Guy de Guines fut-il comte de Forez au XIIe siècle ?
p. 155-165
Texte intégral
1Dans son Historia comitum Ghisnensium, Lambert d'Ardres intitule comte "de Forois", un Guy, fils cadet de Baudouin Ier, comte de Guines1.
2Cette titulature a intrigué plus d'un historien, sans qu'une explication satisfaisante ait jamais pu en être fournie.
3Nous tenterons donc de présenter un état de la question, en confrontant cette indication succincte du chroniqueur avec ce que nous savons, par ailleurs, des familles comtales de Guines et de Forez, aux alentours de 1100.
4Il convient d'abord de nous interroger sur la fiabilité de l'ouvrage de Lambert d'Ardres. Ce dernier, "curé du village de ce nom près Calais, en 1194, allié à la famille de Guines, marié et père de famille, compose, à la demande d'Arnoul, fils de Baudouin, comte de Guines2, entre 1194 et 1198 (et la continue jusqu'à 1203), l'Historia comitum Ghisnensium. Il emploie des sources en langue vulgaire (chansons, poèmes, légendes), des traditions locales et nobiliaires, des vies de saints". Molinier qui s'exprime ainsi, poursuit : "C'est un excellent spécimen d'histoire généalogique qui fourmille de traits de mœurs curieux et qui repose de la banalité ordinaire des chroniques monacales... L'ouvrage renferme un tableau infiniment précieux de la vie de cour à Guines"3. Le Professeur Duby lui fait largement écho, lorsqu'il écrit : "Il s'agit d'un ouvrage... composé... par un écrivain professionnel, par un homme qui n'a pas travaillé seulement sur le contenu de sa propre mémoire ou de celle de ses familiers, mais sur toute une documentation, sur des archives, des écrits généalogiques rédigés antérieurement, et sur les souvenirs attachés aux tombeaux d'une nécropole familiale. Cette source est donc infiniment... riche et contient, notamment, d'innombrables traits latéraux de psychologie collective"4. C'est dire l'intérêt et le sérieux de ce précieux document5.
5En second lieu, il faut déterminer quelle pouvait être la province de "Forois" dont Guy aurait été comte.
6Ménilglaise, dans ses notes de la Chronique de Lambert d'Ardres, résume bien le problème posé. "Dans Villehardouin, écrit-il, "Forois" désigne le comté de Forez. Duchesne en avait conclu que notre Guy, étant devenu l'époux de la fille unique de Guillaume, comte de Lyon et de Forez qui se croisa en 1097, avait dû succéder à ce dernier (Histoire des rois de Bourgogne..., livre III, chapitre LXXI). Mais un examen plus approfondi l'empêcha de reproduire cette opinion dans son Histoire de la Maison de Guines. En effet, les comtes de Forez s'appelaient Guigues et non pas Guy ; et ceux de cette époque étaient de la Maison d'Albon. Nous ignorons donc quel comté Lambert avait en vue"6.
7Il est vrai que Duchesne écrit dans ce dernier ouvrage : "Lambert luy attribue le tiltre de comte de Forois. Mais il ne spécifie point en quel pays estoit cette comté. Ce qui nous fait douter s'il faut l'interpréter de nostre Forests"7.
8Mais un dictionnaire, paru en 1960, apporte quelques utiles précisions8. Répertoriant tous les toponymes, antérieurs à 1226, situés dans une vaste aire géographique couvrant toute la France du nord, le Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas et l'Allemagne occidentale, il en relève quatre en France et trois en Belgique qui pourraient évoquer le "Forois". Or ils sont, tous les sept, situés en Artois, Flandre, Hainaut et Brabant, donc à proximité, relative, de Guines et, en tout cas, en des lieux dont Lambert, homme instruit et bien informé, ne pouvait ignorer les appellations précises9. Que pouvons-nous donc tenter d'en déduire ?
9Ou bien Guy possédait l'un de ces domaines, mais un seul était un comté qui s'appelait... "de Foron" et non "de Forois". Et d'ailleurs, pourquoi alors Lambert se serait-il étonné, si Guy s'était peu éloigné du comté paternel, qu'il fût inhumé dans la nécropole familiale, puisqu'il écrit "Guy, comte de Forois, mais enterré à Andres"12.
10Ou bien Guy avait été comte d'une province lointaine dont Lambert devait ignorer les usages de la chancellerie. Ne sachant pas que le comte de Forez s'intitulait alors, généralement "cornes Forensis" ou "comes Forisii” ou, quelquefois, "cornes Forisiensis", il utilisa, dans sa chronique en latin, le nom français de "Forois" sous lequel cette terre était déjà connue depuis longtemps. En effet, son contemporain Villehardouin cite, vers 1210, "Guighes, li cuens de Forois"10 ; et près d'un siècle plus tôt, Guillaume de Tyr appelait le comte Guillaume, "comes de Forois"11.
11Si donc nous accordons crédit à Lambert d'Ardres, Guy de Guines fut bien comte de Forez, mais il faut maintenant tâcher de savoir quand il le fut, et comment il le devint.
12Citant les six enfants du comte Baudouin Ier et de sa femme Adèle, Lambert nomme d'abord les quatre fils : Manassès qui devait succéder à son père ; Foulque, comte de Beyrouth et inhumé en Terre sainte ; Guy, comte de Forois mais enterré à Andres ; et Hugues, archidiacre de Thérouanne et plus tard chevalier, également inhumé dans la nécropole familiale ; puis les deux filles : Adèle (ou Alice ou Aelis), dame de Semur ; et Gisèle, dame de Gand12.
13Cette énumération n'est pas innocemment succincte. Le Professeur Duby a montré que toutes les chroniques familiales des XIe et XIIe siècles, en France, se focalisaient, presque exclusivement, sur l'ascendance patrilinéaire des seigneurs pour lesquelles elles étaient écrites ; car la notion de noblesse reposait alors, essentiellement, sur le lignage, si possible ancien et prestigieux. Dans cette optique, tous les collatéraux (épouses, filles, fils cadets) sont plus encombrants qu'utiles pour le projet poursuivi ; c'est pourquoi ils sont toujours cités brièvement4.
14Mais à côté de cette histoire généalogique des chroniques, il y a celle que composent, après coup, "les historiens, en dépistant patiemment tous les indices de filiations et d'alliances, à travers les cartulaires, les titres de possession et les documents nécrologiques"4. C'est donc cette dernière démarche qui va nous retenir maintenant.
15Dans une transaction que Baudouin Ier passa, en 1065, avec l'abbaye de Saint-Pierre de Hasnon13, aucun de ses fils ne signe avec lui ; peut-être simplement parce qu'ils n'étaient pas encore majeurs, ce qui les ferait tous naître après 105114. Au contraire, en 1084, le même Baudouin fit d'amples donations à l'église d'Andres, "du consentement de ses fils Manassès, Foulque, Hugues et Guy"15. Et d'autres seigneurs s'associèrent à lui pour donner, au même moment, divers biens à Saint-Sauveur-et-Sainte-Rotrude d'Andres, "du consentement du comte Baudouin et de ses fils Manassès, Foulque et Guy16. Ces actes, empruntés par Duchesne à la Chronique de l'abbaye d'Andres (écrite par son abbé Guillaume), font donc de Guy le troisième (ou quatrième ?) fils de Baudouin, comme le fait aussi Lambert. Donc si l'aîné n'était pas encore né en 1051, Guy ne peut avoir vu le jour avant 1053 ou 1054. Mais comme il était majeur (de quatorze ans ?) lors des donations de 1084, il dut naître avant 1070 (on sait que sa mère mourut en 1084, et son père en 1091)17.
16La date de sa mort n'est pas mieux assurée. On sait seulement qu'elle se situa avant 1137, année du décès de son frère aîné Manassès18. Lambert est formel sur ce point : Manassès ne laissa qu'une seule héritière, sa petite-fille légitime, Béatrice de Bourbourg, "ses trois frères étant décédés sans postérité"19. Mais on est sûr que Guy fut inhumé à Andres, dans la nécropole familiale20, fondée par son père21 car Lambert le précise à deux reprises12-21.
17Récapitulons donc les quelques renseignements tirés de ces documents. Guy de Guines, troisième (ou quatrième ?) fils du comte Baudouin Ier et de sa femme Adèle, a dû naître entre 1054 et 1069. Il fut, à un moment au moins, comte de Forez. Il mourut avant 1137, fut inhumé dans la nécropole familiale des comtes de Guines, à Andres. Enfin, il ne laissa pas d'héritier.
18Voyons maintenant ce qui se passait en Forez à la même époque.
19En 1084, alors que Guy pouvait avoir entre quinze et trente ans, et qu'il était toujours auprès de son père, régnait en Forez le comte Guillaume "le Vieux".
20Rappelons d'abord que, bien avant le partage officiel et définitif du comté de Lyon et de Forez entre l'Eglise de Lyon d'une part, et le comte de Forez d'autre part (1173), ce dernier avait pris l'habitude de ne s'intituler que comte de Forez, dès les années 1070, après les graves revers militaires d'Artaud II22 ; ceci pour dire qu'il n'est pas étonnant que Guy de Guines n'ait porté que ce titre, alors qu'il vivait avant 1173.
21Guillaume le Vieux quitta son Forez, pour la Croisade, en 1096 (ou au début de 1097 ?), et trouva la mort sous les murs de Nicée, au siège de juin 109711. Ce comte eut deux fils, Guillaume "le Jeune" et Eustache23 qui furent, tous les deux, comtes de Forez. Il semble que le premier vivait encore en 110724 et le second mourut (ou fut évincé ?) avant (ou en ?) 111525. On ne sait pas si l’un et/ou l'autre eurent des enfants.
22En tout cas, en 1115, un acte, très retouché mais dont la date ne paraît pas suspecte, cite "Guido, comes Foresii"26, et une notice contemporaine, non datée, qui concerne, comme la précédente, la fondation du couvent de Beaulieu, de l'ordre de Fontevraud, mentionne, à côté de ce comte Guy, une "domina Sibilla Bellijoci, comitissa"27. Deux questions se posent alors :
23D'une part, était-ce de Forez que Sibille, dame de Beaujeu, était comtesse, par mariage avec ce comte Guy (Ier) ? La réponse est catégoriquement positive, malgré les doutes des historiens du XIXe siècle. En effet, parlant du comte suivant Guy II, Humbert III de Beaujeu l'appelle "mon neveu" dans un acte de 116328 ; puis il reconnaît, en 1189, que Guy II, "par le droit héréditaire qu'il tient de sa mère, doit succéder à celle-ci avec lui"29 ; enfin, dans son testament de 1216, Guichard IV de Beaujeu, petit-fils d'Humbert III, nomme son "cousin", l'archevêque de Lyon Renaud, petit-fils de Guy Ier30. Autrement dit, Guy Ier a bien épousé Sibille de Beaujeu, sœur d'Humbert III, donc fille de Guichard III ; et Guy II est bien leur fils.
24D'autre part, le comte Guy Ier pouvait-il être Guy de Guines ? La réponse est assurément négative, puisque nous venons de voir que Guy Ier eut une postérité mâle, tandis que Guy de Guines n'en eut aucune.
25Mais où faut-il alors placer le comte de Forez Guy de Guines ?
26Le lignage comtal forézien est établi avec certitude jusqu'en 1096, date du départ de Guillaume le Vieux pour la Croisade ; et à nouveau à partir de 1115 où paraît, pour la première fois, Guy Ier, dont on sait qu'il n'était pas Guy de Guines, mais dont on ignore, encore aujourd'hui, s'il était un parent de la dynastie précédente.
27C'est donc nécessairement pendant ces deux décennies (1096-1115) qu'il faut placer les règnes de trois comtes : ceux de Guillaume le Jeune (ce dernier tenait peut-être le Forez en 1107)24, d'Eustache et de Guy de Guines, sans qu'on puisse dire dans quel ordre chronologique.
28Il est évident que Guy, cadet d'une famille lointaine et étrangère au comté, donc sans soutien féodal sur place, n'a pu usurper son titre. Il est donc devenu comte par mariage, avec une princesse forézienne capable de faire valoir au moins quelques droits à la succession comtale. A-t-il épousé une sœur, ou une fille, de Guillaume le Vieux, de Guillaume le Jeune ou d'Eustache ? L'un des deux derniers (ou les deux) étai(en)t-il(s) encore mineur(s) quand lui (leur) échut sa (leur) charge ? Aurai(en)t-il(s) alors été supplanté(s), ne serait-ce qu'un moment, par une sœur aînée (ou même leur mère, re-) mariée au flamand ? Les droits de Guy s'éteignirent-ils par sa mort, ou par celle de sa femme, comtesse en titre ? Est-il seulement venu prendre possession effective de son comté, ou a-t-il été évincé avant même d'arriver ? Toutes ces questions resteront probablement à jamais sans réponse.
29Nous voudrions terminer cette évocation, en nous demandant s'il n'était pas étonnant, à la fin du XIe siècle, qu'un cadet d'une famille, noble mais encore modeste, du nord de la France, épousât la fille, ou la sœur, d'un comte du centre du royaume, dont la puissance était quasi dérisoire, depuis le repli sur le seul Forez, après la perte des possessions lyonnaises ? Autrement dit, en plus de ce mariage, existait-il alors d'autres relations suivies, entre ces deux régions ?
30La Première Croisade procura de nombreuses occasions de rencontre entre les nobles de tout l’Occident. Ainsi Belle-forêt rapporte-t-il que le comte de Vermandois, frère du roi Philippe, s'étant croisé le premier, fut vite entouré de beaucoup d'autres, tels Guillaume de Forez, ou un certain "Arnoud, comte de Guines, selon Favyn"31. En réalité, cet Arnoud n'était que sire d'Ardres, vassal du comte de Guines, mais il lui était proche, puisque son fils devait épouser, plus tard (en 1140), la petite-fille et seule héritière de son suzerain32. Il est certain que le comte de Forez eut le temps de connaître et de fréquenter, à Constantinople, des nobles du Nord, arrivés depuis Pâques 1097 avec Godefroy de Bouillon, et que l'armée de Raymond de Toulouse, à laquelle il appartenait, avait rejoints au mois de mai33.
31Un autre indice de contacts entre Forez et provinces septentrionales nous est fourni par l'étude des prénoms. Les historiens des XVIe et XVIIe siècles (Laval, Blondel, Guichenon, Belleforêt, Paradin, La Mure) ont affirmé avoir vu des actes foréziens, des alentours de 1100, aujourd'hui perdus, où apparaissaient, dans la famille comtale, au moins deux dames prénommées Ide et Ide-Raymonde34. Or, en dehors de ces deux exceptions, aucune autre n'apparaît en Forez, du moins avant le XIVe siècle35, tandis que ce prénom est l'un des plus fréquemment rencontrés au nord-est d'une ligne droite qui passerait par Amiens et Mulhouse, comme le montre, avec une particulière prédilection pour la Flandre, la liste dressée par Ulysse Chevalier36.
32Enfin, trois autres preuves témoignent des liens entre Guines et Semur-en-Brionnais, dès la fin du XIe siècle.
33Cette seigneurie de Bourgogne méridionale n'est pas en Forez, mais elle en est toute proche, puisqu'elle en est la voisine immédiate, à la frontière septentrionale du comté. Lambert d'Ardres nous dit que Guy avait deux soeurs : Aelis, l'aînée ; et Gisèle, la cadette12. Or, Monsieur J. Richard a montré qu'Alice épousa Geoffroy IV de Semur (petit-neveu de saint Hugues, abbé de Cluny)37, et non pas Geoffroy II (frère de cet abbé) comme l'avait cru Ménilglaise38, d'après Lambert qui, lui, dit seulement qu'elle était mariée à "Galfrido de Samurense"39.
34En second lieu, c'est parce qu'Aelis, dame de Semur, avait, sur ses terres, le prieuré de moniales de Marcigny, à moins de dix kilomètres du Forez, que son frère, le comte Manassès en imposa la règle au couvent de Saint-Léonard qu'il fonda à Guines, entre 1117 et 1120. En 1129, sa femme Emma et lui passèrent un accord avec Jean, abbé de Saint-Bertin de Saint-Omer40 pour que celui-ci se chargeât de faire gouverner le nouveau monastère par ses moines, mais "suivant la règle de Marcigny"41.
35Enfin, et peut-être surtout, la mort de Manassès, en 1137, ouvrit une période troublée, car sa seule héritière, sa petite-fille Béatrice de Bourbourg, eut quelque mal à tenir son comté, avant de mourir, sans postérité, en 1141. Une âpre compétition s'engagea alors entre les deux neveux de Manassès, Geoffroy V de Semur, le fils d'Aelis, et Arnoul de Gand, le fils de Gisèle. Le Forez ne prit pas part à la lutte, ce qui confirme encore que le comte Guy Ier n'avait aucun lien de parenté avec les Guines. Le sire de Semur prétendit à la succession de Manassès, comme fils de l'aînée de ses sœurs, déjà décédée, et Arnoul en tant que fils de la cadette, encore en vie. Le bourguignon monta une expédition avec quelques compagnons et marcha sur Guines, mais il dut lâcher prise et battre en retraite, faute de soutiens efficaces sur place. Le gantois l'emporta facilement, soutenu par toute la noblesse de la région qu'il s'était, depuis longtemps, attaché par des liens familiaux et matériels42. Cet échec du sire de Semur devant Guines ne serait-il pas la répétition de ce qu’avait peut-être connu son oncle Guy, en Forez, trente ans plus tôt ? On peut, du moins, poser la question.
36Finalement, que conclure ?
37Malheureusement, peu de choses sont solidement établies, concernant Guy de Guines. Troisième (ou quatrième ?) fils du comte Baudouin Ier et de sa femme Adèle, il est vraisemblablement né autour de 1060 (avec une approximation de sept ou huit ans, en-deçà ou au-delà). Il a probablement épousé une fille ou une soeur de l'un des trois derniers comtes de la dynastie forézienne des Artauds (Guillaume le Vieux ou Guillaume le Jeune ou Eustache). Il a porté le titre de comte de Forez, du chef de sa femme, pendant une brève période, nécessairement comprise entre 1097 et 1115 et, plutôt après 1107 ; mais on ne sait pas s'il en a réellement exercé la puissance ; en tout cas, aucun acte forézien qui nous soit parvenu n'y fait référence. Il ne doit pas être confondu avec Guy Ier et n'est pas la souche des comtes de la troisième race, traditionnellement dite "d'Albon", puisqu'il est mort sans postérité, à une date inconnue, mais antérieure à 1137.
38Du moins, ces quelques renseignements, même très lacunaires, permettent de réduire à néant les hypothèses généalogiques proposées par les historiens des XVIe et XVIIe siècles. Pour Duchesne, "première manière", il aurait épousé une fille de Guillaume le Vieux, ce qui n'est pas invraisemblable ; mais il serait la souche de tous les comtes suivants, ce qui est impossible43. Rappelons que, plus tard, Duchesne a, tout simplement, renoncé à identifier le "Forois" dont Guy aurait été comte. Pour La Mure qui assène ses affirmations, sans preuves, l'épouse de Guy aurait été l'aînée des enfants de Guy Ier (le second, qui était un garçon, aurait embrassé la carrière monastique chez les Chartreux, en 1135 ; et Guy II n'aurait été que le troisième)43. Cette hypothèse est totalement invraisemblable, car elle ferait marier Guy, né vers 1060, avec une demoiselle née vers 1115 ou 1120.
Notes de bas de page
1 Ardres, Pas-de-Calais, a. Saint-Omer, ch.l.c.
Guines, Pas-de-Calais, a. Calais, ch.l.c.
2 Arnoul de Gand, petit-fils du comte de Guines Baudouin Ier (mort en 1091) par sa mère Gisèle, devient comte en 1141, à la mort sans postérité, de sa cousine Béatrice de Bourbourg. Fondateur de la seconde race des comtes de Guines, dite "de Gand", cet Amoul meurt en 1169. Son fils Baudoin II (mort en 1205) qui lui succède est le père d'Arnoul (mort en 1220) qui commande une histoire de sa famille à son parent, le curé Lambert (cf. infra, note 5, G. de Ménilglaise, p. XXXII).
3 A. Molinier, Sources de l'Histoire de France depuis les origines jusqu'en 1789, Paris, 1902, II, p. 160-161, V, p. LXXXVII.
4 G. Duby, Hommes et structures du Moyen Age, Paris-La Haye, Mouton, 1973, p. 267-285.
5 A. Duchesne, Histoire généalogique des Maisons de Guines, d'Andres, de Gand et de Coucy, Paris, 1631, a édité des fragments du manuscrit latin, de la fin du XVIe siècle, de l’Historia comitum Ghisnensium de Lambert d'Ardres, conservé à la B.N. (ms. lot. 5996).
G. de Ménilglaise, Chronique des comtes de Guines, par Lambert d'Ardres, avec texte, traduction, notes, cartes, glossaire et tables, Paris, 1855.
6 G. de Ménilglaise, op. cit., notes, p. 418.
7 A. Duchesne, op. cit., p. 17.
8 M. Gysselling, Toponymisch Woordenbroeck van België, Nederland, Luxemburg, Noord-Frankrijk en West-Duisland (vôr 1226), Belgisch Interuniversitair Centrum voor Neelandistieck, 1960, deel I : A-M.
9 On relève les sept mentions suivantes : apud Forois villam (dernier tiers du XIIe siècle) à Forenville (Nord, a. et c. Cambrai) ; villam Forest nominatam (1180) à Forest-en-Cambrésis (Nord, a. Avesnes-sur-Helpe, c. Landrecies) ; Forest (1197) à Forest-sur-Marque (Nord, a. Lille, c. Lannoy) ; Forest mostier (1175) à ForestMontiers (Somme, a. Abbeville, c. Nouvion-en-Ponthieu) ; Forest (1105) à Forest-lesFrasnes (Belgique, prov. Hainaut, a. Ath) ; Foris villa (1149) à Forville (Belgique prov. et a. Namur) ; Foron (1079), Furen (1083), Forun (1084) à Fouron-le-Comte (Belgique, prov. et a. Liège). C'est sans doute aussi de ce dernier Fouron qu'il s'agit, dans Gallia christiana (Paris, 1876 ; III, p. 916 E), en 1133, à propos de Steppo de Manies, "frère de Thibaud, comte de Foron" (frater Theobaldi comitis Foron).
10 Villehardouin, La conquête de Constantinople, éd. E. Faral, Paris, Les Belles Lettres, 1973, I, p. 46 et 52.
11 Guillaume de Tyr, Historia rerum in partibus transmarinis gestarum (1. III, ch. V), éd. J.-P. Migne, Patrologie latine, CCI, col. 279 ; ou éd. Recueil des Historiens des Croisades, Acad. Inscr. et B.L., Paris, 1844, I, p. 118.
12 Manasses postea Ghisnensis cornes, Fulconem in terra promissionis comitem apud Baruth ibique demum sepultum, Guidonem comitem de Forois sed in Andria sepultum, Hugonem Moriniensis ecclesiae archidiaconum sed postea militem et in Andria similiter sepultum, Adelinam quoque Samurensem et Ghislam Gandevensem (G. de Ménilglaise, op. cit., p. XXV, 63-65). Andres, Pas-de-Calais, a. Calais, c. Guines. Moriniensis : de Morinie, territoire gaulois correspondant à l'actuel Boulonnais, dont la capitale Tarenna est devenue Thérouanne. Samurensem : de Semur-en-Brionnais, Saône-et-Loire, a. Charolles, ch.l.c.
13 Hasnon, Nord, a. Valenciennes, c. Saint-Amand-les-Eaux.
14 A. Duchesne, op. cit., Preuves, p. 19.
15 Concedentibus filiis suis Manasse, Fulcone, Hugone, Vuigone (A. Duchesne, op. cit.. Preuves, p. 25).
16 Vivente Balduino comite Gisnensi et concedente et concedentibus filiis eius Manasse, Fulcone, Vuidone (A. Duchesne, op. cit., Preuves, p. 28).
17 G. de Ménilglaise, op. cit., p. XXXII et ch. XXXIII.
18 G. de Ménilglaise, op. cit., p. XXXII et ch. XLIX.
19 Fratres sui... omnes sine corporis sui herede mortui fuerunt et sepulti (A. Duchesne, op. cit., Preuves, p. 32).
20 In Andriae monasterio ubi omnes Ghisnensis terrae comites et eorum filii sepeleri debent (A. Duchesne, op. cit., Preuves, p. 33).
21 Balduino... in ea quam fiundavü ecclesia cum... uxore sua Adela... cum duobus filis Widone et Hugone Andriae sepultus est (G. de Ménilglaise, op. cit., p. XXXII et 82-83).
22 Vers 1078, Artaldus cornes Forensis (Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, éd. A. Bernard, A. Bruel, 6 vol., Paris, 1876-1903 ; charte no 3559). En 1079, Artaldus cornes Forisiensis (Cartulaire de l'abbaye de Savigny et petit cartulaire de l'abbaye d'Ainay, éd. A. Bernard, Paris, 1853 ; charte de Savigny, no 757).
23 Hoc quod pater Willelmus fecit, nos filii ejus videlicet Willelmus et Eutachius (Chartes du Forez antérieures au XIVe siècle, éd. G. Guichard, Cte de Neufbourg, E. Perroy, J.-E. Dufour, M. Gonon, E. Fournial, 24 vol., Mâcon, Paris, 1933-1980 ; no 1286).
24 Si l’on en croit G. Paradin de Cuysaulx qui assure avoir vu une "pancarte... fort belle", émanant "d'un comte Willelmus... (qui) vivoit l'an mil cent sept" (Mémoires pour l'histoire de Lyon, 1573, p. 111-112).
25 Obituaires de la province de Lyon, éd. G. Guigues, J. Lambert, Paris, 1951-1965, t. I, fasc. 1, p. 88.
26 Datum apud Botheonem anno domini millesimo centesimo decimo quinto (Chartes du Forez, op. cit., no 911).
27 Chartes du Forez, op. cit., no 912.
28 Ego Humbertus de Belloioco volo... quod Guigo cornes Forensis nepos meus (Chartes du Forez, op. cit., no 1564).
29 Ego Umbertus Bellijoci... a Guigone comite Forensi... quia prefatus cornes jure hereditario pro maire mecum succedere debet (Chartes du Forez, op. cit., no 13).
30 P. Louvet, Histoire de Beaujolais ; manuscrits inédits des XVIIe-XVIIIe siècles, éd. L. Galle, G. Guigue, 2 vol., Lyon, 1903, I, p. 218.
31 Favyn, suivi en cela par Belleforêt et La Mure (cf. infra, note 33), se trompe. Pendant la première croisade, le comte de Guines n'était pas Arnoud, mais Manassès dont Lambert ne dit pas qu'il se croisa, alors qu'il l'aurait fait si ce comte était passé outremer.
32 Arnoul II, dit le Vieux, sire d'Ardres de 1094 à 1139, se croisa en 1096 (Dictionnaire historique et archéologique du département du Pas-de-Calais, Arras, 1877, I, p. 227).
33 J.-M. de La Mure, Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez, éd. R. Chantelauze, 3 vol., Paris, 1860-1868, I, p. 108-109, cite Belleforêt (Annales, liv. I, ch. XXX).
34 J.-M. de La Mure, op. cit., I, p. 104.
35 Chartes du Forez, op. cit., Tables.
36 U. Chevalier, Répertoire des sources historiques du Moyen Age : Bibliographie, Paris, 1905. Au mot "Ide", on trouve, pour les seuls XIe et XIIe siècles : Se Ide (1156-1226), fille du comte de Kirschberg, épouse du comte de Toggenburg, honorée le 3 novembre ; Be Ide (c. 1040-1113), fille de Godefroy II, duc de Lorraine, épouse d'Eustache II, comte de Boulogne, mère de Godefroy de Bouillon, honorée le 13 avril ; Be Ide de Hohenfels (morte fin XIIe siècle), honorée le 24 février ; Ide (morte en 1026), comtesse de Habsbourg ; Ide (XIe siècle), fille d'Henri II, comte de Louvain, épouse de Baudouin II, comte de Hainaut ; Ide (morte en 1216), fille de Mathieu d'Alsace et de Marie (comtesse de Boulogne), épouse de Géraud, comte de Guldre, puis de Berthold, duc de Zähringen, enfin de Renaud, comte de Dammartin ; Ide, comtesse de Mons avant 1115 ; Ide (XIIe siècle), fille d'Otton II, comte de Chiny, épouse de Godefroy, duc de Brabant.
37 Le cartulaire de Marcigny-sur-Loire. Essai de reconstitution d'un manuscrit disparu, éd. J. Richard, Paris, 1953. Marcigny-sur-Loire, Saône-et-Loire, a. Charolles, ch.l.c.
38 G. de Ménilglaise, op. cit., notes, p. 418.
39 G. de Ménilglaise, op. cit., p. XXV et 65.
40 Saint-Omer, Pas-de-Calais, ch. 1. a.
41 Secundum ordinem et consuetudines monalium de Marcilliaco (Les chartes de Saint-Bertin, éd. D. Haigneré, Saint-Omer, 1886, I, p. 63.
42 G. de Ménilglaise, op. cit., p. LXII et 144-147, notes p. 429. A. Duchesne, op. cit., p. 58, Preuves p. 88.
43 J.-M. de La Mure, op. cit., I, p. 153.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Marquer la ville
Signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie-xvie siècle)
Patrick Boucheron et Jean-Philippe Genet (dir.)
2013
Église et État, Église ou État ?
Les clercs et la genèse de l’État moderne
Christine Barralis, Jean-Patrice Boudet, Fabrice Delivré et al. (dir.)
2014
La vérité
Vérité et crédibilité : construire la vérité dans le système de communication de l’Occident (XIIIe-XVIIe siècle)
Jean-Philippe Genet (dir.)
2015
La cité et l’Empereur
Les Éduens dans l’Empire romain d’après les Panégyriques latins
Antony Hostein
2012
La délinquance matrimoniale
Couples en conflit et justice en Aragon (XVe-XVIe siècle)
Martine Charageat
2011
Des sociétés en mouvement. Migrations et mobilité au Moyen Âge
XLe Congrès de la SHMESP (Nice, 4-7 juin 2009)
Société des historiens médiévistes de l’Enseignement supérieur public (dir.)
2010
Une histoire provinciale
La Gaule narbonnaise de la fin du IIe siècle av. J.-C. au IIIe siècle ap. J.-C.
Michel Christol
2010