Chapitre 1. Diversité régionale et intégration politique
p. 13-45
Texte intégral
1. Les blessures géopolitiques de l’identité
1.1. Frontières et fractures
1Situé au cœur de l’Occident mexicain, entre 18°58’ 00” et 22°45’ 00” de latitude nord et entre 101°28’ 15” et 105°43’ 16” de longitude ouest, le Jalisco s’étend au début du xxe siècle sur environ 86750 km2. Il a pour voisins au nord, les états de Durango, Zacatecas et Aguascalientes ; à l’est ceux de Gua-najuato et San Luis Potosí ; au sud ceux de Michoacán et de Colima et à l’ouest, le territoire de Tepic — l’actuel état de Nayarit — et l’océan Pacifique1.
2Principal héritier politique du royaume colonial de la Nouvelle Galice, le Jalisco du Mexique indépendant se voit confronté à la séparation, au cas par cas, des états de Zacatecas et Colima (1824) et du territoire de Tepic (1867), séparation perçue dans les milieux politiques comme une mutilation inadmissible du corps de l’état.
3Si la constitution du Zacatecas en « état libre et souverain » dès 1824 apparaît logique dans le cadre de la signature du pacte fédéral au lendemain de l’indépendance, celles plus tardives du Colima (1857) et du Nayarit (1917) sont beaucoup plus douloureuses dans la mesure où elles rognent le pouvoir de Gua-dalajara, deuxième ville du Mexique, dans le contexte de la nouvelle nation qui restructure le rapport de forces entre ses composantes.
4En dehors des conséquences symboliques qu’implique une telle réduction de leur aire officielle d’influence, les élites de Guadalajara perdent le contrôle de ressources de premier ordre, issues des deux ports internationaux avec douane que le Jalisco avait sur le Pacifique : Manzanillo (passé sous la juridiction du Colima) et San Blas (dans l’ancien canton de Tepic).
5Toutefois, même si la séparation du Colima représente une mutilation importante du territoire qui se prolonge en litiges autour de la définition des frontières2, c’est celle du canton de Tepic, dans la seconde moitié du xixe siècle, qui prend les dimensions symboliques les plus importantes.
6En effet, en 1867 ledit canton devint un district militaire sous contrôle direct du gouvernement fédéral3. La séparation du Tepic fut ainsi la plus bruyante de toutes et suscita un long litige dont le point culminant fut la non-reconnaissance du nouveau territoire fédéral par la Chambre des Députés du Jalisco en 1884. La blessure mit si longtemps à cicatriser que, pendant presque trente ans, la création de plusieurs nouveaux cantones ne vint pas combler le vide laissé par le 7e dans la structure cantonale de l’état qui garda ainsi une sorte de case vide, témoignage de cette ablation, jusqu’au 30 décembre 1896, date à laquelle, lors de la création du cantón de Chapala, on attribua enfin à celui-ci le numéro 7.
7De toute évidence, au début du xxe siècle, Jalisco est ce qui reste d’une puissance régionale émiettée qui garde encore un souvenir douloureux de ces événements4 et qui associe étroitement l’émiettement de sa puissance aux interventions de l’état central.
8Le caractère imprécis des frontières explique pourquoi les sources les plus officielles qui soient, le recensement de 1900 fait par la Dirección General de Estadística5 et la carte dressée en 1908 par l’ingénieur Agustín V. Pascal6 diffèrent dans leur estimation de la surface de l’état : la première signale 86752 km2 et la seconde 86 7447. Par ailleurs, sous la formule « Le territoire représenté en sépia appartient au Jalisco, mais est en possession du Territoire de Tepic », la carte de Pascal consigne explicitement un différend important.
1.2. Entre particularismes et unité
9Sur cette surface coexistent des régions géographiquement très différentes, diversité de la nature qui est à l’origine, sans en être l’unique cause, d’un développement économique et démographique inégal8.
10Des histoires différentes ont eu lieu sur le territoire de l’actuel Jalisco, qui parlent chacune d’un rythme de peuplement particulier, d’une relation spécifique à la terre et aux ressources naturelles, de la qualité de la terre elle-même, des possibilités de survie, liées aussi bien à la nature qu’à l’histoire ; des ponts tendus vers l’extérieur avec plus ou moins de succès. Aux rythmes régionaux particuliers correspondent un degré et une forme d’intégration variables au rythme d’ensemble.
11Il ne s’agit pas ici de faire un vaste tableau de ces histoires régionales qui, d’ailleurs, sont encore peu et différemment explorées9 et qui, souvent, s’éten dent au-delà du territoire du Jalisco, mais seulement de tracer un panorama succinct qui permette de mieux comprendre et de situer les particularités d’une culture politique elle-même diverse.
12Par ailleurs, l’historien est obligé d’étudier ces régions historiquement définies en croisant leur réalité avec celle, conjoncturelle et souvent arbitraire, des divers découpages administratifs qui traversent le temps et les sources.
13La division interne des états mexicains a un parcours historique accidenté, qui reflète bien les va et vient politiques de l’état au long du xixe siècle10. Pendant le porfiriat, cette structure ne subira plus de grands changements, témoignant ainsi de la stabilité atteinte.
14Au Jalisco, la division qui finira par s’imposer établit des unités assez vastes appelées cantones11. Elle reprend la terminologie et, dans une certaine mesure, les critères employés déjà en 1824 lors d’une première subdivision du naissant état du Jalisco12. En 1908, le territoire de l’état est divisé en douze cantones (cf. tableau 1).
15Selon le recensement effectué en 1900, Jalisco comptait 1 137 311 habitants, dont 570 384 femmes et 566 927 hommes. Ce chiffre représente environ 8,40 % de la population totale du Mexique qui était, à ce moment, de 13 545 462 habitants13. Pour 1910, la composition de la population de l’état était de 618 130 femmes et 584672 hommes, soit 1 202802 habitants14. Il s’agit d’une population jeune — comme dans le reste du pays — et relativement homogène tant d’un point de vue ethnique que linguistique15 dans cette région du Mexique qui était, avant la conquête, faiblement peuplée et qui fut une des plus rapidement hispanisées16. A cet égard, le Jalisco n’est nullement comparable à des états comme Oaxaca, Chiapas ou le Yucatán dont une partie très importante de la population parle au quotidien une langue amérindienne17
16La majorité de la population se concentre dans la partie orientale de l’état, la plus proche du centre du pays, où 3 cantones — Guadalajara, Zapotlán et La Barca — réunissent 46,18 % de la population. Ces cantones comptent plus de 100 000 habitants chacun, Guadalajara dépassant les 200000. En revanche, près de la côte et dans le nord, les agglomérations se font rares.
17Des raisons de caractère géographique expliquent en premier lieu ce phénomène, la Sierra Madre occidentale constituant une barrière naturelle d’importance capitale qui a arrêté les flux de population vers l’ouest18. L’importance de cette frontière naturelle est perceptible depuis l’époque précolombienne et le territoire pris en considération ici est placé à la limite nord de ce que Paul Kirchoff a nommé la Mésoamérique19, avec, justement, pour frontière, la Sierra Madre Occidentale et les reliefs accidentés qui l’entourent.
18Ainsi, le peuplement des territoires au-delà de cette limite naturelle connut un rythme plus lent. Le côté oriental de l’actuel Jalisco est une zone régulièrement habitée depuis l’époque précolombienne, même si elle n’abritait pas des cultures d’une grande puissance. Par contre, le côté nord-ouest fut peuplé petit à petit et les territoires au-delà de la Sierra étaient sous le contrôle de peuples nomades couramment appelés Chichimèques20.
19L’entreprise espagnole de peuplement buta elle aussi sur ce relief d’envergure et aux conséquences du rythme précolombien de peuplement lui-même. Les vicissitudes de la fondation de Guadalajara au début du xvie siècle annonçaient à quel point il serait difficile de peupler d’une façon régulière le territoire de l’autre côté de la Sierra. L’anecdote de Guadalajara la transhumante illustre fort bien comment la géographie et le peuplement initial allaient déterminer en bonne part la dynamique de la colonisation (dans le sens le plus large du terme) de ces régions21.
20Il n’y a pas de place ici pour faire une histoire détaillée du peuplement du Jalisco, mais cet élément fondamental — dont les conséquences se font sentir à travers les siècles — explique en partie les façons particulières dont les diverses régions ont rejoint la dynamique générale de la vie économique et politique de l’état.
1.3. Une capitale hypertrophiée
21Dans le cas du Jalisco, la concentration de pouvoir dans la capitale, Guadalajara, est un phénomène essentiel pour la compréhension de la vie politique de l’ensemble de l’état. La ville, deuxième en importance dans le pays, concentre à la fin du xixe siècle 18,2 % de la population totale de l’état22 ; en 1900, cette concentration est déjà de l’ordre de 26 %23.
22Plus que la concentration démographique, c’est celle des moyens économiques, politiques et culturels qui fait de Guadalajara le centre de décisions d’une vaste région24. Ces moyens sont aussi bien des capitaux qu’une activité culturelle importante, de même que l’existence d’une élite politique influente à échelle nationale.
23Cette élite a été particulièrement forte dans les années de la victoire libérale après la guerre d’intervention française et dans les premières années du porfiriat, avec des « clans » politiques formés autour de personnalités d’envergure nationale, comme Ignacio L. Vallarta, Pedro Ogazón et Ramón Corona.
24Avec la disparition de ces figures (leur assassinat, dans le cas de Corona) et la déstructuration de leurs groupes, l’influence du Jalisco dans la politique nationale se vit considérablement réduite. Le déclin de sa force correspond au renforcement du pouvoir national et à l’assujettissement parallèle des pouvoirs régionaux trop indépendants, une des stratégies politiques qui réussit le mieux à Porfirio Díaz.
25La fierté blessée des élites jaliscienses et leur désir de récupérer l’influence perdue expliquent en partie leur adhésion, vers la fin du porfiriat, à certains mouvements opposés à la politique centrale quoique bien identifiés à l’ordre social dominant, tels le reyisme et le catholicisme social.
26Quoiqu’il en soit, le xxe siècle arrivé, les élites du Jalisco constituent des forces plutôt marginalisées des hautes sphères de la politique nationale tout en conservant un pouvoir régional considérable. Ce pouvoir, concentré à Guadalajara en dépit de l’existence dans l’état de quelques villes moyennes, exerce son influence sur tout l’ouest du pays, c’est-à-dire, bien au-delà des frontières de l’état du Jalisco.
27On ne saurait cependant ignorer ces villes moyennes — en général des chefs-lieux de cantones — qui constituent des centres régionaux de pouvoir et connaissent aussi le phénomène de la concentration urbaine. Ce processus, qu’on aurait tendance à négliger, vue l’ampleur de la croissance de Guadalajara, permet cependant de comprendre l’urbanisation de l’état dans une perspective d’ensemble.
28Au début du siècle, seulement quatorze localités du Jalisco franchissaient, selon des rythmes inégaux d’urbanisation, le seuil des 5 000 habitants (cf. tableau 4). La population concentrée dans ces agglomérations représente 18,33 % de la population totale de l’état.
29D’autre part, hormis le cas de Guadalajara, dans lequel la totalité de la population est urbaine, les localités les plus importantes de l’état n’ont pas encore absorbé la plupart de la population de leur juridiction municipale et celles-ci restent majoritairement rurales. Seulement dans deux cas les chiffres témoignent d’une urbanisation prépondérante sur le territoire municipal : Ciudad Guzmán qui, avec 17 596 habitants, concentre 89 % des habitants de la municipalité et Sayula qui réunit 7 888 habitants, soit 68 % du total municipal.
30Le processus d’urbanisation donne déjà une idée de la diversité des rythmes de vie à l’intérieur du Jalisco. Ainsi, le troisième canton (La Barca), sur la rive du lac de Chapala et sur le chemin de Guadalajara à Mexico, réunit un nombre important de ces villes (4 sur 14).
31Dans deux cantones — Ameca et Ahualulco25 —, deux villes — Ameca et Cocula, Ahualulco et Etzatlán — se disputent le contrôle économique d’une zone et le caractère de chef-lieu de cantón, expression politique de ce pouvoir. Dans les deux cas, la reconnaissance officielle de ce pouvoir bascula de l’une à l’autre pendant le siècle dernier26.
32Il est significatif, finalement, que trois cantones, — Chapala, Colotlán et Mascota —, dont les localités les plus importantes dépassent à peine 4000 habitants, ne soient pas représentés dans cet ensemble.
33La démesure de la concentration démographique à Guadalajara est un élément représentatif de la disproportion existante dans tous les autres domaines entre la capitale de l’état et le reste des localités. Forte densité démographique, pouvoir économique, quasi monopole de la production culturelle, caractéristiques qui, toutes, font de Guadalajara, depuis la période coloniale, un lieu de pouvoir très concentré27. La capitale détient, en effet, le pouvoir politique, puisque la ville est le siège des Pouvoirs constitutionnels de l’état. Elle concentre aussi le pouvoir économique : les banques actives dans l’état, tout comme les grandes maisons commerciales, y ont, bien entendu, leur siège28. Les hacendados les plus puissants ont souvent un pied dans la capitale, et font partie de cette quasi-aristocratie tapatía29 qui donne matière aux pages « de société » des journaux. Guadalajara est omniprésente dans la production de biens culturels (elle concentre la grande majorité de la presse et des établissements scolaires et elle monopolise l’éducation supérieure) et de culture politique. Elle est donc, incontestablement, le centre du pouvoir du Jalisco, ce qui fait de cet état — l’un des plus engagés historiquement dans la lutte pour le fédéralisme30 —, paradoxalement, l’un des plus centralisés dans son fonctionnement interne.
34De cette façon, l’expansion d’une culture urbaine qui est surtout celle de l’opinion publique dans son sens moderne — avec ses « institutions », la lecture, la presse, une certaine forme de scolarité — est un phénomène dominé par la dynamique qu’impose Guadalajara. Cependant, même si le lien entre l’urbanisation et la culture politique moderne peut paraître incontestable, et même si le rythme de modernisation de la culture est en bonne mesure celui de l’urbanisation, on ne saurait placer sans nuances le moderne côté ville et le traditionnel côté campagne. D’autres éléments sont à prendre en compte pour une question aussi complexe.
2. Des espaces hétérogènes
35En empruntant ses termes à la géographie humaine, la notion de territoire, définie comme « un espace marqué par les créations et vécus humains à un moment de l’histoire »31, et — ajoute Jean Revel-Mouroz — « surtout un espace approprié »32, convient tout à fait à la caractérisation du Jalisco porfi-rien, pourvu qu’on lui adjoigne celle de marge. En effet, à cette époque, l’espace du Jalisco est aussi intensément territoire que marge ; territoire pour ce qui est des régions Centre, Ciénega de Chapala, Los Altos et Sud ; marge en ce qui concerne le Nord et la Côte.
2.1. Le territoire
36La région qui a imposé son hégémonie à l’ensemble du Jalisco est celle que l’on appelle couramment et sans originalité le Centre, dominée elle-même par la présence de Guadalajara. En effet, la région a dû se soumettre aux besoins de la capitale de l’état en tant que centre politique, en tant que marché et en tant que centre urbain.
37Cependant, la division de la région Centre en deux sous-régions tient autant à l’influence exercée par Guadalajara sur les municipalités qui lui sont géo-graphiquement les plus proches, qu’à l’existence d’un pôle économique autour de la ville d’Ameca, défini par l’importance de la production agricole et minière des cantones d’Ahualulco, Ameca et une partie de celui de Mascota.
38La sous-région d’Ameca, située à l’ouest de Guadalajara, était riche et régulièrement exploitée, avec des enclaves particulièrement dynamiques comme la zone de Tequila, dans le cantón d’Ahualulco. Ici, le développement de l’industrie agricole, permis par des investissements en majorité sinon totalement locaux33, fut relativement rapide et les industriels-hacendados réussirent à avoir une ligne ferroviaire les reliant à Guadalajara, ligne qui était contrôlée par la compagnie Southern Pacific34. Ce n’est en effet pas un hasard si le train de Ameca est une ligne qui fonctionne régulièrement en reliant le chef-lieu du cantón à Guadalajara.
39Dans la ville de Tequila et la campagne environnante, s’organisait une des industries les plus importantes de l’état à l’époque (et même de nos jours), celle du vino mezcal, connu actuellement tout simplement comme Tequila35. Le succès économique permit à des familles d’hacendados-industriels du vino mezcal — comme les Sauza et les Cuervo — d’être proches du pouvoir à l’échelle de l’état à partir du dernier tiers du xixe siècle et de faire partie de l’élite politique.
40L’autre aspect caractéristique de l’économie de cette sous-région est une tradition minière ancienne, en particulier pour le district36 d’Etzatlán, dans lequel au moins 20 compagnies avaient investi vers la fin du porfiriat37 ; parmi elles, la Amparo Mining Company, une des plus grandes compagnies actives dans l’état et la première à connaître des conflits ouvriers d’importance.
41À propos d’Ameca, Vitold de Szyszlo nous a laissé un témoignage qui résume le partage de la sous-région entre agriculture et exploitations minières :
« C’est dans sa partie sud-ouest que l’état du Jalisco offre le plus d’intérêt pratique et promet avec le plus d’évidence un rapide développement économique et culturel. Le district de Ameca produit de la canne à sucre, du riz, de l’or et du cuivre, qu’on commence à exploiter38. »
42De ce même partage, tout comme de l’évolution économique de cette zone, témoigne également la dispute entre les villes d’Ameca et Cocula pour la suprématie politique et administrative dans le 5e cantón. Toutes les deux ayant une production agricole considérable, c’est peut-être l’essor minier de la première qui décida de leur sort à la fin du xixe siècle.
43Une région à grand dynamisme économique et humain et à forte concentration de population est celle de La Ciénega de Chapala, comprenant les localités situées autour du lac de ce nom, dont certaines font partie de l’état voisin du Michoacán ; la région de la Ciénega, dont la tête est la ville de La Barca, dépasse ainsi les limites du Jalisco.
44Le développement de La Barca se comprend surtout par son emplacement géographique, au bord du lac de Chapala, mais aussi sur le chemin de Gua-dalajara à Mexico39. A la fin du porfiriat, l’activité commerciale autour du lac s’effectuait selon une ancienne pratique qui nous paraîtrait aujourd’hui invraisemblable au vu de l’état actuel de dégradation du lac de Chapala :
« De grandes barques déchargent des céréales, des plantes fourragères, des melons, des courges, des pois chiches et des frijoles [haricots], provenant des haciendas importantes, établies dans cette partie du Jalisco, qui s’adonnent à l’agriculture et à l’élevage du bétail40. »
45Plus ou moins modernisées, toutes les agglomérations situées autour du Cha-pala communiquaient entre elles par le lac, depuis sans doute des siècles, les rives de ce lac étant une des premières zones peuplées de l’Occident mexicain41.
46La région de la Ciénega partageait avec celle du Centre (en particulier avec la sous-région de Guadalajara) la caractéristique de compter avec un équipement agricole moderne42. Un des grands hacendados modernisateurs était Manuel Cuesta Gallardo, propriétaire de l’hacienda de Briseñas et de la Cia. Hidroeléctrica e Irrigadora del Chapala ; son influence politique l’amena brièvement au gouvernement de l’état en mai 1911.
47Les cantones de Lagos et de Teocaltiche et une partie importante de celui de La Barca se regroupent dans la région connue comme Los Altos, qui touche aussi, par Yahualica, à celui de Guadalajara. Los Altos bénéficie de liaisons efficaces tant avec Guadalajara qu’avec plusieurs villes du Bajío mexicain, dont elle fait partie, et avec Mexico même. Sa production agricole s’écoule ainsi aisément en dehors du marché régional43
48Dans cette région densément peuplée, où certaines agglomérations — telles Teocaltiche et Encarnación de Díaz — commencent à prendre de l’ampleur, la ville de Lagos de Moreno joue un rôle de capitale régionale, administrative, politique et culturelle. Los Altos est traditionnellement un lieu de passage : à sa position géographique, s’ajoute le magnétisme de la ville de San Juan de los Lagos, un des grands sites de pèlerinage du catholicisme mexicain depuis les temps coloniaux, et de ce fait un point d’échanges commerciaux pour un territoire bien plus étendu que Los Altos même44. San Juan de los Lagos est ainsi devenu la scène d’un événement religieux et commercial de premier ordre, qui a perduré à travers les siècles45, pèlerinage et foire existant encore de nos jours.
49A ces éléments, il faut ajouter l’importance majeure, aussi bien en termes économiques que culturels, du régime de propriété de la terre, caractérisé par la prédominance d’une propriété privée de dimensions plutôt réduites (la « petite propriété ») et, avec une division du travail fondée sur les rapports familiaux, un des éléments principaux de l’économie ranchera de la région46.
50Il y eut, certes, de grandes haciendas dans la région de Los Altos, pendant la période coloniale ; cependant, pour la plupart, elles subirent un processus d’émiettement, en particulier à cause du système d’héritage prédominant, dans lequel l’institution du majorat était absente, et qui impliquait le partage de la propriété entre tous les membres de la famille y compris les femmes. Il faut toutefois mentionner les haciendas de Santa Ana Apacueco, Jalpa et Ciénega de Mata, parmi les plus importantes47, propriétés qui comprenaient une partie de la région de Los Altos de Jalisco, mais qui s’étendaient sur plusieurs états. Parmi les rares majorais, on peut citer celui de Milpillas qui comprenait l’actuel municipe de Atotonilco et des parties de ceux de Tepatitlán, Tototlán et Arandas48. Il faut mentionner sans doute aussi celui de la célèbre hacienda de Ciénega de Mata, immense propriété de la famille Rincón Gallardo dans le Bajío, dont une partie se trouvait dans l’état du Jalisco, dans la municipalité de Lagos de Moreno49. Par ailleurs, sauf dans le cas de Ciénega de Mata, les grandes haciendas n’ont pas eu au long de leur histoire un seul même propriétaire, mais furent vendues plusieurs fois.
51D’autre part, le système de métayage pour le travail des terres, qui permit la colonisation de la région, fut lui-même un facteur déterminant de la constitution de propriétés de petites et moyennes dimensions. En effet, Los Altos est une région qui a constamment reçu des vagues migratoires ; les nouveaux venus s’installaient comme métayers sur les terres souvent non exploitées des grands propriétaires. Au lendemain de l’indépendance, certains d’entre eux, aidés par leurs activités dans le commerce en tant que muletiers, ont eu la possibilité d’acquérir les parcelles louées et de devenir propriétaires à leur tour, à un moment où les haciendas, affrontant des difficultés économiques majeures, ont dû être vendues. Ceci a fait apparaître un nombre considérable de petits propriétaires à la prospérité relative et dont la préoccupation fut, plutôt que l’accumulation de terres, l’amélioration de la production.
52Ainsi, c’est surtout au xixe siècle que le système de propriété actuel de Los Altos s’est formé. C’est ce même système de propriété de la terre qui permit alors la formation de groupes de pouvoir qui, dans certains cas, perdurent encore50.
53Vers la fin du porfiriat, une myriade de petites propriétés (autour d’un hectare) coexistait avec quelques propriétés assez vastes (dont les plus grandes d’environ 30000 ha) situées plutôt dans la périphérie de Los Altos.
54Par ailleurs, le fait que la région abrite à l’époque peu de communautés indiennes, généralement victimes de l’expansionnisme des haciendas, élimine une source importante de conflits pour la possession et l’usufruit de la terre51. En effet, la façon dont la région a été colonisée, par vagues successives d’immigrants devenus métayers, avait fini par chasser — non sans peine — la population indigène d’origine, semi-nomade pour la plupart52
55Ces trois facteurs — son caractère de lieu de passage commercial et religieux, le régime de propriété de la terre où la productivité prime sur l’extension et l’absence de conflits sociaux aigus — ont fait de Los Altos une région économiquement très dynamique et plutôt stable socialement pendant le porfiriat.
56La région Sud, qui comprend les cantones de Sayula et Zapotlán et deux municipes du canton de Chapala (Tizapán el Alto et Tuxcueca), est une région peuplée depuis l’époque préhispanique, dont les agglomérations actuelles suivent les traces de la colonisation espagnole avec l’établissement de villages blancs, tels Tecalitlán, à côté des pueblos de indios comme Tuxpan.
57Vers le début du xxe siècle, la région a deux centres urbains d’importance, Sayula et Ciudad Guzmán. Pendant la période coloniale, Sayula avait été le centre nerveux de toute la région53
58Cependant, la guerre d’indépendance est venue briser sa prospérité, en arrêtant la production agricole et artisanale, en empêchant le déroulement normal des échanges et faisant fuir capitaux et élites54. Quand elle fut finie (en 1821), Zapotlán el Grande (l’actuelle Ciudad Guzmán) centralisait déjà les activités économiques de la région. Les conséquences politiques de cette nouvelle donne ont mis quelques années à apparaître, dans le cadre d’une lutte pour l’hégémonie régionale, où Sayula, dans son déclin, résistait à lâcher son rôle coordinateur traditionnel, et Zapotlân, appuyée sur sa puissance économique croissante, demandait à avoir un rang en conséquence. Le nouvel ordre politique régional ne vint qu’en 1856 lorsque, suite à la création d’un nouveau canton, Zapotlán fut élevée au rang de chef-lieu de celui-ci, officialisant son aire d’influence en cessant de dépendre administrativement de Sayula55.
59Cette dernière réussit à rétablir, dans les temps de paix, sur une aire d’influence désormais plus réduite, son rôle de centre structurateur d’activités aussi importantes que l’artisanat — particulièrement la ferronnerie — et le com merce. Elle servait surtout de lien entre Guadalajara et les producteurs de la sierra et était donc comme une sorte de grand entrepôt ; cette situation conférait aux maisons commerciales locales une influence qui s’étendait jusqu’à la côte56. Or, le « progrès » porfirien a profondément nui à la vie économique de Sayula, dont un élément principal était, depuis des siècles, le commerce et l’acheminement traditionnel des produits. En effet, l’ouverture de voies modernes de communication condamna le transport par mules d’abord à ne plus desservir que les populations délaissées par les voies ferrées, puis, au fur et à mesure que les trains et les routes avançaient, à disparaître57
60D’une certaine façon, et contrairement à ce qui s’est passé ailleurs, l’arrivée des chemins de fer fut pour cette Sayula en déclin le coup de grâce. Avec le nouveau siècle, en 1901 précisément, le train fit son entrée dans Sayula. Certaines maisons commerciales se sont vues par la suite obligées de fermer, car leur fonction essentielle d’entrepôts était devenue superflue. Même si le processus prit un dizaine d’années (car les chemins de fer n’atteignirent Colima qu’en 1910), il était irréversible. Le marché de produits régionaux, organisé autour de Sayula, disparut58.
61Pendant le porfiriat, la région Sud du Jalisco voit donc s’achever le déplacement de son axe vers Ciudad Guzmán sans pour autant que Sayula cesse entièrement de fonctionner comme un centre structurant du point de vue économique mais aussi politique. Alors que Ciudad Guzmán devient, dans son essor, la scène d’un projet pilote du catholicisme social qui prend forme pendant la dernière décennie du xixe siècle, Sayula, même en déclin, continue d’être un fief de plusieurs tendances se réclamant du libéralisme.
2.2. Les marges
La reserve
62Voisine de la région Sud, la région Pacifique comprend l’ensemble du cantón de Autlán, la majorité de celui de Mascota et des parties des cantones de Ameca et de Zapotlán. Tout comme le Nord, la région de la côte est une de celles dont la géographie et les difficultés d’accès ont déterminé l’isolement par rapport à une dynamique d’ensemble de l’état. A la différence du Nord cependant, il ne s’agit pas d’une marginalisation où des facteurs culturels ont un rôle de première importance, mais bien d’une intégration précaire. Le voyageur Vitold de Szyszlo, qui avait traversé le Mexique à la fin du porfiriat, faisait de cette région la description suivante :
« Du côté du Pacifique, Jalisco se prolonge en terrasses qui surplombent le rivage. Les plages n’existent pas, sauf dans quelques endroits couverts de marais salants. Le versant maritime disparaît sous une végétation folle, presque impénétrable, qui renferme des richesses inouïes en bois précieux [...] et offre un asile sûr aux bêtes féroces et aux repris de justice59. »
63Il est vrai qu’en particulier la frange côtière eut un peuplement assez tardif (dans certains cas jusqu’au milieu du xxe siècle 60) et que, encore dans les années 1940, la côte était connue pour être une région insalubre et peuplée d’animaux dangereux61. Ce faible peuplement faisait d’elle, pendant le porfiriat, une région marginalisée, scène de conflits avec les compagnies d’arpentage surgies à la fin du xixe siècle suite à la promulgation de la loi sur les terrains vagues62.
64La frange côtière fut souvent l’objet de projets ambitieux qui visaient à la rendre plus accessible et, par voie de conséquence, mieux exploitable. L’idée d’y introduire les chemins de fer et l’électricité date d’ailleurs de la fin du porfiriat63.
65C’est ici que se trouvent les plus vastes haciendas de l’état, dont celle de Chamela, qui dépassait 100 000 hectares64. Il s’agit cependant de propriétés très peu productives, plutôt sources de prestige social que de pouvoir économique.
66Cependant, à l’intérieur des terres, les richesses minières de la région avaient attiré des capitaux ; en particulier dans le cantón d’Autlán — où au moins 12 compagnies y avaient des intérêts à la veille de la révolution65 —, tout comme autour de la ville de Mascota.
67Ainsi, conçue comme une réserve aux ressources inexploitées et même inexplorées, la côte fait davantage partie des marges que du territoire du Jalisco.
L’ailleurs
68Finalement, la région Nord de l’état est formée par le seul canton de Colotlán. Elle fait partie physiquement et culturellement d’un ensemble territorial plus vaste que ce canton, comprenant une partie de l’état de Zacatecas et une autre du territoire de Tepic, qui fut brisé administrativement lors de la création de l’état de Zacatecas en 182466.
69Depuis le xvie siècle, le Nord a intéressé les Espagnols du fait de ses ressources minières — en particulier à Bolanos — et c’est ainsi qu’il fut colonisé. Le Nord vécut donc en partie au rythme des centres miniers et au gré des vagues migratoires. En même temps, malgré l’implantation relativement précoce de couvents et de missions (depuis 1616), une partie des communautés indiennes restèrent longtemps insoumises au régime colonial et se replièrent en majorité dans les zones les plus inaccessibles67. Au lendemain de l’indépendance, la région fut l’objet de l’intérêt d’autres entrepreneurs : ainsi, en mai 1826, des investisseurs anglais avaient déjà loué toutes les mines de Bolanos68.
70Les pâturages et les bois dont le Nord est riche, éveillèrent eux aussi maintes convoitises et les communautés huichol, détentrices de titres coloniaux de propriété collective de la terre, se virent régulièrement dépouillées de leurs biens, ce qui les poussa davantage au repliement. Leur repli géographique et culturel a déterminé la conservation d’un mode de vie traditionnel, globalement incompris du reste de l’état, qui s’illustre entre autres par la conservation de techniques traditionnelles de production agricole, dont l’écoulement est réservé à un marché local69.
71L’idée de briser la pénurie des moyens de communication dont la région souffre est souvent revenue, spécialement de la part des exploitants de mines. En 1880 Juan José Matute, ingénieur, exhorte le gouvernement de l’état à ouvrir une route. Celle-ci ne fut commencée qu’un siècle plus tard, en 198070. Après lui, au début du siècle, les compagnies minières songèrent aussi à l’ouverture d’une voie praticable, étant prêtes à investir les sommes élevées qu’un tel projet demandait. Quant aux chemins de fer, le cas de Bolanos illustre que, en dépit du lien étroit entre leur développement et celui des mines, l’existence de richesses minières et leur exploitation régulière ne furent pas des conditions suffisantes à l’ouverture de voies ferrées. En effet, si l’arrivée tardive des chemins de fer sur le territoire du Jalisco peut être reliée en partie à sa position marginale en matière minière par rapport à d’autres états de la fédération, inversement, l’absence d’une infrastructure moderne de transport a sans doute entravé le développement de cette industrie. « Les richesses minières, — écrivait Szyszlo — encore peu exploitées, souffrent du manque de voies ferrées »71.
72Le cas du Minerai de Bolaños est sans doute l’exemple le plus extrême : au xixe siècle les capitalistes anglais n’ont pas pu tirer le profit espéré de leurs investissements en bonne partie à cause de l’isolement de la région, ce qui rendait impossible l’arrivée ponctuelle des denrées indispensables à l’exploitation optimale des mines72.
73Il faut ajouter à cette situation géographique l’isolement politique dont la région était (et demeure) l’objet. En particulier, l’administration centrale intervient fort peu dans les conflits des Indiens avec les propriétaires fonciers. En effet, en dehors du manque d’intérêt pour une population méprisée et peu respectée, les limites entre Jalisco et Zacatecas constituaient encore une source de conflit à la veille de la révolution73 (une frange du territoire du canton de Colotlán, faisait l’objet de revendications de part et d’autre) et la non-résolution de ce conflit permettait l’existence d’un territoire où la loi du plus fort s’imposait sans que les autorités d’un état ou de l’autre s’intéressent vraiment à la question.
74Le caractère indéfini de ces limites était discuté dans les journaux de l’époque et dépassait les limites de la région pour être débattu dans la presse nationale. Ainsi, les journaux Jalisco Libre et El Tiempo (ce dernier imprimé à Mexico) eurent une controverse au sujet de la localité dite de San Juan de Núñez, revendiquée par les deux états. La question était soulevée par l’intervention des forces armées du Jalisco afin de saisir des laboureurs accusés de « dommages à la propriété d’un tiers »74. Le problème paraît n’inquiéter personne jusqu’au moment où il faut qu’une administration intervienne. El Correo de Jalisco se croit obligé de préciser :
« [...] personne ne croit qu’il y a des difficultés entre les deux états, mais des questions soulevées par les propriétaires fonciers [...] puisque quand il s’agit de payer au fisc du Zacatecas, ils disent appartenir au Jalisco et, quand ils sont requis par le Jalisco, ils se disent vecinos du Zacatecas75 »
75Entre temps, les conflits se résolvaient par la voie habituelle, celle dominée par la raison du plus fort76.
3. Modernité et clivages
76L’effort d’intégration politique et territoriale ne connaît, pendant le porfi-riat, qu’une phase initiale et surtout inégale. Il suffit de considérer l’infrastructure des communications au début du siècle pour avoir un aperçu général des liens possibles entre les régions et le centre administratif de l’état. La particularité des liaisons entre les chefs-lieux des cantones et Guadalajara révèle déjà une grande disparité des voies de communication reliant les différents cantones à la capitale. Ainsi, pour se rendre de Colotlán jusqu’à Guadalajara, il n’y a même pas de camino carretero (route), mais le camino de herradura (chemin muletier) long de 265 kilomètres ; un pareil voyage durait environ cinq jours77. Le cas de Mascota est semblable avec 158 km à parcourir par chemin muletier, même si ensuite un trajet de 90 km peut se faire par le train. Rien d’étonnant alors à ce que le Nord reste davantage soumis à l’influence du Zacate-cas, avec lequel il communique plus facilement, comme l’illustre la diffusion des mouvements révolutionnaires — comme celui de Luis Moya en 1910 — qui arrivent dans la région Nord le plus souvent par le canon de Juchipila78.
77Des régions plus peuplées, comme le Sud, bénéficient d’une liaison par route et les villes placées sur le chemin de Mexico ont profité de la construction d’une ligne ferroviaire qui les relie à la capitale : La Barca, Lagos, Teocaltiche. Lagos a été, d’ailleurs, la première ville du Jalisco à avoir une liai- son ferroviaire avec la capitale du pays, en 188279. Finalement, Ahualulco a bénéficié des débuts de la construction d’une ligne vers le nord du pays. Voilà encore un élément qui approfondira les différences entre les régions de l’état, en agissant d’une manière très sensible sur leurs possibilités d’intégration et de développement économique.
3.1. La modernité sur rails
78L’importance du train est souvent soulignée par les auteurs qui s’occupent du porfiriat, et non sans raison : le chemin de fer a introduit un rythme nouveau et a changé complètement la vie des populations. La locomotive devint symbole de modernité puisqu’elle représentait des possibilités inédites de communication et d’échanges commerciaux. Le train amena une amélioration sans précédent des conditions de transport en matière de confort et de sécurité, par rapport aux véhicules de traction animale, à un moment où l’utilisation des véhicules à moteur était encore très limitée. Ainsi, le voyage entre Guadala-jara et Mexico, mais aussi entre Guadalajara et Ameca, devint courant parmi les politiciens, les hommes d’affaires et les gens d’élite, si bien que les principaux journaux de Guadalajara consacraient quotidiennement un espace au micro-événement produit par l’arrivée ou le départ de voyageurs80.
79Quant au commerce, toutes les données ont été renversées par l’arrivée du train : qu’il s’agisse de la quantité de produit à transporter, du temps requis pour l’amener à sa destination ou des conditions du voyage81.
80Il faut toutefois préciser que, au début de l’histoire des chemins de fer mexicains, Guadalajara ne constitue pas un point prioritaire. Les deux premières motivations de la construction du réseau ferré mexicain ont été les ports internationaux et les mines ; or à l’époque, Jalisco n’a même pas un port international et ses mines sont considérablement moins développées que celles des grands centres miniers de la république. Ceci explique le fait que, en ce qui concerne l’ouest mexicain — qui fait déjà partie d’une deuxième vague de construction ferroviaire, bien après la liaison entre le centre du pays et le Golfe —, on se soit occupé d’abord du projet de ligne Mexico-Manzanillo (port international dans l’état de Colima), en s’empressant de bâtir la portion Manzanillo-Armería, bien avant de penser à Guadalajara, qui fut reliée à Mexico, en quelque sorte comme par voie de conséquence de ce projet82. Toujours dans le souci de rendre les chemins de fer utiles à l’industrie et au commerce, vinrent ensuite les lignes reliant Mexico à la frontière nord83 et c’est alors que Guadalajara bénéficia du commencement de la ligne Mexico-Laredo.
81Ainsi, quand enfin en 1888 la locomotive du Ferrocarril Central Mexicano arrive à Guadalajara, un des buts principaux est de pouvoir faire, par ce biais, une liaison rapide avec les ports du Pacifique et avec la frontière nord sur ce même versant. Dans cette même optique — et dans le cadre de la politique limantourienne visant à donner à l’état un plus grand contrôle sur l’ensemble du réseau ferré national et sur les investissements privés en la matière — en 1899, la construction de la ligne Guadalajara-Tepic-Mazatlán fut déclarée prioritaire84.
82Malgré l’importance de l’introduction des lignes ferroviaires, on aurait tort de croire à des changements généralisés. En effet, l’arrivée du train dans des villes comme Guadalajara, La Barca, Sayula, Ciudad Guzmán ou Lagos de Moreno changea peu aux conditions de transport dans la région Nord ou de la Côte, même s’il est vrai que le réseau ferré fédéral touche, en 1908, la plupart des chefs-lieux des cantones. Par ailleurs, il fallait bien que les réseaux commerciaux reliant petites et moyennes localités continuent de fonctionner pour approvisionner une population qui dépassait le million d’habitants et qui était, en majorité, rurale.
83Quelques éléments nous rapprochent de ce qu’était la réalité du réseau ferré dans Jalisco au début du xxe siècle. Il faut en premier lieu distinguer entre les grandes lignes exploitées sous concession fédérale par des compagnies privées, souvent étrangères, qui reliaient Guadalajara à Mexico et en partie à la frontière nord85, et les petites lignes qui fonctionnaient sous le contrôle de particuliers ayant obtenu une concession du gouvernement de l’état.
84La ligne fédérale Mexico-Guadalajara existait depuis 1888 et assurait, de fait, une communication constante avec la capitale du pays. La gare devint un lieu public de premier ordre : site de rassemblements lors de l’arrivée de personnalités importantes, transformé souvent en véritable place publique86. La moindre arrivée d’une personnalité était l’occasion du rassemblement de la « haute société » et des autorités à la gare, ainsi que des « curieux » d’autres couches sociales et le prétexte à une manifestation musicale.
85Vers la fin du porfiriat, une troisième grande ligne était presque achevée qui reliait Guadalajara à Colima, capitale de l’état voisin du même nom, construite par la compagnie du Ferrocarril Central Mexicano et finie en 1910. L’intérêt de cette ligne était l’ouverture d’une voie sur la côte Pacifique et sa construc- tion a surtout contribué à modifier le paysage économique et politique dans la région Sud de l’état.
86On peut imaginer alors combien la différence pouvait être profonde entre le rythme des transports traditionnels de traction animale et celui des nouveaux transports, qui permettait d’aller de Guadalajara à Mexico en une journée. Il est essentiel de considérer à quel point la locomotive a stimulé les échanges et, dans ce sens, à quel point le porfiriat entraîna une rupture culturelle. Et nul doute qu’un tel changement élargit la distance entre deux univers qui étaient déjà fort lointains, et qu’on aurait tendance à résumer dans l’antinomie ville-campagne. Mais on ne saurait réduire ici une réalité aussi complexe à cette seule opposition qui n’est valable d’une façon incontestable que par rapport à Guadalajara. Les autres villes de l’état étaient plus liées à la campagne avoi-sinante et les conditions de vie de leurs habitants ne sont pas forcément aussi lointaines de celles des paysans que celles des tapatíos.
87Ainsi, plus que parler d’un univers urbain par opposition à un univers rural, la distinction s’impose entre un univers incorporé au réseau ferré et un autre resté dans un réseau traditionnel de communications, ce qui implique, bien entendu, la capacité et les possibilités d’adaptation des populations à la nouvelle donne. Distinction plus soutenable dès lors que la campagne, elle aussi, participe pleinement de ce phénomène, s’intègre et modifie sa vie au rythme ferroviaire. Les régions Centre, Ciénega de Chapala et Los Altos où les haciendas et ranchos, sous l’impulsion de propriétaires modernisateurs, ont suivi dans la mesure du possible le nouveau rythme (qui est aussi celui du capital), permettent de le constater87.
88A ce sujet, on peut aisément constater le poids des rapports avec Mexico : ce sont les régions les plus en rapport et les mieux reliées à la capitale du pays qui s’incorporent rapidement à des réseaux plus larges. Par contre, celles plus en retrait géographiquement, à partir de l’arrivée des voies ferrées dans l’état, ne seront que davantage mises à l’écart.
89Les avantages du nouveau moyen de transport ont été bien appréciés par les propriétaires et les initiatives n’ont pas tardé à se présenter, à une échelle évidemment bien plus modeste que celle des grandes compagnies, mais néanmoins significative. Ainsi, en 1909, existaient quelques lignes ferroviaires pour des distances courtes et quelques réseaux à échelle urbaine. L’ensemble des premières couvrait un total de 72382 m tandis que les réseaux urbains parcouraient 70801 m. Or, ces lignes n’ont en commun avec les trains fédéraux que le principe de la voie ferrée ; en effet, elles font en partie appel aux nouvelles énergies, notamment à l’électricité et parfois à la vapeur, mais le fonctionnement de la plupart de ces réseaux est assuré par la traction animale. Il n’y a que Guadalajara qui compte avec un réseau urbain de tramway électrique, mais là encore il s’agit d’une nouveauté, car la ville n’a échangé ses traditionnels tranvías de mulitas (des tramways tirés par des mules) contre des trams électriques qu’en février 190788.
90En effet, nous sommes à l’époque de l’introduction de l’électricité dans Jalisco, et l’utilisation de cette énergie a encore un caractère expérimental. Même pour Guadalajara, l’électricité est un événement tout récent : en septembre 1907, la presse se réjouissait de l’installation d’une usine électrique pour l’éclairage de la prison de la ville89. En effet, l’usine électrique située à El Salto de Juanacatlán commence à approvisionner Guadalajara, mais la plupart de l’état ne connaît pas encore l’électricité90.
91Le plus important reste néanmoins cette impulsion modernisatrice, cette volonté d’encourager les lignes régulières de transport et d’améliorer et dynamiser le réseau. La création des réseaux urbains témoigne des besoins nouveaux des villes grandissantes, tout comme de l’intention d’alimenter une image de modernité.
92Bien que Guadalajara concentre la majorité du réseau (69,76 % de l’extension totale), le fonctionnement de lignes à traction animale dans d’autres localités témoigne de la présence d’une bourgeoisie modernisatrice.
93À l’origine de ces lignes se trouvent souvent des hacendados-entrepreneurs, dont la fonction a été essentielle dans la constitution des réseaux de transport urbains et suburbains modernes, vu le rôle extrêmement réduit de l’état dans ce domaine, qui se limitait à octroyer des concession91.
94La structuration des réseaux suburbains, quant à elle, a suivi en bonne partie la trace de l’industrialisation. Ainsi, autour de Guadalajara, si des lignes relient les importants villages de San Pedro Tlaquepaque et de Zapopan, il y a bien aussi une liaison avec La Experiencia, où se trouve une des fabriques textiles les plus importantes de l’époque.
95El Salto de Juanacatlân, proche aussi de Guadalajara, est le siège de plusieurs usines dont une hydroélectrique ; la ligne le relie à El Castillo, petite station où s’arrête le train Mexico-Guadalajara. Finalement, Palos Verdes est la station qui permet à Ciudad Guzmán de se raccrocher à la ligne Guadala-jara-Colima, tout récemment finie, ce qui explique l’ampleur de l’investissement dans une voie de 18 kilomètres, la plus longue parmi les lignes « suburbaines ».
96L’intérêt de se relier avec les lignes fédérales sera une des préoccupations des élites locales. Ainsi, en 1912, dans la région de Los Altos, Pedro Valle, propriétaire domicilié à Atotonilco el Alto, sollicitait du gouvernement de l’état une concession pour ouvrir une voie ferrée de traction animale, afin de relier cette localité à la gare des chemins de fer fédéraux, ce qu’il considérait « être déjà une nécessité pour la population » en même temps que, sans contestation, « une amélioration d’importance »92. En mars 1913, le contrat était finalement signé entre le Gouverneur de l’état et Valle, pour l’établissement d’une « ligne de tramway » faisant le parcours en question93.
3.2. Le progrès en images
97On ne saurait terminer cette approche du tracé des marges internes du Jalisco sans rappeler un clivage qui réapparaîtra tout au long de ces pages, celui entre les élites et le reste de la population ; clivage notamment modelé à Guadalajara. Et quelle meilleure expression que celle d’un « faiseur d’opinion », un journaliste tapatío qui brode, autour de modifications potentielles au service ferroviaire de transport de passagers, sur le cloisonnement social que le service même reflète !
98En novembre 1907, le journal Jalisco Libre se manifestait contre la suppression de la deuxième classe dans les trains fédéraux. La longue argumentation reposait en premier lieu sur l’affirmation de la place du Mexique dans le concert des nations, comme un cas (normal) parmi tant d’autres :
« Dans notre République, comme dans maintes autres parties du monde, il y a dans la population quatre classes sociales94. »
99Le journal entreprend ensuite de définir ces quatre classes :
« la première ou celle des riches [...] ; ils paient toujours l’extraordinaire Pullman [...]95. »
100Vient ensuite,
« La deuxième classe, très nombreuse, très importante de tous points de vue dans la société, c’est celle qui travaille le plus, celle qui se lance dans le vaste champ des opérations, celle qui bouge sans cesse, celle qui produit le plus et aussi celle qui consomme le plus, mais sa condition économique l’oblige à se passer de certaines commodités96. »
101On trouve déjà ici bien affirmées les valeurs d’une société capitaliste, l’importance de la « deuxième classe » lui vient du fait d’être celle qui « travaille le plus », mais aussi et surtout celle qui « produit le plus » et qui « consomme le plus ». L’argumentation conduit à démontrer l’erreur financière que constitue la suppression du service le plus utilisé :
« Cette classe si nombreuse et sympathique, est celle qui a toujours voyagé en deuxième [classe], celle qui remplit constamment les wagons de cette classe et celle qui certainement laisse les plus grands profits aux Chemins de Fer97. »
102Cependant, au-delà de l’objectif premier poursuivi par l’auteur, apparaît sa conception de cette classe comme étant « très importante de tous points de vue dans la société ». Il s’agit en fait d’une classe moyenne urbaine et intégrée aux rythmes de production et consommation capitalistes. En plus, du fait qu’elle est celle qui voyage le plus (entre autres), c’est celle qui effectue les échanges culturels les plus importants.
103L’auteur décrit en premier lieu les classes sociales qui, dans sa conception, participent pleinement à la vie du pays. C’est alors qu’apparaît une troisième classe et d’emblée on aperçoit le mur que le journaliste dresse entre elle et les deux premières :
« Elle est constituée par la pobrería [populace] et la indiada [foule d’Indiens], elle est aussi très nombreuse et très différente de la deuxième, de par sa position économique et plus encore de par son éducation et culture98. »
104Apparaît ici toute l’idéologie libérale altière, discriminatoire vis-à-vis de l’Indien et des couches démunies de la société, que l’on retrouve souvent dans le discours de l’époque :
« Ces gens-là voyagent en troisième classe, parce que leurs ressources ne leur permettent pas plus et aussi parce qu’eux-mêmes ils comprennent qu’ils ne doivent aller ni en deuxième ni en première, et ils voyageraient en quatrième classe s’il y en avait une99. »
105Encore heureux si l’auteur accorde à « ces gens-là » quelque peu de lucidité qui les retient dans la marge ! Mais le gouffre que la mentalité dominante creuse est plus profond que le réel : le discours dépasse la ségrégation qui se produit dans la pratique et renvoie, sur un plan imaginaire, pobreria et indiada à une hypothétique quatrième classe du service.
106L’exclusion réelle définit en revanche une frontière supplémentaire : il existe encore une quatrième classe sociale, celle « constituée par les très pauvres et misérables qui ne voyagent jamais »100.
107Les transports publics sont ainsi un miroir de la société et ce qu’on attend d’eux est lié également aux plus chers desseins des élites. Il est avant tout question d’image, de mise en scène de l’espace urbain selon les canons de la « civilisation » pour un public extérieur :
« Il est avant tout nécessaire qu’on n’admette pas plus de passagers que ceux qui peuvent rentrer largement dans chaque wagon et que, pour aucune raison, on ne permette que les gens, surtout s’il s’agit de gens qui portent des sombreros ras-pones de petate, s’entassent sur les plates-formes d’entrée, parce que ceci est non seulement répugnant à la vue mais aussi propice à des fautes qu’il n’est pas de notre ressort de signaler101. »
108Une des préoccupations constantes du régime porfirien fut de créer et de nourrir une image internationale et les élites du Jalisco vivent en perpétuelle pose pour une caméra étrangère imaginaire :
« Dans toutes les villes du monde, les plates-formes sont dégagées et elles doivent l’être ici pour un plus grand confort des passagers et comme un indice, pour les étrangers qui nous visitent, qu’ils sont de prime abord dans une ville cultivée et civilisée, au sens le plus large de ces termes102. »
109S’exprime ainsi dans cet article le souci de se placer dans un contexte international, parmi ces villes du monde (d’ailleurs toutes) mythiques où les plates-formes sont dégagées. Évidemment il s’agit de se placer au milieu des villes où justement ces plates-formes peuvent exister, donc des villes équipées de moyens de transport de pointe ; ainsi toutes les villes du monde sont les villes techniquement modernisées ; autrement dit, seul le monde modernisé peut constituer un paradigme. D’ailleurs, on ne trouve jamais dans la presse du Jalisco de l’époque une comparaison de Guadalajara ou de sa société avec des villes américaines (tout juste, implicitement avec des villes de l’Amérique du nord), africaines ou asiatiques et surtout pas avec d’autres villes mexicaines, pas même avec la capitale du pays. Les élites tapatias ont le regard posé sur l’Europe et, en ce sens, elles sont profondément porfiriennes.
110Elles attendent aussi que ce regard étranger se pose sur elles, regard qui témoignera de leur appartenance de plein droit au « monde civilisé ». On peut déceler la crainte de l’infériorité dans ce besoin pressant d’affirmation face à l’étranger-paradigme, auquel il faut bien faire sentir qu’il est dans une ville cultivée et civilisée au sens le plus large de ces termes. Si l’article n’explicite jamais en quoi consiste la Civilisation, il pose clairement, en revanche qu’elle ne porte pas de sombrero raspón de petate.
Notes de bas de page
1 A. V. Pascal, Mapa del Estado de Jalisco. 1908, AHJ MP-421-1908 ; Instituto Nacional de Estadística Geografía e Informática, Jalisco en Síntesis, troisième édition, Mexico, juin 1990, p. 1.
2 Le Colima a obtenu le statut de « territoire fédéral » en 1824 à la signature de l'Acta Constitutiva de la Federación, statut que la première Constitution de la république lui confirma. Les querelles concernant sa surface impliquèrent non seulement le Jalisco mais aussi le Michoacán. La Constitution fédérale de 1857 lui octroya le statut d'état.
3 Ceci dans un contexte politiquement délicat, non seulement pour le Jalisco, mais pour l'ensemble du pays, celui du soulèvement indien dirigé par Manuel Lozada. Cf. S. Gutierrez Contreras, El Territorio del Estado de Nayarit a través de su Historia, Compostela, Nayarit, Mexique, 1979.
4 Échantillon d'une blessure d'honneur mal cicatrisée dans le temps, encore en 1918, le député fédéral Jorge Delorme y Campos s'autorisait des propos annexionistes vis-à-vis de l'état de Colima qui réclamait une frange de territoire.
5 A. Peñafiel, Anuario Estadístico de la República Mexicana, n° 8, Mexico, Secretaría de Fomento, Colonización e Industria, 1901.
6 L'ingénieur Pascal, de la Société Mexicaine de Géographie et Statistique était, avec l'ingénieur Carlos F. de Landero, un des rares à s'occuper des limites géographiques du Jalisco, en particulier de l'établissement de ses coordonnées et ses altitudes. Il établit une série de cartes, avec division politique, chaque année, au moins jusqu'en 1908. Certaines de ces cartes sont conservées à l'A.H.J.
7 Les dimensions de l'état se sont vues encore réduites par la suite et la surface selon le dernier recensement (INEGI, 1990) est de 80138 km², sans que les conflits limitrophes soient pour autant entièrement réglés.
8 Pour les aspects géographiques en général voir Claude Bataillon, Régions Géographiques au Mexique, Travaux et Mémoires de l'Institut des Hautes Études de l'Amérique Latine n° 20, Paris, 1968.
9 La région qui a attiré le plus l'attention d'amateurs et chercheurs est celle de Los Altos ; parmi les travaux les plus importants on peut citer ceux de l'équipe du CIS-INAH dirigée par Andrés Fábregas dans les années 1970, dont l'approche est plutôt anthropologique et dont le livre de Fábregas lui-même offre une excellente synthèse : La Transformación Histórica Je una Región : Los Altos de Jalisco, Mexico, CIESAS, 1986. La région Sud a été aussi l'objet de travaux parmi lesquels, d'un point de vue historique, on peut mentionner les recherches de Jaime Olveda sur Gordiano Guzmán et Sayula. La région centre fait l'objet de nombreuses études dont la plupart concernent Guadalajara ; ainsi, dans la pratique, l'histoire de cette région tient lieu souvent d'histoire de l'état conformément aux centralisme culturel qui domine et au vieux slogan qui prétend que Guadalajara est Jalisco. L'histoire du Nord a été peu étudiée mais on peut toujours citer les écrits de Luis Sandoval Godoy qui visent une aire comprenant en partie l'actuel Zacatecas. Finalement, la région de la côte, en dehors du livre de Jesús Amaya Topete, Ameca. protofundación mexicana, fait l'objet de recherches plus récentes du Programa de Estudios Jaliscienses dirigé par José María Muriá. Par ailleurs, dans les dernières années, ce Programme (Université de Guadalajara-Gouvernement de l'état) a réalisé un effort tendant à donner une impulsion aux études sur l'histoire des différentes légions et micro-régions.
10 Cf. Edmundo O'Gorman, Historia de las divisiones territoriales de México, Mexico, editorial Porrúa, 5e édition, 1973.
11 J. M. Muria, Historia de las divisiones territoriales de Jalisco, Mexico, 1976.
12 José María Narváez établissait déjà en cette année une carte des états du Jalisco. Zacatecas et du territoire de Colima, comprenant la division cantonale du premier. Lucas Fruneau y Manso, Estado de Jalisco. Descripción corográfica de sus ocho cantones, Guadalajara, Programa de Estudios Jaliscienses — UNED Gobierno del Estado de Jalisco, 1992.
13 A. Peñafiel. op. cit.
14 A. Bancalari, Resultado de las primeras operaciones del Censo en el Estado de Jalisco, décembre 1910. AHJ-ES-10.
15 L. sanders samaniego, Les origines économiques et sociales de la révolution au Jalisco, mémoire de maîtrise, Université de Paris I-Panthéon-Sorbonne. s.d„ exemplaire dactylographié, pp. 21 et suiv.
16 R. Fernandez et D. Deraga, « Una visión diacrónica del Occidente de México », dans R. Avii.a Palafox (éd.), El Occidente de México en el tiempo, Guadalajara, Universidad de Guadalajara, 1994, pp. 41-49.
17 A la fin du xixe siècle, la plupart des habitants du Jalisco parlent couramment et uniquement le castillan, même s'il existe encore des communautés hors de la portée de la globalisation linguistique, notamment dans les cantones de Colotlán — où l'on parle le huichol — et de Zapotlán — où sont recensées des minorités parlant mexicano (nahuatl) et huasteco ; A. Peñafiel, Censo General de la República Mexicana verificado el 20 de octubre de 1895. Estado de Jalisco, Mexico, Ministerio de Fomento, Dirección General de Estadística, 1897.
18 Pour une caractérisation géographique de l'Occident Mexicain, cf. O. Rosier Barrera, « La integración territorial del Occidente de México », dans R. Avila Palafox (éd.), op. cit., pp. 11-25.
19 Malgré les critiques dont il a été l'objet, le concept de Kirchoff continue d'être une référence en la matière. R. Avila Palafox (éd.), op. cit.
20 Il convient de rappeler que le terme chichimèques ne désigne pas un groupe humain en particulier, mais, de façon générale et imprécise, les peuples nomades du nord de l'actuel Mexique, insoumis aux grands états de l'Amérique précolombienne.
21 Guadalajara n'a trouvé son site définitif qu'à sa quatrième « fondation ». Les raisons sont d'ordre géographique et militaire (puisque ses fondateurs ont recherché un site à la fois privilégié du point de vue des ressources et à l'abri des incursions chichimèques), mais aussi politique du fait des querelles entre conquistadors. Cf. J. M. Muria (dir.). Historia de Jalisco, t. I, Guadalajara, Gobierno del Estado de Jalisco, UNED, 1982 ; E. lopez moreno, La cuadrícula en el desarrollo de la ciudad hispanoamericana, Guadalajara, Mexico, Guadalajara, editorial Universidad de Guadalajara, 1992, pp. 19-28 et surtout A. chavez hayhoe, « Las Guadalajaras pre-atemajaquenses », Boletín de la Junta Auxiliar Jalisciense de la Sociedad Mexicana de Geografía y Estadística, t. VII, vol. I, septembre 1941.
22 A. Peñafiel, Censo General de la República Mexicana. Jalisco, 1897.
23 L. Asiain. Subdirector del Departamento de Estadística de la Secretaría de Fomento, División municipal y prontuario geográfico de la República Mexicana, Mexico, Imprenta y fototipia de la Secretaría de Fomento, 1908.
24 Cf. H. Riviere d'Arc, Guadalajara y su región, Mexico, SEP, 1973 ; D. vazquez, Guadalajara. ensayos de interpretación, Guadalajara, El Colegio de Jalisco, 1989 ; E. Lopez Moreno, op. cit.
25 Le chef-lieu du douzième canton, Ahualulco, était une ville de 4 867 habitants, raison pour laquelle il n'apparaît pas dans le tableau.
26 C. Castañeda, Organización municipal del Estado de Jalisco, Mexico, UNED, Gobierno del Estado de Jalisco, 1985.
27 J. Olvida, « El Occidente de México en el siglo XIX : ¿Integración o desintegración ? », dans R. Avila Palafox (éd.). El Occidente de México..., op. cit., pp. 127-134.
28 II s'agit du Banco de Jalisco, banque d'émission et des succursales du Banco Nacional de México et du Banco de Londres y México.
29 De Guadalajara.
30 Cf. J. olveda, La política de Jalisco durante la primera época federal, Guadalajara, ed. Poderes de Jalisco, 1973. et J. M. Muria, Historia de Jalisco, op. cit., t. III.
31 A. Bailly et H. beguin, Introduction à la géographie humaine, Paris, Masson, 1982, cité par J. Revel-Mouroz, op. cit., p. 16.
32 Ibid.
33 M. Aldana Rendón, El campo jalisciense durante el porfiriato. Guadalajara, IES-Universidad de Guadalajara, 1986, pp. 80-97.
34 V. de szyszlo, Dix Mille Kilomètres à travers le Mexique 1909-1910, 2e édition, Paris, Plon-Nour-rit et Cie. Imprimeurs-Éditeurs, 1913 p. 256.
35 Pour des références plus larges sur l'histoire de l'industrie du tequila, cf. J. M. Muria, El tequila, boceto histórico de una industria, Guadalajara, Universidad de Guadalajara ; ainsi que R. Luna, La historia del tequila. Sus regiones y sus hombres. Mexico, CONACULTA-Universidad de Guadalajara, 1991 ; pour un aperçu de l'état actuel de cette industrie : Rogelio Luna, « Internacionalización y maquila de la industria del tequila en las últimas décadas », dans J. Orozco Alvarado et alii, Economía, agroindustria y política agraria en Jalisco, Guadalajara, El Colegio de Jalisco, 1992.
36 La gestion de la production minière de l'état était organisée en dix districts surveillés par un agent du gouvernement fédéral : Ameca, Autlán, Ayutla, Ciudad Guzmán, Colotlán, Etzatlán, Guadalajara, Hos-totipaquillo. Mascota, Unión de Tula. J. R. Southwokth, El Directorio Oficial de las Minas y Haciendas de México. Descripción general de las propiedades mineras y de las haciendas y ranchos de aquellos Estados y territorios donde se han podido obtener datos fidedignos de la República Mexicana, Liverpool, 1910, p. 14.
37 Ibid, pp. 114-119. Malgré l'inscription plutôt marginale du Jalisco dans l'histoire minière mexicaine, — on ne saurait comparer sa tradition et sa richesse avec celle d'états comme Guanajuato, Zacatecas, Hidalgo ou San Luis Potosí —, celle-ci est un élément de première importance pour certains cantones comme Ameca, Ahualulco, Colotlán et Autlán, dont elle explique en bonne partie le peuplement, les courants migratoires, le développement des communications et des transports ainsi que la vie sociale. On y trouvait à l'époque de l'argent, de l'or et du cuivre. C. R. Enock, Mexico its ancient and modem civilisation, history and political conditions, topography and natural resources, industries and general development, Londres-Leipzig, T. Fisher Unwin, 1909.
38 V. de Szyszlo, op. cit., p. 256.
39 Sur l'importance et les potentialités du lac comme point intermédiaire entre ces deux capitales, cf. B. Böehm de Lamieras, « Guadalajara y Chapala, historia de una relación regional. Siglo XIX y principios del XX », dans R. Avila Palafox (éd.). El Occidente de México..., op. cit., pp. 135-158.
40 V. de Szyszlo, op. cit., p. 230.
41 B. Böehm de Lamieras, op. cit. ; par ailleurs, Szyszlo lui-même fait une partie de son voyage par cette voie ; ainsi, à partir de Ocotlán, « Un petit bateau, actionné par un moteur à pétrole, me transporta à Chapala en quatre heures de navigation », V. de Szyszlo, op. cit., p. 232.
42 M. Aldana Rendón, op. cit., p. 78.
43 Ibid., op. cit., p. 135.
44 Cette tradition religieuse bien ancrée a pour origine le caractère miraculeux attribué à une image de la vierge depuis l'année 1625. Ceci encouragea le pèlerinage qui fit augmenter la population de San Juan et développa l'importance de la ville. Finalement, le 20 novembre 1797, le roi Carlos IV « a octroyé à San Juan de los Lagos le privilège d'une foire pour 15 jours, perpétuellement et entièrement franche et libre de tout droit de alcabala, arbitrage et péage », S. Ortiz Vidales, La arriería en México, 2e édition, Mexico, Editorial Botas, 1941. p. 103.
45 Dans la ferveur locale, la vierge de San Juan a longtemps concurrencé celle de Zapopan — dont le sanctuaire se trouve à quelques kilomètres à peine de Guadalajara — pour le patronage de l'état du Jalisco, finalement attribué à cette dernière au milieu du xxe siècle.
46 A. fabregas, La transformación histórica de una Región : Los Altos de Jalisco, Mexico, CIESAS, 1986 ; R. D. Shadow, « Los rancheros de Occidente : hacia un modelo de su organización comunitaria », dans R. Avila Palafox (éd.), El Occidente de México..., op. cit., pp. 159-188.
47 Sur Santa Ana Apacueco cf. R. Lancaster-Jones, « La Hacienda de Santa Ana Apacueco », Boletín de la Junta Auxiliar Jalisciense de la Sociedad Mexicana de Geografía y Estadística, t. IX, janvier-avril 1951, n° 4-5, pp. 149-178 ; sur Jalpa cf. D. Brading, « The Structure of Agricultural Production in the Mexican Bajío during the Eingteenth Century », XL Congreso Internacional de Americanistas, Rome, 1972 ; sur Ciénega de Mata cf. F. Chevalier, La formación de los latifundios en México, México, Fondo de Cultura Económica, 1976.
48 Cf. T. Martínez Saldaña, « Formación y transformación de una oligarquía : el caso de Arandas, Jalisco », dans T. Martínez Saldaña et L. Gandara Mendoza, Política y Sociedad en México : el caso de los Altos de Jalisco, Mexico, SEP-INAH, 1976, pp. 52-53.
49 J. R. Southworth, op. cit., p. 209.
50 T. Martinez Saldaña, op. cit., p. 44.
51 M. Aldana Rendón, op. cit., p. 30.
52 Encore au début du xviie siècle, la hacienda de Jalpa a chassé des groupes chichimèques.
53 J. Olveda, « La Dinámica del Sur de Jalisco », dans Primer encuentro de investigación jalisciense economía y sociedad. Tema I : Jalisco y la cuestión regional, Guadalajara, 1981, exemplaire dactylographié, s.p.
54 Ibid.
55 Le 19 avril de cette même année, le gouverneur Santos Degollado decréta le changement de nom de la ville qui prit celui de Ciudad Guzmán.
56 M. gonzalez de la rocha, « Subordinación de un centro regional : Sayula, Jal. », dans Primer encuentro..., op. cit.
57 Depuis les temps coloniaux et jusqu'à l'introduction du chemin de fer, dans Jalisco — comme dans le reste du pays — le transport de la plupart des produits commerciaux se faisait par bêtes de somme. Ainsi, en 1895, la profession de muletier (arriero), qu'exercent 3 817 personnes, est d'importance considérable, aux côtés de celle des molenderas, ces femmes dont l'activité est de moudre le maïs pour sa préparation ultérieure en divers produits alimentaires de consommation quotidienne (que le recensement estime en 3 438), et plus nombreuse que celle des boulangers (3 196). La arriería était ainsi une profession prospère qui permettait une certaine mobilité sociale. Étant donné qu'elle constituait le seul moyen de transport des produits, elle permettait souvent à celui qui l'exerçait de réunir un capital qu'il pouvait ensuite investir dans l'agriculture ou bien dans le commerce à plus grande échelle. Avec la modernisation des transports, cette profession devint beaucoup moins prometteuse et son exercice limité aux seuls parages encore inaccessibles par les nouveaux moyens. M. Gonzalez de la Rocha, op. cit. ; S. Ortiz Vidales, op. cit., pp. 7 et 65 ; Censo General de la República Mexicana, 1895.
58 La vaste gamme d'activités artisanales et industrielles qui s'étaient développées à Sayula, sont, pour la plupart, d'abord entrées en décadence, puis disparues dans les premières décennies du xx' siècle.
59 V. de. Szyszlo, op. cit., p. 256.
60 Une partie de la côte fut peuplée suite à la campagne de colonisation promue sous la présidence de Manuel Avila Camacho (1940-1946), dite la marcha hacia el mar, mais la zone reste encore faiblement peuplée de nos jours.
61 Entretien avec Antonio Zepeda, militant pour la réforme agraire, Guadalajara, 1991.
62 M. Aldana Rendón, op. cit., particulièrement le chapitre 1, « Las características del despojo agrario », pp. 9-53.
63 Ibid., p. 257. Toutefois, le projet d'une voie ferrée n'a jamais vu le jour et de nombreuses localités n'ont bénéficié de l'installation électrique qu'à la fin des années 1980.
64 Chamela, avec ses 105 356 hectares, située dans la municipalité de Tomatlán, sur la côte du Pacifique, était la propriété de Fernando Castaños. J. R. Southworth, op. cit.
65 Ibid., pp. 115-119.
66 L. Sandoval Godoy, « Los pueblos del norte, antes y después de la carretera », dans Primer encuentro de investigación jalisciense..., op. cit.
67 . Ibid.
68 L. J. arellano, « Las libras esterlinas y Bolaños », dans Primer encuentro..., op. cit.
69 M. Aldana Rendón, Op. cit., p. 25.
70 Ibid.
71 V. de Szyszlo, op. cit., p. 255.
72 L. J. arellano, op. cit.
73 D'ailleurs, encore au cœur du xxe siècle, la situation n'a pas trouvé de solution définitive ; dans les années 1980. lors de l'ouverture de la route Guadalajara-Colotlán, Luis Sandoval Godoy parlait de cette « capricieuse ligne de division qui ne s'est toujours pas vérifiée exactement dans certains points, [qui] assigna à Jalisco tels et tels villages » L. Sandoval Godoy, op. cit., s.p.
74 El Correo de Jalisco, 8 juin 1908.
75 Ibid.
76 Sur les conflits autour de la terre, cf. M. Aldana Rendón, op. cit.
77 L. Sandoval Godoy, op. cit.
78 Cf. infra, chapitre 8.
79 B. Urias. cl alii, Los ferrocarriles de Mexico 1837-1987, Mexico, Ferrocarriles Nacionales de Mexico, 1987.
80 C'est le cas de journaux comme El Correo de Jalisco, La Libertad, El Regional, La Gaceta de Guadalajara.
81 Cf. B. Urias, op. cit., pp. 50 et suiv.
82 Ibid., p. 72.
83 En 1884, on pouvait déjà faire le trajet Mexico-Chicago, par le Ferrocarril Central Mexicano qui reliait avec les lignes américaines. Ibid., p. 73.
84 Sur proposition de Limantour, ministre des finances, par la Loi sur les chemins de fer du 29 avril 1899 — la première dans son genre — avaient été déclarées prioritaires les lignes suivantes : Chihuahua — un port dans Sonora ou Sinaloa ; Mexico — un port dans Guerrero ; Ferrocarril Mexicano — Ferrocarril de Tehuantepec ; Guadalajara-Tepic-Mazatln ; Ferrocarril Nacional de Tehuantepec — Tabasco et Campeche et jusqu'à la frontière avec le Guatemala. Ibid., p. 87.
85 La ligne vers le nord, qui faisait partie de la liaison Mexico-Laredo, ne couvrait pas entièrement la portion Guadalajara-Tepic, sans doute à cause du grand obstacle représenté par la Sierra Madre Occidentale ; cependant elle a joué un rôle de grand importance dans la communication avec la frontière nord et d'autre part pour l'intégration du cantón d'Ahualulco.
86 En 1909, l'arrivée à Guadalajara des propagandistes de Ramón Corral qui suscita une grande manifestation reyiste à la gare et, en 1910, l'accueil donné dans cette même gare à Francisco I. Madero sont les principales illustrations d'un tel phénomène.
87 Cf. M. Aldana Rendón, op. cit.
88 R. García Ruiz, « Cronología Jalisciense », dans Jalisco en el progreso de México. Aportación a ¡a obra de gobierno del Lic. José de Jesús González Gallo 6 estudios fundamentales, Guadalajara, 1947, pp. 9-94.
89 Jalisco Libre, 22 septembre 1907.
90 Le projet de la compagnie Lernia Mines Development & Power Co. de faire une usine hydro-électrique au nord de Tequila, qui profiterait du courant du Santiago, n'a jamais prospéré. J. R. southworth, op. cit., p. 117.
91 Dans le cas de Guadalajara, par exemple, c'est la Compagnie Hidroeléctrica e Irrigadora del Cha-pala, propriété de l'hacendado Manuel Cuesta Gallardo, qui a assumé le contrôle du réseau de trams électriques et les industriels du vino mezcal sont faciles à reconnaître derrière la ligne urbaine de Tequila.
92 Pedro Valle au Gouverneur de l'état. 23 octobre 1912, AHJ F-5-912, ATA/1090.
93 Le contrat fut approuvé le 25 mars 1913, par le décret n° 1576 du Congrès de l'état. Ibid.
94 Jalisco Libre. 3 novembre 1907.
95 Ibid.
96 Ibid.
97 Ibid.
98 Ibid.
99 Ibid.
100 Ibid.
101 Allusion aux chapeaux populaires en fibres de palme tressées. Jalisco libre, 29 octobre 1907. Ce commentaire était placé dans un article concernant un conflit de travail entre la Compañía de Luz y Fuerza et ses employés ; Jalisco Libre soulignait l'absence d'un règlement qui puisse encadrer l'activité des travailleurs.
102 Ibid.
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