Conclusion. Clément VI, pape savant
p. 339-356
Texte intégral
1La réarticulation de l’idéologie pontificale dans un nouveau contexte intellectuel, politique et spirituel, celui du milieu du xive siècle, fut-elle suffisante face aux contestations de la papauté ? Ce n’est pas certain, comme il n’est pas certain que la parole pontificale ait été en son temps un instrument suffisant de transformation de l’Église et du monde. Le projet n’en est pas moins révélateur à la fois d’une vision de l’Église aux yeux de quelques générations de grands prélats formés à l’université entre le dernier tiers du xiiie siècle et le début du xive siècle, et d’un usage du savoir scolastique dans la pratique concrète du pouvoir ecclésiastique au xive siècle.
2En choisissant d’incarner une figure de « pape savant », à la tête d’une Église rénovée et en voie de « gouvernementalisation », Clément VI, à partir des instruments dont il disposait après des années de travail, a tenté de répondre aux évolutions politiques et théologiques auxquelles lui et la société chrétienne de son époque ont été confrontés. En effet, le savoir n’est pas seulement pour lui un instrument de maîtrise de l’institution et de reconquête idéologique : en tant que sapientia, faculté et vertu dont la parole est la manifestation, il est la clé de voûte de sa théorie même du pouvoir pontifical.
3Car c’est bien ainsi qu’il faut comprendre finalement l’effort accompli par Pierre Roger/Clément VI pour conjoindre le travail intellectuel, l’éloquence et l’exercice du pouvoir ecclésial. L’inspiration est cicéronienne, selon le précepte qu’il cite : « La sagesse sans l’éloquence est comme une épée dans la main d’un paralytique », Sapientia sine eloquentia est quasi gladius in manu paralitici1. Mais elle est surtout christique : la parole est elle-même témoignage et propagation de la sagesse, à commencer par la parole du Christ, érigé une fois de plus en modèle2. La prédication d’un prince de l’Église n’est pas uniquement une tâche d’édification morale, elle est la forme même de la sagesse, vertu indissociablement spirituelle et politique dans la conception de Clément VI. Saint Thomas est vanté pour ses qualités de prêcheur3, de même que saint Dominique4, mais les deux principaux modèles sont saint Augustin et saint Jean Évangéliste, auteurs dont on a mesuré la portée politique et ecclésiologique pour son œuvre. Dans les deux sermons consacrés au premier, la qualité de son art oratoire est vantée avec énergie5, tandis que le second est le modèle même de l’homme dans lequel le verbe et la sagesse se rejoignent, ce qui dissimule là encore un autoportrait6.
4Ces figures de prédicateur sont l’occasion de tenir un discours général sur la prédication et ses liens avec la manifestation de la sagesse et de la science, discours qui sonne déjà comme un plaidoyer pro domo. Elles sont également l’occasion de considérations sur l’éloquence, telle que Pierre l’entend. Un des sermons sur Augustin lui permet de donner son sentiment sur la pratique de la prédication et sa décadence dans l’Église contemporaine :
Mais la fausseté, la bassesse, la vanité et l’obscurité doivent être étrangères au sermon, et c’est aussi quand elles en sont éloignées que le sermon est beau. Et comme, hélas, dans de nombreuses paroles de prélats, et même de grands prélats, se glissent ces quatre choses ou simplement l’une d’entre elles, car c’est souvent qu’on trouve dans leur bouche la fausseté plutôt que la vérité, la bassesse plutôt que l’honnêteté, la vanité plutôt que l’utilité, l’obscurité plutôt que la clarté, aussi leurs paroles ont quelque chose de trouble plutôt que de la beauté7.
5L’utilité de la prédication se trouve également défendue dans le sermon pour la fête de saint Thomas (Predicator enim debet predicare non subtilia sed utilia8) et dans le sermon pour la fête de saint Dominique9. On la retrouve surtout dans un texte assez singulier, un sermon que Pierre a recopié sur les derniers folios laissés blancs du ms. BAV Borgh. 96 contenant les sermons de Gérard de Mailly, et qui porte comme titulus :
Contre certains prêcheurs de la parole divine qui, alors qu’ils doivent inciter à la contrition et à la haine des péchés, et en premier lieu, par conséquent, au gémissement et aux pleurs, provoquent pourtant plutôt à la détente et au rire, ce qu’on reproche vivement10.
6Chemin faisant, il reprend dans le texte une bonne partie des arguments sur la subordination de la science à la sagesse et de l’humain au divin11, en soulignant à quel point l’office de prédicateur doit jouer un rôle d’intermédiaire entre la sagesse divine qui sauve du péché et les hommes12. La conclusion est sans surprise et rejoint le début :
Ce qui va à l’encontre de nombreux prêcheurs [praedicatores, qui corrige un lapsus calami révélateur, pécheurs, peccatores] qui ne cherchent pas querelle ou reproche à leurs ouailles pour les nombreux péchés qu’elles commettent, mais bien plutôt les flattent. On peut dire de tels hommes qu’ils sont des chiens muets, incapables d’aboyer, et peut-être craignent-ils qu’on leur dise : Médecin, commence par te soigner13 !
7Bien prêcher, c’est donc défendre l’Église en mettant en œuvre la sagesse. L’édifice complet de Pierre Roger trouve son achèvement dans cette notion de sapientia. Cette sagesse, rendue manifeste et active par la parole du prédicateur, est le point de rencontre entre l’inspiration divine, la science intellectuelle et la vertu politique de gouvernement. Dès 1327, Pierre affirme à propos de la royauté du Christ : « En lui se trouve la certitude de la sagesse, non pas pour punir mais pour diriger » (In ipso est certitudo sapientie non ad puniendum sed ad dirigendum), propos peut-être inspiré par le déplacement thomiste où le pouvoir du roi n’est plus de punir les pécheurs mais de les guider14.
8Cette conception de la sagesse, illustrée dès l’introduction de ce livre avec le sermon funèbre de Jean de Cardaillac en 1352, est l’objet d’une construction explicite de la part de Pierre Roger tout au long de son œuvre oratoire. Dans un sermon de 1333 pour le deuxième dimanche de l’Avent, Pierre Roger s’explique dans l’introduction sur la figure du « sage », qui a pour première caractéristique de rechercher la vérité et la scientia, la vérité s’opposant à la vanité15. L’ensemble du passage repose sur un tissage très serré de citations aristotéliciennes et bibliques, et avait déjà été utilisé, sous une forme presque semblable, quelques mois auparavant, pour la saint Jean Baptiste 1333. Dans ce dernier sermon, l’archevêque de Rouen s’explique sur la hiérarchie des savoirs à partir de la question des futurs contingents. Il y a trois types de savoirs16 : le premier, rejeté au nom du libre arbitre, est celui des nigromanciens, qui est un savoir faux. Le second est un savoir faillible, celui des mathématiciens et des philosophes naturels : on retrouve l’attitude de Pierre envers ces savoirs qui ne sont pas rejetés mais subordonnés. Enfin seul le troisième type de savoir, celui des prophètes, des saints et des hommes inspirés, donne une certitude.
9Avec la sapientia, comme avec la prudentia, Clément VI construit dans ses sermons une synthèse qui superpose une diversité de sens accumulés, le mot se trouvant à la fois dans des citations bibliques17, chez de nombreux Pères comme Ambroise18, Grégoire19 ou Bernard20, enfin dans des textes païens comme ceux de Cicéron21, Aristote ou Averroès22. En amont, la sagesse est liée à la faculté de connaître, la cognitio, au sens le plus intellectuel. Souvent associée à elle dans des membres de distinctions23, elle partage avec cette notion le champ lexical de la clarté et de la lumière, qui caractérise l’évidence des premiers principes et de la Révélation24. En aval, elle a partie liée avec la prudence25 et avec le domaine des vertus politiques26. C’est pourquoi la sagesse est une vertu non seulement fondamentale pour le perfectionnement individuel en vue du Jugement dernier27, mais aussi pour la défense temporelle et spirituelle de l’Église28. Pierre/Clément tient à distinguer sagesse et prudence29, suivant le commentaire par Averroès d’Aristote. Dans le ms. BAV Borgh. 57, en marge du commentaire qui précise Et omnes vident sapientem alium esse a prudente, le jeune Pierre note : Differentia inter sapientiam et prudentiam30. Le maintien de cette distinction plonge ses racines au cœur du processus de resémantisation du texte biblique. En effet, un écho apparaît entre d’une part le texte aristotélicien et ses commentaires par Thomas ou Averroès, qui distinguent prudentia et sapientia, et d’autre part certains versets bibliques qui utilisent les deux notions en les distinguant, comme Prov. 17, In facie prudentis lucet sapientia. À la rencontre de ces traditions textuelles, le pape propose un modèle dans lequel la prudence est une vertu proprement politique, celle de la faculté de décision humaine, tandis que la sagesse est une vertu intellectuelle et spirituelle garantie par Dieu, au-dessus des choses humaines, mais capable de prédisposer aux choix que doit effectuer la prudence. C’est ainsi que Pierre semble lire et théologiser la suite du commentaire d’Averroès : Et propter hoc dicimus quod Plato et Socrates sunt sapientes et non dicimus quod sunt prudentes […]. Non requirebant bona conferentia humana sed divina31. La sagesse ne peut qu’être liée à Dieu, comme l’avait déjà affirmé saint Bonaventure32.
10Pour cette raison, les détenteurs légitimes de la sapientia sont les docteurs et les maîtres, ce qu’il faut entendre dans un sens professionnel et, bien sûr, autobiographique33. Ces docteurs ont plusieurs modèles de sagesse : Salomon34, mais aussi les saints, dont la sagesse est un attribut, comme le montre le sermon pour la canonisation de saint Yves35. Enfin et surtout, le modèle absolu de la sagesse est le Christ36 : le modèle intellectuel et politique appuyé sur la sagesse culmine dans une conclusion théologique placée comme toujours sous le signe de l’incarnation. Pierre en trouve la formulation la plus claire dans la glose, à propos d’un verset évangélique où Jean – une fois encore – repose sur la poitrine du Christ. Ce dernier incarne dans sa chair la sagesse et la science : In pectore Ihesu sunt thesauri sapientie et scientie absconditi super quod recubuit Johannes quem maiore ceteris sapientie et scientie singularis munere dotat37. Par un effet de miroir, en marge du commentaire d’Averroès à l’Éthique, quand est évoqué le magistère (magisterium) lié à la sagesse, Pierre écrit38 : Nota quod superius est virtus magisterii ante cuiusquam virtutem artis, laissant transparaître l’idée d’un lien privilégié entre les maîtres et la sagesse, qui s’inscrit dans une conception du pouvoir universitaire héritée du xiiie siècle, comme l’a bien montré Elsa Marmusztejn39.
11Cette conception de la sagesse qui a été à la fois élaborée et incarnée par Clément VI a reçu un écho très direct dans son entourage, faisant de la figure du pape savant une véritable signification imaginaire sociale, selon le terme de Cornelius Castoriadis40. En témoignent les dédicaces des ouvrages présentés au pape, qui amplifient et fortifient cet imaginaire théologico-politique qui fait la singularité de la papauté du milieu du xive siècle. Elles sont un lieu privilégié d’élaboration de la doctrine du souverain détenteur de la sapientia, même si ces ouvrages ne répondent pas à la même logique de production : certains sont des commandes tandis que d’autres sont des dédicaces de circonstances, liées à des épisodes de la carrière de leurs auteurs41.
12Ces dédicaces comportent des aspects stéréotypés : les régularités stylistiques caractéristiques d’une influence diplomatique qui aboutissent à des récurrences de syntagmes figés, comme les adresses42, et dont la forme la plus répétée est la clausule ad pedum oscula beatorum43, ou la demande faite au pape de bien vouloir corriger ou améliorer le texte44. L’énumération des qualités du pape, en revanche, laisse déjà poindre un discours plus particulièrement adapté à la personne et au savoir de Clément VI, au-delà des aspects attendus sur sa clémence ou sur son éloquence. Son passé universitaire est signalé par Jacques Fouquier qui rappelle que le pape Clément VI fut un célèbre maître et docteur en théologie de l’université de Paris avant d’arriver à la tête de l’Église45. Lévi ben Gerson fait allusion à l’intérêt précoce du pape pour les questions d’ordre scientifique, en particulier astronomique et astrologique46, largement confirmé par les ms. BAV Borgh. 134 ou 247, ainsi que par certains passages de sa prédication. De même se trouve chez Walter Burley une référence au passé professoral du pape47, ce qui achève de montrer comment les figures de l’individu réel et du souverain pontife se superposent l’une à l’autre.
13Cette superposition s’effectue d’abord par le recours à cette idée d’une utilité du savoir pour le peuple chrétien et le bien de l’Église. C’est l’argument principal de la lettre de Jean de Murs et Firmin de Beauval qui signalent que l’usage du calendrier dans sa forme actuelle fait verser « tous les vrais catholiques » dans l’erreur48. Leur travail est destiné à remédier à cette situation et à mettre au point un système meilleur et plus utile (utilior) à l’Église49. Guillaume de Mirica met également son travail de commentateur au service de l’Église, point sur lequel il revient deux fois dans sa lettre de dédicace50. On retrouve chez Bartolomeo d’Urbino une théorie du savoir très proche des conceptions exprimées par Clément VI dans ses sermons, concernant à la fois l’utilité pour l’Église, la subordination à une sagesse de nature théologique et la suspicion devant les nouveautés :
La fontaine de science, verbe de Dieu dans les cieux, a donné à notre féconde mère l’Église d’illustres docteurs, vrais fleuves sur les terres, vraies étoiles rayonnant dans les cieux. Leur vie garde toute sa force après leur trépas, et leur étude des lettres combat pour les modernes. Désormais, une nouvelle génération est conduite pour un autre travail vers des choses magnifiques, des ténèbres à la lumière où elles débouchent ; leur vie s’ordonne, vie pour laquelle ces hommes nés dans l’éclat de la vérité ont préparé l’éclat et le lis de leurs mœurs, eux qui défient toujours la récompense des mérites. Mais une nouvelle postérité, moins prudente, enveloppe les discours véritables dans les volutes de ses paroles et dispute et discute de problèmes évidents en termes voilés, met en avant les nuages des opinions, et ne repaît pas l’esprit de grain, mais de balle, et comme d’aliments déguisés ; ils tiennent pour inutile ou bas un raisonnement fondé sur l’autorité, alors que l’autorité des saints tire sa force de la raison. De sorte que l’ignorance de la vérité a prospéré, et que les [auteurs] orthodoxes, dont le visage leur est inconnu, sont ignorés dans leurs discours51.
14Ces auteurs qui dédient leurs œuvres à Clément VI rejoignent ainsi sa conception de la sapientia, résultat à la fois de l’effort intellectuel de l’homme, comme le rappelle Bartolomeo d’Urbino52, mais aussi, comme chez Guillaume de Mirica, don de Dieu, dans lequel viennent confluer théologie et philosophie53. Ces textes contribuent à élaborer une doctrine de la fusion entre savoir et pouvoir dans la figure du pape, qui doit passer de la connaissance à l’action à la fois pour mener les hommes au salut et pour les gouverner sur Terre, et qui fait écho à la prédication de Clément VI. Le savoir est utile à l’Église en général, mais en particulier au pape, qui doit l’acquérir pour mieux présider aux destinées du genre humain. Guillaume de Mirica justifie ainsi l’apprentissage de la physiognomonie54, comme Lévi ben Gerson de l’astronomie55. Bartolomeo d’Urbino est le plus clair : non seulement il fait aussi appel en parlant de Clément VI au type biblique de Salomon, modèle du roi savant, mais il affirme même que le choix de Dieu est lié à la sagesse de Pierre Roger : « En effet, Dieu tout-puissant promeut les sages au faîte du siège apostolique » (Omnipotens enim Deus ad apostolicae sedis culmen promovet sapientes).
15Guillaume de Mirica affirme que son ouvrage rend sage et prudent56, recourant au même vocabulaire que celui employé par le pape. C’est sans doute là que se dessine le plus nettement l’inflexion par rapport au xiiie siècle. En effet, de telles formulations sur la sapientia trouvent leur origine dans des textes antérieurs, quoique relativement isolés, à commencer par Roger Bacon dans l’Opus majus adressé au pape Clément IV. Mais l’interprétation politique de ce savoir est maintenant élevée au rang d’une évidence partagée par un milieu intellectuel et social. Bartolomeo d’Urbino associe dans sa lettre du Milleloquium Ambrosianum la potestas du pape et sa scientia57, tandis que Jacques Fouquier met en parallèle deux clés, la clé de la sagesse (clavis sapientie) et celle de la puissance (clavis potentie)58. Luca Manelli aborde également ce point qui constitue le cœur du système de Clément VI, définissant ainsi le bon prince :
La chaire générale de l’Église universelle et la hauteur d’un tel état requièrent dans le prince non seulement de surpasser les autres en intelligence, et de les devancer par la connaissance singulière des lettres, mais de transcender tous les mortels par l’éloquence, puisqu’il leur est supérieur en dignité, toutes choses pour lesquelles tout ce que la bonté de la nature et l’exercice vous ont apporté éclate aux yeux, mais on exige de plus qu’il conduise le peuple chrétien59.
16Un peu plus loin, il met lui aussi en parallèle les deux formes du pouvoir pontifical, appelant le pape « prince et pasteur60 ».
17Enfin, la formulation qui montre le mieux le renouvellement de la théocratie par les nouvelles conceptions politiques est celle de Walter Burley. Dans la lettre à Clément VI qui ouvre son commentaire de la Politique, premier texte connu à utiliser la notion de scientia politica, il donne une explication des motifs de sa dédicace d’autant plus révélatrice qu’on peut la mettre en parallèle avec son autre dédicace du même traité, à Richard de Bury61. Dans cette dernière, rien ne concerne un quelconque usage ecclésial du savoir aristotélicien exposé par le maître anglais, alors que, s’adressant au pape, Walter modifie son argumentaire. Il met désormais en avant l’intérêt de ce texte pour l’exercice du pouvoir temporel et spirituel du pape, liant la potentia et la sapientia mais aussi la « cité », au sens aristotélicien (politia), et l’Église militante :
Et à présent, j’ai pensé qu’il serait digne de présenter également à votre sainteté une exposition sur le livre des Politiques, puisqu’elle règne tant par sa puissance que par sa sagesse, tant au spirituel qu’au temporel, sur la cité universelle de l’Église militante62.
18Ces mots de Walter Burley illustrent la nouveauté du lien entre savoir et pouvoir pontifical, tel qu’il se met en place depuis le xiiie siècle pour culminer avec Clément VI. Le savoir n’est pas seulement un capital culturel qui permet de parvenir au sommet de l’Église, ou une série de techniques facilitant l’exercice de la domination : il se confond avec le pouvoir et devient son expression même. Cela explique aussi l’attention prêtée dans ce livre à la typologie documentaire et aux pratiques d’écriture : ces sources ne sont pas seulement le moyen d’accéder à l’histoire de Clément VI et de son pontificat. Elles sont cette histoire : la lecture des textes scolastiques, l’écriture de questions théologiques ou de sermons, les annotations diverses ou la commande de manuscrits patristiques sont, de manière indissociable, des pratiques de connaissance et de gouvernement, de soi, des autres et du monde.
19La scolastique, tant dans l’anthropologie qu’elle engendre, au sens d’A. Boureau63, que dans les techniques de maniement du savoir qu’elle suscite, au sens d’O. Weijers64, est une formidable machine à produire du pouvoir pour l’Église des xiiie et xive siècles, et, au-delà, pour les institutions politiques laïques. Que les savoirs scolastiques se déplacent de l’université vers des lieux de pouvoir comme la papauté est donc tout sauf indifférent : ce mouvement transforme la nature de l’exercice même de l’autorité pontificale – mais aussi impériale, royale ou princière. Inversement, ce lien, en retour, affecte la forme et le développement de ces savoirs, comme le montrent les interventions doctrinales directes de Clément VI à l’université de Paris. L’historiographie du dépérissement de la scolastique après 1350 n’est pas sans rapport avec la permanence de cette sujétion des savoirs scolaires aux pouvoirs institués, à commencer par la papauté, qui en faisaient le plus large usage, mais dans une perspective utilitariste – même si on connaît mieux aujourd’hui la fécondité intellectuelle des universités de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance.
20Le constat d’un utilitarisme dissymétrique entre pouvoir et savoir, qui a parfois eu des effets contraignants pour la spéculation savante, a une dimension sociologique, comme l’a souligné Jacques Verger en parlant des « gens de savoir65 ». Les hommes qui sont formés dans le cadre des universités et des écoles à la théologie, au droit ou aux arts libéraux sont aussi, pour une grande partie d’entre eux, ceux qui participent à la redéfinition de ces lieux du pouvoir durant les derniers siècles du Moyen Âge – qu’il s’agisse d’en être les administrateurs, les concepteurs ou bien les ordonnateurs, comme c’est le cas avec Clément VI, figure d’intellectuel organique participant à la reconstruction d’une hégémonie culturelle en péril, celle de la papauté. Pour autant, cette lecture gramscienne doit à son tour être historicisée. C’est d’abord à cause de l’expérience fondatrice des institutions gouvernementales de la fin du Moyen Âge, parmi lesquelles la papauté, que la pensée même du lien entre les intellectuels – qui sont toujours restés des clercs –, le pouvoir et l’hégémonie a pu être formulée en ces termes par les sciences sociales du xxe siècle. En effet, la fin du Moyen Âge – plus spécifiquement encore le xive siècle – a vu se mettre en place un espace social et intellectuel polarisé par les universités, les institutions urbaines et les grandes cours66. Cet espace forme la base d’une structuration dans la longue durée de ce qu’on peut commencer à appeler le politique dans sa configuration occidentale et moderne, un espace dans lequel le pouvoir, justement, est savoir – un « champ » qui rende possible l’apparition mais aussi la conception réflexive de la notion même de champ, si l’on replace le travail de Pierre Bourdieu dans une perspective historique. Une nouvelle fois, les interrogations théoriques qui ont animé ce livre se trouvent en situation chiasmatique vis-à-vis de la documentation médiévale : si le nouage du savoir et du pouvoir, tel que Michel Foucault l’a rendu visible, est à la fois si décisif pour l’histoire des institutions en Occident et si capable d’en décrire rétrospectivement le sens, c’est aussi parce qu’il est déterminé par une configuration historique construite depuis le tournant des xiiie et xive siècles, superposant d’une manière inédite le monde de la scolastique théologique, juridique, philosophique et celui du gouvernement des hommes, des choses et des territoires.
21C’est tout le sens de cette figure du souverain savant, tellement caractéristique de ce moment. Clément VI en incarne la facette pontificale, point d’aboutissement d’une tradition intellectuelle et scientifique illustrée par la papauté dès le xiiie siècle, avec des papes comme Clément IV, Jean XXI ou Boniface VIII, qui voisinent avec les modèles contemporains laïcs de l’empereur Frédéric II ou du roi de Castille, Alphonse X67. Cet héritage, réinterprété par la scolastique parisienne et oxfordienne de la fin du xiiie siècle et son acculturation dans les milieux cléricaux, mais aussi curiaux, durant les premières décennies du xive siècle, a joué un rôle majeur dans les pratiques avignonnaises. Les premières manifestations de cet idéal de souverain savant, en décalage avec une idéologie du xiiie siècle qui mettait d’abord l’accent sur le souverain législateur, apparaissent, on l’a vu, avec les traités de Roger Bacon adressés à Clément IV68. Cependant, cette figure n’a pas pris un essor immédiat. Le tournant aristotélicien des miroirs au prince, avec Thomas d’Aquin et surtout Gilles de Rome69, a renforcé la justification politique et non plus seulement théologique du savoir comme fondation du pouvoir, mais aucun des deux ne se sert dans ce contexte nouveau de l’image du rex sapiens pourtant déjà présente chez Jean de Salisbury au xiie siècle. Ni Boniface VIII ni Philippe le Bel ne suscitent d’importants développements sur ce point. Comme l’a suggéré Samantha Kelly, le « prince savant » émerge véritablement à partir des années 1320-1330, dans le cadre napolitain avec Robert de Naples70 puis avignonnais avec Clément VI, avant d’être repris par Charles V en France71, Charles IV de Luxembourg à Prague72 ou Richard II à Londres73. C’est dans cette série de souverains savants qu’il faut replacer Clément VI pour bien comprendre la portée de son action et de sa parole sur le trône de Pierre. Cherchant à refonder le discours de la papauté sur elle-même, après l’échec de la théocratie, il se fait l’un des défenseurs d’un nouveau modèle de prince, au moment précis où les savoirs gouvernementaux et administratifs connaissent un premier essor, et où la politique de représentation, à travers la magnificence, devient déterminante dans l’exercice du pouvoir. Savoir du prince, techniques de gouvernement et éclat de la représentation sont ainsi les trois aspects par lesquels se redéfinit la souveraineté au seuil de la modernité, une redéfinition à laquelle la papauté de Clément VI apporte une contribution majeure.
22Cependant cette contribution n’est pas sans ambiguïté, aux yeux des contemporains du pape comme à ceux de l’historien. Si l’action de Clément VI vise à promouvoir l’image du pape savant, sa réception, au-delà de son cercle rapproché, est contrastée. Elle révèle, en négatif, la spécificité du pouvoir pontifical par rapport aux autres formes de souveraineté. Lorsque Clément VI veut montrer ce qu’il appelle « être pape », il suscite des critiques d’autant plus radicales que la papauté semble prise dans des injonctions contradictoires qui n’apparaissent que plus clairement, entre ambition temporelle et vocation spirituelle. Comme Pétrarque le fait dire au personnage qui représente Clément VI dans son Carmen Bucolicum : « Nous ne connaissons pas les arts de la magie74. » En choisissant, pour rendre à la papauté sa stature universelle et contourner l’épineux souvenir de la théocratie du xiiie siècle75, de mêler l’héritage grégorien du xiie siècle – ce qu’illustre Bernard de Clairvaux, son modèle oratoire et politique – et les pratiques monarchiques du xive siècle, Clément VI a cherché une sorte de quadrature du cercle, finalement révélatrice des mutations et des tensions à l’œuvre au sein de l’Église. La difficulté de Clément VI à rendre effectif le modèle ecclésial qu’il conçoit, malgré tout son savoir et toute son éloquence, est le symptôme d’un découplage progressif que le pape, par sa volonté de restaurer un discours de puissance pontificale, rend d’autant plus visible au milieu du xive siècle. D’une part, découplage entre la papauté, entendue comme institution, et l’Église, comme communauté, ce que traduit bien la critique évangélique adressée par les contempteurs de Clément VI, ainsi que le paradoxe de la dénonciation des richesses par un pontife qui est parvenu en dix ans à épuiser le trésor de l’Église romaine à force de splendeur. D’autre part, découplage entre corps ecclésial et corps social : la promotion de nouvelles formes d’organisation collectives horizontales et verticales, qu’elles soient urbaines, princières ou monarchiques, sur lesquelles toute l’éloquence du pape ne parvient plus à avoir prise, marque les limites d’une idéologie de l’ecclesia qui rêvait de faire coïncider Église et société.
23Dans la singularité de sa position pontificale, Clément VI ne manifeste que plus clairement la nature des transformations à l’œuvre. L’extraordinaire art de la parole qu’il déploie, rendu possible par un travail intellectuel inscrit au fil même de ses manuscrits, est, si l’on veut reprendre le vocabulaire de Michel Foucault, à la fois la démonstration la plus emblématique du pouvoir pastoral et, dans le même temps, le signe de son inscription dans un nouvel horizon, celui de la gouvernementalité, qui n’attend pas le xvie siècle pour se faire jour. Administrer des populations et un territoire : Valérie Theis a montré que c’est précisément ce que la papauté a appris à faire durant son séjour avignonnais – mais l’exercice de ce pouvoir sans visage qu’est celui de l’administration nécessite, précisément, la transfiguration du modèle du pasteur. Sa parole, par sa forme même, plus encore que par ce qu’elle dit, est l’une des conditions d’existence de ce nouvel espace qui n’est plus celui de l’ecclesia, mais qui peut désormais être dit politique.
24De cet espace politique auquel correspond désormais une société qui, pour être chrétienne, n’est plus ecclésiale au sens des moines et des papes des xiie et xiiie siècles, Clément VI serait comme le Moïse, victime d’une ruse de l’histoire. Il l’aperçoit sans pour autant pouvoir y pénétrer ; il a contribué à y guider ses ouailles, mais à son corps défendant. Il est ainsi l’incarnation de cette dialectique par laquelle l’Église est elle-même, par ses contradictions et par la confrontation avec le monde, le moteur de la sortie de l’ecclesia, ce système idéologique visant à englober dans l’Église tous les aspects de la vie sociale. La papauté du xive siècle, parce qu’elle solde les comptes du projet théocratique à bonne distance de Rome, semble, malgré elle sans doute, une scène privilégiée de cette dialectique qui dissocie progressivement, d’une matrice commune, le « politique » et le « religieux », au sens où l’entend l’âge moderne, depuis la confessionnalisation du xvie siècle jusqu’aux Lumières, puis à Weber et Habermas. Cependant cette matrice théocratique et les savoirs qui lui sont associés, s’ils se dissolvent peu à peu, ne disparaissent pas tout à fait. Cherchant, pour rénover l’institution pontificale, à réunir savoir et pouvoir d’une manière inédite et fondatrice, la figure de Clément VI est certes représentative du découplage de l’Église et de la société, mais aussi du couplage de l’éloquence pastorale et de la raison gouvernementale. L’histoire intellectuelle et sociale de Clément VI témoigne de la vie souterraine de cet héritage. Si son entreprise peut être, du point de vue de ses espérances institutionnelles, jugée décevante, elle n’en est pas moins, paradoxalement, à la fois révélatrice d’une évolution historique propre au xive siècle et de développements futurs pour les siècles suivants. Elle est l’une des occasions de comprendre comment les savoirs ecclésiaux et gouvernementaux de la fin du Moyen Âge ne déterminèrent pas seulement les formes d’encadrement des populations durant l’Ancien Régime, mais aussi, plus discrètement, les formes de leur connaissance dans le temps long, devenant ainsi les passagers clandestins de la modernité et des sciences sociales, dont l’impensé médiéval demeure d’autant plus actif qu’il est dissimulé.
Notes de bas de page
1 Ms. Sainte-Geneviève 240, sermon pour la fête de saint Dominique, Benedicam tibi (s. d.), RLS, no 10, f. 191v.
2 Ibid., sermon pour le premier dimanche XL, Ihesus ductus est, 8 mars 1332, RLS, no 49, f. 81r : Et bene omnia habemus in Ihesu qui in predicatione [exhibuit] sapientie documentum, distinction réutilisée à plusieurs reprises, par exemple dans le sermon pour la fête de saint Augustin, Sol illuminans (s. d.), RLS, no 84, f. 145v.
3 Ibid., sermon pour la fête de saint Thomas d’Aquin, Vir Dei, 7 mars 1326, RLS, no 100, f. 195v : Ad litteram enim sicut corpora superiora influunt in inferiora, sic superiores in scientia debent influere in inferiores pluviam doctrine. Beatus autem Thomas fuit fecundissimus predicator.
4 Ibid., sermon pour la fête de saint Dominique, Benedicam tibi (s. d.), RLS, no 10, f. 191v : Dico primo quod fuit luminosus ad intelligendum. Aqua prius debet esse in fonte quam in rivo, et semen prius est in terra quam in spica. Et ideo dicitur Dan. xi. : docti in populis docebunt plurimos contra illos qui prius volunt docere quam didicerunt. Ymmo et officium predicationis assumunt qui vix unum verbum de Biblia audierunt.
5 Ibid., sermon pour la fête de saint Augustin, Nephtalim cervus emissus, 28 août 1341, RLS, no 63, f. 162v : Unde videtur michi quod inter cetera eloquium dicitur habere pulchritudinem ex quatuor secundum similitudinem pulchritudinis corporalis, les catégories étant ensuite appliquées à saint Augustin ; et sermon pour la fête de saint Thomas, Docebat eos, 7 mars 1340, RLS, no 24, f. 401v : Fuit ergo primo valde facundus ad proferendum eloquia decoris vir eloquens, etc.
6 Voir plus haut, et ibid., sermon pour la fête de saint Jean Évangéliste, Testimonium perhibuit verbo dei, 27 décembre 1347, RLS, no 91, f. 345r-346v sur le verbe de saint Jean, dont on trouve f. 349v la célébration de la supériorité tant dans le savoir que dans l’éloquence, puisque Pierre écrit à propos de ce que Jean savait et de ce qu’il disait : Hoc doctus Plato nescivit, hoc Demoscenes eloquens ignoravit, tandis qu’il vante au f. 351r sa sagesse divine (divina sapientia).
7 Ibid., sermon pour la fête de saint Augustin, Nephtalim cervus emissus, 28 août 1341, RLS, no 63, f. 163r : Falsitas autem vilitas, vanitas et obscuritas debent esse extranea a sermone et ideo quando remota sunt, sermo pulcher est. Et quia proch dolor in multis verbis prelatorum etiam magnorum ista quatuor vel eorum alterum se immiscent, quia frequenter in ore eorum invenitur potius falsitas quam veritas, vilitas quam honestas, vanitas quam utilitas, obscuritas quam claritas, idcirco eorum verba turpitudinem potius quam pulchritudinem habent.
8 Ibid., sermon pour la fête de saint Thomas d’Aquin, Vir Dei, 7 mars 1326, RLS, no 100, f. 201r.
9 Ibid., sermon pour la fête de saint Dominique, Benedicam tibi (s. d.), RLS, no 10, f. 192r : Et illud Act. xxvi. : verba veritatis et sobrietatis eloquiorum. Contra quosdam qui quasi scriptura indigeat mendaciis ad sui confirmationem inducunt in suis predicationibus quedam falsa et mirabilia de piscibus et avibus et aliis huiusmodi. Contra quosdam etiam qui magis volunt docere subtilia quam utilia. Contra alios etiam qui prerumpunt in abusum ad opprobria magis et ad convicia quam ad loquendum sobria.
10 Ms. BAV Borgh. 96, f. 349r : Contra quosdam predicatores verbi divini qui cum debent provocare ad contritionem et detestationem peccatorum et primo per consequens ad gemitum et ad planctum, ipsi tamen eorum provocant ad lasciviam et ad risum, quod multum reprehendit.
11 Par exemple ibid., f. 349v : Unde si hoc habet lex humana multo fortius debet hoc habere et pro certo habet lex divina. Ymo si in legibus humanis aliquid rectitudinis invenitur, hec est solum et in tantum in quantum a divina sapientia originaliter habetur.
12 Ibid., f. 350v : Predicatoris officium est mundum in mundanos homines arguere de peccato, etc.
13 Ibid., f. 351r : Quod est contra multos praedicatores qui non arguunt nec reprehendunt subditos suos de multis peccatis que commitunt [sic], yimo eis magis adulantur. Potest dici de talibus quod sunt canes muti non valentes latrare, et forte timent quod eis dicatur : medice, cura te ipsum. Au cas où il y aurait eu un doute sur ses intentions, Pierre a ajouté une note a posteriori au texte : Ille arguet mundum in homines mundanos mundana et terrena magis quam celestia diligentes de peccato quod commiserunt de iustitia quam non fecerunt et de extremo divino iudicio quod omnino contempserunt.
14 M. Senellart, Les arts de gouverner, op. cit., p. 158-179.
15 Ms. Sainte-Geneviève 240, sermon pour le troisième dimanche de l’Avent, Tu es qui venturus, 12 décembre 1333, RLS, no 94, f. 108v-109r.
16 Ibid., sermon pour la fête de saint Jean Baptiste, Quis putas, 24 juin 1333, RLS, no 74, f. 118v.
17 Par exemple ibid., sermon pour le premier dimanche LXX, Sic currite, 8 février 1327, RLS, no 81, f. 60r : Sicut dicit Apostolus i. ad Cor. primo : sapientia in predicatione, etc. ; sermon pour le premier dimanche de Carême, Fortis in bello Ihesus (s. d.), RLS, no 41, f. 70r : Igitur sicut dicitur Ecc. melior est sapientia quam fortitudo. Sur les aspects bibliques de la notion, voir R. Brague, « Du prince au peuple. La sagesse politique dans la Bible », dans R. Halévi (éd.), Le savoir du prince, Paris, 2002, p. 7-23.
18 Ibid., sermon pour la fête de saint Nicolas, Talis decebat, 6 décembre 1326 ou 1327, RLS, no 88, f. 285r : Ambrosius in suo pastorali dicit sic : sic polleat episcopus sapientia, etc.
19 Par exemple ibid., sermon pour la fête de saint Thomas d’Aquin, Vir Dei, 7 mars 1326, RLS, no 100, f. 196v : Quia sicut dicit Gregorius Moralium : sapientia quorundam est sensum verbis velare, que falsa sunt, vera ostendere, etc.
20 Par exemple ibid., sermon pour le premier dimanche LXX, Sic currite, 8 février 1327, RLS, no 81, f. 60r : Sicut deducit beatus Bernardus sermone xxii. super Cantica scilicet quod factus est nobis sapientia, justiticia, sanctificatio et redemptio.
21 Ibid., sermon pour la fête de saint Dominique, Benedicam tibi (s. d.), RLS, no 10, f. 191vb : Sicut dicit Tullius, sapientia sine eloquentia est quasi gladius in manu paralitici.
22 Sur ces deux derniers, voir infra l’usage du ms. BAV Borgh. 57.
23 Ibid., sermon pour la fête de saint Dominique, Benedicam tibi (s. d.), RLS, no 10, f. 187r : Secundo habent in intellectu claritatem sapientie et cognitionis ; sermon pour la fête de saint Bernard, Dilectus Deus michi, entre 1338 et 1342, RLS, no 23, 179r : Et lucidus splendor sapientie et cognitionis ; sermon pour la fête de saint Nicolas, Talis decebat, 6 décembre 1326 ou 1327, RLS, no 88, f. 287v : Decimo fulgorem sapientie et cognitionis in divinorum contemplatione.
24 Voir les exemples précédents, ou encore ibid., sermon pour la fête de saint Thomas, Docebat eos, 7 mars 1340, RLS, no 24, f. 401r : Secundo luminosus in cognitione quia habuit sapientie et veritatis certitudinem ; ou ibid., sermon pour la fête de saint Augustin, Sol illuminans (s. d.), RLS, no 84, f. 144v : Iste sanctus debet habere triplicem virtutem, illuminativam per splendorem sapientie et veritatis, etc.
25 Par exemple ibid., sermon pour le premier dimanche LXX, Sic currite, 8 février 1327, RLS, no 81, f. 58v : Quarto contra ignorantie cecitatem, est optimum remedium sapientie et prudentie claritas ; sermon pour la fête de saint Jean Baptiste, Quis putas, 24 juin 1333, RLS, no 74, f. 117v : Videtur michi quod sapientes et prudentes consueverunt interrogare et inquirere specialiter propter tria.
26 C’est le cas dans certains contextes en association avec la prudence, comme dans la réponse aux ambassadeurs romains sur l’indulgence jubilaire, Desidero vos, 27 janvier 1343, RLS, no 21, f. 154r : Vos romani qui subiugastis vobis orbem per vestram sapientiam, gubernastis orbem per vestram prudentiam, ou en utilisant le terme tout seul, dans un sens souvent très voisin de la prudence, par exemple lorsqu’il glose le passage du Deut. 1 Tuli de tribubus vestris viros sapientes et nobiles et constitui eos principes, ou encore dans la comparaison avec le châtelain avisé, sermon pour la fête de saint Thomas d’Aquin, Vir Dei, 7 mars 1326, RLS, no 100, f. 193v : Ad litteram enim sapiens castellanus obsessus frequenter dirigit oculum ad locum castri debiliorem, ut si ex illa parte detur insultus, resistere possit.
27 Ibid., sermon pour la fête de saint Augustin, Sol illuminans (s. d.), RLS, no 84, f. 146v : Sicut enim sapiens mercator crescit in divitiis temporalibus, sic sapiens in divitiis spiritualibus.
28 Ibid., sermon pour le premier dimanche XL, Ihesus ductus est, 8 mars 1332, RLS, no 49, f. 86v : Secundam habuit a sagitta volante in die, id est ab hereticis tempore doctorum et in ista in multum profecit ecclesia quia ipsam vicerunt per scripturam et sapientiam, ou ibid., sermon pour la fête de saint Martin, Totus mons (s. d.), RLS, no 92, f. 218ra : Ergo oportet continue tenere arma sapientie que sunt lucida contra dyaboli deceptionem.
29 Le seul contre-exemple est un passage où il est dit que le Christ agit avec sagesse (sapientia) et que Pierre fait suivre le verset biblique de Job 26 : Prudentia eius percussit superbum, créant de fait une équivalence entre les deux notions.
30 Ibid., sermon pour la canonisation de saint Yves, Exulta et lauda, 19 mai 1347, RLS, no 35, f. 21.
31 Ibid.
32 Voir le sermon « Vous avez un seul maître, le Christ », dans R. Imbach et M.-H. Méléagre (dir.), Philosophes médiévaux des xiiie et xive siècles, Paris, 1986, p. 116-117 : « Et de ce fait, il semble que, parmi les philosophes, le discours de sagesse ait été donné à Platon et le discours de science à Aristote. Le premier, en effet, regardait principalement les réalités supérieures ; le second, en revanche, principalement les vérités inférieures. Mais les deux discours de sagesse et de science ont été donnés par l’Esprit saint à Augustin, en tant que commentateur principal de l’Écriture tout entière, en grande excellence, comme le montre ses écrits. […] Mais c’est en Jésus-Christ notre Seigneur que ces discours se trouvèrent en parfaite excellence […]. »
33 Ms. Sainte-Geneviève 240, sermon pour la canonisation de saint Yves, Exulta et lauda, 19 mai 1347, RLS, no 35, f. 29v : Unde in principio misit Apostolos et armatos fide contra incredulos, postea martires armatos patientia contra tyrannos, postea doctores illustratos sapientia contra hereticos ; ibid., sermon pour la fête des saints Pierre et Paul, Principes populorum, 26 juin 1339, RLS, no 70, f. 128v : Filii dulcioris amoris ergo merito congregati sunt cum deo sicut cum magistro docente omnes sapientiam et veritatem, ou encore ibid., sermon pour l’Assomption, Veni de Libano (s. d.), RLS, no 96, f. 383v : Secundo corona magistralis insignum in signum sapientie qua coronantur doctores.
34 La figure de la reine de Saba venue entendre la sagesse de Salomon est ainsi utilisée dans ibid., sermon pour l’Épiphanie, Signum magnum, 6 janvier 1342, RLS, no 83, f. 395v, et dans ibid., collation pour la remise du chapeau de cardinal à Nicolas de Besse, Loquere tu et audiemus, juin 1344, RLS, no 61, f. 527r.
35 Ibid., sermon pour la canonisation de saint Yves, Exulta et lauda, 19 mai 1347, RLS, no 35, f. 29r : Unde quoniam a terra defecit sanctus videtur michi non supervacue ex hiis qui empti sunt de terra revocare in medium virum vere sanctum et nostrorum quidem temporum singularis sapientie et virtutis. On trouve aussi, à partir du verset de l’Ecc. dernier chap., Cum esset sapientissimus docuit populum que sunt verba utilia, la notion employée en rapport avec saint Jean Évangéliste (f. 353v) et saint Thomas (f. 196v).
36 Ibid., sermon pour la Toussaint, Sufficiat vobis, 1er novembre 1342, RLS, no 85, f. 49v-50r : Cognoscemus patris potentiam, filii sapientiam, etc. ; ibid., sermon pour le premier dimanche XL, Ihesus ductus est, 8 mars 1332, RLS, no 49, f. 81r : Et bene omnia habemus in Ihesu qui […] in predicatione sapientie documentum ; ibid., sermon pour le premier dimanche de l’Avent, Israhel habitabit, 27 novembre 1323, RLS, no 56, f. 236v : Et sapiens ipse liberabit urbem per sapientiam suam. Ad litteram dictum est de Christo […].
37 Ibid., sermon pour la fête de saint Jean Évangéliste, Testimonium perhibuit verbo dei, 27 décembre 1347, RLS, no 91, f. 356v.
38 Ms. BAV Borgh. 57, f. 20v.
39 E. Marmursztejn, L’autorité des maîtres, op. cit.
40 C. Castoriadis, L’institution imaginaire de la société, Paris, 1975.
41 D. Wood, Clement VI, op. cit., Appendix 1, p. 207-208, donne une liste des œuvres dédiées à Clément VI. On a conservé, en commun avec elle, les deux traités de Bartolomeo d’Urbino, Milleloquium veritatis Augustini et Milleloquium Ambrosianum, la prédiction de Jean de Murs pour les conjonctions astrales de 1357 et 1365, le traité de Jean de Murs et de Firmin de Beauval sur la réforme du calendrier, le De instrumento de Lévi ben Gerson dans sa version latine, la Tabulatio et Expositio Senecae de Luca Manelli, le commentaire de la Politique d’Aristote par Walter Burley, et celui de la Physionomie du Pseudo-Aristote par Guillaume de Mirica. Dans la liste n’ont pas été prises en compte les œuvres dédiées à Pierre Roger (Bernard Gui, Legenda sancti Thomae, Gui Terreni, Summa de Heresibus) et celles qui ne comportent pas de lettres de dédicace (les ouvrages de Jean Bernier de Fayt et de Richard Fitzralph) ou qui ont disparu (le De Romani Pontificis Christi Vicarii Auctoritate de Bartolomeo d’Urbino, le commentaire de l’Éthique de Walter Burley). Enfin, il faut ajouter un oubli de D. Wood, le Viridarium Gregorianum de Jacques Fouquier, et une erreur, le Tractatus de Jurisdictione Ecclesiae super Regnum Apuliae et Siciliae de Nicolas Rossel, contenu dans le volume 70 de l’Armadium XXXV des Archives du Vatican, qui ne date pas de Clément VI mais d’Innocent VI.
42 Bartolomeo d’Urbino, Milleloquium Ambrosianum, Lyon, 1556, lettre de dédicace (non foliotée) : Sanctissimo patri et domino, domino Clementi divina providente clementia, sacrosancte, sacrosanctae Romanae ac universalis Ecclesiae summo pontifici, humillima eius creatura frater Bartholomaeus, etc. ; Id., Milleloquium Augustini : Sanctissimo patri patrum et domino, domino Clementi divina providentia sacrosanctae Romanae ac universalis Ecclesiae summo pontifici, etc. Luca Manelli, dans sa Tabulatio et Expositio Senecae (édition de la lettre de dédicace dans T. Käppeli, « L. Manelli e la sua Tabulatio et Expositio Senecae », Archivum Fratrum Praedicatorum, XVIII, 1948, p. 237-264, p. 260), est proche de la formulation : Sanctissimo patri et domino Clementi, divina providentia sacrosancte Romane ac universalis ecclesie summo pontifici, etc. Lévi ben Gerson se rapproche également du même modèle, De instrumento (édition de la lettre dans G. Dahan, « Les traductions latines des œuvres de Gersonide », dans Id. [éd.], Gersonide en son temps. Science et philosophie médiévales, Louvain/Paris, 1991, p. 350) : Sanctissimo patri et domino, dulcore clementie, perspicitas acumine, celeri intellectu, thesauro memorie et facundia eloquendi ab altissimo predotato, domino Clementi multiplicibus ac predictis ad tronum summi pontificatus electo ex milibus, etc. Jean de Murs et Firmin de Beauval vont dans le même sens (C. Gack-Scheiding, Johannes de Muris, Epistola super reformatione antiqui kalendarii. Ein Beitrag zur Kalenderreform im 14. Jahrhundert, Hanovre, 1995, p. 113 : Sanctissimo in Christo patri ac domino nostro, domino Clementi sexto, sacrosancte Romane ac universalis ecclesie summo pontifici, etc.), de même que Guillaume de Mirica, ms. Bodleian Oxford, Canon. 350, f. 1 : Sanctissimo in Christo patri ac domino, domino Clementi sacrosancte romane et universalis ecclesie summo pontifici, etc. On trouve la formule suivante, plus sobre, chez Walter Burley (lettre éditée par A. Maier, « Zu Walter Burleys Politik-Kommentar », dans Ausgehendes Mittelalter, I, Cité du Vatican, 1964, p. 93-99, en particulier p. 95) : Sanctissimo patri ac domino Clementi supernaque vocatione papae sexto, etc. ; enfin Jacques Fouquier, Viridarium Gregorianum, ms. Mazarine, Paris, 687, indique : Sanctissimo patri ac domino clementissimo domino Clementi superne vocationis clementia pape vi., etc.
43 Bartolomeo d’Urbino, Milleloquium Ambrosianum : domino Clementi […] frater B. […] pedum oscula beatorum ; Id., Milleloquium veritatis Augustini, Lyon, 1555, lettre de dédicace non foliotée : Domino Clementi […] frater Bartholomeus de Urbino, ad pedum oscula beatorum. Luca Manelli, Tabulatio, p. 262 : Ad pedum oscula beatorum nobiscum humiliter prosternantur. Walter Burley, p. 95 : Cum subiectione humili pedum oscula beatorum. Jean de Murs et Firmin de Beauval, p. 113 : Ad beatorum pedum oscula prostrati presentamus hunc libellum ; Guillaume de Mirica, f. 1 : Devota pedum oscula beatorum ; Jacques Fouquier, f. 1r : Cum omni subiectione et humili pedum oscula beatorum.
44 On trouve ainsi chez Jacques Fouquier la demande suivante, f. 1v : Si quid autem in hoc opere seu potius opusculo corrigendum, addendum vel dividendum decreveritis, etc. ; ou encore chez Bartolomeo d’Urbino, dans le Milleloquium Augustini : Sed quia culpas nescire consuevit humilis petitio veniae, vos, Pater Sanctissime, opus et opificem corrigite, in cuius conspectu facile est honestare pauperem. Chez Richard Fitzralph, Summa de questionibus armenorum, ms. Vat. lat. 1033, f. 1, qui n’est cependant pas dédié à Clément VI : Et ipsum opus […] premittendo approbacioni et reprobacioni nostri patris Clementis sexti universalis ecclesie summi pontificis, in toto et in parte commicti.
45 Jacques Fouquier, f. 1v : [Dominus] qui est et fuit magister et doctor in theologia parisiensis probatissimus pre ceteris vite nostre consortibus ac fama celebratissimus toti orbi, etiam longe diu satis ante quam romane ecclesie cardinalatum papatumque eiusdem ratione ac universalis ecclesie sortiretur.
46 Lévi ben Gerson, éd. G. Dahan, p. 350 : Quoniam sanctitas vestra in statu sue iuventitus cogitare incepit circa archana et secreta cuiuscumque scientie, ideo Deus, qui viris desideriorum (Dan. 9, 23) revelat mysteria, vult dicte sanctitatis maiestati omnis scientie quamcumque particulam clarere perfecte, propter quod michi sacramentum astronomie scientie completive in baculo Jacob extitit revelatum, non in sapientia que in me sit plus quam in cunctis viventibus (Dan. 2, 30) sed ut regi regum, patri et domino eius fiat interpretatio manifesta.
47 Walter Burley, éd. Maier, p. 95 : Nomini igitur vestrae sanctitatis, a qua didici iam est diu in studio Parisiensi clarum, artificiosum multumque ordinatum modum loquendi ac etiam exponendi, temporibus quibus ibi lecturam sacrae scripturae ceterosque actus scholasticos exercebatis tamquam doctor in theologia excellentissimus et veritatis perscrutator subtilissimus, expositionem praedictorum librorum merito dedicavi.
48 Jean de Murs et Firmin de Beauval, éd. C. Gack-Scheiding, p. 113 : Sane in kalendario, quo utuntur omnes vere catholici, quosdam defectus tamquam indagator subtilissimus percepistis, qui quidem defectus, nisi remediantur, adeo pullulabunt, quod in vestro sanctissime grege veritate dimissa oves in posterum forsitan caderent in errorem.
49 Ibid., p. 114 : Ut aliquas vias, que nobis viderentur meliores et ecclesie utiliores, inveniremus, si possemus. La notion d’utilité est encore rappelée dans la dernière phrase, p. 115 : Et hoc scienter facere voluimus, ut sacrosancta Romana ecclesia, que spiritu sancto regitur, utiliorem viam minusquam defectuosam eligere valeat et tenere.
50 Guillaume de Mirica, f. 1r : Cupiens et in hoc arbitrans me facere ad vestre beneplacita sanctitatis, in gazophilacium ac thesaurum scientiarum quibus sancta mater ecclesia filios suos nutrit et dirigit in agendis, quia non sufficit de theologicis aurum saltem de philosophycis mittere et minutum, etc. Un peu plus loin : Quin ymmo ut prius pater et misericors dominus benigno favore persequimini eos qui de profunditate putei divinarum haurire nil valentes de aliarum tamen scientiarum rivulis haurire conantur, ex quibus paradisus dei et ortus deliciarum sancta scilicet mater ecclesia potest quomodolibet irrigari.
51 Bartolomeo d’Urbino, Milleloquium Augustini : Fons sapientiae verbum Dei in excelsis, almae matri Ecclesiae doctores eximios velut flumina terris et sidera caelis radiantia dedit. Quorum vita viget post obitum, et modernis militant eorum studia literarum. Iam nova progenies alieno labore ad res pulcherrimas ex tenebris ad lucem eruptas deducitur, vita componitur, cui nati clarissimi viri veritatis, radium et morum lilium praepararunt et semper provocant ad bravium meritorum. Sed minus prudens in nonnullis nova soboles veras sententias verborum involuit volucris et per occulta disputat de apertis, opinionum nubes obiciit, non granis, sed paleis, ac velut pictis epulis animum pascit, reputant inutilem seu vilem locum ab autoritate, cum sanctorum auctoritas vires habeat a ratione. Propter quod inolevit ignorantia veritatis, et orthodoxi qui ignoti sunt facie, sententiis ignorantur.
52 Id., Milleloquium Ambrosianum : Nec agit haec magistra laboris, videlicet laudis ambitio, cum generalissimum honoris possideat evidenter titulum : sed amor sapientiae et exercitium virtuosum, procul pellit otium, bonis artis inimicum.
53 Guillaume de Mirica, f. 1v : In quo quidem opusculo si legentibus occurrerunt aliqua veritate philosophice consona laudetur. Ille qui est fons sapientie verbum patris altissimi in excelsis. Voir aussi citation précédente, sur la philosophie et la théologie.
54 Ibid., f. 1r : Quia non sufficit de theologicis aurum saltem de philosophycis mittere et minutum, cum non sit tamen detestabile quantumpotius summe necessarium et utile tam in yconomiis quam polliciis quibuslibet pro vitandis malorum periculosis contagiis, ac proficuis bonorum consortiis eligendis, ex diversitate corporum mores naturales cognoscere.
55 Lévi ben Gerson, éd. G. Dahan, p. 351 : Quanquam ex dictis possit evidenter concludi vestram sanctitatem omni fulgere scientia, nihilominus Deus quandoque aliquam scientiarum particulam parvulis modo quodam speciali revelat, ad solatium gaudiumque sapientium dominorum. Etc.
56 Guillaume de Mirica, f. 217r : Mirabili potest fieri sapiens et prudens, propter eorum certitudinem in cognoscendo per phisionomiam mores naturales.
57 Bartolomeo d’Urbino, Milleloquium Ambrosianum : Sed non sic in bonis cunctis praepollens a Christo sanctissima dignitas vestra, cui ante potestatis iurisdictionem contulit scientiae clavem, et tot virtutum concessit insignia.
58 Jacques Fouquier, f. 1v : Vestre igitur sanctitati tam excellentissimi iudicii rectitudine per clavem sapientie prefulgenti quam etiam superne auctoris plenitudine per clavem potentie, etc.
59 Luca Manelli, éd. T. Käppeli, p. 262 : Generalis tocius ecclesie cathedra et celsitudo tanti status requirit in principe non solum ut ingenio ceteros superet et litterarum peritia singulari subditos antecedat et facundia omnes mortales transcendat quibus est dignitate prestantior, in quibus omnibus quantum vobis nature benignitas et exercitium contulerit evidens est, sed exigitur ulterius ut christianum populum […] inducat.
60 Ibid. : Conservet vos deus populo suo principem et pastorem, etc.
61 Pour une analyse du commentaire qui souligne ce premier emploi de la notion et qui le replace dans son contexte intellectuel, voir S. Harrison Thomson, « Walter Burley’s Commentary on the Politics of Aristotle », dans Mélanges Auguste Pelzer, Louvain, 1947, p. 557-578.
62 Walter Burley, éd. A. Maier, p. 95-96 : Et nunc expositionem libri Politicorum eidem sanctitati vestrae praesentandam dignum fore putavi, sicut regenti tam ex potentia quam sapientia, tamque spiritualiter quam etiam temporaliter universalem politiam ecclesiae militantis.
63 Voir supra note 41.
64 Voir par exemple O. Weijers, Le maniement du savoir. Pratiques intellectuelles à l’époque des premières universités, Turnhout, 1996.
65 J. Verger, Les gens de savoir dans l’Europe de la fin du Moyen Âge, Paris, 1997.
66 C. König-Pralong, Le bon usage des savoirs, op. cit.
67 Sur ce point, voir P. Morpurgo, L’armonia della natura e l’ordine dei governi (secoli xii-xiv ), Florence, 2000. Sur Alphonse X, voir aussi R. I. Burns (éd.), Emperor of Culture : Alfonso X the Learned and his Thirteenth-Century Renaissance, Philadelphie, 1990. Sur Frédéric II, voir A. Paravicini Bagliani et P. Toubert (éd.), Federico II e le scienze, Palerme, 1994. Pour l’influence de ce modèle, voir A. Boureau, « Le prince médiéval et la science politique », dans R. Halévi (éd.), Le savoir du prince, Paris, 2002, p. 25-50, en particulier p. 39-46. Pour la papauté, voir une fois encore les travaux d’A. Paravicini Bagliani.
68 Roger Bacon, Opus tertium, éd. J. S. Brewer, Opera quaedam hactenus inedita, Londres, 1859, p. 3-6.
69 Gilles de Rome, De regimine principum, livre II, chap. 7-8, sur la formation intellectuelle des jeunes princes ; et Thomas d’Aquin, Opera Omnia, XLII, De Regno ad regem Cypri, Rome, 1979, p. 449, pour la lettre de dédicace ; A. Boureau, « Le prince médiéval », art. cité, p. 46-50.
70 S. Kelly, The New Solomon. Robert of Naples (1309-1343) and Fourteenth-Century Kingship, Leyde/Boston, 2003, voir en particulier le chap. 7, « Wise Kingship and the Fourteenth Century », p. 287-305.
71 F. Autrand, Charles V, Paris, 1994.
72 I. Rosario, Art and Propaganda. Charles IV of Bohemia (1346-1378), Woodbridge, 2000.
73 A. Goodman et J. L. Gillespie (dir.), Richard II. The Art of Kingship, Oxford/New York, 1999.
74 Voir préambule, p. 43.
75 Sur cet aspect de l’évolution, voir l’article fondamental de C. Dolcini, « Aspetti del pensiero politico in età avignonese », art. cité.
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