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Chapitre 10. Les enjeux électoraux

p. 343-380


Texte intégral

Introduction

1L’arrivée de Francisco I. Madero à la Présidence de la République, à la fin de l’année 1911, érige la devise Sufragio efectivo. No reelección en programme de gouvernement national. L’ « apôtre de la démocratie » incarne cet idéal qui, dans sa pratique, se trouve immédiatement confronté à de puissants facteurs sociaux et politiques, dont les revendications de différents mouvements sociaux et militaires (notamment orozquistas et zapatistas) et la permanence dans le gouvernement de nombreux éléments porfiriens, ne sont pas les moindres1.

2Sur le terrain favorable à l’innovation politique que constitue cet espace public libéré de ses contraintes porfiriennes, et où de nouvelles formes de contrôle n’ont pas encore été mises en place, prend forme un véritable laboratoire démocratique. Laboratoire dans le sens où les différentes forces politiques, y com le nouveau gouvernement (aussi bien celles rescapées de la dictature que de nouvelles forces nées au moment de son déclin, voire de sa chute), s’y essaient, s’y mesurent et créent, dans l’action même, de nouvelles formes d’in dans un espace dont le mode d’emploi implicite jusqu’alors en vigueur a perdu de son sens. Laboratoire enfin, en ce qu’une issue démocratique, objec d’une partie des acteurs, mais nullement de l’ensemble, n’est pas garantie d’avance.

3Le Jalisco est un terrain exceptionnellement propice à la constitution de ce laboratoire. Non pas qu’il soit le seul état où cela a été possible, car dans la République entière, à différentes échelles, y compris à l’échelle nationale, le phénomène est observable à des degrés divers ; mais, en raison précisément de sa marginalité par rapport aux mouvements armés qui secouent intensément à l’époque d’autres régions du Mexique, ainsi que de la faiblesse du gouverne de l’état (que la reprise de l’autoritarisme cache mal), le Jalisco réunit des conditions exceptionnelles qui permettent l’expérimentation du jeu démo. Il est évident qu’à ce jeu participent des acteurs démocratisants et non démocratisants, et que de leur interaction, soumise à l’influence de facteurs externes au seul état, naissent les spécificités de ce laboratoire, dont ils sont les réactifs.

1. Entre démocratie et autoritarisme

1.1. La convocation des élections et ses enjeux

4Le 11 novembre 1911, Alberto Robles Gil, gouverneur provisoire du Jalisco depuis le 1er août, déclare publiquement être enfin décidé à convoquer des élec pour janvier 19122. Il s’agit en principe du renouvellement des Pouvoirs Exécutif et Législatif de l’état, ce dernier ayant été dissout au mois de juin, tandis que le premier était pourvu provisoirement par les Pouvoirs de la Fédé, en absence d’un Congrès de l’état. Le gouverneur ne tiendra que la moi de sa promesse : la convocation des législatives aura lieu, les élections d’un nouveau gouverneur seront à nouveau ajournées indéfiniment. Néanmoins, indépendamment de leur degré de véracité, ces déclarations insufflent de l’énergie à un processus qui est, dans l’histoire de l’état, la caractéristique la plus saillante de la période madériste. Il s’agit d’une ouverture démocratique — que l’on peut constater pour l’ensemble du pays3— opérée ici, en partie, par des acteurs politiques étrangers à l’exercice du pouvoir et que l’état accepta à contrecœur.

5Cette ouverture s’était déjà esquissée pendant la brève gestion de Gutiérrez Allende4, mais l’arrivée de Robles Gil au pouvoir, propulsé depuis Mexico, avait mis fin à une atmosphère de liberté politique développée en partie à l’ombre de la faiblesse de l’Exécutif. En effet, Robles Gil avait repris plusieurs principes de la façon porfirienne de gouverner, notamment celui de la concen du pouvoir, sans s’embarrasser cependant d’autant de formes que les hommes de Díaz pour simuler un respect des libertés et la validité des insti républicaines5. Ainsi, là où des gouverneurs porfiriens (à l’instar de Díaz lui-même) avaient eu des législateurs dociles, prompts à légitimer par leur seule existence les actes du gouvernement, Robles Gil préféra ne pas s’embarrasser de Congrès, gouverner en solitaire, accompagné formellement par la seule Suprema Corte de Justicia del Estado — Pouvoir Judiciaire —, organe à la force bien réduite et symbolique.

6Ainsi, alors que sa fonction principale en tant que gouverneur provisoire était de faire retourner l’état dans l’ordre constitutionnel, en organisant les élections législatives et du gouverneur, il avait repoussé constamment ce moment, alléguant d’abord qu’il fallait attendre la réalisation des élections présidentielles6 et ensuite, soit qu’il fallait d’abord pacifier l’état, soit qu’on ne pouvait réaliser ces élections tant que des élections municipales n’auraient eu lieu. Le gouverneur eut souvent recours à cette argumentation, depuis les premières fois où il fut interrogé directement sur le sujet jusqu’au milieu de l’année 1912, lorsqu’il essayait encore d’ajourner le renouvellement de l’Exécutif.

7Cependant, même si, comme le constate Mario Aldana, l’agitation dans la campagne du Jalisco a été constante à partir de la fin 19107, il est vrai que les perturbations de l’ordre que connaissait l’état vers la fin 1911 n’étaient pas de nature à inquiéter la capitale ni à perturber une transmission de pouvoir.

8En dépit de la volonté de Robles Gil et de la concentration de pouvoir qu’il recherchait, un retour pur et simple aux formes de l’autoritarisme porfirien n’est plus réalisable. En effet, cette affaire de la convocation des élections permet de constater la persistance d’un espace ouvert pour l’opinion, en particulier pour l’expression de l’opposition, qui témoigne à sa manière des limites matérielles et pratiques d’un autoritarisme ainsi contraint de s’adapter. En effet, les réactions de la presse ne se font pas attendre, celle de La Libertad la première, en septembre, invitant Robles Gil à s’expliquer8.

9Les antiréélectionnistes ont été parmi les premiers ennemis déclarés de Robles Gil, et n’ont eu de cesse de promouvoir les critiques du gouverneur dans la presse régionale et nationale, ainsi que d’essayer de s’assurer le soutien du gouvernement de Madero contre Robles Gil. Ce dernier avait, quant à lui, ses principaux soutiens au Sénat, encore contrôlé à l’époque par d’anciens porfiristes.

10Dans cette ambiance et afin de mieux asseoir son pouvoir, Robles Gil n’hésita pas à se servir de la répression systématique contre ses critiques et opposants les plus acharnés : les emprisonnements politiques, la persécution et fermeture de journaux sont redevenus monnaie courante, montrant qu’il était possible de reprendre et même d’endurcir les pratiques en vogue au Jalisco vers la fin du porfiriat. Tout comme dans les derniers mois du gouvernement Ahumada, la principale cible de la répression fut celle des antiréélectionnistes et la presse qui leur était proche. Très rapidement, il apparut de façon claire que Robles Gil se consacrait à bâtir un pouvoir personnel qu’il ne comptait pas quitter de si tôt. L’homme qui était censé pourvoir au rétablissement de l’ordre constitutionnel fut celui qui s’y opposa le plus fortement.

11Toutefois, le gouverneur déclencha, par cette affirmation d’autoritarisme, une série de réactions, tendant toutes à exiger le rétablissement de l’ordre constitutionnel par la convocation d’élections.

12En plus des attaques de la presse, certains décident de faire appel au président provisoire de la République afin d’obtenir la convocation des élections, voire le retrait immédiat de Robles Gil de sa charge9.

13Le Comité Ejecutivo Electoral de la fórmula « Madero-Vázquez Gómez-Gutiérrez Allende »10, diffuse quant à lui un document daté du 23 septembre — dont l’auteur est l’avocat José Gutiérrez Hermosillo —, rappelant que la fonction d’un gouverneur à caractère provisoire est de se limiter à la convocation prompte d’élections et incitant par conséquent Robles Gil à le faire sans tarder11.

14Ainsi, Robles Gil est rapidement devenu l’ennemi commun face auquel se rassemblent plusieurs tendances politiques, qui gardent toutes l’espoir de conserver en l’état, sinon d’élargir, cette voie démocratique qui s’était entrouverte à la chute de Díaz.

15Les critiques se radicalisent avec les nouvelles échéances électorales ; ainsi, après les élections présidentielles du mois d’octobre qui portent Madero et Pino Suárez au pouvoir, notamment dans les pages de La Libertad12.

16Ainsi lorsque, vers la fin du mois d’octobre, les représentants de plusieurs clubs politiques font circuler dans Guadalajara une pétition adressée au président de la République (toujours de la Barra) contre Robles Gil, la presse commentait :

« L’accusation, pour être plus logique, devrait commencer par Monsieur de la Barra, auteur principal et complice de Monsieur Robles Gil13 »

17De la Barra ayant soutenu Robles Gil pour l’accession au poste, le pouvoir central restait toujours « coupable ».

18Le gouverneur s’étant transformé en ennemi commun fortement mobilisateur, malgré la réduction des libertés, le fourmillement ne s’arrêta pas, comme le montre la multiplication de nouvelles sociabilités pendant tous les mois de gestion de Robles Gil14.

1.2. Rumeurs, candidatures, forces politiques

19Le développement des critiques dans la presse n’est qu’une manifestation mieux conservée que d’autres d’une mobilisation assez large autour de la question du renouvellement des Pouvoirs Exécutif et Législatif. La dispute pour le Pouvoir Exécutif prit, entre autres, la forme d’une campagne électorale extrêmement prolongée15, entamée bien avant la convocation officielle des élections.

20Autour de ces campagnes se produit une mobilisation politique intense qui touche l’ensemble de l’état, et une intensification des échanges entre individus, groupes et localités, puisque certains candidats se déplacent (Gutiérrez Allende, Salvador Gómez, Ambrosio Ulloa, Rodolfo Reyes), et que certains partis ou clubs envoient des propagandistes, sinon faire le tour de l’état, du moins parcourir des régions où ils ont des contacts (c’est ce que font le PCN de même que les partisans de López Portillo). Le déplacement des candidats avait été mis à la mode par Manuel Cuesta Gallardo à un moment où, en plein déclin du porfiriat, on commençait à avoir recours à de nouvelles pratiques politiques16. La grande nouveauté des années 1911-12, c’est que nous trouvons simultanément plusieurs candidats sur le terrain.

21Cependant, vers la fin 1911, les candidats n’ont plus la même force que lors de l’arrivée de Robles Gil au pouvoir, et ne sont plus tout à fait les mêmes, à bien des égards.

22Un des faits les plus remarquables est l’élimination de la candidature de Roque Estrada. Cette élimination est le fait d’une série de facteurs qui combinent la peur de la radicalité relative qu’Estrada représentait et son exercice trop ostentatoire d’un pouvoir qu’il détenait de manière para-institutionnelle, et qui finit par l’opposer à ceux-là mêmes qui l’avaient soutenu, notamment aux anti-réélectionnistes de la première heure, qui finissent par demander à Madero le retrait d’Estrada du territoire du Jalisco17. La candidature de Rodolfo Reyes a également disparu18, mais on trouve en revanche Ireneo Paz19 ; les noms de Salvador Gómez, Ambrosio Ulloa, David Gutiérrez Allende et José Lopez Portillo y Rojas, sont quant à eux toujours là. Les plus forts d’entre eux donnent leur nom à des groupes politiques importants que l’on retrouve tout au long de cette conjoncture : gomistas, portillistas, allendistas. Toutefois, leurs candidatures ont elles aussi évolué, et il convient de voir dans quel sens.

23La figure de Salvador Gómez, après l’élimination d’Estrada, se voit de plus en plus démonisée, devenant le symbole de tous les radicalismes révolutionnaires. Gómez, « officier de l’armée libératrice », madériste de la première heure et le seul parmi ces candidats à avoir participé à la lutte armée, reste l’unique représentant des positions et propositions de réforme sociale les plus radicales. Il est soutenu par le parti Antiréélectionniste et par des groupes de paysans et d’ouvriers, et souvent taxé de « socialiste », l’accusation la plus disqualificatrice que les élites politiques « comme il faut », de toutes tendances, pouvaient formuler à l’époque.

24D’autre part, la candidature de David Gutiérrez Allende semble avoir perdu de sa force, tout comme son principal soutien, le parti Independiente, mais reste l’une des rares à représenter une large possibilité de consensus tout au long de la période.

25L’ingénieur Ambrosio Ulloa, un des principaux animateurs du reyisme au Jalisco en 1909, ne compte qu’avec peu de soutien et est attaqué par ses anciens co-équipiers, aux yeux desquels il apparaît comme un opportuniste en quête de pouvoir20. Le parti qu’il fonde, à des fins purement électorales, l’Efectivista, n’a que très peu de succès.

26De la candidature de López Portillo y Rojas, pendant plusieurs mois, il ne fut plus question, jusqu’à ce que, précisément, les déclarations de Robles Gil la réveillent. C’est, comme celle de Gutiérrez Allende, une candidature avec des larges possibilités de consensus, très bien vue surtout des élites. López Portillo recueille sans doute le fruit de ses années reyistes21, mais surtout de l’acharnement dont il fut l’objet de la part de Porfirio Díaz22.

27Dans cet ensemble de candidats, Gutiérrez Allende et surtout Gómez (en tant qu’ancien madériste) semblent compter avec le soutien de Madero, ce qui leur est souvent reproché, et qui a été lu par certains comme une nouvelle tentative d’intervention du centre dans les affaires du Jalisco23.

28On ne saurait enfin oublier une autre candidature, même si elle resta longtemps en suspens, celle de Robles Gil lui-même. En effet, pour certains cercles libéraux, Robles Gil était un candidat viable avant même d’être gouverneur provisoire ; ainsi, dans le « concours électoral » organisé par La Gaceta de Guadalajara, son nom apparaît dès le 25 juin 1911, en troisième position sur une liste de quinze candidats24. Pendant longtemps, cependant, aucun club ni parti n’a lancé sa candidature. Elle s’est vue réduite à des rumeurs, les plus fortes étant celles qui en faisaient le candidat de l’Unión Democrática Jalisciense (UDJ) en novembre 1911. Ce n’est finalement qu’en février 1912 que le parti Liberal Jalisciense lance ouvertement la candidature du gouverneur provisoire25. Il n’en reste pas moins qu’à partir du moment où Robles Gil accède au pouvoir, le poids de ces rumeurs devient important : elles confirment d’une part les soupçons que le gouverneur n’est pas pressé de quitter son poste et, d’autre part, font planer le doute sur la limpidité du processus électoral. Les rumeurs s’accompagnent d’une préparation du terrain dans la presse proche du gouverneur et de la structuration d’un groupe politique qui n’affiche ouvertement aucune candidature.

29Ainsi, après la convocation effective des élections, un éditorial de La Gaceta de Guadalajara décrit le panorama électoral du Jalisco, essayant de poser, en premier lieu, le constat d’un vide :

« [...] il n’y a pas de candidat, parmi ceux qui se proposent, qui puisse remplir les aspirations du peuple ; il n’y a pas de candidat capable, de par ses qualités ou son prestige, d’entraîner derrière lui l’opinion ; ou de réunir à ses côtés celle d’une majorité suffisamment significative pour pouvoir, demain, bien gouverner l’état26. »

30Le constat d’absence d’un candidat, alors même que la liste des aspirants est plutôt longue, va donc forcément de pair avec la disqualification de ces derniers.

31Ce n’est pas un hasard si les seules candidatures que le journal estime viables sont celles de deux hommes à leur façon profondément porfiriens, José López Portillo y Rojas et Rodolfo Reyes, deux candidatures que, par ailleurs, La Gaceta tenait pour disparues. Elle ne se trompait pas pour Reyes qui, partant inopinément pour La Havane afin de rejoindre son père, avait laissé, à peine quelques jours auparavant, ses partisans en « liberté » de soutenir un autre candidat et ne reviendrait plus27. Elle jugeait mal, en revanche — mais peut-être délibérément —, la solidité de la candidature de López Portillo y Rojas, dont certains commentaient déjà la force et l’arrivée imminente. C’est le cas de El Correo de Jalisco, lequel estime qu’à l’idée même que López Portillo fait déjà ses bagages afin de s’installer à Guadalajara, « on considère vaincues les autres candidatures actives »28. La Gaceta elle-même se démentit quelques jours plus tard : « M. López Portillo, que l’on croyait dans l’ostracisme, annonce qu’il viendra soutenir sa candidature [...] »29.

32Implicitement, le remède ne pouvait être que de trouver encore un candidat, doté de la capacité de gouverner. Ces considérations de La Gaceta, cherchant à démontrer le besoin d’une candidature nouvelle, d’une personnalité forte, ont été lues comme une incitation voilée à lancer la candidature de Robles Gil. Cet éditorial prépare le terrain à l’apparition d’une nouvelle organisation politique.

33En effet, le 17 novembre, les lecteurs du Correo de Jalisco sont mis au courant de la constitution d’un nouveau groupe, présenté comme une « Junte Provisoire », formée de 85 personnes se préparant à participer à la lutte électorale. Leurs arguments rappellent fortement ceux de La Gaceta : il leur semble, en premier lieu, qu’aucune des candidatures au gouvernement de l’état que présentent les clubs politiques « n’a prospéré au point de dominer l’opinion publique »30.

34La nouvelle organisation prend le nom de Unión Democrática Jalisciense et, à partir de sa constitution, la rumeur d’une éventuelle candidature de Robles Gil au poste de gouverneur constitutionnel se fait de plus en plus pressante.

35Les dirigeants de l’UDJ sont des membres de l’élite économique et politique porfirienne, en majorité des proches des anciens gouverneurs Manuel Cuesta Gallardo, Miguel Ahumada ou bien même de Luis del Carmen Curiel.

36La structuration de cette élite porfirienne en un groupe politique, le ton du discours des journaux officieux31, font supposer qu’effectivement l’UDJ était née sinon pour promouvoir la candidature de Robles Gil, du moins pour chercher à assurer la prolongation de cette tentative de retour à l’ordre porfirien qu’il représentait.

37Par ailleurs, le fait que cette organisation soit née sans une candidature déjà définie ne doit pas étonner — au-delà de la discrétion qu’effectivement un éventuel lancement de Robles Gil imposait. En effet, malgré l’existence de multiples candidatures, toutes les forces n’en avaient pas encore adopté une. C’est le cas notamment du PCN, dont le soutien est l’objet de rumeurs de la presse et surtout des convoitises de la part des candidats. La rumeur la plus répandue fait de López Portillo y Rojas le candidat du PCN32, mais David Gutiérrez Allende n’en reste pas moins un candidat probable. Des rumeurs se font aussi sur le candidat de l’Independiente, dont on dit qu’il pourrait être Gutiérrez Allende, López Portillo ou même Salvador Gómez33.

38Même une fois que l’Independiente s’est décidé pour Gutiérrez Allende, une tentative de joindre à sa candidature les votes des électeurs du PCN (l’élection est encore, à ce moment-là, indirecte) exprime bien l’importance que l’on accordait au potentiel électoral de ce dernier, et souligne aussi le fait que les deux organisations visaient du moins en partie une même clientèle électorale. Ainsi, un imprimé signé par « plusieurs membres du parti Independiente » incitait les délégués du PCN à s’entretenir avec le candidat Gutiérrez Allende avant d’émettre leur vote34. Il est certain que ces libéraux modérés étaient parfaitement conscients du potentiel électoral du PCN, ainsi, l’Independiente faisait appel à une argumentation d’ordre religieux pour s’attirer l’électorat du PCN :

« Les misérables veulent vous tromper. Catholiques alerte ! Votre union avec les caciques et les científicos serait sacrilège35 ! »

39Les arguments pour essayer de soustraire des sympathies au PCN changent selon les tendances. Si dans certains cas, comme le précédent, on essaie de toucher aux mêmes fibres que la propagande catholique, on mise dans d’autres cas sur la dénigration du vote PCN. En effet, la force représentée par l’électorat potentiel du PCN suscite non seulement des envies, mais également des critiques qui peuvent être aussi acerbes que viscérales, comme celle-ci, qui cherche à propager l’image des électeurs du PCN comme des êtres manipulés, dont le choix politique est dépourvu, en dernière instance, de rationalité :

« Ils auront du travail, ces messieurs du Parti, avec tous ces candidats à leur porte, et dans les villages on attend anxieusement l’ordre pour se lancer à la lutte. Ils n’ont pas besoin de savoir qui est l’élu. Une fois que M. le Curé l’ordonnera, les porteurs de la bonne nouvelle se répandront par monts et par vaux pour travailler les yeux fermés36. »

40Tout cela fait partie d’une dispute du pouvoir où l’on accorde au vote citoyen une valeur dont pendant tout le porfiriat il avait été dépourvu.

1.3. Propagande et création d’images

41L’un des aspects les plus intéressants de tout ce processus est la définition que chaque groupe a donnée de lui-même, par rapport aux autres, et surtout la manière dont il a contribué à une définition collective des autres.

42La presse et quelques documents imprimés sont restés des lieux privilégiés de cette construction qui ont sans doute entretenu une relation complexe avec la dimension orale de la création et du développement d’une image de chaque tendance. Quelques générations plus tard, dans le langage parlé du Jalisco, il est toujours possible de retrouver des traces de cet imaginaire alimenté dans les années 1911-12, qui reprenait déjà des éléments d’un discours datant du xixe siècle. Ainsi, la polarisation de libéraux et catholiques, l’identification systématique catholique-conservateur, libéral-anticlérical sans religion, ou bien la peur inspirée par les socialistes.

43Dans les définitions que les différents groupes politiques donnent d’eux-mêmes, on sent de manières diverses l’influence de la conjoncture de guerre civile que vit le pays. Ainsi, le PCN se définit par rapport à l’exigence de paix (ou disons plutôt la crainte du désordre), non seulement en tant que « parti de l’ordre », mais en tant que seul parti susceptible de garantir l’ordre. Pour les élections du 6 octobre 1912, en incitant à voter pour José López Portillo y Rojas, la feuille de propagande du PCN signale : « sa candidature est soutenue par le seul parti de l’ordre »37.

44Le parti Independiente, qui soutient la candidature de David Gutiérrez Allende, se définit lui aussi en tant que parti de l’ordre et de la paix :

. L’allendismo c’est la paix, c’est l’ordre. Nous qui en faisons partie, nous sommes le peuple honnête [...]38. »

45Le PI. se définit aussi en reprenant un élément qui avait été important lors de la campagne reyiste en 1909 : il se pose comme le représentant des classes moyennes (identifiées au peuple honnête) et par conséquent, définit ses adversaires comme « les ennemis éternels de la classe moyenne »39.

46Finalement, les partisans de Salvador Gómez (gomistas) se définissent par leur identification aux principes du mouvement madériste, par leur proximité non seulement des classes populaires, mais de toutes celles n’étant pas liées au pouvoir économique et politique. Ainsi, dans leur manifeste, un appel est fait aux électeurs appartenant à « toute classe sociale autre que la [classe] privilégiée »40, à voter pour une liste qui se définit dans les termes suivants :

« Notre candidature est, en un mot, la plus démocratique, la plus sincèrement fidèle aux principes de la dernière Révolution et à la cause populaire, c’est celle qui est composée par des personnes de toutes les classes et toutes les professions et qui ont la connaissance la plus parfaite et immédiate des nécessités publiques. Elle est aussi celle qui promet de réaliser le plus grand nombre de réformes tendant à soulager la misérable et douloureuse condition du prolétariat41. »

47La définition de soi devient souvent une définition par la négative, dans la mesure où elle passe par une prise de position par rapport à l’autre ; c’est ainsi que, dans leur définition, les gomistas sont amenés à prendre leurs distances par rapport au « jacobinisme » :

« La véritable nature de notre Parti [...] tend à la liberté dans le sens large et véritable du mot, sans envie de jacobinisme ni de persécution d’aucun credo religieux ; [...]. Nous ne sommes pas antireligieux [...]42. »

48Cependant, pour l’essentiel, dans le Jalisco des années 1911-12, la propagande politique passe par la création d’une image de l’autre. Les arguments pour attirer l’électeur à soi sont souvent ceux qui cherchent à l’éloigner du concurrent ; lutter pour la répulsion de l’autre est un des éléments centraux dans les discours de propagande politique les plus structurés :

« Si vous êtes de l’avis que la fin exclusive de l’état dans n’importe laquelle de ses manifestations est de veiller au bien commun de la société, au lieu de se consacrer à la persécution religieuse et à la propagande sectaire [...]43. »

49On trouve encore :

« Vous sympathisez avec la candidature de M. David Gutiérrez Allende ? [...] remarquez que la personne de l’honnête jurisconsulte est une chose, mais que l’al-lendismo, qui est devenu sectaire et jacobin, en est une autre. Pour cette raison, Vous en tant que catholique, vous ne suivriez pas les préceptes de la morale en votant pour une candidature jacobine formée par l’allendismo44. »

50Ce qui transparaît derrière ce genre de propagande, c’est aussi le fait que, pendant tout un temps, notamment en décembre 1911 et encore début janvier 1912, toutes sortes d’alliances paraissent possibles au sein de l’élite. Ainsi, pendant le mois de décembre, Gutiérrez Allende cherche à s’attirer l’électorat du PCN45 ; la tentation est à tel point réelle, que le PCN se sent obligé de répondre pour prévenir un éventuel glissement de ses électeurs potentiels vers le candidat du PI, avec le genre de discours cité ci-dessus, par une assimilation de l’allendismo au jacobinisme46.

51Si nous retrouvons ce type de discours dans toutes sortes d’imprimés, il semble bien qu’il ait été aussi au cœur de la propagande faite oralement. Ainsi, par exemple, le curé de Tonalá, Manuel M. Gonzalez, racontait l’attitude de quelques gomistas lors de leur visite du village :

« Des propagandistes gomistas, qui ont très mal parlé des riches et du parti catholique, sont venus ici lundi [...] on a crié “A mort les catholiques” et “A mort le Parti Catholique” et on a commencé à nous appeler "les masqués".47 »

52En contrepartie, El Correo de Jalisco dénonçait comment, suite à l’initiative du curé de la comisarίa del Refugio, 30 à 40 individus s’étaient livrés au désordre, sans que nul ne tente de les arrêter. Selon le journal, suite à une réunion chez le curé, ces hommes étaient sortis dans la rue, et avaient crié « à mort Juárez, le parti libéral et tous les libéraux du village »48.

1.4. Ouverture démocratique et alliances politiques

53Lorsqu’enfin les élections des députés ont lieu, en janvier 1912, il s’agit d’un premier pas vers le retour à l’ordre constitutionnel. Cette victoire relative des forces politiques indépendantes de l’état, face au gouverneur, n’en est pas moins une façon pour Robles Gil de légitimer son pouvoir, car le Congrès s’empresse de lui donner le statut de gouverneur intérimaire49. Ce retour à la légalité n’a donc lieu qu’au prix d’une alliance ; en effet, la réouverture du Congrès témoigne d’une alliance de Robles Gil avec le PCN. Si Robles Gil ne cherche pas un soutien direct du PCN à sa personne, tout semble indiquer que c’est grâce aux négociations entre ce parti et le gouverneur que les élections pour députés ont enfin été convoquées.

54La réouverture du Congrès de l’état marque un répit dans les attaques dont Robles Gil était l’objet. Ces attaques ne reprendront cependant que de plus belle, car l’élection de nouveaux députés ne fait pas disparaître la demande d’une convocation à d’autres élections : celles pour gouverneur, que Robles Gil avait initialement promis, mais dont la réalisation avait été à nouveau ajournée.

55Tout aussi importante que le retour à l’ordre constitutionnel représenté par la formation d’un nouveau Congrès, est la mise en place d’un panorama politique nouveau, caractérisé par l’existence d’un Pouvoir Législatif, en sa majorité opposé à l’Exécutif, qui cherche à affirmer son indépendance par rapport à celui-ci, et par une politisation intense de la société civile qui multiplie ses moyens de participation politique. Il s’agit de la mise en œuvre d’un véritable laboratoire démocratique, qui permet la consolidation de forces politiques alternatives et qui ne va pas sans provoquer, parallèlement et en réaction, de nouvelles pratiques politiques destinées à éviter l’alternance50.

56D’un point de vue politique, le phénomène le plus marquant de l’année 1912 est la continuation d’un processus d’élargissement de la sphère politique, indépendant de la volonté de l’état, par l’incorporation d’acteurs d’horizons de plus en plus divers.

57Ce processus, commencé dans les derniers jours du porfiriat, avait été encouragé autant par la victoire madériste que par le renouvellement des enjeux politiques qui s’en suivit. En effet, à la fin de l’année 1911, le renouvellement des Pouvoirs politiques était devenu un véritable enjeu ouvert, sinon à l’ensemble de la population, du moins aux nouveaux réseaux de sociabilité. Non seulement pour la première fois depuis plusieurs décennies, le pays a connu une élection présidentielle (octobre 1911) contenant un enjeu politique réel, mais depuis la signature de la paix à Ciudad Juárez (mai 1911), il est plongé dans une frénésie de renouvellement des autorités politiques qui pose notamment, comme on l’a vu, la question de la démocratie municipale51. De plus, un pas essentiel vers la modernisation des pratiques politiques est fait lorsque le suffrage devient direct pour la première fois (pour les élections législatives fédérales de septembre 1912).

58Cette ouverture est, à double titre, le fruit de la révolution madériste : d’une part parce qu’elle faisait partie de ses objectifs et qu’elle a soulevé en ce sens d’innombrables espoirs, d’autre part et surtout, à cause de la faiblesse de l’état national qui en résulte et des sérieux conflits qui ont empêché Madero de consolider son pouvoir52. L’affaire de la candidature imposée de Pino Suárez à la Vice-présidence de la République, qui barrait la route aux frères Vâzquez Gômez, prouve que 1’ « apôtre de la démocratie » a été pris — quels qu’aient été ses principes et ses idéaux — dans le jeu de la politique non démocratique53. Ce qui est clair, cependant, c’est qu’entre l’écroulement de l’état porfirien et les difficultés de construction d’un appareil madériste de contrôle, des espaces importants sont restés hors de la portée de l’état, et qu’un élan citoyen s’est dégagé (libéré symboliquement par le triomphe du madérisme), permettant le développement d’un certain jeu démocratique.

59Au Jalisco, plusieurs éléments témoignent de cette ouverture : en premier lieu, le fait qu’une série de forces politiques de création récente s’affichent en toute liberté et développent des pratiques politiques non utilisées auparavant, tendant à faire de la politique une affaire publique et non plus à huis clos54. Ainsi, par exemple, règlent-ils leurs disputes en public et non pas en privé. C’est le cas, notamment, du parti Independiente, qui exprime ouvertement ses conflits avec son ancien dirigeant, Ambrosio Ulloa, fondateur du parti Efecti-vista55. Ce n’est en réalité que la prolongation d’une pratique initiée par le P.I. depuis son époque reyiste (on se souviendra du conflit de ce parti avec le Club Jalisciense del Partido Democrático et Tomás Rosales, qui finit par être rendu public56), et la confirmation de son élargissement à d’autres groupes. Cette pratique avait aussi été largement utilisée lors du conflit entre Roque Estrada et les antiréélectionnistes57.

60L’utilisation de la presse, notamment, en tant qu’espace où se règlent des disputes entre groupes ou entre individus, n’est pas en soi chose nouvelle : pendant les dernières années du porfiriat, le règlement d’affaires par voie publique est fréquent, mais il s’agit pour l’essentiel d’affaires privées. Par ailleurs, lorsque des affaires publiques problématiques étaient abordées dans la presse, c’était souvent lorsque le problème avait disparu58. La presse indépendante la plus osée — comme La Libertad — se risquait à critiquer les politiques nationales, mais difficilement celle du gouvernement de l’état59 Or, à partir de la chute de Díaz, il s’agit d’affaires considérées d’intérêt public et surtout de questions concernant l’exercice du pouvoir.

61Un deuxième élément témoigne de l’ouverture opérée dans l’espace politique : c’est l’apparition franche, sur la scène, de certaines forces dont la participation avait été auparavant censurée ou reléguée à d’autres sphères. C’est en particulier le cas du Parti Catholique National60.

62Il faut toutefois préciser que, de ce point de vue, l’ouverture n’est que partielle : un seuil de « censure » persiste que certaines forces ne parviendront pas à franchir, à savoir le respect du statu quo social. C’est ainsi que les organisations anarchistes et socialistes, du fait de leur programme, suscitent des réactions de peur et ont à subir des persécutions. D’ailleurs, toute tentative de changement radical est immédiatement taxée de « socialiste », et le socialisme devient le fantôme craint par toutes sortes de forces « respectueuses » du statu quo.

63Finalement, la réalisation des élections législatives et leurs résultats sont aussi représentatifs de l’existence d’un espace politique non contrôlé : le 1er mars 1912, la Chambre Législative du Jalisco rouvre ses portes (closes depuis juin 1911) pour accueillir 12 nouveaux députés, tous présentés par le Parti Catholique National. Grande nouveauté qui ne surprend personne à l’époque car, espéré ou craint, le triomphe du PCN était prévu par tous.

64La victoire du PCN constitue toutefois un bouleversement politique hautement significatif : le catholicisme ouvertement politique, fait son entrée en force, non plus seulement cette fois sur le terrain de la conquête du pouvoir, mais sur celui de son exercice. Il s’agit d’un événement de portée nationale qui consacre le Jalisco comme l’état-laboratoire de la politique du PCN et, compte tenu de la tendance des dirigeants régionaux, de la démocratie chrétienne.

2. Querelles et démons ressuscites

2.1. Le PCN : réception au Jalisco d’un nouveau parti

65L’élément d’explication du triomphe électoral du PCN le plus utilisé, est l’absence d’un adversaire unifié, de taille, capable de lui faire face. Cette absence a été interprétée par l’historiographie61 comme un éclatement des autres forces — les forces « libérales » —, qui auraient eu une tendance « naturelle » à l’unification, vu leur fond idéologique commun. Or, il est indispensable de préciser que, d’abord, le fond idéologique commun présupposé est très faible. Un fond de credo libéral à la base ne suffit pas à réunir des anciens porfiristes, partisans du maintien du statu quo, anticléricaux féroces, ces libéraux-conservateurs qui entourent le gouverneur Robles Gil et fondent d’abord l’Union Democrática Jalisciense, puis le parti Liberal, à des démocrates, partisans du maintien de la religion comme une affaire privée, mais non de la persécution et, à la limite, plus enclins à négocier avec un parti confessionnel mais aux idéaux démocratiques qu’avec des libéraux de souche autoritaire, comme ces allendistas, issus en leur majorité du parti Independiente.

66Il paraît tout aussi difficile de réunir, pour le moment, ces mêmes libéraux-conservateurs à ceux qui, issus du mouvement madériste, s’identifient à la révolution et cherchent la justice sociale par le biais notamment de la distribution des terres aux paysans, comme les gomistas.

67Comme on peut le voir, le libéralisme des uns est très différent de celui des autres et il est clair, de surcroît, que le facteur d’anticléricalisme qui serait censé — selon une telle interprétation — les regrouper, n’est pas encore, à cette date, suffisamment développé. En effet, si les libéraux-conservateurs structurent leur discours autour d’une argumentation anticléricale classique, gomistas et allendistas, que l’on peut considérer comme appartenant à une famille idéologique libérale, même s’ils critiquent de plus en plus le PCN, ils n’ont pas pour l’instant développé leur anticléricalisme au point d’en faire l’élément structurant de leur discours. Il faut toutefois préciser que la consolidation du PCN, amènera une radicalisation de l’anticléricalisme au sein de ces deux forces.

68Pour l’instant, notamment avant janvier 1912, le « danger » représenté par une laïcité mise en péril, est perçu par une large partie de ces acteurs « libéraux » comme ayant une importance moindre que celle du danger représenté par le retour à la dictature (leurs efforts pour s’unir contre l’une ne sont pas comparables à ceux pour s’unir contre l’autre). L’éventail de forces libérales ne peut, en tout état de cause, être considéré comme un bloc. L’acteur « les libéraux » n’existe pas, il n’y a pas un bloc de « forces libérales et révolutionnaires » s’opposant aux forces catholiques-conservatrices. Il faudrait commencer par se demander où les acteurs de l’époque placent le conservatisme, et ce qu’il faut donc entendre par le terme « conservatisme ». C’est sans doute dans des organisations comme l’UDJ ou le PL, regroupant l’ancienne élite politique porfirienne, que se trouve le plus de conservatisme.

69En 1911-1912, l’assimilation sans nuances du PCN au conservatisme est, pour l’essentiel, la lecture des libéraux-conservateurs alors que, aux yeux d’autres forces politiques, le PCN est un parti qui utilise à mauvais escient la religion pour en tirer un avantage politique. En ce sens, une interprétation historiogra-phique qui cherche coûte que coûte ce bloc libéral-progressiste pour la période 1911-1912, ne fait que reprendre les termes de cette lecture-là. Il est indispensable alors de s’interroger sur les éléments qui, dans le temps, ont donné naissance à cette interprétation.

70Le triomphe écrasant du PCN aux élections législatives de janvier 1912 intensifie une série de réactions, qui s’étaient manifestées dès l’apparition de cette force politique ouvertement confessionnelle.

71En effet, la création du PCN avait été perçue de trois manières différentes :

721) comme la renaissance du « parti conservateur » du xixe siècle62, promoteur de l’intervention française :

« Les factions libérales essaient de suggérer dans les masses des sentiments de haine et d’aversion envers les catholiques, ce pourquoi ils attribuent au défunt parti conservateur les crimes et les récits les plus condamnables et honteux, et chargent les catholiques de toutes ces abominations63

732) Comme la récupération de droits ôtés aux catholiques par le libéralisme intransigeant.

743) Comme la résurrection inopportune d’une problématique surmontée par le régime porfirien et en ce sens comme une régression.

75Dans deux de ces interprétations, on retrouve la notion d’un retour à des temps révolus dont personne ne veut plus. La première d’entre elles prolonge le vieux discours libéral — jamais totalement disparu — reposant sur l’opposition catholicisme = conservatisme vs. libéralisme = progrès64. Discours qui fait partie du vieux débat libéraux-conservateurs qui s’est prolongé tout au long du porfïriat, et qui, en passant notamment par le biais de l’éducation, a évité la confrontation directe entre les libéraux au pouvoir et ceux que leur triomphe avait évincé des affaires publiques. Cette lecture est le fait des libéraux-conservateurs porfiriens, et les principaux tenants de ce genre de discours se manifestent dans les pages de l’officieux Correo de Jalisco :

« C’est pour cela que la foi est bonne. Croire sans objecter, c’est le salut de ce Parti. La masse s’y lance tel un coup de mitraille65. »

76L’expression la plus achevée de cette lecture nous est fournie par un manifeste du parti Libéral « au peuple du Jalisco », dans lequel on retrouve l’assimilation explicite du PCN aux conservateurs du xixe siècle, assimilation qui va de pair avec celle des concepts de conservateur et de clérical, et dans lequel on peut lire des expressions telles que :

« Miguel Palomar y Vizcarra, émissaire du Parti Catholique, conservateur ou clérical, tout ça c’est la même chose66 » ;

77ou encore :

« Souviens-toi, peuple du Jalisco, que ces hommes sont les mêmes qui portent dans leurs veines le sang des assassins de Tacubaya et, dans leurs cerveaux, pétrifiée, immuable, l’idée de la trahison. N’oublies pas que, s’ils ont prétendu assassiner la Patrie avec les baïonnettes françaises, la crucifiant afin de glorifier un Archiduc autrichien, dont ils ont supposé qu’il serait favorable à leurs ambitions, ils te cracheront à la face en déchirant ta souveraineté, s’ils parviennent à leurs fins67. »

78Face au triomphe du PCN et en accord avec cette lecture, les vieilles forces libérales porfiriennes se sentent invitées à se mobiliser pour combattre leur ennemi séculier. Cet événement provoque en effet la réorganisation et la mobilisation d’une partie de la franc-maçonnerie, celle liée aux secteurs libéraux les plus traditionnels — proches de Robles Gil — qui reprend sans ambages le vieux discours libéral anticlérical. Ainsi, le 18 février 1912, moins d’un mois après les élections législatives de l’état (21 janvier 1912) gagnées par le PCN, était créée la Cran Logia Occidental Mexicana. La Gran Logia est le produit de l’union de trois loges déjà actives : la Benito Juárez n°24, la Occidente n° 10 et la Pitágoras n°14 68.

79Cette réaction ne manque pas d’en entraîner une autre, de la part d’un secteur des catholiques qui reprennent, eux aussi dans la plus pure des traditions du xixe, le discours anti-jacobin, anti-maçonnique et « anti-sectaire » ; discours jamais entièrement disparu et que l’hebdomadaire La Chispa s’était chargé de rendre au goût du jour depuis sa naissance en février 190969. Réapparaît ainsi, dans toute sa splendeur, la vieille querelle « jacobins »-mochos70 (anticléricaux-cléricaux) dont le porfiriat avait mitigé les termes.

80Tous les efforts des dirigeants régionaux du PCN pour se démarquer d’un conservatisme qui ne correspondait pas à leur projet politique furent inutiles. C’est le sort même d’un de leurs premiers avertissements publics, contenu dans le manifeste du Centre Jalisco du 31 mai 1911 :

« Nous voulons former un nouveau parti, sans aucune filiation historique, qui s’adapte à toutes les évolutions légitimes de notre époque, et non pas l’impossible résurrection du parti conservateur. Même si nous nous sentons liés à sa mémoire de par l’immuabilité des principes religieux que les dévoués dirigeants de ce groupe-là ont soutenu, nous ne pourrions être liés aujourd’hui au critère politique contenu dans leur œuvre, qui fut un critère uniquement politique, tandis que nous, si nous avons recours à celle-ci, ce n’est que pour garantir l’efficacité de l’action sociale que nous devons développer au bénéfice du peuple qui réclame bien-être et garanties, c’est-à-dire, justice et liberté71. »

81Un des éléments-clé de cette lecture qui reprend des stéréotypes du XIXe, l’identification du PCN au parti conservateur, se retrouve par ailleurs dans plusieurs interprétations de la naissance du parti confessionnel, même dans certaines qui essaient de rester à l’écart de sa satanisation. Tel est le cas des partis Antirreeleccionista Jalisciense et Constitucional Progresista, qui s’expriment ainsi :

« [...] les catholiques sincères du Mexique n’ont pas tous été impérialistes avec Iturbide, ni interventionnistes avec Márquez et Miramón, ni abjects et traîtres avec Santa Anna : le Parti Conservateur, cependant, a soutenu à l’époque que ceux qui ne communiaient pas avec ces erreurs vraiment monstrueuses n’étaient pas des vrais catholiques, de la même façon qu’aujourd’hui, celui qui s’auto-proclamme Parti Catholique et qui n’est rien d’autre que le même Parti Conservateur de jadis, soutient que tous les catholiques, du l’ait même de l’être, doivent se grouper autour de lui [...]72. »

82L’utilisation du vieux discours se trouve même chez les propagandistes du PCN73. En fait, au sein de ce parti, ce n’est qu’une élite réformiste qui refuse les termes de ce discours de vieille querelle conservateurs-libéraux.

83La deuxième lecture de la fondation du PCN, qui la conçoit comme la récupération de droits ôtés aux catholiques par le libéralisme intransigeant, est partagée par les fondateurs mêmes du parti et par quelques intellectuels dont les jésuites Alfredo Méndez Medina et Arnulfo R. Castro sont deux exemples notoires74, mais aussi par un journaliste comme Eduardo J. Correa qui s’exprime dans les pages de El Regional, puis de La Nación75.

84Ces deux premières lectures, dans le fond complémentaires, contribuent à la recréation d’une atmosphère de forte tension entre deux groupes, les libéraux-conservateurs et le PCN, tension exacerbée avec le triomphe électoral de ce dernier, et qui n’est qu’une des formes les plus visibles d’une lutte pour le pouvoir. La résurrection de cette vieille querelle, masquant les véritables enjeux du moment, contribue à la rupture des possibilités de conciliation-négociation indipensables à tout fonctionnement démocratique76.

85La troisième lecture de la fondation du PCN, qui en fait la régression à une problématique dépassée par le régime porfirien, est caractéristique d’une pensée libérale conciliatrice, qui représente alors le lieu de convergence de différentes tendances réformistes, résultat d’un libéralisme ayant assumé positivement une partie des expériences de trente-cinq ans de porfiriat. Pendant le gouvernement de Madero, c’est dans un tel lieu que la conciliation démocratique, entre des positionnements idéologiques très variés, était possible. Cela non seulement à cause du développement d’une tendance à la conciliation et au respect de l’autre, mais aussi du fait d’un phénomène humain au sens strict : les hommes qui incarnaient cette position étaient des ponts humains entre les différentes tendances ; souvent libéraux (plutôt progressistes, quoique pas toujours), souvent aussi de foi catholique et, surtout, pour la plupart, des démocrates. Leur existence même prouve par ailleurs que pendant le gouvernement de Madero, la classe politique jalisciense est loin d’être entièrement polarisée et irréconciliable ; des points de rencontre et de concertation entre des forces importantes existent bel et bien ; la polarisation vient vers la fin de ce gouvernement et elle n’est sans doute pas étrangère à sa chute.

86Les représentants de cette position sont souvent proches du parti Independiente et surtout des idées affichées par le journal La Libertad. Un cas particulièrement intéressant est celui de l’avocat José Gutiérrez Hermosillo, membre précisément du Pl., pour qui « la fondation du Parti Catholique au Mexique a été inopportune »77. Pour Gutiérrez Hermosillo, il ne fait pas de doute que la fondation d’un parti confessionnel avait été une violence superflue dans une ambiance où l’intolérance ne s’était pas du tout manifestée jusqu’alors. Il indique, en analysant le contexte dans lequel le parti est né :

« Les essais des groupes politiques qui s’étaient formés depuis un moment, se limitaient à une aspiration politique. [...] Il n’y a pas eu de heurt, à ma connaissance, dans aucun de ces partis à cause des opinions religieuses78

87Dans une longue lettre à Miguel Palomar y Vizcarra, dont il est ami, Gutiérrez Hermosillo livre ses réticences et son jugement par rapport à la fondation du PCN, dont il déplore surtout le mélange entre politique et religion :

« [...] le groupe politique auquel tu appartiens, avec toute la force que l’on imprime aux mouvements sociaux et politiques lorsque domine la foi religieuse, s’est présenté en suscitant des soupçons chez les uns, la haine sectaire chez les autres, l’esprit d’expectative pour une minorité et l’envie de lutter pour le plus grand nombre 79. »

88Pour lui, au fond, c’est la création même du PCN qui a déclenché toute une vague de libéralisme « jacobin » à son encontre :

« Le choc ne s’est pas fait attendre, les passions se sont excitées, il s’est organisé un parti qui s’appelle Libéral, sectaire et systématique, dont la devise est, au fond, de harceler le clergé et le catholicisme. [...] Si nous, les catholiques, nous étions montrés actifs, honnêtes, prudents et toujours pleins de foi [...] en faisant partie de groupes politiques ou en en formant un dans lequel la question religieuse n’apparaisse pas, afin de commencer à prendre habilement et prudemment les postes les plus importants, je crois, mon ami, qu’on aurait réussi. Nous aurions ainsi entouré l’ennemi sans soubresauts et sans probabilités de perturbation de la paix de notre chère patrie80. »

89Dans un sens historique et politique, cette fondation lui paraissait pour le moins inopportune et provocatrice :

« Ceux qui ont conçu l’idée de fonder et d’organiser un parti de l’importance et de la transcendance du Parti catholique, auraient dû attendre que le nouveau gouvernement se consolide, observer sa progression politique, voir s’il se formait quelque parti pour harceler les catholiques et non pas provoquer son apparition81. »

90Gutiérrez Hermosillo insistait sur le caractère inopportun, d’un point de vue historique, de cette fondation et concluait que le PCN était porteur, de surcroît, d’une profonde incohérence entre son contenu, son projet et son nom :

« Mais ne pas agir avec toute cette prudence et se présenter à lutter à l’ombre d’un parti qui, par-dessus son programme qui accepte et se propose de lutter pour les libertés modernes, fait ostentation religieuse de s’appeler « Catholique », c’est, à mon avis, contradictoire et c’est ne pas agir en accord avec les lois du développement social [...], c’est agir inopportunément82. »

91La position politique et idéologique que cette troisième lecture représente, autour de laquelle une conciliation assez large semblait à un moment possible, était déjà, cependant, en perte de vitesse en 1912.

2.2. Le PCN : du conservatisme à la démocratie

92La période étudiée ici (de la fin 1911 jusqu’en octobre 1912) a vu se produire un bon nombre d’alliances politiques entre les multiples groupes qui s’étaient constitués depuis la fin 1909. C’est le cas d’une alliance électorale comme celle entre les partis Antirreeleccionista et Constitucional Progresista autour de la candidature de Salvador Gómez83. L’ampleur des coalitions est à la mesure de l’enjeu que les forces alliées veulent combattre. Ainsi, une coalition pourra même réunir vers la mi-1912, l’ensemble des forces indépendantes contre le gouverneur Robles Gil, pour le forcer à la convocation d’élections84.

93Ces alliances ont souvent lieu de façon ouverte, notamment lorsqu’elles ont un caractère spécifiquement électoral, comme il arrive autour de la candidature de David Gutiérrez Allende, de celle de Salvador Gómez ou encore de celle de José López Portillo y Rojas. Mais pendant cette période, se réalisent aussi certaines alliances discrètes, sans doute difficiles à revendiquer compte tenu des principes contradictoires affichés par les parties alliées. Mais sans doute étaient-elles aussi repérables et, pour certaines d’entre elles, d’une importance majeure dans le déroulement des événements politiques. Tel est le cas de l’alliance entre des libéraux-conservateurs, proches du gouverneur Robles Gil, et le PCN pour les élections des députés au Congrès de l’état du 21 janvier 1912. Le 16 novembre 1911, le PCN rendait publique une liste « mixte » de candidats, où se côtoient des membres du PCN (Móanuel F. Chávez, Francisco Marrón Alonso, Félix Araiza, Joaquih Aceves, Miguel Palomar y Viz-carra, Alfredo Morfín Silva, Luis B. de la Mora, Indalecio A. Dávila) et des libéraux proches de l’ancien gouverneur Cuesta Gallardo ou de celui alors en fonction, Robles Gil : des membres de l’ayuntamiento de Guadalajara poussés à la démission par le triomphe madériste (Enrique Alvarez del Castillo, Jesús Camarena) ; des membres encore d’organisations politiques comme le Partido Progresista Jalisciense, regroupant une élite porfirienne liée à l’exercice du pouvoir (Miguel Campos Kunhardt) ou comme le Club Pedro Ogazón — qui s’était formé pour soutenir la candidature de Rodolfo Reyes —, dont fait partie Jésus Camarena, un des chefs de file de la loge maçonnique Benito Juárez n° 24. D’autres enfin sont des hommes clairement proches du gouverneur provisoire, comme Javier Verea et Carlos Robles Gil85.

94Cette alliance montre que, à la fin de l’année 1911, un accord est encore possible entre le PCN et une partie de l’élite porfirienne, les libéraux-conservateurs. Le PCN local penche encore à l’époque vers un conservatisme commun à une partie large des élites porfiriennes. Jusqu’au début du mois de janvier, ce parti est — publiquement du moins — en bons termes avec Robles Gil, comme le montre cette prise de position publique du centre Jalisco, critiquant l’attitude de plusieurs clubs et partis :

« Tous ces partis ont eu le plus grand mépris pour les listes électorales préparées par l’honnête Gouvernement de M. Robles Gil86. »

95L’alliance montre aussi qu’en cette conjoncture, le pragmatisme politique s’impose au-delà de considérations idéologiques. On ne saurait oublier, par ailleurs, que cette entente a pour toile de fond la réapparition de la vieille querelle jacobinos-mochos. Il n’est pas surprenant que la querelle devienne bien plus forte au moment de la rupture de cette alliance.

96L’alliance PCN-cientίficos n’est pas une particularité du Jalisco87. Elle n’est pas, non plus, le fait d’une élite résidant dans la capitale de l’état ; mais s’est produite dans d’autres localités, comme le suggèrent les mots de ce militant du PCN à Acatic, qui écrivait en mars 1912 :

« [...] je vous dirai pour finir que l’union qui paraissait régner ici entre le PCN et le Libéral, n’existe plus88 ».

97En effet, dans le contexte de l’après-révolution madériste, les camps ne semblent pas être clairement délimités et les alliances politiques se font et se défont au gré des enjeux locaux et des conjonctures précises, tout particulièrement lorsqu’il y va des questions municipales. Ainsi s’explique ce qui arrive à Sayula lors des élections des membres de l’ayuntamiento et des alcaldes, en novembre 1911, où les partis Católico Nacional, Liberal Rojo et José María Morelos, protestent contre la victoire du Partido Católico Independiente89. Dans le spectre régional des organisations politiques, le Católico Independiente est un parti qui n’existe pas ! Une scission du PCN local l’a sans doute rendu possible.

98Ces alliances évoluent donc avec la situation politique de l’ensemble de l’état, en même temps qu’elles en témoignent et la construisent. La dissolution de l’alliance PCN-parti Liberal à Acatic, illustre à sa façon une évolution de l’ambiance politique générale, laquelle, à partir de l’entrée en fonction du nouveau Congrès, passe d’une entente entre ces deux factions à une atmosphère d’intolérance de plus en plus prononcée.

99L’idéologisation des positions politiques atteindra son point culminant au mois de mai, contribuant même à un basculement des termes de l’alliance : elle ne se fera plus entre PCN et libéraux-conservateurs, elle se fera entre PCN et un spectre libéral vaste (du porfirien réformiste au progressiste) dont les seuls exclus sont les alliés d’hier.

100La confirmation de la force du PCN par un triomphe électoral incontestable fait basculer l’alliance de ce parti avec les libéraux-conservateurs dans la mesure où la revendication d’une indépendance du Pouvoir Législatif et les efforts pour consolider rapidement ce Pouvoir par le biais de nouvelles élections de gouverneur s’avèrent totalement incompatibles avec le désir de continuité de ce groupe, bien représenté dans les ambitions personnelles de Robles Gil.

101Le conflit se déclenche le 15 avril, lorsque le Congrès de l’état adopte une initiative prévoyant des élections extraordinaires de gouverneur pour le 9 juin ; le gouverneur ainsi élu entrerait en fonctions le 1er juillet90.

102Le document met en valeur l’absence de tout mouvement militaire d’envergure, sur le territoire de l’état, qui mériterait l’ajournement des élections. Il souligne le fait que, dans l’ensemble de la République, il n’y a que le Jalisco qui ne soit pas entré dans l’ordre constitutionnel, ainsi que l’intérêt vif de l’ensemble des organisations politiques (à une exception près, les roblesgilistas) pour la célébration des élections dans les meilleurs délais91.

103Pour Robles Gil, cette convocation a valeur de déclaration de guerre et il rejette d’emblée le décret du Congrès92. Quelques jours plus tard le Congrès ratifie le décret ; le gouverneur, à son tour, ratifie son rejet ; ce scénario se reproduit plusieurs fois entre le 15 avril et le 21 mai, jour où Robles Gil obtient du Sénat qu’il soutienne son refus de convoquer des élections93.

104Pendant ce temps, la partie est loin d’être jouée d’avance. Le gouverneur refusant d’approuver l’initiative, des rumeurs courent sur la stratégie que pourraient adopter les députés du PCN. La Chambre pourrait, éventuellement, lancer la convocation sans passer par l’Exécutif ; elle pourrait aussi invoquer l’aide du président de la République et obtenir de ce dernier qu’il désigne un autre gouverneur provisoire. Ces rumeurs sont alimentées par le départ à Mexico, bientôt connu malgré sa discrétion, du député Palomar y Vizcarra.

105La réaction ne se fait pas attendre : en premier lieu, le gouverneur ne tarde pas à y envoyer lui aussi un de ses proches, Jorge Delorme y Campos94. D’autre part, le 21 avril le journal Chin-chun-chan fait paraître un pamphlet qui attaque la Chambre95. Dans la même ligne, le parti Liberal — qui soutient la candidature de Robles Gil — publie quant à lui un manifeste96.

106Le document s’attaque aux députés du PCN, en particulier à Palomar y Viz-carra. Il a recours au fantasme payant de la souveraineté violée et s’efforce de présenter le député comme un homme indifférent à une immixtion du gouvernement fédéral dans les affaires internes du Jalisco. L’emploi de cette argumentation illustre une fois de plus l’importance, dans l’imaginaire politique jalisciense de l’époque, du bras de fer avec l’état national pour l’exercice de la souveraineté en tant qu’entité de la fédération. En effet, aucune accusation ne pouvait être plus forte, contre un homme politique, que celle d’être indifférent à une violation éventuelle de la souveraineté de l’état.

107Ainsi la situation à Guadalajara devient de plus en plus tendue, le gouvernement surveille les mouvements des députés du PCN, essaie par différents moyens — comme la violation de leur correspondance — de les intimider ; les députés finissent par se présenter armés aux séances97. A plusieurs reprises, les députés pensent pouvoir rendre publique la convocation98, mais à chaque fois Robles Gil trouve des arguments pour l’ajourner, comme lorsque le 29 avril il demande 3 jours afin d’envoyer l’orateur qui le représentera dans la discussion du décret ; dépité, un législateur écrit :

« En 3 jours on aura des nouvelles de 9 attaques différentes dans différents endroits de l’état et par conséquent 9 raisons de plus sur lesquelles pourra s’appuyer l’Exécutif. — En 3 jours le conflit du Nord pourra être résolu ou du moins on pourra entrevoir sa solution et on pourra profiter de cela à la même fin d’ajourner les élections99. »

108L’opposition entre le Congrès et le gouverneur prend rapidement des proportions importantes et attise la querelle mochos-jacobinos qui ne fait que rendre la négociation de plus en plus improbable. En dehors du débat intense dans la presse, des attaques ininterrompues dans des imprimés, les partisans de Robles Gil sont prêts à faire pression sur les députés du PCN par d’autres moyens. Ainsi, les séances de la chambre se font dans une ambiance très tendue. Celle où se présente enfin l’orateur du gouverneur doit être suspendue à cause du désordre dans les galeries où les partisans de Robles Gil ridiculisent les députés catholiques en mimant des prières et des chants100.

109Dans le cadre de ce conflit, l’ambiance politique s’assombrit considérablement ; nombre de protagonistes observent un comportement marqué par la peur : des lettres signées sous pseudonyme ou seulement avec des initiales, des télégrammes chiffrés101. L’ambiance d’ouverture relative d’autrefois a eu du mal à résister à ce qu’était un fort enjeu de pouvoir.

110Le Congrès arrive à la fermeture de sa période de séances extraordinaires. Pour ce premier tour, Robles Gil est triomphant : une fois le Congrès hors de ses fonctions, la convocation d’élections est impossible. Certains voient en cela un soutien de Madero au gouverneur du Jalisco102. Ce qui est certain, c’est que le président se méfie du PCN103 qu’il n’est pas encore décidé à jouer contre Robles Gil et que ce dernier compte avec le soutien du Sénat. Ainsi, le candidat du PCN, José López Portillo y Rojas, écrit :

« Que peut-on faire pour le Congrès ? Rien, car il n’est pas en situation de légiférer104. »

111Le 21 mai le Sénat sanctionnait l’attitude de Robles Gil105.

2.3. Convergences

L’opposition à Robles Gil

112Au delà de la confrontation pure et simple de deux Pouvoirs, confrontation qui se pare d’un contenu idéologique très fort, la lutte pour le pouvoir met en évidence de nouvelles possibilités d’alliance politique mettant en jeu des acteurs tenus auparavant pour incompatibles. Ainsi naît vers la fin du mois d’avril, une coalition qui a pour axe la plus importante force politique du Jalisco à ce moment, le PCN, à laquelle participent portillistas — partisans de Lopez Portillo y Rojas —, allendistas et gomistas. Le but de cette coalition est de soutenir publiquement et coûte que coûte le Congrès dans sa volonté de convoquer des élections extraordinaires pour le poste de gouverneur106.

113Cette alliance est significative de plusieurs choses : le PCN est certes la force la plus importante du moment, mais il ne peut agir entièrement seul ; sa véritable puissance réside dans sa capacité d’alliance avec d’autres. Pour l’optimiser, il lui faut en premier lieu casser la logique de confrontation catholiques-libéraux qui est la grille de lecture imposée jusque là par les libéraux-conservateurs partisans de Robles Gil — et suivie, il faut le dire, avec complaisance, par une partie de ses propres militants

114Cette alliance démontre également un changement d’orientation du PCN : pour un moment, le parti se détourne des conservateurs qui avaient été ses partenaires dans l’alliance avec Robles Gil, pour entrer en contact avec des libéraux progressistes. En réalité les éléments nouveaux de cette alliance sont les partisans de Salvador Gómez, les gomistas, car de multiples points de contact avec les portillistas et les allendistas existaient depuis un moment : le PCN soutenait la candidature de López Portillo depuis le mois de décembre 1911 et les liens personnels avec les membres du parti Independiente étaient nombreux et solides.

115Il y a une grande part de pragmatisme dans la constitution de cette coalition ; en effet, au-delà de l’intérêt d’une union des principales forces politiques indépendantes, bien considérée, la présence de Gómez est probablement un des seuls liens efficaces avec Madero. Or, ce qui manque fortement au PCN dans sa confrontation avec Robles Gil, c’est le soutien d’éléments au sein du gouvernement fédéral. Ainsi, un militant écrit à Palomar y Vizcarra :

« Salvador Gómez est parti hier vers là-bas [Mexico], essayez de le voir pour vous mettre d’accord ou du moins, pour que vous sachiez ce que dit Madero107. »

La peur du socialisme

116La présence des partisans de Salvador Gómez dans la coalition contre Robles Gil représente la rupture d’un des grands tabous de la pratique politique de l’époque. En effet, pendant une bonne partie de la période ici considérée, au milieu de l’établissement et la rupture d’alliances de l’ordre le plus divers, une chose est claire : d’un point de vue idéologique, toutes les alliances semblent possibles sauf une, celle avec ce qu’on appelle le « socialisme ». Il est clair que, parallèlement à la très large publicité faite à la querelle mochos-jacobinos et avec une bien plus grande profondeur, s’établit chez la plupart des élites une peur de cette altérité que représente le socialisme.

117La peur du socialisme n’est pas un phénomène nouveau et dans un sens elle est surtout, elle aussi, la prolongation d’une vieille peur — internationale celle-ci — datant du xixe siècle. Cependant, avec le triomphe de la révolution madériste et l’essor de mouvements populaires aux revendications sociales, le socialisme, cette doctrine dont on craignait la propagation, apparaît comme une réalité matérialisée sous la forme de campagnes politiques et semble s’incarner dans des individus très concrets :

« Le socialisme — s’alarme officiellement le PCN — n’existait pas parmi nous jusqu’à la chute de la Dictature, et encore moins sous sa forme la plus grossière, agressive et odieuse : l’anarchisme108.  »

118Pour cette lecture, qui ignore — est-ce de façon délibérée ? — l’existence depuis plusieurs années d’un courant anarchiste mexicain d’importance non négligeable109, l’apparition d’un tel « fléau » ne peut qu’être postérieure à la chute de cette forme d’ordre qu’était la dictature, et à la limite une conséquence de cet événement :

« L’imprudence des orateurs révolutionnaires, celle d’une certaine presse peu avertie et les doctrines vénéneuses dont elle s’inspire dans son aversion à Dieu et à l’Église, ont fait germer et pousser chez les masses populaires, non pas la haine du riche, déjà latente auparavant, mais les aspirations exorbitantes et absurdes à des réformes sociales, que le principe sacré de la propriété et la morale chrétienne réprouvent [...]110. »

119Il y a, ainsi, dès le départ, une assimilation du mouvement révolutionnaire aux doctrines socialistes, ce « poison » que l’on donne au peuple et qui ne peut conduire qu’au désordre :

« par le fait même que nous aimons le peuple, nous voyons avec une immense douleur qu’on le fourvoie ; qu’on l’empoisonne avec les erreurs socialistes les plus criantes et abominables [...] et que l’on permette, approuve et même stimule le développement de ces principes dits de revendication et qui ne sont que [des principes] de désordre111 ».

120La direction du PCN lance ainsi un appel au gouvernement de Madero :

« L’ordre est en danger, la liberté est en danger car la dictature s’impose, l’indépendance est en danger car l’intervention menace. Que le Gouvernement nous sauve 112 ! »

121Elle propose des mesures concrètes, comme la répression énergique des tumultes populaires, afin de garantir l’ordre113, et offre au gouvernement sa collaboration, à condition de

« ne jamais soutenir les clubs et partis socialistes, ne jamais réveiller la crainte chez le propriétaire ni les appétits contraires à l’ordre chez l’Indien et le journalier, par des lois agraires qui ne doivent pas s’immiscer dans ce qui ne correspond qu’à l’évolution et au progrès naturels de la civilisation d’un peuple114 ».

122Même s’il s’inscrit dans un contexte très précis, ce document traduit bien cette assimilation rapide et bien répandue entre socialisme et mouvements populaires, et surtout exprime une peur qui n’était pas exclusive aux élites directrices du PCN. En effet, bien loin de la direction du parti, cette même appréhension s’exprime dans des termes semblables. Le curé du village de Tonalá, par exemple, en dressant une liste de grands maux urgents auxquels il convient de remédier, signale en premier lieu « les dangers du socialisme »115.

123Le socialisme prend ainsi rapidement un visage et un visage bien connu : pour l’ensemble du Mexique, celui du zapatisme : « les hordes de Zapata menacent la République entière »116; au Jalisco celui de Salvador Gómez.

124L’exemple le plus achevé en est sans doute l’ancien journal porfiriste El Imparcial, qui s’en sert pour attaquer durement le gouvernement madériste, et qui proposait d’ailleurs, bien que dans des termes moins édulcorés, la même solution que la direction du PCN. Comme l’explique Ariel Rodríguez Kuri, pour El Imparcial,

« l’ennemi zapatiste, soit dit en passant, n’était pas humain : il était "zoologique" [...]. Le journal plaidait pour "l’extermination cruelle et terrible" des zapatistes117 ».

125Or, on sait bien que ni les zapatistes ni les partisans de Gómez ne se voulaient socialistes, ces derniers se sont même défendus publiquement de l’être : « L’accusation de Socialisme n’est pas, elle non plus, fondée »118. Non pas que le socialisme leur ait été complètement étranger — il suffit pour cela de tenir compte de la présence auprès de Gómez de cet « intellectuel de l’utopie » qu’était Miguel Mendoza López Schwertfeger119 —, mais que sans doute ils préféraient, dans une région où la foi catholique occupait une place aussi importante, ne pas prendre le socialisme comme bannière.

126Cependant, tout comme l’identification du PCN au conservatisme, celle du gomismo au socialisme se bâtit sans tenir compte outre mesure ni de l’avis ni des déclarations du principal intéressé. Cette assimilation se produit chez les directions de ses adversaires politiques probablement en toute connaissance de cause, mais se répand à tous les niveaux, où il ne fait pas le moindre doute que les gomistas sont des socialistes. Ainsi le curé de Tonalá, qui s’écrie :

127« Ici tout le village est gomista. Dieu nous garde du socialisme120 ! » Ainsi, les projets réformistes touchant au social, notamment ceux qui se rapprochent des revendications populaires, sont taxés de socialisme et plus ils ont du succès plus on les craint. C’est donc ce qui arrive au programme de Gômez, construit autour de sept questions fondamentales : la distribution équitable des impôts, le travail et la propriété de la terre (« nous voulons stimuler le travail de la terre et éviter que, dorénavant, des grandes haciendas ne demeurent pres-qu’improductives »121), une meilleure administration de la justice, la qualité de vie des travailleurs et la nécessité de faire parvenir l’instruction publique aux couches populaires :

« Nous voulons que l’instruction publique, fondamentale parmi les institutions démocratiques, soit largement diffusée [...] qu’elle parvienne au fils de l’ouvrier et du peón [...]122.  »

128Le programme se prononce contre les concessions excessives et les monopoles et il clame, enfin, une liberté religieuse absolue.

129Jusqu’où le projet de Salvador Gómez, tout en se rapprochant des revendications ouvrières et paysannes, est-il un projet socialiste ? Au fond, cela a sans doute moins d’importance que la perception qu’en ont ceux qui le redoutent et que l’image qu’ils en construisent. Salvador Gómez proposait des réformes sociales, il est devenu donc, aux yeux des autres et à son corps défendant, « socialiste ».

130Davantage que la peur du socialisme en lui-même, c’est la peur d’être taxé de « socialiste » qui touche certains groupes ; c’est le cas des allendistas, dont la réaction au triomphe du PCN lors des législatives du 21 janvier 1912 se termine par les mots suivants :

« Notre objectif est d’éloigner à jamais le danger de la guerre religieuse, tuer pour toujours le caciquisme en tant qu’honteuse exploitation du pauvre et freiner la monstrueuse agitation de ceux qui essaient de détruire l’agriculture dont nous vivons tous, par le système absurde du communisme socialiste123. »

131Ce sont tout de même les militants du catholicisme politique qui ont le plus manifesté, dans leur discours, la peur de ce genre de mouvement. Au de là de ce fond commun de refus du socialisme partagé avec d’autres groupes, ce qui faisait peur aux militants catholiques chez les socialistes, c’est qu’ils étaient, dans les méthodes comme dans le public visé, des véritables concurrents, et même des concurrents ayant souvent une longueur d’avance. Un exemple éclairant est celui du travail auprès des femmes : lorsque Arnulfo R. Castro, jésuite résidant en Belgique et un des contacts les plus importants des démocrates-chrétiens mexicains avec l’avant-garde européenne de leur courant, insiste sur l’urgence de l’incorporation des femmes à un mouvement tel que les operarios guadalupanos, son argumentation est fondée non seulement sur l’importance du rôle joué par les femmes dans la structuration d’un mouvement, mais aussi sur le fait que les socialistes y travaillent déjà !

« Pourquoi ne pas établir des centres régionaux de Operarias Guadalupanas dépendantes du Centre général ou directement de M. l’Archevêque de Mexico ? Vous mieux que moi savez et connaissez l’importance immense de cette affaire et il me suffit de vous rafraîchir l’idée. [...] Les socialistes y travaillent déjà, il faut nous dépêcher124. »

132Ce « socialisme » qui n’en est pas un, a été, lui aussi, un structurateur d’opposition, une raison de la convergence de différentes tendances politiques, toutes celles qui avaient le souci de protéger la propriété privée et qui se sentaient menacées par des projets de redistribution des terres. Or ce « socialisme » correspond au programme de certains révolutionnaires qui commence à intégrer des demandes sociales pressantes comme celle de la distribution de la terre ou de l’amélioration des conditions de travail des ouvriers. Il touche au fétiche et aux intérêts de la propriété privée, et il catalyse les efforts antirévolutionnaires. La révolution, plus que le socialisme, est, pour les élites, le danger à conjurer.

3. Fragilité de la démocratie

3.1. L’élection du gouverneur

Redéfinition des candidatures

133Le 15 août 1912, le Congrès du Jalisco reprend ses séances interrompues au mois de mai, dans le seul but de lancer la convocation des élections au poste de gouverneur125. Cette reprise d’activités témoigne avant tout d’un changement de première importance dans les rapports de force entre d’un côté le PCN et ses alliés et, de l’autre, les libéraux-conservateurs regroupés autour du gouverneur de l’état. Il semble en effet que, pendant la suspension des séances du Congrès, les forces indépendantes de l’état aient misé sur une intervention du centre et réussi à convaincre le président Madero du besoin de congédier Robles Gil.

134Le Congrès du Jalisco ne reprend donc ses séances que lorsqu’il est assuré du soutien du gouvernement de Madero. Ainsi, le 10 août, le candidat López Portillo — selon sa propre version à la demande de Madero même — écrit à Palomar y Vizcarra en incitant les députés à lancer la convocation126, et le 15 du même mois les députés se réunissent à nouveau. Dans sa lettre, López Portillo affirme que le président de la République aurait requis le concours du général Villaseñor, chef de la zone militaire comprenant le Jalisco, pour soutenir et rassurer le Congrès avec les forces fédérales à sa charge. « Il n’y a pas une seule minute à perdre — finit-il. C’est maintenant ou jamais »127.

135Ce succès n’exclut pas l’usure de bon nombre des protagonistes de cette dispute, sans doute accentuée par leur recherche constante de soutien à Mexico auprès des responsables de la politique nationale, tout comme par l’inévitable cortège de rumeurs qui s’en suivait et qui transitait entre Guadalajara et Mexico avec les voyages des uns et des autres128.

136Or, justement, les rumeurs les plus importantes sont celles qui relient le général Villaseñor aux intentions de Robles Gil de rester au pouvoir129.

137Dans le même temps la spéculation autour de nouvelles candidatures reprend : du côté des libéraux-conservateurs, on parle de Luis Alatorre, d’Octavio Lobato (ce dernier étant plus proche des tendances de concertation), et de Jesús Camarena130; du côté des madéristes, il est toujours question de Salvador Gómez. L’idée qu’il puisse y avoir plusieurs candidats se réclamant du libéralisme réjouit par avance les militants du PCN, les partisans de López Portillo et le candidat lui-même, car ils voient en cela la division de la franc-maçonnerie, qu’ils tiennent pour leur ennemi principal131.

138Par ailleurs, Robles Gil, ne parvenant pas à avoir un soutien fort pour sa propre candidature, opte pour soutenir lui-même celle de Luis Alatorre, sans jamais obtenir pour autant le ralliement à ce dernier de ceux qui soutiennent Octavio Lobato.

139En fin de compte, seules les candidatures de Lobato, président de l’ayun-tamiento de Guadalajara, Alatorre — présenté par la Gran Convención Liberal — et López Portillo y Rojas sont enregistrées. Celle de Gómez n’est pas maintenue, mais des rumeurs incessantes — probablement déclenchées par Robles Gil — en font une candidature imposée par Madero132.

Le pouvoir d’un candidat-gouverneur

140Depuis la chute de Manuel Cuesta Gallardo (mai 1911), différents groupes politiques ont cherché à faire de José López Portillo y Rojas le gouverneur du Jalisco, les principaux étant ceux qu’on connaît comme les clubs portillistas, auxquels s’est joint, en décembre 1911, le PCN. Toute la campagne s’est faite sans le candidat (et en ce sens c’est une campagne très porfirienne), qui résidait à Mexico, d’où il a essayé — sans beaucoup de succès — de jouer un rôle dans la négociation avec Madero pour obtenir le retrait d’Alberto Robles Gil du Pouvoir Exécutif de l’état133.

141Auprès de Madero, ce qui était un des grands atouts politiques de López Portillo au Jalisco, le soutien de sa candidature par le PCN, semble, du moins aux yeux du candidat, peser contre lui :

« Don Octavio Lobato sera le candidat de ceux que l’on appelle les libéraux, et il est probable qu’il ait le soutien officiel. [...] Monsieur Madero me manifeste une relativement bonne considération, mais il se méfie beaucoup du parti catholique et il préférerait, selon ce que j’ai pu comprendre, que ce soit la candidature libérale qui triomphe134. »

142Par ailleurs, il ne semble pas que l’intense passé reyiste de López Portillo ait eu un poids négatif dans les rapports entre le candidat au gouvernement du Jalisco et le président de la République, et ce malgré l’aversion de Madero pour Bernardo Reyes. Il ne semble pas avoir de raison pour que Madero qui, avant d’accéder à la Présidence, avait fait abstraction de son anti-reyisme pour tenter un rapprochement avec le général135, ait gardé quelque réticence envers un des animateurs civils du mouvement reyiste en 1909, d’autant plus que López Portillo n’avait pas participé au soulèvement de Reyes en novembre 1911136.

143Pendant ces mois de campagne prolongée, de lutte pour le retour à la légalité constitutionnelle, les liens entre López Portillo et son allié du moment, le PCN, se renforcent, surtout à partir de la rupture entre ce dernier et Robles Gil. Mais, plus que le renforcement de ce contact, somme toute naturel, entre le candidat et les représentants du PCN, c’est le début d’une collaboration en matière législative entre celui qui est perçu comme un gouverneur en attente et « son » Pouvoir Législatif. En effet, les projets de loi les plus importants lui sont adressés et son avis requis.

144Mais l’implication de López Portillo dans les tâches du Congrès de l’état va bien au-delà de l’émission d’un avis personnel, comme le laisse bien entendre cette lettre qui fait référence vraisemblablement au projet de loi du Bien de Familia, et avec laquelle López Portillo accompagnait le brouillon du rapport, « que vous avez eu la délicatesse de me demander afin qu’il soit adopté par le député chargé de la commission concernée »137. Par ailleurs, le candidat ne se contente pas d’adhérer aux projets des députés du PCN, mais il leur en propose, comme lorsqu’il leur suggère l’adoption du projet de Flores Magón d’abolition des jefaturas polίticas :

« Ce serait un coup splendide contre R.G. [Robles Gil] — dit-il — que de voter rapidement une loi qui laisserait hors-jeu ses acolytes138. »

145En attendant ces élections qui devraient en théorie confirmer son triomphe, l’influence de López Portillo sur le Pouvoir Législatif de l’état est celle d’un gouverneur élu qui attend la confirmation de son poste. Ainsi, par exemple, se dit-il content que les députés aient bien voulu accepter les suggestions qu’il leur avait adressées par l’intermédiaire de Manuel Chávez « afin d’éliminer les éléments malsains du gouvernement du Jalisco »139.

146Cette implication de López Portillo dans le travail des législateurs se voit aussi dans son grand intérêt pour un de leurs projets de plus grande signification politique : la loi électorale de représentation proportionnelle140.

147La collaboration entre López Portillo et le PCN se voit également dans l’organisation des élections, une fois que leur convocation a enfin pu être lancée. Ainsi, début septembre, reconnaissant son éloignement du terrain, le candidat demande un exemplaire de la nouvelle loi électorale ainsi qu’une liste de personnes susceptibles d’être nommées comme ses représentants électoraux141.

148Libéral de la vieille école porfirienne, López Portillo avait fait sa campagne avec un programme plutôt éloigné du madérisme, visant l’application de la Constitution de 1857 et de ses réformes142 ; c’est donc un programme libéral assez classique, qui se veut, avant tout, restaurateur d’une légalité déformée par la pratique politique porfirienne. Pour ce qui est du Jalisco, il s’agit non seulement de la mise en vigueur de lois qui ne sont que lettre morte, mais d’une véritable restauration institutionnelle, c’est-à-dire, d’un retour à la légalité d’avant les réformes constitutionnelles pratiquées par le colonel Miguel Ahumada143 :

« Rétablissement de l’institution des Insaculados, afin d’empêcher que la Chambre des députés élise librement n’importe quel citoyen pour remplacer le Gouverneur dans ses absences, sans le concours du peuple » (IV).
« Rétablissement du Conseil du Gouvernement afin de renforcer et d’illustrer l’action de l’Exécutif » (V).

149Libéral, sans pour autant être anticlérical, le programme propose l’équité dans le traitement des différentes confessions religieuses dans l’enseignement public (XXIX).

150Seule concession à un air du temps qui commence à chercher la « justice sociale » : deux points du programme, l’un qui veut

« empêcher l’exploitation indue de la classe nécessiteuse par des négociants, des propriétaires ou des enganchadores144 » (XX).

151L’autre qui prétend

« proposer des lois qui facilitent la division des grandes propriétés foncières » (XIV).

152Toutefois, les craintes que ce dernier point pouvait soulever se voient équilibrées par la volonté explicite de « donner des garanties à tous les intérêts légitimes, en cherchant à assurer la sécurité absolue sur tout le territoire de l’état » (XXI).

153Des questions ayant trait aux pratiques politiques de l’époque et à ceux qui en étaient considérés comme les grands fléaux sont également présentes dans le programme :

« Ne pas tolérer la formation de groupes ou de camarillas qui exerceraient ou prétendraient exercer leur empire sur le Gouvernement » (XXII).
« Abolir le gouvernement des dits caciques, en interdisant que l’autorité ne retombe dans leurs mains ou dans celles de leurs subordonnés ou de leurs créatures » (XXII).

154Ce qui frappe d’emblée, c’est que le programme de López Portillo ignore autant les principes du mouvement madériste que le mouvement lui-même : il ignore le principe de la non-réélection, même s’il s’arrête sur celui du respect dû à tout suffrage (XXIII).

155En revanche, la fierté régionale occupe une place centrale, et plusieurs points rappellent le besoin de faire respecter la souveraineté du Jalisco (XXIV), voire de réhabiliter sa puissance :

« Faire en sorte que le Jalisco dispose d’un bon port145. »

156Ce n’est donc pas un hasard si le programme se termine par le point suivant :

« Veiller, d’une manière générale, à la grandeur, au bien-être et à la gloire de l’état » (XXXVI).

157C’est avec ce bagage que López Portillo se propose de négocier son alliance avec le PCN en décembre 1912. Personne ne s’arrêta à l’époque aux contradictions d’une telle alliance : ainsi, le candidat soutenait le besoin d’appliquer la Constitution avec ses réformes, alors que ses alliés cherchaient le retrait des lois de Réforme ; ou bien encore, le candidat défendait un traitement égalitaire de l’état à toutes les confessions religieuses, alors qu’il ne manquait pas au sein du PCN des militants désireux de rétablir le statut privilégié du catholicisme146.

Les alliances rompues

158Trop souvent, lorsqu’on fait référence à l’arrivée de López Portillo y Rojas au gouvernement de l’état, on ne retient que le soutien que le PCN apporta à sa candidature en oubliant le fait que celle-ci avait été en premier lieu lancée par les portillistas147. Cette lecture du triomphe de López Portillo ne fait que reproduire, une fois de plus, la version des faits qu’essayait de propager le groupe libéral-conservateur proche de Robles Gil, qui fait volontairement un amalgame facile des termes catholique et réactionnaire, catholique et portillista. Or, le nouveau gouverneur apparaît aux yeux mêmes de ses contemporains comme une combinaison de libéralisme classique (modéré) et de catholicisme, soutenu par le PCN, mais non pas, loin de là, totalement identifié aux principes de ce parti.

159Cette combinaison de foi catholique et de libéralisme, qui en quelque sorte fait de López Portillo un homme profondément porfirien, ne fut pas relevée — en tout cas publiquement — comme une contradiction au moment du lancement de sa candidature (ni en juin 1911 lorsqu’elle apparaît pour le compte des clubs portillistas, ni en décembre de la même année lorsque le PCN décide de l’adopter). En revanche, au moment de l’arrivée effective de López Portillo au pouvoir, cette contradiction a déjà acquis une importance de première ligne, témoignant à sa façon du développement du sectarisme dans l’état au cours de l’année 1912148.

160Aussi, au moment de son triomphe électoral, la double identité de López Portillo suscite des sentiments de crainte et d’espoir qui, un an auparavant, n’étaient pas du tout à l’ordre du jour. Le journal La Libertad estimait ainsi probable que le PCN se voit désabusé par la gestion de López Portillo, libéral de la « vieille école », défenseur de la Constitution de 1857 et des Lois de Réforme149. Au même moment, les membres du PCN se méfiaient déjà de leur allié libéral :

« Tout le monde me parle ici de la nécessité que nous avons d’imposer à L.P. y R. [Lopez Portillo y Rojas] un secrétaire qui soit entièrement des nôtres150. »

161Cette méfiance se traduit rapidement par la rupture d’une partie de l’alliance politique. En effet, à peine López Portillo entré en fonctions, le 30 octobre 1912, la direction du PCN au Jalisco adressait une circulaire aux dirigeants des Centros Católicos pour leur expliquer que, en vue de la préparation des prochaines élections de députés au Congrès de l’état, le PCN ne travaillerait plus en liaison avec le club Jesús López Portillo,

« car le texte de la nouvelle loi sur la représentation proportionnelle et la probable concurrence désespérée de la faction libérale, nous mettent dans le besoin inévitable d’employer ce recours, afin de gagner le plus grand nombre de Députés exclusivement pour notre Parti151 ».

162Même si, pour le moment, il n’y a pas une rupture au sens propre du terme, mais seulement ce que nous pouvons considérer comme une séparation du capital électoral152, dans cette lecture, « la faction libérale » est devenue, à nouveau, un bloc monolithique, dont López Portillo fait partie.

3.2. Conjurer la révolution

Réformer pour conjurer.
La législation sociale et politique des députés PCN

163L’élite qui dirigeait le PCN au Jalisco concevait le travail législatif comme une des bases de son projet politique et social, d’où l’importance attachée au contrôle du Congrès de l’état et la volonté, une fois au pouvoir, de se consacrer à la réforme législative. Elle a disposé pour cela de deux périodes législatives, 1912 et 1913, la première très marquée par leur conflit avec le gouverneur Robles Gil, et la seconde caractérisée par la chute du régime de Madero et le retour à un régime dictatorial.

164Le premier cadre a obstrué de manière importante le travail législatif, qui s’est vu réduit à des essais pour lancer une convocation électorale sans cesse repoussée. Ainsi, les deux projets les plus importants de la première Chambre (1912), celui de l’institution du bien de familia et celui de la représentation proportionnelle, ne sont devenus des lois qu’une fois López Portillo élu gouverneur.

165Une partie de l’œuvre de ces législateurs peut être considérée comme restauratrice et correspond aux vieilles revendications catholiques d’abandon des lois de Réforme. Ainsi la modification de la loi d’instruction publique, qui revenait au principe de liberté de l’enseignement, tel qu’établi par la Constitution de 1857153. A ce sujet, les députés PCN ont attendu le départ de Robles Gil du pouvoir pour annuler les dernières dispositions de celui-ci en la matière. En effet, dans sa séance du 29 octobre 1912, le Congrès abroge un des derniers décrets du gouverneur Robles Gil, considérant qu’il constitue « une attaque manifeste contre la liberté de l’enseignement »154.

166Mais la majeure partie de l’œuvre législative du PCN au Jalisco peut être qualifiée de novatrice, dans la mesure où, en s’inspirant des législations européennes et états-uniennes, elle instaurait des systèmes jusqu’alors inexistants au Mexique. C’est le cas notamment de la loi dite du bien de familia — inspirée du Home Stead anglais — et de la loi électorale de représentation proportionnelle.

167Le bien de familia établissait la protection d’un patrimoine familial immobilier non saisissable, inaliénable et indivisible155. C’était une loi destinée à protéger et à encourager la petite propriété foncière rurale et urbaine, adressée pour l’essentiel à ceux qui étaient déjà propriétaires et qui concernait des propriétés à l’économie « saine », car la fondation ne pouvait pas se faire sur une propriété hypothéquée, saisie ou soumise au droit de retrait.

168L’institution du bien de familia était étroitement liée à l’institution familiale : elle se dissolvait avec la dissolution de cette dernière (par décès, mariage, ou séparation des membres de la famille), mais pouvait aussi bien continuer d’une génération à une autre. Elle marquait ainsi clairement sa filiation leplay-sienne — qui était, par ailleurs, explicite dans l’initiative de loi156. La loi aurait pu aller encore plus loin dans ce sens, si l’ensemble des législateurs avaient voulu suivre les suggestions du rapporteur du projet, dans le sens de doter la famille d’une personnalité juridique propre157.

169Par ailleurs, l’initiative du bien de familia était fondée sur les idées originales de Le Play sur la famille-souche, mais ignorait les critiques que certains disciples du sociologue français (Tourville, Demolins) apportaient au rôle central de cette famille-souche et de la transmission intégrale du patrimoine familial comme facteurs de stabilité sociale et comme forme supérieure d’organisation158.

170Dans l’idée d’encourager le développement de l’institution, plusieurs exemptions fiscales étaient octroyées, dont la plus significative était l’exemption de l’impôt sur la propriété, pendant dix ans, aux cinq cents premières propriétés qui se constitueraient en bien de familia.

171D’un point de vue social, l’institution était de caractère conservateur, dans la mesure où elle cherchait à renforcer une famille traditionnelle et s’appuyait moralement sur des valeurs traditionnelles : l’autorité inébranlable du père respectée par une famille aux convictions religieuses solides159.

172Cependant, on ne saurait s’arrêter à la seule qualification de « conservatrice » pour cette loi, dans la mesure où elle cherchait la protection de la petite propriété familiale (urbaine et rurale), ce qui était à l’époque inexistant dans les lois. D’où les félicitations adressées à son auteur160 et, au-delà, l’intérêt qu’elle suscita161. Les termes de López Portillo y Rojas pour la qualifier, donnent une idée de la valeur qu’on pouvait accorder dans certains milieux à la nouvelle loi :

« Cette loi, à elle seule, fera la réputation de la Chambre dont vous faites si dignement partie. Le Jalisco aura la gloire d’être le premier état à établir une loi de ce genre, non seulement sage en elle-même, mais entièrement appropriée à notre temps et aux problèmes d’aujourd’hui162. »

173Une autre loi novatrice fut celle de la représentation proportionnelle, mise en vigueur sous le gouvernement López Portillo et appliquée dans les élections législatives et municipales du mois de novembre 1912.

174Le projet de la représentation proportionnelle repose sur une mise en valeur de ce système et de ses avantages par rapport au système de représentation des majorités, jusqu’alors, théoriquement, en vigueur. La diversité de la « volonté sociale » fondait le refus du système de majorité en soulignant son défaut majeur, sa capacité de laisser en marge de la représentation sociale la moitié des électeurs moins un163.

175Ainsi, selon le rapport, le système des majorités pouvait facilement tourner à l’oppression légitimée :

« Et si les représentants d’une majorité dictent des lois ou des dispositions injustes et violent les droits d’une minorité, la majorité devient oppressive et la minorité oppressée164. »

176La qualité principale de cette initiative c’était, aux yeux de son auteur, Miguel Palomar y Vizcarra, de renforcer l’intérêt de la lutte électorale comme lieu de règlement des conflits :

« Par le biais des luttes électorales, on n’arrivera jamais à la guerre civile, si les partis en dispute sont honnêtes ; et quand bien même ils ne le seraient pas, on les verra doubler leurs efforts afin que, si aujourd’hui ils ont eu une minorité, demain ils puissent avoir la majorité165. »

177De même, cela devait pouvoir empêcher un fonctionnement tyrannique du Congrès :

« [...] il n’y aura pas dans la Chambre une partie dominante, car elle aura toujours face à elle l’opposition, la représentation de tous les éléments sociaux166 »

178Arriver à la stabilité politique et sociale et à l’exercice partagé du pouvoir par le biais de la représentation de la société dans son ensemble dans le Pouvoir Législatif, voilà qui traduit parfaitement le souci majeur de ces députés du PCN au Jalisco : conjurer la révolution, déjà déclenchée sur divers fronts dans d’autres régions du pays, en profondeur, grâce aux fruits d’une législation d’avant-garde politique et sociale.

Notes de bas de page

1 Cf. A. Knight, op. cit.. en particulier le chapitre 5 : « The Madero regime : the revolution goes on » pp. 247-387.

2 La Gaceta de Guadalajara, 12 novembre 1911.

3 Cf. A. Knight, op. cit., en particulier le chapitre « The Madero regime : 2. The liberal experiment ».

4 Cf. supra, chapitre 9.

5 Cf. à ce sujet F.-X. Guerra. México : del Antiguo Régimen... op. cit., t. I, pp. 27-52.

6 « Como cumplen con la ley los gobernantes modelo. Interpelación al Sr. gobernador provisional de Jalisco », La Libertad, 17 octobre 1911.

7 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cil., p. 111. Son affirmation, toutefois, paraît exagérée : « A partir de ces années la campagne du Jalisco devient un incendie inextinguible. »

8 La Libertad, 20 septembre 1911.

9 C’est le cas des avocats Miguel Mendoza López et Enrique Luna Roman (défenseurs de Félix C. Vera et proches de Roque Estrada et de Salvador Gómez), La Libertad. 23 septembre 1911.

10 Il s’agit d’un comité à des fins électorales, promouvant les candidatures de Madero à la Présidence de la République, de Vazquez Gómez à la Vice-présidence et de Gutierrez Allende comme gouverneur de l’état. Le comité était issu du parti Independiente.

11 La Libertad, 13 octobre 1911.

12 Voir, par exemple, l’éditorial du 17 octobre 1911.

13 La Libertad, 21 octobre 1911.

14 Dans les mois les plus répressifs de la gestion de Robles Gil (avant novembre 1911), près de 80 organisations politiques actives — sans compter les filiales du PCN — ont été recensées. Cf. annexe 7.

15 Cf. supra, chapitre 9.

16 Cf. supra, chapitre 8.

17 Cf. en général La Gaceta de Guadalajara et La Libertad de la fin juin et du mois de juillet 1911.

18 La candidature de Rodolfo Reyes perd franchement de son éclat lorsque les intentions de rébellion de son père apparaissent de façon de plus en plus claire. Après la rébellion franche du Général, son arrestation et son exil, son fils abandonne sa candidature pour le rejoindre.

19 Plus tard s’ajoutera à cette liste Luis Alatorre.

20 « El autocandidato » La Libertad, 20 octobre 1911. Cf. aussi « El autobombo político. Monomanía incurable », La Libertad, 11 octobre 1911.

21 Cf. supra, chapitres 5 et 6.

22 Cf. supra, chapitre 9.

23 I. Paz, manifeste « Al pueblo de Jalisco y a los candidatos independientes para el Gobierno de ese Estado », El Correo de Jalisco, 20 novembre 1911.

24 La Gaceta de Guadalajara, 25 juin 1911.

25 Manifiesto del Partido Liberal Jalisciense, Guadalajara, 13 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

26 « Hace falta un candidato en Jalisco ». La Gacela de Guadalajara. 14 novembre 1911.

27 La Gaceta de Guadalajara. 10 novembre 1911.

28 El Correa de Jalisco, 15 novembre 1911.

29 La Gaceta de Guadalajara, 25 novembre 1911.

30 El Correo de Jalisco, 17 novembre 1911. La Junta s’était constituée le 11 novembre.

31 Cf. La Gaceta de Guadalajara et El Correo de Jalisco, durant la deuxième quinzaine du mois de novembre 1911.

32 El Correo de Jalisco, 16 novembre 1911.

33 Ibid., 17 novembre 1911.

34 ¡Católicos, Alerta contra los Científicos de Jalisco !, imprimé signé Varios miembros del « Partido Independiente », s.d. (porte la date manuscrite décembre 1911), FMPV, caja 40, exp. 315.

35 Ibid.

36 El Correo de Jalisco, 16 novembre 1911.

37 Imprimé de propagande de la candidature de José López Portillo y Rojas par le PCN, septembre 1912. FMPV, caja 40, exp. 319.

38 Imprimé signé Varios miembros del « Partido Independiente », s.d. (porte la date manuscrite décembre 1911), FMPV, caja 40, exp. 315.

39 Ibid.

40 Manifiesto de los Partidos Antirreeleccionista Jalisciense y Constitucional Progresista, al Pueblo de Jalisco, sobre las próximas elecciones de Diputados al Congreso del Estado, 12 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

41 Ibid.

42 Ibid.

43 Tract de propagande du PCN pour les élections municipales, novembre 1911, FMPV, caja 40, exp. 316.

44 Algunas Razones, imprimé s.d. (porte la date manuscrite de janvier 1912), FMPV, caja 40, exp. 315.

45 ¡Católicos. Alerta!...

46 Algunas Razones...

47 Manuel González à Manuel Palomar y Vizcarra, Tonalá, 16 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

48 « El fanatismo en acción », El Correo de Jalisco, 16 novembre 1911.

49 J. M. Muria (dir.). Historia de Jalisco, op. cit.. t. IV, p. 218.

50 Pratiques à plus d’un égard annonciatrices de celles utilisées largement par le système politique mexicain du parti d’état instauré en 1929, qui auront, quant à elles, longue vie.

51 Cf. supra, chapitre 9.

52 Cf. A. Knight, op. cit., en particulier les chapitres 5 « The Madero regime : 1 the revolution goes on », pp. 247-387 et 6 « The Madero regime : 2 the liberal experiment », pp. 388-490 et C. C. Cumberland, Mexican revolution. Genesis..., op. cit.

53 Au Jalisco, d’une manière générale, la candidature de Pino Suárez fut répudiée par les madéristes organisés, en majorité partisans farouches de Vázquez Gómez. Pino fut hué de façon répétée pendant la tournée électorale, en dépit des efforts de Madero pour faire adopter son candidat. Les résultats des élections démontrent par ailleurs la force de ce refus, car Pino Suárez n’a obtenu de résultats significatifs qu’à Tuxpan.

54 Le huis clos sera remis à l’honneur par l’institutionnalisation de la révolution triomphante, avec la fondation du PNR par Plutarco Elias Calles en 1929. Cf. L. J. Garrido, op. cit.

55 Cf. La Libertad. 10. 1l, 18 et 20 octobre 1911.

56 Cf. supra, chapitre 5.

57 Cf. supra, chapitre 9.

58 C’est le cas de la fondation de Jalisco Libre par Cipriano C. Covarrubias pour combattre la présence de Felipe Robleda dans l’administration Curiel, cf. supra, chapitre 3, p. 119.

59 Cf. supra, pp. 118-120 et 160-166.

60 Cf. supra, chapitre 7.

61 Cf. notamment, M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit.

62 Ce « parti conservateur » du xixe n’est pas, tout comme le « parti libéral » de la même époque, un parti au sens moderne du terme, niais simplement une l’action sans structure institutionnelle.

63 Les rédacteurs de El Cruzado, hebdomadaire catholique, à Miguel Palomar y Vizcarra ; Mexico, 29 octobre 1911, FMPV, caja 40, exp. 316.

64 Cf. Introduction.

65 El Correo de Jalisco, 16 novembre 1911.

66 Partido Liberal, Al Pueblo de Jalisco, s.d., FMPV, caja 40, exp. 317.

67 Ibid.

68 Circulaire n° 1 de la Gran Logia Occidental Mexicana. Gran Oriente de Guadalajara, Jalisco, 22 février 1912. AHN, SGC, Masonería, exp. n° 233-A.

69 Cf. supra, chapitre 7.

70 Terme péjoratif né au xixe siècle pour désigner les conservateurs.

71 « Manifiesto del Centro Jalisco del PCN a los habitantes del Estado », El Regional, 31 mai 1911.

72 Manifiesto de los Partidos Antirreeleccionista Jalisciense y Constitucional Progresista, al Pueblo de Jalisco, sobre las próximas elecciones de Diputados al Congreso del Estado, Guadalajara, 12 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

73 Cf. par exemple les lettres d’Agustín Navarro Flores à Miguel Palomar y Vizcarra, FMPV, caja 40, exps. 317 et 318.

74 Cf. notamment la correspondance de ce dernier avec Miguel Palomar y Vizcarra pendant 1911, FMPV, caja 40, exps. 316 et 317.

75 Cf. d’une manière générale, les éditoriaux du mois de mai 1911 de El Regional, en particulier celui du 14.

76 Une étude remarquable des liens entre la réduction des possibilités de négociation entre différentes forces politiques et l’avènement de l’autoritarisme est celle de E. TIRONI, Pinochet. La dictature néo-libérale, Paris, CETRAL-L’Harmattan, 1987.

77 José Gutiérrez Hermosillo à Miguel Palomar y Vizcarra, Guadalajara, 3 août 1912, FMPV, caja 40, exp. 319.

78 Ibid.

79 Ibid.

80 Ibid.

81 Ibid.

82 Ibid, souligné dans l’original.

83 Manifiesto de los Partidos Antirreeleccionista Jalisciense y Constitucional Progresista, al Pueblo de Jalisco, sobre las próximas elecciones de Diputados al Congreso del Estado, 12 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

84 J. Palomar y Vizcarra à Miguel Palomar y Vizcarra, par l’intermédiaire de Ramón Martínez, Guadalajara, 5 avril 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

85 « Candidatura para diputados », tract daté du 16 novembre 1911, FMPV, caja 40, exp. 318. Il faut préciser que, dans la liste de ceux qui ont été effectivement élus, quelques noms ont changé. Du côté des titulaires, les noms de Miguel Suárez del Real, Javier Verea et Pascual M. Toral (les deux derniers prévus initialement comme suppléants) se substituent à ceux de Miguel Campos Kunhardt, Aurelio López et Leonardo Mendoza. A la liste originale des suppléants s’ajoutent les noms de Antonio Ayala Ríos, Enrique Arriola, et Salvador E. Ochoa et disparaissent définitivement ceux de Luis B. de la Mora et Jesús Camarena. J. M. Muria (dir.), Historia de Jalisco, op. cit., t. IV, p. 218. Avec Campos Kunhardt et Camarena, la liste perd deux de ses éléments libéraux les plus notoires.

86 Algunas Razones..., cit.

87 Une situation semblable se présente à Veracruz, où le PCN passe une alliance avec les anciens cientίficos. K. B. Koth. « Madero, Dehesa y el cientificismo : el problema de la sucesión gubernamental en Veracruz, 1911-1913 », Historia Mexicana n° 182, vol. XLVI, oct.-déc. 1996, pp. 397-424.

88 Guadalupe Gutiérrez à Miguel Palomar y Vizcarra. Acatic, 31 mars 1912, FMPV, caja 40, exp. 318.

89 La Gaceta de Guadalajara, 14 novembre 1911.

90 Initiative de convocation aux élections extraordinaires de gouverneur, 15 avril 1912, dactylographié, FMPV. caja 40, exp. 317.

91 Ibid.

92 La procédure constitutionnelle normale voudrait que toute initiative de cet ordre émanant du Congrès passe ensuite par le gouverneur et, une fois approuvée par celui-ci, revienne au Congrès afin d’être promulguée.

93 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit., p. 167.

94 « Franco » à Miguel Palomar y Vizcarra, Guadalajara, 21 avril 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

95 FMPV, caja 40, exp. 317.

96 Partido Liberal, Al Pueblo de Jalisco, s.d., FMPV, caja 40, exp. 317.

97 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden.... op. cit., pp. 166-167.

98 [Illisible] à Miguel Palomar y Vizcarra, 19 avril 1911, et A. Navarro Flores à Miguel Palomar y Vizcarra. Guadalajara, 30 avril 1912, FMPV. caja 40, exp. 317.

99 « Franco » à Miguel Palomar y Vizcarra, Guadalajara, 30 avril 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

100 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit.. p. 167.

101 Cf. FMPV, caja 40. exps. 317 et 318.

102 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit., p. 157.

103 Cf. A. Knight, op. cit., en particulier le chapitre « The Madero regime : 2 The liberal experiment ».

104 José López Portillo . Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra et Alfredo Morfín Silva, Mexico, 7 mai 1912, FMPV, caja 40, exp. 318.

105 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit., p. 167.

106 J. Palomar y Vizcarra Miguel à Palomar y Vizcarra, par l’intermédiaire de Ramón Martínez, Guadalajara, 5 avril 1912, FMPV, caja 40, exp. 317 et « Juan N.F. sin miedo » [pseudonyme de A. Navarro Flores] à Miguel Palomar y Vizcarra, Guadalajara, 26 avril 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

107 Agustín Navarro Flores à Miguel Palomar y Vizcarra, Guadalajara, 9 mai 1912, FMPV, caja 40, exp. 318.

108 Manifiesto del Centro Nacional al PCN y a todo el Pueblo mexicano (signé Gabriel Fernández Somellera), 5 février 1912, FMPV, caja 40. exp. 317.

109 Cf. J. D. Cockcroft, op. cit., John Masón Hart, op. cit. et Salvador Hernandez, op. cit.

110 Manifiesto del Centro Nacional...

111 Ibid.

112 Ibid.

113 Ibid.

114 Ibid.

115 Manuel M. González á Miguel Palomar y Vizcarra, Tonalá, 13 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

116 Manifiesto del Centro Nacional...

117 A. Rodriguez kuri, op. cit.. p. 717.

118 Manifiesto de los Partidos Antirreeleccionista Jalisciense y Constitucional Progresista, al Pueblo de Jalisco, sobre las próximas elecciones de Diputados al Congreso del Estado, 12 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

119 Cf. P. Valles, op. cit.

120 Manuel M. González à Miguel Palomar y Vizcarra, Tonalá, 16 février 1912, FMPV, caja 40, exp. 317.

121 Manifiesto de los Partidos Antirreeleccionista y Constitucional Progresista...

122 Ibid.

123 Manifiesto del Comité Ejecutivo Electoral Allendista al pueblo de Jalisco, 11 février 1912. FMPV, caja 40, exp. 317.

124 Amulfo R. Castro, S.J. à Miguel Palomar y Vizcarra, Ore Place, Hastings, England, 11 novembre 1911, FMPV, caja 40, exp. 316.

125 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden., op. cit., p. 172.

126 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 10 août 1912, FMPV. caja 40, exp. 319.

127 Ibid

128 « La tension de mon esprit a été constante depuis plus d’un an et je sens mes forces épuisées ». José Lôpez Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra. Mexico. 29 juin 1912, FMPV, caja 40, exp. 318. « Manuel Cuesta — rapporte de Mexico José López Pórtillo y Rojas — est en train de répandre dans cette ville [la nouvelle] qu’il n’y aura pas de convocation aux élections de Gouverneur, car la Chambre des députés en a décidé ainsi, en accord avec les allendistas », ibid.

129 Ainsi, lorsque Villaseñor fait un voyage à la capitale. López Portillo s’empresse de contacter le ministre des affaires étrangères — Lascuráin — dont il est proche, « je lui ai communiqué nos soupçons que ledit chef soit venu pour faire de la politique trouble et roblesgilista » ; puis le ministre de l’intérieur — Flores Magón — dont il demandait l’aide pour garantir le soutien des forces fédérales aux députés le jour où serait discutée la célèbre convocation. José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 19 août 1912, FMPV, caja 40, exp. 319. Par ailleurs, les liens d’amitié qui unissaient Villasenor à Robles Gil sont confirmés par le discours du libéral Luis Manuel Rojas à la chambre nationale des députés le 25 octobre 1912 : « Le chef de zone [militaire] était un ami intime du gouverneur. M. Alberto Robles Gil. qui vient de quitter le pouvoir [...] », cité dans D. Arenas Guzman, op. cit., t. IV, p. 194.

130 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 20 août 1912, FMPV, caja 40, exp. 319.

131 Ibid.

132 M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit., pp. 172-175.

133 López Portillo — dont on ne peut pas dire qu’il ait jamais été madériste — ne semble pas avoir joué un rôle essentiel auprès du président ; ses contacts dans le cabinet présidentiel se faisaient par le biais du ministre des Affaires étrangères, Pedro Lascuráin, lui même très peu madériste sinon pas du tout, et ses demandes formelles d’aide au gouvernement fédéral passaient par le ministre de Gobernación, Flores Magón. Cf. José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 19 août 1912, FMPV, caja 40, exp. 319, et Carlos F. de Landero à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico 28 juin 1912, FMPV, caja 40.

134 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 20 août 1912, FMPV, caja 4, exp. 319.

135 Au point de passer un accord avec le général Reyes et de l’inviter à faire partie de son cabinet : le 12 septembre 1911, en présence du président provisoire de la République, F. León de la Barra, les représentants de Madero et de Reyes signent un engagement pour la démocratie. Les documents se conservent à l’ABR-Condumex.

136 Il ne semble pas, en effet, que López Portillo ait été en contact avec les nouveaux reyistes ni en 1911, ni en 1913. Les archives Bernardo Reyes ne conservent aucune trace de correspondance entre López Portillo et le général à partir de 1909. alors qu’il y en a, abondante, pour le mouvement de 1909 (cf. supra, chap. 5 et 6). Côté civil, en 1913, l’organisation des reyistes est sous la direction de F. Fspinoza de los Monteros. Par ailleurs, ce soutien semble lié davantage à des secteurs de la franc-maçonnerie, dont López Portillo ne faisait pas partie. Cf. El Gran Campamento Templario de los Estados Unidos Mexicanos invita a la Gran Tenida Blanca en memoria de B.R., que tendrá lugar el 22 del mismo. 18 avril 1913. Mexico, D.F., ABR-Condumex.

137 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, México, 6 juillet 1912, FMPV, caja 40, exp. 318.

138 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra. México, 2 septembre 1912, FMPV. caja 40, exp. 319.

139 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 11 septembre 1912, FMPV, caja 40, exp. 319.

140 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 6 septembre 1912 (cf. aussi sa lettre du 11 septembre), FMPV, caja 40, exp. 319. López Portillo n’était pas le seul candidat à s’intéresser à un tel projet ; comme l’écrivait E. Luna Román au même Palomar, « M. Gómez [Salvador] a incidemment parlé avec le Président de la loi de représentation proportionnelle, et M. Madero s’est montré en parfait accord avec le projet. » Lettre confidentielle de E.L.R. [Enrique Luna Román] à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 14 septembre 1912.

141 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 2 septembre 1912, FMPV, caja 40, exp. 319.

142 « Programa de Gobierno del Lic. López Portillo y Rojas » La Gaceta de Guadalajara, 14 juillet 1911.

143 Cf. supra, chapitre 2.

144 Par le terme enganchadores, on désignait des agents recruteurs de main d’oeuvre paysanne, au service de grands propriétaires et exploitants. Le système se caractérisait par le leurre et par le fait que les travailleurs ainsi recrutés (les enganchados) étaient en général destinés à des exploitations agricoles lointaines, d’où ils ne revenaient que très rarement.

145 Il convient de rappeler à ce sujet que l’état avait perdu, avec le territoire de Tepic, le contrôle du port de San Blas. dernier port à douane internationale, dont les bénéfices alimentaient les caisses de l’état, après la perte de celui de Manzanillo. Cf. supra, chapitre 1.

146 Il convient de préciser que sur ce dernier point, les militants du PCN au Jalisco n’affichaient pas publiquement une position, mais implicitement, la présence d’autres confessions était mal perçue.

147 J. M. Muria (dir.j, Historia de Jalisco, op. cit. t. IV, p. 219 et M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit., p. 172.

148 Sectarisme au sens strict du terme, c’est-à-dire aussi bien au sein des groupes anti-cléricaux que de leurs pendants anti-libéraux et non pas seulement dans le sens employé couramment à l’époque dans les milieux catholiques, qui désignait exclusivement les « jacobins ».

149 La Libertad, 15 octobre 1912, cité dans M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit., p. 178.

150 Luis [B. de la Mora ?] à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 11 octobre 1912, FMPV, caja 40, exp. 319.

151 Circulaire de Nicolas Leano. président du Comité Ejecutivo Electoral du PCN. Guadalajara. Aux dirigeants des Centras Catôlicos, 3 0 octobre 1912. FMPV, caja 4 0 . exp. 3 1 9 .

152 Des difficultés suffisamment importantes pour compromettre la collaboration politique entre Lopez Portillo et le PCN ne se manifestent qu’entre mai et juillet 1913, bien après l’écroulement du gouvernement madenste et à un moment où. fortement influencé par l’arrivée à l’archidiocèse de Guadalajara d’un nouvel archevêque, Francisco Orozco y Jiménez, le PCN accentue son confessionalisme et devient plus agressif et sectaire. Cf. M. Aldana Rendon, Del reyismo al nuevo orden..., op. cit.. pp. 187-189.

153 Cf. J. A. Rosales Saldaña et R. E. Partida Rocha, La contrarrevolución en Jalisco : el Partido Católico Nacional 1911-1914, tesis de licenciatura Universidad de Guadalajara, Facultad de Filosofía y Letras, juin 1986, ex. dactylographié.

154 « Diario de debates de la Cámara de Diputados », BCEJ, libro 99, folio 279, séance du 29 octobre 1912.

155 « Decreto n° 1481 del Congreso del Estado, Ley sobre "Bien de Familia" », Guadalajara, 16 octobre 1912. Le décret a été approuvé par le gouverneur le 24 octobre 1912. FMPV, caja 40, exp. 318.

156 « [...] il a été dit de façon formelle, dans le projet de loi, que la loi aurait pour objectif de suivre les normes indiquées par Le Play [...] ». Commentaire sur le Bien de Familia (fragment d’un brouillon) probablement de la main de Miguel Palomar y Vizcarra et vraisemblablement destiné à être publié, s.d., FMPV, caja 40, exp. 318.

157 « M. Chávez, dans son rapport, signala que la seule façon d’atteindre, pleinement et de façon satisfaisante, les objectifs du bien de familia, aurait été de retirer complètement au fondateur la propriété du domaine sur lequel on aurait érigé [le bien de familia]. et de la donner à la famille, en la revêtant, pour ce faire, d’une personnalité morale et juridique, distincte des membres qui la composent. » lbid.

158 F. Arnault, Frédéric Le Play. De la métallurgie à la science sociale, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1993. Il est probable que l’auteur de l’initiative, le député Palomar y Vizcarra, ait connu les idées des Leplaysiens, mais qu’il ne les ait pas partagées.

159 Commentaire sur le Bien de Familia...

160 Parmi les félicitations. F. León de la Barra à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico. 7 juin 1912. Et José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra. Mexico, 24 juin 1912, FMPV, caja 40, exp. 318.

161 Il est clair en tout cas que l’initiative fut largement diffusée au sein du PCN. Cf. lettre de Arrieta V [izcaíno] à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 5 novembre 1912, où il demande que d’autres exemplaires du Bien de Familia lui soient envoyés, car nombreux sont ceux qui le lui demandent. FMPV, caja 40, exp. 320.

162 José López Portillo y Rojas à Miguel Palomar y Vizcarra, Mexico, 24 juin 1912, FMPV, caja 40, exp. 318.

163 « Diario de debates de la Cámara de Diputados », séance du 27 septembre 1912. BCEJ.

164 Ibid.

165 Ibid.

166 Ibid.

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