Limitem restitueret, praedam militibus daret : l’Empire romain en difficulté face aux défis de la prédation, des derniers Antonins à la Tétrarchie
p. 27-51
Texte intégral
1Limitem restitueret, praedam militibus daret : restaurer la frontière et donner du butin aux soldats, c’est ainsi que l’auteur anonyme de l’Histoire Auguste imaginait, à la fin du ive siècle, dans un passage de fiction de la vie d’Aurélien (X, 2), l’action du bon général au cœur d’un siècle difficile pour Rome. Dans cet exemplum idéal – car parfaitement inventé –, le butin ne profite pas d’ailleurs qu’aux soldats, des provinces s’enrichissent aussi de bœufs, de chevaux, de captifs pris à l’ennemi. Les dépouilles de guerre sont déposées au Palatin, au cœur de Rome, et parce que la fantaisie de l’auteur n’a pas de limites, la villa privée de l’empereur regroupe elle aussi esclaves, vaches, juments, moutons et chèvres – ou chevreuils – par milliers1. Cet extrait ne peut donc pas nous offrir une description historique de la prédation dans la période qui nous intéresse, il offre en revanche un bon aperçu de la manière dont elle était conçue, représentée, désirée dans l’imaginaire historique romain, en même temps qu’il résume deux des grands défis des empereurs du iiie siècle : assurer la sécurité des provinces par la défense des limites de l’empire et conserver, par la victoire et ses dividendes, le soutien de l’armée. Notre extrait, enfin, met bien en valeur la position paradoxale de l’empire et de ses forces armées face à la prédation : il s’agit de l’empêcher à l’intérieur de l’empire mais aussi de l’exercer à son profit. L’empire de Rome ne saurait être une proie, il est bon pour lui d’être un prédateur, c’est aux Romains que revient le monopole de la prédation légitime, c’est le sens profond de la « paix romaine ». Rien de nouveau dans ces deux faces de l’exercice du pouvoir romain sur son empire, on sait comment elles avaient été développées par Tacite, à quelques années d’écart, dans deux discours célèbres de ses œuvres historiques. Dans la bouche du chef calédonien Calgacus, les Romains sont les brigands du monde, raptores orbis, uniquement portés par l’avidité, et leur paix n’est qu’un désert2. Dans la bouche du légat Cerialis, l’ordre romain garantit la sécurité aux Gaules, perpétuellement menacées par leurs cupides voisins germaniques et incapables de se défendre sans la force de Rome3. Dans cette logique, le tribut versé à Rome n’est que la contrepartie de cette protection, la participation financière à l’effort de défense de l’empire.
2Cette situation de paix proclamée dans les provinces de l’empire et le caractère limité des progressions territoriales des conquêtes après Auguste expliquent que l’historiographie ait surtout considéré les questions de prédation pour la période précédente, celle de la République, que l’on peut qualifier de prédatrice si l’on songe aux conquêtes et aux triomphes des imperatores de ses derniers siècles4.
3À partir de la fin de l’époque antonine toutefois, pillages, captures, raids et razzias apparaissent plus nettement dans de nombreuses provinces et jusque sur le sol de l’Italie, semblant remettre en cause la situation que nous venons de décrire. Les conflits entre Rome et les barbares dans cette époque, et plus largement leurs relations et les rapports de prédation qui pouvaient s’exercer ont reçu ces dernières années une mise en valeur assez remarquable à l’occasion notamment de publications et d’expositions qui présentaient au grand public des trouvailles qui peuvent témoigner de pratiques de prédation. Ainsi, au cours des années 2000, les trouvailles de Neupotz et d’Hagenbach ont été présentées dans diverses expositions5, de même que les dépôts, peut-être votifs, de butin effectués au Danemark6. Parallèlement, le renouvellement historiographique peut s’appuyer sur de nouveaux documents, on peut songer à cet égard au désormais célèbre autel de la Victoire d’Augsbourg, mais aussi plus récemment à l’autel de la Dea Fortuna à Dalheim7. Mais les sources plus anciennes gagnent toujours à être revisitées, on peut ainsi songer au bénéfice que l’on peut tirer de la récente réédition des fragments de Dexippe8, et plus encore de la découverte de nouveaux fragments9. La numismatique témoigne éloquemment de ces renouvellements10 offrant des documents essentiels sur certains règnes brefs et très mal connus, ou sur la chronologie de règnes plus importants11. Surtout, elle soulève directement la question de la prédation et de l’insécurité à travers l’interprétation que l’on donne des trésors. Si l’interprétation univoque, expliquant nécessairement les trésors par des raids barbares, reste parfois présente, il faut attirer plutôt l’attention sur les analyses plus nuancées et plus précises, sur la mise en évidence de différentes logiques à l’œuvre derrière la thésaurisation12. Une réaction semblable peut se trouver dans le domaine archéologique, où les signes de destruction ne sont plus nécessairement corrélés aux récits historiques anciens des invasions sans pour autant dénier toute importance à l’insécurité13, si bien que l’on peut noter un écart entre les débats des spécialistes et la présentation parfois univoque des expositions que nous évoquions précédemment14.
4Par-delà les débats qui subsistent sur la « crise » du iiie siècle, l’approche peut se faire désormais autour d’une chronologie et d’une géographie plus précises des difficultés politiques et militaires de l’empire15. Ces difficultés ne sont pas homogènes sur toute la période et sur tout l’espace de l’empire, des moments de crise marqués par des raids importants frappent certaines régions et déstabilisent le pouvoir, mais l’empire ne se trouvait pas alors face à un déferlement de masse ni face à des peuples migrants, et ses capacités de réponse étaient considérables16. Ainsi, si le tableau s’est précisé et nuancé, les positions historiographiques sur l’impact de ces invasions restent très diverses : la question demeure ouverte, parfois dérangeante17.
L’empire, victime de la prédation
Un arrière-fond de pratiques de prédations continues, à basse intensité et opportunistes
5Il faut tout d’abord considérer la situation en temps ordinaire, en dehors des crises militaires qui frappent l’empire au cours du iiie siècle. Malgré les représentations officielles ou courtisanes célébrant, comme le Panégyrique de Rome d’Aelius Aristide, un empire pacifié, où la guerre est devenue un mythe, où l’ordre s’impose sans bruit et sans trouble, et où tous peuvent se déplacer librement18, brigandage et piraterie n’ont jamais totalement disparu mais subsistent à un niveau de basse intensité et peuvent prendre plus d’ampleur à l’occasion d’une mauvaise conjoncture19. En temps ordinaire, la prédation est avant tout le fait des brigands, certaines régions étant réputées pour leur présence. Dans nos sources, ce sont des régions marginales, pauvres, éloignées des douceurs de la cité et de la prospérité de la civilisation. Ainsi les montagnes de Thrace et les marais égyptiens offrent du pittoresque aux tribulations des héros de roman en même temps qu’elles peuvent appeler l’intervention des agents du prince20. Loin des clichés de la littérature antique sur les brigands, dans la réalité les situations étaient probablement bien plus complexes. L’empire ne répugne pas à laisser aux autorités locales la prise en charge de ces problèmes tant qu’ils ne dépassent pas un certain seuil21, au-delà duquel l’armée peut intervenir. Ponctuellement toutefois, des situations plus graves attestent de la possibilité de menaces d’une autre ampleur.
6Un raid barbare en quête de butin au sein du territoire provincial était toujours ponctuellement possible. Les Chattes en offrent un exemple durant le règne de Claude. Si le gouverneur Pomponius y gagna, aux dires de Tacite22, les ornements triomphaux, il faut admettre que les opérations furent d’une ampleur limitée, ne mobilisant que quelques unités auxiliaires pour rattraper et châtier les pillards. Si la raison exacte d’un tel raid n’est pas vraiment précisée par Tacite, la suite de ce passage des Annales, avec l’histoire du roi Vannius23, montre l’importance du butin et de la richesse pour les voisins germaniques de l’empire. Il montre aussi comment l’empire s’en protégeait habituellement par un subtil mélange de diplomatie et de dissuasion. Un déséquilibre dans cette situation pouvait assez rapidement avoir des conséquences. Dans le contexte troublé de l’année des quatre empereurs, en 69, les différends entre les cités d’Oea et de Leptis en Tripolitaine dégénèrent24. Ayant le dessous, les habitants d’Oea s’offrent, en 70, le service des Garamantes, farouche peuple des oasis du Sahara. Ces derniers pillent le territoire de Leptis, dont les habitants se réfugient derrière le rempart de la cité. L’intervention de l’armée romaine met fin au pillage et permet de récupérer le butin qui n’a pas encore été vendu aux gens inaccessibles de l’intérieur. L’armée romaine pousse jusqu’au cœur du pays des Garamantes pour éviter le retour de tels troubles25. Significativement, Tacite décrit les Garamantes qu’il caractérise comme nomades, vagi, prédisposés à ce type de comportement26. Sa description cependant témoigne que la situation de pillage ne ressort pas que de l’essence des Garamantes, mais d’une situation particulière où l’ordre habituel est perturbé, à laquelle s’ajoute une demande en amont, celle d’Oea, les Garamantes agissant quasiment comme des mercenaires, et en aval un marché pour écouler le butin dans les inaccessibles mapalia de l’intérieur : les Garamantes avaient déjà témoigné de leurs qualités de receleurs à l’occasion de la révolte de Tacfarinas27. À cet égard, l’exemple a aussi le mérite de montrer la complexité des interactions de part et d’autre de la frontière de l’empire.
7Cette complexité devait jouer aussi pour des situations moins exceptionnelles. Le cas du célèbre centurion d’Auchendavy l’illustre au milieu du iie siècle et a aussi le mérite de jeter une vive lumière sur des cas de prédation. Ce centurion, Marcus Cocceius Firmus, nous est connu par plusieurs inscriptions du mur d’Antonin mais aussi par un passage du juriste Pomponius28. Eric Birley a éclairé magistralement ce cas. Une femme avait été condamnée aux mines de sel, mais fut capturée par des brigands extérieurs à l’empire (a latrunculis exterae gentis capta). Elle fut ensuite vendue et finalement rachetée par le centurion. Elle retourna subir sa peine dans les salines, mais le fisc remboursa à Firmus le prix du rachat. La frontière apparaît comme un lieu offrant des opportunités de brigandage, mais la prédation exercée par les brigands barbares n’est absolument pas coupée de l’empire et de son économie puisque c’est là qu’on peut revendre les captifs. Le terme de latrunculi témoigne du caractère modéré de la prédation qui s’était exercée à ce moment sur les marges de la Bretagne. Il s’agit de brigandage ordinaire, même s’il engage des barbares extérieurs, une menace de plus grande ampleur les aurait fait qualifier d’hostes29. En droit, sinon dans les faits, la paix romaine n’était pas menacée par ces situations, ce qui ne veut pas dire que le pouvoir impérial s’en soit nécessairement désintéressé.
8Ainsi, le terme de latrunculi, appliqué à des peuples extérieurs à l’empire, se retrouve dans une série d’inscriptions pannoniennes datant de la première partie du règne de Commode, au plus tard de 185, et célébrant l’édification de burgi et de praesidia pour défendre la frontière de la province, la rive (ripa) du Danube, contre les incursions des latrunculi30. Le contexte est ici bien différent de celui de Cocceius Firmus sur le mur d’Antonin. La frontière exposée aux raids des latrunculi n’est pas une avancée extrême de l’empire récemment installée. Au contraire, ces fortifications de la rive du Danube prennent place après une période de graves menaces sur cette région qui a connu un effondrement des systèmes de défense romain au cours du règne précédent et de longues et difficiles guerres pour ramener la sécurité sur le territoire provincial et l’ordre sur ses frontières. La sécurité complète n’était apparemment pas revenue mais l’usage du terme latrunculi proclame l’absence de gravité de la situation : il s’agit de protéger l’ordre public dans la province au cours d’une période de paix.
Une prédation tournée vers les personnes
9L’importance de l’esclavage dans la société romaine contribuait à faire des personnes des objets de butin recherchés ; pour reprendre les mots de Claude Lepelley, on peut dire que « l’histoire de la jeune fille enlevée par des brigands de la maison de ses parents et vendue dans une région lointaine, lieu commun habituel des romans grecs et latins, correspondait […] à une réalité ». Mais il faut en même temps souligner avec lui les limites de ce phénomène. Il ne connaissait une véritable recrudescence que lorsque « l’autorité publique n’était plus capable de faire régner l’ordre et la loi31 ». La correspondance d’Augustin offre un aperçu d’une de ces périodes dans les années 420. La lettre Divjak 1032 en particulier, adressée à Alypius de Thagaste, insiste sur les ravages des marchands d’esclaves galates, les mangones. Elle montre aussi les protections que ces derniers trouvaient et la variété de leurs fournisseurs : des bandes de ravisseurs, mais aussi un mari cupide qui vend sa femme, une femme d’Hippone qui tend des pièges à des campagnardes pour les vendre. Ce sont finalement 120 personnes qui furent libérées à Hippone sous l’impulsion d’Augustin. Pour le iiie siècle, la correspondance de Cyprien, en particulier sa lettre 6233, offre un écho notable à celle de l’évêque d’Hippone. Il ne s’agit plus de Galates mais de barbares de Numidie, le problème est cependant le même : la capture de libres et leur asservissement. Toutefois l’évêque de Carthage n’est pas en situation, comme le fut Augustin, d’en appeler à la loi. La libération doit passer par une rançon. La lettre de Cyprien témoigne d’une situation de difficultés locales dans une province au dispositif militaire transformé et affaibli depuis plus d’une dizaine d’années, difficultés graves qui transparaissent avant tout dans la documentation épigraphique et en particulier en 253 dans le « bulletin de victoire » du gouverneur Caius Macrinius Decianus qui avait vaincu, entre autres, les Fraxinenses qui ravageaient la province de Numidie (qui provinciam Numidiam vastabant)34.
10Les raids barbares profonds et massifs qui au cours du iiie siècle percèrent ponctuellement mais à plusieurs reprises le dispositif frontalier romain sur le Rhin et le Danube se traduisirent, semblablement, par d’importantes saisies humaines35. L’inscription de l’autel de la Victoire d’Augsbourg l’a illustré éloquemment. Ce sont des milliers de captifs italiens qui sont libérés en 260 grâce à la victoire de Marcus Simplicinius Genialis (excussis milibus Italorum captivor[um])36. Ce que l’Italie et les provinces internes ne subissaient qu’exceptionnellement à l’occasion de raids audacieux ou de périodes de difficultés extrêmes, les provinces frontalières durent l’expérimenter bien plus régulièrement et rudement. Les guerres du règne de Marc Aurèle constituèrent sans doute un moment marquant à cet égard. Lors de négociations de paix, les Quades promirent de rendre treize mille captifs et déserteurs, puis d’autres ensuite en nombre indéterminé37. Mais par la suite ils ne s’acquittèrent pas réellement de ces promesses, ne rendant que des captifs sans intérêt pour eux ou exerçant des pressions pour faire revenir les autres38. Finalement, en 175, après neuf années de guerre dans les régions pannoniennes, ce sont cent mille captifs que les Sarmates Iazyges vaincus auraient finalement rendus à l’Empire romain, aux dires de Dion Cassius. L’historien bithynien précise que le nombre réel de captifs avait été bien supérieur mais que beaucoup étaient morts ou avaient été vendus39. Comme on l’a vu, la paix n’apporta pas une solution à tous les problèmes et, dix ans plus tard, l’empire proclamait qu’il fortifiait la région contre les incursions des latrunculi. On doit bien sûr s’interroger très sérieusement sur la validité de ces chiffres, ils expriment en tout cas un ressenti considérable et une situation installée, durable.
11Ramener la paix, c’était donc pour l’empire rétablir la sécurité des personnes mais aussi permettre le retour des captifs et l’exercice du postliminium. Celui-ci ne se déroulait pas toujours par le biais de la victoire, et comme on l’a vu avec Cyprien, seul le rachat permettait souvent le retour. Comme l’a observé Hervé Huntzinger, le retour à l’ordre tétrarchique montre un effort législatif sur le rachat des esclaves et l’application du postliminium40. De nombreux rescrits témoignent des cas qu’il fallait trancher. Plus fondamentalement, par-delà les cas individuels, il fallait favoriser le retour des captifs et pour cela il fallait protéger les intérêts des marchands d’esclaves : le captif racheté, redemptus, ne retrouvait sa liberté complète qu’après remboursement du prix – pretium – qu’avait payé le marchand. Cela posait assurément un certain nombre de problèmes, les aspects juridiques sont ainsi particulièrement complexes et discutés, la situation pouvait donner lieu à des abus, le redemptor pouvant abuser de sa position. En considérant ces sources juridiques, on peut constater combien les situations de captivité pouvaient se prolonger, engager des histoires personnelles sur des années : les conséquences et le souvenir de la prédation étaient durables. Si, déjà en 50, Pomponius avait libéré des Romains capturés quarante et un ans plus tôt41, on en donnera deux autres exemples pour notre période. Un rescrit de Septime Sévère et Caracalla à Ovinius Tertullus mentionne le cas d’une femme née en Sarmatie de deux parents captifs42. Ovinius fut gouverneur de Mésie inférieure entre 198 et 20143. La naissance d’une enfant suppose un certain temps de captivité, on pourrait se demander si la capture des parents ne remontait pas aux difficultés des règnes de Marc Aurèle et Commode que nous avons précédemment évoquées. Une telle durée ne serait pas étonnante au regard de notre second exemple. Un rescrit de Dioclétien et Maximien en 293 mentionne le cas d’une personne prise comme captive, Palmyrenae factionis dominatione44. La sécession de Palmyre avait pris fin dans l’été 272, vingt et un ans auparavant. Ce dernier cas nous rappelle aussi que les affrontements internes à l’empire, les guerres civiles, étaient tout autant l’occasion d’accès de prédation envers les personnes. La question se posa sans doute avec une acuité nouvelle lors des conflits qui suivirent la mort de Commode, et lorsque Ulpien précisait que ces cas ne relevaient pas du postliminium, il envisageait incontestablement des situations concrètes45. En raison des difficultés militaires et politiques de l’empire, la période allant du règne de Marc Aurèle à la Tétrarchie représenta donc incontestablement un moment d’accroissement des pratiques prédatrices tournées envers les sujets de l’empire. Cet accroissement fut sans doute marqué par une hétérogénéité considérable, il dut varier énormément selon les régions et les moments.
12Les conséquences furent importantes aussi pour le pouvoir impérial et ses représentations : il se devait de protéger ses sujets, l’exaltation de la tranquillitas et de la securitas qu’il garantissait avait des racines très concrètes. En cas d’échec, il lui appartenait de garantir le retour de chacun dans son statut en conciliant les ambiguïtés d’une société fondamentalement esclavagiste. À cet égard, obtenir le retour de captifs sans rachat, soit par traité comme dans le cas de Marc Aurèle, soit par une victoire sur les ennemis comme dans le cas de l’autel de la Victoire d’Augsbourg, était apprécié et appréciable car le postliminium s’appliquait directement sans que l’ancien captif ait à s’acquitter du pretium auprès de son racheteur. C’est la valeur des soldats des empereurs qui devait permettre de telle libération (virtute militum nostrorum)46. Les crises qui avaient touché l’empire avaient pourtant mis aussi, nous le verrons, l’armée en situation de prédatrice sur le sol même de l’empire.
L’impact de la prédation sur les biens
13Sauf trouvaille épigraphique exceptionnelle, comme celle d’Augsbourg, la prédation sur les personnes et ses circuits ont peu de chances d’apparaître clairement dans les sources archéologiques. On peut cependant en constater l’existence par la découverte ponctuelles d’entraves dans des contextes liés à des situations de prédation. Ce fut le cas dans les découvertes de Neupotz et d’Hagenbach. Ces découvertes archéologiques et leurs publications ont attiré à nouveau l’attention sur les aspects très matériels du butin, sur le pillage des biens et des richesses47, mais soulèvent d’importantes questions d’interprétation48. Il est en effet très difficile d’établir les modalités de provenance d’un objet archéologique trouvé en un lieu donné : comment distinguer l’objet parvenu par voie commerciale du cadeau diplomatique ou du butin49 ? Quelques cas apparemment sans ambiguïté existent, ainsi une main votive déposée par un soldat romain dans un sanctuaire en Dacie et retrouvée en Ukraine50. C’est le cas aussi des lamelles d’argent d’Hagenbach. Le « trésor » de Neupotz a en revanche fait l’objet de discussions.
14Par-delà le côté spectaculaire de ces trouvailles ponctuelles, il est difficile, voire impossible de formuler un bilan global de l’impact économique de ces pillages. Cet impact est cependant certain et a dû être fortement ressenti, par contraste avec la période prospère et la sécurité provinciale précédant les difficultés qui se manifestèrent à la fin de l’époque antonine puis se renouvelèrent plus fortement et plus généralement lors des diverses crises militaires du iiie siècle. Il faut toutefois résister à la systématisation et à la généralisation, et éviter d’exagérer les conséquences des cas qui nous sont connus. Ainsi, dans le cas du trésor d’Hagenbach, il faut observer que les plaques d’argent qui avaient été arrachées à un sanctuaire aquitain – c’est ce que l’on peut déduire des noms qu’elles portent51 – manquèrent sans doute peu à l’économie locale. Certes, elles finirent au fond du Rhin, mais il s’agissait d’une richesse immobilisée par une thésaurisation sacrée locale, et elles auraient pu tout aussi bien finir dans une cache maçonnée dans leur sanctuaire, à l’occasion d’une réfection, comme ce fut sans doute le cas du trésor de Berthouville52. On ne soutiendra pas ainsi évidemment que de tels raids étaient sans conséquences immédiates, mais il faut attirer l’attention sur les capacités de résilience des sociétés locales. À Dalheim, on peut réparer le portique et les bains mis à mal par la violence des barbares ui barbarorum53, car les ressources de la communauté des uicani permirent ce retour à la normalité.
15Plus largement, les conséquences du raid isolé n’étaient pas nécessairement catastrophiques mais avaient un fort impact psychologique54. La perte de l’argenterie d’un sanctuaire civique ne mettait pas immédiatement en danger l’économie locale, en revanche elle touchait clairement l’identité collective qui était représentée par ces monuments, la dignité de la cité était donc atteinte. Plus que le raid ponctuel, c’est la récurrence sur certaines régions qui fut dommageable, ou bien la concomitance d’un raid et de difficultés autres qui donnent à ses dégâts une importance critique. Ajoutons qu’un certain nombre d’aspects matériels de ces raids prédateurs nous échappent. Lors des raids les plus lointains, les pillards devaient vivre sur le terrain et fonder leur logistique sur l’extorsion puisant dans les réserves des exploitations agricoles, quand bien même leur cible principale pouvait être constituée d’établissements bien plus riches ou de sanctuaires. Ce ravitaillement qui pouvait se faire sans destruction notable ne saurait se voir dans nos sources, il pouvait cependant considérablement compliquer l’existence d’une exploitation pour peu que les récoltes aient été maigres. On ne saurait nier non plus le contexte de violence de ces raids et les crimes qui les accompagnaient55.
Des difficultés grandissantes pour l’empire
16Le déroulement des conflits montre que l’empire eut à faire face à des difficultés croissantes à partir du second tiers du iiie siècle. Il arriva un moment où certains raids barbares se dotèrent de véritables capacités de siège autorisant la prise de ville : un fragment célèbre d’Eusèbe de Nantes montre comment les Francs, lors du siège de Tours dans les années 260-270, firent usage de machines de guerre56. L’impact symbolique de telles actions, qui ne furent pas nécessairement des plus courantes, était sans doute bien plus fort que celui représenté par le pillage de villae dans la campagne ou la mise à sac de sanctuaires extra-urbains, car attaquer le cœur urbain des cités, c’était véritablement quitter le domaine du brigandage pour entrer dans celui de la guerre57. L’insécurité des villes touchait directement les aristocraties provinciales, couche sociale qui était le principal soutien du pouvoir impérial. D’autres zones, qui n’avaient pas pour les contemporains la dignité des villes, pouvaient être frappées de manière très perturbante pour le pouvoir central : les mines semblent avoir été particulièrement vulnérables aux raids58. Les difficultés de l’empire s’expliquent par des capacités plus grandes de la part de ses voisins barbares mais aussi par ses difficultés internes qui pouvaient rendre certaines de ses régions plus vulnérables.
17Ce développement de la prédation trouvait aussi ses causes dans les transformations du monde barbare en Europe centrale et orientale, transformations difficiles à cerner dans ces mondes sans écritures dont les métamorphoses profondes ne nous sont connues, bien souvent, que par l’évolution des cultures matérielles. Dans quelle mesure les pratiques de la prédation s’y sont-elles transformées ? Y eut-il le développement particulier d’une économie de la prédation, du conflit, du raid ? Une telle économie ne devait pas être comprise uniquement dans le sens matériel et financier : indépendamment de son contenu matériel, le butin procure aussi du prestige, une distinction et peut jouer un rôle social et politique majeur même s’il finit immergé dans un lac. On sait l’importance des dépôts de butin dans le sud de la Scandinavie à partir du iie siècle de notre ère59, qu’en était-il dans les régions barbares plus proches de l’empire ? On sait la place de la violence et du conflit dans ces sociétés barbares voisines de l’empire60, les circonstances et les transformations postérieures au iie siècle les ont-elles exacerbés ? Autant de questions difficiles à résoudre, qui engagent de nombreux domaines et dépassent notre propos : la place de la guerre et de la violence dans les sociétés barbares, leurs rapports à Rome, leur structuration et leur hiérarchisation sociales, leurs dynamiques économiques, leurs diversités culturelles et géographiques… Enjeux matériels et enjeux immatériels – comme le prestige – ne s’opposaient sans doute pas, et il serait sans doute réducteur et faux d’expliquer les raids du iiie siècle par une cause exclusive. La crise militaire et sa traduction en termes de prédation pouvaient avoir des racines multiples pour l’empire, tandis que pour les barbares la décision de mener un raid pouvait trouver des causes immédiates diverses et changeantes. Nous avons ainsi pu proposer, dans le cas du début du règne d’Aurélien, que des difficultés agraires liées à une situation climatique ponctuelle très spécifique aient joué comme facteur aggravant61. La question peut être posée pour d’autres cas, son approche ne peut être que prudente.
18Pour l’empire, les crises militaires et politiques qui marquèrent la seconde moitié du iiie siècle eurent un coût non négligeable et se soldèrent, à terme, par l’abandon de territoires, en Dacie et sur la rive droite du Rhin, et par le déplacement des élites habitant ces régions62. Le plus grave fut cependant le passif financier de l’empire, dû à la situation militaire, mais celle-ci engageait bien plus que les raids des barbares d’Europe qui ne doivent pas éclipser les conséquences de la menace des Perses sassanides et les conséquences des guerres civiles63. À un autre niveau, on peut s’interroger sur d’autres conséquences économiques indirectes de cette situation d’insécurité. L’économie impériale romaine et sa prospérité ont récemment été considérées dans le cadre d’une approche en termes d’économie institutionnelle dans la continuité des analyses économiques de la nouvelle économie institutionnelle élaborée en particulier par Douglass North64. Jusqu’où la capacité de l’empire à faire baisser les coûts de transaction sur son territoire par la mise en place d’une propriété privée protégée et d’institutions encourageant le commerce joua dans l’intégration des économies générales et la mise en place d’une éventuelle croissance ? La question est difficile et débattue. Mais on peut par contraste s’interroger sur la situation entraînée par un risque de prédation plus élevé : dans quelle mesure la perspective de pillage, la difficulté à circuler et le poids fiscal plus grand de l’armée purent contribuer à un processus partiel de désinstitutionnalisation de l’économie, en parallèle avec d’autres phénomènes indépendants, comme la disparition des métiers de banque à la même époque ? Le développement de la prédation aux dépens de Rome65 entraînait un risque nouveau qui, à terme, n’était sans doute pas négligeable dans les grands équilibres économiques de l’empire, puisque ces derniers semblent avoir reposé sur des marges étroites66.
19Si l’on considère la période à l’échelle des cités, il faut convenir que c’était, pour elles, la survenue d’un risque nouveau ou, pour les plus anciennes, oublié67. Face à ce risque, leur vulnérabilité était très inégale et dépendait de nombreux facteurs : localisation géographique, taille de la cité, proximité d’une garnison romaine, présence d’une muraille, réactivité de la population, capacité à mobiliser les puissants personnages qui pouvaient décider de la protection de la cité… Les cités n’étaient donc pas totalement dépourvues de capacités à faire face68. Elles pouvaient aussi faire preuve d’une remarquable résilience : se remettre des dévastations d’un raid n’exigeait sans doute pas des capacités bien différentes de celles mobilisées pour se remettre d’un incendie, d’une inondation, d’un séisme ou d’une pestilence. Comme pour les autres calamités, c’est surtout, semble-t-il, la récurrence ou la survenue simultanée de crises de natures différentes qui épuisent les cités.
20Dans une certaine mesure, il était possible, face à la prédation, de corriger partiellement sa vulnérabilité en se dotant d’une muraille, de fortifications. Pour une région qui se considérait comme particulièrement exposée, la meilleure des protections envisageable fut rapidement la présence de l’empereur, présence qui normalement garantissait la sécurité et l’intérêt bienveillant du défenseur de l’empire. Certes, la présence d’un empereur pouvait garantir une tranquillité face à la prédation, mais une telle attente de la part des provinciaux favorisa les usurpations. L’instabilité du pouvoir impérial, en partie liée à cette situation, entraîne aussi une insécurité provinciale : les armes des compétiteurs au pouvoir s’affrontent, choisir le mauvais parti, c’est s’exposer au pillage. Autun et les Éduens en firent l’amère expérience. Après la mort de Postumus, ils subirent un long siège – sept mois – face à l’armée de Victorinus, soucieuse de punir une puissante cité qui avait tenté de renouer avec le pouvoir légitime romain69. Même s’il faut observer que de tels sièges sont plus l’exception que la règle, cet exemple illustre bien la capacité de certaines villes à résister au pouvoir en place et le paradoxe qui frappe l’empire dans de tels cas : sa défense contre les conflits génère des conflits internes à l’empire, la prédation est finalement conduite par celui qui doit l’empêcher. Au regard du point de résistance que pouvait constituer une cité mobilisée et dotée de bonnes murailles, de l’appui potentiel qu’elle pouvait donner à un usurpateur, on comprend que Dexippe – qui en son temps avait défendu Athènes contre un raid des Hérules – ait souligné, à propos de Trajan Dèce, l’ambiguïté du pouvoir impérial face aux capacités de défense locales :
Dèce, l’empereur de Rome, considérait avec crainte la force combative des Thraces, redoutant qu’elle ne fût à l’origine de quelque coup de force menaçant la stabilité de son pouvoir. Aussi s’efforça-t-il, dans une lettre, de les empêcher de mener une sortie contre les ennemis : sans laisser paraître les intentions qu’il avait en tête, il tâchait de les contrôler par la peur, pour éviter qu’en allant trop loin, ces gens sans expérience de la guerre n’eussent à vérifier le caractère inopportun de leur impulsivité, avant que les secours qu’il leur envoyait ne pussent être sur place70.
21La nécessité de faire face à la prédation entraîne donc une redistribution des capacités de défense, ce qui ne manquait pas à terme de conséquences politiques : dans un contexte de guerre civile, une cité fortifiée contre les barbares pouvait aussi constituer un problème pour une armée impériale, l’armée redéployée engageait des rapports nouveaux avec les civils et les autorités. Dans une certaine mesure, la redéfinition des risques et des capacités de les affronter peut aussi déterminer une redéfinition de l’usage de l’espace : à terme le cœur des villes se contracte, se ferme et se fortifie, même si l’on sait aujourd’hui que ce mouvement fut bien plus lent et ordonné que ce que l’on avait un temps imaginé ; les campagnes doivent aussi se protéger71, se résoudre parfois à être abandonnées à leur sort.
L’empire prédateur
22Le monopole progressivement mais fermement imposé par Auguste sur les dividendes de la victoire militaire, des plus matériels aux plus symboliques, avait placé la question du butin fait par les armées romaines en dehors des luttes politiques : comme l’apprit à ses dépens Licinius Crassus72, le temps des imperatores était bel et bien fini. Ce monopole dura jusqu’au Bas-Empire73, pourtant les difficultés militaires du iiie siècle ramenèrent, mais d’une manière nouvelle, le butin au cœur des débats politiques implicites qui animaient l’empire. C’est d’abord l’absence du butin qui amena le débat sur les guerres de l’empire. Après la mise en coupe réglée de la Dacie et de ses trésors par Trajan, au début du iie siècle, la partie occidentale de l’empire ne recelait plus de terres extérieures susceptibles d’offrir un butin considérable : les guerres ne pouvaient qu’y être coûteuses. L’Orient sembla offrir des possibilités plus grandes tant que Rome put accéder au cœur de la Mésopotamie. Bien que terni par l’historiographie de la fin de l’Antiquité, le pillage de Séleucie du Tigre par les troupes d’Avidius Cassius entraîna un butin non négligeable : de très nombreux captifs, des objets précieux rapportés à Rome. Les bénéfices en furent sans doute cependant rapidement dilapidés par le retour coûteux des nombreuses troupes engagées dans le conflit, par le triomphe fastueux des deux Auguste puis par les difficultés considérables touchant l’empire, menaces graves sur le Danube et épidémie de peste qui fut finalement même attribuée à la rapacité des soldats lors du sac de Séleucie74. Le pillage de Ctésiphon par les troupes de Septime Sévère procura assurément encore un butin considérable et glorieux : les trésors du Grand Roi des Parthes. Hérodien y voit un effet de la fortune, mais Dion souligne comment l’armée agit comme si son seul but était le pillage75. Dans cette région toutefois, ces succès du début 198 furent les derniers pour une longue période.
23L’arrivée au pouvoir des Sassanides inversa la situation stratégique, et ce fut Rome qui fut obligée de subir la prédation de son voisin. À l’exception possible des coups de main audacieux et heureux d’Odénath76, il fallut attendre Carus et Numérien dans l’été 283 pour voir les armées romaines prendre à nouveau les grandes cités de la Mésopotamie perse77. Dans l’économie générale de l’empire, les guerres s’inscrivent désormais dans le passif, et tout effort militaire, même couronné de succès, est subordonné à l’exercice d’une pression fiscale. Ce fut la réponse de Marc Aurèle à ses soldats, demandant une gratification après la victoire : tout ce qu’il pourrait leur donner serait pris à leurs concitoyens et parents78. Tous les empereurs ne voulurent ni ne purent maintenir une telle attitude : il s’agissait aussi de tenir compte des demandes d’une armée professionnelle pour qui les guerres se révélaient bien plus dures et difficiles. Dans un empire très inégalement exposé à la prédation de ses voisins, ce sont alors les exigences fiscales impériales qui pouvaient passer pour prédatrices aux yeux des régions et couches sociales protégées. La situation est alors dépeinte sous les traits de la tyrannie et du paradoxe : le mauvais prince cupide ravage son empire et lui extorque les richesses que la victoire ne lui donne pas. Deux exemples peuvent illustrer la situation. Traditionnellement, la célébration d’une victoire impériale entraînait une demande d’or coronaire79. C’était une pratique qui remontait à l’époque hellénistique et républicaine, les cités offrant des couronnes d’or au prince victorieux. Pratique au départ proche du butin, c’était aussi pour les cités une occasion de communication politique avec le pouvoir victorieux. Sous l’empire, ce dernier caractère ne s’était pas perdu, mais la pratique avait aussi évolué vers un impôt déguisé exceptionnel. Tout l’empire devait célébrer la victoire en envoyant de l’or et de l’argent – les couronnes étaient toujours réalisées mais comptaient moins que les sommes réelles. Les bons empereurs pouvaient en faire remise80, les mauvais en abusaient. Ce fut le cas de Caracalla, aux dires de Dion Cassius, qui enchaîna conflit après conflit et pressura les contribuables – jusqu’aux sénateurs81. Sans butin véritable, les victoires devenaient coûteuses pour tous, elles perdaient leur sens et ne pouvaient plus offrir une légitimation au pouvoir de l’empereur. Le récit du règne de Maximin dans l’œuvre d’Hérodien en offre un second exemple et montre l’aggravation de la situation. Dans le récit de ce dernier, les expéditions de Maximin en terre germanique ne sont pas dépourvues de butin82, mais le coût politique en est trop lourd : « À quoi bon faire du butin sur l’ennemi si c’était pour dépouiller et priver ses compatriotes de leurs biens83 ? » Et finalement, pour Hérodien, c’est la pression fiscale exercée sur les biens des cités qui paraît un siège et un pillage, les identités civiques sont heurtées par la confiscation des ornements des cités et des biens de temples, trésors sacrés qui ne finirent pas dans un bras du Rhin mais dans les ateliers monétaires impériaux84. La révolte de Thysdrus montre qu’il ne s’agit pas là seulement de la rhétorique propre à Hérodien et que cela témoigne des graves déséquilibres induits par l’hétérogénéité de la pression prédatrice sur un empire qui ne saisit pas les priorités militaires partout de la même manière.
24Empêcher les barbares de faire du butin, en faire soi-même à leurs dépens et à quel coût ? Avec la répétition des crises militaires après 230, cela devint un enjeu finalement vital dans les relations du pouvoir impérial avec les cités et avec l’armée. Comme Hérodien lui-même le reconnaît dans le cas de Maximin, ces guerres permettaient bel et bien de faire, malgré tout, du butin, ce qui posait la question de son usage et de sa répartition. Un cas nouveau apparut cependant, le butin de butin. La situation décrite par l’inscription d’Augsbourg semble avoir été assez typique : c’est à leur retour que les pillards barbares sont attaqués par l’armée romaine, alors qu’ils sont encombrés de captifs et de richesses. C’était déjà la situation de Pomponius contre les Chattes dans les années 50, ce fut aussi ce qui permit à Marc Aurèle de punir les Marcomans de leurs incursions dans l’empire : « Il mit en déroute les Marcomans pendant qu’ils traversaient le Danube et rendit aux habitants des provinces le butin qu’ils leur avaient pris85. » On a vu l’importance de la libération des captifs dans cette situation. La récupération du butin matériel soulève d’autres problèmes : comment rendre aux provinciaux ce qui a été pris, comment savoir à qui rendre de l’argenterie découpée en morceaux, des pièces, des outils agricoles, des ex-voto, de la vaisselle ? Nul doute que le fisc impérial devait reprendre une grande partie de ces richesses. Comment une telle situation était-elle perçue, organisée ? Des dérives étaient possibles, comme en témoigne l’histoire de Carausius au début du règne de Dioclétien, telle que racontée par Eutrope : « Il faisait souvent prisonniers de nombreux barbares mais le butin n’était pas intégralement rendu aux provinciaux ni envoyé aux empereurs ; on s’était mis à le soupçonner de laisser passer à dessein les barbares afin de les intercepter avec le butin et de s’enrichir à cette occasion86. » On voit là une collusion objective entre les barbares et ceux qui, censés pourtant défendre l’empire, pouvaient également recueillir les fruits de la prédation. Il s’agit certes aussi d’accabler un usurpateur qui résista longtemps et fièrement au pouvoir légitime : la figure de Carausius reste définitivement marquée par l’image très dévalorisante qu’élaborèrent à son encontre les Tétrarques et leurs soutiens. Carausius – comme ensuite son successeur Allectus – est un archipirate, le chef d’une bande de pirates rebelles, image que l’historiographie moderne a volontiers reprise, même s’il fut un acteur politique qui revendiquait la même légitimité qu’un Dioclétien ou un Maximien87. On peut alors légitimement se demander si ce que l’on observe pour l’usurpateur n’existait pas aussi dans une certaine mesure pour le pouvoir ordinaire.
25Le comportement de Carausius par rapport au butin ne soulevait pas qu’une question d’enrichissement personnel et de corruption, il engageait aussi un rapport politique à ses soldats. Les questions de la répartition du butin et de son usage avaient en effet pris une importance considérable à partir des grandes crises militaires des années 250. Le pouvoir impérial devait répondre aux demandes de l’armée. Incapables de trouver la victoire, ses titulaires sont dans une position fragile, et leur pouvoir est éphémère lorsqu’ils ne peuvent faire face. Même pour ceux qui parviennent à durer, comme Gallien, Postume, Aurélien ou Probus, la situation n’est jamais acquise. Le partage du butin est un élément important des rapports entre l’empereur et ses troupes, il a pu devenir déterminant, vital. Il n’engageait pas nécessairement uniquement le rapport entre l’empereur et les soldats du rang, il faut aussi penser au noyau des officiers qui entouraient le prince et faisaient la médiation avec les troupes. On jugera de l’importance politique de cette question du butin au regard de deux récits notables et opposés.
26Tout d’abord l’histoire de Postume, ou plutôt la double histoire de Postume : celle de son accession au pouvoir et celle de sa chute. Deux versions de son accession au pouvoir nous sont procurées par nos sources. Dans l’une, il est un usurpateur involontaire, porté au pouvoir par les troupes. Dans l’autre, plus proche peut-être de la vérité, plus précise en tout cas, et qui semble remonter à Dexippe mais qui nous a été transmise par Zosime et Zonaras, Postume prend le pouvoir pour une raison de partage du butin :
Postume, commis à la garde du Rhin pour interdire aux barbares qui habitaient au-delà du fleuve le passage en territoire romain, s’en prit à un parti qui avait réussi à traverser le fleuve à son insu et revenait chargé de butin : il en tua un grand nombre, leur enleva tout le butin et le partagea aussitôt entre ses soldats. Albanus, l’ayant appris, lui envoya l’ordre de le lui livrer, ainsi qu’au jeune Gallien. Postume appela alors ses soldats et leur réclama leur part de butin dans le but de les exciter à la révolte ; ce qui advint88.
27Malgré ses approximations – Albanus est en fait Silvanus et le jeune Gallien est en fait Salonin qui se trouvait alors à Cologne –, ce récit a le mérite de nous montrer comment la répartition du butin est un enjeu disciplinaire mais aussi un levier politique et le symbole du pouvoir. Postume fut porté sur le trône grâce à sa capacité à distribuer du butin, son refus de le faire lui coûta en revanche finalement la vie. Eutrope raconte comment « il fut tué au cours d’une révolte de ses soldats, pour n’avoir pas autorisé la troupe à piller Mayence qui s’était soulevée contre lui au moment où Laelianus fomentait sa révolte89 ».
28Notre second cas, en revanche, nous montre qu’il n’y avait pas de fatalité et témoigne qu’un empereur pouvait encore reprendre en main le contrôle de ses armées qui ne s’étaient pas laissées complètement aller à la prédation. Il s’agit d’Aurélien parti à la reconquête de la partie orientale de l’empire, passée sous le pouvoir de Zénobie de Palmyre, et arrivant devant la ville de Tyane90. Celle-ci refuse de se rendre et ferme ses portes. Furieux, Aurélien décrète que, une fois Tyane prise, il ne laissera pas un chien vivant dans la cité. C’était promettre à ses troupes un sac complet de la ville en utilisant une image que l’on peut déjà trouver dans Polybe, une vieille tradition de l’armée romaine91… Mais la ville ne fut pas mise à sac, et pour faire face aux demandes de ses soldats, privés d’un butin désiré, Aurélien répondit : « J’ai dit que je ne laisserai pas un chien vivant dans cette ville ? Eh bien ! Tuez tous les chiens92. » L’Histoire Auguste ne détaille pas plus le discours d’Aurélien et dépeint la noble attitude des soldats convaincus, apparemment, par ce jeu de mots. C’est que l’auteur anonyme tardif est plus intéressé par une longue digression de son cru sur Apollonius de Tyane. Une autre source, mal connue, l’Anonymus post Dionem, précise les choses : Aurélien y convainc ses soldats en distinguant une guerre de libération d’une guerre de conquête, en expliquant les raisons stratégiques qui empêchaient de piller la ville, il s’agissait de travailler au ralliement de l’empire : « Nous combattons pour libérer ces villes et, si nous commençons par les saccager, alors elles ne nous seront plus loyales ; il vaudra mieux chercher le butin sur les Barbares, en épargnant celles-ci qui sont nôtres93. » La prédation n’était donc pas une fatalité, le redressement de l’empire pouvait s’appuyer aussi sur son armée et sur le groupe d’officiers efficaces qui s’étaient emparés du pouvoir à partir de la mort de Gallien. Aurélien réussit là où Postume échoua. Il permit le pillage de Palmyre quand même, lors de la seconde prise de la ville, mais il s’agissait là d’un message politique bien plus que de céder aux soldats94…
29La prédation jouait donc un rôle important et accru dans les pratiques militaires romaines. Le butin apparaît comme un enjeu tactique essentiel. Il concourait grandement à la motivation des soldats. À la fin de l’Antiquité, le butin est l’horizon d’attente du soldat professionnel en campagne pour Végèce, et un puissant moyen de l’encourager95. Cette motivation avait cependant un revers grave en termes de discipline et de cohésion au combat, la précipitation pour profiter des dépouilles de l’ennemi pouvait désorganiser les premiers rangs dans la bataille et entraîner le retournement de son issue, parce qu’on la croyait gagnée. L’Histoire Auguste place sous Claude un tel épisode96. Même si la victoire ne fut pas, cette fois-ci, remise en cause, la cupidité et l’inconscience de ses soldats auraient alors coûté la vie à deux mille hommes. Claude aurait alors sévi fortement envers les soldats. S’il est difficile de se prononcer sur la réalité de cet épisode particulier, qui a pu être aussi bien inventé que repris à la narration de Dexippe, il s’agissait en tout cas réellement d’une question tactique importante et présente dans la longue durée de l’histoire militaire, comme en témoigne le Strategikon de Maurice97. Le comportement prédateur des soldats pouvait aussi être coûteux, on l’a vu, quand il se retournait contre l’empire à l’occasion de guerres civiles, de conflits entre usurpateurs. Les déplacements de troupes pouvaient alors se révéler très pesants, bien plus que les exigences courantes que des soldats en déplacement pouvaient avoir auprès des civils98. Toutefois, en temps plus ordinaire et dans la mesure de ses capacités, le pouvoir impérial s’attachait à montrer qu’il disciplinait ses soldats et protégeait les cités et les communautés locales, ces dernières pouvant faire graver sur la pierre le rappel à l’ordre de l’empereur pour dissuader les soldats cupides99.
30Les crises militaires qui touchent l’empire entre 155 et 285 montrent incontestablement que la question de la prédation s’est réimposée avec force au sein des rapports politiques et militaires dans le monde romain. La prédation n’est plus le privilège d’une armée romaine conquérante, elle est aussi subie, il faut s’en défendre, il faut en jouer. Elle devient donc un enjeu important pour le pouvoir et s’impose dans les représentations politiques, le bon empereur doit protéger ses provinces des raids barbares, affaiblir leur cupidité100, restituer le butin aux provinciaux, en faire lui-même aux dépens des ennemis. Au cœur des difficultés, dans le contexte d’un empire divisé et affaibli, la prédation semble un enjeu essentiel dans les rapports du prince face à ses soldats, elle est en tout cas, pour l’historiographie ancienne de la période, une pierre de touche pour distinguer l’usurpateur de l’empereur légitime. Le redressement du ive siècle ne constitua pas un retour en arrière : le défi de la prédation resta présent jusqu’à la fin de l’empire.
Notes de bas de page
1 SHA [= Scriptores Historiae Augustae], Divus Aurelianus, X, 2 : […] exercitum duceret, limitem restitueret, praedam militibus daret, Thracias bubus, equis, mancipiis captivis locupletaret, manubias in Palatio conlocaret, quingentos servos, duo milia vacarum, equas mille ovium decem milia, caprearum quindecim in privatam villam Valeriani congereret ([Aurélien] dirigea l’armée, rétablit l’intégrité des frontières, distribua le butin aux soldats, enrichit les provinces de Thrace de bœufs, de chevaux et d’esclaves qu’il avait capturés, déposa les dépouilles de guerre au palais et regroupa dans la maison privée de Valérien cinq cents esclaves, deux mille vaches, mille juments, dix mille moutons, quinze mille chèvres) (Histoire Auguste, t. V, 1re partie, éd. François Paschoud, Paris, Les Belles Lettres, 1996, p. 23, 87-88, 324 ; traduction française par André Chastagnol, Histoire Auguste, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1994, p. 981).
2 Tacite, Agricola, XXX, 6-7.
3 Id., Histoires, IV, 73-74.
4 Coudry, Humm (éd.), Praeda. Butin de guerre et société dans la Rome républicaine, op. cit.
5 Voir ainsi Historisches Museum der Pfalz (éd.), Geraubt und im Rhein versunken: der Barbarenschatz, Stuttgart, Theiss, 2006 ; Jean-Jacques Aillagon (éd.), Rome et les Barbares. La naissance d’un nouveau monde, Venise, Skira, 2008.
6 Lars Jørgensen, Birger Storgaard, Lone G. Thomsen (éd.), The Spoils of Victory. The North in the Shadow of the Roman Empire, Copenhague, Nationalmuseet, 2003. Pour un bilan en français sur ces dépôts : Xavier Pauli Jensen, « Les armes sacrifiées au Nord : les armes votives de l’Antiquité scandinave », dans Alain Testart (éd.), Les armes dans les eaux, Paris, Errance, 2012, p. 167-192.
7 Jean Krier, « Deae Fortunae ob salutem imperii. Nouvelles inscriptions de Dalheim (Luxembourg) et la vie religieuse d’un vicus du nord-est de la Gaule à la veille de la tourmente du iiie siècle », Gallia, 68-2, 2011, p. 313-340.
8 Bernadette Puech, « Comment il faut écrire, dans la tradition classique, l’histoire des guerres romaines contre les Barbares », Ktema, 36, 2011, p. 43-56.
9 Ainsi Jana Grusková, Gunther Martin, « Ein neues Textstück aus den “Scythica Vindobonensia” zu den Ereignissen nach der Eroberung von Philippopolis », Tyche, 29, 2014, p. 29-43.
10 Bilan et bibliographie sur les recherches récentes : Sylviane Estiot, « De Pertinax à la réforme de Dioclétien (192-294) », dans Michel Amandry, Donald Bateson (éd.), A Survey of Numismatic Research 2002-2007, Glasgow, International Numismatic Commission, 2009, p. 157-174, ici p. 157-158 sur les trésors et 165-166 sur la « crise » du iiie siècle.
11 Par exemple Sylviane Estiot, « Une campagne germanique de l’empereur Probus : l’atelier de Ticinum en 277-278 », dans Ségolène Demougin et al. (éd.), H.-G. Pflaum, un historien du xxe siècle, Genève, Droz, 2006, p. 207-247 et pl. V-IX, ici p. 223-226 sur l’insécurité dans les provinces.
12 Estiot, « Une campagne… », art. cité, p. 225, n. 44, et précédemment id., « Le iiie siècle et la monnaie : crise et mutations », dans Jean-Luc Fiches (éd.), Le iiie siècle en Narbonnaise. Données régionales sur la crise de l’Empire, Sophia-Antipolis, 1996, p. 33-70, ici p. 56-63.
13 Ainsi Paul Van Ossel, Établissements ruraux de l’Antiquité tardive dans le nord de la Gaule, Paris, Éd. du CNRS, 1992, ici p. 35, 49-53, 69-72 ; Andrew Pearson, « Piracy in Late Roman Britain: A Perspective from the Viking Age », Britannia, 37, 2006, p. 337-353, ici p. 345-346. Bilan récent sur ces questions dans Paul Van Ossel, « Les cités de la Gaule pendant la seconde moitié du iiie siècle. État de la recherche et des questions », dans Regula Schatzmann, Stefanie Martin-Kilcher (éd.), L’Empire romain en mutation. Répercussion sur les villes dans la deuxième moitié du iiie siècle. Colloque international Bern/Augst (Suisse, 3-5 décembre 2009), Montagnac, Monique Mergoil, 2011, p. 9-22, ici p. 12-15.
14 Voir par exemple Fraser Hunter, dans son compte rendu de Jørgensen et al., The Spoils of Victory…, op. cit., dans Britannia, 36, 2005, p. 519-520, ou encore Alain Ferdière, « Voyage à travers les campagnes de la Gaule romaine - XIII », Revue archéologique du Centre de la France, 47, 2008, p. 11-13 (http://racf.revues.org/1240) à propos de Neupotz.
15 Michel Christol, L’Empire romain du iiie siècle. Histoire politique, Paris, Errance, 2006, p. 117-118. C’est à partir de ses grandes scansions chronologiques qu’il faut aborder la période.
16 Sur cette situation, on verra les réflexions de John F. Drinkwater, The Alamanni and Rome, 213-496 (Caracalla to Clovis), Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 77-79, dans une tendance, il faut le dire, assez générale de son ouvrage à minimiser la menace barbare.
17 Voir les réflexions de Van Ossel, « Les cités de la Gaule… », art. cité, p. 12-15.
18 Aelius Aristide, En l’honneur de Rome, ici § 30, 32-33, 70, 100-101.
19 Pour la piraterie : David Braund, « Piracy under the principate and the ideology of imperial eradication », dans John Rich, Graham Shipley (éd.), War and Society in the Roman World, Londres/New York, Routledge, 1993, p. 195-212. Pour les brigands, la meilleure introduction reste l’article de Brent D. Shaw, « Le bandit », dans Andrea Giardina (éd.), L’homme romain, Paris, Seuil, 2002, p. 385-435.
20 Benoît Rossignol, « Les attitudes de quelques agents du prince à l’époque des guerres des règnes de Marc Aurèle et Commode », Cahiers Glotz, 21, 2010, p. 119-137, ici p. 125-128.
21 Pour les provinces hellénophones : Cédric Brélaz, La sécurité publique en Asie Mineure sous le Principat (ier-iiie siècle ap. J.-C.), Bâle, Schwabe, 2005.
22 Tacite, Annales, XII, 27-28. PIR2 [= Prosopographia Imperii Romani], P 754, voir aussi P 756.
23 Ibid., 29-30.
24 Id., Histoires, IV, 50.
25 Pline, Histoire naturelle, V, 38.
26 Tacite, Histoires, IV, 50 : Gentem indomitam et inter accolas latrociniis fecundam.
27 Id., Annales, IV, 23.
28 RIB [= Roman Inscriptions of Britain], 2174-2177 ; Digeste, 49, 15, 6 ; Eric Birley, « Marcus Cocceius Firmus: an epigraphic study », Proc. Soc. Ant. Scotland, 70, 1936, p. 363-377, désormais dans id., Roman Britain and the Roman Army, Kendal, 1953, p. 87-103 ; R. W. Davies, « A lost inscription from Auchendavy », Glasgow Archaeological Journal, 1976, p. 103-107. Sur le passage du Digeste, voir Hervé Huntzinger, La captivité de guerre en Occident dans l’Antiquité tardive, thèse de doctorat dirigée par Alain Chauvot, université de Strasbourg, 2009, t. 1, p. 69-70 ; t. 2, p. 90.
29 Selon la distinction exposée par Ulpien et conservée par Digeste, 49, 15, 24.
30 Sur ce dossier, voir Péter Kovács, « Burgus building inscriptions of Commodus from Pannonia », Sylloge Epigraphica Barcinonensis, VI, 2008, p. 125-138 (p. 136, il faut éliminer la personne d’Artorius Castus de sa reconstitution).
31 Claude Lepelley, Aspects de l’Afrique romaine, Bari, Edipuglia, 2001, p. 369-375, p. 373-374 pour les citations.
32 Saint Augustin, Epist. 10* ; voir aussi 24* ; voir Lepelley, Afrique romaine…, op. cit. ; Serge Lancel, Saint Augustin, Paris, 1999, p. 371-374.
33 Michel Christol, Regards sur l’Afrique romaine, Paris, Errance, 2005, p. 259-261.
34 CIL [= Corpus Inscriptionum Latinarum], VIII, 2615, p. 1739 ; voir Christol, Regards…, op. cit., p. 229-277, ici p. 236, 249.
35 N. Lensky, « Captivity and Romano-Barbarian Interchange », dans Ralph W. Mathisen, Danuta Shanzer (éd.), Romans, Barbarians, and the Transformation of the Roman World, Ashgate, Farnham/Cherry Street, 2005, p. 185-198.
36 Christol, L’Empire romain…, op. cit., p. 142. Voir infra, note 89.
37 Dion Cassius, LXXI (LXXII), 11, 2 (Exc. UG 57).
38 Ibid., 13, 3 (Exc. UG 59).
39 Ibid., 16, 2 (Exc. UG 61).
40 Huntzinger, La captivité…, op. cit., p. 305-306 ; sur les règles du retour et du rachat, voir p. 143-156.
41 Tacite, Annales, XII, 27.
42 CJ [= Codex Justinianus], 8, 50, 1 ; le rescrit est aussi cité par Ulpien : Digeste, 38, 17, 1, 3 (Ulpien, lib. XII ad Sabinum), et Digeste, 49, 15, 9 (Ulpien, lib. III ad legem Iuliam et Papiam).
43 PIR2 O 191. Voir ISM [= Inscriptiones Scythiae Minoris], II, 84, AE [= L’Année épigraphique], 1997, 1325 (Tomis), et CIL III, 781 (ILS [= Inscriptiones Latinae Selectae], 423) (Tyras).
44 CJ, 7, 14, 4.
45 Digeste, 49, 15, 21 (Ulpien, lib. V Opinionum).
46 CJ, 8, 50, 12 (28 décembre 293).
47 Sur ces aspects, beaucoup d’éléments ont été traités par Jerzy Kolendo, « Rome et les barbares : effets économiques des guerres sous le Haut Empire », dans Jean Andreau, Pierre Briant, Raymond Descat (éd.), Économie antique. La guerre dans les économies antiques. Entretiens d’archéologie et d’histoire, Saint-Bertrand de Comminges, Musée archéologique départemental, 2000, p. 377-398.
48 Ferdière, « Voyage… », art. cité ; voir surtout Jean Hiernard, « Un témoin archéologique exceptionnel des invasions du iiie siècle : la trouvaille de Hagenbach (Rhénanie-Palatinat) », Cahiers Glotz, 8, 1997, p. 255-260.
49 Pearson, « Piracy… », art. cité, p. 346-347.
50 ILS, 9171 ; AE 1998, 1113 ; ILD [= Inscriptiones latinae Daciae], 805 ; voir Kolendo, « Rome et les barbares… », art. cité, p. 386. Une clepsydre en bronze du musée de Francfort, donnée pour trouvée dans le Rhin, semble aussi avoir fait partie d’un butin, mais le contexte exact de sa trouvaille manque : AE 2003, 1279b.
51 Hiernard, « Un témoin archéologique… », art. cité.
52 Voir surtout Élisabeth Deniaux, « Les dédicants du sanctuaire de Berthouville (cité des Lexouii) » dans id. et al. (éd.), Sanctuaires, pratiques cultuelles et territoires civiques dans l’Occident romain, Bruxelles, Timpermann, 2006, p. 271-295, ici p. 291-292 ; sur le lien possible à la réfection : Patrice Lajoye, « Analyse sociale des donateurs du trésor de Berthouville (Eure) », dans Ralph Häussler (éd.), Romanisation et épigraphie. Études interdisciplinaires sur l’acculturation et l’identité dans l’Empire romain, Montagnac, Mergoil, 2008, p. 127-132 (moins fiable par ailleurs). Présentation générale : Kenneth Lapatin (éd.), The Berthouville Silver Treasure and Roman Luxury, Los Angeles, Getty Trust Publications, 2014.
53 Jean Krier, « Deae Fortunae ob salutem imperii. Nouvelles inscriptions de Dalheim (Luxembourg) et la vie religieuse d’un vicus du nord-est de la Gaule à la veille de la tourmente du iiie siècle », Gallia, 68-2, 2011, ici p. 332-333.
54 Voir, pour le cas de la Grèce entre les Costoboques et les Hérules, les réflexions d’Amelia Robertson Brown, « Banditry or Catastrophe? History, Archaeology, and Barbarian Raids on Roman Greece », dans Ralph W. Mathisen, Danuta Shanzer (éd.), Romans, Barbarians, and the Transformation of the Roman World, Ashgate, Farnham/Cherry Street, 2005, p. 79-96.
55 On verra par exemple John F. Drinkwater, The Alamanni and Rome, 213-496 (Caracalla to Clovis), Oxford, 2007, p. 78-79, avec notamment les 13 cadavres retrouvés dans le puits de la villa de Regensburg-Harting. De telles trouvailles sont cependant difficiles à interpréter, voir Simon Kramis, « La fontaine souterraine de la colonia Augusta Raurica : étude anthropologique des vestiges humains. Rapport préliminaire », dans Schatzmann, Martin-Kilcher (éd.), L’Empire romain en mutation, op. cit., p. 133-140.
56 Felix Jacoby, F. Gr. Hist., II, 101, 2, p. 480-482. Voir Hagith Sivan, « The Historian Eusebius (of Nantes) », Journal of Hellenic Studies, 112, 1992, p. 158-163 ; Jean-Pierre Callu, « D’Evagre à l’Histoire Auguste », dans Giorgio Bonamente, François Paschoud (éd.), Historiae Augustae Colloquium Genevense, Bari, Habelt, 1994, p. 71-87, ici p. 76-77 ; Puech, « Comment il faut écrire, dans la tradition classique, l’histoire des guerres romaines contre les Barbares », art. cité, p. 47-48.
57 En témoigne le passage d’Hérodien sur Maternus et les déserteurs (I, 10, 1-2) : le passage du brigand à l’ennemi au moment où l’on passe du pillage des villages et campagnes à l’attaques des grandes cités.
58 Voir Slobodan Dušanić, « Army and Mining in Moesia Superior », dans Géza Alföldy, Brian Dobson, Werner Eck (éd.), Kaiser, Heer und Gesellschaft in der Römischen Kaiserzeit, Stuttgart, Franz Steiner, 2000, p. 344-363, ici p. 347-349.
59 Cette pratique du « sacrifice de butin », bien attestée en Scandinavie, ne manquait pas de surprendre les Romains, comme en témoigne Orose, Histoires, V, 16, 5-6. On notera au passage que, dans des trouvailles comme celle de Neupotz ou d’Hagenbach, les interprétations comme dépôt votif ou comme butin ne sont pas exclusives l’une de l’autre. Sur les trouvailles scandinaves, outre les références indiquées supra en notes 6 et 14, on pourra voir les courtes synthèses de Charlotte Fabech, « Booty sacrifices in Southern Scandinavia. A history of warfare and ideology », dans Eva Björklund et al., Roman Reflections in Scandinavia, Rome, L’Erma di Bretschneider, 1996, p. 135-138 ; Ruth Blankenfeldt, Andreas Rau, « Die skandinavischen Kriegsbeuteopfer. Befunde, Funde und Interpretationen », dans Varusschlacht im Osnabrücker Land GmbH/Museum und Park Kalkriese (éd.), 2000 Jahre Varusschlacht. Konflikt, Stuttgart, Konrad Theiss, 2009, p. 132-139.
60 Brève synthèse et bibliographie dans Hans-Peter Hasenfratz, « Feind und Freund. Zur Kulturgeschichte der Aggression bei den Germanen », dans Varusschlacht im Osnabrücker Land GmbH/Museum und Park Kalkriese (éd.), 2000 Jahre Varusschlacht, op. cit., p. 285-289.
61 Benoît Rossignol, Sébastien Durost, « Volcanisme global et variations climatiques de courte durée dans l’histoire romaine (ier s. av. J.-C.-ive s. ap. J.-C.) : leçons d’une archive glaciaire (GISP2) », Jahrbuch des römisch-germanischen Zentralmuseums, 54, 2007, p. 395-438, ici p. 429. Précisons ici, pour avoir vu notre propos caricaturé et transformé, qu’il n’a jamais été question d’envisager un déterminisme climatique, mais de prendre en compte un contexte que les proxys nous permettent désormais de connaître, un contexte où les variations météorologiques peuvent jouer, dans le cadre d’une situation de causalités multiples, un rôle de déclencheur. La chronologie doit être désormais affinée avec Michael Sigl et al., « Timing and climate forcing of volcanic eruptions for the past 2,500 years », Nature, 523, 30 juillet 2015, p. 543-549.
62 Phénomène qui trouve des échos dans d’autres moments marqués par la prédation, comme lorsque les élites romaines se replient sur l’Afrique après le sac de 410. Voir aussi, pour le haut Moyen Âge, Pearson, « Piracy… », art. cité, 37, p. 343. Mais les crises internes à l’empire pouvaient se révéler tout autant capables de désorganisation, ainsi qu’en témoigne Ausone à propos du conflit qui opposa Autun à Victorin ; voir Antony Hostein, La cité et l’empereur. Les Éduens dans l’Empire romain d’après les Panégyriques latins, Paris, Publications de la Sorbonne, 2012, p. 148-149 et 445. Sur l’abandon de la rive droite du Rhin : Alexander Reis, Nida-Heddernheim im 3. Jahrhundert n. Chr. Studien zum Ende der Siedlung, Francfort, Schnell & Steiner, 2010, ici p. 271-274, et Christian Witschel, « Die Provinz Germania superior im 3. Jahrhundert. Ereignisgeschichtlicher Rahmen, quellenkritische Anmerkungen und die Entwicklung des Städtewesens », dans Schatzmann, Martin-Kilcher (éd.), L’Empire romain en mutation, op. cit., p. 23-64.
63 Jean-Michel Carrié, « Le bilan économique de la guerre dans l’Empire romain tardif », dans Andreau, Briant, Descat (éd.), Économie antique, op. cit., p. 103-124.
64 Voir ainsi Elio Lo Cascio, « The Role of the State in the Roman Economy: making use of the New Institutional Economics », dans Peter F. Bang, Mamoru Ikeguchi, Harmut G. Ziche, Ancient Economies, Modern Methodologies: Archaeology, Comparative History, Models and Institutions, Bari, Edipuglia, 2006, p. 215-234 ; Peter F. Bang, « The ancient economy and New Institutional Economics », Journal of Roman Studies, 99, 2009, p. 194-206.
65 Car, dans la période républicaine, elle avait pu servir la prospérité romaine : Bang, « The ancient economy… », art. cité, p. 202-203. On verra aussi ses réflexions p. 205 sur l’empereur comme « marchand de protection ».
66 Pour la période considérée, l’empereur se retrouve facilement en situation d’impécuniosité et doit alors user d’expédients. La prédation diminuait sa capacité fiscale. Les grands équilibres économiques, à commencer par le budget de l’État, nous restent dans une large mesure inconnus, on peut cependant essayer de se donner des ordres d’idées, on pourra voir par exemple les réflexions proposées par Peter F. Bang, « Romans and Mughals. Economic integration in a tributary empire », dans Lukas De Blois, John Rich (éd.), The Transformation of Economic Life under the Roman Empire (Proceedings of the Second Workshop of the International Network Impact of Empire), Amsterdam, Brill, 2002, p. 1-27.
67 Nous résumons ici les analyses que nous avons développées, à partir de l’exemple de l’époque de Marc Aurèle, dans « “Il avertissait les cités de se méfier des pestes, des incendies, des tremblements de terre”, crise militaire, frumentaire et sanitaire : les cités de l’Occident au temps de la peste antonine », dans Mireille Cébeillac-Gervasoni, Clara Berrendonner, Laurent Lamoine, Gérer les territoires, les patrimoines, les crises : le quotidien institutionnel II, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2012, p. 451-470.
68 Outre l’exemple de Tours vu plus haut, il faut citer celui de Saldae connu par AE, 1928, 38.
69 Hostein, La cité et l’empereur…, op. cit., p. 146-154.
70 Dexippe, Scythica, F22 Martin, 1, tr. fr. Puech, « Comment il faut écrire, dans la tradition classique, l’histoire des guerres romaines contre les Barbares », art. cité, p. 53.
71 Van Ossel, Établissements ruraux…, op. cit., p. 53, 163-165, 173.
72 Michel Tarpin « M. Licinius Crassus imperator, et les dépouilles opimes de la République », Revue de philologie, de littérature et d’histoire anciennes, 77-2, 2003, p. 275-311.
73 Bilan pour l’époque postérieure à Constantin, dans Roland Delmaire, Largesses sacrées et res privata. L’aerarium impérial et son administration du ive au vie siècle, Rome, École française de Rome, 1989, p. 412-413.
74 Ammien Marcellin, XXIII, VI, 24 ; SHA, Vita Veri, VIII, 1-4.
75 Hérodien III, 9, 10-12 ; Dion Cassius, LXXV (LXXVI), 9 ; voir Christol, L’Empire romain…, op. cit., p. 17.
76 Benjamin Isaac, The Limits of Empire. The Roman Army in the East, Oxford, Oxford University Press, 1993, p. 32.
77 Christol, L’Empire romain…, op. cit., Paris, 2006, p. 188.
78 Dion Cassius, LXXI (LXXII), 3, 3-4.
79 Marianne Coudry, « Les origines républicaines de l’or coronaire », dans id., Humm (éd.), Praeda, op. cit., p. 153-185. Un bon exemple en 198 : IGBulg [= Inscriptiones Graecae in Bulgaria repertae], 659 ; J. H. Oliver, Greek Constitutions of Early Roman Emperors from Inscriptions and Papyri, Philadelphie, American Philosophical Society, 1989, p. 217.
80 Ainsi, pour Marc Aurèle et Lucius Vérus, voir ibid., no 177, et pour Alexandre Sévère, ibid., no 275 (P. Fayum, 20).
81 Dion Cassius, LXXVII (LXXVIII), 9.
82 Hérodien, VII, 2, 3-4 et 9.
83 Id., VII, 3, 1 ; tradution française par Denis Roques, Histoire des empereurs romains de Marc-Aurèle à Gordien III, Paris, Les Belles Lettres, 1990, p. 176.
84 Id., VII, 3, 5-6.
85 SHA, Vita Marci, XXI, 10 : Marcomannos in ipso transitu Danuvii delevit et praedam provincialibus reddidit.
86 Eutrope IX, 21 : Multis barbaris saepe captis nec praeda integra aut provincialibus reddita aut imperatoribus missa, cum suspicio esse coepisset consulto ab eo admitti barbaros, ut transeuntes cum praeda exciperet atque ac se occasione ditaret […] ; traduction française par Stéphane Ratti, Les empereurs romains d’Auguste à Dioclétien dans le Bréviaire d’Eutrope, Paris, Les Belles Lettres, 1996, p. 148 (légèrement modifiée) et p. 355 pour un bref commentaire. Voir aussi les récits très proches d’Aurélius Victor, 39, 21, et d’Orose, VII, 25, 3. Sur l’usurpation de Carausius : Peter J. Casey, Carausius and Allectus. The British Usurpers, Londres, Taylor & Francis, 1994, p. 52-53 ; Christol, L’Empire romain…, op. cit., p. 193.
87 Pan. Lat., II (10), XII ; Pan. Lat., IV (8), VI, XII et XVI ; ce second texte, prononcé en 297, abonde au demeurant en notations sur la prédation soit subie, soit exercée par l’empire.
88 Zonaras, XII, 24 ; tr. fr. Hiernard, « Un témoin archéologique… », art. cité, p. 255 ; voir aussi Henri Lavagne, « Une nouvelle inscription d’Augsbourg et les causes de l’usurpation de Postume », Comptes rendus des séances de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 138-2, 1994, p. 431-446, ici p. 440. Sur cet épisode et ses sources, voir Ingemar König, Die gallischen Usurpatoren von Postumus bis Tetricus, Munich, C. H. Beck, 1981, p. 46-49 ; Bruno Bleckmann, Die Reichskrise des iii. Jahrhunderts in der spätantiken und byzantinischen Geschichtsschreibung. Untersuchungen zu den nachdionischen Quellen der Chronik des Johannes Zonaras, Munich, Herbert Utz, 1992, p. 243-248 ; Christol, L’Empire romain…, op. cit., p. 143.
89 Eutrope IX, 9 : Qui seditione militum interfectum est, quod Mogontiacum, quae adversus eum rebellaverat Laeliano res novas moleinte, diripiendam militibus tradere noluisset ; tr. fr. Ratti, Les empereurs romains…, op. cit., p. 145 (légèrement modifiée), et voir p. 324 pour un bref commentaire. Voir Christol, L’Empire romain…, op. cit., p. 161-162.
90 Alaric Watson, Aurelian and the Third Century, Londres/New York, Routledge, 1999, p. 71-72.
91 Polybe, X, 15, 5, dans sa célèbre description du pillage d’une ville par l’armée romaine, description dont on peut se demander dans quelle mesure elle correspondait à la réalité : Adam Ziolkowski, « Urbs direpta, or how the Romans sacked cities », dans Rich, Shipley (éd.), War and Society in the Roman World, op. cit., p. 69-91.
92 SHA, Divus Aurelianus, XXIII, : « canem », inquit, « negavi in hac urbe me relicturum : canes omnes occidite » ; tr. fr. Chastagnol, Histoire Auguste, op. cit., p. 995.
93 C. Müller, FHG [= Fragmenta Historicorum Graecorum], IV, p. 197, 4 ; traduction Jean-Pierre Callu, « D’Evagre à l’Histoire Auguste », art. cité, p. 80, n. 41, que l’on verra aussi pour l’analyse des rapports de ce texte avec le récit de l’Histoire Auguste et peut-être avec Eusèbe de Nantes.
94 Watson, Aurelian…, op. cit., p. 81-82 ; Christol, L’Empire romain…, op. cit., p. 166.
95 Végèce, II, 24, 2 : […] non tantum gloriosa uictoria sed etiam amplior praeda […], et III, 26, 30 : Milites timor et poena in sedibus corrigit, in expeditione spes ac praemia faciunt meliores.
96 SHA, Divus Claudius, XI, 5-8.
97 Maurice, Strategikon, VIIA, 14, éd. George T. Dennis, Maurice’s Strateikon: Handbook of Byzantine Military Strategy, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 1984, ici p. 78. Sur cette phase de la bataille dans l’Antiquité tardive, Sylvain Janniard, Les transformations de l’armée romano-byzantine (iiie-vie siècles apr. J.-C.) : le paradigme de la bataille rangée, thèse de doctorat dirigée par J.-M. Carrié, École des hautes études en sciences sociales, 2010, p. 407.
98 Voir les réflexions de Lukas de Blois, « The crisis of the third century A.D. in the Roman Empire: a modern myth? », dans id., Rich (éd.), The Transformation of Economic Life…, op. cit., p. 204-217, ici p. 211-212.
99 Voir Peter Herrmann, Hilferufe aus römischen Provinzen: ein Aspekt der Krise des römischen Reiches im 3 Jhdt n. Chr., Göttingen/Hambourg, Joachim Jungius-Gesellschaft der Wissenschaften, 1990 ; Tor Hauken, Petition and Response. An Epigraphic Study of Petition to Roman Emperors 181-249, Bergen, Norwegian Institue at Athens, 1998. Nous avons abordé certains aspects de cette question dans Benoît Rossignol, « Élites locales et armées : quelques problèmes », dans Mireille Cébeillac-Gervasoni, Laurent Lamoine (éd.), Les élites et leurs facettes, Clermont-Ferrand/Rome, École française de Rome, 2003, p. 349-380, ici p. 360-361 ; et « Les attitudes de quelques agents du prince à l’époque des guerres des règnes de Marc Aurèle et Commode », Cahiers Glotz, 21, 2010, p. 119-137, ici p. 128-129 : l’exercice du pouvoir même à une échelle subordonnée pouvait toujours s’accompagner de l’exercice du type particulier de prédation qu’est la corruption.
100 On verra, par exemple, les ruses proposées par l’auteur de l’Histoire Auguste dans sa Vie de Pescennius niger, X, 1-2 et 7. La dernière de ces ruses est peut-être une rétroprojection par l’auteur, sur une figure idéale d’empereur disciplinant les soldats, d’une mesure décidée après la terrible défaite d’Abritus où les Goths s’étaient emparés de quantités sans doute considérables d’or ; on verra sur cela la belle étude d’Aleksander Bursche, « The Battle of Abritus, the Imperial Treasury and Aurei in Barbaricum », The Numismatic Chronicle, 173, 2013, p. 151-168, pl. 32-37.
Auteur
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne / Anhima-UMR 8210
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