Conclusion de la deuxième partie
p. 257
Texte intégral
1Les topoï concernant l’espace mais aussi l’histoire d’al-Andalus constituent l’ossature du discours géographique. Ils sont autant de points de repère et d’ancrage à partir desquels un champ du savoir est délimité. Si le lieu commun « se fonde sur l’oubli de son lieu originel au profit d’une vérité universelle qui appartient à tous1 », il convient de constater l’originalité des clichés de l’écriture géographique, dont la force réside justement dans la capacité à rester ancrés en un lieu. Le lieu commun devient ici lieu de mémoire, là « où [celle-ci] se cristallise et se réfugie2 », tant est forte l’articulation entre géographie et histoire. L’inventaire des lieux est l’occasion du rappel du passé et induit la conscience des vicissitudes du temps ; comme Hérodote parcourant les cités des hommes, les géographes constatent que « celles qui étaient jadis grandes, pour la plupart sont devenues petites ; et celles qui sont grandes, étaient autrefois petites3 ». Il convient donc de toutes les décrire et l’inventaire discursif de la géographie est ici étayé par la déontologie de l’historien. Il ne s’agit pas tant, sous la plume des géographes, d’une confusion entre temps et lieux que de la reconnaissance de leur indéfectible complémentarité. L’écran de ces topoï géographiques et historiques peut donner l’impression d’un discours immuable et intemporel, dont les nuances seules feraient figure de variations. Or c’est justement ce postulat d’immuabilité et d’intemporalité qui nous semble significatif. Pourquoi la géographie se défie-t-elle tant de l’histoire ou, plus justement, du présent ? Il nous faut discerner, derrière l’architecture générale du champ du savoir géographique, la diversité des apports personnels. Les inflexions tout autant que l’apport original de chacun témoignent de la diversité des écritures de la géographie et, partant, des contextes d’élaboration de ses œuvres.
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