Chapitre VII. La géographie andalouse par-delà la disparition d’al-Andalus : Ḥimyarī ou la mémoire des lieux (xive siècle)
p. 379-423
Texte intégral
1Au xive siècle, al-Andalus n’existe plus, hormis dans le petit royaume de Grenade. La Reconquista, menée tambour battant depuis la bataille de Las Navas de Tolosa en 1212, a sonné le glas de l’Espagne musulmane. Les prestigieuses villes qui ont fait sa gloire sont tombées entre les mains de l’ennemi : les Portugais sont à Beja en 1235 ; les Aragonais aux Baléares en 1235, à Valence en 1238 ; les Castillans sont à Cordoue en 1236, à Murcie en 1243, à Carthagène en 1244, à Séville en 1248 et à Cadix en 1265. C’est un effondrement brutal et absolu ; il ne subsiste d’al-Andalus, pour plus de deux siècles encore, que les régions de Malaga et de Grenade. Les musulmans jouent néanmoins un rôle encore important vers 1300, leur influence culturelle reste considérable, mais l’Espagne n’en est pas moins dominée par les chrétiens, à l’exception de quelques petits îlots isolés. L’exil, les combats, l’esclavage de guerre ont dispersé les musulmans et les ont privés de leurs élites. Ils constituent alors des groupes peu influents, peu organisés et souvent de petite condition, artisans et cultivateurs, payant un tribut et vivant en communautés autonomes, les Aljamas ou Moreiras, sous l’autorité de magistrats appliquant le droit coranique. Le goût pour la civilisation andalouse est cependant vif chez les noblesses castillane et aragonaise qui font bâtir églises et châteaux par des artisans maures, créant par là même l’art mudéjar. Si la culture des vaincus garde un rayonnement et une richesse dont le prestige est parvenu jusqu’à nous, il n’en reste pas moins qu’au xive siècle al-Andalus, en tant qu’État prestigieux et indépendant, n’est plus qu’un souvenir.
2C’est pourtant à cette date qu’al-Ḥimyarī compose le Rawḍ al-Miʿṭār, une description d’al-Andalus, alors qu’al-Andalus n’est plus : la géographie arabe continue de décrire une terre désormais perdue. Cet auteur, qui incarne à lui seul la dernière floraison de la géographie andalouse, rédige une vaste somme résumant l’ensemble des connaissances ayant trait à cette terre. Il est à ce titre bien plus que le dernier en date de nos géographes et le point d’arrivée de notre étude, il en est également le point de départ puisque c’est d’après le corpus de textes qu’il a réuni que nous avons établi notre propre choix d’auteurs. Son texte nous a accompagnée toujours, lui seul pouvait permettre de compléter un passage tronqué, de confirmer une information et d’établir l’archéologie du savoir géographique.
3Ḥimyarī est bien l’archétype de ceux que nous avons choisi de nommer les « géographes andalous » : on ne sait presque rien de cet auteur (il s’avère qu’ils sont peut-être deux !), la date de la rédaction de l’ouvrage reste inconnue, les renseignements qu’il fournit sont tous périmés, la plupart des pages qu’il rédige sont empruntées à d’autres, mais enfin il existe une somme remarquable, détaillée, irremplaçable, destinée à récapituler un savoir et à le sauvegarder. Il est à ce titre le gardien d’un héritage, qu’il recompose et arrange au gré de la compilation, mais qu’il clôt. Sous sa plume surgit donc une ultime vision d’al-Andalus, où le territoire se mue en patrimoine, où l’histoire réapparaît pour suppléer aux défauts de la mémoire, et où le discours géographique, désormais utopique, énumère des lieux pour conserver le souvenir d’un espace qui n’est plus.
LES INCERTITUDES AUTOUR D’UN AUTEUR ET D’UNE ŒUVRE
Deux auteurs pour une seule œuvre
4Le célèbre biographe turc du xviie siècle, Ḥāğğī Ḫalīfa, cite dans son Kašf al-ẓunūn deux personnages portant l’ethnique d’al-Ḥimyarī. Il rédige ainsi deux notices distinctes consacrées à ces hommes portant des noms pratiquement identiques et dont les ouvrages ont des titres semblables, qui apparaissent à la suite aux rubriques 6597 et 6598. Il précise dans la première notice que la date de mort du « premier » Ḥimyarī est 900/1494-1495. La seconde notice ne livre aucune date1.
5É. Lévi-Provençal, dans l’introduction qu’il consacre à l’édition du Rawḍ, écarte la tentation de conclure à l’existence d’un unique auteur, vivant à la fin du xve siècle, dans la mesure où l’ouvrage est déjà cité par Qalqašandī dans un livre terminé en 814/1412, le Subḥ al-aʿšā. Maqrīzī rédigea même ce que l’on prit longtemps pour un abrégé du Rawḍ, le Ǧanāʾ al-azhār min al-Rawḍ al-Miʿṭār, en 845/1442, mais qui s’avère être un résumé de l’ouvrage d’Idrīsī. É. Lévi-Provençal tente de résoudre l’énigme en avançant l’hypothèse qu’une première version aurait été rédigée par un Ibn ʿAbd al-Munʿim al-Ḥimyarī au cours du viie/ xiiie siècle ou au début du viiie/ xive siècle, et que l’un de ses descendants, après avoir apporté quelques menues retouches et compléments, se serait attribué l’entière paternité de l’ouvrage, à la fin du xve siècle (le manuscrit trouvé à Tombouctou, et que Lévi-Provençal utilise principalement, indique que l’ouvrage fut achevé à Djedda en 866/1461)2. C’est ce qui expliquerait que le Rawḍ ne fasse jamais allusion à des événements postérieurs à la fin du viie/ xiiie siècle ; la dernière date mentionnée est celle de 686/1287, qui correspond à la prise de Minorque par le comte de Barcelone3.
6En dépit de l’origine de ce nom, et même si le colophon de l’un des manuscrits du Rawḍ4 indique que l’ouvrage fut achevé à Djedda, Lévi-Provençal suppose que les deux Ḥimyarī étaient originaires de l’Occident musulman. Une importante famille hispanique de Ceuta portait au Moyen Âge la maʿrifa d’Ibn ʿAbd al-Munʿim et la nisba d’al-Ḥimyarī. L’adoption d’une ascendance yéménite était alors chose courante en ces lieux, comme en témoigne le fait qu’elle ait été revendiquée par une fraction importante des tribus berbères Ṣanhāğa. Notre auteur est d’ailleurs appelé par le polygraphe andalou de la fin du xive siècle Ibn al-Ḫatīb : Abū ʿAbd Allāh Muḥammad b. ʿAbd al-Munʿim al-Ṣanhāğī al-Ḥimyarī5.
7É. Lévi-Provençal reprend de plus une phrase extrêmement significative de Maqqarī, lequel, décrivant dans son Nafḥ al-ṭīb la bataille de Zallāqa, livre les quelques informations que fournissent le kāmil d’Ibn al-Aṯīr et les Wafayāt al-aʿyān d’Ibn Ḫallikān, avant de redonner la parole à Ḥimyarī au motif que « [celui-ci] connaît mieux l’histoire d’al-Andalus vu qu’il est lui-même des gens de ce pays ; le maître de la maison sait mieux [que tout autre ce qui s’y passe]6 ».
8Il s’agit donc indéniablement d’un auteur occidental, dont l’ouvrage acquiert d’autant plus de prix à nos yeux qu’il émane de l’un de ces exilés réfugiés au Maghreb, dont la famille a fui les avancées de la Reconquista chrétienne en Espagne, et dont l’œuvre contribue à faire exister pour un temps encore une al-Andalus perdue par les armes.
9Sait-on seulement dans quel contexte Ḥimyarī écrit ? Les incertitudes de la date de composition, mais aussi du lieu de l’écriture ne permettent pas d’affiner davantage le tableau. Est-il même bien utile de dresser le contexte de la Ceuta du début du xive siècle, de décrire les formes du pouvoir qui s’y déploient, les acteurs principaux de son histoire ? Cette géographie nostalgique, qui poursuit la description d’une Espagne musulmane figée dans une splendeur passée, nous affranchit presque des obligations qui incombent habituellement à l’historien. Il nous suffit de savoir que Ḥimyarī est un exilé, l’un de ces hommes dont la famille fut contrainte d’émigrer, mais qui se réclament encore d’un sol pourtant perdu. Il suffit de dire qu’il fait exister par le discours ce qui a été perdu par les armes, qu’il prétend transcender l’histoire et postuler l’intemporalité d’une terre : sa qualité d’exilé résume en grande partie une identité qui nous a été transmise de façon bien incomplète. L’essentiel, à nos yeux, est que le portrait d’al-Andalus continue à être dressé, par-delà même sa disparition.
Le Kitāb al-Rawḍ al-Miʿṭār : un dictionnaire géographique
10Le Kitāb al-Rawḍ al-Miʿṭār fī ḫabar al-aqṭār se présente sous la forme d’un vaste dictionnaire géographique (muʿğam) constitué de plusieurs milliers de notices, classées par ordre alphabétique selon les toponymes qu’elles se proposent de décrire, et traitant de l’ensemble du dār al-islām ainsi que de ses marges. L’entreprise est bien classique, puisqu’elle renoue avec le genre des masālik wa al-mamālik du xe siècle, mais son conservatisme même pose question : l’intrusion de l’Occident latin et chrétien, qui constituait l’originalité d’Idrīsī, devient a posteriori une initiative intéressante mais isolée. Le monde dont Ḥimyarī est le contemporain est cependant bien éloigné de celui de Muqaddasī et d’Ibn Ḥawqal, alors que la division politique ne suffisait pas à masquer son éclatante prédominance, alors que les seules guerres qui le traversaient étaient des guerres civiles.
11Lorsque Ḥimyarī écrit, les grands bouleversements du xiiie siècle sont passés par là. Le califat abbasside est définitivement tombé sous les coups des Mongols d’Hūlākū, qui ont exterminé son dernier représentant, al-Mustaʿṣīm (1242-1258), ainsi qu’une partie de la population de Bagdad, de l’Iraq et de l’Orient. Seuls les esclaves militaires du Caire, les Mamluks, ont contenu les nouveaux envahisseurs en 1260 à ʿAyn Ǧālūt, protégé la Syrie et l’Égypte, profitant des problèmes de succession qu’ouvrait en 1259 la mort de Mongka, frère d’Hūlākū.
12Dans l’occident du monde, la situation de l’Islam n’est guère plus favorable : la Sicile et la majeure partie d’al-Andalus ont été perdues. Le projet almohade, visant à unifier l’Occident musulman sous un même pouvoir, a failli : en 1269, Marrakech, arrachée un siècle plus tôt aux Almoravides, est prise par les Mérinides7. Il s’agit certes d’une dynastie musulmane, mais son principal objectif est sa survie et son maintien dans la zone du Maroc actuel. On ne peut compter sur elle pour reprendre durablement les terres perdues8. Ḥimyarī pourtant continue d’écrire la géographie comme les maîtres du xe siècle, comme ʿUḏrī et Bakrī également. Il affirme qu’al-Andalus s’étend jusqu’à Narbonne9 et se contente de dresser des peuples du Nord de l’Espagne un bref tableau ethnographique10. Il semblerait que, en reprenant l’exercice déjà ancien de la description du seul monde musulman, Ḥimyarī veuille retenir le temps et se réfugie par là même dans une vision nostalgique de la géographie. Cette discipline, nous l’avons vu à plusieurs reprises, tente de contourner l’histoire en privilégiant les permanences d’une terre : fleuves, montagnes, frontières intemporelles, productions agricoles et artisanales, merveilles, etc. Ḥimyarī ne force donc pas la géographie quand il la contraint à décrire une terre perdue, il suit son penchant naturel. Au sein de ce discours dont le dessein essentiel est de transcender l’histoire, Al-Andalus trouve assez naturellement une place de choix : la moitié des notices de l’ouvrage lui sont consacrées.
13L’auteur réserve effectivement autant d’attention aux localités de l’Orient qu’à celles de l’Occident musulman et al-Andalus joue un rôle de premier plan, tant par le volume qu’elle représente que par la qualité des informations la concernant. À titre d’indication, le sondage effectué par É. Lévi-Provençal sur les 174 notices commençant par la lettre alif donne le résultat suivant : 95 désignent des localités orientales (5 pour l’Extrême Asie, 31 pour l’Asie antérieure, 33 pour l’Arabie et l’Iraq, 17 pour la Syrie-Palestine et 9 pour l’Égypte). 79 notices sont consacrées à l’Occident (5 à l’Europe occidentale, 3 à la Sicile, 32 au Maghreb, 34 à al-Andalus et 5 au Soudan). C’est cette constatation qui est précisément à l’origine de la publication des extraits concernant al-Andalus par Lévi-Provençal en 1938. Ce sont au total 197 notices traitant d’al-Andalus et de ses voisins immédiats que nous livre ce grand découvreur de textes arabes.
14Il existe cependant une différence fondamentale avec les œuvres du xe siècle, celles qui dressaient le minutieux tableau des terres du dār al-islām : le territoire musulman n’est désormais plus appréhendé selon le mode du parcours et de l’énumération des provinces ou des États qui le constitue, il est éclaté en de multiples toponymes qui s’organisent selon le mode alphabétique, puisqu’il s’agit d’un dictionnaire. Le territoire, envisagé auparavant comme un espace cohérent que l’on domine par le biais de cette opération intellectuelle qu’est l’écriture de la géographie, s’efface devant des toponymes que ne rattachent plus entre eux ni itinéraires ni contiguïté. Les lieux ne sont plus les points d’un espace, mais les entrées du dictionnaire. Il s’agit là, au vrai sens du terme, d’une géographie utopique : les localités deviennent des noms, la géographie se détache du terrain, elle invente un espace qu’elle ne peut plus inventorier. L’unité que semble suggérer le texte établi par Lévi-Provençal, qui déroule les toponymes d’al-Andalus sur plus de deux cents pages, ne doit pas faire oublier qu’il s’agit là d’une reconstitution et que chacune des notices est, dans le texte originel, placée entre des paragraphes concernant des localités du Khorasān d’Égypte, du Maghreb ou d’ailleurs. Le principe même du dictionnaire abolit la réalité du terrain.
15Cette façon d’écrire la géographie, car il s’agit de géographie puisque les rubriques sont ordonnées à partir des noms de lieux, n’est pas une invention de Ḥimyarī. Les dictionnaires géographiques arabes ont alors une longue histoire11. Ils se sont, aux siècles antérieurs, principalement attelés à la tâche qui consistait à exposer les toponymes de l’Arabie. La lexicographie affleurait alors sous la géographie, car préciser soigneusement l’orthographe et la localisation des lieux qui furent le cadre de la geste des Arabes, avant et pendant les premiers temps de l’islam, était un enjeu d’importance12.
16Bakrī, près de deux siècles et demi avant Ḥimyarī, s’était illustré dans cet exercice classique qu’est la description des lieux saints de l’Islam13, en adoptant l’ordre du dictionnaire. Son Muʿğam mā istaʿğam (« Dictionnaire [des noms géographiques] à orthographe douteuse ») épousait ainsi un classement alphabétique14. L’Andalou Isḥāq b. al-Ḥusayn15, dans ses Collines de corail (Ākām al-marğān), daté vraisemblablement du xe siècle, aurait également rédigé un répertoire, « première ébauche d’un dictionnaire16 », se proposant, quant à lui, de passer en revue les merveilles des différents pays. Le principe du classement et du répertoire fut florissant tout au long du Moyen Âge, tant en botanique (que l’on pense aux célèbres catalogues andalous17) qu’en matière d’enregistrement des savants (ṭabaqāt). Le modèle achevé du dictionnaire géographique est la grande œuvre de Yāqūt, le Muʿğam al-buldān18, que nous avions évoqué dans la première partie de cet ouvrage. Dans la préface, l’auteur explique la raison de ce choix de présentation des toponymes selon le principe alphabétique19 : les ouvrages de géographie sont peu clairs, il est impossible d’y consulter rapidement un toponyme afin d’en vérifier l’orthographe ou d’en préciser la localisation. Yāqūt expose donc la démarche qu’il se propose de suivre et l’applique ensuite dans le cadre de ses notices : il commence par fixer l’orthographe d’un nom de lieu ; pour cela, il épelle chacune des lettres qui entrent dans sa composition, sans oublier les points diacritiques qui déterminent leur valeur et les voyelles qui doivent les accompagner. Il signale que parfois cette orthographe varie. Ensuite, il discute la signification étymologique du nom, cite les différentes opinions en ce domaine. Le philologue transparaît sous le géographe, la topographie est ici étroitement liée à la lexicographie. Ḥimyarī ne cite jamais Yāqūt. On peut cependant penser, puisqu’il rédige son ouvrage près de cent ans après le géographe oriental, qu’il a pu prendre connaissance du Muʿğam al-buldān. Notre géographe est essentiellement un compilateur, et il semblerait étonnant qu’il ait eu l’audace d’adopter la forme du dictionnaire sans s’être assuré de l’existence de solides précédents. Or, comme le montre W. Jwaideh, le Muʿğam al-buldān connut assez rapidement un important succès20. Ḥimyarī a donc dû le consulter. Il écrit peut-être le pendant occidental de l’ouvrage de Yāqūt : tout en respectant la démarche initiale qui prévoit de décrire l’ensemble du monde musulman, il privilégie cependant l’Occident du dār al-islām, et plus particulièrement al-Andalus, la patrie désormais perdue de ses ancêtres. Pour ce faire, il n’a qu’à puiser dans l’abondant matériau mis à sa disposition par des générations de géographes andalous, celles-là mêmes qui, avant lui, avaient réparé les lacunes de la géographie orientale et dont il parachève l’œuvre dans cet exercice indispensable qu’est celui de la conservation de la mémoire.
L’ART DE LA COMPILATION
17Le savoir géographique, nous l’avons vu, se constitue de façon cumulative. Il s’enrichit des apports que chacun apporte à l’édifice commun. Il est essentiel cependant que les ajouts soient les plus discrets possible, non pas tant pour créer l’illusion d’une originalité créatrice de chaque auteur mais, au contraire, parce que tout savoir digne de ce nom doit être un savoir transmis21. Le paradoxe est intéressant : le champ des connaissances est considéré comme limité, déjà balisé par les grands prédécesseurs, mais cet héritage se doit d’être revivifié par chaque génération afin de maintenir l’illusion de sa permanence.
18Avec Ḥimyarī, l’art de la compilation prend tout son sens, à la fois parce que cet auteur est l’héritier d’une longue tradition initiée plusieurs siècles avant lui, mais aussi parce que se pose alors l’urgente question de la sauvegarde d’un savoir. Si le Moyen Âge musulman dans son ensemble « a succombé au fantasme du Grand Oubli », selon la formule de Houari Touati22, force est de constater que cette « théorie catastrophiste du savoir23 » ne s’applique pas aux seules sciences religieuses et qu’elle est d’une douloureuse actualité, dès lors qu’il est question d’al-Andalus, en ce début du xive siècle. Patiemment, Ḥimyarī collecte donc ce qu’il estime être la totalité des informations géographiques accumulées au fil des siècles concernant cette terre. On lui a toujours reconnu ce mérite essentiel, Lévi-Provençal le premier : il a sauvé de l’oubli un certain nombre de textes antérieurs que sa compilation a ressuscités24. De fait, les textes de Rāzī, ʿUḏrī, Bakrī et Idrīsī sont fondus, superposés, parfois présentés dans leurs différences, au sein de ce nouveau discours géographique sur al-Andalus. Il serait trop fastidieux de reproduire mot à mot les emprunts que fait le Rawḍ à chacun ; il est intéressant en revanche de signaler la nature de l’emprunt : ce que Ḥimyarī choisit de reprendre des textes de ces auteurs et les quelques éléments qu’il semble passer sous silence.
Les emprunts faits à Rāzī
19Ḥimyarī reprend en grande partie les considérations générales sur al-Andalus qui figurent en tête de la partie géographique de l’ouvrage de Rāzī. La même phrase ouvre les deux ouvrages : « Le pays d’al-Andalus forme l’extrémité du IVe climat vers l’occident25. » La suite diffère quelque peu dans la mesure où Ḥimyarī rassemble toutes les informations sur ce point, en reproduisant, immédiatement après la phrase de Rāzī, celles du cadi Sāʿid de Tolède, de ʿUḏrī, de Bakrī et d’Idrīsī. Il faut parcourir plusieurs paragraphes avant de retrouver la plume de Rāzī, et notamment son exposé des trois angles de la Péninsule. Encore une fois, la moisson des citations occulte le texte originel, et l’exercice se poursuit tout au long de l’introduction du Rawḍ. Notons à ce titre que notre géographe réussit à allier les exigences du classement alphabétique à celles de l’ouvrage de géographie, lequel débute le plus souvent par une présentation générale du territoire que l’on va par la suite décrire par le menu. Ḥimyarī commence son tableau de la péninsule Ibérique par une longue notice consacrée à al-Andalus dans sa globalité, une véritable introduction donc, que permet le nom de ce pays, lequel a la bonne grâce de commencer par la lettre alif.
20Il est intéressant de constater que le géographe de Ceuta ne reprend pas le fameux passage de son illustre devancier sur les « deux al-Andalus », que définissent des régimes de vent et des sens d’écoulement des eaux différents. Peut-être que le principe même d’une partition de la Péninsule, fût-elle physique, est alors d’une trop grande actualité pour qu’il soit besoin d’y insister. Ḥimyarī s’inspire en revanche grandement de la partie historique de l’ouvrage de Rāzī. Il réintroduit au cœur du discours géographique les développements que le géographe du califat avait réservés au second volet de son livre. L’histoire refait là une entrée en force ; nous y reviendrons plus tard. Si l’on effectue quelques sondages, il ne reste que peu d’éléments de certaines des « grandes » notices de Rāzī : la description de Cordoue, ville du pouvoir, est occultée au profit de l’exposé des merveilles de sa grande mosquée26. Les éléments les plus neutres, indication des productions agricoles, des noms de fleuves, quelques données de botanique ou d’hydrologie, sont assez clairement identifiables comme étant extraits de l’ouvrage de Rāzī. De la fastidieuse énumération que faisait ce dernier de la grappe des châteaux forts d’al-Andalus, point central de sa géographie, il ne reste cependant que peu. Il est vrai que ces deux manières d’écrire la géographie s’opposent là de façon radicale : Rāzī donnait la liste des jalons d’un territoire maîtrisé, Ḥimyarī reconnaît implicitement la disparition de l’unité spatiale en éclatant les toponymes dans autant de rubriques différentes. Rāzī commençait par décrire Cordoue, Ḥimyarī passe de la notice sur al-Andalus à celle consacrée à Ubāl (Obejo)27, principe du dictionnaire oblige.
21Il n’empêche que la quasi-totalité des sujets développés par le géographe du califat sont repris par Ḥimyarī, mais de façon diffuse, comme noyés dans l’océan de la compilation. Rāzī fut à l’origine du premier discours géographique sur al-Andalus, et ses successeurs, jusqu’à Ḥimyarī, resteront fidèles à cette première écriture de la géographie en al-Andalus. Ce ne sont donc pas les thèmes généraux qui diffèrent d’un auteur à l’autre, mais leur agencement, leur place au sein de l’architecture générale du discours. En adoptant le principe du classement alphabétique, le compilateur qu’est Ḥimyarī peut bien répéter les mêmes motifs, il est cependant à l’origine d’une vision radicalement différente d’al-Andalus, conforme à ce qu’est devenue cette dernière : un objet de mémoire plus qu’un territoire réel.
Les emprunts faits à ʿUḏrī
22Comme Qazwīnī (m. en 682/1283)28 et Yāqūt, Ḥimyarī reprend, en le développant, le texte de ʿUḏrī concernant les merveilles (ʿağāʾib) d’al-Andalus, qu’il s’agisse de la légende des « sept dormants » de Loja29, des récits sur la conquête d’al-Andalus, qui sont alors l’occasion d’évoquer la « trahison » du comte Julien, la table de Salomon ou l’épisode de la maison fermée de Tolède30 ; il reprend également les descriptions de cavernes étonnantes et de sources au débit déconcertant. L’évocation des splendeurs de la grande mosquée de Cordoue est également, mais en partie seulement, une reprise du texte de ʿUḏrī. Celui-ci est le premier de nos géographes à avoir substitué à la description de la ville le minutieux portrait de sa mosquée. Ḥimyarī reprend ce passage et, à son habitude, lui adjoint d’autres citations, mises bout à bout31. Les longs récits que fait ʿUḏrī de l’histoire de l’implantation arabe dans les zones de la Marche, assortis d’une multitudes de détails sur la généalogie des principaux protagonistes, sont parfois repris par Ḥimyarī, qui n’en retranscrit cependant qu’une infime partie, de manière ponctuelle. Comme dans le cas de celle de Rāzī, la géographie de ʿUḏrī est bien éloignée de celle de son lointain successeur du xive siècle : ʿUḏrī ne choisissait de décrire du territoire andalou que les môles conservés par un pouvoir arabe après le long naufrage du califat et la fitna, Ḥimyarī au contraire fait feu de tout bois, veut être exhaustif et conçoit la géographie comme une somme récapitulative engrangeant le maximum de données : rien ne doit échapper à la mémoire.
Les emprunts faits à Bakrī
23Avec Bakrī et Idrīsī, nous touchons au cœur du système de la compilation tant il est vrai que le Rawḍ reprend pratiquement l’intégralité du Kitāb al-masālik wa al-mamālik et de la Nuzhat. Bakrī, nous l’avons vu, est à l’origine d’un discours original sur al-Andalus : à l’issue d’une présentation générale de la Péninsule, il choisit de ne traiter que de dix villes, qui ne sont pas toujours, loin s’en faut, les plus importantes de son temps. Il est donc aisé de « traquer » les éléments reproduits par Ḥimyarī qui, précisons-le, ne cite pas une seule fois le nom de Bakrī32. La présentation générale du territoire andalou que fait Bakrī, en tête du chapitre consacré à al-Andalus, est assez classique et elle s’inspire en grande partie de l’ouvrage de Rāzī et, peut-être, de l’introduction de ʿUḏrī, laquelle ne nous est pas parvenue.
24Ḥimyarī opère un tri : il ne reproduit pas le partage de la Péninsule attribué à Constantin et qui ouvre la présentation de Bakrī. Ce dernier voulait témoigner de la profondeur de l’empreinte laissée par les Rūm dans ce sol, ce qui n’est guère ce dont Ḥimyarī veut se souvenir. Il recopie cependant l’extrait relatif aux anciens noms d’al-Andalus33.
25Figure également le fameux passage, assez énigmatique, où la Péninsule est comparée à d’autres terres : « Al-Andalus est comme la Syrie par sa fertilité et la pureté de son air, comme le Yémen par son climat égal et tempéré, comme l’Inde, par ses aromates et la finesse de ses produits, comme al-Aḥwāz par l’importance de ses revenus fiscaux, comme la Chine par ses gisements de pierres précieuses, comme Aden pour les bénéfices tirés de son littoral34. » Il poursuit in extenso la citation de Bakrī en évoquant l’héritage grec de cette terre. Ce sont là deux extraits dont on ne peut penser qu’ils sont de la plume de Bakrī.
26La pratique presque exclusive de la compilation peut donner des résultats bien étonnants : la phrase de Bakrī sur l’importance de l’héritage grec précède un long développement (près de sept pages dans le texte arabe établi par Samia Bouamrane) sur les ressources minérales d’al-Andalus. Il s’agit là d’un texte très détaillé sur les différents minerais, l’ambre, les résines, la terre comestible, les plantes médicinales que l’on trouve dans la Péninsule. Or, dans l’ouvrage de Ḥimyarī, ce long développement se mue en un très léger paragraphe sur les pierres judaïques de la région de Santarem et le cristal de roche de Badajoz. Tout occupé qu’il est à suivre le fil de la pensée de Bakrī, il n’ose supprimer totalement ce passage, mais il le résume à l’extrême, accentuant par là même le caractère haché de sa propre écriture : citation sur les Grecs, puis sur ces quelques ressources naturelles et, enfin, évocation d’al-Andalus, territoire de ribāṭ. Si l’on ne sait que, à cet endroit de son écriture, il jongle avec les citations de Bakrī, on ne peut comprendre l’agencement de son propre discours, et ne reste que le coq-à-l’âne.
27S’il a coupé assez nettement le passage sur les ressources naturelles de la Péninsule, Ḥimyarī recopie cependant mot à mot la suite de l’introduction de Bakrī. Ce dernier explique qu’al-Andalus est un territoire où l’on combat pour la foi (dār Ǧihād) et un lieu de séjour en ribāṭ. Il expose ensuite longuement les traditions relatives à l’Espagne, en prenant bien soin de donner l’isnād35, cite le nom de l’un des Compagnons du Prophète qui prit part à la conquête de cette terre36, ainsi que ceux des tābiʿūn (successeurs immédiats des Compagnons du Prophète) qui participèrent à l’entreprise, dont le fameux Ḥanaš al-Ṣanʿānī. Il est ensuite longuement question de Nuṣayr, le père du conquérant de l’Espagne, Mūsā, et de la réponse qu’il fit à son maître Muʿāwiya lorsque celui-ci lui reprocha sa désertion37. Ces longs développements étaient loin d’être anodins sous la plume de Bakrī et ils témoignaient de la sensibilité shiite de l’auteur. Avec Ḥimyarī cependant, ils perdent leur pouvoir corrosif et ne sont convoqués, parmi d’autres motifs et au sein d’autres citations, qu’à titre d’illustration du prestige d’al-Andalus, cette terre qui fut capable de capter un temps quelques-unes des figures illustres de l’Islam. La compilation ici se fait au détriment du sens et de l’engagement.
28La dernière phrase de l’introduction de Bakrī, également recopiée mot à mot, est lourde de sens : « La partie d’al-Andalus occupée par les musulmans s’étend sur 300 parasanges (farsaḫ) de longueur entre Ocsonoba et Huesca ; et 80 parasanges de largeur entre Carthagène d’Alfa et Fahmiyīn38. » Ceci correspond, nous l’avons vu, au territoire d’al-Andalus dont Bakrī est le contemporain, mais en aucun cas à celui de l’époque de Ḥimyarī. Ce dernier cependant prolonge le propos en l’actualisant quelque peu : « La partie qu’en possédaient les chrétiens était de même étendue que celle qu’occupaient les musulmans, ou un peu plus. Mais, par la suite, les révoltés (ṯuwwār) [contre le régime omeyyade] se rendirent maîtres du pays, ce qui eut pour résultat la perte des zones frontières et le passage aux mains de l’ennemi de la plus grande partie du territoire musulman : de celui-ci il ne subsiste qu’une très petite portion. Il existe dans al-Andalus des chaînes de montagnes bien connues et des sources thermales nombreuses. » Il s’agit de l’une des rares concessions que fait le géographe de Ceuta à son temps. Il s’appuie sur une information caduque, celle de Bakrī, retranscrite fidèlement et bien inutilement, pour ensuite la dépasser, mais sans s’appesantir le moins du monde car son propos n’est pas de témoigner de ce qu’il reste à l’Islam en ce début du xive siècle.
29Ḥimyarī ne se contente pas de retranscrire l’essentiel de l’introduction de Bakrī ; il reprend presque mot à mot le portrait que fait Bakrī de dix villes d’al-Andalus. Il recopie ainsi la totalité de la notice consacrée à Cordoue : explication étymologique du nom de la ville (« Cordoue » vient de « Cordhoba » (Qurḍuba) en goth, qui signifie les « cœurs divergents39 »), description de la grande mosquée, et constat désabusé sur la ruine de cette prestigieuse cité au milieu du xie siècle, au moment où Bakrī rédige son ouvrage. Ḥimyarī prolonge, encore une fois, le constat en l’actualisant : « Les chrétiens se rendirent maîtres de Cordoue et y établirent leur autorité, dans la dernière décade de šawwāl de l’année 633 (fin du mois de juin 1236)40. » L’histoire de la ville se clôt à cette date pour Ḥimyarī. Le devoir de mémoire est accompli ; le devenir ultérieur de la ville lui importe peu, il relève à ses yeux d’une géographie, ou d’une histoire, qui n’est plus la sienne.
30L’intégralité de la notice portant sur Séville est recopiée. C’était, pour Bakrī, l’occasion de retracer l’importance du passé antique d’al-Andalus : marque laissée par les César, portrait d’Išbān et des crimes qu’il commit à Jérusalem41, évocation d’une statue antique merveilleuse dont les hommes tombaient amoureux en lui jetant un simple regard. Figurait également le récit de la grande révolte qui éclata à Séville contre le pouvoir omeyyade en 301/91342. Bakrī mettait ainsi en relief les oppositions qui, au cours de la longue d’histoire d’al-Andalus, avaient remis en cause la domination de cette dynastie. Ḥimyarī noie le propos en intercalant les données d’ordre économique qu’il compile chez Idrīsī. Il neutralise en quelque sorte le discours de Bakrī, un discours dont il ne peut cependant faire l’économie puisque sa démarche même lui impose de tout reprendre. Il ajoute, à la fin de la notice, quelques informations supplémentaires sur une crue du Guadalquivir, survenue en 597/120043, et sur la chute de la ville, prise par Ferdinand III en 646/124844.
31Bakrī n’était guère prolixe dans la notice qu’il consacrait à Algésiras. Celle-ci se réduit à l’évocation du passage de Moïse et d’al-Ḫiḍr en cette ville : « Ce sont les habitants d’Algésiras qui refusèrent de recevoir Moïse et al-Ḫiḍr. C’est à Algésiras qu’al-Ḫiḍr fit construire le mur, qu’il fit une brèche dans le navire, réduisant al-Jalandī à la soumission. Tels sont les faits rapportés par le Livre sacré45. » Bakrī prenait bien soin de préciser l’isnād (d’après Muḥammad ibn Waḍḍāḥ46, qui le tenait de Zuhayr ibn ʿAbbād al-Qilāʿī, d’après le cousin de Wāqī ibn al-Ǧarrāḥ al-Kūfī47) lorsqu’il localisait cet épisode relaté par le Coran (sourate XVIII, versets 70, 76 et 78) dans la péninsule Ibérique. Hormis une courte phrase sur la situation géographique de cette ville, située sur une colline, voici les seuls éléments que Bakrī faisait figurer dans le portrait d’Algésiras. Ḥimyarī en revanche lui consacre une longue notice, nourrie par des citations multiples, et qui éclaire en retour, aux yeux des néophytes que nous sommes, le récit de Bakrī. Avant de reprendre la phrase de ce dernier, il explique longuement que cette ville fut la première conquise en al-Andalus par les musulmans, à la tête desquels se trouvait… Mūsā ibn Nuṣayr. L’Algésiras païenne avait chassé Moïse et al-Ḫiḍr, elle sera la première à tomber entre les mains de Mūsā (transposition arabe de Moïse). Le travail de compilation de Ḥimyarī, son souci d’exhaustivité nous sont encore une fois d’un grand secours.
32La « description » que fait Bakrī de Merida est tout aussi succincte que celle d’Algésiras48. L’essentiel est constitué d’un court rappel de son passé antique, et notamment d’une allusion énigmatique à une inscription gravée sur la muraille de la ville et rappelant que les habitants de Jérusalem contribuèrent à son édification. Ḥimyarī, comme à son accoutumée, reprend cette phrase et l’éclaire, en reprenant, sans citer sa provenance, un long récit de Rāzī49. Il met en scène un vieillard en larmes, contraint par Hāšim b. ʿAbd al-ʿAzīz50, un gouverneur de l’émir omeyyade Muḥammad b. ʿAbd al-Raḥmān, de traduire cette inscription rédigée en langue non arabe (aʿğamīyya) : « [Il s’agit] d’un acte qui concède le droit de piller librement les gens de Jérusalem (Īliyā) à celui qui aura bâti quinze coudées du présent rempart51. » Le sens est différent selon Bakrī ou Ḥimyarī, mais ce dernier est allé puiser dans le texte de Rāzī, peut-être pour mieux comprendre la signification de l’anecdote. Il omet cependant de reprendre toute une partie de ce récit. Avant de traduire l’inscription, le vieillard, qui était un clerc selon Rāzī, avait prononcé les phrases suivantes : « Ô Jésus-Christ, seigneur de pitié, où étais-tu le jour où la ville de Mérida fut soustraite à l’autorité de ta sainte foi ? Et, Seigneur qui sais toutes choses, je désire tant que tu saches de moi que, n’était ce que j’ai vu et je vois à travers la vérité et à travers les signes auxquels je crois véritablement, il n’y aurait rien au monde que justifieraient davantage mes prières vers toi que le malheur qui, en si peu de temps, s’est abattu sur les chrétiens d’Espagne ! Seigneur, tu ne devrais pas supporter la perte de tant de bons prêtres qui ne cessaient jamais de louer ton saint nom ! Seigneur, si tu vois tout, pourquoi ne vois-tu pas les autels de Mérida, sur lesquels tant de fois ton corps fut présent et où tant de saintes prières se disaient à ta louange, en ton honneur et à ton nom ? Alors qu’aujourd’hui sont dits tant de blasphèmes contre ta volonté et en l’honneur de Muḥammad52 ! » Ce passage a du moins le mérite d’expliquer les larmes du vieillard. On comprend cependant aisément que Ḥimyarī ait choisi de le supprimer : il témoigne certes d’un temps où l’islam était en position de vainqueur, mais il est à ce titre d’autant plus douloureux de l’évoquer qu’un revirement en faveur du christianisme s’est opéré au moment où notre géographe rédige son ouvrage de compilation.
33La notice du Rawḍ consacrée à Badajoz est constituée pour moitié d’une reprise de Bakrī53. Les deux textes diffèrent quelque peu, ce qui laisse supposer qu’ils s’inspirent tous deux d’une source commune, que nous ne pouvons identifier. Il y est question de la fondation de la ville par ʿAbd al-Raḥmān al-Ǧillīqī54. Bakrī insistait sur le fait que l’émir omeyyade Muḥammad n’avait apporté son aide à ʿAbd al-Raḥmān dans la construction de la ville, en autorisant sa fondation, en lui fournissant maçons et artisans, que pour mieux fixer le vieux révolté et en faire son obligé. Cet aspect est gommé dans le passage de Ḥimyarī, ce qui conduit tout naturellement son traducteur, Lévi-Provençal, à s’interroger sur cette coopération réunissant les deux ennemis55. Ce que Bakrī et Ḥimyarī choisissent de retenir de cette histoire diffère là de manière claire.
34Le texte que consacre Bakrī à Tolède est repris mot pour mot par Ḥimyarī56. La notice décrivant Talavera, et qui se réduit à quelques lignes chez nos deux géographes, est une reprise exacte du texte de Bakrī, agrémenté de quelques lignes d’Idrīsī. Ḥimyarī précise cependant que la ville fait partie du troisième groupe de la division de Constantin, ce que ne signale pas Bakrī57. De Tudèle, Bakrī n’évoque que sa femme à barbe, qui défraya la chronique en 400/1009-101058. Ḥimyarī reprend l’intégralité du récit. L’usage que fait Ḥimyarī de la notice que Bakrī consacre à Barbastro59 est révélateur de sa pratique de la compilation. Il reprend le récit sur la prise de Barbastro par les Francs et les Normands en 456/106460, puis sa reprise par les musulmans quelques mois plus tard, en l’agrémentant d’un long poème d’Ibn al-ʿAssāl61. La dernière ville que décrit Bakrī ne fait pas partie de l’Espagne musulmane62 ; c’est Barcelone et son évocation n’est que l’occasion de présenter les démêlés conjugaux du comte Raymond Bérenger Ier63. Ḥimyarī reprend la totalité du récit de Bakrī.
35Au total, peu de lignes de Bakrī ne figurent pas dans le Rawḍ. Le discours du géographe du xie siècle est cependant amalgamé à d’autres citations, noyé notamment parmi les informations économiques tirées de l’ouvrage d’Idrīsī. La prose de Bakrī, sans nul doute originale par son style comme par ses préoccupations « historiques », est aisément identifiable au sein de l’écriture de Ḥimyarī. En relisant l’intégralité du Rawḍ, on ne trouve pas trace de passages de ce type qui ne figurent pas dans les manuscrits que nous connaissons de Bakrī. Puisque Ḥimyarī prend tant de soin à recopier ce texte, il semble peu probable qu’il ait choisi d’écarter certaines notices du Kitāb al-masālik wa l-mamālik. Cela accrédite la thèse selon laquelle la géographie de Bakrī qui nous est parvenue n’est point tronquée, contrairement à ce qu’affirmait Lévi-Provençal.
Les emprunts faits à Idrīsī
36La quasi-intégralité des pages de la Nuzhat d’Idrīsī traitant de l’Espagne se retrouvent dans le Rawḍ. Seules les localités de Najera, Mequinenza, Lucena, Elvas, Astorga et Carrion, évoquées dans l’ouvrage d’Idrīsī, ne sont pas mentionnées par Ḥimyarī. Ce dernier ne consacre pas de notice, mais deux allusions dispersées, à Medinaceli64, que cite pourtant le géographe du roi Roger. Hormis ces quelques exceptions, les informations géographiques que fournit Idrīsī constituent le cœur du Rawḍ. Certaines des notices de cet ouvrage ne sont parfois constituées que d’une citation d’Idrīsī65. Cette géographie, qui se voulait plus « neutre » que celle de Bakrī, qui privilégiait les données d’ordre économique, ne pouvait que se tailler la part belle au sein du tableau récapitulatif que dresse Ḥimyarī.
37Nous l’avons vu au chapitre précédent, le géographe du roi Roger écrivait en un temps où le devenir de l’Espagne musulmane paraissait déjà compromis. En insistant sur l’identité économique des villes, en écartant l’histoire, en situant des localités à la fois dans les IVe et Ve climats, Idrīsī permettait à la géographie concernant al-Andalus de continuer à s’écrire, sans pour autant dresser le bilan de ce qui était et de ce qui n’était plus à l’Islam. Il ouvrait donc la voie à la géographie utopique de Ḥimyarī, un discours qui transcende l’histoire tout autant qu’il s’affranchit du terrain. Il est donc assez cohérent qu’Idrīsī soit, avec Rāzī, le seul géographe cité par Ḥimyarī. Quelques éléments en revanche, peu nombreux mais signifiants par leur absence même, n’ont pas été repris, ce qui signifie bien que la compilation est bien un choix, un filtre des informations, et qu’elle ne saurait être anodine. La géographie de Ḥimyarī est aussi une vision du territoire. Le principe du classement alphabétique permet ainsi de dépasser la distinction que faisait Idrīsī entre les IVe et Ve climats. Certaines informations sont sciemment écartées : lorsque, par exemple, Ḥimyarī recopie la notice qu’Idrīsī consacre à Coria, il omet de faire figurer la dernière phrase du géographe de Roger, celle qui précise que la ville est tombée entre les mains des chrétiens (depuis 1124)66. Ḥimyarī est donc bien loin de réactualiser systématiquement les informations reprises chez ses prédécesseurs.
L’articulation des citations
38Rāzī, ʿUḏrī, Bakrī, Idrīsī, mais aussi Masʿūdī67, Ibn Ḥayyān ou Ibn al-Aṯīr pour les informations plus historiques, sont donc largement mis à contribution par l’auteur du Rawḍ. Dans sa préface cependant, Ḥimyarī clame haut et fort son intention de dépasser ses prédécesseurs et d’écrire un livre plus abouti. Nous ne reviendrons pas sur les ambiguïtés de la compilation, ainsi que sur les compromis qui la sous-tendent, mais force est de constater que l’auteur du Rawḍ, s’il est avant tout un compilateur, n’est pas que cela. Le fait de recopier ses devanciers est inhérent à la prose géographique même, ce qui n’ôte pas le mérite de livrer aussi une vision du monde.
39De la même façon que la géographie, « touchant à toutes les autres recherches, est “autre chose” que chacune d’elles68 », la géographie de Ḥimyarī, bien que constituée pour l’essentiel de citations, ne se réduit pas à un collage. Comme le dictionnaire encyclopédique auquel elle emprunte sa forme, elle se veut une somme et engrange les connaissances et les informations selon une logique qui lui est propre. Cette démarche totalisante plie les discours antérieurs pour les faire tenir dans un cadre qu’elle a au préalable fixé. Rāzī est ainsi sollicité pour les informations historiques contenues dans la seconde partie de son ouvrage (et guère pour sa géographie proprement dite), ʿUḏrī pour les généalogies qu’il donne des dynasties arabes contrôlant aux temps de l’émirat puis du califat omeyyades les zones de Marche, ainsi que pour les merveilles de l’Espagne, Bakrī pour les explications étymologiques qu’il fournit à propos des noms de villes et pour les indications concernant le passé antique des villes, et enfin Idrīsī est une mine inépuisable à propos des productions agricoles et artisanales des différentes localités et régions d’al-Andalus.
40Chacune de ces conceptions du territoire andalou est en partie vidée de sa cohérence à défaut de sa substance mais, mises bout à bout, elles constituent une autre vision du territoire. Prenons l’exemple d’une notice type, celle que Ḥimyarī consacre à la ville de Santa Maria de Algarve (Shantamarīya69) : « Ville d’al-Andalus, dans la région d’Ocsonoba. Près de Santa Maria, il y a une curiosité que tous les musulmans qui sont venus dans les parages ont pu observer. Il s’agit d’une source qui sort de terre avec une eau abondante, sous les yeux des gens qui sont là. Mais si ceux-ci s’approchent et s’arrêtent devant la source, l’écoulement cesse et plus une goutte n’en sort. Dès qu’ils s’éloignent, le débit de la source redevient normal. C’est là un phénomène que ceux qui parviennent jusque dans cette région n’ont pas de peine à vérifier. (Citation de ʿUḏrī, reproduite par Qazwīnī70.)
41Santa Maria de Algarve est située sur les bords de l’océan Immense (al-bahr al-aʿẓam), et ses murs baignent dans l’eau à marée haute. C’est une ville d’importance moyenne, avec un territoire dont le sol est de bonne qualité. Elle est pourvue d’une mosquée du vendredi, d’une chaire de prédication et d’une petite mosquée. Son port est fréquenté par les navires. Les environs produisent beaucoup de raisin et de figues. La distance qui la sépare de Silves est de vingt-huit milles. (Citation d’Idrīsī71.)
42C’est de Santa Maria qu’est originaire le maître Abū al-Ḥağğāğ Yūsuf b. Sulaymān al-Šantamarī al-Aʿlam, l’auteur d’ouvrages réputés. Santa Maria est de fondation antique. Elle est pourvue d’un chantier de construction pour les flottes (dār al-ṣināʿa). En face d’elle, dans la mer, sont des îles où croissent des pins. (Citation de Rāzī72.)
43Une curiosité est celle dont on put être témoin à Santa Maria dans la période comprise entre 560 et 570 (1165-1174) : il s’agissait d’un enfant dont les témoins oculaires estimèrent l’âge exact à environ cinq ans, et qui avait déjà acquis sa virilité et était couvert de poils. Il passa dans le pays pour un phénomène73. » (Citation non identifiée.)
44Si l’on considère l’une des notices les plus emblématiques, celle consacrée à Cordoue, on comprend également l’architecture de cette géographie, malgré les échafaudages qui l’encombrent. La très longue description de la grande mosquée, cliché s’il en est de la littérature géographique d’al-Andalus, est ainsi le fruit de croisements multiples : les passages de ʿUḏrī, de Bakrī puis d’Idrīsī se succèdent ainsi, quitte à induire un effet de répétition. Le but est de montrer l’exhaustivité du compilateur, qui met bout à bout les matériaux dont il dispose. Mais Ḥimyarī fait plus que juxtaposer les citations, il introduit un nouvel élément au sein de la géographie andalouse, un élément jusque-là négligé par une discipline qui se proposait avant tout de rendre compte d’un territoire. L’un des passages de la notice consacrée à Santa Maria en témoigne : dans l’articulation des citations se glisse le nom d’un lettré. Avec Ḥimyarī, la géographie humaine se préoccupe enfin des hommes. Certes, il ne s’agit pas de n’importe quels hommes, mais de ces ulémas qui sont dorénavant, eux aussi, à l’instar des lieux, les dépositaires d’une mémoire.
UNE GÉOGRAPHIE DES LETTRÉS
45Le territoire n’a plus de cohérence, il est éclaté en de multiples toponymes que l’on ne découvre pas au fil des itinéraires, mais selon leur classement alphabétique. De ces lieux, perdus pour la plupart, ne restent finalement que des noms, dont il faut conserver le souvenir. Au sein de cette géographie, désormais affranchie du terrain, d’autres jalons peuvent désormais prendre le relais de la mémoire défaillante et incarner, au sens propre du terme, une terre qui n’est plus un territoire : ce sont les hommes qui ont illustré son histoire. Ce ne sont guère les héros éponymes, les conquérants, les sauveurs de tous ordres ou les souverains glorieux que le Rawḍ choisit de mettre en valeur, mais les lettrés, ceux qui forment cette caste sociale à laquelle notre auteur appartient. Les ulémas sont ainsi présentés comme les ornements d’une société, mais aussi comme ces références incontournables qui témoignent de la grandeur d’une terre. La notice que consacre Ḥimyarī à la ville de Dénia témoigne bien de l’intrusion de ceux-ci au sein du discours géographique sur al-Andalus :
« De là [Cullera] à Dénia, quarante milles. Cette ville est au bord de la mer ; elle est prospère et jolie. Elle a un faubourg florissant. Elle est entourée d’une enceinte forte, qui, du côté de l’est, s’avance dans la mer. Elle a été construite avec beaucoup d’art et d’intelligence. Sa citadelle est très forte et surplombe un territoire mis en valeur sans solution de continuité, et de nombreux figuiers et vignobles. Des navires s’y rendent et on en construit beaucoup dans son chantier naval. Des flottes en sortent pour des opérations militaires et des bateaux en partent pour l’Orient le plus lointain. Au sud de cette ville, il y a une énorme montagne ronde du sommet de laquelle on aperçoit la montagne d’Ibiza en pleine mer. Cette montagne s’appelle Qā‘ tūn74. (Ce passage est entièrement repris de l’ouvrage d’Idrīsī.)
C’est de Dénia qu’est originaire Abū ʿAmr al-Dānī, le spécialiste des lectures coraniques, connu sous le nom d’Ibn al-Ṣayrafī et auteur d’ouvrages sur les recensions du Coran. Dans al-Andalus, il fut le disciple de Muḥammad b. ʿAbd Allāh Ibn Abī Zamanīn ; il se rendit en Orient et y fut l’auditeur de nombreux maîtres. Il mourut à Dénia en 444 (1053)75. »
46Ḥimyarī réintroduit ces hommes qui, contrairement aux souverains ou aux militaires, peuvent être présentés de manière intemporelle. Dans le discours géographique, ils échappent à tout contexte : la chaîne du savoir qui les relie leur confère une histoire indépendante, une existence autonome. On comprend dès lors pourquoi ils sont omniprésents dans la géographie de Ḥimyarī : leurs poèmes témoignent mieux que les grands discours de la douleur ressentie lors de la perte d’une ville76 ; leurs noms projettent parfois quelque lumière sur une obscure bourgade dont la seule qualité est de les avoir vus naître77 ; leur intégrité morale sert d’exemple78 ; et la profondeur de leur savoir, toujours, est louée. L’évocation des ulémas s’accorde particulièrement bien de la fragmentation du cadre urbain. Ḥimyarī est donc l’inventeur, en al-Andalus, d’une géographie des ulémas : en dépit de son constant souci de rester bref, il n’hésite pas à énumérer longuement leurs noms, ou à citer poèmes et œuvres de prose. En introduisant ces hommes au sein du discours géographique, en retranscrivant des extraits de leurs ouvrages au sein de notices consacrées à des localités, il en fait les jalons d’un territoire désormais éclaté. Ces hommes, présentés non dans leur succession chronologique, ni même alphabétique comme c’est le cas dans les ṭabaqāt (les dictionnaires biographiques), relient les villes entre elles, font figure d’itinéraires et témoignent de la cohérence d’un lieu et d’une histoire. Il nous a semblé important d’en donner la liste, selon leur ordre d’apparition dans le Rawḍ, afin de témoigner de la place qu’ils occupent au sein de cette géographie :
47- Aḥmad b. Muḥammad al-Rāzī. À tout seigneur, tout honneur, le père de la géographie andalouse apparaît dans l’introduction du Rawḍ, ce qui lui vaut d’être mentionné en premier79.
48- Sāʿid b. Aḥmad, cadi de Tolède, mort dans cette ville en 1070, et auteur d’un ouvrage intitulé Catégories des nations (Tabaqāt al-hukamā’), que nous avons cité à plusieurs reprises80. Ḥimyarī reprend sa localisation d’al-Andalus à cheval sur les IVe et Ve climats.
49- ʿAbd al-Malik b. Ḥabīb b. Sulaymān b. Hārūn al-Sulamī al-Mirdāsī, historien andalou né en 180/796, mort en 238/853. Ce « premier historien connu de l’Espagne musulmane », selon É. Lévi-Provençal, est invoqué comme une autorité par Ḥimyarī qui lui empreinte le nom du seul compagnon du Prophète ayant participé à la conquête d’al-Andalus (al-Munḏir al-Ifrīqī)81.
50- Aḥmad b. Muḥammad Ibn ʿAbd Rabbihi, auteur d’un ouvrage intitulé al-‘Iqd, né en 246/840, mort en 328/940. Ḥimyarī recopie un extrait d’un poème composé par cet homme à propos de la répression par le futur calife ʿAbd al-Raḥmān III d’une révolte qui avait éclaté dans la ville d’Ecija en 300 (912)82.
51- Ibn Waddāh, écrivain cordouan mort en 286 ou 287 (899-900). Ḥimyarī précise que, selon cet auteur, la femme qui tua Jean, fils de Zacharie (saint Jean-Baptiste), était originaire d’Italica, près de Séville83.
52- Abū Ǧaʿfar Ibn Waḍḍāḥ al-Qaysī, surnommé dans la tradition espagnole « El Vaquero », mort vers 530/1136. Notre géographe recopie une partie du poème consacré par Abū Ǧaʿfar à la victoire remportée par Yaḥyā b. ʿAlī Ibn Ġāniya face à Alphonse le Batailleur devant Fraga le 23 ramaḍān 528 (17 juillet 1134). Ce beau texte, empli de l’écho de la bataille, mérite d’être reproduit en partie (mètre basiṭ) :
« Tu as retroussé tes vêtements quand le nonchalant laisse traîner les siens à terre, et l’ennemi a allumé dans ton cœur le feu du courroux ! Tu t’es avancé vers lui à la tête d’une forêt de lances, pareil à l’œil autour duquel bat la broussaille des cils !
Tu as noyé tes adversaires dans le sang, grâce à tes sabres indiens dégainés : ils s’en sont abreuvés comme de l’eau des étangs !
Ne t’impatiente pas si un seul parmi eux, [leur chef] n’a pas été tué : celui qui peut briser la tige de l’arbre nabʿ peut bien briser celle du saule d’Égypte !
Le gros de l’ennemi a subi des pertes, et les décrets divins qui ont fait replacer au fourreau les sabres des musulmans empêchent l’adversaire de se préparer à combattre de nouveau !
[Lors de cette bataille] tu sus prendre position, tandis que ton armée combattait, dispersée comme les perles d’un collier ; à tes côtés, pareils aux plus grosses perles, demeuraient les šayḫ-s et les jeunes [princes] ! Et les chevaux des ennemis tombaient sous les coups des sabres ! On eût dit que leurs hennissements étaient des réponses en chœur à des chants84 ! »
53- Abū Isḥāq Ibrāhim b. Ḫālid al-Ilbīrī al-Amawī, mort en 268/881-882. Traditionniste, originaire d’Elvira et figurant dans la notice consacrée à cette ville, au cœur d’une liste comportant les noms de ceux auprès desquels il « entendit le hadith85 ». Ḥimyarī précise qu’il s’agit de l’un des sept rapporteurs de hadith qui se trouvaient réunis à la même époque à Elvira.
54- Yaḥyā b. Yaḥyā al-Layṯī, traditionniste et juriste malikite réputé, d’origine berbère, mort en 234/848-849. Il fut l’un des maîtres du précédent86.
55- Saʿīd b. Ḥassān, l’un de ceux qu’alla écouter Abū Isḥāq Ibrāhim b. Ḫālid al-Ilbīrī al-Amawī87.
56- Abū Isḥāq Ibrāhim b. Masʿūd b. Saʿīd al-Ilbiri at-Tuğibī, poète ascétique, également originaire d’Elvira, mort à la fin de l’année 459/1067. Il est surtout connu par le poème virulent qu’il composa contre les juifs de Grenade, à l’époque de la dynastie ziride88.
57- Abū al-Ḥağğāğ Ibn ʿAtaba, médecin, lettré et poète originaire de Séville, qui mourut en Égypte au xiiie siècle. Ḥimyarī cite un poème composé par cet auteur lors de son passage à Andarax (Andaraš) et louant la beauté de cette ville située près d’Almería89.
58- Abū al-Rabīʿ Sulaymān b. Mūsā b. Sālim al-Kalāʿī, traditionniste mort « en combattant pour la foi » à la bataille d’Anīša en 634 (1237). Il est l’auteur d’un livre intitulé Kitāb al-Iktifā’, sur la biographie du Prophète et des trois premiers califes. Ḥimyarī l’évoque dans la notice consacrée à la ville d’Anīša (El Puig, près de Valence)90.
59- Abū ʿAbd Allāh Ibn al-Abbār al-Quḍāʿī, illustre littérateur et biographe andalou, mort en 658/1260, et que cite Ḥimyarī en raison du long poème funèbre qu’il composa lors des funérailles d’al-Kalāʿī, et qui se termine sur le vers suivant (mètre ṭawīl) :
« Disons adieu à ce bas monde, maintenant que n’y brille plus le visage de Sulaymān b. Mūsā b. Sālim91 ! »
60Ce personnage est également mentionné dans la notice consacrée à Valence, pour une épître qu’il fit lors de prise de la ville par les chrétiens en 636/1238 et que Ḥimyarī reproduit in extenso. Notre géographe cite également quelques vers d’un célèbre poème d’Ibn al-Abbār, poème en rimes s (sīnīya) et dans lequel figure cet extrait (mètre basīṭ) :
« Atteins avec tes cavaliers, les cavaliers d’Allāh, al-Andalus ! […]
Accours vers la Péninsule, dont les habitants sont en proie aux coups du sort et dont la fortune a fait place au malheur,
Vers les mosquées qui sont devenues des églises, vers l’appel à la prière que les cloches ont remplacé !
Quelle perte ! Comment ressusciter son passé ? Ces collèges où l’on récitait les versets du Coran ne sont plus que des ruines !
Elle était un parterre qui charmait nos prunelles ; ses bosquets naguère verdoyants se sont desséchés et durcis !
Les paysages enchanteurs qui l’environnaient ont changé, eux qui invitaient les passants à s’arrêter (pour les contempler), les gens assis à monter à cheval (pour les parcourir) !
Un impie est venu effacer ses beautés ; le sort l’a désigné pour sa perte ; tout occupé à la mettre en pièces, il ne dort, ni ne sommeille !
Il la fit tressaillir de tous côtés lorsque ses troupes l’encerclèrent ; il a rabaissé l’orgueil des plus élevés de ses habitants !
Dans les villes, le polythéisme s’installa, souriant et joyeux, tandis que la vraie Foi dut émigrer, la mort dans l’âme !
Les malheurs qui les ont ruinées en ont fait un spectacle deux fois plus triste qu’il n’était réjouissant naguère !
Ceux qui, parmi ces villes, ont atteint Valence et Cordoue sont tels que l’esprit en est épuisé et la respiration arrêtée92 ! »
61- Abū al-Muṭarrif Aḥmad b. ʿAbd Allāh Ibn ʿAmīra al-Makhzūmī, célèbre historien, juriste et poète andalou, né à Alcira en 582/1186 et mort à Tunis vers 656/1258. Il composa lui aussi un poème funèbre en l’honneur d’al-Kalāʿī93.
62- Abū al-Walīd Sulaymān b. Ḫalaf al-Bāğī, illustre juriste espagnol, né à Badajoz en 403/1012 et mort à Almería en 474/1081. Il figure dans la notice consacrée à Orihuela car il exerça la charge de cadi dans cette ville94.
63- Abū Muḥammad ʿAbd Allāh b. Farağ b. Ġazlūn al-Yaḥsubī, connu sous le nom d’Ibn al-ʿAssāl, littérateur, juriste et poète qui mourut en 487/1094. Il apparaît dans la rubrique traitant de Barbastro en raison d’un poème qu’il écrivit à l’occasion de la prise de la ville par les Rūm en 456/1064 et qui impute la responsabilité de cette défaite aux musulmans eux-mêmes :
« Mais, n’étaient les péchés des musulmans, n’étaient les crimes de lèse-religion qu’ils ont commis au su de tous,
Jamais le moindre cavalier chrétien ne les aurait vaincus ! Mais leurs péchés ont été pour eux comme une maladie !
Les mauvais parmi eux ne dissimulent même pas leurs méfaits, et la vertu de ceux qui font montre d’honnêteté n’est qu’hypocrisie95 ! »
64- Abū al-Ḥasan ʿAlī b. Muḥammad b. Šafīʿ al-Basṭī est un lettré que seul Ḥimyarī mentionne. Il est cité dans la notice sur Baza, ville dont il serait originaire, et à propos de laquelle il aurait écrit ces vers légers : « Si j’avais eu un penchant naturel pour l’ascétisme, la beauté de mon pays m’aurait quand même entraîné à la frivolité, à l’amour et à l’oisiveté96 ! »
65- Abū Isḥāq Ibrāhīm b. Abi al-Fatḥ Ibn Ḫafāğa, poète mort en 533/1138, et que cite Ḥimyarī dans la notice portant sur Valence. Il reproduit des extraits d’une longue lamentation qu’écrivit cet auteur après l’incendie de la ville par les Rūm en 495/1101-110297.
66- Abū ʿAbd Allāh Muḥammad b. ʿAbd al-Raḥmān b. Ḫalsa, grammairien valencien mort à Almería en 520 ou 521/1126-1127, qui composa également un poème à l’occasion de l’incendie de Valence98.
67- Abū al-Ḥasan Ali b. Muḥammad Ibn Ḥarīq al-Maḫzūmī, littérateur et poète de Valence, où il mourut en 622 (1225), un an avant la prise définitive de la ville par les chrétiens. Le texte que reproduit Ḥimyarī témoigne de l’angoisse du lettré face au sort qu’il pressent pour sa ville99.
68- ʿAbd Allāh b. Fatūḥ b. ʿAbd al-Wāḥid, auteur d’un livre intitulé al-Waṯāʾiq al-mağmūʿa, qui ne nous est pas parvenu. Ḥimyarī mentionne ce lettré dans la rubrique qui traite d’Alpuente (al-Būnt), bourgade dont il était originaire100.
69- Abū al-Ḥağğāğ Yūsuf b. Ibrāhīm al-Bayyāsī, historien mentionné dans la notice consacrée à cette ville, né à Baeza en 573/1177, mort à Tunis en 653/1255. Notre géographe ne retient de sa production littéraire qu’un ouvrage sur les guerres de l’Islam intitulé le Kitāb al-Iʿlām101.
70- Qāsim b. Aṣbaġ b. Muḥammad b. Yūsuf b. Nāṣih b. ʿAṭāʾ al-Bayyānī, traditionniste et philologue né à Baena en 247/862, mort à Cordoue en 340/952. La mention de son nom, mais aussi celle des maîtres d’Orient et d’Occident qu’il est allé écouter constituent l’essentiel de la rubrique concernant la ville de Baena102. Ces maîtres sont les suivants : Baqī b. Maḫlad (juriste espagnol, mort à Cordoue en 276/889), Aḥmad b. Zuhayr b. Ḥarb, appelé aussi Ibn Abī Ḫayṯama (savant irakien mort en 279/892), ʿAbd Allāh b. Aḥmad Ibn Ḥanbal (le fils du fondateur du rite hanbalite), ʿAbd Allāh b. Muslim Ibn Qutayba (m. 276/889), Muḥammad b. Yazīd al-Mubarrad (célèbre philologue irakien, mort en 285/898), Ṯaʿlab (célèbre grammairien irakien mort en 291/904).
71- Abū al-ʿAbbās Aḥmad b. ʿAbd Allāh al-Qaysī, poète surnommé al-Ṭuṭīlī al-Aʿmā, l’« aveugle de Tudèle », mort en 520/1126. Cité dans la notice consacrée à Tudèle103.
72- Abū ʿAlī Ḥusayn b. Muḥammad b. Aḥmad al-Ġassānī al-Ǧayyānī, imam, né en 427/1035-1036, mort à Cordoue en 498/1105. Cité dans la notice traitant de Jaén104.
73- Abū Ḏarr Muṣʿab b. Muḥammad b. Masʿūd b. ʿAbd Allāh b. Masʿūd al-Ḫušanī, connu sous le nom d’Ibn Abī Rukab, philologue andalou, né en 533 ou 535/1138 ou 1141, mort à Fès en 604/1208. Il figure dans la notice consacrée à Jaén dans la mesure où il était originaire de cette ville et en raison d’un poème qu’il composa lorsqu’il dut quitter la ville (mètre tawīl) :
« Ô Jaén, tu es l’aiguade dont un obstacle me sépare, et pourtant une soif ardente m’attire vers toi !
C’est toi que je me rappelle lorsque souffle le vent du Nord et que mes yeux voient, comme en une apparition, se dessiner tes contours !
Mais quand je veux m’en aller vers toi, la peur que me cause le cruel ennemi qui t’occupe me fait rebrousser chemin !
Ô vous, les deux palmiers de Jaén, par Allāh ! Soyez propices à un exilé qui pleure la perte de ses parents et de ses voisins !
Il soupire après votre ombre, et son cœur est l’otage des beautés qui sont demeurées à Jaén !
Il a mis son espoir dans la plus lointaine des terres du Couchant (le Maroc), et le Levant est devenu son souci ! Et elle lui rappelle des lieux qui lui en font regretter d’autres !
Ce ne sont ni la haine ni le dépit, mais les vicissitudes du temps qui font obstacle à mon retour !
Veuille Celui qui a décrété de m’envoyer loin des miens me témoigner Sa grâce, en arrangeant mes affaires et en améliorant ma condition ! »
74- Ḥimyarī précise que cet homme avait été cadi à Séville, préposé aux mariages (ḫuṭṭāṭ al-manākiḥ), puis qu’il avait exercé cette charge dans sa ville de Jaén en 1115-1116105.
75- Wakīʿ b. al-Ǧarrāḥ, juriste et traditionniste hanafite, mort en 197/812. C’est sous son autorité que Ḥimyarī, dans la notice consacrée à Algésiras, rapporte le sort que les habitants de cette ville réservèrent à Moïse et al-Ḫiḍr106.
76- Abū ʿAmr al-Dānī, connu sous le nom d’Ibn al-Ṣayrafī, spécialiste des lectures coraniques (muqriʾ), auteur d’ouvrages sur les recensions du Coran, mort en 444/1053 à Dénia, la ville dont il était originaire107.
77- Muḥammad b. ʿAbd Allāh Ibn Abī Zamanīn, l’un des maîtres du précédent, cité à ce titre dans la notice consacrée à Dénia108.
78- Abū ʿAbd Allāh Muḥammad b. Ġālib al-Raffāʾ al-Ruṣāfī, célèbre poète, mort à Malaga en 572/1177, dont l’évocation suffit à nourrir la notice consacrée à la bourgade de Rusāfa109.
79-Abū ʿAbd Allāh Muḥammad b. Farağ Ibn al-Ṭallāʿ, juriste cordouan renommé, né en 404/1014, mort en 497/1101. Il est mentionné dans la notice du Rawḍ consacrée à Zallāqa : Ibn ʿAbbād de Séville ayant tué de ses mains, en rağab 479 (octobre 1086), l’émissaire juif d’Alphonse VI de Castille, parce qu’il était ulcéré par les demandes de ce dernier, demanda à Ibn al-Ṭallāʿ une consultation juridique sur la légalité du châtiment qu’il avait infligé à l’émissaire. Le juriste s’empressa de répondre que le souverain avait eu raison d’agir comme il l’avait fait, et s’en expliqua à ses collègues juristes : « Je me suis hâté de répondre de la sorte à la consultation du prince afin de l’empêcher de faiblir dans la décision qu’il a prise de rompre le traité qui le liait à l’ennemi ! Peut-être Allāh fera-t-il de cette décision un moyen de salut pour les musulmans110 ! » -Abū Bakr ʿUbayd Allāh Ibn Adham, cadi de Cordoue vers 1086. Son nom figure également dans la notice portant sur Zallāqa car il fut au nombre de ceux que le souverain de Séville envoya au Maroc afin demander l’aide du souverain almoravide, Yūsuf b. Tāšfīn, en 1086, après la prise de Tolède par Alphonse VI111.
80- Abū al-ʿAbbas Aḥmad b. Muḥammad b. Farağ al-Anṣārī, connu sous le nom d’Ibn Rumayla le Cordouan, mort à la bataille de Zallāqa (23 octobre 1086), juriste et ascète112.
81- Abū Muḥammad ʿAbd al-Ǧalīl Ibn Wahbūn, poète originaire de Murcie, mort vers 480/1087 et présent à la bataille de Zallāqa113.
82- Abū Muḥammad Qāsim b. Ṯābit b. Ḥazm b. ʿAbd al-Raḥmān al-ʿAwfī, auteur du Kitāb al-Dalāʾil, mort à Saragosse en 302/914-915, originaire de Saragosse et évoqué dans la notice du Rawḍ consacrée à cette ville114.
83- ʿAlī b. Abī Ǧaʿfar Ibn Ḥamuško, poète dont le tombeau est à Segura. Selon É. Lévi-Provençal, ce personnage serait le frère du célèbre aventurier Ibrāhīm Ibn Ḥamušku (dont le nom signifierait en espagnol, « à l’oreille coupée ») qui, dans la seconde moitié du vie/ xiie siècle, fut seigneur de Segura avant de se soumettre aux Almohades115.
84- Abū Ibn Mujbar al-Fihriī, poète originaire de Segura et qui vécut surtout à Séville où il fut le chantre de la dynastie almohade. Il mourut à Marrakech en 588/1192, après avoir composé plus de neuf mille vers116.
85- Abū ʿAlī ʿUmar b. Muḥammad b. ʿUmar al-Azdī al-Išbīlī, connu sous le nom d’al-Šalūbīn, grammairien andalou, né en 562/1166 à Salobreña (Shalūbīniya) et mort en 645/1247.117 Son nom est cité à plusieurs reprises dans le Rawḍ et notamment dans la notice consacrée au château fort d’al-Suḫūr (près de Murcie). Celle-ci est l’occasion de raconter la rébellion d’Ibn Hūd contre ses maîtres almohades en 625/1228. Le calife almohade al-Maʾmūn interprète comme un très mauvais présage l’allocution improvisée par notre lettré. Celui-ci, affublé d’un fort défaut de prononciation qui le faisait prononcer le s et le ṣ comme un ṯ ; lui tient les propos suivants : Ṯallamaka al-Ilāhu wa-naṯaraka ! (qu’Allāh t’ébrèche et te disperse !), alors qu’il voulait dire sallamaka al-Ilāhu wa-naṣaraka (qu’Allāh te sauve et te rende victorieux)118.
86- Abū Muḥammad ʿAbd Allāh b. Muḥammad Ibn Sāra al-Bakrī al-Šantarīnī, connu sous le nom d’Ibn Sāra, poète mort en 517/1123-1124, évoqué dans la notice consacrée à la Sierra Nevada, et sur laquelle il composa un poème que Ḥimyarī recopie « en demandant à Allāh de [lui] pardonner de transcrire pareils blasphèmes » :
« Il nous est permis de délaisser la prière dans votre région et d’y boire du vin qui réchauffe, encore que ce soit là chose déclarée illicite !
Fuyons vers le pays de l’enfer, car il nous sera plus accueillant et moins inclément que Šulayr [la Sierra Nevada] !
Si, mon Dieu, tu dois me faire entrer dans la géhenne, c’est par un jour aussi froid qu’aujourd’hui, que la géhenne doit être agréable119 ! »
87- Abū al-Ḥağğāğ Yūsuf b. Sulaymān al-Šantamarī al-Aʿlam, littérateur andalou, originaire de Santa Maria de Algarve, mort en 476/1084, mentionné dans la rubrique traitant de la ville de Santa Maria de Algarve, dont il était originaire ; il est surtout connu par son « Commentaire des six diwān-s » (des principaux poètes de l’époque préislamique)120.
88- Abū ʿAmr Aḥmad b. Muḥammad Ibn Darrāğ al-Qasṭallī, poète originaire de Cacella, au Portugal actuel, né en 347/958 et mort en 421/1002. Il est cité dans la notice consacrée à Santiago en raison d’une missive qu’il envoya au calife Hishām II afin de l’informer de l’éclatante victoire remportée en 387/997 par al-Mansūr Ibn Abī ‘ Amīr en ce lieu très symbolique121.
89- Abū Marwān ʿAbd al-Malik b. Idrīs al-Ǧazīrī al-Ḫawlānī, connu sous le nom d’al-Jazīrī, poète et vizir d’al-Manṣūr Ibn Abī ʿĀmir ; il est mentionné dans la notice consacrée à Tortosa en raison d’un texte qu’il composa sur les terribles conditions de vie faites à ceux qui étaient emprisonnés dans la prison de cette ville, et au nombre desquels il fut puisque l’on sait qu’il y a été incarcéré sur l’ordre de ʿAbd al-Malik al-Muẓaffar et qu’il y mourut en 394/1003122.
90- Abū al-Walīd al-Turtūšī al-Fihrī, juriste, imam, né à Tortosa vers 451/1059-1060, mort à Alexandrie vers 520/1126. Il est mentionné dans la notice consacrée à sa ville natale. Ḥimyarī précise que ce lettré alla à Bagdad pour étudier le fiqh et écouter le hadith, et « on a dit que sa dévotion était plus grande que sa science », ce qui n’empêcha pas plus de deux cents juristes et jurisconsultes de suivre ses cours. Toujours selon notre géographe, il fut le contemporain de Ġazalī, dont il ne partageait pas les opinions. De ses ouvrages, le plus connu est le Sirāğ al-Mulūk123.
91- Aḥmad b. Muḥammad b. ʿAbd Allāh b. Lope (Lubb) b. Yaḥyā al-Maʿāfirī al-Ṭalamankī, savant versé dans la science des lectures coraniques (muqrīʾ), et dont l’évocation suffit à nourrir la notice consacrée à Talamanca, où il mourut en 429/1037-1038124.
92- Aḥmad b. Hārūn b. Aḥmad b. Ǧaʿfar Ibn ʿĀt al-Nafzī, juriste originaire de Jativa, né en 542/1148 et mort à la bataille de Las Navas de Tolosa, le 17 juillet 1212. Il est évoqué dans la rubrique traitant de ce lieu125.
93- Abū al-Ḥakam Munḏir b. Saʿīd al-Ballūṭī, grand cadi de Cordoue qui mourut à la fin de l’année 355/966, à l’âge de 82 ans, et qui était originaire de la région de Faḥṣ al-Ballūt (La plaine des chênes)126.
94- Ibrāhīm b. Yaʿqūb al-Ṭurtūšī, juif espagnol du début du xe siècle, dont les informations ont servi de sources à Bakri pour l’Espagne chrétienne et le reste de l’Europe, et qui fut, selon Qazwini127, l’informateur direct de ʿUḏrī qui le cite fréquemment. Il est mentionné dans la notice consacrée à Lorca en raison d’une information qu’il rapporte à propos d’un olivier merveilleux128.
95- Mūsā Ibn ʿImrān al-Qaysī al-Mārtulī, poète et ascète originaire de Mertola, où il mourut en 591/1194-1195. Ḥimyarī précise que cet homme avait à Séville la réputation d’être un saint et qu’il composa ces lignes :
« Je t’en fais la recommandation, ne désire ni la charge de témoinnotaire (ʿadl), ni celle d’imam, ni celle d’amīn !
Tu seras ainsi à l’abri de l’accusation de faux témoignage, de l’affligeante jalousie, du risque de passer pour malhonnête129 ! »
96- Abū Muḥammad ʿAbd Allāh b. Sulaymān Ibn Ḥawṯ Allāh al-Anṣārī, traditionniste célèbre et cadi de Malaga, mort en 612/1215. Ḥimyarī le mentionne dans la rubrique sur Malaga, en rapportant ce mot qu’il déclama lors de son arrivée à Malaga devant les étudiants venus l’accueillir :
« Salut à toi, Malaga, toi dont les figues font revenir les bateaux au port !
Mon médecin, durant ma maladie m’a interdit d’en manger ; qu’a donc mon médecin à me défendre ce qui me donne le goût de vivre130 ! »
97- Abū al-Qāsim ʿAbd al-Raḥmān b. ʿAbd Allāh al-Ḫaṯʿamī al-Suhaylī, ḥāfiẓ mort en 581/1185, originaire d’une localité appelée Suhayl, près de Marbella, et située au pied d’une montagne élevée du haut de laquelle les gens prétendent que l’on peut voir l’étoile Canope (Suhayl). Il est l’auteur du Rawḍ al-ānif131.
98- Abū Ġālib Tammām b. Gālib, connu sous le nom d’Ibn al-Tayyānī al-Luġawī (le lexicographe) al-Mursī, auteur d’un ouvrage intitulé al-Mawʿib ; il est mort à Almería en 436/1044-1045. Il est mentionné dans la notice consacrée à Murcie. Mujāhid, prince de Dénia, ayant conquis Murcie, lui aurait proposé 1 000 dinars pour qu’il lui dédie son ouvrage, ce que le lettré refusa132.
99- ʿUbayd Allāh b. Yaḥyā, poète cordouan, mort en 298 (911). Cité dans la notice consacrée à Munyat Nasr, localité située près de Cordoue133.
100- Abū ʿAbd Allāh b. Muḥammad b. Muṭarrif b. Šuḫays, poète cordouan de l’époque du califat, qui célèbre la même localité que le précédent, en plagiant un poème d’Ibn al-Muʿizz, le prince poète de l’époque abbasside, mort en 296/908. Notre Cordouan mourut avant 400 de l’Hégire134.
101- ʿAbd al-Barr Ibn Farsān al-Wādīʾāšī, lettré originaire de Guadix, mort peutêtre vers 1225, et qui fut vizir de Yaḥyā Ibn Ġāniya al-Mayūrqī. Il est l’auteur de ces vers guerriers très célèbres :
« Allons, faites-moi entendre les hennissements des chevaux, qui sont ma musique de prédilection, comme les flaques brillantes de sang répandu sont mon vin préféré !
Déposez ma selle sur le sol brûlé, car elle est ma couche, et les étendards qui flottent sont ma tente135. »
102- Abū ʿAbd Allāh Muḥammad b. Aḥmad al-Waškī, poète originaire de Huesca, mentionné dans la rubrique consacrée à cette ville, et sur lequel nous ne disposons d’aucun renseignement136.
103- Abū Bakr Ṣafwān b. Idrīs al-Tuğībī, auteur d’une anthologie de poètes andalous, le Zād al-musāfir ; il est né à Murcie en 560/1164 et mort dans la même ville en 598/1201. Il figure dans la notice consacrée à Huesca en raison de la correspondance qu’il entretint avec le lettré précédent137.
104- Abū al-Walīd Hišām b. Aḥmad b. Hišām b. Ḫālid al-Kinānī al-Waqqašī, cadi de Tolède originaire de Huecas, qui mourut à Dénia en 489/1096. Ḥimyarī signale que ce personnage avait des dispositions pour la géométrie, la logique, et qu’il était doté d’un grand sens de l’humour, comme en témoigne cette anecdote : « On rapporte que deux hommes vinrent lui exposer leur différend. L’un d’eux dit : “Ô juge, j’ai acheté à cet homme douze boucs, sauf ton respect [littéralement : sauf toi] !” “Dans ce cas, répliqua le cadi, dis alors onze boucs138 !” »
105- Abū Muḥammad ʿAbd al-Mağīd b. ʿAbd Allāh Ibn ʿAbdūn, connu sous le nom d’Ibn ʿAbdūn al-Yāburī, originaire d’Évora et auteur de la qasīda, mort en 529/1134139.
106La liste que nous venons de dresser témoigne de l’omniprésence des lettrés au sein du Rawḍ. On pourrait objecter que pareille énumération est un peu vaine, tant elle s’apparente au catalogue et ne nous renseigne guère sur chacun des auteurs qui la compose. C’est pourtant ainsi que ces derniers apparaissent au sein du discours géographique : sous la forme d’une brève évocation, enrichie parfois d’une anecdote ou d’un long poème, mais rarement plus. La raison en est l’agencement du discours géographique lui-même, lequel choisit de présenter les lettrés au gré des notices consacrées aux villes qui les ont vus naître, ou dans lesquelles ils se sont illustrés. Le résultat consiste en une mise à plat des différences, un nivellement des hommes et des périodes : une obscure bourgade devient l’égale des plus grandes villes dès lors qu’elle a la chance d’être le lieu de naissance d’un personnage illustre, lequel en retour nourrit en grande partie la notice consacrée à ladite bourgade. Comme les lieux, que plus aucune hiérarchie territoriale ne distingue puisque le classement alphabétique les met à égalité, les lettrés andalous sont évoqués au fil des notices, indépendamment de leur renommée ou de leur production. Cordoue ou Séville sont à ce titre comparables à Suhayl, Mertola ou Talamanca.
107Ce nivellement s’opère de plus au détriment de ceux que nous considérons comme les plus illustres de ces personnages. Nulle mention explicite à Ibn Ḥazm (384-456/994-1064), Averroès (520-595/1126-1198), Ibn ʿArabī (468-543/1076-1148), Azarquiel (m. 493/1100), Abū Marwān Ibn Zur (Avenzoar, 487-557/1092-1161), Ibn Bağğā (Avempace, m. 533/1138), Maïmonide (1135-1204), le mystique Ibn al-ʿArabī (560-638/1165-1240), et bien d’autres encore. Des hommes dont nous savons pourtant qu’ils bénéficièrent parfois d’une large renommée de leur vivant. Il est bien difficile d’expliquer leur absence ; l’originalité que nous reconnaissons à chacun d’eux ne suffit guère à justifier les motifs de leur éviction. Peut-être faut-il en imputer la responsabilité, une fois encore, au discours géographique lui-même, qui ne privilégie là que l’anecdotique et qui ne choisit parmi les savants que ceux dont la biographie permet d’évoquer une ville.
108Autre conséquence logique du choix de classement par origine géographique, ces hommes sont quasiment tous des Andalous. Lorsqu’un lettré oriental est évoqué, ce n’est qu’en qualité de maître de quelque savant originaire de la Péninsule. Force est de constater d’ailleurs que ce type de mentions est bien rare. Rien n’est dit des contacts que les savants andalous entretiennent avec leurs homologues orientaux ou maghrébins, ce qui donne ainsi l’illusion que, au fil des siècles, la culture andalouse évolue en vase clos.
109L’œuvre intellectuelle elle-même est rarement considérée, et les ouvrages, dans le meilleur des cas, ne sont évoqués qu’au détour d’une phrase. Toute anecdote quelque peu saillante a bien plus de chances de figurer au sein du Rawḍ qu’une analyse, même sommaire, des productions intellectuelles. Le discours géographique désociabilise les lettrés, rompt les chaînes qui parfois les unissent : ils ne sont désormais plus que les jalons d’un territoire éclaté, abstrait et perdu. Ce processus de distanciation, ou de dissociation, qui fige ces lettrés dans une identité qui n’est plus que géographique, est loin d’être anodin. Il est l’aboutissement de ce que nous entrapercevions déjà dans la géographie d’Idrīsī : le divorce progressif entre géographie et politique. Avec Ḥimyarī, cette séparation est désormais prononcée.
110Lorsque le géographe du roi Roger écrivait, le projet califal avait failli. Incapable de maintenir l’unité du dār al-islām, il avait fait preuve d’une impuissance rendue responsable de ce qui n’était encore que des reculs territoriaux. La géographie ne s’écrivait plus dans son ombre car il était essentiel pour sa survie qu’elle se dissocie d’un pouvoir qu’elle avait longtemps servi et qu’elle ne voulait pas suivre dans sa chute. Les automatismes persistaient cependant : dispensée de son rôle de serviteur de l’État, elle ne s’imaginait pas encore affranchie du pouvoir. Pour continuer à écrire une géographie universelle de langue arabe, Idrīsī se devait d’invoquer le patronage du roi normand de Sicile. Qu’importe si ce dernier était chrétien, l’essentiel résidait en la pérennité d’un discours dont l’enjeu n’était rien moins que la domination intellectuelle du monde.
111Au début du xive siècle, la géographie arabe est désormais séparée du pouvoir souverain. Dans la préface de Ḥimyarī, point d’invocation à un prince ni d’éloge à une dynastie ou à la ville qui l’abrite, mais la simple évocation d’une filiation intellectuelle et l’affirmation du rôle que cet auteur prétend jouer dans le champ d’un savoir. On comprend dès lors l’une des raisons de la place octroyée aux lettrés dans son écriture : ces derniers sont sa patrie, ses références et ce qui le rattache à une culture au sens large du terme, celle de l’Islam. Tout autant que les lieux, qui ne sont plus que des noms, ils incarnent une terre disparue et servent de points d’ancrage au discours géographique. Dès lors que la géographie est totalement affranchie du politique et qu’elle se réfugie dans une écriture utopique et nostalgique, l’histoire n’est plus un danger. Elle est même désormais le seul recours de la mémoire.
LA GÉOGRAPHIE, ENTRE HISTOIRE ET MÉMOIRE
112Tout autant que les lettrés, les allusions d’ordre historique se taillent la part belle au sein de la géographie de Ḥimyarī. Elles émaillent ce discours, bien plus que ceux de ses prédécesseurs. Rāzī réservait les mentions historiques à la deuxième partie de son ouvrage, dressant ainsi une cloison entre histoire et géographie. ʿUḏrī ne faisait pratiquement que de l’histoire, celle des familles arabes qui s’épanouirent sur le sol andalou. Il s’agissait là d’une ethnographie qui n’empruntait à l’histoire comme à la géographie que ce qui semblait nécessaire à son établissement. Bakrī accordait beaucoup d’intérêt aux récits ou aux traces du passé, mais il n’était presque exclusivement question que du passé antique de la Péninsule. Idrīsī refoulait autant qu’il le pouvait l’histoire, cette ennemie de la géographie. Avec Ḥimyarī, le propos diffère considérablement. L’histoire, jugée par nos auteurs défavorable à l’Islam, n’est plus l’adversaire qu’il faut contenir et auquel il faut imposer le silence afin que la géographie perdure et puisse présenter un territoire intemporel. Elle est désormais le seul recours permettant de redonner chair à un territoire qui n’est plus.
Les dates citées dans le Rawḍ al-Miʿṭār
113Nous avons choisi de présenter les dates explicitement fournies par le Rawḍ non selon leur ordre d’apparition, mais selon leur succession chronologique. L’inconvénient majeur de ce mode de présentation est de remettre un peu d’ordre dans un matériel que ne livre l’ouvrage que de façon éclatée, au gré des notices. Si nous avions respecté cette disposition lorsqu’il était question des lettrés, nous avons cependant choisi de la dépasser dans le cas présent, afin de mieux mettre en relief les périodes historiques privilégiées par le Rawḍ.
90 (708-709) | Prise d’Algésiras par les musulmans140 |
92 (710-711) | Bataille du Wādī Lakko141 |
94 (712-713) | Conquête de la région de Tudmīr142 |
138 (755) | Débarquement de ʿAbd al-Raḥmān Ier à Almuñecar143 |
160 (776-777) | Révolte d’al Fatḥ Ibn Ḏī al-Nūn à Uclés144 |
216 (831) | Fondation de Murcie par ʿAbd al-Raḥmān II145 |
241 (855-856) | Peuplement et fortification sur l’ordre de l’émir Muḥammad des villes de Calatrava et Talavera146 |
245 (859-860) | Prise d’Algésiras par les Normands147 |
270 (883-884) | Reconstruction de la ville de Lérida par Ibn Qasī148 |
288 (901) | Construction de la grande mosquée de Lérida149 |
288 (901) | Choix de Zamora comme capitale par les Rūm150 |
290 (903) | Conquête de l’île de Majorque par les musulmans151 |
300 (912) | Siège d’Ecija par Badr, le hājib de ‘ Abd al-Raḥmān III152 |
301 (913) | Prise de Séville par Badr153 |
305 (917-918) | Prise de Carmona par ‘ Abd al-Raḥmān III154 |
313 (925) | Siège et prise de San Esteban (Aštabīn) par les armées omeyyades155 |
327 (939) | Campagne de Zamora et défaite musulmane d’Alhandega (défaite du fossé)156 |
330 (941-941) | Prise de Narbonne par les chrétiens157 |
344 (954-955) | Construction de la ville d’Almería par ʿAbd al-Raḥmān III158 |
345 (955-956) | Construction de la grande mosquée de Tortosa159 |
368-370 (978-981) | Construction d’al-Madīnat al-Zāhira par al-Manṣūr Ibn Abī ʿĀmir160 |
387 (997) | Expédition d’al-Manṣūr contre Santiago161 |
421 (1030) | Reconstruction des remparts de Badajoz162 |
446 (1054-1055) | Voyage de Raymond de Barcelone au cours duquel il tombe amoureux d’Almodis163 |
456 (1064) | Prise de Barbastro par les Rūm164 |
457 (1065) | Reprise de Barbastro par Ibn Hūd165 |
459 (1066-1067) | Siège de Malaga par Ibn ʿAbbād166 |
478 (1085) | Prise de Tolède par Alphonse VI167 |
479 (1086) | Victoire musulmane de Zallāqa/Sagrajas168 |
495 (1101-1102) | Reprise de Valence par Almoravides169 |
508 (1114-1115) | Raid du comte de Barcelone contre Majorque170 |
512 (1118) | Prise de Saragosse par Alphonse Ier d’Aragon171 |
528 (1134) | Victoire musulmane de Fraga172 |
539 (1145) | Démolition du temple de Cadix par un amiral almoravide et campagne d’Alphonse VII contre Cordoue et Séville173 |
556 (1161) | Fondation de la ville de Gibraltar174 |
585 (1189) | Prise de Silves par Sancho Ier175 |
587 (1191) | Campagne du calife almohade al-Manṣūr Yaʿqūb b. |
591 (1195) | Victoire musulmane d’Alarcos177 |
592 (1195-1196) | Campagne d’al-Manṣūr Yaʿqūb dans la moyenne vallée du Tage178 |
599 (1203) | Expédition almohade contre Majorque179 |
608 (1211) | Prise de Salvatierra par le calife almohade al-Nāṣir180 |
609 (1212) | Défaite musulmane de Las Navas de Tolosa (al-ʿIqāb |
610 (1213-1214) | Victoire musulmane à Marğ al-Ḥimār |
614 (1217-1218) | Défaite musulmane à Alcacer do Sal |
620 (1224) | Siège du château fort d’Alcaraz par Ferdinand III187 |
621 (1224) | Défaite musulmane à Tejada188 |
622 (1225) | Défaite musulmane à Afs189 |
623 (1226) | Raid des chrétiens contre l’île de Qabtūr191 |
625 (1228) | Soulèvement d’Ibn Hūd à al-Ṣuḫūr192 |
627 (1229-1230) | Prise de Majorque par le roi d’Aragon194 |
630 (1232-1233) | Prise de Trujillo par les chrétiens195 |
633 (1236) | Prise de Cordoue par les chrétiens197 |
634 (1237) | Victoire des Aragonais à Anīša198 |
636 (1238) | Prise de Valence par Jacques Ier d’Aragon199 |
656 (1248) | Prise de Séville par Ferdinand III200 |
686 (1287) | Prise de Minorque par le comte de Barcelone201 |
114Le Rawḍ fournit donc un important matériel historique qui, lorsqu’il est recoupé avec d’autres sources, est un auxiliaire précieux pour l’établissement de l’histoire d’al-Andalus. Nous laissons cependant à d’autres le soin de poursuivre les travaux initiés par É. Lévi-Provençal afin de délimiter la véracité d’informations globalement fiables. C’est donc l’essentiel du passé andalou qui est ici retranscrit. Les dates citées se décomposent de la manière suivante : cinq dates concernent le viiie siècle, quatre le ixe siècle, treize le xe siècle, sept concernent le xie siècle, onze le xiie siècle et enfin dix-sept le xiiie siècle. Cette répartition s’explique en grande partie par la domination presque exclusive de l’histoire politique : hormis quelques moments clés de la conquête, l’histoire d’al-Andalus commence vraiment avec la longue marche au califat. La période des Taïfas, temps d’une intense activité intellectuelle mais aussi d’un éclatement politique pensé comme un amoindrissement, est logiquement sous-représentée. Trentedeux dates, en revanche, traitent des périodes almoravide (1085 à 1147) et almohade (1147 à 1269), ce qui témoigne de leur importance et de leur densité événementielle. Le nombre élevé d’événements du xiiie siècle s’explique par la notification, assez fréquente, de la chute de la ville aux mains des Rūm.
115De la même façon que les lettrés dont les noms nous sont les plus familiers ne figuraient pas dans le Rawḍ, certaines des dates phares de l’histoire d’al-Andalus sont passées sous silence. 929, qui correspond à la proclamation du califat omeyyade depuis Cordoue, près de deux siècles après le renversement de la dynastie en Orient, n’est pas mentionnée. L’évocation cependant des nombreuses villes soumises les unes après les autres par ʿAbd al-Raḥmān III et Badr, remplit le même office et témoigne tout autant de la montée en puissance de l’émir, dont l’accession au titre califal sonne comme une consécration. 1031, date que nous considérons comme fondamentale puisqu’elle correspond à l’abandon officiel du califat, dans une Cordoue ravagée par la guerre civile et à l’issue d’une interminable agonie, ne figure pas plus dans le Rawḍ. Mais la mention de la reconstruction des remparts de Badajoz évoque immanquablement la fitna. Si l’on ne considère que les dates, les Omeyyades sont occultés par les Almoravides et les Almohades. Nous avons vu cependant, dans la seconde partie de cette thèse, que l’évocation de la prestigieuse dynastie débordait de très loin le cadre étriqué des péripéties événementielles qui firent son histoire. Elle s’incarne, bien plus que les dynasties berbères, en des lieux qui sont l’élément central de cette géographie des villes. Peut-être peut-on supposer également que, au moment où Ḥimyarī écrit son ouvrage, l’âge d’or du califat est plus qu’un passé révolu, il est un mythe fondateur.
116Pléthore de dates donc, mais absence de celles que nous attendions. Nous concevons l’histoire comme la juxtaposition, donc le déroulement, de périodes successives que délimitent des dates clés. Celles-ci résument, tout autant qu’elles symbolisent, des processus longs dont elles marquent le début ou l’achèvement. Peut-être faudrait-il s’interroger sur la notion même de périodisation et sur les caractéristiques de l’écriture de l’histoire au Moyen Âge, lorsque le processus est plus signifiant que la date butoir. En ce qui nous concerne, c’est-à-dire dans le cadre d’une histoire qui n’est pas déroulée mais éclatée au sein du discours géographique, l’oubli, délibéré ou non, de certaines dates s’inscrit dans une volonté plus globale de neutraliser l’histoire.
La neutralisation de l’histoire
117Au sein de ce discours organisé de façon alphabétique, donc cloisonnée, l’histoire n’est plus le récit déroulé de façon chronologique et continue de l’apogée puis de la décadence. Éclatée en de multiples références que l’on rencontre au gré des rubriques consacrées aux villes qui lui servent de cadre, elle devient inoffensive, comme neutralisée par la géographie. Ḥimyarī peut donc se permettre d’en faire l’un des principaux motifs de son écriture. Toutes les notices du Rawḍ comportent ainsi des allusions au passé, antique ou plus récent, mais celles-ci voisinent avec d’autres informations, ce qui les empêchent de s’agencer en un récit proprement historique. Présente, mais mise à distance, l’histoire innerve donc en profondeur le discours géographique de Ḥimyarī, sans être jamais dominante. Et quand il faut évoquer la grandeur ou même la perte d’une ville, ce sont d’autres registres qui prennent le relais pour témoigner de la fierté ou de la douleur. Les deux plus longues notices du Rawḍ sont ainsi essentiellement nourries d’éléments « historiques », mais traités selon un autre mode.
118Le long portrait de Cordoue est ainsi constitué d’une minutieuse description de sa grande mosquée, dont on évoque les agrandissements successifs, ce qui revient à exposer l’histoire des Omeyyades. La notice très fournie que consacre Ḥimyarī à Valence n’est guère une description de la ville. C’est une revue de textes poétiques déplorant l’incendie qui ravagea cette cité lorsque les chrétiens l’évacuèrent en 1101-1102, puis sa perte définitive en 1238. Certains de ces textes, bien mieux que le récit de l’historien, évoquent la douleur de la défaite, de la perte et de l’exil. La poésie vient se substituer à l’histoire, laquelle n’est plus qu’un cadre vide, sobre et neutre, dont la seule fonction est de fournir des repères. Et lorsque l’on relit cette notice, il faut bien concéder que nul discours d’historien ne pourrait exprimer mieux que les vers d’Ibn ʿAmīra la souffrance devant la perte de la ville : « Les nuits de Valence brillaient naguère de l’éclat que leur donnait la religion de la bonne direction, et voici que ses jours sont maintenant obscurcis par la religion de l’égarement !
119Les nuits de l’adversité la couvrent désormais de leurs ténèbres, et les matins qui les suivent ont des aurores qui fatiguent nos yeux202 ! »
120Point n’est donc besoin de mentionner systématiquement les revers militaires, les défaites et les désastres de façon exhaustive, quelques évocations y suffisent. La convocation du passé, prédominante par définition dans une géographie qui décrit une terre disparue, emprunte donc de multiples formes et ne se réduit pas au simple récit historique. C’est la capitulation de l’histoire qui explique sa réconciliation avec la géographie.
L’histoire et la géographie au service de la mémoire
121Dans l’introduction qu’il donne à cette vaste entreprise historiographique que fut l’établissement des lieux de mémoire203, Pierre Nora oppose en partie l’histoire à la mémoire. L’histoire, parce qu’elle se fonde sur une distanciation temporelle, s’oppose à la mémoire, vivante, hors du temps, qui s’apparente à la tradition. Mais lorsque la mémoire disparaît parce que les milieux de mémoire ne sont plus, seule l’histoire peut sinon la retenir, du moins en conserver quelques bribes. Elle crée alors des lieux de mémoire où celle-ci vient se réfugier. « Habiterions-nous encore notre mémoire, nous n’aurions pas besoin d’y consacrer des lieux204 », écrit Pierre Nora. Ces lieux sont symboliques, ils ne sont que les endroits que la mémoire choisit d’investir205. Ils n’ont pas besoin d’être ancrés dans le sol ; ils servent bien mieux ce dernier en le transcendant. La géographie de Ḥimyarī participe, à un certain degré, de la même démarche. Les lieux ne sont plus que des noms, mais à ce titre leur existence symbolique est bien plus forte que lorsqu’ils étaient les simples jalons d’un territoire réel. Ils n’avaient alors comme seule importance que celle dictée par les circonstances de manière provisoire et conjoncturelle. Dès lors qu’ils ne sont plus les points d’un espace terrestre, mais les repères d’un territoire symbolique, leur force est décuplée par le simple jeu de l’évocation. Cordoue, Séville, mais aussi d’autres villes moins prestigieuses sont désormais affranchies du temps comme de l’espace, du contexte comme de la topographie, et elles revêtent de ce fait un caractère universel et intemporel qui les sublime. Il ne s’agit pas tant de « lieux de mémoire », emblématiques et symboliques donc peu nombreux et sélectionnés pour leur aptitude à incarner une mémoire qui se délite, que d’une mémoire des lieux, où tous les toponymes concourent, presque à égalité grâce à leur nombre, à faire exister un territoire. Le souci d’être complet, de n’oublier aucune de ces bourgades, villes et provinces qui firent al-Andalus dicte la démarche du géographe, lequel est désormais le seul comptable du capital territorial. Les lettrés deviennent les détenteurs par excellence de la mémoire lorsque les princes et les soldats ont été défaits. Leur responsabilité est de veiller à sa transmission, mais aussi à son élaboration, car « nul ne [sait] de quoi le passé sera fait206 ».
122Nous ne pouvons manquer de faire un parallèle avec ce que Pierre Nora nomme la mémoire archivistique qui caractérise notre époque : « À mesure même que disparaît la mémoire traditionnelle, nous nous sentons tenus d’accumuler religieusement vestiges, témoignages, documents, images, discours, signes visibles de ce qui fut, comme si ce dossier de plus en plus proliférant devait devenir on ne sait quelle preuve à l’on ne sait quel tribunal de l’histoire207. » La douloureuse tentative de notre géographe de conserver la mémoire est bien autre chose que la simple nostalgie de la « chaleur de la tradition ». Le terreau même de son enracinement lui a été arraché et la géographie symbolique vise à faire exister autrement un espace perdu par les armes. Si l’histoire prend le relais quand la mémoire s’effrite, la géographie fait de même lorsque la terre disparaît. Il s’agit donc bien d’un rapport dialectique entre histoire et mémoire : l’histoire prend le relais quand la mémoire n’est plus, et donc la conserve d’une certaine façon. Mais en même temps, en ressuscitant la mémoire, on transcende l’histoire et ses aléas. La géographie de Ḥimyarī vise à extraire al-Andalus du cours du temps ; tout en se nourrissant de données historiques neutralisées, elle l’extirpe de toute historicité.
123Le dernier de nos auteurs clôt et résume tout à la fois la longue évolution de la géographie de langue arabe écrite depuis al-Andalus, en livrant un ouvrage unique, par sa composition comme par son ambition. Le Rawḍ est une mosaïque, faite d’apports multiples, qui ne prend sens que lorsque l’on considère le résultat final et non l’infinité des matériaux qui la constituent. Par le biais de la compilation érigée en méthode, les récits géographiques antérieurs, tous différents par leur essence comme par les contextes qui les ont vus naître, s’agencent presque logiquement au sein d’un discours qui est autre chose que leur somme. Au cœur de cette vaste récapitulation, les données géographiques et historiques se déploient de façon alphabétique, permettant ainsi à Ḥimyarī de faire l’économie à la fois d’un tableau chronologique de l’histoire et d’une présentation globale d’un territoire qu’il est bien difficile de délimiter désormais. La grande nouveauté de cette écriture est d’introduire au cœur de la géographie de nouveaux jalons, les lettrés, mémoire vive d’al-Andalus, mais aussi les éléments historiques, contribuant par là même à l’avènement d’une géographie utopique, c’est-à-dire débarrassée des lieux. On conçoit dès lors qu’il s’agisse de la dernière mouture de la géographie andalouse. Cette vaste somme clôt un savoir dont elle prétend avoir fait le tour. Passé le xiiie siècle, cette terre n’intéresse plus ce domaine du savoir. Rituellement, les mêmes données, chaque fois plus périmées, seront pieusement exhumées, mais nul n’osera plus, en tant que géographe, prétendre apporter sa pierre à un édifice désormais achevé.
Notes de bas de page
1 Ḥāğğī Ḫalīfa, Kašf al-ẓunūn, éd. Flügel, Leipzig, 1835-1858, III, p. 490-491, nos 6597 et 6598.
2 C’est à cette même conclusion qu’arrive S. H. Hamarnesh, « Are there one or two Authors of the Work al-Rawḍ al-Miʿṭār by al-Ḥimyarī ? », Folia Orientalia, XII, 1970, p. 79-90.
3 Ḥimyarī, texte, p. 185 ; trad., p. 224.
4 Il s’agit d’un manuscrit rapporté de Tombouctou par un officier français et que Lévi-Provençal put consulter à Paris en 1935.
5 Cité dans É. Lévi-Provençal, La péninsule Ibérique au Moyen Âge…, op. cit., p. XVII.
6 Maqqari, Anal., II, p. 680. Cité dans É. Lévi-Provençal, La péninsule Ibérique au Moyen Âge…, op. cit., p. XVII.
7 R. Le Tourneau, The Almohade Movement in North Africa in the Twelfth and Thirteen Centuries, Princeton, Princeton University Press, 1969.
8 Les Mérinides se maintinrent au pouvoir dans l’actuel Maroc de 1269 à 1420 ; en Ifrīqiya, ce sont les Hafsides qui régnèrent, de 1228 à 1574.
9 Ḥimyarī, texte, p. 2 ; trad., p. 5.
10 Ḥimyarī, texte, p. 26-27 ; trad., p. 32-34 (France), texte, p. 161 ; trad., p. 193 (Castille) ; texte, p. 174 ; trad., p. 09 (León).
11 A. Miquel, La géographie humaine du monde musulman…, op. cit., t. I, p. 262 et suiv.
12 Sur les répertoires traitant de la péninsule Arabique, cf. ibid., p. 244 et suiv.
13 Il ne s’agissait pas seulement d’une géographie religieuse puisque étaient traités les lieux de la Ǧāhiliyya, de l’anté-islam, constitutifs également de l’identité arabe.
14 L. Kopf (« Djawharī », EI, 2, t. II, p. 509) précise qu’il existe en fait plusieurs principes de classement alphabétique : celui de l’alphabet rationalisé d’al-Ḫalīl, qui s’ordonne autour des catégories de phonèmes transcrits, celui de l’alphabet traditionnel, qui prend pour base de classement soit la première, soit la troisième des trois consonnes qui composent la racine. Cf. A. Miquel, La géographie humaine du monde musulman…, op. cit., t. I, p. 262.
15 Précisons que cet auteur est mentionné par Idrīsī dans la liste des sources qu’il a utilisées ; cf. GAL, suppl., t. I, p. 405 ; Kratchkovsky, op. cit., p. 233-234/229-230 ; A. Miquel, La géographie humaine du monde musulman…, op. cit., t. I, p. XXX.
16 Ibid., t. I, p. 262 et suiv.
17 É. Lévi-Provençal, EI, 2, t. I, p. 160.
18 Yāqūt, Muʿğam al-buldān, Beyrouth, 1374-1376/1955-1957, 20 vol. en 5 t. ; trad. part. W. Jwaideh, The Introductory Chapters of Yāqūt’s Muʿğam al-buldān, Leyde, 1959.
19 Il se trouvait à Merw en 615 (1218) avec plusieurs érudits chez Faḫr al-Dīn ʿAbd al-Raḥim, fils du jurisconsulte Samʿānī, lorsque les convives ne réussirent pas à s’accorder sur la localisation exacte d’un nom de lieu mentionné dans les traditions. Pour étayer l’hypothèse qu’il voulait défendre, Yāqūt se rendit dans toutes les bibliothèques de la ville et relut les meilleurs ouvrages sur la matière. Il ne parvint à trouver la réponse à sa question qu’à l’issue de laborieuses et fastidieuses recherches. Il en déduisit alors que les ouvrages manquaient de méthode, de cohérence et d’ordre. Il décida donc de réunir au sein d’un dictionnaire, obéissant à une classification alphabétique, tout ce qu’il avait pu recueillir sur un si vaste sujet.
20 W. Jwaideh, The Introductory Chapters of Yāqūt’s Muʿğam al-buldān, op. cit., p. 32-35.
21 Il s’agit là d’une contamination de ce qui prévalait pour le droit et le hadith aux premiers siècles de l’Islam. Sur la question essentielle de la structure généalogique du savoir, destinée à sauver le ‘ilm de l’oubli et à empêcher sa corruption, voir H. Touati, Islam et voyage au Moyen Âge, op. cit., p. 25-56.
22 H. Touati, Islam et voyage au Moyen Âge, op. cit., p. 35.
23 Et selon laquelle, plus on s’éloigne des origines, c’est-à-dire de l’époque du Prophète, plus le savoir se corrompt et risque d’être tronqué.
24 Lévi-Provençal l’appelle le plus souvent le « compilateur », et précise dans l’introduction qu’il donne du texte du Rawḍ qu’il s’agit d’« un enchevêtrement de citations anonymes et plus ou moins identifiables [lequel] constitue comme l’armature de la compilation d’Ibn ʿAbd al-Munʿim », É. Lévi-Provençal, La péninsule Ibérique au Moyen Âge…, op. cit., p. XXVI.
25 Rāzī, p. 59. Ḥimyarī, texte, p. 1 ; trad., p. 3.
26 Rāzī, p. 64-65 ; Ḥimyarī, texte, p. 153-158 ; trad., p. 182-190.
27 Château fort d’al-Andalus dont la principale caractéristique est de se situer à proximité d’une mine de mercure, Ḥimyarī, texte, p. 10 ; trad., p. 15.
28 Auteur de deux ouvrages intitulés Āṯār al-bilād (Monuments des pays) et Kitāb ʿağāʾib al-maḫlūqāt (Merveilles des choses créées). Les emprunts concernent principalement les merveilles d’al-Andalus, Āṯār al-bilād, Beyrouth, 1380/1960, p. 502, 505, 512, 549 et 553 ; Kitāb ʿAğāʾib al-maḫlūqāt, éd. Wüstenfeld, Göttingen, 1849, p. 173.
29 ʿUḏrī, Tarṣīʿ al-aḫbār, p. 92-93 ; Ḥimyarī, texte, p. 173-174 ; trad., p. 208-209. Sur la fameuse légende des sept dormants d’Éphèse ou de Loja, cf. l’article de L. Massignon, « Les sept dormants. Apocalypse de l’Islam », art. cité, p. 254-260, et J. Hernández Juberías, La península imaginaria, op. cit., p. 121-161.
30 ʿUḏrī, p. 58, 97, 122. Ḥimyarī, texte, p. 4-6, 8-10, 130-132, 179 ; trad., p. 6, 10-12, 14, 157-159, 216.
31 ʿUḏrī, p. 101-102. Ḥimyarī, texte, p. 153-158 ; trad., p. 182-190.
32 Du moins dans les notices traitant d’al-Andalus. Il cite en revanche une fois le nom de Bakrī lorsqu’il décrit l’Afrique du Nord.
33 Bakrī, texte, p. 517 ; trad., p. 275 ; Ḥimyarī, texte, p. 2 ; trad., p. 4 : « On dit que l’ancien nom d’al-Andalus était Iberia (Ibāriya) ; puis on l’appela Baetica (Bātika), ensuite Hispania (Išbāniya), du nom d’un personnage, Ishbān, qui, dans l’Antiquité, régna sur ce pays. On dit également qu’elle tire son nom des Išbān, peuple qui l’habita au début des temps. Puis on l’appela al-Andalus, du nom des Vandales (al-Andalīš) qui vinrent s’y fixer. »
34 Bakrī, texte, p. 523 ; trad., p. 286 ; Ḥimyarī, texte, p. 3 ; trad., p. 5.
35 Cf. supra, dans le chapitre consacré à Bakrī.
36 Il s’agit d’al Munḏir al-Ifrīqī.
37 Cf. supra, dans le chapitre consacré à Bakrī.
38 Bakrī, texte, p. 528 ; trad., p. 301 ; Ḥimyarī, texte, p. 4 ; trad., p. 7-8.
39 Bakrī, texte, p. 529 ; trad., p. 302 ; Ḥimyarī, texte, p. 156 ; trad., p. 187. Il s’agirait peut-être d’une extrapolation du latin cor dubium.
40 Ḥimyarī, texte, p. 158 ; trad., p. 189-190. La date exacte de la chute de Cordoue est le 23 šawwāl 633/29 juin 1236.
41 Bakrī, texte, p. 534-535 ; trad., p. 308-309 ; Ḥimyarī, texte, p. 18-22 ; trad., p. 24-28.
42 Bakrī, texte, p. 535-536 ; trad., p. 311 ; Ḥimyarī, texte, p. 20 ; trad., p. 26.
43 La pratique comme l’aveu de la compilation sont ici nettement mis en valeur : « Cette crue est mentionnée au tome second de l’ouvrage intitulé Ǧāli al-fikar, au premier feuillet, sous l’année 597 ; le passage en question est à recopier. » Il s’agit peut-être d’une chronique de l’époque almohade, désormais perdue.
44 Ḥimyarī précise que le souverain permit aux musulmans de quitter la ville avec leurs biens et qu’il les fit escorter, pour leur sécurité, jusqu’aux zones encore détenues par l’Islam, et qu’à sa mort, « cet homme doux, qui avait du sens politique fut enterré dans la mosquée-cathédrale de Séville, du côté de la qibla » (texte, p. 22 ; trad., p. 28).
45 Bakrī, texte, p. 538 ; trad., p. 314-315 ; Ḥimyarī, texte, p. 74 ; trad., p. 92.
46 Célèbre traditionniste malikite qui étudia en Orient auprès d’Ibn Ḥanbal et qui mourut en 287/900.
47 Juriste et traditionniste hanafite, mort en 197/812. Cf. Bencheneb, Classe des savants, p. 177, n. 2.
48 Bakrī, texte, p. 539 ; trad., p. 316-317.
49 Rāzī, p. 84-85.
50 Rāzī ne donne pas le nom de Hāšim b. ʿAbd al-ʿAzīz, mais celui de Ṯaʿlaba b. ʿUbayd Allāh. É. Lévi-Provençal avance qu’il s’agit d’un seul et même personnage, mis à mort par l’émir al-Mundhir en 273/886 (Ḥimyarī, trad. p. 212, n. 3).
51 Ḥimyarī, texte, p. 177 ; trad., p. 212-213. Sur cet épisode, voir l’analyse de C. Aillet, Les mozarabes…, op. cit., p. 138.
52 Rāzī, p. 85.
53 Bakrī, texte, p. 539-540 ; trad., p. 318-319 ; Ḥimyarī, texte, p. 46 ; trad., p. 58.
54 Sur ce célèbre révolté, qui s’opposa de 254/868 à 271/884 à l’émir omeyyade Muhammad I (852/886), voir Ibn Ḥayyān, Muqtabis, p. 15 ; Ibn ʿIḏārī, Bayān, II, p. 102, et É. Lévi-Provençal, Histoire de l’Espagne musulmane, op. cit., t. I, p. 295-299. Sur cet épisode de la fondation de Badajoz, cf. supra, dans le chapitre consacré à Bakrī.
55 Ḥimyarī, trad., p. 58, n. 4.
56 Ḥimyarī, texte, p. 133 ; trad. p. 160-161 ; Bakrī, texte, p. 541-542 ; trad., p. 320-322.
57 Ḥimyarī, texte, p. 127-128 ; trad., p. 155.
58 Bakrī, texte, p. 544 ; trad., p. 324 ; Ḥimyarī, texte, p. 64 ; trad., p. 80. Sur la signification de cette anecdote, voir G. Martinez-Gros, Identité andalouse, op. cit., p. 113-115.
59 Bakrī, texte, p. 545-546 ; trad., p. 325-326 ; Ḥimyarī, texte, p. 39-41 ; trad., p. 50-52.
60 Sur cet épisode, cf. supra, chapitre consacré à Bakrī, et R. Dozy, Recherches sur l’histoire et la littérature de l’Espagne, op. cit., II, p. 335 et suiv. ; É. Lévi-Provençal, Histoire de l’Espagne musulmane, op. cit., t. III, p. 78-79 ; du même, l’article « Al-Madjūs », EI, 3, p. 105 ; R. Menéndez Pidal, La España del Cid, op. cit., I, p. 163-167.
61 Traditionniste, juriste et poète qui mourut en 487/1094.
62 La ville, conquise par Mūsā ibn Nuṣayr en 97-98/714-715, fut reprise par le fils de Charlemagne, Louis, roi d’Aquitaine, dès 801.
63 Bakrī, texte, p. 547-549 ; trad., p. 327-331 ; Ḥimyarī, texte, p. 42-43 ; trad., p. 53-55. Pour l’analyse de cet épisode, cf. G. Martinez-Gros, Identité andalouse, op. cit., p. 108-119.
64 Ḥimyarī, texte, p. 162 et 193 ; trad., p. 195 et 234.
65 C’est le cas par exemple de celle consacrée à la plaine de Balāta (faḥṣ al-Balāṭa), texte, p. 46 ; trad., p. 59.
66 Idrīsī, texte, p. 547 ; trad., 266 ; Ḥimyarī, texte, p. 164 ; trad., p. 198.
67 Ḥimyarī recopie à plusieurs reprises des passages figurant dans Les prairies d’or de Masʿūdī. C’est le cas notamment d’un long récit qu’il donne de l’expédition menée par ʿAbd al-Rahmān III contre Zamora en 327/939, Ḥimyarī, texte, p. 98-99 ; Murūğ, III, p. 72.
68 A. Miquel, La géographie humaine du monde musulman…, op. cit., t. I, p. 32.
69 Aujourd’hui Faro, au Portugal.
70 ʿUḏrī, texte, p. 24 ; trad. F. de la Granja, « La Marca Superior », p. 15. Qazwini, Aṯār al-bilād, p. 359.
71 Idrīsī, texte, p. 543 ; trad., p. 262.
72 Rāzī, p. 91.
73 Ḥimyarī, texte, p. 114-115 ; trad., p. 141.
74 Idrīsī, texte, p. 557 ; trad., p. 276-277.
75 Ḥimyarī, texte, p. 76 ; trad., p. 95.
76 Dans la notice qu’il consacre à la ville de Valence, la « description » de la cité s’efface totalement devant l’importance des extraits de poèmes et d’œuvres en prose relatant deux épisodes de l’histoire de la ville : son incendie lorsque les Rūm l’évacuèrent en 495/1101-1102, et sa perte définitive en 636/1238. Le premier moment de cette histoire douloureuse est l’occasion de citer les vers écrits par Abū Isḥāq Ibrāhīm b. Abi al-Fatḥ Ibn Ḫafāğa (m. 533/1138) et ceux de Abū ʿAbd Allāh Muḥammad b. ʿAbd al-Rahmān b. Ḫalsa (grammairien valencien mort à Almería en 520 ou 521/1126-1127). Sur ces deux auteurs, voir H. Pérèz, La poésie andalouse en arabe classique au xie siècle, Paris, Adrien-Maisonneuve, 1937, p. 107 ; Ḥimyarī, texte, p. 47-55 ; trad., p. 59-69.
77 Voici par exemple la notice consacrée à Alpuente (al-Būnt) : « C’est un bourg dépendant de Valence, dont l’auteur du livre intitulé al-Waṯāʾiq al-majmūʿa, ʿAbd Allāh b. Fatūh b. ʿAbd al-Wāḥid, portait l’ethnique », Ḥimyarī, texte, p. 56 ; trad., p. 71.
78 C’est le cas par exemple d’Abū Ġālib Tammām b. Ġālib, connu sous le nom d’al-Tayyānī al-Luġawī (le lexicographe) al-Mursī (m. 436/1044-1045), qui refusa les mille dinars que lui proposait le célèbre Muğāhid de Dénia, qui venait de conquérir Murcie, afin que son nom figurât dans l’introduction de l’ouvrage. Ḥimyarī, texte, p. 182 ; trad., p. 219.
79 Ḥimyarī, texte, p. 1 ; trad., p. 3.
80 Ce texte a été édité par Cheikho, Beyrouth, 1912, et traduit par Blachère, Paris, 1935. Sur ce personnage, article de Blachère, EI, 1, t. IV, p. 874-875. Ḥimyarī, texte, p. 1 ; trad., p. 3.
81 Sur ʿAbd al-Malik Ibn Ḥabīb, R. Dozy, Recherches sur l’histoire et la littérature de l’Espagne, op. cit., I, p. 28-29 ; Brockelmann, GAL, I, p. 149-150 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., p. 29 ; Bencheneb, Classes des savants, op. cit., p. 151 ; EI, II, p. 402. Ḥimyarī, texte, p. 3 ; trad., p. 6.
82 Sur ce personnage, Brockelmann, GAL, I, p. 154 ; EI, II, p. 375-376 ; Ibn al-Faraḍī, Taʾrīḫ, no 118 ; Ḍabbī, Buġya, no 327 ; Dozy, introd. à son édition du Bayān, p. 27 ; Pons-Boigues, Ensayo…, op. cit., no 14, p. 151-157. Ḥimyarī, texte, p. 15 ; trad., p. 21.
83 Cf. Ibn al-Faraḍī, Taʾriḫ, no 1134 ; Ḍabbī, Buġya, no 291 ; Pons-Boigues, Ensayo…, op. cit., no 7, p. 49. Ḥimyarī, texte, p. 19 ; trad., p. 25.
84 Sur ce poète, Ḍabbī, Buġya, no 469 ; Ibn al-Abbār, Takmila 3, no 105. Des vers de ce poète sont cités par Maqqarī, Anal., II, p. 407-408. Cf. aussi M. Gaspar Remiro, Historia de Murcia musulmana, op. cit., p. 158-59. Ḥimyarī, texte, p. 25 ; trad., p. 32. Ce poème et ceux que nous citons plus loin ont été traduits soit par É. Lévi-Provençal, soit par H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit.
85 Cf. Ibn al-Faraḍī, Taʾriḫ, no 7 ; Ḍabbī, Buġya, no 499. Ḥimyarī, texte, p. 30 ; trad., p. 37-38.
86 Cf. R. Dozy, Histoire des musulmans d’Espagne, op. cit., I, p. 287 et suiv. Ḥimyarī, texte, p. 30 ; trad., p. 38.
87 Il s’agit sans doute, selon Lévi-Provençal, d’un personnage mort en 236/850-851, qui a fait l’objet d’une courte notice dans Ḍabbī, Buġya, no 796. Ḥimyarī, texte, p. 30 ; trad., p. 38.
88 Cf. Ḍabbī, Buġya, no 520 ; Ibn al-Abbār, Takmila, 3, no 352 ; R. Dozy, Histoire des musulmans d’Espagne, op. cit., III, p. 70-72 ; le même, R. Dozy, Recherches sur l’histoire et la littérature de l’Espagne, op. cit., I, p. 282 et suiv. et app. no XXVI ; É. Lévi-Provençal, Les « Mémoires » de ʿAbd Allāh, op. cit., p. 20. De nombreux vers de ce poète sont cités par Maqqarī ; cf. aussi H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit. Ḥimyarī, texte, p. 30 ; trad., p. 38.
89 Sur cet auteur, cf. Maqqarī, Anal., I, p. 533, 915, et II, p. 349. Ḥimyarī, texte, p. 31 ; trad., p. 40.
90 Cf. Brockelmann, GAL, I, p. 371 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 239, p. 283. Ḥimyarī, texte, p. 32-33 ; trad., p. 40-42.
91 Brockelmann, GAL, I, p. 340-341 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 253, p. 291 et suiv. ; Bencheneb, dans EI, 1, t. II, p. 374-375. Ḥimyarī, texte, p. 32 ; trad., p. 41.
92 Ḥimyarī, texte, p. 54 ; trad., p. 68-69.
93 Cf. Ibn al-Ḫaṭīb, Ihāta, éd. du Caire, I, p. 60-65 ; Maqqarī, Anal., index ; Brockelmann, GAL, I, p. 321-13 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 250, p. 288-289.
94 Cf. Ibn Baškuwāl, Sila, no 449 ; Ḍabbī, Buġya, no 777 ; Al-Fatḥ, Qalāʾid, p. 215-216 ; Maqqarī, Anal., I, p. 504-517 ; Brockelmann, GAL, I, p. 419 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 116, p. 155-156 ; Bencheneb, Idjāza, § 134 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., p. 69-70, 453, 456. Ḥimyarī, texte, p. 34 ; trad., p. 43.
95 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 624 ; Ibn al-Abbār, Takmila, 3, texte p. 6 ; trad., p. 15 et n. 5 ; Maqqarī, Anal., II, p. 140, 153, 672 ; É. Lévi-Provençal, « Alphonse VI et la prise de Tolède », Hespéris, XII, 1931, p. 49 ; Inscriptions arabes d’Espagne, p. 74 et n. 1 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., p. 99, 454, n. 6 ; Ḥimyarī, texte, p. 40 ; trad., p. 51.
96 Ḥimyarī, texte, p. 45 ; trad., p. 57.
97 Cf. H. Pérès, Poésie andalouse, index ; Brockelmann, GAL, I, p. 272 ; A. Gonzalez Palencia, Historia de la literatura arabigo-espanola, op. cit., p. 90-91. Ḥimyarī, texte, p. 48 ; trad., p. 60.
98 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 564. Ḥimyarī, texte, p. 48 ; trad. p. 60-61.
99 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 1895 ; Ibn al-Zubayr, Ṣilat al-Ṣila, no 263 ; Maqqarī, Anal., II, p. 278-279 passim. Ḥimyarī, texte, p. 55 ; trad., p. 69.
100 Une courte notice, sans indication chronologique, est consacrée à ce personnage par Ḍabbī, Buġya, no 946. Ḥimyarī, texte, p. 56 ; trad., p. 71.
101 Cf. Ibn Ḫallikān, Wafayāt, II, p. 548-551 ; Maqqarī, Anal., II, p. 122, 213 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 252, p. 290. Ḥimyarī, texte, p. 59 ; trad., p. 74.
102 Cf. Ibn al-Faradī, Taʾriḫ, no 1068 ; Ḍabbī, Buġya, no 1298 ; Yāqūt, Iršād, VI, p. 154 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 19, p. 59-61 ; Bencheneb, Idjāza, § 281. Ḥimyarī, texte, p. 59-60 ; trad., p. 75.
103 Cf. Ḍabbī, Buġya, no 429 ; Al-Fatḥ, Qalāʾid, p. 315-322 ; Brockelmann, GAL, I, p. 271 ; A. Gonzalez Palencia, Historia de la literatura arábigo-española, op. cit., p. 106 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., index. Ḥimyarī, texte, p. 64 ; trad., p. 81.
104 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 326 ; Ḍabbī, Buġya, no 643 ; Ibn Ḫallikān, Wafayāt, I, p. 158. Ḥimyarī, texte, p. 71 ; trad., p. 89.
105 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 1098 ; Ibn al-Qāḍī, Ǧadwa, p. 219. Ḥimyarī, texte, p. 72 ; trad., p. 90.
106 Cf. Bencheneb, Classes des savants, op. cit., p. 177, n. 2, et la bibliographie citée. Ḥimyarī, texte, p. 74 ; trad., p. 92.
107 Cf. Bencheneb, EI, I, p. 987. Ḥimyarī, texte, p. 76 ; trad., p. 95.
108 Cf. Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 64, p. 97-98, et la bibliographie citée. Ḥimyarī, texte, p. 76 ; trad., p. 95.
109 Cf. Ḍabbī, Buġya, no 251 ; Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 772 ; Ibn Ḫallikān, Wafayāt, II, p. 10 ; ʿAbd al-Wāḥid al-Marrākušī, Muʿğib, texte, p. 154-59 ; trad., p. 186-91 ; Maqqarī, Anal., index. Ḥimyarī, texte, p. 78 ; trad., p. 97.
110 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 1123 ; Ḍabbī, Buġya, no 256. Ḥimyarī, texte, p. 84 ; trad., p. 105.
111 Le nom de ce cadi de Cordoue ne figure dans aucun recueil biographique andalou. Ḥimyarī, texte, p. 86 ; trad., p. 107.
112 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 142. Ḥimyarī, texte, p. 91 ; trad., p. 112.
113 Cf. Ḍabbī, Buġya, no 1101 ; al-Fatḥ, Qalāʾid, p. 278-282 ; Šaqundī, Risāla, trad. Garcia Gómez, Elogio del Islām español, p. 59 et n. 71 ; Maqqarī, Anal., index ; ʿAbd al-Waḥīd al-Marrākušī, al-Muʿğib, éd. R. Dozy, p. 72, trad. Fagnan, p. 87 et n. 2 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., index. Ḥimyarī, texte, p. 94 ; trad., p. 116.
114 Cf. Ibn al-Faradī, Taʾrīḫ, no 1060 ; Ḍabbī, Buġya, no 1300 ; Yāqūt, Iršād, VI, p. 154. Ḥimyarī, texte, p. 98 ; trad., p. 120.
115 Cf. Ibn al-Ḫaṭīb, Aʿmāl al-aʿlām, p. 303 ; Iḥāṭa, éd. du Caire, I, p. 159-163. Ḥimyarī, texte, p. 105 ; trad., p. 129.
116 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 2055 ; Ḍabbī, Buġya, no 1493 ; Ibn Khallikān, Wafayāt, II, p. 328-329 ; Maqqarī, Anal., II, p. 159 ; Šaqundī, Risāla, trad. Garcia Gomez, Elogio del Islām español, op. cit., p. 83 et n. 109. Ḥimyarī, texte, p. 105 ; trad., p. 129.
117 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila 1, no 1829 ; Ibn Ḫallikān, Wafayāt, I, p. 382 ; Ibn Fahrūn, Dībāğ, p. 190 ; Ibn al-Zubair, Ṣilat al-ṣila, no 128 ; Maqqarī, Anal., index ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 247, p. 287. Ḥimyarī, texte, p. 111 ; trad., p. 136.
118 Ḥimyarī, texte, p. 119 ; trad., p. 146.
119 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 1331 ; Ḍabbī, Buġya, no 896 ; al-Fatḥ, Qalāʾid, p. 299-314 ; Ibn al-Ḫaṭīb, Iḥāta, ms. de l’Escorial, p. 232 ; une notice lui est consacrée à la fin du t. II de la Ḏaḫīra d’Ibn Bassām ; de nombreux vers de ce poète sont cités par Maqqarī (cf. index des Anal.) ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., index. Ḥimyarī, texte, p. 112 ; trad., p. 137.
120 Cf. Brockelmann, GAL, I, p. 309 ; EI 2., I, p. 252 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., p. 157 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., p. 29, 35, 58. Ḥimyarī, texte, p. 115 ; trad., p. 141.
121 Cf. R. Blachère, « La vie et l’œuvre du poète épistolier andalou Ibn Darrāğ al-Qasṭallī », Hespéris, XVI, 1933, p. 99-121 et la bibliographie citée p. 99, n. 1 ; Garcia Gomez, Elogio del Islām español, op. cit., p. 60 et n. 75 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., index. Ḥimyarī, texte, p. 115-116 ; trad., p. 142.
122 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 757 ; Ḍabbī, Buġya, no 1058 ; al-Fatḥ, Matmaḥ, p. 14-16 ; Maqqarī, Anal., I, p. 385-387 ; H. Pérès, Poésie andalouse, op. cit., p. 85-86, 169. Ḥimyarī, texte, p. 125 ; trad., p. 152.
123 Cf. Brockelmann, GAL, I, p. 459 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 150, p. 181 et suiv. ; Bencheneb, dans EI, 1, t. II, p. 378, s. v. « Ibn Abī Radaqā » et p. 271. Ḥimyarī, texte, p. 125 ; trad., p. 152.
124 Voir à son propos Ibn Baškūwal, Sila, no 90 ; Ḍabbī, Buġya, no 347 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 185, p. 118. Ḥimyarī, texte, p. 128 ; trad., p. 155.
125 Une notice lui est consacrée par Ibn al-Abbār, Takmila, 3, no 262, notice reproduite par Maqqarī, Anal., I, p. 873-874. Ḥimyarī, texte, p. 138 ; trad., p. 165.
126 Cf. notamment Ḫušanī, Quḍāt Qurṭuba, texte, p. 206-207, trad., p. 256-257 ; Ibn al-Faradī, Taʾrīḫ no 1452 ; Ḍabbī, Buġya, no 1357, et les autres références fournies par Fagnan, dans Bayān, II, trad., p. 259, n. 4. Ḥimyarī, texte, p. 140 ; trad., p. 168.
127 Cosm., II, p. 373.
128 Ḥimyarī, texte, p. 171 ; trad., p. 206.
129 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, no 2147 ; selon ce dernier, l’ascète serait mort en 604/1207 ; M. Asin Palacios, Vidas de Santones andaluces : la « Epistola de la Santidad » de Ibn Arabi de Murcia, Madrid, 1933, p. 91-94. Ḥimyarī, texte, p. 175 ; trad., p. 210.
130 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, 1, no 1435 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 223, p. 266. Ḥimyarī, texte, p. 179 ; trad., p. 215.
131 Cet ouvrage est une continuation de la Sīra d’Ibn Hišām. Cf. Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 201, p. 249-251 ; Brockelmann, GAL, I, p. 413. Ḥimyarī, texte, p. 180 ; trad., p. 217.
132 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 280 ; Ḍabbī, Buġya, no 600 ; Ibn Ḫallikān, Wafayāt, I, p. 120 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 98, p. 124. Ḥimyarī, texte, p. 182 ; trad., p. 219.
133 Cf. Ibn Ḥayyān, Muqtabis, index ; Ibn Faradī, Taʾrīḫ, no 762 ; Ḍabbī, Buġya, no 973 ; Ibn ʿIḏārī, Bayān, II, texte, p. 153, trad., p. 246 ; Maqqarī, Anal., index. Ḥimyarī, texte, p. 187 ; trad., p. 226.
134 Cf. Ḍabbī, Buġya, no 276 ; Maqqarī, Anal., II, p. 121 ; Ibn ʿIḏārī, Bayān, II, texte, p. 256, trad., p. 397 et n. 1. Ḥimyarī, texte, p. 187 ; trad., p. 227.
135 Ḥimyarī précise que Ibn Saʿīd (le grand historien hispano-maghrébin du xiiie siècle) et Ibn Buğayr (historien de la période almohade) ont tous deux mentionné Ibn Farsān. Il est également cité par Ibn Ḫaldūn (Histoire des Berbères, trad., II, p. 93) comme ayant accompagné le fils d’Ibn Ghāniya à Bagdad auprès du calife abbasside al-Nāṣir b. al Mustaḍīʾ ; Maqqarī, Anal., I, p. 881-883 ; II, p. 336, 381. Ḥimyarī, texte, p. 192 ; trad., p. 233.
136 Ḥimyarī, texte, p. 195 ; trad., p. 237.
137 Cf. Ibn al-Abbār, Takmila, no 1231 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 210, p. 256 ; Gaspar Remiro, Historia de Murcia musulmana, p. 259. Ḥimyarī, texte, p. 195 ; trad., p. 237.
138 Cf. Ibn Baškūwal, Sila, no 1323 ; Ḍabbī, Buġya, no 1426 ; Saʿīd, Ṭabaqāt al-umam, éd. R. P. Cheikho, p. 74 ; trad. R. Blachère, p. 10, 136, 137 et n. 1 ; Maqqarī, Anal., II, p. 256, 482, 515, 642. Ḥimyarī, texte, p. 196 ; trad., p. 237.
139 Cf. Ibn Baškūwal, Takmila, 1, no 831 ; Ḍabbī, Buġya, no 1567 ; Ibn al-Zubayr, Ṣilat al-Ṣila, no 63 ; Pons Boigues, Ensayo…, op. cit., no 158, p. 190-198 ; Brockelmann, GAL, I, p. 271. Ḥimyarī, texte, p. 197 ; trad., p. 239.
140 Ḥimyarī, texte, p. 74 ; trad., p. 93.
141 Ḥimyarī, texte, p. 169 et 193 ; trad., p. 204 et 235.
142 Ḥimyarī, texte, p. 62-63 et 151-152 ; trad., p. 78-79 et 181-182. Ce récit de 23 lignes a l’avantage de reproduire l’intégralité du traité de paix conclu entre Théodomir (Tudmīr pour les Arabes) et ʿAbd al-ʿAzīz b. Mūsā b. Nuṣayr, conquérant de cette région qui portait le nom de son roi.
143 Ḥimyarī, texte, p. 186 ; trad., p. 225.
144 Ḥimyarī, texte, p. 28 ; trad., p. 35. Il s’agit peut-être d’une rébellion contre l’émir ʿAbd al-Raḥmān I. Selon Lévi-Provençal, il est plus probable que cet événement ait eu lieu dans la région de Santaver qu’à Uclès (cf. le récit d’Ibn ʿIḏarī, Bayān, II, texte p. 57, trad. p. 88).
145 Ḥimyarī, texte, p. 181 ; trad., p. 218.
146 Ḥimyarī, texte, p. 163 ; trad., p. 196.
147 Ḥimyarī, texte, p. 75 ; trad., p. 93.
148 Ḥimyarī, texte, p. 168 ; trad., p. 202.
149 Ḥimyarī, texte, p. 168 ; trad., p. 202.
150 Ḥimyarī, texte, p. 99 ; trad., p. 122. Selon Lévi-Provençal, la date de 280 (893-894), avancée par Ibn ʿIḏarī (Bayān, I, trad., p. 204), semble plus vraisemblable.
151 Ḥimyarī, texte, p. 188 ; trad., p. 228.
152 Ḥimyarī, texte, p. 15 ; trad., p. 21.
153 Ḥimyarī, texte, p. 20 ; trad., p. 26.
154 Ḥimyarī, texte, p. 159 ; trad., p. 191.
155 Ḥimyarī, texte, p. 22 ; trad., p. 28.
156 Ḥimyarī, texte, p. 98-99 ; trad., p. 121-122. Cette retentissante défaite du calife omeyyade ʿAbd al-Rahmān III contre les Galiciens à Zamora est également évoquée par Bakrī. C’est cependant à Masʿūdī (Murūğ, édition de Paris, III, p. 72) que Ḥimyarī a emprunté ce passage.
157 Ḥimyarī, texte, p. 12 ; trad., p. 17. Ce passage de 5 lignes est attribué par Maqqarī (Anal., II, p. 672) à Masʿūdī, Murūğ (éd. de Paris, I, p. 363-364).
158 Ḥimyarī, texte, p. 183 ; trad., p. 221.
159 Ḥimyarī, texte, p. 124 ; trad., p. 151.
160 Ḥimyarī, texte, p. 80-82 ; trad., p. 100-102.
161 Ḥimyarī, texte, p. 115 ; trad., p. 142.
162 Ḥimyarī, texte, p. 46 ; trad., p. 58. Ils s’agit ici une citation de Bakri nous apprenant que les remparts de pisé de Badajoz furent reconstruits en pierre de taille et chaux vive en 1030, lors des soubresauts de la guerre civile. La date de 1031, abandon officiel du califat, n’est pas mentionnée dans le Rawḍ.
163 Ḥimyarī, texte, p. 42 ; trad., p. 54.
164 Ḥimyarī, texte, p. 40 ; trad., p. 51.
165 Ḥimyarī, texte, p. 41 ; trad., p. 52.
166 Ḥimyarī, texte, p. 178 ; trad., p. 214. Il s’agit d’une citation de Bakrī. Celui-ci remet en cause la prédiction selon laquelle les habitants de Malaga sont à tout jamais à l’abri des coups du sort ; il en donne pour preuve les exactions commises lors de la prise de la ville par les Abbadides de Séville.
167 Ḥimyarī, texte, p. 135 ; trad., p. 162. Notre auteur ne consacre qu’une seule ligne à cet événement au retentissement et aux conséquences immenses : « Les chrétiens prirent Tolède au milieu de muharram de l’année 478 (11 mai 1085) ».
168 Ḥimyarī, texte, p. 83, 95, 127 ; trad., p. 104, 116, 154. Il est ici question de la célèbre bataille qui eut lieu le 12 rağab de l’année 479 (23 octobre 1086) et au cours de laquelle les Almoravides, appelés à la rescousse par les princes musulmans d’al-Andalus après la prise de Tolède, écrasèrent les armées d’Alphonse VI. La victoire est très longuement dépeinte (plus de 13 pages) dans le Rawḍ. (Sur cette bataille, cf. V. Lagardère, Le vendredi de Zallāqa).
169 Ḥimyarī, texte, p. 48 ; trad., p. 60. Récit de la prise de Valence par le général almoravide Mazdalī, mettant ainsi fin au pouvoir du Cid puis de Chimène. Le texte est entièrement consacré aux exactions commises par les chrétiens lorsqu’ils évacuèrent la ville, et Ḥimyarī reproduit de longs passages de poèmes déplorant l’incendie de la cité.
170 Ḥimyarī, texte, p. 188 ; trad., p. 228. La notice consacrée à Majorque est la seule fournissant un récit historique continu, depuis la prise de la ville par les musulmans (290/903) jusqu’à sa chute entre les mains des Rūm en 627 (1229-1230).
171 Ḥimyarī, texte, p. 98 ; trad., p. 120. Ne figure qu’une courte allusion à la prise de la ville par Alphonse le Batailleur le 4 ramadān 512 (18 décembre 1118).
172 Ḥimyarī, texte, p. 24 ; trad., p. 31. Deux pages célèbrent les louanges des musulmans lors du combat qui les opposa à Alphonse le Batailleur. On peut également lire ce récit, avec plus de détails, dans le livre d’Ibn ʿIḏarī, Bayān, III.
173 Ḥimyarī, texte, p. 148 ; trad., p. 176. L’auteur lie la démolition du temple de Cadix aux incursions des Rūm contre Cordoue et Séville, suivant en cela une prédiction annonçant qu’al-Andalus disparaîtrait lorsque la statue serait démolie. Cordoue fut effectivement prise à cette date par le transfuge hūdide Sayf al-Dawla (le Safadola des chroniques espagnoles), à l’aide de troupes chrétiennes, mais pour quelques mois seulement. Séville payait alors tribut à Alphonse VII, depuis le raid victorieux de ce dernier en 527/1133.
174 Ḥimyarī, texte, p. 121 ; trad., p. 149. Ḥimyarī commet une erreur en attribuant la construction de la ville de Gibraltar à l’un des descendants du calife almohade ʿAbd al-Muʾmin ; c’est ce souverain qui la fonda.
175 Ḥimyarī, texte, p. 106 ; trad., p. 130. Le roi du Portugal, Sancho I, est appelé « Ibn al-Rinq (fils d’Henri), seigneur de Coïmbre ». Il prit Silves le 20 rajab 585 (3 septembre 1189).
176 Ḥimyarī, texte, p. 106-107 ; trad., p. 130-131. D’après Ḥimyarī, le souverain almohade, irrité par la prise de Silves, quitta Marrakech en janvier 1190, mena une campagne militaire en al-Andalus, et reprit Silves, le 26 ğumādā II 587 (21 juin 1191).
177 Ḥimyarī, texte, p. 12-13 ; trad., p. 18-19.
178 Ḥimyarī, texte, p. 13 ; trad., p. 19. Le souverain profite de la victoire remportée à Alarcos pour détruire ou prendre quelques châteaux forts de la région, avant de revenir en triomphateur à Séville.
179 Ḥimyarī, texte, p. 189 ; trad., p. 228-229. Cette expédition, envoyée par les Almohades, réussit à chasser de Majorque ʿAbd Allāh b. Isḥāq Ibn Ġāniya. Il s’agit, selon É. Lévi-Provençal, du plus long récit dont nous disposons sur la prise de Majorque par les Almohades.
180 Ḥimyarī, texte, p. 108-110 ; trad., p. 132-134.
181 Ḥimyarī, texte, p. 137-138 ; trad., p. 164-166. Ḥimyarī livre force détails, contrairement à son habitude dès lors qu’il s’agit d’une défaite musulmane, sur cet épisode extrêmement important de l’histoire d’al-Andalus, dont il sonne le glas. Il fournit notamment les noms des victimes illustres et insiste sur les trahisons et les ruses des Rūm, ainsi que sur l’incapacité de ce même al-Nāṣir qu’il avait encensé plus haut.
182 Ḥimyarī, texte, p. 11 ; trad., p. 15-16.
183 Ḥimyarī, texte, p. 196 ; trad., p. 238. Marğ al-Ḥimār est une plaine située près de Séville. Les habitants de cette ville surent la défendre avec bravoure contre les troupes du roi de Castille. Il ne s’agit cependant que d’une victoire défensive, retardant juste la chute de la ville.
184 Ḥimyarī, texte, p. 138 ; trad., p. 166. Le vaincu de Las Navas de Tolosa mourut, nous dit le chroniqueur, en raison de la morsure d’un chien ; mort peu glorieuse !
185 Ḥimyarī, texte, p. 162 ; trad., p. 194. Le géographe précise que, « suivant leur habitude, les soldats [musulmans] abandonnèrent le terrain et firent volte face, en peine déroute, tandis que l’ennemi leur faisait des morts et des prisonniers ».
186 Ḥimyarī, texte, p. 116 ; trad., p. 142-143. Le Rawḍ livre là le seul texte dont nous disposons sur cet épisode.
187 Ḥimyarī, texte, p. 166-167 ; trad., p. 200-201. La perte de cette forteresse, située près d’Albacete, par les musulmans est présentée comme une victoire par Ḥimyarī. La résistance héroïque de son gouverneur, Ibn Farağ, « occupa longtemps Alphonse (Ferdinand III), grâce à quoi le reste du territoire musulman connut du répit. Les musulmans en rendirent tout le mérite à Ibn Farağ ».
188 Ḥimyarī, texte, p. 128-129 ; trad., p. 155-157. Ce texte est le seul récit dont nous disposons sur cette importante bataille, que ne fait qu’évoquer Ibn Ḫaldūn dans son Histoire des Berbères, et qui opposa en ğumādā I de l’année 622 (mai-juin 1225) les Sévillans aux chrétiens de l’Algarve (Rūm al-ġarbiyyūn). « Le lustre de la dynastie (almohade) avait terni », et ce fut la populace (ʿāmma) de Séville qui se rendit au-devant des ennemis dans la plaine de Tejada. Le « ramassis de soldats improvisés » se fit tailler en pièces par les chrétiens, et ce sursaut populaire ne semble guère trouver grâce aux yeux de Ḥimyarī qui déplore l’absence d’une véritable armée de musulmans.
189 Ḥimyarī, texte, p. 136 ; trad., p. 163. Il s’agit, comme à Tejada, d’une bataille opposant les chevaliers chrétiens, bien armés, à la population de Murcie, qui est écrasée.
190 Ḥimyarī, texte, p. 57-59, 165, 173-174 ; trad., p. 72-74, 198, 209. Ce prince almohade, gouverneur de Baeza, se révolta contre le calife almohade, remit sa ville aux chrétiens et entreprit la conquête de plusieurs autres.
191 Ḥimyarī, texte, p. 149 ; trad., p. 178. Ce passage est, selon Lévi-Provençal, le seul témoignage dont nous disposons sur cet épisode, qui se déroula dans une bourgade située sur une île du Guadalquivir, près de Séville. Il s’agit d’un raid classique, avec son cortège de meurtres et de pillages.
192 Ḥimyarī, texte, p. 118 ; trad., p. 144. C’est dans ce château fort situé près de Murcie que se retrancha Ibn Hūd et qu’il se proclama indépendant d’un pouvoir almohade en pleine décomposition. Ḥimyarī fournit la liste des autres révoltés d’importance : les Banū Mardanīš à alence, les Banū ʿIsā à Murcie, les Banū Ṣanādīd à Jaén, les Banū Fāris à Cordoue, les Banū Wazīr à Séville.
193 Ḥimyarī, texte, p. 68-70 ; trad., p. 84-87. Il s’agit du récit le plus détaillé qui nous soit parvenu sur Ibn Wağğān, un dignitaire almohade rebelle qui tenta de rallier une partie du Maroc à sa cause. Il fut, ainsi que son fils, assassiné à Marrakech, à la porte de la mosquée qui lui servait d’asile.
194 Ḥimyarī, texte, p. 191 ; trad., p. 231. « Le passage de Majorque au pouvoir de la chrétienté eut lieu en l’an 627 (1129). » C’est par cette phrase laconique que se termine la longue notice consacrée à l’histoire de Majorque.
195 Ḥimyarī, texte, p. 63 ; trad., p. 80.
196 Ḥimyarī, texte, p. 199 ; trad., p. 241.
197 Ḥimyarī, texte, p. 158 ; trad., p. 190. La longue notice consacrée à Cordoue, célébrant la beauté de cette capitale d’al-Andalus et les ors de sa grande mosquée, se termine par cette simple phrase : « Ce fut alors que les chrétiens se rendirent maîtres de Cordoue et y établirent leur autorité, dans la dernière décade de shawwāl de l’année 633 » (fin de juin 1236).
198 Ḥimyarī, texte, p. 32 ; trad., p. 40. Anīša a été identifié avec El Puig, situé à une vingtaine de kilomètres au nord de Valence.
199 Ḥimyarī, texte, p. 48 ; trad., p. 61.
200 Ḥimyarī, texte, p. 22 ; trad., p. 28. Ḥimyarī souligne la bonté du roi Alphonse (Ferdinand III) qui permit aux habitants de quitter la ville avec leurs biens et qu’il fit même escorter jusqu’en territoire musulman afin de garantir leur sécurité. « C’était un homme doux, qui avait du sens politique. On dit que, lorsqu’il mourut, il fut enterré dans la mosquée-cathédrale de Séville. »
201 Ḥimyarī, texte, p. 185 ; trad., p. 224. Cette dernière date du Rawḍ n’en est pas une, car elle ne figure pas telle que dans le texte. L’auteur précise simplement qu’un gouverneur du nom de Saʿīd b. Ḥakam (al-Amawī) gouverna Minorque jusqu’à sa mort. C’est alors que « l’ennemi […] débarqua par surprise et s’en rendit maître ». Ibn al-Ḫaṭīb nous apprend que ce gouverneur mourut en 1281, que son fils lui succéda et qu’en 1287 le comte de Barcelone réussit à lui ravir Minorque.
202 Ḥimyarī, texte, p. 52 ; trad., p. 66.
203 P. Nora, « Entre Histoire et Mémoire, la problématique des lieux », dans Id. (dir.), Les lieux de mémoire, t. I, p. 23-43.
204 Ibid., p. 24.
205 Ces lieux de mémoires sont, par exemple, le calendrier républicain, la tour Eiffel, Le tour de la France par deux enfants, etc.
206 Cette heureuse expression est de P. Nora, Les lieux de mémoire, op. cit., p. 35.
207 Ibid., p. 31.
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