Conclusion de la troisieme partie
p. 317
Texte intégral
1Passée l’année 1957, où vraiment personne aux États-Unis ne s’intéressait à l’Unesco, l’Organisation commençait à y connaître un regain de faveur, du moins à Washington. Ainsi, pendant la période 1957-1963, la politique américaine – lorsque politique il y avait – s’y imposait encore. Pouvait-il en être autrement alors que les États-Unis finançaient l’Unesco à hauteur de 30 et 40 %, et même beaucoup plus, pour certains projets ? Mais là n’est pas la seule raison de cet état de fait.
2Le regain de faveur arriva, parce qu’aux États-Unis la diplomatie culturelle constituait un nouveau terrain d’exercice pour faire pièce à la propagande et aux succès soviétiques, tels que le lancement du premier Spoutnik dans l’espace (1957). Dans un premier temps, cette politique se manifesta par une meilleure information sur les États-Unis à l’étranger. Mais le Département d’État prit rapidement conscience que cette tactique faisait appel aux mêmes techniques que la propagande soviétique et qu’il valait mieux mettre l’accent sur la culture. Faire connaître à l’étranger la culture américaine, le Directeur de l’USIA, George Allen, l’un des « unesquiens » des États-Unis, n’était pas étranger à cette nouvelle orientation.
3Puis, en 1960, la guerre du Congo faisait comprendre au Président Eisenhower que la guerre froide s’était déplacée vers l’Afrique. Il devenait important pour Washington que l’Unesco, considéré comme l’un des atouts dans la défense du monde libre, développât ses projets d’éducation en Afrique. Kennedy savait mettre en pratique les intuitions de son prédécesseur. Pour l’Unesco, le projet passait par la voie de la Décennie pour le développement, mise en oeuvre par les organisations du système des Nations unies, dans tout le monde en voie de développement. A noter que ce n’est pas tant le changement de régime présidentiel qui rapprocha de nouveau les États-Unis et l’Unesco, que la conjoncture internationale, ainsi qu’une confortable majorité démocrate au Congrès qui permettait de débloquer des fonds, destinés à l’étranger, à des fins autres qu’économiques ou militaires.
4Mais, une fois cette nouvelle politique américaine mise en place, elle semble se figer. Même William Benton, revenu au début de 1963 en tant que membre américain du Conseil exécutif de l’Unesco, ne pouvait y mettre en marche un politique plus imaginative. Un fossé commençait à se creuser entre la politique américaine auprès de l’Organisation et les bouleversements qui se préparaient, aussi bien à l’intérieur du pays que dans son engagement sur la scène internationale. Car, la mort dramatique de Kennedy, le mécontentement de plus en plus violent des Noirs et l’enlisement dans la guerre du Vietnam mettaient fin à l’image d’invincibilité, que les Américains avaient d’eux-mêmes. Ainsi, si la période 1957-1963, en ce qui concerne les rapports entre les États-Unis et l’Unesco, témoigne-t-elle, d’une part d’un regain d’intérêt, d’autre part, elle marque la fin d’une ère.
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