Chapitre 6. Le « sérail ébranlé1 »
p. 209-237
Texte intégral
1Ramaḍān 1833. Les esprits s’échauffent au Bardo. Les affres du jeûne tendent à l’extrême les nerfs des serviteurs. Le chef des mamelouks du palais tempête au petit matin. Les muchachos napolitains censés servir le repas de fin de nuit à ses hommes ne se sont pas réveillés. Ils n’ont pas même entendu la fanfare du palais. Le chef des mamelouks du vestibule, Muṣṭafā Bāš-Mamlūk, ordonne qu’ils soient châtiés sur-le-champ, jusqu’au sang. La bastonnade qui est infligée à neuf d’entre eux sur un groupe de soixante employés napolitains au Bardo2 est si violente que les domestiques fuient, les jambes estropiées, vers la maison de leur consul. La mort dans l’âme, ce représentant se résigne à demander au bey d’infliger un blâme au chef de ses mamelouks. Puis les positions se durcissent. Une escadre napolitaine est dépêchée vers Tunis pour orienter le bey Ḥusayn dans la bonne voie. Les anciens domestiques obtiennent plus que satisfaction contre leurs supérieurs : Muṣṭafā Bāš-Mamlūk est, un temps, mis aux arrêts.
2Une bonne partie des muchachos sortis du palais, certains mamelouks invitent les plus jeunes de leurs corps à servir les plus âgés. D’autres ne veulent pas même entendre parler d’une telle alternative. Ils jugent n’être là que pour honorer leur maître. Tout autre service entacherait la considération qu’ils estiment tirer de leur proximité au souverain. Il leur faut, jurent-ils, pas moins que des salariés à leur service. Le bey suit ce dernier avis : il craint qu’à leur tour des domestiques mamelouks d’origine étrangère ne demandent leur liberté et ne trouvent refuge auprès de consuls européens. Des « gens parmi les enfants du royaume » sont donc recrutés. Ibn Abī al-Ḍiyāf explique ce choix par une formule d’une ironie des plus tragique : « Que l’un d’eux ait la tête cassée, il n’aurait personne pour le pleurer : il ne pouvait mettre son espoir que dans l’aide de Dieu, le seul, l’unique3. »
3Tout est dit dans ces derniers mots. Tout se concentre dans cette affaire en apparence quotidienne des muchachos. Les moindres désordres domestiques, la négligence de valets chrétiens, la brutalité d’un chefaillon, l’arrogance de mamelouks et le mépris pour les muchachos prennent une dimension démesurée, avec la montée en puissance des nations européennes et de leurs représentants. Un service de sérail est désorganisé par les protections qu’accordent les consuls, par leurs immixtions dans les relations de dépendance.
4Les équilibres sont sans cesse à réaménager, d’abord avec l’affranchissement de chrétiens qui se placent sous la tutelle de leurs autorités d’origine, puis avec leurs départs, et enfin lorsque les maîtres du sérail se résolvent à recruter des autochtones. Le dernier choix révèle alors un bouleversement majeur : le recours aux chrétiens et aux mamelouks est devenu si problématique qu’il est préférable d’engager de modestes sujets ne pouvant émettre leurs plaintes uniquement auprès des beys. L’entrée des enfants du pays dans la domesticité du palais n’est pas volontaire. C’est un choix par défaut. Le sujet autochtone accède à certains métiers du sérail lorsqu’une catégorie de dépendants disparaît, quand il se révèle plus malléable et corvéable qu’aucun autre, à l’exception des ‘abīd noirs.
5Tout s’entremêle dans ce scandale de sérail : désorganisation interne et pressions externes. Et ces deux dynamiques seront, à partir de maintenant, le plus souvent isolées afin de distinguer ce qui a trait à une adaptation constante du mameloukat de ce qui relève des facteurs de dérèglement, de dissolution et de lente disparition de ce corps de dépendants au moment où la relation de service doit être reformulée, au temps des réformes, après 1830.
LES TROUBLES INTÉRIEURS
L’exécution de deux vizirs
6Parmi les éléments de perturbation de l’ordre mamelouk, les exécutions des vizirs Yūsuf et Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ en 1815 et en 1837 constituent les épisodes les plus spectaculaires. Mais, à y regarder de plus près, déchargés de leurs secousses violentes, ces renversements éclairent davantage un phénomène de régulation interne qu’ils ne consacrent une irrémédiable remise en cause du système du favori. Ramenées à de plus justes proportions, les chutes des vizirs s’accompagnent de la formation de coalitions adverses de mamelouks, de la redéfinition des champs d’autorité de leurs successeurs et de la remise en selle des princes héritiers dans des querelles de primauté.
7Yūsuf et Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ ont exercé un certain ascendant sur leurs maîtres4. Lucide, Ḥammūda Bāšā avertissait Yūsuf : « Aucun d’autre que moi ne peut te souffrir, tu ne vivras pas plus de quatre mois, après moi5. » Moins sûr de lui, le bey Ḥusayn dévoilait une plus grande dépendance dans la correspondance nourrie qu’il entretenait avec son serviteur. À chaque absence, le prince ne cachait pas son plus grand désir de revoir Šākīr6. Il consultait son vizir à tout propos, y compris lors de ses déplacements sur des sujets majeurs comme sur les menues questions, sur les relations avec la France7 comme sur les chevaux de la maḥalla8. Il rechignait à agir sans disposer de son vizir à ses côtés9 et pouvait attendre son retour pour régler une affaire10. Il se refusait à ouvrir une lettre qui était adressée en propre à son favori11 et faisait ouvertement part de ses scrupules à garder en son sérail une jāriya de son vizir dont il jurait n’être pas certain de garantir la sécurité12. Šākīr voulait connaître les noms des interlocuteurs quotidiens du bey et la teneur de leurs échanges13. Il osait même s’ouvrir par écrit des faiblesses de son protecteur14.
8Après le décès de Ḥammūda Bāšā, Yūsuf Ṣāḥib al-Ṭābi‘ eut beau considérer qu’il était relégué à la fonction de khaznadār par ‘Utmān Bey, le vizir déchu demeura dangereux pour l’entourage de Maḥmūd Bey15. Survivant à Ḥusayn Bey, Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ refusa à l’inverse de taire ses ambitions. En 1837, il fit pâlir son nouveau maître, Muṣṭafā Bey, lorsqu’il proposa de sanctionner en personne les Tunisois qui avaient refusé la conscription, pour les faire payer l’un après l’autre sur la place de la casbah le double de ce qu’il avait obtenu lors de la répression des Kairouanais16. Selon le récit peu amène d’Ibn Abī al-Ḍiyāf, durant ces derniers jours, Šākīr ne se serait plus embarrassé de prudence. Le Ṣāḥib al-Ṭābi‘ « creusait sa propre tombe » à vouloir se mêler des affaires des troupes régulières placées par le bey entre les mains de son fils Aḥmad17. « Il alla jusqu’à imaginer que s’il quittait sa fonction, on ne trouverait personne pour le remplacer18. »
9Dans les deux cas, les risques de subversion et d’usurpation furent plus dramatisés et fantasmés qu’assurés. Dans le cas de Yūsuf Ṣāḥib al-Ṭābi‘, d’après le chroniqueur Ibn Abī al-Ḍiyāf, le favori al-‘Arbī Zarrūq impliqua des soldats qui vinrent dénoncer les prétentions du vizir auprès du dey. Dans le cas de Šākīr, en revanche, Ibn Abī al-Ḍiyāf se fit un devoir d’avaliser toutes les accusations. Selon le récit déroulé dans l’Itḥāf, le Ṣāḥib al-Ṭābi‘ ne chercha pas à se saisir du trône. Il voulut se prémunir du pire, « se tirer d’affaire ». À cette fin, il s’entendit avec des officiers de la région de Sousse. Les hommes d’armes s’engagèrent « à se soulever » s’il les rejoignait en compagnie de Muḥammad Bey, un des fils de son maître défunt, qui avait pourtant la réputation d’être hostile au vizir.
10D’après une autre affirmation étrange, Šākīr s’ouvrit de son projet auprès de Muḥammad b. Malūka. Ce šaykh cita un proverbe des plus dissuasif : « Celui qui tire le glaive de l’injustice périra par lui ; et celui qui allume le feu de la révolte sera brûlé par lui. » Puis il avertit l’ennemi du vizir, le bey Aḥmad, confirmé dans ses soupçons par un militaire. Huit jours après l’exécution de Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, le consul de France ne cachait pas son scepticisme. Le 19 septembre 1837, Schwebel relevait que la « réalité de cette conspiration est niée ou mise en doute […] par beaucoup de personnes […] aucune véritable preuve n’en ayant encore été fournie ». Il n’admettait qu’une probable intelligence avec la Sublime Porte : le 23 août, le Capitan Pacha avait fait escale à Tunis. Les débuts d’une quarantaine avaient amené ce dignitaire ottoman à solliciter une entrevue avec Šākīr19.
11Fragiles, les accusations de conspirations légitimaient, malgré tout, des peines capitales appliquées dans une logique de restauration de l’ordre et de la cohésion de la maison beylicale. Dans ces perspectives, la forme des exécutions devait obéir à des règles d’usage. Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, lui-même, ne devait subir « aucun affront ni aucun traitement infamant ». Une pièce fut préparée pour recueillir son dernier soupir. Il y fut escorté par deux mamelouks, Farḥāt et Aḥmad, le frère de Muṣṭafā Khaznadār. D’autres mamelouks conduits par l’uḍā-bāšī, Muḥammad al-Ṭabarqī, les relayèrent. Le condamné « leur recommanda d’enduire la corde de savon afin qu’elle s’enfonçât plus facilement dans son cou et que sa mort fût rapide ». Le cercueil du vizir fut escorté par des ḥānba et des mamelouks eu égard à son rang. Et Muṣṭafā Bey, très affecté, refusa d’évoquer la mémoire du défunt en compagnie du consul de France20.
12Les épisodes d’exécution devaient rétablir l’unité de la maison husaynide dans l’esprit de ses membres. Avant de faire disparaître le mamelouk de son frère, Muṣṭafā Bey prit à partie son entourage : « Accepteriez-vous que Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ teigne mes cheveux blancs de mon propre sang et qu’il allume le feu de la discorde à l’intérieur de ma Maison et entre mes fils21 ? » Ces événements violents participaient donc de l’adaptation constante de l’ordre mamelouk à l’autorité de la dynastie husaynide. Mais la purge ne ramenait pas le sérail à son premier état. L’ensemble des mamelouks et les princes ne sortaient pas indemnes de ces disgrâces brutales, au propre comme au figuré. Muṣṭafā Bey aurait avoué que le supplice de son serviteur avait affecté sa santé. Il confia à un qādī que « le tué avait corrompu [son] sang22 ».
13Ces usages commençaient à démontrer leurs limites : mis en avant afin de consolider et d’étendre la puissance de la famille beylicale, jusqu’à quel point des vizirs pouvaient-ils promouvoir leurs intérêts sans menacer ceux de leurs maîtres ? Le maintien de vizirs promus par des prédécesseurs n’était pas exempt de dangers pour les successeurs, mais cette inclination à promouvoir de proches serviteurs à d’aussi hautes positions ne fut pourtant pas abandonnée. Les positions de premiers favoris et de vizirs les plus écoutés devaient revenir aux hommes de confiance, aux principaux défenseurs de la dawla contre de prétendues conjurations.
14Ces révolutions de palais révélaient un second motif de perturbation des rangs mamelouks : des coalitions et des divisions au sein de leur ordre, à la fois plus rentrées, plus feutrées en temps ordinaires et plus récurrentes, en tout cas mieux repérables dans la première moitié du xixe siècle.
Rivalités et antagonismes parmi les mamelouks
15Les coalitions et divisions de mamelouks ne sont pas aisées à reconstituer pour les dernières décennies du xviiie siècle et le début du xixe siècle. Pour cette période, la chronique d’Ibn Abī al-Ḍiyāf laisse soupçonner des fragments de rivalités, des affrontements épisodiques d’ambitions personnelles. Le plus apparent des antagonismes oppose Yūsuf Ṣāḥib al-Ṭābi‘ à Muṣṭafā Khūjā, l’ancien vizir de ‘Alī Bey. Cette rivalité survécut à l’un, puis à l’autre des vizirs. Al-Ḥajj Ḥasan Khaznadār, le mamelouk qui dénonça les néfastes projets de Yūsuf Ṣāḥib al-Ṭābi‘ à l’oreille de Maḥmūd Bey et trempa dans les manœuvres de al-‘Arbī Zarrūq, était surtout connu pour avoir auparavant obéi à feu Muṣṭafā Khūjā23. À sa suite, Ḥusayn Bāš-Mamlūk, une des créatures de Yūsuf Ṣāḥib al-Ṭābi‘, s’en prit à al-‘Arbī Zarrūq. À ces coalitions perpétuées par la rancœur se greffaient bien d’autres tensions plus sporadiques. Sous le règne de Ḥammūda Bāšā, le mamelouk Dilāwār voulut nuire à Khayr al-Dīn Kāhiya. Il l’accusa de vouloir assassiner son maître. Le kāhiya fut longtemps incarcéré. Il ne fut affranchi qu’à l’avènement de ‘Utmān Bey et ne retrouva la faveur que sous Maḥmūd Bey. Pour sa part, Dilāwār finit ses jours au milieu des années 1830, banni sur l’île de Djerba24.
16Ces divisions dans le corps des mamelouks furent motivées avec une plus grande netteté par des solidarités et des oppositions ethniques25, sous le vizirat de Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘. Les serviteurs du Bardo ne se comparaient certes plus aux reniés tunisois du xviie siècle. Ils ne se regroupaient plus au gré des quartiers, par nations italiennes, françaises, espagnoles et nord-européennes. Désormais, ce sont les Caucasiens, Géorgiens et Circassiens qui mettaient un point d’honneur à se distinguer des autres agents du bey, à bien proclamer leur supériorité. À en croire Ibn Abī al-Ḍiyāf, Šākīr et certains de ses contemporains considéraient que toute « promotion était réservée aux mamelouks géorgiens et circassiens ; oubliant, ce faisant, l’ascendance [nisba] [moldave] du vizir […] Yūsuf Ṣāḥib al-Ṭābi‘. Ils sous-estimaient les capacités des mamelouks grecs [rūm] et des enfants du pays26 ». Le caractère passionnel et orageux des liens que Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ entretenait avec Muḥammad Khaznadār témoigne de ces antagonismes ethniques.
17Le dignitaire circassien avait distingué le mamelouk d’origine grecque en le choisissant comme bras droit mais un trait de son caractère, son insatisfaction permanente, ses fortes exigences rendirent son service des plus ardu… Le Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ pouvait donner du « mon fils », du ibnī aux débuts de fréquentes lettres adressées à Muḥammad Khaznadār, après quelques lignes, il rudoyait son agent. Dans une missive de la fin de l’année 1830, le vizir engageait son trésorier à mobiliser des fonds de sources variées, tout en lui interdisant d’en appeler au bey et surtout de « poser [sa] main » sur l’argent de l’hôtel de la monnaie. Ses capacités devaient ainsi lui être révélées au grand jour. Dans le cas contraire, avertissait le Ṣāḥib al-Ṭābi‘, « vous n’avez pas à vivre parmi nous27 ». Lorsque, à l’été 1832, leur échange épistolaire laissait à nouveau des traces, on retrouvait Šākīr dans un état de grande colère. Début juillet, il reprochait à Muḥammad de n’en faire qu’à sa guise, de ne pas l’informer de l’état des finances et, surtout, d’avoir fait venir sa mère à ses côtés sans l’avoir prévenu28. Le Khaznadār avait beau s’être ouvert le plus simplement du monde de cette arrivée le 25 juin, ce second mobile d’insatisfaction éclairait l’animosité régulière du vizir et les motifs d’une tension ethnique qui se confirma par la suite.
18Les Grecs, et parmi eux Muḥammad, avaient afflué à Tunis dans les années 1820, avec la répression de leur mouvement d’« indépendance », selon les Européens, de « rébellion », selon les autorités ottomanes. Et voici qu’en une seconde vague, des parents rejoignaient les enfants dans la régence. Si le frère de Muḥammad était resté à Izmir, un certain Ḥasan, mamelouk de Sīdī al-Ṣaġīr, avait non seulement fait venir la mère du Khaznadār, mais aussi accompagné la sienne ainsi que sa sœur dans la traversée de la Méditerranée29. Des Circassiens et a fortiori des Géorgiens, inscrits depuis des décennies dans de longues traites, renommés pour leurs qualités de service, plus éloignés que les Grecs de leurs foyers d’origine, pouvaient, dans ces conditions, se vanter de leur loyauté, de leur fidélité confirmée dans la durée et par ailleurs s’estimer lésés et menacés par un nouveau groupe de mamelouks.
19Récurrentes, déployées dans le cadre des palais, mais porteuses d’instabilité, ces rivalités ethniques se rapprochaient de l’autre perturbation interne : de la montée en puissance cyclique des vizirs. Les antagonismes entre serviteurs et les excès de puissance des plus distingués d’entre eux étaient le fruit et la source des adaptations d’usages des mamelouks. Ce sont les beys et leurs intimes qui introduisaient et distinguaient de nouvelles figures dans le sérail. En retour, les concurrences s’attisaient dans une quête de la faveur princière. Une mémoire de sérail s’est bâtie au fil de ces disgrâces et de ces factions, fixée à l’écrit par des chroniqueurs tels qu’Ibn Abī al-Ḍiyāf. Des protégés perpétuaient les inimitiés jusqu’à les épuiser, jusqu’à leur trouver d’autres motifs personnels ou ethniques. Tout cela donc n’était qu’un jeu d’équilibres et de puissances comparés à des secousses extérieures qui furent autrement plus déstabilisatrices pour le corps des mamelouks à partir des années 1810, telles que les restrictions progressives de la traite des Latins et des Caucasiens, les extensions de protections consulaires et les recrutements d’Européens à titre d’experts étrangers des armes et des sciences.
LES ONDES DE CHOC
La fin des traites d’esclaves européens
20Initiés dès le xviie siècle par les missions de rachat des rédempteurs et des consuls, les efforts de réduction des traites d’Européens sont dans la première moitié du xixe siècle rythmés, à échéance régulière, par des accords et des proclamations solennelles : en 1816, lors la première croisière de lord Exmouth ; en 1830, dans le corps d’un traité avec la France, et enfin en 1846, au terme d’initiatives graduées du bey Aḥmad contre les traites. Aussitôt posées, ces déclarations de principes n’affectent pas directement le corps des mamelouks. Les beys ne se passent pas de jeunes mamelouks du jour au lendemain. Ils détournent leurs recherches au fil des conjonctures méditerranéennes vers une aire grecque et des foyers orientaux plus éloignés, jusqu’à ce que ces dernières sources se tarissent et que les flux en hommes, puis en femmes s’amenuisent.
Les effets des accords diplomatiques
21L’expédition commandée par lord Exmouth en 1816 ne vise pas de front les corps des mamelouks des beys de Tunis ou de Tripoli. Cette mission de diplomatie armée naît cependant au temps des combats abolitionnistes, dans une Angleterre heurtée par le maintien d’un esclavage « blanc » au sud de l’Europe30. Elle est lancée pour apaiser l’indignation que des corsaires tunisois avaient soulevée après le rapt de 120 civils à Saint-Antioche, le 15 octobre 181531. Elle trouve place, enfin, dans le cadre d’une diplomatie britannique qui, pour consolider une primauté navale, s’empresse de répondre à la résolution unanime du congrès de Vienne contre la course et l’esclavage en Méditerranée32.
22Parvenue sur les côtes de Barbarie, début avril 1816, l’escadre anglaise ne retire pas les renégats à leurs maîtres, elle réduit pourtant quelques-uns des flux qui nourrissaient encore les effectifs de ces convertis. Une partie des Italiens ne seront plus compris parmi les captifs chrétiens qui pouvaient être tentés par le passage au service de princes musulmans. Les chefs des trois régences barbaresques signent des accords de paix avec les royaumes de Piémont-Sardaigne et des Deux-Siciles33. À Tunis, la délégation britannique obtient a minima l’affranchissement de 473 Napolitains pour 147 900 réaux espagnols34, de 267 Sardes pour 250 piastres par tête35, et la libération de 257 Siciliens et Génois sans bourse délier36. En plus de ces domaines occidentaux, Maḥmūd Bey ainsi que le dey d’Alger se coupent en théorie d’un autre foyer de recrutement oriental : séparément, ils reconnaissent la protection des Britanniques sur les îles ioniennes et leurs habitants37. À Tunis comme à Tripoli, par une concession plus déterminante encore, les captifs chrétiens « ne pourront plus être possédés38 ». En cas de conflit, ils seront désormais considérés comme des prisonniers de guerre et protégés jusqu’à ce qu’une réconciliation ouvre la voie à leur libération sans rançon39.
23Quatorze ans plus tard, en 1830, la révision des traités avec la France entérine le principe de l’abolition de l’esclavage des chrétiens et paraît de nouveau condamner pour de bon une des réserves potentielles du corps mamelouk :
« Si, à l’avenir, le Bey avait la guerre avec un autre État, les soldats, négociants, passagers, ou tous sujets quelconques de cet État qui tomberaient en son pouvoir seraient traités comme prisonniers de guerre, et d’après les usages des nations européennes40. »
24Istanbul a déjà mis fin à l’asservissement des captifs de guerre l’année précédente41. Dans les instructions adressées au consul de Lesseps, le ministère prévoit que les indemnités du bey à ses sujets encore en possession de chrétiens ne lui imposeront pourtant « pas des sacrifices onéreux puisqu’il s’en trouve actuellement très peu dans les Régences barbaresques42 ». Enfin, les négociateurs ont davantage ferraillé sur les modalités de pêche du corail que sur la traite des hommes43.
25Plus que les clauses, c’est l’abandon d’anciens repères qui a pu troubler les serviteurs des beys. Sous les regards des dignitaires du sérail, les circonstances d’élaboration du traité concrétisent le basculement des rapports de force au détriment des beys de Tunis44. La révision du traité a été précédée par l’arrivée de navires de guerre du port d’Alger vers les côtes de Tunis. D’une simple signature, le bey Ḥusayn a dû accepter de mettre fin à la course, aux monopoles commerciaux et aux cadeaux que lui présentaient les consuls45. Comble de l’humiliation : en 1832, c’était aux Sardes, à une nation hier dominée, que le gouverneur de la province devait garantir l’abolition de l’esclavage dans ses États. Par une disposition du traité d’amitié de commerce, « tout sujet sarde qui par hasard se trouverait encore en état d’esclavage sera immédiatement délivré sans aucune espèce de rançon ou d’indemnité46 ».
26Troisième étape : en janvier 1846, dans cette progressive réduction des traites, l’affranchissement général des esclaves présents dans la province47 était censé marquer un nouveau palier. La proclamation n’était cette fois pas seulement dictée de l’extérieur. Elle était décidée par Aḥmad Bey en personne, encouragé – il est vrai – par le consul britannique et soutenu de Malte par des lettres diffusées en arabe et en anglais48. À l’instar de ses devanciers, le maître de la maison husaynide tenta d’abord de se dérober aux désirs anglais. Dans une lettre au consul Thomas Reade, le 29 avril 1841, il niait posséder le moindre esclave car – expliquait-il –, « dans [sa] religion, les restrictions à ce sujet sont si sévères, qu’il se rend [sic]très difficile d’en maintenir les conditions49 ».
27Pressé par le diplomate, il opta ensuite pour une stratégie tout en prudence : en mai 1841, il argua qu’un affranchissement « exigerait du temps et bien des précautions parce que tous les petits propriétaires [ne] cultivent, en quelque sorte, leurs champs qu’à l’aide de nègres50 ». Au cours de l’année, le bey parvint malgré tout à interdire la vente d’esclaves sur le souk, il y fit détruire leur lieu d’exposition. Les ports reçurent l’ordre de ne plus en laisser sortir. En outre, l’État ne préleva plus de droits sur leur commerce51. Il enclenchait dès lors un processus de démantèlement des traites et de leurs structures de vente qui ne pouvait que rejaillir sur l’ensemble des acteurs volontaires et involontaires de ce négoce, jawārī et mamelouks compris. Fin 1842, il infléchissait les relations de service au sein de sa propre maison, « en commençant par libérer en masse les nôtres » afin que cela soit su et rendu public52. Le souverain demandait à un de ses intimes d’en faire autant : Muḥammad b. ‘Ayyād libéra soixante de ses esclaves. Le bey promettait de surcroît que plus aucune créature ne serait offerte aux sultans53. Il rompait, enfin, les chaînes d’asservissement par la filiation en décrétant que « tous leurs enfants [seraient] libres, afin que ceux qui sont nés dans cette Régence ne puissent être vendus ni achetés54 ».
28L’affranchissement général de 1846 remettait en cause l’esprit et les pratiques des relations de dépendance et de patronage. Les motifs invoqués pour légitimer les décisions du bey étaient en effet rattachés à une forme d’égalité et au souffle de « liberté » qu’inspirait le mouvement des réformes. Selon un argumentaire quasi officiel, les esclaves furent d’abord affranchis parce que la majorité des sujets ne se comportaient plus selon les normes religieuses, « avec leurs frères par les descendants d’Adam », et que par ailleurs, le bey voulait « suivre la voie d’une civilisation par la liberté55 ». La proclamation de 1846, comme celles de 1816 et 1830 pouvaient cependant autant être perçues comme des concessions aux pressions occidentales que comme des adaptations, pour perpétuer sous d’autres formes une obéissance aux beys.
Les contournements
29Durant cette période de restriction et d’abolition, les beys et les dignitaires du pays n’ont en effet cessé de s’adapter. Dans ces domaines de la traite, ils ont appris à négocier avec les émissaires occidentaux. Au fil des accords et des traités successifs, il était question de paix, d’affranchissements et, à la rigueur, en 1830, d’abolition partielle en faveur des esclaves chrétiens mais, jamais au grand jamais, d’abolition complète du statut légal de l’« esclavage ». Y. Hakan Erdem, dans son étude sur la fin de l’esclavage dans l’Empire ottoman, insiste sur cette nuance de taille : tous les firmans et toutes les lois des autorités ottomanes ont abouti à mettre fin à une branche particulière de la traite. Aucun accord international n’exigeait une abrogation de principe qui aurait contredit la šarī‘a56.
30Dans leurs efforts de compromis et de restriction des traites, sans toucher à l’essentiel, les sultans à Istanbul et les beys à Tunis à leurs plus modestes rangs ne renonçaient surtout pas à un noyau de clients, aux kul, mamelouks et jawārī qui contribuaient à asseoir leur autorité en leurs sérails et en dehors57. À cette fin, la maison husaynide ne pouvait dépendre des maigres sources occidentales pour renouveler les rangs de ses serviteurs blancs. Les beys se sont aussi approvisionnés auprès d’un centre impérial qui contrôlait les trafics de Caucasiens et de Grecs58.
31À concevoir que les beys dussent encore en passer par les rives nord de la Méditerranée, par les transporteurs européens omniprésents dans les liaisons maritimes avec l’Anatolie, le front européen n’était pas sans failles dans la lutte contre les traites. Des négociants et des agents diplomatiques participaient à la fructueuse contrebande des garçons et des femmes en provenance du Caucase et de l’aire grecque. En 1841 et en 1843, le consul d’Angleterre puis celui de Suède demandèrent à M. Gaspary de ne plus les représenter comme agent au port de La Goulette : « Son nom était impliqué dans l’embarquement d’esclaves de ce lieu, à bord d’un vaisseau grec59. » Cet exemple n’était pas isolé. Pour s’en tenir à la même période, le représentant britannique se faisait l’écho du rôle actif de Français dans des trafics frontaliers d’esclaves à partir des villes de Bône et de Constantine60.
32Si l’expédition de 1816, prolongée en 1819 par l’envoi d’une escadre franco-anglaise, annonça donc le maintien d’une pression européenne sur les traites, contribua au déclin de la course maghrébine et consolida des protections qui s’étendirent aux Romains et aux Toscans61, dans un plus large contexte méditerranéen, les missions d’acquisition de mamelouks au Levant n’en furent pas moins poursuivies de plus belle. Le milicien Muṣṭafā al-Turkī, beau-fils du vizir al-‘Arbī Zarrūq, fut chargé d’approvisionner le bey Ḥusayn en mamelouks en 182262. Le vizir Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ put acquérir onze mamelouks lors d’une mission auprès de la Sublime Porte en 183563. Entre-temps, intermédiaires et agents des beys profitèrent des troubles grecs pour capter des créatures que le sultan avait jugées rebelles à son autorité.
33Il n’est pas aisé de suivre tous ces convois de captifs grecs à partir de Tunis. Certaines pistes clandestines étaient par nature brouillées. Néanmoins, la vingtaine de mentions de débarquements d’hommes et de femmes de ces contrées, retrouvées le plus souvent dans les archives britanniques et tunisiennes, aident à comprendre durant une décennie, entre 1822 et 1832, comment, après les foyers occidentaux, une autre source d’approvisionnement du corps mamelouk fut, avant de s’éteindre, préservée par les beys envers et contre tous les accords diplomatiques.
34Un an après le début de la révolution grecque de 1821 et jusqu’à l’été 1823, des captifs étaient acheminés en toute discrétion. Deux lettres rédigées en italien, datées des 27 mai 1822 et 8 juin 1823, formulaient des suppliques de libération : la première en faveur de « Gerasimo Costantino Foy », natif de Céphalonie64, la seconde pour soulever le cas de « Andrea xilo Caicha », présent au Bardo sous le nom de Muṣṭafā65. En octobre 1822, après avoir rapporté l’arrivée d’enfants sur un vaisseau sarde et un brick maltais, le représentant de l’Angleterre en était encore à se demander si le traité de 1816 pouvait s’étendre aux Grecs ou si ces derniers devaient encore être considérés comme des sujets du Grand Seigneur et de facto du bey de Tunis66.
35La riposte s’organisa à partir de l’été 1823. Par des instructions reçues le 8 juin, le consulat était autorisé à employer un grécophone chargé d’inspecter les navires battant pavillons britannique, ionien ou maltais. L’émissaire devait y débusquer des esclaves hellènes avant que les navires pris en faute ne soient renvoyés vers l’île de Malte67. Parallèlement, une délégation britannique fut dépêchée à Tunis pour, d’une part, réclamer la libération de six garçons transportés sur le brick maltais et, de l’autre, imposer un article additionnel au traité de 1816 interdisant la vente et l’importation d’esclaves grecs68. Sur la défensive, Maḥmūd Bey s’engagea durant la dernière année de sa vie, dans une stratégie du refus et de la négation. Sur le fond, il rejeta une révision de traité qui retirerait les sujets grecs de la protection du Sultan et le ferait apparaître comme un gouverneur rebelle à l’autorité d’Istanbul. Pour la circonstance, il démentit tout transport d’esclaves grecs sur des navires britanniques. Quant aux garçons réclamés, il clamait qu’ils avaient embrassé l’islam avant d’avoir posé le pied à Tunis69. Enfin, un des membres de la délégation, lord Ponsomby, se vit refuser toute rencontre avec ces convertis. Cet aide de camp du roi d’Angleterre prétendait juger les croyances de ces hommes au moment de la conversion70.
36Par la suite, Maḥmūd Bey trouva d’autres parades aux exigences britanniques. Après l’arrivée de trois garçons sur un vaisseau autrichien le 22 juillet, il expliqua que la lettre adressée à ses sujets installés au Levant, pour qu’ils cessent de commercer des captifs grecs ne leur était pas encore parvenue. Il ajouta craindre une révolte turque et que « sa flotte » ne soit saisie par le gouvernement ottoman71. Enfin, quand début octobre, un brick anglais parvint de Smyrne à Tunis, avec à son bord et à la grande surprise du capitaine, deux femmes et un petit enfant grecs, de nouveau, le bey contestait cette version et certifiait que les deux jawārī étaient musulmanes et non grecques et surtout qu’elles devaient épouser ses fils72. Maḥmūd Bey ne parut plier qu’avec l’arrivée d’une escadre anglaise73. Dans une lettre datée du 1er janvier 1824, il promettait :
« Si des esclaves grecs ou chrétiens arrivent ici à l’avenir, nous ne pourront ni les vendre ni permettre à qui que ce soit de les acheter en tant que prisonniers de guerre jusqu’à l’instauration de la paix. [Alors], ils nous rendront ceux qu’ils détenaient et nous leur rendrons ceux dont nous disposions, sans aucune rançon […]. Cela nous le faisons en contradiction avec les ordres de notre maître le Sultan, mais en considération de l’amitié. » qui nous lie à vous74.
37D’après le consul sarde Palma, Maḥmūd Bey mettait à la disposition des autorités britanniques l’ensemble des esclaves grecs, à l’exception des convertis75. Là encore, il s’agissait de sauver ce qui pouvait encore l’être dans les services du palais.
38Cet acharnement à se situer dans une zone grise se fit de nouveau sentir à partir de 1828, année de défaites ottomanes face aux Russes. Au consul britannique qui lui demandait de libérer « .trois Grecs dernièrement apportés. », Ḥusayn Bey répondait le 20 avril, en digne successeur de Maḥmūd, que ces garçons étaient venus à lui en tant que musulmans, sujets du sultan, que leur protecteur mort au combat, il était de son devoir de les conserver en leur foi et de se maintenir dans l’obéissance à son maître d’Istanbul76. En 1830, le représentant de la nation anglaise avait encore à dénoncer une « violation directe des Traités » : l’épouse légitime d’un sujet de Sa Majesté avait été enlevée à Chios, vendue à Smyrne, rachetée par Sulaymān Kāhiya et enfin revendue à l’« Oukil d’Alger », dans le sérail du Bardo77. D’un geste, quand une plainte lui parvenait, le bey s’inclinait devant les diplomates ; de l’autre, en sous-main, il protégeait les agissements illégaux de ses proches : en mars.1832, il ordonnait à son kāhiya de La Goulette des débarquements clandestins de mamelouks et de jawārī destinés à son vizir Šākīr Ṣaḥib al-Ṭābi‘78. Ces chemins détournés ne faisaient que retarder le progressif essoufflement de traites peu à peu limitées à quelques garçons et surtout à des femmes du Caucase.
39Malgré la contrebande et toutes sortes de stratagèmes, les accords et traités firent peu à peu effet et bousculèrent la composition du corps mamelouk. L’apport en jeunes hommes se raréfia. : en 1833, l’agent de Šākīr Ṣaḥib al-Ṭābi‘, en Anatolie, se plaignait de ne rien trouver de convenable79. Six ans plus tard, lors d’une escale à Malte, Muṣṭafā Khaznadār rapportait avoir vu un des trois mamelouks qu’un Djerbien, fils d’un certain Būlaḥiyān, certifiait posséder. Il jugeait l’âge de l’enfant proche de celui de Rustum, mamelouk du Bardo promis à un brillant avenir, mais il ne mentionnait aucun marchandage, aucun transfert de ces garçons80. De façon plus générale, il devenait plus difficile de procéder à des conversions. Entre la fin des années 1830 et le début des années 1840, James Richardson rapportait que trois ou quatre Maltais ne purent devenir musulmans. Des ecclésiastiques et les autorités britanniques en charge de la nation maltaise s’y étaient opposés81.
40Le marché aux esclaves de Tunis se vidait : sur une estrade de « deux pieds et demi au-dessus du sol, entourée de barreaux de bois », au centre d’une « place d’environ trente-cinq pieds de long sur vingt-cinq pieds de large », le chapelain anglican Nathan Davis n’avait trouvé à la fin des années 1830 que « vingt à trente esclaves – des femmes pour la plupart82 ». La traite des jawārī ne se perpétuait qu’en s’en tenant peu à peu aux Caucasiennes et en transformant, auprès des autorités européennes, tout potentiel statut d’odalisque en celui de futures épouses : l’entrée au harem et au service des beys n’était donc désormais acceptée qu’à condition d’être volontaire, qu’à condition de donner lieu à affranchissement.
41En 1853, quatre Géorgiennes retenues sur un brick autrichien n’avaient débarqué qu’une fois affranchies. Par l’intermédiaire du chef des mamelouks du palais, Aḥmad Bey les avait laissées opter entre un retour au pays ou une libération dans la régence. « Melk Kbar », « Husn al-Mulk », « Elbatt » et « Shefk Ennoür » avaient « immédiatement [choisi] de descendre à Tunis et d’y demeurer, avec la condition de recevoir leur liberté83 ». Cette conduite était devenue si commune qu’au milieu du xixe siècle elle justifiait, auprès de dignitaires du beylik, l’apport de femmes « devenant libres au moment où elles posaient leur pied sur le territoire tunisien84 ». Ces formes de migration ne devaient donc plus se forger par la contrainte, elles avaient à procéder d’un semblant d’adhésion. À l’âge de l’imposition du libre-échange en Méditerranée, les traites se délestaient de leur caractère forcé, elles pouvaient se transformer en émigration légale85. Hommes et femmes de Géorgie et de Circassie avaient bien le droit de circuler à condition que les apparences soient sauves.
42L’abolition graduelle voulue par Aḥmad Bey était conditionnée par cette logique. Aussi bien à Tunis en 1846 qu’à Istanbul cinq ans plus tard, les impressionnantes destructions de marchés aux esclaves n’avaient pas satisfait que les observateurs européens. En coulisses, intermédiaires et marchands s’étaient, eux aussi, frotté les mains. Plus aucune incarnation matérielle du marché, cela signifiait moins ou pas de taxations, des formalités administratives allégées, bref, un poids désormais restreint de l’autorité publique dans la régulation de ce type de négoce. Près de trois semaines après la démolition du souk aux esclaves, le consul de France se plaignait que les Noirs ne puissent « plus se soustraire aux mauvais traitements de leur maître, c’est-à-dire, se faire inscrire chez le chef de ce marché, pour être vendus86 ». Le représentant diplomatique se résignait à accueillir ceux qui cherchaient refuge auprès de sa maison consulaire87.
43Sur une durée étendue, plus que les initiatives ponctuelles de consuls et de chancelleries occidentales, c’est la situation propre des réserves en mamelouks et odalisques qui déterminait le dynamisme et l’ampleur de leurs mises en mouvement. Seule l’extinction progressive des foyers caucasiens avec l’avancée des troupes russes, puis la fixation des flux de réfugiés et leur absorption dans des cadres nationaux avaient un impact conséquent sur les dernières traites de Blancs en Méditerranée. La Géorgie fut d’accès moins facile dès le début du xixe siècle, quand les troupes du tsar y furent davantage présentes88. Mais l’asservissement et la vente de ses habitants ne furent interdits par un firman qu’en pleine guerre de Crimée en 185489.
44Les Circassiens constituèrent par la suite l’ultime ensemble de choix pour des dignitaires à la recherche de serviteurs blancs. Les modalités de leurs asservissements ne furent pour partie démantelées qu’à partir de 1867, à Istanbul. Lorsque les autorités ottomanes furent confrontées à un afflux massif de réfugiés, fuyant une « pacification » russe et menaçant la cohésion du cœur de l’Empire, il fut décidé que si un esclave avait des parents libres dans l’Empire, il devait bénéficier de leur statut. Liée à cet effort européen pour mettre fin aux traites, une seconde dynamique perturba plus frontalement l’ordre des mamelouks au service des beys de Tunis : la protection accrue des consuls sur des compatriotes originaires des rives nord de la Méditerranée.
Les fuites aux consulats
45Jusqu’à la fin du xviiie siècle et dans les premières années du xixe siècle, les mamelouks comme l’ensemble des autres serviteurs du bey ne pouvaient aisément frapper à la porte des consuls et de leurs proches. En 1776, dans un extrait des registres de la chancellerie française à Tunis, un article spécifiait en effet qu’il était « expressément défendu » aux résidents du fondouk français « de cacher et de donner asile dans ledit fondouk à aucune personne ou effets recherchés par ordre du Bey90 ». Les consuls ne tenaient pas à s’embarrasser de serviteurs récalcitrants ou de rebelles à l’autorité des beys. Les fugitifs devaient trouver asile de préférence dans des bâtiments religieux ou auprès d’hommes de foi. Dans l’aire ottomane, la norme et l’usage voulaient, dans cet esprit et en référence à la šarī‘a, qu’une fois rattrapé un esclave soit envoyé vers un cadi pour une période de trois mois, dans l’attente d’une compensation financière de l’ancien maître ou d’une nouvelle mise aux enchères91.
46Mais des pratiques plus complexes limitaient les possibilités de se placer à l’ombre des minarets. En 1807, le consul Devoize était bien embarrassé d’avoir à accueillir un āġā qui avait piteusement abandonné ses troupes lors du siège de Constantine. Il témoignait que le milicien n’avait nul autre lieu où aller puisque les mosquées censées donner droit d’immunité étaient murées lorsqu’elles accueillaient de « grands criminels » afin de les affamer et de les pousser à se rendre92. Quand les fuyards n’avaient donc pas les troupes du bey à leurs trousses, quand ils n’étaient pas rattrapés en bon chemin, comme ce mamelouk appréhendé au départ de Medjez al-Bab fin 179093, la seule solution restait l’exil. Entre la fin des années 1770 et le début des années 1780, un dignitaire aussi fortuné qu’Ismā‘īl Kāhiya, dont la position était mise à mal par la prééminence du vizir Muṣṭafā Khūjā et l’ascension de Ḥammūda Bāšā, n’eut d’autre choix que de quitter la régence à deux reprises pour les cieux plus cléments de Livourne, de Smyrne et de La Mecque puis de Constantinople et du Caire94.
47En fort contraste avec les premiers réflexes de frilosité du xviiie siècle, les réceptions fréquentes de mamelouks dans les maisons consulaires, leur inclusion dans les cercles élargis de protégés des représentants européens ne furent en fait perceptibles qu’à partir des années 1820. Et ces mouvements ne prirent une véritable ampleur qu’au tournant des années 1830, avec la prise d’Alger par la France et au moment où les offensives diplomatiques des nations européennes contre les traites et pour la sécurité de leurs ressortissants commencaient à porter leurs fruits.
48Dans un premier temps, ce furent des captifs chrétiens qui franchirent le pas, assurés qu’ils étaient de se voir bien accueillis par les autorités européennes. Trois ans après la conclusion de traité de 1816, un jeune Sarde « d’une belle tournure » qui risquait de comparaître devant le bey pour des soupçons de vol parvint à s’échapper au consulat de France. Il avoua avoir été poussé à fuir par la femme de son maître, une Géorgienne qui lui avait promis de le rejoindre en Sardaigne. Le garçon quitta la régence et l’affaire fut étouffée95. Achevés dans un silence gêné, ces départs précipités n’étaient pas sans influence sur les autres agents des palais : le 7 août 1826, deux mamelouks de Ḥusayn Bey « accompagnés d’un chrétien » tentèrent d’emporter du sérail des armes et des objets de valeur. Ils furent décapités. Les deux premiers le lendemain de leur forfait, devant le Bardo, le dernier par des cavaliers partis à sa poursuite96.
49À partir de 1830, les tentatives d’évasion se multiplièrent et s’achevèrent sur des dénouements moins tragiques. L’année de l’offensive française sur le territoire voisin d’Alger s’ouvrait sur le récit pour partie fictif de la fuite de Yūsuf al-Mamlūk auprès du consul de France. Présenté comme « attaché au Bach-Mamelouk », Yūsuf aurait prétendu être en danger de mort97. Il fut envoyé à Alger où sa légende et son épopée romanesque s’établirent peu à peu, faisant de ce transfuge aux origines obscures l’incarnation de l’héroïque officier indigène et de l’intrépide amant de sérail98. En 1831, sous l’effet d’une même crainte d’être trop sévèrement châtié pour une faute, là encore non précisée, un autre mamelouk se retrouva dans la maison des Français. Attentif à ses faits et gestes, le vizir Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ conseillait au transfuge « de ne pas sortir et de n’avoir aucune fréquentation car il est notre cousin et qu’il ne connaît personne dans ce pays99 ». À partir de la fin du mois de mai 1831, la plus grande prudence fut de mise lorsqu’il fallut accueillir coup sur coup un « jeune homme de quatorze ans » qui se plaignait de recevoir « tous les jours de cruelles bastonnades », puis les deux fils puînés d’un mamelouk d’origine napolitaine qui s’étaient présentés comme des « chrétiens, esclaves » éprouvés par « les mauvais traitements […] et les infamies auxquels on voulait les obliger de condescendre ».
50La France, nouvelle puissance occupante dans la région, n’était pas seule impliquée dans cette extension de protections consulaires. À Tunis, la résidence du consul britannique devint un second lieu de refuge pour les serviteurs des beys. Le 7 juillet 1831, Thomas Reade annonçait avoir obtenu de Ḥusayn Bey le départ de trois de ses mamelouks vers la Morée100. C’est à partir de cette période que les consuls européens maintinrent leurs portes ouvertes. En 1840, la représentation britannique continuait à accueillir deux mamelouks, en l’occurrence deux Grecs de 22 et 18 ans, amenés de Constantinople quelques années plus tôt101. En 1855, les consulats de France et d’Autriche constituèrent sans grande difficulté quelques retraites pour Ismā‘il, un mamelouk d’Aḥmad Zarrūq, accusé de fraudes et de vols dans l’administration des tabacs et de l’habillement des troupes102.
51Le facteur principal d’élargissement de ces pratiques pourrait paraître évident : cela ne pouvait être qu’un des résultats concrets de la diplomatie européenne dans la province, qu’une des conséquences des concessions obtenues auprès des beys. Au plus près de cette croyance sur un effet émancipateur des textes, le consul de France voulait ainsi lier l’afflux des agents des palais au traité de 1830. Afin de détacher un jeune Grec de la dépendance du Bardo, le diplomate entendait faire jouer le deuxième article qui proclamait l’abolition de l’esclavage des chrétiens au prétexte que l’abjuration de l’enfant n’aurait « eu lieu qu’après la date dudit traité103 ». Pour sa part, son homologue britannique restait sensible à la protection qu’il se devait d’accorder aux Grecs ioniens, invoquant le traité de 1816 et la clause additionnelle de 1824.
52Mais dans le cas particulier des mamelouks, cette vision par le haut, par l’intervention européenne était trop générale, trop englobante, pas assez fondée sur les stratégies et les perceptions propres des principaux intéressés… Des mamelouks formés au sérail étaient-ils au fait de toutes les subtilités des administrations consulaires ? La plus grande visibilité de leurs fuites vers les résidences des représentants occidentaux coïncida avec le choc souterrain et lointain que représenta la prise d’Alger. Avec les expéditions navales britanniques et l’avancée des troupes françaises dans le deylik voisin, les preuves nécessaires de la suprématie européenne devenaient palpables au-dedans et au plus près de la régence. Entre les consulats consolidés par des forces de dissuasion militaires, des mamelouks pouvaient désormais échafauder d’autres parcours, introduire des intermédiaires dans leurs relations avec leurs maîtres du Bardo.
53Dans ce cadre perturbé, l’entourage de Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, déjà mis à mal par des rivalités entre Caucasiens et Grecs, fut très souvent affecté par ces défections et ces départs calculés vers des demeures de représentants européens. Rustum, caïd de Nefta, demanda l’asile au consul de France en avril 1833, parce qu’il s’estimait marginalisé par Ḥusayn Bey et Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ : « Notre maître me déteste tout comme le garde des Sceaux […] alors qu’à l’époque de Sīdī Ḥammūda Bāšā, j’étais considéré104. » Le dignitaire avait, il est vrai, subi une rebuffade avant de quitter le Bardo : le vizir lui avait donné tort au profit d’un mašaykh de Nefta venu se plaindre de l’injustice du caïd105. Ḥusayn Bey préférait, pour sa part, invoquer des motivations financières pour expliquer la résignation de son serviteur : Rustum s’était transporté dans la résidence de France alors qu’il se devait d’honorer un crédit d’un montant de 6 000 piastres contracté auprès d’un chrétien anglais106. Habile, Rustum enveloppait ses difficultés sous les apparences de la dignité offensée et entendait jouer des tiraillements entre chargés d’affaires français et anglais.
54Dans la même veine, un proche de Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, Muḥammad Šūlāq, ne supporta pas de voir le vizir et le bey critiquer ses manières d’exercer sa charge de gouverneur sur les Tripolitains de la régence. Il rechercha l’appui du consul de France pour l’aider à quitter la province. Muḥammad Šūlāq « se croyait le droit de réclamer le bénéfice du traité du 8 août [1830] en sa qualité de mameluck » alors qu’il n’avait pas exprimé « son intention de redevenir chrétien » et que le consul s’échinait à lui faire entendre que l’accord ne concernait que les seuls esclaves chrétiens. Sûr de son bon droit, l’invité encombrant se permettait « de sortir plusieurs fois du consulat en plein jour » comme si de rien n’était. Au bout d’un certain temps, « voyant qu’il ne pouvait plus compter sur [l’]appui » du consul de France, Muḥammad Šūlāq se rendit auprès du consul d’Angleterre qui refusa de l’accueillir « pour ne pas faire affront » à son homologue français. En fin de parcours, le mamelouk se retira « dans une immunité religieuse située sur le haut du cap Carthage, qui sert ordinairement de refuge aux coupables ». De là, il reçut l’absolution de Muṣṭafā Bey qui « le replaça à son service » après son avènement en 1835107.
55Partir pour mieux revenir : tout comme les exécutions de vizirs surpuissants et les rivalités ethniques, les allers-retours entre les maisons consulaires et les palais, en plus de perturber le service du bey, pouvaient aussi être interprétés comme des tentatives de rééquilibrage des influences dans les rangs mamelouks et dans les relations de ces derniers avec leurs maîtres. Mais plus que les deux premières formes de perturbation, les fuites au consulat dénaturaient les liens de forte dépendance qui caractérisaient l’usage des mamelouks : les sorties de sérail installaient entre les serviteurs et leurs maîtres des regards étrangers, des médiateurs intéressés ; les séjours aux consulats, les circulations entre lieux d’asile élargissaient l’autonomie d’action des mamelouks.
56Par un degré supérieur d’ingérence consulaire dans le fonctionnement du sérail, c’est au milieu de tous ces départs de mamelouks qu’éclata au mois de ramadan de l’année 1833 l’affaire que nous avons présentée au début de ce chapitre, l’affaire des muchachos napolitains, sanctionnés en leur chair pour ne pas s’être éveillés avant l’aube et ne pas avoir préparé le repas des mamelouks du Bardo. Sous pression diplomatique sarde, le bāš mamlūk à l’origine de leurs sanctions fut, nous l’avons dit, déconsidéré et mis pendant un certain temps aux arrêts.
57Plus déterminant encore, le départ définitif d’une partie de ces muchachos mal traités éveilla le projet de leur remplacement par les plus jeunes mamelouks, mais aboutit au final à recruter des enfants du pays108. Ce dernier rebondissement ouvrit la voie à une autre forme de domesticité. La protection consulaire dont purent jouir les serviteurs napolitains poussa la maison beylicale à mettre progressivement fin au recours séculaire à de jeunes chrétiens placés dans les services de chambre des beys mouradites et des premiers husaynides109. En conséquence, le Bardo dut mettre en place, sous la même catégorie de muchachos, d’autres formes de services fondées sur un degré différent de contraintes et un ensemble de domestiques non plus caractérisés en premier lieu comme un groupe de captifs, mais avant tout comme des salariés à part entière.
58Par les dimensions qu’elle recèle, cette affaire dévoile le degré de perturbation induit par les protections consulaires. Elle permet aussi et surtout d’aborder un dernier élément majeur de perturbation du corps mamelouk : la nouvelle place à attribuer à des Européens que les beys n’engageaient plus à des fonctions subalternes, qu’ils ne cherchaient pas à convertir à l’islam dans une perspective ascensionnelle, mais qu’ils promouvaient aux côtés de mamelouks favoris ou méritants, à de plus hautes fonctions militaires, médicales et plus généralement scientifiques selon leurs confessions et nationalités d’origine.
59L’emploi de ces serviteurs en tous genres, non captifs et non convertis, n’est pas une nouveauté dans la province. Mais comment évaluer ces positions face à celles qu’avaient connues les captifs de raids maritimes et des convertis pour partie versés dans les rangs mamelouks ? Dans l’interrogation qui nous guide ici sur ce qui relève de l’adaptation ou de la lente dissolution du corps des mamelouks, comment situer ces derniers, face à des médecins, des instructeurs, des traducteurs, voire des consuls européens, rattachés sans interruption à leur patrie ? L’influence est-elle allée dans un seul sens, dans le sens d’une remise en cause de l’expérience mamelouke : vers l’imposition des critères et des modalités de travail des employés européens, vers un détachement du territoire et des liens de parenté, vers des formes moins personnalisées d’obéissance, vers une mise en valeur de savoirs promus dans le cadre des diplômes et d’une instruction formelle ? Dans la direction opposée, en concentrant nos vues sur les cas mieux documentés des instructeurs militaires et des médecins, n’y a-t-il pas eu tentation de « mameloukiser » pour le moins les discours et les pratiques d’obéissance de ces expatriés que l’inclusion dans de fructueuses relations de clientèle et de dépendance pouvait tenter110 ?
LES INTERACTIONS
La montée en puissance d’agents libres et non convertis
60Les recrutements de serviteurs hors des parcours de la captivité et de la conversion furent rendus possibles dès l’établissement, puis le maintien, de relations diplomatiques entre les dignitaires ottomans de la province de Tunis et leurs voisins des rives nord de la Méditerranée. Dans ce cadre, les beys ne se sont pas contentés de conserver leurs recrues en leur état d’origine, ils ont aussi négocié leur venue avec leurs autorités de tutelle. Fin 1687, Muḥammad Bey s’adressait à Cosme III de Médicis pour lui faire part de son désir de recevoir « quelque bon médecin de confiance parmi [ses] serviteurs » qui pourrait l’aider à soulager « certaines maladies » dont il souffrait depuis quelques années. Moins d’un siècle plus tard, en 1772, ‘Alī Bey émettait une requête comparable auprès de l’État français par l’intermédiaire du consul de Saizieu :
« C’est surtout l’âge et l’expérience que [le bey] désire dans son choix.
L’habileté d’un jeune homme ne servirait de rien auprès de ce Prince et n’obtiendra pas à son médecin l’entrée du harem111. »
61Mais si anciennes qu’elles puissent nous apparaître, ces demandes intermittentes en savants et en experts européens libres de toute dépendance, et leurs éventuelles arrivées dans la régence se sont surtout accélérées entre la fin du xviiie siècle et la première moitié du xixe siècle.
62Dans ces vagues multiples, les apparitions, puis les présences d’instructeurs militaires au Bardo sont relativement connues. Elles ont fait l’objet d’études éclatées, menées par nationalités d’origine, mettant le plus souvent l’accent sur les éléments français112. Des cas marquants ont peut-être été distingués de façon rétrospective, à la recherche des premières traces des réformes. Ils émergent durant le règne de Ḥammūda Bāšā dans les métiers de l’ingénierie militaire. Une relation vénitienne de l’année 1784 attribue la construction de digues du port de La Goulette à Pierre Gajo, ex-officier de la Sérénissime, « passé comme ingénieur au service du Bey113 ». Dix ans plus tard, un certain Jean Gazel, « recommandable pour ses connaissances dans l’art de la construction navale », se présenta à Muṣṭafā Khūjā ; le vizir le jugea « propre à exécuter [ses] plans » mais la volonté de Gazel de faire venir « ses livres, ses instruments » et sa famille mit un terme au projet de recrutement114.
63Cette première vague passée, le gros de la troupe s’imposa avec la mise en place de l’armée régulière à partir des années 1830, puis avec l’ouverture de l’école polytechnique du Bardo, dès 1840. En ces dernières périodes, les instructeurs n’ont pas concurrencé les mamelouks dans des fonctions d’encadrement de l’armée, ils ont introduit des innovations, des techniques, des modes d’enseignement : autant de missions qui ne furent jamais attendues des quelques mamelouks dirigés vers le métier des armes et vers les charges de kāhiya ou de chefs de maḥalla.
64Peu perturbante dans le domaine militaire, cette recherche amplifiée de compétences européennes eut des conséquences plus fâcheuses parmi l’ensemble des thérapeutes, guérisseurs et chirurgiens du palais. Dans ces métiers en contact intime avec les corps des princes et de leurs parents, des reniés et des mamelouks avaient trouvé quelques places aux côtés des sujets autochtones et de praticiens chrétiens dès l’époque mouradite. À la fin du xviie siècle, le « renié italien » d’origine sicilienne, « Soliman Tabib », également surnommé « Soliman l’Affricano115 », cumulait, en plus de son emploi de chirurgien des beys, des licences pour le commerce d’huile116, la possession d’au moins un esclave chrétien117 et des missions de police118.
65Mais ce type de figures bien particulières eurent tendance à s’effacer autour de la seconde décennie du xixe siècle. Muḥammad al-Mamlūk, un médecin d’origine italienne, fut exécuté en 1814. Il était accusé d’avoir empoisonné Ḥammūda Bāšā avec la complicité du Napolitain Mariano Stinca119. Quatre ans plus tard, Rajab al-Ṭabīb, présenté comme un docteur issu de « Francs convertis », était jeté « en prison comme un criminel » pour avoir le premier annoncé au bey la réapparition de la peste à Tunis120. Au début des années 1820, des registres du palais ne mentionnaient encore qu’un certain Muṣṭafā al-Mamlūk al-Ṭabīb121.
66À partir de la seconde moitié du xviiie siècle, des médecins européens non convertis ont peu à peu assuré leur prépondérance sur les autres praticiens, sur les convertis et les umanā’ al-aṭibbā’ (chefs locaux de corporation médicale), en modifiant progressivement la nature de leurs liens de dépendance à l’égard du bey, et en affichant pour ce faire une supériorité de compétences. Par ces transactions de savoirs, les relations aux employeurs se détachèrent des cadres pesants de la captivité pour se déployer dans des formes moins rigides de clientélisme. Dans les années 1770, par le même procédé, en reconnaissance de louables efforts diplomatiques, Bruno Jourdan fut nommé consul d’Autriche et de Toscane, pays où il avait développé d’importants intérêts commerciaux122.
67Ce mouvement de substitution des captifs et des dépendants par des étrangers ou des autochtones sans fortes attaches avec la maison beylicale s’étendit à d’autres services moins prestigieux du palais : aux valets muchachos, comme cela fut perçu dans les pages précédentes, mais aussi aux artisans. D’après Jacques Revault : « Après l’abolition de l’esclavage, on fera souvent appel à des maîtres italiens pour répondre aux demandes des dignitaires et riches tunisois tout en les chargeant de former, à leur tour, sculpteurs et peintres locaux123. » À une strate intermédiaire, entre officiers instructeurs, premiers médecins au plus haut des hiérarchies et valets ou artisans à la base, le « métier » de traducteur fut endossé par un cercle de plus en plus large d’hommes de l’entre-deux : d’abord de façon officieuse par un fils d’esclave comme Joseph Raffo, puis de manière plus officielle par des Levantins comme Elias Mussalli ou bien encore par des Français arabisés natifs de la province, tel que Napoléon Eugène Lombard124. La formalisation de ce métier se concevait alors dans un mouvement de révision des critères d’attribution des charges qui reposaient moins qu’auparavant sur des degrés de dépendance et de transformation des identités, et davantage sur une valorisation des connaissances et des compétences acquises hors des palais.
68Nombre des agents recrutés par le biais d’accords bilatéraux, qui maintenaient des liens constants avec leur nation d’origine et dont la valeur dépendait de l’ampleur des connaissances recherchées, n’avaient en apparence, vus de l’extérieur du sérail, plus rien à voir avec les profils des mamelouks. L’expérience mamelouke semblait laisser place au service des expatriés. De l’intérieur, il en allait autrement. Les palais, voire le pays, parvenaient parfois à absorber une partie de ces nouveaux serviteurs. En ces lieux, ce type d’agents se « mameloukisaient ».
L’absorption dans les palais
69Camper des médecins, des instructeurs, des traducteurs et autres agents contractuels des palais dans des positions supérieures, les resituer dans des stratégies nationales, les loger dans des cases administratives et des clauses d’accords ne constituent en effet qu’une manière de percevoir ces hommes. Selon d’autres lectures, ces serviteurs des beys peuvent aussi être rapprochés de leurs patients, de leurs élèves ou de leurs employeurs. Ce faisant, ils peuvent révéler des traits communs avec d’autres catégories de serviteurs du palais, dont le corps des mamelouks. Car à juste distance entre un probable retour en Europe et un possible ancrage dans la régence, tous ces expatriés ont expérimenté sur des durées souvent plus restreintes, mais selon des degrés plus intenses, les relations que des mamelouks ont pu entretenir au proche et au lointain. Ces relations étaient beaucoup moins reconstruites par les beys ou d’autres dignitaires des palais mais, tout comme les mamelouks furent placés entre les sujets et la famille régnante, entre les miliciens turcs et les troupes arabes, les haut gradés et les médecins réputés, venus du dehors ou formés sur le continent, se sont intercalés entre les beys et leurs intimes.
70Des mamelouks du sérail ont éprouvé par eux-mêmes ces situations de proximité distante, cette étrange accoutumance à l’étranger ou au non-semblable. Au début des années 1850, un officier, ‘Alī al-Mamlūk, s’est vite rapproché du capitaine Philippe Daumas. Au cours d’un premier échange que l’instructeur rapporta dans son récit de mission, le mamelouk promu aux fonctions de capitaine se serait d’abord enquis, en langue française, des conditions de vie de son homologue. Invoquant une prétendue coutume locale, il lui conseilla de se couvrir de « trois burnous » pour mieux dormir la nuit. ‘Alī al-Mamlūk et Daumas auraient ensuite pris l’habitude de parcourir la carte de l’Asie d’un même regard. Le rituel était le même : à chaque fois, le mamelouk montrait du doigt les lieux de sa naissance, les « environs de Mamaï dans la grande Abasie125 ».
71Des gens venus d’Europe élaboraient des stratégies afin de se maintenir au service des beys. Dans le cas des militaires, les foyers géographiques de recrutement des instructeurs se rapprochèrent de plus en plus du Bardo. D’après la typologie établie par A.-M. Planel, à l’initiale, parmi les premiers officiers instructeurs engagés à Tunis, certains, comme Giuseppe Bonaldi ou Louis Calligaris, ajoutaient à leur pratique de l’arabe un service dans l’Empire ottoman. Dans un second temps, leurs successeurs (tels qu’Eugène Lion, Émile de Berny et Ernest de Taverne) commencèrent à venir de l’Algérie francisée tout en restant pour partie arabophones ; enfin par une dernière impulsion, à partir de 1855, une relève tunisienne émergea tandis que les officiers français, recrutés par les beys, prenaient racine dans le pays126.
72Dans le cas différent des médecins, le rapprochement avec les patients husaynides et avec les cercles généraux du palais s’opéra dans un cadre familial. Dans la seconde moitié du xixe siècle, le médecin de Muḥammad al-Ṣādiq Bāšā Bey, Nicolas Vignale – issu de l’union d’un commerçant avec la descendante de Joseph Raffo –, maria ses deux fils à des Mascaro, placés à la tête d’une pharmacie prospère à Tunis. Nicolas Vignale introduisit, du même coup, auprès du bey, un descendant des Mascaro, Jean-Baptiste, pour lui succéder. Ce Mascaro, à son tour, fit agréer « comme deuxième médecin du bey » le docteur Prat, un concitoyen espagnol qu’il avait élevé « pendant quelques années » et pour qui « il paya une partie [des] frais d’études127. »
73Inscrit dans des stratégies de perpétuation, s’insérant dans les hiérarchies administratives et militaires, tout comme d’autres catégories de serviteurs, ce personnel d’un nouveau genre trouva sa place au sein du Bardo, dans la vie quotidienne des palais. Un médecin, d’origine anglaise, recommandé à la fois par le consul de sa nation et celui des États-Unis, bénéficia à partir d’avril 1832 d’un approvisionnement comparable à celui d’un médecin du bey dont le nom était transcrit en arabe sous la forme de Murāl128.
74Qui plus est, ces serviteurs permanents avaient leurs entrées réglées par les portes du sérail. Au début du règne d’Aḥmad Bey, à l’instar du secrétaire de chancellerie Bājī al-Mas‘ūdī, de ‘Alī le précepteur de l’école du sérail ou du rabbin Mūšī, « Tūnīn [Antoine] al-Ṭabīb [le médecin] » et « Fessler al-Ṭabīb » étaient invités à pénétrer par la porte de garde. Tous ne pouvaient franchir le seuil qu’en présence du maître des lieux. Les deux médecins en particulier devaient nécessairement se diriger vers l’hôpital de la forteresse129. Avec l’arrivée croissante de ces compétences étrangères, les palais changeaient de physionomie : des instructeurs et leurs épouses s’installaient dans les nouvelles casernes du Bardo, de La Manouba ou de la Muḥammadiyya130.
75Les employés installés dans des temps plus anciens avaient réussi à pénétrer les réseaux d’alliances et liens de clientèle noués autour des beys. Parmi eux, Laurent Gay incarnait au mieux cette capacité à se fondre dans le paysage. Présent au Bardo, durant un quart de siècle, de 1788 à sa mort en 1823, auparavant chef de l’hôpital de la Compagnie commerciale d’Afrique au comptoir de La Calle, le Dr Gay prit pied dans le sérail par le biais du principal wazīr du bey, le mamelouk géorgien, Muṣṭafā Khūjā, dont il soignait maisonnée et dépendants, des femmes du harem aux simples clients131. Bénéficiant à partir de 1813 du prestigieux titre de « Premier médecin » du bey132, il joua par la suite un rôle d’intermédiaire entre sa nation et la cour du Bardo. En 1814, il informait le consul Devoize des motifs de mécontentement du bey à son égard133. À la fin de sa vie, Maḥmūd Bey le traitait avec le plus grand honneur : il « l’admettait à sa table lors même que ses femmes y étaient présentes134 ».
76Figure moins installée, dans le cadre balbutiant de l’armée régulière, l’instructeur piémontais Louis Calligaris voulut, pour sa part, bénéficier de la protection de Muṣṭafā Khaznadār tout en restant proche de Ḥusayn Khūjā, favori ruiné et discrédité : « […] étant son voisin de maison au Bardo, je lui rendais souvent visite. Je profitais de ses conseils pour l’étude de la langue arabe que j’avais commencée à Alep et reprise à Tunis, et je passais avec lui bien des heures à converser très agréablement135. » Enfin, dans une position plus tutélaire, des années 1850 aux années 1860, Ernest de Taverne obtint le respect de ses employeurs et de ses élèves de l’école militaire du Bardo. Aḥmad Bey, qui l’avait appelé à ses côtés, lui conféra des décorations du pays et intervint pour que la Légion d’honneur lui soit aussi remise136. Aux dires de Ibn Abī al-Ḍiyāf, ses élèves pleurèrent à chaudes larmes sa disparition à Tunis, « comme un fils pour son père137 ».
77Ces derniers cas l’illustrent : de l’exécution des vizirs au recrutement des médecins et des instructeurs militaires, les membres de la maison husaynide ont disposé d’une capacité non négligeable d’action et d’adaptation. Les instructeurs, médecins, traducteurs, qui furent recrutés parfois pour leurs compétences, ont été attirés dans des relations de service et de clientèle. Ils ont élaboré à leur tour des « stratégies makhzéniennes » pour se maintenir en place et bénéficier de la générosité princière. La maison husaynide est aussi parvenue à atténuer les ondes de choc extérieures. En dépit de décisions et d’accords unilatéraux, des traites de mamelouks et surtout de jawārī ont été maintenues, pour ces dernières, au moins jusqu’au début du Protectorat, prenant l’apparence de flux migratoires non plus fondés sur la contrainte, mais sur des choix volontaires. Dans des marchés en voie de dérégulation, des capitaines et des contrôleurs de navires occidentaux se sont associés à ces trafics avec des négociants d’Istanbul.
78Tant de contournements, tant d’efforts n’ont pourtant pas suffi à stopper net des phénomènes d’érosion, à se dégager des pressions orchestrées par les consulats. L’inclusion constante d’éléments européens a transformé les cadres et la répartition du service au sein du palais : l’attention portée aux connaissances et aux compétences l’a parfois emporté sur les degrés de dépendance ; les figures particulières des médecins reniés furent aussi peu à peu perdues de vue. La vigilance que les consuls ont exercée sans failles, non seulement en faveur de leurs compatriotes venus au Bardo, mais aussi pour faire appliquer toutes les concessions et promesses d’extinction des traites, a abouti à réduire les réserves en captifs européens et donc en potentiels convertis. Le refuge accordé aux mamelouks en fuite dans les consulats a dénaturé les relations de dépendance, introduisant une tierce personne, entre le maître et son serviteur.
79L’une après l’autre, chacune de ces perturbations a commencé à être ressentie avant l’ère des réformes (y compris les fuites au consulat et l’introduction d’agents libres et non convertis). Mais ces réformes décrétées par l’autorité centrale, par les sultans, constituèrent des réponses à ces perturbations en même temps que des facteurs de renforcement de ces mouvements. À leur manière, les réformes ont aussi contribué à redéfinir les formes d’obéissance et de service rendu aux beys. Ces temps de réaménagement de l’ordre ont été à la fois marqués par des ouvertures volontaristes du pays sur l’ensemble européen et par des passages de relais à des enfants du pays.
80De ce point de vue, la mise en place d’une armée régulière à partir des années 1830, l’établissement d’institutions scolaires, judiciaires et administratives ne se comprennent pas seulement selon les interprétations historiographiques comme des stratégies conscientes pour se rapprocher de la France et asseoir l’autonomie du beylik ou bien a contrario comme gage de fidélité aux sultans « modernisateurs » afin de se prémunir des lourdes pressions européennes. Les réformes résonnent aussi au-dedans, au cœur de la province, comme des moyens de reformuler les relations de service rendu aux maîtres du pays. Armée régulière (al-niẓām al-jadīd), école du Bardo, fiscalité étendue et rationalisée, tribunaux étatisés : chacune de ces fondations se situe dans la ligne d’un long processus d’accumulation, d’appropriation au profit de la maison husaynide, infléchie en parallèle par une dépersonnalisation progressive des relais et des processus d’autorité138. De ce double point de vue, il nous faudra déterminer à quel point quelques dignitaires mamelouks furent bénéficiaires à courte échéance des réformes, alors que l’ensemble de leur corps était victime à plus long terme d’une rationalité administrative, des désenchantements et de la désolation profonde et néanmoins féconde que la remise en ordre des réformes engendrait (chapitre 7).
81À un niveau supérieur, l’ensemble des nouvelles institutions, par les opportunités et les carrières qu’elles offraient, les besoins en centaines, puis milliers d’hommes qu’elles suscitaient, les conscriptions forcées et recrutements contraints qu’elles imposaient, aboutissaient à reformuler peu à peu la complexe équation entre service, autochtonie et extranéité. Les foyers de traites des « Blancs » disparaissant l’un après l’autre, la dynastie husaynide pouvait de moins en moins compter sur des recrues allogènes, asservies et converties. Il fallait s’entourer d’enfants du pays, ne pas les maintenir aux postes subalternes, se résoudre à les salarier, à les promouvoir. Du coup, la dilatation de l’autorité en des cercles élargis de la régence rendait de moins en moins utile et de plus en plus caducs le jeu sur les origines, leurs brouillages, la valorisation du lointain et ses reconstructions.
82Cette appréhension renouvelée du local et des « fils du pays » (awlād al-balad) se complétait, enfin, d’un approfondissement des pratiques et des discours de la filiation. Les formulations de parenté fictive, l’inclusion de descendants de mamelouks au service des beys, aux côtés de leurs pères, n’étaient guère abandonnées. Bien au contraire, la présence des fils dans le corps des mamelouks était officialisée et étendue par décret beylical en 1860139. La qualification de « fils » que les beys réservaient à leurs tābi‘ et fidèles prenait de l’ampleur dans les proclamations aux armées, et pouvait atteindre, selon ce dernier registre, l’ensemble d’une administration structurée et dynamisée en apparence en fonction des hiérarchies et d’une culture militariste (chapitre 8). Autorité personnelle, relation construite avec les territoires, transmission par la filiation : les perturbations superficielles et souterraines que le corps mamelouk ne cessa de subir rejaillissaient sur des structures profondes du beylik.
Notes de bas de page
1 Référence à G. Veinstein et N. Vatin, Sérail ébranlé. Essai sur les morts, dépositions et avènements des sultans ottomans (xiv-xixe siècle), Paris, Fayard, 2003.
2 Pro, FO 77/24, T. Reade, Report on the Outrageous Conduct of the Bey in Directing Certain Neapolitans to be Bastinadoed, 3 février 1833.
3 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 46-48.
4 Mae, CP, Tunis, vol. 1, 202 r-203 r.
5 Ḍiyāf, 1989, vol. vii, 98.
6 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 21, f. 9 a, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 11 décembre 1830.
7 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 21, f. 6 a, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 24 novembre 1830.
8 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 95, Muḥammad Khaznadār à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 21 juin 1832.
9 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 99, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, juin-juillet 1832 (ṣafar 1248).
10 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 21, f. 13 a, Muḥammad Khaznadār à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 30 novembre 1830.
11 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 93, Muḥammad Khaznadār à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 27 juin 1832.
12 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 52, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 4 avril 1832 (3 qa‘da 1247).
13 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 21, f. 13 b, Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ à Muḥammad Khaznadār, 8 décembre 1830.
14 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 21, f. 12, Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ à Muḥammad Khaznadār, 6 décembre 1830.
15 Ḍiyāf, 1989, vol. iii, 137-138.
16 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 79.
17 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 89-90.
18 Ḍiyāf, 1989, vol. viii, 30.
19 Mae, CP, Tunis, vol. 3, Schwebel, 19 septembre 1837, f. 108 r-109 r.
20 Mae, CP, Tunis, vol. 3, Schwebel, 14 septembre 1837, f. 103.
21 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 94.
22 Bnt, Ibn Salāma, ms. 18618, f. 67 v.
23 Ḍiyāf, 1989, vol. iii, 140-141.
24 Ḍiyāf, 1989, vol. viii, 45, 98-99.
25 Question abordée pour le centre de l’Empire et à partir du xviie siècle, par M. I. Kunt, 1974.
26 Ḍiyāf, 1989, vol. viii, 29.
27 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 21, f. 14 b, Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ à Muḥammad Khaznadār, 9 rajab, l’année n’est pas indiquée mais il doit s’agir de l’année 1246, soit le 24 décembre 1830.
28 Ant, SH, C. 9, d. 93, arch. 2, Muḥammad Khaznadār à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 5 juillet 1832 (6 ṣafar 1248).
29 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 94, Muḥammad Khaznadār à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 25 juin 1832.
30 D. Panzac, 1999, 227.
31 K. Chater, 1984, 221.
32 D. Panzac, 1999, 227.
33 Pour Tunis, A. Rousseau, 1980, 312. Pour Alger, D. Panzac, 1999, 228. Pour Tripoli, K. Chater, 1984, 254.
34 Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 86, tadkira au consul anglais, 29 jumādā II 1231, indiqué au 17 avril 1816 mais correspond au 27 mai 1816. Dans l’archive 106, il est fait mention de 493 chrétiens napolitains. K. Chater (1984, 254) rapporte le chiffre de 500 Napolitains en se fondant sur une source française (Mae, CCC, Tunis, vol. 42, Devoize à Richelieu, 25 avril 1816, f. 154).
35 D. Panzac, 1999, 228 ; leur nombre est arrondi à 300 dans les Annales d’A. Rousseau (1980, 312) et dans l’ouvrage de K. Chater (1984, 254) qui rapporte que leur libération fut permise sans rançon.
36 D. Panzac, 1999, 228.
37 D. Panzac, 1999, 228 et K. Chater, 1984, 253. Une convention passée entre Maḥmūd Bey et l’amiral anglais reconnaît « l’indépendance de ces îles grecques et la protection de l’Angleterre sur la nation grecque » (Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 106, 17 avril 1816).
38 Ḍiyāf, 1989, vol. iii, 148 : lā yamlakūna.
39 Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 106, convention entre Maḥmūd Bey et l’amiral anglais Edward « Kasmūt », 17 avril 1816. D. Panzac, 1999, 229. Ḍiyāf, 1989, vol. iii, 148.
40 Mae, CP, Tunis, vol. 1, traité de 1830, f. 65 r.
41 Y. H. Erdem, 1996, 44.
42 E. Plantet, 1899, 701.
43 E. Plantet, 1899, 707, « Chakir, garde des Sceaux » à de Lesseps, le Bardo, 10 août 1830.
44 C. Windler, 2002, 23, 402.
45 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 24 ; E. Plantet, 1899, 704.
46 A. Gallico, 1992, 232 : article II du traité d’amitié et de commerce sardo-tunisien du 22 février 1832.
47 Mae, CP, Tunis, vol. 5, Lagau, 14 mai 1841, f. 41 v. ; Mae, CP, Tunis, vol. 9, Delporte, 28 janvier 1846, f. 153 ; Ḍiyāf, 1989, vol. iv, 97 ; M. Bompard, 1888.
48 A. Larguèche, 1990, 60-63.
49 Pro, FO 84/373, Aḥmad Bey à T. Reade, 29 avril 1841 selon la lettre, f. 492 r.
50 Mae, CP, Tunis, vol. 5, Lagau, 14 mai 1841, f. 41 v.
51 Ḍiyāf, 1989, vol. iv, 98.
52 Pro, FO 84/427, Aḥmad Bey à T. Reade, 8 décembre 1842 selon la lettre, f. 170 v.
53 L. C. Brown, 1974, 323.
54 Ḍiyāf, 1989, vol. iv, 98 ; Pro, FO 84/427, Aḥmad Bey à T. Reade, 8 décembre 1842 selon la lettre (6 qa‘da 1258 soit le 9 décembre), f. 171 v.
55 Ḍiyāf, 1989, vol. iv, 97, 98 ; M. Bompard, 1888, 398.
56 Y. H. Erdem, 1996, 94.
57 Dans cet ordre d’idées, E. R. Toledano (1998, 113) : It was the defence of kul/harem slavery that delayed full adoption of a clear abolitionist stance by the Ottoman governing elite.
58 Y. H. Erdem, 1996, 20 : en 1822, les autorités ottomanes entendent obliger le retour à Chios de garçons et de filles que des soldats et fonctionnaires voulaient vendre sans pencik (taxe d’importation ad valorem jusqu’en 1857).
59 Pro, FO 84/373, T. Reade, 4 juin 1841, f. 513 r-v. ; FO 84/486, T. Reade, 20 novembre 1843.
60 Pro, FO 84/427, T. Reade, 28 avril 1842, f. 144 r-v.
61 D. Panzac, 1999, 242-243 ; A. Rousseau, 1980, 313-315, 325.
62 A. Raymond, 1994, vol. ii, 39.
63 Ant, SH, C. 221 d. 356, arch. 11, août-septembre 1835 (jumādā I 1251).
64 Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 100, du capitaine de frégate, S. M. Seringapatam au bey de Tunis, 20 mai 1822.
65 Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 99, lettre non signée, 2 juin 1823.
66 Pro, FO 77/13, 22 octobre 1822.
67 Pro, FO 77/14, instructions de sir Thomas Maitland, représentant du gouvernement britannique à Malte au consulat de Tunis, 8 juin 1823.
68 K. Chater, 1984, 334.
69 Pro, FO 77/14, vice-consul Tulin au Earl Bathurst, 20 juin 1823.
70 Mae, CCC, Tunis, vol. 44, Malivoire, 11 juin 1823, f. 264 r-v.
71 Pro, FO 77/14, vice-consul Tulin au Earl Bathurst, 6 août 1823.
72 Pro, FO 77/14, de M. Gaspary, représentant du consulat à La Goulette au chargé d’affaires Alexandre Tulin, 1er octobre 1823 ; de Charles Johovich à Alexandre Tulin, 3 et 4 octobre 1823 ; d’Alexandre Tulin au lieutenant général, sir Thomas Maitland. Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 80, Maḥmūd Bey au vice-amiral Hamilton, commandant de l’escadre anglaise à La Goulette et à Alexandre Tulin, 2 janvier 1824 (29 rabī‘ II 1239).
73 G. Davies, 1919, 84-89.
74 Pro, FO 77/15, Maḥmūd Bey au vice-amiral Hamilton, 1er.janvier 1824 (22 rabī‘ II 1239).
75 A. Gallico, 1992, 131, lettre de Palma du 22.janvier 1824.
76 Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 89, Ḥusayn Bey à Thomas Reade, 20 avril 1828 (9 šawāl 1243).
77 Ant, SH, C. 230, d. 421, arch. 94, T. Reade à Ḥusayn Bey, 19 juillet 1830.
78 Ant, SH, C .3, d. 42, arch. 42, Muḥammad Khaznadār à Šākīr Ṣaḥib al-.abi‘, 27 mars 1832.
79 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 208, al-‘Ibrī à Šākīr Ṣaḥib al-Ṭabi‘, 6.mai 1834 (26 ḥijja 1249). : dans cette lettre, il parle d’amalik, اكك, mais mentionne auparavant deux acquisitions qui n’ont pas donné satisfaction.
80 Ant, SH, C. 142, d. 209, arch. 14, Muṣṭafā Khaznadār à Aḥmad Bey, 24 avril 1839 (9 ṣafar 1255).
81 Pro, FO 102/29, rapport de James Richardson, An Account of the Present State of Tunis, 1845, f. 48 r.
82 N. Davis, 1841, 168.
83 Pro, FO 84/486, T. Reade, 21 novembre 1843.
84 Pro, FO 84/919, Edward Bagnus au comte de Clarendon, 2 juillet 1853, f. 209 r.
85 J. Ganiage (1959, 44) a signalé la croissance des migrations siciliennes vers Tunis à partir des années 1860 : il ne s’agissait certes plus de captifs plus ou moins volontaires, mais de « jeunes gens » fuyant la conscription, « de bandits en difficulté avec la police italienne ou de couples en difficulté avec leurs familles ». Un phénomène similaire est perceptible à la fin du xixe siècle lorsque des Noirs fuient en masse l’« esclavage de la Tripolitaine voisine » et sont en quête d’emplois en Tunisie (I. Mrad-Dali, 2009, 377).
86 I. Mrad-Dali, 2009, 197 : des « marchés clandestins ont remplacé les ventes publiques et contrôlées ».
87 Mae, CP, Tunis, vol. 5, Lagau, 30 septembre 1841, f. 187 r-v.
88 T. Nieuwenhuts, 1982, 182 ; N. Assiatiani et A. Bendianachvili, 1997, 227-248.
89 Y. H. Erdem, 1996, 103.
90 Anf, AE B I 1148, Tunis, vol. 24, extrait des registres de la chancellerie du consulat de France au Royaume de Tunis, f. 155, article 3.
91 Y. H. Erdem, 1996, 160.
92 Mae, CCC, Tunis, vol. 38, Devoize, 2 juin 1807, f. 226 v.
93 Ant, reg. 260, f. 36 23 décembre 1790 (16 rabī‘ II 1205).
94 Anf, AE B I 1149, Tunis, vol. 26, Devoize, 24 novembre 1778, 8 juin 1779. Anf, AE B I 750, Livourne, vol. 56, de Berthelet, 11 décembre 1778, f. 82 ; 15 janvier 1779, f. 91 v. ; 9 avril 1779. Anf, AE B I 1150, Tunis, vol. 27, Du Rocher, 13 juillet 1780, 30 décembre 1782. Anf, AE B I 751, Livourne, vol. 57, de Berthelet, 28 février, et 8 août 1783.
95 Anf, AE B III 304, régence de Tunis, Tabarka, La Galite, 1801-1846. Missions en Barbarie, 1815-1847 : « Notice historique sur l’invasion de l’Isle de St-Pierre par les Tunisiens, la captivité des habitants qui tombèrent en leur pouvoir et leur affranchissement », 9 juillet 1819.
96 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 10.
97 M. Emerit, 1952, 385.
98 R. Du Casse, 1879-1880 ; A. Messaoudi, 2008, 202 : il serait « vraisemblablement issu d’une famille de juifs livournais ».
99 Mae, Bey et cour beylicale, reg. 1, lettres du Bardo, Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘ à Lesseps, 24 mai 1831.
100 Pro, FO 77/22, T. Reade, 7 juillet 1831.
101 L. C. Brown, 1974, 246 (Pro, FO 102/8, 9 avril 1840).
102 Mae, Bey et Cour beylicale, correspondance du Bardo, liasse 20, arch. 69, Muḥammad Bāšā Bey au consul Merlato, 6 septembre 1855 (23 ḥijja 1271). Mae, CP, Tunis, vol. 15, Roches, 7 septembre 1855, f. 230 r.
103 Mae, CP, Tunis, vol. 1, 12 juin 1831, f. 193 r.
104 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 186, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 30 avril 1833 (10 ḥijja 1248).
105 Ḍiyāf, 1989, vol. viii, 31.
106 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 186, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 30 avril 1833 (10 ḥijja 1248).
107 Mae, CP, Tunis, vol. 2, 20 janvier 1834, f. 22-24 ; Ḍiyāf, 1989, vol. viii, 33.
108 Ḍiyāf, 1994, vol. i, 46-48.
109 En 1701, sous le règne de Ramaḍān Bey et de Murād III, ces domestiques sont qualifiés de bach-kasak. P. Grandchamp (t. 8, 1930, t. 10, 1933, xviii). La même qualification prévaut pour le règne de Ḥusayn b. ‘Alī (M. Tayyeb, 1990, 112 ; R. Pococke, 1745, 267).
110 A.-M. Planel (2000, 509) remarque que certains « employés du bey » « entretiennent avec le pouvoir makhzénien un rapport hiérarchique tellement étroit qu’ils pourraient être qualifiés de “mamelouks”, s’ils n’avaient pas choisi de demeurer chrétiens ».
111 ANF, AE B I 1144, Tunis, vol. 20, de Saizieu, 30 juin 1772, f. 307.
112 P. Marty, 1935. Voir aussi : H. Hugon, « Les instructeurs français de l’ancienne armée beylicale », Revue tunisienne, 1923, 162 ; M. Gandolphe, « L’armée tunisienne », Revue tunisienne,1922, 274 ; R. Drevet, « À propos de l’armée tunisienne (réponse à M. Gandolphe) », Revue tunisienne, 1923, 294.
113 P. Grandchamp, 1932, 248.
114 E. Plantet, 1899, 242 : Muṣṭafā Khūjā à Buchot, Tunis, août 1794, thermidor an II.
115 P. Grandchamp, 1933, t. 10, 35, mention dans un acte du 29 mai 1702 et page 108, dans une lettre de Livourne, le 16 juin 1702, de Sebastiano Fucili au commerçant français Nicolas Béranger, à Tunis.
116 P. Grandchamp, 1930, t. 8, 323, acte du 7 juin 1700, « Moizé et Abram Mendez Ossuna, juifs, ont reçu de Soliman Tabib, turc, chirurgien de Amurath bey, trois teskras pour permettre de charger 6 000 “metars” d’huile, à 1 000 piastres chacun ».
117 P. Grandchamp, 1933, t. 10, 29 : acte du 11 février 1702, un esclave florentin de ce chirurgien reçoit une somme du consul de France.
118 P. Grandchamp, 1930, t. 8, 379 : acte du 22 avril 1700. Les deux serviteurs, Jean Baptiste Rousset, ancien baš-qazaq, et Ventura Maruccio, « garde-robe » (l’équivalent d’un « valet de chambre »), se sont noyés, après un naufrage, sur les côtes sardes.
119 Ḍiyāf, 1989, vol. iii, 128.
120 Ḍiyāf, 1989, vol. iii, 165.
121 Ant, reg. 421 bis, f. 67, (4 ša‘bān 1236) : ḥaqq rūz šahriyya Muṣṭafā al-Mamlūk al-Ṭabīb ‘an al-šahr.
122 N. Gallagher, 1983, 19. L’auteur cite notamment en référence E. Plantet, 1899, 93 et 236-237.
123 J. Revault, 1983, 446.
124 A.-M. Planel, 2000, 158, 155.
125 P. Daumas, 1857, 85, 98-99.
126 A.-M. Planel, 2000, 100, 105, 110.
127 F. Lovy, 1931, 212-214. À partir du cas des Gandolphe et des Clément, A.-M. Planel (2000, 254) invoque des « statégies collectives […] makhzéniennes [qui] usent en priorité d’un système de privilège ou de relations clientélaires, soit pour s’intégrer à l’administration ottomane tardivement, comme les Clément, soit pour s’en différencier exceptionnellement, comme les Gandolphe ».
128 Ant, SH, C. 3, d. 42, arch. 52, Ḥusayn Bey à Šākīr Ṣāḥib al-Ṭābi‘, 4 avril 1832 (3 qa‘da 1247).
129 Ant, reg. 3066, f. 8, la date est difficile à déterminer, au début du registre il est d’abord fait mention au 14 šawwāl 1254 (31 décembre 1838), mais le neuvième feuillet est daté de 1262 (1845-1846).
130 A.-M. Planel, 2000, 403.
131 Anf, AE B I 1153, Tunis, vol. 30, « Pièce arabe contenant quelques chefs d’accusation contre le Consul et les réponses émargées de Sidy Moustapha Khodja, envoyées à Monsieur de Fleurieu », f. 230.
132 A.-M. Planel, 2000, 51. E. Plantet, 1899, 505 : il est qualifié de « médecin du bey » dans une « liste des Français de Tunis » datée du 2 janvier 1813.
133 E. Plantet, 1899, Devoize à Talleyrand, Lazaret de Toulon, 5 septembre 1814, 522.
134 E. Plantet, 1899, Malivoire au vicomte de Chateaubriand, Tunis, 30 avril 1823, 588.
135 C. Monchicourt, 1928, 576.
136 A. Martel, 1956, 375.
137 Ḍiyāf, 1989, vol. v, 46.
138 P. Bourdieu, 1997.
139 M. Oualdi, 2005, 137-146.
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