Les rapports de force
p. 245-256
Texte intégral
1Le pouvoir musulman avait besoin de prestigieux juristes afin de faire appliquer la loi religieuse et, pour de nombreux savants, la carrière judiciaire était attractive. Mais les relations entre les gouvernants et leurs juges, les cadis, pouvaient se révéler houleuses ; la prétention d’un souverain à conserver un droit de regard sur les pratiques judiciaires de ses délégués se heurtait aux velléités d’indépendance de juges qui ne voulaient rendre de compte qu’à Dieu. Les enjeux de l’institution judiciaire sont ici évoqués par Ibn Ḥajar al-‘Asqalānī (m. 1449), un juriste chafiite et traditionniste égyptien qui fut lui-même grand cadi d’Égypte et de Syrie entre 1423 et 1448. Auteur de volumineux dictionnaires biographiques consacrés aux savants, il écrivit aussi une histoire des cadis qui se succédèrent à Fusṭāṭ puis au Caire entre la conquête arabo-islamique jusqu’à sa propre époque. Cette Réhabilitation des cadis de Miṣr, dont provient le présent texte, repose, pour le xe siècle, sur un ouvrage désormais perdu d’Ibn Zūlāq (m. 996) qui fut lui-même contemporain de la transition entre les Ikhshidides et les Fatimides. La carrière d’Abū Ṭāhir al-Dhuhlī (m. 978), ici examinée par Ibn Ḥajar, dépendit de ses relations en perpétuelle renégociation avec le pouvoir et les notables locaux. L’histoire de ce savant, que ses fonctions érigèrent en intermédiaire entre les gouvernants et leurs sujets, reflète enfin la confrontation entre deux ordres juridiques : l’un, sunnite, traditionnel, en Égypte, représenté par le cadi, et l’autre, ismaïlien, apporté par la nouvelle dynastie.
2Source : Ibn Ḥajar al-‘Asqalānī, Raf‘ al-isr ‘an quḍāt Miṣr [Réhabilitation des cadis de Miṣr] trad. partielle par M. Tillier, Vies des cadis de Miṣr (237/851-366/976), Le Caire, Institut français d’archéologie orientale, 2002, p. 177-180.
3Ibn Zūlāq dit :… [Abū Ṭāhir al-Dhuhlī] vint à Miṣr pour la première fois en [3]40/951-952, après avoir exercé la judicature de Damas, car les habitants de cette ville lui avaient porté préjudice en rédigeant un procès-verbal sur son compte. Kāfūr leur avait apporté son soutien. Les lettres par lesquelles al-Muṭī‘ le révoquait de la judicature de Damas étaient arrivées, il avait été destitué d’ignoble manière, et les lettres avaient été lues du haut du minbar* de la grande mosquée de Miṣr. Al-Khaṣībī fut nommé à sa place.
4Abū Ṭāhir demeura à Miṣr. Lorsqu’al-Khaṣībī mourut, son fils fut nommé [à sa place] puis mourut peu de temps après. Miṣr demeurait sans cadi. On suggéra à Kāfūr de nommer Abū l-Ṭāhir, mais il refusa et désigna ‘Uthmān b. Muhammad b. Shādhān, le cadi d’al-Ramla, grâce aux intrigues du vizir Ja‘far b. al-Faḍl ; mais la nouvelle de la mort dudit ‘Uthmān se répandit [bientôt] à Miṣr. ‘Abd Allāh b. Walīd offrit alors trois mille dinars à Kāfūr.
5Les témoins instrumentaires et les notables de Miṣr se mirent d’accord pour accepter Abū Ṭāhir [comme cadi]. Ce dernier se rendit chez Kāfūr, qui tenait une audience de maẓālim*, en compagnie des hommes d’al-Khaṣībī. Ils se dirigèrent vers Kāfūr, mais celui-ci éconduisit [Abū Ṭāhir]. Ce dernier alla chez Niḥrīr al-Khādim, chez qui se trouvaient les témoins instrumentaires et les notables ; Niḥrīr se rendit chez Kāfūr, lui parla, et Kāfūr envoya un message aux témoins instrumentaires :
6— Choisissez un cadi ! leur disait-il.
7— Nous avons choisi Abū l-Ṭāhir, répondirent-ils. Nous l’avons beaucoup côtoyé, et nous n’avons vu que du bien.
8Yaḥyā b. Makkī b. Rajā’et al-Ḥasan b. Ayyūb al-Ṣayrafī firent son éloge, et Kāfūr [finit par] le nommer. [Abū l-Ṭāhir] s’en alla à la grande mosquée et reçut les archives du tribunal (dīwān* al-ḥukm) et des biens de mainmorte. Il exerça ses fonctions de bonne manière. La population l’aima, et de son côté il se montra aimable avec elle : ses jugements étaient complaisants, et il ne faisait pas preuve de sévérité, se rappelant ce que les habitants de Damas lui avaient fait subir. À Miṣr, son pouvoir de justice était restreint, car Kāfūr tenait souvent des audiences de maẓālim, tous les samedis.
9Il rédigeait des apostilles destinées aux témoins instrumentaires. Kāfūr lui retira les biens de mainmorte en shawwāl [3]50/nov.-déc. 961 et rendit leur administration à al-Ḥasan b. Ayyūb et Yaḥyā b. Makkī.
10Lors de sa judicature, [Abū l-Ṭāhir] agréa comme [témoins honorables] un groupe de chérifs.
11[…] Ibn Zūlāq dit :
12Abū l-Ṭāhir continua à rendre la justice jusqu’à ce que Jawhar arrivât avec l’armée d’al-Mu‘izz. Les habitants de Miṣr furent troublés de [cette arrivée]. Le vizir Ibn al-Furāt députa Abū Ja‘far Musallam al-Ḥusaynī, Abū Ismā‘ īl al-Zaynī et le cadi Abū l-Ṭāhir, parmi d’autres notables de la ville. Ils sortirent [à la rencontre] de Jawhar et lui demandèrent l’amān*. [Jawhar] leur rédigea un acte (sijill), rehaussa le rang du cadi et lui offrit une robe d’honneur.
13Jawhar pénétra ensuite à Miṣr et confirma le cadi à son poste. Il l’obligea cependant à trancher les affaires d’héritages d’après la doctrine des gens de la Maison (ahl al-bayt)1, et à agir de même pour le divorce et le croissant de lune. Tous les ans, le cadi guettait le croissant de lune de rajab, de sha‘bān et de ramaḍān de la terrasse de la grande mosquée ; [Jawhar] abolit cette pratique, et l’apparition du croissant de lune fut déterminée selon le comput – un mois de trente [jours], un mois de vingt-neuf –, ainsi que le jeûne, sa rupture, etc.
14Al-Mu‘izz arriva, et les notables de la ville l’accueillirent à Alexandrie. Il offrit une robe d’honneur au cadi, lui donna une [belle] monture, et le fit chevaucher à ses côtés.
15— Ô cadi, lui demanda-t-il, combien de califes as-tu vus ?
16— Un seul. Les autres sont des rois ! [Abū l-Ṭāhir] avait en réalité vu dix [califes] de la dynastie abbasside, le premier d’entre eux ayant été al-Mu‘ taḍid.
17Al-Nu‘mān b. Muḥammad était arrivé en compagnie d’al-Mu‘izz ; il ne s’occupait point de la justice, bien qu’al-Mu‘izz l’eût associé au cadi. En compagnie d’al-Mu‘izz arriva également ‘Abd Allāh b. Muḥammad b. Abī Thawbān : al-Mu‘izz lui confia le contrôle des maẓālim, et il rendit la justice comme bon lui semblait, entendit les témoignages, et les enregistra sous le titre de « cadi de Miṣr et d’Alexandrie ». Certains témoins instrumentaires se séparèrent des autres et vinrent témoigner à ses procès, comme nous l’avons vu dans sa biographie.
18Al-Ḥusayn b. Kahmash lui dit alors qu’un incident s’était produit :
19— Tu as ordonné que soit écrit sur tes documents : « cadi de Miṣr et d’Alexandrie ». As-tu révoqué Abū l-Ṭāhir, ou es-tu son associé ? Mets-nous au fait de ton acte de nomination (sijill), afin que l’on puisse régulariser le témoignage de tes jugements !
20— Que l’on applique les jugements prononcés par Muḥammad b. Aḥmad ! déclara al-Mu‘izz en apprenant l’affaire.
21Les témoins instrumentaires se détachèrent donc d’Ibn Abī Thawbān. Ce dernier tomba malade, le mal le terrassa et il mourut. Al-Nu‘mān mourut également, et al-Mu‘izz ordonna à ‘Alī b. al-Nu‘mān d’administrer la justice. Ce dernier rendit la justice avec Abū l-Ṭāhir ; lorsqu’ils étaient nécessaires, les témoignages se faisaient auprès de ‘Alī b. al-Nu‘mān.
22Bibliographie : Th. Bianquis, « Les pouvoirs de l’espace ismaïlien », dans J.-Cl. Garcin (éd.), États, cultures, sociétés et cultures du monde musulman médiéval, xe-xve siècle, Paris, Puf, 1995-2000, 3 vol., t. 1, p. 81-117 ; M. Tillier, Les cadis d’Iraq et l’État abbasside (132/750-334/945), Damas, Presses de l’Ifpo, 2009 ; M. Tillier, « Qāḍīs and the Political Use of the Maẓālim Jurisdiction under the ‘Abbāsids », dans C. Lange et M. Fierro (éd.), Public Violence in Islamic Societies : Power, Discipline, and the Construction of the Public Sphere, 7th-18th Centuries CE, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2009, p. 42-66 ; M. Tillier, « The Qāḍīs of Fusṭāṭ–Miṣr under the Ṭūlūnids and the Ikhshīdids : the Judiciary and Egyptian Autonomy », Journal of the American Oriental Society, 131, 2011, p. 207-222.
64. La disgrâce d’Ibn Rushd/Averroès par le calife almohade al-Manṣūr
23Ibn Rushd (1126-1198) fut l’un des plus grands philosophes de l’Islam, connu en Occident sous le nom d’Averroès. Très lié au calife almohade Abū Ya‘qūb Yūsuf (1163-1184) dont il fut le médecin et le conseiller, il exerça la charge de cadi, d’abord à Séville, puis à Cordoue. À la fin de sa vie il connut une disgrâce inattendue, souvent alléguée comme signe que l’islam rejette la philosophie et la rationalité. De nombreux travaux, outre la fameuse thèse de Renan sur Averroès et l’averroïsme (publiée en 1852), ont montré que l’affaire devait être replacée dans son contexte et qualifiée de « circonstancielle » tout en illustrant les relations complexes du pouvoir avec les élites savantes.
24Ibn Abī Usaybi‘a (m. 1270) consacre à Ibn Rushd quelques pages du Dictionnaire des médecins qu’il élabora en Syrie dans la seconde moitié du xiiie siècle. Dans cette biographie, hormis la longue citation du Kitāb al-kulliyyāt (Colliget) et la liste des ouvrages composés par le savant [passages omis ici], il traite surtout des relations entre Ibn Rushd et le calife almohade al-Manṣūr (1184-1199), en reprenant les propos de l’ancien cadi de Séville, Abū Marwān al-Bājī, exilé à Damas.
25Au-delà des accusations anecdotiques invoquées pour justifier le courroux du calife, le texte laisse clairement entrevoir la rivalité entre des élites juridico-religieuses, attachées à la sharī‘a, et des élites civiles, ouvertes aux sciences rationnelles. Il souligne la politique changeante d’al-Manṣūr, qui s’appuie tour à tour sur les unes et les autres. Alors qu’il tentait de mobiliser toutes les forces au moment de son offensive contre Alphonse VIII de Castille (1158-1214) – qui devait conduire à la victoire d’Alarcos le 18 juillet 1195 –, il refusa de faire droit aux adversaires cordouans d’Ibn Rushd ; deux ans plus tard il sacrifia plusieurs membres de son entourage, au premier rang desquels Ibn Rushd, pour répondre aux accusations portées contre eux2 ; mais, dès son retour à Marrakech l’année suivante, il décida de les réhabiliter, voire de tenter une réconciliation entre les deux « partis » en nommant Abū Ja‘far à la fois chef des ṭalaba3 et chef des médecins.
26Source : Ibn Abī Uṣaybi‘a, Kitāb ‘uyūn al-anbā’ fī ṭabaqāt al-aṭibbā’, éd. par Niẓār Riḍā, Beyrouth, Dār Maktabat al-Ḥayāt, 1965, p. 530-532 ; trad. F. Micheau ; voir aussi, éd. et trad. de H. Jahier et A. Noureddine, Sources d’informations sur les classes des médecins. XIIIe chapitre. Médecins de l’Occident musulman, Alger, Ferraris, 1958, p. 130-135.
27Le cadi Abū l-Walīd Muḥammad b. Aḥmad b. Muḥammad Ibn Rushd naquit et grandit à Cordoue. Il était connu pour ses mérites, soucieux d’apprendre les sciences, sans rival dans la connaissance du fiqh et des divergences [entre écoles juridiques]. Il étudia auprès du faqīh* al-Ḥāfiẓ Abū Muḥammad b. Rizq. Il se distingua également par sa connaissance de la science médicale. Il écrivit de très bons ouvrages, aux idées remarquables. Dans le domaine de la médecine, il écrivit le Kitāb al-kulliyyāt [« Livre des généralités », c’est-à-dire la théorie], un excellent ouvrage. Il était lié d’amitié avec Abū Marwān Ibn Zuhr et, quand il eut composé ce traité sur les généralités, il demanda à Ibn Zuhr de rédiger un traité sur les particularités4, afin que les deux traités fassent un ouvrage complet sur l’art de la médecine.
28L’auteur cite alors la fin du Kitāb al-kulliyyāt dans laquelle Ibn Rushd renvoie au Taysīr d’Ibn Zuhr.
29Le cadi Abū Marwān al-Bājī m’a rapporté ceci : Le cadi Abū l-Walīd Ibn Rushd avait un jugement sûr et une vive intelligence, il s’habillait modestement et possédait un fort tempérament. Il avait appris les mathématiques et la médecine auprès d’Abū Ja‘far b. Hārūn. Il s’attacha à lui un certain temps et acquit auprès de lui nombre de disciplines philosophiques (al-‘ulūm al-ḥikmiyya). Ibn Rushd fut cadi à Séville un certain temps, ensuite à Cordoue. Il était influent auprès d’al-Manṣūr, très estimé sous son règne comme sous celui de son fils al-Nāṣir. Celui-ci avait pour lui une grande considération.
30Et [Abū Marwān al-Bājī] de poursuivre : Quand al-Manṣūr fut à Cordoue, alors qu’il s’apprêtait à attaquer Alphonse en l’année 591/1195, il convoqua Abū l-Walīd Ibn Rushd et, quand celui-ci se présenta, [le calife] lui manifesta un grand respect, le fit approcher au point de le placer à l’endroit où s’asseyait Abū Muḥammad ‘Abd al-Wāḥid, fils du shaykh [Abū] Ḥafṣ al-Hintātī, proche compagnon de ‘Abd al-Mu’mīn et le troisième ou le quatrième des Dix5 ; celui-ci était parent par alliance d’al-Manṣūr qui lui avait donné sa fille en mariage en raison de sa haute position ; il eut un fils d’elle, du nom de ‘Alī, qui est maintenant maître de l’Ifrīqiya. Lorsqu’al-Manṣūr fit approcher Ibn Rushd et le fit asseoir à ses côtés, il s’entretint avec lui. Puis [Ibn Rushd] sortit. Un groupe d’étudiants et nombre de ses proches l’attendaient, ils le félicitèrent pour la position qu’il avait acquise auprès d’al-Manṣūr et pour la manière dont il avait été reçu. Il rétorqua : « Par Dieu ! Il n’y a pas de quoi être félicité. Mais il est vrai que l’Émir des croyants m’a fait approcher d’un seul coup, d’une manière que je ne pouvais espérer et à un degré que je ne pouvais ambitionner. » Or nombre de ses adversaires avaient répandu le bruit que l’Émir des croyants avait ordonné de le tuer. Aussi lorsqu’il sortit sain et sauf, il envoya l’un de ses serviteurs dans sa demeure pour demander [aux siens] de lui préparer un bouillon de qaṭṭa6 et de pigeonneau en attendant son arrivée. Il voulait ainsi les rassurer sur son sort.
31Par la suite, al-Manṣūr se vengea d’Abū l-Walīd Ibn Rushd et lui ordonna de résider à Lucena, une ville proche de Cordoue qui avait auparavant appartenu aux juifs, et de ne pas en sortir. De même il se vengea d’un certain nombre d’autres notables, leur fixant d’autres lieux. Il expliqua qu’il avait agi ainsi envers eux parce qu’ils affirmaient publiquement étudier la philosophie (ḥikma) et les sciences des anciens (‘ulūm al-awā’il). Parmi eux se trouvaient Abū l-Walīd Ibn Rushd, Abū Ja‘far al-Dhahabī, le faqīh Abū ‘Abd Allāh Muḥammad b. Ibrāhīm, cadi de Bougie, Abū l-Rabī‘ al-Kafīf, Abū l-‘Abbās al-Ḥāfiẓ al-Shā‘ir (le poète) al-Qarābī. Ils restèrent [en exil] un certain temps. Ensuite plusieurs notables de Séville témoignèrent qu’Ibn Rushd n’avait rien à voir avec ce dont on l’accusait. Al-Manṣūr fut [de nouveau] satisfait de lui ainsi que de tous les autres, et ceci en l’année 595/1198. Il fit d’Abū Ja‘far al-Dhahabī le chef des ṭalaba et le chef des médecins ; il faisait ses louanges et tenait des propos élogieux, disant qu’Abū Ja‘far al-Dhababī était tel de l’or (dhahab) dont la fusion ne fait qu’augmenter l’excellence.
32Le cadi Abū Marwān ajoute ceci : L’une des choses restées dans le cœur d’al-Manṣūr à l’encontre d’Ibn Rushd est que celui-ci, quand il se rendait auprès d’al-Manṣūr et s’entretenait avec lui ou lui parlait d’un sujet de science, l’interpelait par ces mots : « Écoute, ô mon frère ! » Et aussi qu’Ibn Rushd avait composé un traité sur les animaux dans lequel il mentionnait les diverses espèces d’animaux et décrivait chacune d’elle. Quand il en vint à mentionner la girafe, il ajouta : « J’en ai vu une chez le roi des Berbères (malik al-Barbar), c’est-à-dire chez al-Manṣūr. » Quand ceci parvint à al-Manṣūr, il en fut contrarié et ce fut l’une des raisons importantes pour lesquelles il se vengea d’Ibn Rushd et l’exila. On rapporte que, pour s’en excuser, Ibn Rushd expliqua qu’il avait dit « roi des deux continents » (malik al-barrayn)7 et que le copiste avait par erreur écrit « roi des Berbères ».
33Le cadi Abū l-Walīd Ibn Rushd – que Dieu lui accorde miséricorde – mourut à Marrakech au début de l’année 595/décembre 1198, au commencement du règne d’al-Nāṣir. Il était d’un âge avancé. Il laissa un fils, savant médecin, du nom d’Abū Muḥammad ‘Abd Allāh, qui laissa à son tour des enfants qui s’occupèrent de fiqh et exercèrent la judicature dans [différents] districts.
34Suit la liste des 47 ouvrages composés par Ibn Rushd.
35Bibliographie : Averroès, Le livre du discours décisif, éd. et trad. M. Geoffroy, Paris, Flammarion, 1996 (longue introduction d’A. de Libera) ; A. Bazzana, N. Bériou, P. Guichard (éd.), Averroès et l’averroïsme (xiie-xve siècle). Un itinéraire historique du Haut Atlas à Paris et à Padoue. Actes du colloque international organisé à Lyon, les 4 et 5 octobre 1999, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2005, notamment les contributions de D. Urvoy, « Ibn Rushd et le pouvoir almohade » (p. 121-130) et d’É. Fricaud, « Le problème de la disgrâce d’Averroès » (p. 155-189) ; M. Bencherifa, Ibn Rushd al-Ḥafīd. Sīra wathā’iqiyya [en arabe], Rabat, 1999 ; É. Fricaud, « Les ṭalaba dans la société almohade (Le temps d’Averroès) », Al-Qanṭara, 18, 1997, p. 379-383 ; D. Urvoy, Averroès. Les ambitions d’un intellectuel musulman, Paris, Flammarion, 1998.
65. Sufyān al-Abyanī, un saint yéménite face au pouvoir
36Le soufisme yéménite, enraciné dans une forte tradition d’ascétisme local, resta longtemps plutôt en marge des autres grands courants soufis du monde islamique, et structuré essentiellement autour de figures de saints locaux, et de leur lignage dépositaire de la baraka* du saint, qui jouaient un rôle d’intercession auprès du pouvoir pour les populations locales. L’État sultanien au Yémen, largement renforcé à partir de la fin du xiie siècle, rencontra ainsi l’opposition de certaines de ces figures, en particulier dans les terres que le pouvoir entendait contrôler fermement, dans la plaine côtière de la Tihāma et autour d’Aden, qui était un espace stratégique essentiel. C’est toutefois au xve siècle, dans le contexte d’un soufisme désormais largement triomphant, que fut rédigé le premier ouvrage consacré exclusivement à exalter les principales figures de saints yéménites, les Ṭabaqāt al-khawāṣṣ d’al-Sharjī (m. 1488), d’où est tiré ce portrait hagiographique d’un saint de la région d’Aden, au début du xiiie siècle, Sufyān al-Abyanī, largement réécrit pour mettre en avant le pouvoir universel du saint, en reprenant des traits typiques (hostilité à la participation des dhimmī-s* au pouvoir ; châtiment des serviteurs injustes du souverain) que l’on retrouve dans de nombreuses autres régions du Dār al-Islām.
37Source : Al-Sharjī, Ṭabaqāt al-khawāṣṣ ahl al-ṣidq wa l-ikhlāṣ, éd. par al-Ḥibshī, Sanaa, al-Dār al-Yamaniyya li l-nashr wa l-tawzī‘, 2e éd., 1992, p. 146-149 ; trad. É. Vallet.
38« On raconte qu’il y avait dans la ville d’Aden un homme juif à qui le sultan avait confié une charge (wilāya) importante, tant et si bien qu’un groupe de musulmans se trouvait sous ses ordres et devait marcher sous sa coupe. Cela parvint jusqu’aux oreilles du shaykh Sufyān qui en fut courroucé. Il se trouvait ce jour-là en état de retraite et de dénuement. Il se rendit auprès de ce personnage en habit de pauvre (faqīr). Il le vit assis sur un siège, alors qu’un groupe de musulmans se trouvaient debout auprès de lui à son service. Il s’adressa à lui : « Dis : J’atteste qu’il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu et j’atteste que Muḥammad est l’Envoyé de Dieu. » Le juif cria, appela ses soldats au secours mais ils ne purent rien faire [à Sufyān]. Il lui répéta la shahāda* une deuxième fois puis une troisième fois. Et l’autre d’appeler à l’aide ses compagnons, qui étaient cependant incapables de faire quoi que ce soit. Après la troisième fois, le shaykh empoigna le juif par les cheveux, prit un couteau qui se trouvait en sa possession, et dit « Au nom de Dieu » et « Dieu est grand », et lui trancha la gorge. Puis il s’en retourna à son lieu [de retraite] ; il se tenait assis dans la grande mosquée.
39Lorsqu’il apprit la nouvelle, l’émir de la cité dit à ses gardes (ghilmān) : « Amenez-le moi », mais une fois parvenus à la mosquée, ils ne purent arriver jusqu’à lui, revinrent chez l’émir et l’en informèrent. Celui-ci partit alors à cheval avec son armée et arriva à la porte de la grande mosquée. Aucun d’entre eux ne put y pénétrer, ne pouvant ainsi lui faire de mal. L’émir reconnut alors qu’il s’agissait d’un miracle (karāma) et que [le shaykh] était protégé par Dieu le Très Haut. Il s’en retourna tout en étant empli de crainte envers [la réaction du] sultan, car la cité était sous sa responsabilité. Il consulta les hommes d’influence (ahl al-‘aql wa l-ra’y) à ce propos. Ils lui répondirent : « Ces saints (walī-s*), on ne peut rien leur faire sauf si l’on est l’un d’entre eux ; or, il y a dans la ville de Laḥj un homme, qui est un saint, appelé al-‘Ā’idī : fais appel à lui. » Il l’envoya chercher. Lorsqu’il arriva, il le mit au courant de l’histoire, il le fit s’engager et lui dit : « Je voudrais que tu ne sortes pas de la cité avant que le sultan n’apprenne l’affaire et n’envoie sa réponse ». Al-‘Ā’idī lui dit : « Oui, si Dieu le veut. »
40Il alla voir le shaykh Sufyān. Il y avait entre eux une relation de compagnonnage. Al-‘Ā’idī le félicita de ce qu’il avait fait et lui dit : « Tu as ôté une pierre du chemin des musulmans. » Puis il sortit avec lui et marcha jusqu’à la porte de la prison. Al-‘Ā’idī dit au gardien : « Enchaîne-le ». Le faqīh* Sufyān lui tendit sa jambe. Il fut enchaîné et resta plusieurs jours en prison. Quand il le voulait, il retirait la chaîne de son pied ou se la remettait lui-même. Lorsqu’arriva le vendredi, il jeta la chaîne, alla à la grande mosquée, y entra et s’approcha de l’émir. Puis il regarda les gens et dit : « Je prie pour ces morts en disant quatre takbīr8. » Quand la prière fut achevée, il retourna à la prison et y resta jusqu’à l’arrivée de la réponse du sultan qui disait : « Libérez-le. Nous lui demandons sa protection. Car il a déjà affirmé que le pays était son pays et que le pouvoir souverain (mulk) lui revenait et non à nous. » Il sortit de prison. Ni le sultan ni aucun autre n’avait de pouvoir (sulṭān*) sur lui. Il y avait eu auparavant une affaire entre lui et le sultan : alors que ce dernier se trouvait à Laḥj9, il entra chez le sultan sans permission et lui déclara : « Sors de mon pays. » C’est à cela que le sultan avait fait allusion dans sa réponse. […]
41En résumé, ses miracles sont très nombreux et célèbres. L’imam al-Yāfi‘ī10 les a mentionnés dans de nombreux ouvrages, en le louant à de nombreuses reprises. Il rapporte notamment à propos de sa venue en Égypte : j’ai appris qu’il avait voyagé pour assister au jihad à Damiette. La victoire des musulmans se fit grâce à lui. Un de ceux à qui Dieu avait révélé ses desseins avait dit : « La victoire de Damiette se réalisera par l’intermédiaire d’un habitant du Yémen. » Damiette était au pouvoir des Francs qui s’en étaient emparé. Le shaykh Ṣafī al-Dīn b. Abī al-Manṣūr al-Miṣrī dans sa Risāla qui mentionne les saints qui s’y étaient rassemblés, dit : « Parmi ceux que j’ai vus se trouvait le shaykh, le pieux, le saint Sufyān al-Yamānī ; il faisait partie des grands et des maîtres de la vertu. » […]
42Le shaykh Sufyān mourut dans la ville de Laḥj. Son mausolée (turba), qui se trouve là-bas, est l’un des plus célèbres ; il est fréquenté pour les pèlerinages et pour gagner les bénédictions. Quiconque s’y réfugie, personne ne peut s’en emparer pour lui faire du mal. Quiconque tente d’outrepasser cela est durement châtié, sans merci, comme cela a pu être vérifié plus d’une fois.
43Bibliographie : D. Aigle (dir.), Les autorités religieuses entre charisme et hiérarchie. Approches comparatives, Turnhout, Brepols, 2011 ; M. A. Aziz, Religion and Mysticism in Early Islam : Theology and Sufism in Yemen, the legacy of Aḥmad Ibn ʻAlwān, Londres, I. B. Tauris, 2011 ; H. Ferhat, « Souverains, saints et fuqahā’ : le pouvoir en question », al-Qanṭara, XVII/2, 1996, p. 375-390 ; Z. Mochtari de Pierrepont, « Aḥmad Ibn ‘Ujayl and Bayt al-Faqīh : the Birth of a Sacred Site », Proceedings of the Seminar for Arabian Studies, 44, 2014, p. 299-316 ; É. Vallet, L’Arabie marchande. État et commerce sous les sultans rasūlides du Yémen (626-858/1229-1454), Paris, Publications de la Sorbonne, 2010.
66. Le pouvoir des gens du Ḥaram à La Mekke : l’exemple du cadi Muḥammad al-‘Uqaylī
44Le gouvernement de La Mekke au cours des derniers siècles du Moyen Âge ne mettait pas seulement en jeu les relations entre l’émir, issu des clans de chérifs hassanides, en théorie maîtres de la cité, et leurs puissants protecteurs sultaniens (Mamlouks ou Rassoulides), dont l’autorité se manifestait de façon saisonnière, au moment du grand pèlerinage (ḥajj*). Il impliquait également un influent groupe d’hommes de religion ou de personnes de tous milieux venus passer un temps à l’ombre du sanctuaire (mujāwirūn) qui constituaient ensemble ce que les sources désignent comme les « gens du Ḥaram », attachés à l’espace sacré mekkois. L’influent cadi malikite et chroniqueur al-Fāsī (m. 1429) rassembla la mémoire de ce groupe dans son imposant dictionnaire biographique, Al-‘Iqd al-thamīn, rédigé tout au long du premier quart du xve siècle. La longue biographie qu’il consacre au cadi Muḥammad al-‘Uqaylī (m. 1384), un savant chafiite issu de l’une des principales familles savantes de La Mekke, illustre bien le poids que ce milieu avait acquis dans la seconde moitié du xive siècle.
45Source : al-Fāsī, Al-‘Iqd al-thamīn fī ta’rīkh al-balad al-amīn, éd. M. al-Ṭayyib et Ḥ. Al-Fiqqī, Le Caire, Maṭba‘ at al-Sunna al-Muḥammadiyya, 1959-1969, 8 vol., I, p. 300-304 ; trad. É. Vallet.
46[Muḥammad al-‘Uqaylī] avait acquis des connaissances très larges, et atteint un très haut niveau de savoir ; sa réputation s’était répandue et sa renommée s’était étendue. Il devint une référence recherchée non seulement dans sa cité, mais aussi dans tout le Hedjaz. Il enseigna, rendait des avis juridiques (fatwas*), supervisait [des fondations religieuses] et transmettait des hadiths. Il fut d’abord le substitut [comme juge] de son oncle maternel le cadi Shihāb al-Dīn al-Ṭabarī. Puis il devint cadi de La Mekke, après le retrait du cadi Taqī al-Dīn al-Ḥarāzī en 763/1362. Il débuta dans ce poste au début du mois de ramaḍān de cette année-là et continua à l’occuper jusqu’à sa mort. Il était en outre en charge de la prédication du vendredi (khuṭba*) dans le Ḥaram et assurait l’intendance [du Ḥaram]11. Puis, à un moment donné, il s’était retiré de l’intendance [du Ḥaram] pour assurer la mashyakha du Ḥaram12, la ḥisba* de La Mekke, et l’enseignement dans les trois madrasas dépendant des rois du Yémen, la Manṣūriyya, la Mujāhidiyya et l’Afḍaliyya13. Il est le premier à avoir enseigné dans l’Afḍaliyya. Il y habitait et assurait la supervision de ces madrasas. Il fut chargé d’enseigner [le droit] à Bashīr al-Jamdār, uniquement par transmission orale. Il enseigna le hadith au vizir de Bagdad, et le droit (fiqh) au souverain d’Égypte, al-Malik al-Ashraf Sha‘bān14. Aucun cadi n’avait assumé toutes ces fonctions à la fois avant lui, et nul après lui ne les a plus jamais rassemblées.
47Il assuma toutes ces charges (wilāya) jusqu’à sa mort, si ce n’est qu’il fut démis de [ses fonctions] dans les madrasas, peu de temps avant sa mort, mais on n’apprit cette nouvelle qu’après sa mort. La cause principale de son retrait des madrasas est qu’il avait interdit au Qāḍī15 Zakī al-Dīn al-Kharrūbī, marchand privé du sultan en Égypte, qui s’était retiré (mujāwir) à La Mekke en 785/1383-1384, de refaire le pavement de pierre de la mosquée sacrée (al-masjid al-ḥaram). [Al-‘Uqaylī] affirmait qu’une telle action ne devait être menée qu’avec l’argent du sultan, c’est-à-dire du maître de l’Égypte. Il s’opposa à [al-Kharrūbī] aussi dans d’autres de ses désirs à La Mekke. Cela fut insupportable à al-Kharrūbī qui voulut lui porter préjudice. Il ne trouva pour cela rien d’autre que ce qui était en relation avec les madrasas de La Mekke, qui dépendaient du souverain du Yémen. C’était à cette époque al-Malik al-Ashraf Ismā‘īl b. al-Afḍal ‘Abbās b. al-Mujāhid ‘Alī b. al-Mu’ayyad Dāwūd b. al-Muẓaffar Yūsuf b. al-Manṣūr ‘Umar b. ‘Alī b. Rasūl16. Al-Kharrūbī avait du poids auprès d’al-Ashraf car il s’occupait de ses intérêts dans le commerce et dans d’autres domaines en Égypte. Lorsqu’al-Ashraf sut quel était son désir, il démit [le cadi].
48Auparavant, des gens avaient calomnié ce cadi [auprès d’al-Ashraf], mais il n’avait pas accordé foi à ces calomnies et lui avait écrit de sa main pour lui dire : « Tu peux continuer à t’occuper de la supervision [des madrasas] et de ton enseignement. Je n’accorde aucun crédit aux propos qui ont été rapportés. Ces paroles sont mensongères. » Tel était le contenu du message écrit d’al-Ashraf au cadi, d’après ce qui m’est parvenu. [Al-‘Uqaylī] recevait annuellement d’al-Ashraf à chaque saison une gratification conséquente en raison du sermon (khuṭba*) fait en son nom à La Mekke, de la guidance (hudā) faite en son nom à Minā17 et du présent que le cadi lui envoyait. On m’a rapporté qu’une année, il avait reçu d’al-Ashraf pour toutes ces raisons 27 000 dirhams. Aucun cadi après lui n’obtint une telle somme du maître du Yémen. Le maximum qu’aient obtenu certains s’élevait au tiers de cela ou moins.
49Puis, durant cinq années consécutives, à partir de 814/1411-1412, ces envois furent interrompus, y compris ce qui était destiné à l’émir de La Mekke et aux muezzins, et tout ce qui [était envoyé] de façon coutumière, en raison du changement d’attitude du maître du Yémen, al-Malik al-Nāṣir Aḥmad b. al-Ashraf18, vis-à-vis du maître de La Mekke. Les deux émirs de La Mekke, à l’époque ‘Ajlān et son fils Aḥmad19, avaient beaucoup de considération à l’égard [d’al-‘Uqaylī], connaissant la place considérable qu’il avait auprès des Égyptiens, et lui-même avait également de la considération pour eux, du moins pour tout ce qui était irréprochable. Ainsi, ils lui demandèrent de citer dans le sermon à La Mekke le maître de l’Irak, le Shaykh20 Uways, qui leur avait envoyé à tous les deux un présent extraordinaire. [Al-‘Uqaylī] fit cela un temps, puis cela fut abandonné jusqu’à aujourd’hui.
50Il informait les gouvernants (wālī-s*) de La Mekke de ce qui concernait les membres du Ḥaram, si bien qu’ils ne commettaient rien contre eux durant leur gouvernement, et il les protégea beaucoup de cela. Aussi les gens du Ḥaram virent-ils leur position renforcée auprès de la dynastie [des émirs]. Le sayyid Aḥmad b. ‘Ajlān venait souvent le voir lorsqu’il avait des affaires à traiter et ils se réunissaient au bas de l’Afḍaliyya. Parfois le cadi ordonnait de le faire monter dans son salon (majlis*) au milieu (wasaṭ) de l’Afḍaliyya, ce que le sayyid Aḥmad b. ‘Ajlān faisait avec une grande peine à cause de son embonpoint.
51Bibliographie : F. Bauden, « Les Ṭabariyya : Histoire d’une importante famille de La Mekke (fin xiie-fin xve siècle), dans U. Vermeulen et D. De Smet (éd.), Egypt and Syria in the Fatimid, Ayyubid and Mamluk Eras (Orientalia Lovaniensia Analecta 73), Louvain, Peeters, 1995, p. 253-266 ; R. T. Mortel, « Madrasas in Mecca during the Medieval Period : A Descriptive Study Based on Literary Sources », Bulletin of the School of Oriental and African Studies, 30, 1997, p. 236-252 ; É. Vallet, L’Arabie marchande. État et commerce sous les sultans rasūlides du Yémen (626-858/1229-1454), Paris, Publications de la Sorbonne, 2010 ; É. Vallet, « Panique à La Mekke. Écrire la fitna au temps des chérifs ḥasanides (début ixe/xve siècle) », dans G. Lecuppre et E. Tixier du Mesnil, Désordres créateurs. L’invention politique à la faveur des troubles, Paris, Kimé, 2014, p. 215-243.
Notes de bas de page
1 Expression qui désigne les membres de la famille du Prophète.
2 Sur ces accusations, voir les récits de ‘Abd al-Malik et Ibn ‘Idharī, trad. dans É. Fricaud, « Le problème de la disgrâce d’Averroès ».
3 Pluriel de ṭālib ; ce terme désigne de manière générale les étudiants et dans l’organisation almohade ceux qui avaient été formés pour diffuser la doctrine d’Ibn Tūmart.
4 C’est-à-dire chaque maladie particulière, en d’autres termes la pratique.
5 Le conseil des Dix, mis en place par Ibn Tūmart, regroupait les conseillers les plus influents et les responsables les plus élevés.
6 Une sorte de pigeon.
7 Dont la graphie arabe est proche de malik al-Barbar. Les “deux terres” sont al-Andalus et al-Maghrib.
8 Le takbīr consiste à prononcer la formule Allāh akbar (« Dieu est grand »). Chez les sunnites, il était de coutume de répéter quatre fois cette formule devant la dépouille d’un mort.
9 Ville située sur la plaine côtière de la mer Rouge, à une trentaine de kilomètres au nord d’Aden.
10 Célèbre auteur soufi d’origine yéménite mort en 1366.
11 Littéralement naẓr, ce qui désignait la gestion des waqfs affectés à la grande mosquée de La Mekke.
12 Mashyakhat al-Ḥaram : responsabilité non identifiée, au sein de Ḥaram.
13 La Manṣūriyya, à La Mekke, fondée par le sultan du Yémen al-Manṣūr ‘Umar (1229-1249) ; la Mujāhidiyya par le sultan al-Mujāhid ‘Alī (1321-1364) et l’Afḍaliyya par le sultan al-Afḍal al-‘Abbās (1364-1377).
14 Sultan d’Égypte entre 1363 et 1377.
15 Ce terme est ici employé non pas pour désigner un juge islamique, mais un dignitaire au sein de l’administration égyptienne.
16 Sultan du Yémen entre 1377 et 1400.
17 Prêche délivré lors du ḥajj.
18 Sultan du Yémen entre 1400 et 1425.
19 ‘Ajlān b. Rumayth, émir de La Mekke de 1343 à 1175 et son fils Aḥmad, émir entre 1361 et 1386.
20 Shaykh Uways b. Ḥasan-i-Burzurg, maître jalāyiride de l’Irak entre 1356 et 1374.
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