Chapitre - IX - Anthroponymie
p. 261-283
Texte intégral
1Dès la fin du quatorzième siècle l'anthroponymie gabalitaine recourt régulièrement à un système à deux noms : "nomen proprium" et "nomen paternum", soit l'actuel prénom identifiant l'individu et le patronyme le rattachant à un lignage. Toutefois, la période couverte par notre recherche n'autorise pas la mise à jour du processus de formation de ce mode d'identification. Cependant, la consultation des chartes les plus anciennes du pays publiées par Clovis Brunei démontre que l'évolution de ce phénomène dans notre contrée place cette dernière dans la norme1. En 1109, la fondation d'un repas anniversaire par l'évêque Aldebert de Peyre2 démontre qu'en tant qu'ecclésiastique, et surtout en raison de son titre épiscopal, le prélat n'est identifié que par son prénom et son titre3 ; de même, son testament, supposé rédigé vers cette même date, mentionne-t-il l'expression nominative : "Aldebertus secundus episcopus Mimatensis". Aldebert constitua un legs à "Bertran, lo fil Bernard Bozuga". A cette époque, nous sommes donc en présence d'un mode d'identification reposant déjà sur le système à deux noms, exception faite pour les ecclésiastiques4, où l'identité des fils est donnée par référence au père. En 1134, lors d'un serment prêté par Garin à Guilhem, évêque de Mende, le contractant ne se nomme que par son prénom5, mais les témoins se déterminent majoritairement par un nom propre et un patronyme : "Raimond argidiaque, Benedeh Prior, Raimond Bernard, Raimond Amblard, Peiro Ricard, Jeremias, Manent6, Guillelm de Monmerle, Peiro Vergili, Bertrand Guigo, Ricard, Esteve Cota, Esteve Ponzo, Galteir, Bernard Lautald". Raimond est certainement l'archidiacre de la cathédrale, confirmant ainsi le rejet du patronyme pour le bénéficiaire d'une prébende, et il ne reste alors que deux personnages nommés : Ricard et Galteir7. La troisième charte remonte à 1147 et concerne l'hommage rendu à l'évêque par Astorg de Peyre. Les deux contractants ne sont identifiés que par les prénoms, mais les témoins le sont, par leurs prénoms et dignités pour les ecclésiastiques, et par les prénoms et patronymes pour les laïcs8. Dès le XIIe siècle, l'anthroponymie gabalitaine repose bien sur un système à deux noms, cohabitant encore avec celui à un nom. Ce dernier était un prénom, comme Ricard ou Galteir, ou un surnom. En effet, lors du serment prêté en 1152 par Giral et Ricart de Peyre à l'évêque Aldebert9, parmi les témoins figurent un "Jeremias" et un "Pelamorgue"10. Ce constat ne fait que rejoindre celui de Michel Zimmermann dans son étude sur la Catalogne11.
2Si les hommes sont identifiés par un système à deux noms, c'est loin d'être le cas des femmes et des enfants. Lors de leurs mariages, les jeunes des deux sexes sont généralement présentés comme "fils de" ou "fille de". Parfois les garçons portent directement leur patronyme, mais il faut en principe que les mariés soient adultes pour qu'ils déclinent leur propre identité. Les femmes ne suivent pas toujours ce dernier principe et continuent parfois à comparaître comme "veuve de". En conséquence, nous étudions la question féminine à l'aide des seuls testaments Dans un peu plus de 70 % des cas, la testatrice est citée comme "femme de" ou "veuve de" ; son nom n'est alors découvert que dans le corps d'un peu moins du tiers de ces actes, grâce à un legs fait à un frère, ou la mention du père. Ensuite, 11,65 % des femmes révèlent leur prénom suivi de celui du père et du nom de ce dernier. Mais, en 1427, Jausionde Artald allie les deux références en se disant "femme de prudent homme maître Pons Valdin, notaire de Mende, et fille de feu Durand Artald" ; elle récidive en 1430 en précisant qu'elle est veuve. Par contre, 16,45 % des testatrices livrent directement leur prénom et leur patronyme, telle Catherine Alègre, veuve de maître André Clapier. En 1477, le notaire détermine ainsi l'identité de sa cliente, "honnête femme Jehanne Berta, fille de feu Guillaume Bert, veuve de Jehan d'Erbosus"12, multipliant les rattachements patronymiques ou familiaux. Toutefois, nous constatons que le patronyme de 10,39 % de ces femmes n'est autre que celui de leur mari13. Agnès Petrota est la veuve de Pierre Petroti. Il ne peut être rétorqué que ces femmes étaient homonymes de leurs époux car le corps du testament d'Agnès de Fisto, femme d'Etienne de Fisto, indique qu'elle est la soeur de Pierre de Valgalier14. D'où vient cette différence entre les femmes ? Cette pratique semble davantage découler de l'attitude des notaires que d'une réelle volonté marquée par les femmes ou leurs familles. En effet, 57,50 % des testaments qui nomment la femme par son patronyme paternel ont été rédigés par les notaires du Malzieu, 25 % par ceux de Mende et le reste par ceux de Vébron. En proportion, cela représente respectivement près de la moitié des dernières volontés rédigées au Malzieu, 11,45 % de celles de Vébron et 1,20 % de celles de Mende. Peut-être les Cévenoles et les femmes des marches de l'Auvergne demeuraient-elles plus attachées à leur lignage que les mendoises, mais il ne faut pas donner un sens excessif à cet état de fait, et nous pouvons simplement conclure que la fille était généralement identifiée comme enfant de son père jusqu'à son mariage ; devenue adulte elle était la femme, voire la veuve, de celui avec lequel elle partageait sa vie ; mais aucune règle juridique ne l'empêchait de se faire connaître par le nom de son père alors qu'elle était mariée.
3Au XVe siècle, les patronymes gabalitains sont donc déjà très anciens et 15 % de ceux que nous avons retenus figurent dans la liste des mendois révoltés contre l'évêque de Mende en 126215. Mais il n'en demeure pas moins que le "modus operandi" de la désignation des individus est encore en mutation en cette fin du Moyen Age. En effet, si les notaires usent majoritairement du système à deux noms, un certain nombre de leurs clients ajoutent un "cognomen" d'origine assez variée selon les exemples pris en considération, découvrant ainsi une anthroponymie à trois éléments. Ce "cognomen" s'avère susceptible d'imposer un changement de patronyme, par confusion du nom de l'ancêtre éponyme et du surnom.
I - LES PATRONYMES
4Nous avons décidé de limiter notre étude à l'ensemble des noms des testateurs et des mariés que nous avons rencontrés, excluant les nombreux témoins et autres personnages relevés dans le minutier lozérien, ce qui constitue un fonds de huit cent soixante unités. Autrement, nous aurions aisément pu doubler ce nombre. Le reproche pourrait nous en être fait, mais nous avons préféré recourir à un ensemble rationnel où presque tous les patronymes ont été clairement identifiés et géographiquement localisés, ce qui n'aurait pas toujours été le cas si nous en avions enregistré la totalité. Si notre méthode n'est pas quantitativement exhaustive, elle ne présente pas pour autant d'inconvénient dans la mesure où notre but n'est pas de dresser une liste complète _impossible à réaliser_ des noms de familles gabalitains, mais de juger de l'état de l'anthroponymie du pays à la fin du Moyen Age.
A - Approche linguistique
5Nos sources étant rédigées en latin, nous nous heurtons à un évident problème de traduction. En effet, les noms inscrits dans les actes ne sont presque jamais ceux des parties, tels qu'ils existaient réellement, et correspondent à une latinisation fixée par les scribes. Ces derniers, opérant sans doute d'une façon très empirique, adaptent le patronyme de leur client selon leurs connaissances et leur pratique du latin et de l'étymologie. Un problème s'impose immédiatement : par juste retour des choses, devons-nous retraduire les expressions latines en français, voire en occitan ? Un certain purisme pourrait nous inciter à conserver la langue des notaires, mais ne serait-ce pas là un excès surréaliste éloigné de tout bon sens. En espérant demeurer le plus près possible de nos sources, ne sombrerions-nous pas dans la dérision ? Ainsi, ne serions-nous pas bien intrigués par un Antiquidentis dont nous ne saurions que faire, alors que le véritable nom de cette famille mendoise est "Vielhadent" ; et que dire d'un de Manso ou d'un de Mundo correspondant à "Dumas" ("Delmas") et à "Dumond" ? N'est-il pas plus sage de remplacer de fonte par "de Lafont" et de Collibus par "de Lascols" notoirement connus pour leurs origines toponymiques. Ces exemples suffisent à démontrer combien la traduction s'avère nécessaire pour disposer d'un fonds de patronymes correspondant mieux à la réalité. Mais nous sommes alors confrontés à un nouveau problème, tant la traduction est souvent difficile à déterminer. Notre habitude des noms lozériens, les formes retenues dans l'Armorial du Gévaudan et les occasionnelles apparitions de la langue vernaculaire dans certains actes nous ont aidé. Et si le nom occitan est rarement présent dans les contrats de mariage ou dans les testaments, du moins survient-il dans quelques instruments complémentaires. Enfin, la logique s'impose parfois d'elle-même, et comprendre qu'un Albareti correspond à un "Albaret" est aisé.
6Un dernier problème surgit : l'imprécision de l'orthographe. En 1469, dans le testament de Guillaume Abolenc, le patronyme de ce dernier apparaît sous trois formes différentes : Abolenc, Abolenca, Habolenc16. Les deux premières n’offrent pas de contradiction car elles désignent, l'une un homme, l'autre une femme ; mais pourquoi mettre un "H" dans la dernière occurrence ? Il faut donc accepter dès le départ les déformations classiques : un "c" remplace "qu", dans des formes comme "Alcays" et "Alquays", le "c" et le "ch" sont indifféremment utilisés pour "Chabane, Charle, Chasal" et "Cabane, Carie, Casai". Le "c" égale le "ss" ("Chauce, Chausse"), le "s" le "z" ("Chasot, Chazot"), et le "t" le "th" ("Thoayron, Toayron"). Devant le "b" se glisse souvent un "t", comme dans "Chabert" et "Chatbert". Le son "ai" est représenté par "e", "ei", "ay", "ey", dans la mesure où le "i" et le "y" ont la même valeur, comme dans "Masoier" et "Masoyer", et le "ey" le même effet que le "ay" ("Maynadier, Meynadier"). La forme "gn" est généralement transcrite en occitan par un "nh", comme dans "Montanhier, Montanhac" pour "Montagnier, Montagnac". Le "g" dur est ou non suivi d'un "u" ("Guitbald, Gitbald"). Le "o" est susceptible de se substituer à "au" ("Delclos, Delclaus") et à "ou" ("Crozet" et "Crouset"). La désinence occitane "o" se francise en "on" ("Marro, Marron"). Le "j" se mue occasionnellement en "g" : de "Méjan" vers "Mégan". Le "ll" est mouillé, non par un "i", mais par un "lh", dans "Melhac" préféré à "Meillac". Le groupe "ol" remplace "ou" ("Molto, Mouton"), et "al" le "au" ("Chaldeyrac, Chaudeyrac"). Les patronymes commençant par des voyelles absorbent parfois des consonnes, comme "Abolenc, Habolenc", mais c'est surtout le "D" qui exprime une rétractation de la préposition "de", comme dans "D'Alvernhe, Dalvernhe, Alvernhe", ou perdent leur voyelle (Escoti, Avinhola, Scoti, Vinhola). Enfin les consonnes sont doublées ou non sans qu'il faille s'en formaliser ("Bonet, Bonnet"). En outre, s'il existe des familles "de Lafont" et "de Lasfonts", les notaires intervertissent parfois les deux formes et l'identification des parties n'est rendue possible que par la localisation géographique ou une parfaite connaissance généalogique.
7Est-il dès lors nécessaire de préciser combien la recherche du vrai patronyme s'avère malaisée et ne livre souvent qu'une approximation, ce qui ne saurait gêner réellement puisque l'état civil ne s'est progressivement fixé qu'à partir du XIXe siècle. Le premier doute porte sur la nécessité de la traduction Albi, Arleri, Destrictis, Dominici, Martini, Molas, Pelorgas doivent-ils être systématiquement transformés en "Blanc, Arlier, d'Estrets, Dominique, Martin, Meules, Pélorges", ou une partie d'entre eux doit-elle être conservée sous la forme latine ? La traduction ne doit s'imposer que si nous avons de fortes raisons d'estimer qu'elle est impérative, comme avec Martin puisqu'il ne semble pas y avoir de "Martini" dans les siècles ultérieurs alors que nous trouvons trace de "Martin". Il est probable que des "Albi" et des "Blanc" coexistaient et il est pour ainsi dire impossible de réaliser une distinction entre chaque famille. Cela nous conduit à la dernière difficulté : celle non plus du choix de traduire ou non mais de la façon de le faire dans certains cas. De Manso, nous l'avons signalé, signifie "du Mas", et par conséquent "Dumas". La forme occitane "Delmas" n'est-elle pas préférable, et ce d'autant plus qu'elle apparaît parfois dans le minutier17 ? Or, cette même famille "Delmas" est citée par le Vicomte de Lescure pour s'être perpétuée jusqu'au XIXe siècle sous le nom de "Dumas de Cultures"18.
8Une partie des patronymes est directement orthographiée en occitan ou en français19 et accordée à un féminin en "a" s'il est porté par une femme, comme Codonch, Codonh qui donnent Codonha, ce sont bien évidemment les patronymes dont l'étymologie est la plus facile à découvrir, même si la raison pour laquelle le nom a été attribué reste obscure20.
9Lorsqu’une forme latine est utilisée, la grande majorité des patronymes est adaptée au génitif "i" de la seconde déclinaison21, tels Adatgerii, Aygoni, Ayraldi. Lorsque les noms s'achèvent par un "o" en occitan ou un "on" en français, la désinence latine "is" du génitif de la troisième déclinaison est alors utilisée, comme cela apparaît avec : Agulhonis, Lebratonis, Rochebaronis. Toutefois, bien d'autres patronymes suivent la même conversion : Barralis, Joglaris, Malevallis, Savajolis, Vitalis22. Certains actes diffèrent dans le choix opéré entre "i" et "is", et "Planh" est latinisé sous les formes Plani, Planis et Seguron en Seguri, Seguroni. L'usage de ces génitifs est supposé rappeler que le dénommé est "fils de" ; toutefois, il est certain qu'au XVe siècle, ce nom n'est plus un "nomen paternum" mais bien un nom éponyme dont le génitif rappelle le lien lignager. Il n’y a donc pas d'accord du nom en fonction du reste de la phrase selon la place qu'il occupe dans celle-ci23, mais seulement par relation avec le prénom.
10Toutefois, lorsque ces mêmes patronymes sont portés par des femmes, ils sont féminises et nous en avons la preuve avec plus de 15,95 % de ceux qui étaient déclinés en "i" et de 11,45 % de ceux en "is". Les notaires transforment ainsi Albareti, Atgerii en Albareta, Atgieyra et Cogulhonis, Geymaris, Roquonis en Cogulhenia, Gismara, Roquona. Ce "a" semble correspondre à un nominatif, mais il arrive, assez curieusement, que le patronyme décliné au féminin s'accorde alors avec le reste de la phrase, à l'accusatif, singulier ou pluriel, ou au datif de la première déclinaison. Nous relevons ainsi plusieurs désinences selon les actes : Berlerii, Berleyram, Fornerii, Fomeyriam, Ruphi, Rupham, Ruphe, Rebolli, Rebola, Rebelle, Rotgerii, Rotgeyra, Rotgerie, Rauseri-Rauseyras, et Ribayrolis, Ribayrolas. La féminisation du patronyme ramène parfois un thème plus proche de la forme française, ou occitane, ainsi "Masoyer" est-il écrit Masoerii mais féminisé sous la forme Masoyera, ce procédé est également révélé par : Folcherii, Folchieyra, Lauzerii, Lausieyras. Mais la féminisation complique parfois la version française. Dans certains cas ce système entraîne une mutation de la dernière consonne : Creguti, Creguda, Veylaci, Velaygua ; il peut aussi la fait disparaître : Dulsani-Dolsa, ou imposer un rajout : Fabri, Fabressa.
11Le second accord le plus fréquemment utilisé après le génitif est l'ablatif. Tout d'abord, 9,80 % des patronymes donnés à des mâles sont regroupés dans la première déclinaison avec là désinence "a". Un doute surgit d'abord sur le cas ; s'agit-il d'un nominatif, d'un vocatif ou d’un ablatif ? En fait, 6,95 % sont liés à un toponyme, comme Aerra, Basalgeta, Deveza, Roqueta, de Subtus-Via, alors que les 2,85 % restants ont des étymologies plus variées liées à un objet, un état physique ou moral : Bossa, Doladilha, de La Marca, Malabocha, Targavayra, Temeyra. Il est donc clair que les notaires ont voulu traiter le nom de famille comme un complément d'origine ou de moyen. L'ablatif de la seconde déclinaison "o" rattache à des origines topographiques, comme de Camaco, de Caturco, Chabrido, de Orto, de Manso, de Nemanso, de Ranco, de Rivo, Macello, Rieutorto24, ainsi que le pluriel "ibus" de Brossonibus, de Fontibus, de Collibuset le singulier de la troisième déclinaison "e", Bessede, Blacheyrie, Brieude, Bruguerie, de Cruce, Dorsserie, de Ponte, Fagone, de Fonte, de Ruppe, Rimeysie, Roverie, Vaysse, Vinhole25. Mais l'ablatif est, en de rares occasions, également utilisé pour des noms dont l'étymologie n'a rien à voir avec une provenance géographique, comme Viro ce qui semble vouloir dire "le fils venant de l'homme". Il sert aussi à rappeler une teinte, comme Negro et Blancone qui sont également orthographiés aux génitifs Nigri et Blanconis.
12Toutefois, plusieurs de ces patronymes adoptent d'autres désinences, et passent de l'ablatif de la troisième à celui de la première déclinaison Besseda, Brieuda, Vayssa, au génitif de la seconde Brugerii, de la troisième Fagonis, ou à l'accusatif pluriel de la première Dorssieyras, tout en étant d'origine géographique. De même, d'autres voient leur "o" se muer en un génitif Caturci, Chabriti, Macelli, ou un l'ablatif de la première déclinaison de Carnagua, voire de la troisième déclinaison Rivete, ou "ibus" devenir un génitif singulier avec Casalis26.
13Quelques cas d'accusatif pluriel de la première déclinaison "as" sont également à signaler, étant rattachés à une origine topologique, comme de Combetas, Despeyssas, Fangosas, Nozieyras, ou à des substantifs désignant un métier, voire une qualité, tels que Didas, Molas, Pelorgas, Valarias.
14Les noms composés s'adaptent à des déclinaisons différentes comme de Pulcra Valle, de Bella Valle, de Fontibusbessis ("de Fontsbesses") si c'est nécessaire, ou à la même si les deux composantes s'y raccordent, tels que Costarausta ("Costerouste"), Bonienfanti, Bonaenfanta. Toutefois, le double accord n'est pas toujours évident et nous sommes parfois confrontés à des Balidoyni, Bonigiraldiet à des Baldoyni, Bonbernardi.
B - Etymologie
15Sur l'ensemble du "corpus" des patronymes retenus, l'étymologie de 4,65 % d'entre eux n'a absolument pas pu être déterminée. Pour les autres, il est bien évident qu'un doute subsiste souvent, en particulier lorsque plusieurs pistes retiennent notre attention ; toutefois quatre grandes catégories s'affirment : les noms d'origine géographique, ceux qui correspondent à des noms de baptême ou d'origine germanique, ceux qui font allusion à un état social ou familial, et ceux qui se réfèrent à un état physique ou moral.
1°) Les patronymes d'origine géographique
1629,75 % des patronymes sont formés à partir d'un toponyme dont 89,55 % sont apparemment localisés en Gévaudan27, et 14,70 % de ces derniers sont portés par une famille qui réside encore dans le lieu illustré par leur patronyme28, comme les Bastide à Bastide, les Chasaux aux Chasaux, les Costerouste à Costerouste, en la paroisse de Recoules-d'Aubrac29, les Bosquet au Boschet (Rieutort-de-Randon), les Bragaho à Bragaho (Lanuéjols), les Frayce sur la borie de Frayce (Laubies), les Chasalmartin à Chasalmartin (Saint-Sauveur-de-Ginestoux), les Ranc au Ranc (Saint-Amans30). En outre, il convient d'ajouter les familles nobles qui portent le nom de leur fief : celles d'Ancette31 et de Solatges par exemple32.
17De plus, 7,35 % des patronymes ayant une origine toponymique gabalitaine33 désignent des familles qui résident à côté d'un manse homonyme, comme les Amelhac à Chirac, les Basalgette à Saint-Etienne-du-Valdonnez.
182,10 % des familles font allusion à une origine étrangère au Gévaudan, allemande, basque, catalane, anglaise, lombarde, écossaise, ou rappellent une province, Auvergne, Forez, Lavedan, Poitou et Velay34.
1910,45 % des noms se rapportent à une construction artificielle, comme une bourgade ("Borgade"), un ermitage ("Bonicel"), une jolie cabane ("Cabanel"), ou à une référence topographique naturelle telle qu'un orme ("Alméras"), de l'eau ("Aygon, Torrent") ou un tas de bois mort ("Sequier"). Parfois, le nom est directement formé par allusion à un nom de rivière ("Averos, Bes, Tarn") ou d'une forêt ("Mercoire").
20Dans les patronymes d'origine géographique, la particule ne joue qu'un rôle mineur. En fait, elle n'apparaît presque pas dans ceux qui introduisent un rappel d'un pays ou d'une province ; elle n'intervient que dans moins de 10 % des références à un objet topographique naturel ou artificiel. Par contre elle accompagne 24 % des noms de localités. Cette différence indique une plus forte nécessité de marquer la provenance par la préposition dans le second cas35. L'absence de cette dernière ne saurait être justifiée par l'utilisation du génitif ou de l'ablatif puisque sa présence n'empêche pas l'utilisation de l'un ou l'autre de ces cas de déclinaison. Si nous nous intéressons aux patronymes portés par des familles vivant encore sur un lieu homonyme, nous constatons que plus de la moitié d'entre eux est précisément assortie de la particule. En effet, si les Bastide, Costerouste et Tuzet s’affranchissent de sa présence, ce n'est pas le cas des Gado, Lasfonts, et Massegui. Les familles Masauric, des lieux de Bosquet, de Fraissinet-de-Fourques et de Gabriac usent toutes d'elle. Toutefois son allocation riest pas toujours régulière ; alors que la plupart des Masel négligent sa présence, ceux de Barre l'arborent ostensiblement dans leurs actes36. L'exemple des Monteilh démontre que le processus est encore plus complexe. Les Monteilh de Florac font précéder leur patronyme d'une particule, contrairement à ceux de Ribennes37. Or, s'il n'y a aucune parenté apparente entre les habitants de Florac et ceux de Ribennes, les seconds sont cousins de Monteilh résidant à Javols. Et plusieurs actes mentionnent un prêtre de cette famille, Guillaume, installé à Mende, indifféremment nommé "de Monteilh" ou "Monteilh"38. En outre, dans un acte de 1466, nous observons que Guillaume "Monteilh", fils de feu Guillaume, originaire de Monteilh (Bondons), alors du Vigan en Nîmois, délivre quittance de ses droits familiaux aux époux de ses parentes, Marguerite, fille de feu Guillaume "de Monteilh", et Marguerite, fille de feu Etienne "de Monteilh", dudit lieu de Monteilh39. Pierre Monteilh, tavernier qui tient taverne à Mende, n'échappe pas à ce comportement confus. Quand sa femme teste, en 1449, elle se dit femme de Pierre "Monteilh". Toutefois, à partir de 1458, Pierre décline son identité sous la forme "de Monteilh". Lui et les siens persévèrent ainsi par la suite, lorsque Pierre teste en 1472, quand il marie sa fille en 1473, et à l'occasion du testament de cette dernière en 148340.
21Pour comprendre ce phénomène, il faut sans doute remonter à l'origine du choix du patronyme. Tout d'abord, comme Michel Zimmermann l'a noté pour la Catalogne, le rappel de "cette localisation [dans le choix du patronyme] est moins souvent celle d'une origine que d'une résidence ; elle exprime l'enracinement d'une famille dans un patrimoine ou un lieu"41.
22Cela est largement démontré par les exemples de familles vivant sur un lieu homonyme. Certaines paroisses ont même largement contribué au développement de ces patronymes locaux, avec les Bessière, Colagne, Fangosas et Malassanha à Rieutort-de-Randon, ou les Bastide, Chasaux, Costerouste à Recoules-d'Aubrac. En conséquence, un homme ne reçoit pas le nom de son village d'origine après l'avoir quitté pour s'établir ailleurs ; il prend le nom du lieu sur lequel il est établi. Et si ses descendants s'éloignent vers une autre paroisse, ils portent toujours ce nom éponyme, comme Pierre de Roffiac, tisserand mendois, qui teste en 148242, alors qu'il est le fils et le frère de laboureurs vivant sur le manse de Roffiac à Saint-Bauzile. Le patronyme est alors une allusion à une résidence et à une origine, et la particule est rarement occultée. Mais quand une famille a quitté le berceau ancestral depuis plusieurs générations, le nom perd de plus en plus sa valeur toponymique, l'indication d'une provenance n'est plus utile : elle disparaît dans les documents et certainement dans les relations orales. Un Monteilh, fils et petit-fils de Monteilh qui auraient tous vécu à Mende, est susceptible d'oublier une particule qui n'a plus de valeur. Il est donc probable que certains pensent à préserver leur particule, en particulier lorsqu'ils appartiennent à des milieux où les intéressés bénéficient d'une culture suffisante pour défendre leur tradition, et cela malgré leur déracinement. En somme, c'est au porteur de soutenir la présence de sa particule, face à des scribes qui n'ont pas cette mission de préservation de l'intégrité des patronymes, comme l'auront les officiers d'état-civil de la société industrielle. Bien sûr, le notaire qui rédige les actes s'interroge toujours sur le sens à donner aux patronymes, en particulier pour les latiniser, mais la langue latine lui permet de jouer sur l'origine toponymique, et l'ablatif le dispense de l'ajout d'une particule pour marquer une provenance43.
23Michel Zimmermann précise que la particule caractérise tout particulièrement l'aristocratie. C'est vrai, mais les familles nobles qui tiennent leur patronyme d'un surnom n'ont pas encore éprouvé le besoin d'ajouter de préposition, comme les Albert, Bertrand, Drogon, Louet, Pagès et Pelamorgue. Les anoblis ou les usurpateurs, tels que les Alamand, Ebrard et Salayron, n'ont pas davantage envie de prouver leur récente ascension par cet usage. En fait, l'aspect nobiliaire de la particule résulte sans doute du fait que la tranche supérieure de la société était la plus apte à défendre sa perpétuation avec le nom, pendant que les notaires devaient la respecter plus attentivement que pour des paysans ou des petits artisans.
2°) Les patronymes d'origine chrétienne ou germanique
24Près de 21 % des noms de familles sont, soit d'anciens noms de baptême, soit des noms d'origine germanique. En fait, 5,35 % sont des noms de personnes formés à partir de langues germaniques, tels que Adatgier, Augier, Baldit, Chatbert, Gibelin, Jalbert, Savaric ; voire exceptionnellement hybrides entre le latin et le germain, comme Bonald. De plus, 5,95 % sont des prénoms d'origine germanique, comme Achard, Bochard, Renoard, ou comme les plus conventionnels Adhémar, Bertrand, Galtier, Garin, Léonard et Sicard. Ce sont donc un peu plus de 11 % des patronymes gabalitains qui proviendraient des dialectes germaniques. Même si cela est évident, nous rappellerons que ce pourcentage n'a aucun rapport avec l'importance des invasions barbares. D'ailleurs, la germanisation des noms était certainement plus élevée dans les premiers siècles du Moyen Age ; et Michel Zimmermann a démontré qu'en Catalogne la très grande représentation de ceux-ci avait été réduite par l'apport des toponymes.
25Les autres correspondent à des noms de baptême assez variés. Nous rencontrons trois Evangélistes, Jehan, Marc et Matthieu ; des Apôtres, André, Bartholomé, Jacques, Jehan, Matthieu, Philippe, Simon, Thomas, et sous les diminutifs "Paulet" et "Petrot", Paul et Pierre, et l'Archange saint Michel. Les martyrs ne sont pas négligés, avec Constans, Denis, Etienne, Georges, Gervais, Julien, Laurent, Maurice, Privat qui fut le premier évêque historique de Mende martyrisé au IIIe siècle, Quintin, Romain, Simon, Etienne (Stevenon), Valentin, Vincent et Vital. D'autres saints, également renommés, servent de référence, comme Alain, Anthoine, Benoît, Boniface, Clément, Dominique, Félix, Gallus (Gal), Gille (Gely), Germain, Grégoire, Ilaire, Martin, Maurin, Nicolas, Pascal, Pons, Roch et Urc.
26Nous retrouvons également des prénoms régionaux comme Astorg, désignant l'héritier des seigneurs de Peyre depuis le XIe siècle, Astruc, encore porté par les Gabalitains du XVe siècle, mais principalement par les filles sous la forme d'Astruge, et Viern qui est généralement attribué à des femmes. Les diminutifs, aphérèses ou hypocoristiques, alimentent également notre fonds : Bonbernard, Colet, Colin, Gillet, Masso, Michelon ; quelques-uns appartiennent typiquement à l'aire méridionale : Dedet et Dides qui sont des diminutifs de Marguerite, ou Alberjona, sans doute traduisible par "le jeune Albert". Enfin, une dernière catégorie est liée à une influence mystique : Jourdan, Panthacosta, Salvat et Savi.
3°) Les patronymes rappelant un état
27Un peu plus de 12 % des noms évoquent des états de toutes sortes. Certains sont très aisément reconnaissables, liés à un métier d'art, comme le médecin (Medici), le jongleur (Joglar), le luthier (Lheutier) ; à un métier manuel, le porteur d'eau (Egalenc), le fabricant de broches (Astier), le taillandier (Talhandier), le charpentier (Chapsier), le dollier (Doladilha), l'ardoisier (Lauzier), le tourneur (Tornayre), à un commerce dans le vestimentaire, le mercier (Borssier, Mercier), le pelletier (Pelhicier) ; au négoce, comme le marchand (Coret, Merchadier). Plusieurs rappellent les travaux champêtres : le bouvier (Boayro, Boyer, Hermentier), le tenancier d'une terre (Masoyer, Ramadier), le vendangeur (Levet), le coupeur de vignes (Poderos, Tranchaceps). D'autres encore font allusion à une fonction : le garde (Gachon, Garde), le péager (Pontier). Enfin, une dernière vague de patronymes évoque un lien d’affinité : le neveu (Bodet), le gendre (Filhastre), le filleul (Filholis) et le chef de famille (Maynadier). Outre ces étymologies plus ou moins évidentes, d'autres sont relativement obscures. Barrandon vient de l'occitan "Barrado" qui désigne une troupe d'ouvriers poussant une barre et, très certainement, par extension, un ouvrier ; Cordolh est probablement une déformation de l'occitan "courdelié" et correspondrait à un cordelier ; Planthier découlerait de l'occitan "plantié" qui désigne une vigne nouvelle et servirait alors à nommer un vigneron ; Berlier serait un cultivateur de berles et Ranvier un usurier.
28Au XVe siècle, ces patronymes, très anciens, n'ont théoriquement plus de rapport entre leur porteur et l'activité réelle de ces derniers ; toutefois nous avons la surprise de voir que plusieurs Fabri sont bien forgerons et des Fournil boulangers. A Barre, Pierre Fabri, fils de Vital, est forgeron lorsqu'il achète une châtaigneraie en 1468. En 1500, Vital Fabri, certainement le fils du précédent, exerce le même métier. A Châteauneuf-de-Randon, Jehan Fabri travaille dans le même secteur en 145344. A Chirac, nous rencontrons également Raymond, fils de Barthélémy, forgeron en 1394-1396, comme Pierre, à la même époque, tous deux suivis par Guillaume, mort en 1441, et par son fils Etienne décédé avant 1463. A Mende, Astorg du Fournil travaille comme fournier en 1432 et est cité comme tel après sa mort, en 1460, dans un acte concernant son fils, François. Ce dernier se trouvait déjà attaché à l'entreprise familiale dès 1458. Par la suite, François est devenu sergent. Le second fils d'Astorg, Jehan, est mentionné comme foumier en 1468-1471, mais il est également tisserand en 1470-147145. Toutefois ces occurrences sont certainement fortuites, et nous rencontrons François Sabbatier, cordonnier à Mende en 1458-1474, alors que son père, Pierre, alias Claustre, était marchand en 1428, ce qui n'excluait pas le commerce des chaussures, mais tisserand en 145846. Ainsi, la signification du patronyme est-elle indéniablement liée à l'activité d'un ancêtre, mais sa concordance avec le métier des hommes du XVe siècle n'est que le fruit du hasard.
29D'autres noms de familles, tout en exprimant un état, puisent assurément leur origine dans le mystère des sobriquets : le prieur (Prieur), le moine (Canonge, Morgue), le marguillier (Obrier), le pèlerin (Romieu), le roi (Régis), le comte (Comitis), le seigneur (Mossier), le bachelier (Bachalar) et le parier (Parier).
4°) Les patronymes d'origines variées
30Près de 8,60 % des noms de familles dériveraient d’une caractéristique morale, et 6,60 % d'un trait physique. Ces interprétations sont toujours aléatoires et nous nous contenterons de signaler des cas typiquement occitans, comme Bellier, rédigé sous les formes "Bellerii" et "Bellorii" qui correspondent certainement à la latinisation à peine transformée de "belour" (beauté) et de "belori" (parure luxueuse), et qui désignaient probablement un ancêtre de belle prestance. Golabrun, vient de "goula" (goinfrer) et "brun", symbolisant sans doute un homme gros et noiraud. Targavayra évoquerait un homme de bonne mine. D'autres sont plus évidents à comprendre : Malachane (mal proportionné, de l'occitan "mala-cana"), Pantart (gros, rustre), Paparel (gros mangeur), Reboul (arrondi). Parmi les traits de caractère, Afflatet est celui qui flatte, Agasse celui qui crie, Arlier un homme fat, Balsin un trompeur, Béchiquier un hargneux, Bestion un nigaud, Burlanda un railleur, Cobe un avare, Cortusson un individu courtois, Gorgolho un gourmand, Jaffuer un moqueur, Jausion un gai luron, Temeyra un fantasque et Valarias une joyeuse drille. D'autres patronymes ont des origines encore plus énigmatiques dont nous devons nous contenter de relever l'étymologie sans chercher à comprendre pourquoi un homme se trouva ainsi dénommé, comme Cogulhon (Primevère), Creysse (croître), Nurigat (nourrisson), Ozial (oiseau), Pinhard (cul) ou Trenquald (tranchant).
C - Fréquence
31Sur l'ensemble de notre fonds de patronymes, 33,25 % de ces derniers ne sont respectivement relevés que dans une paroisse47. Parmi ces exemples, figurent des noms d'usage apparemment courant, comme Adhémar, Anthoine, Bonenfant, Boniface, Félix, Jaucelin et Léonard, alors que d'autres sont spécifiques à notre pays car tirés de toponymes, tels que : Aures, Bayrac, de Brenoux, de Capluc, Chabrit, de Chasalmartin, Fayssac, Fosilhac, de Gado, Lauzier, Lebéjac, de Leyris, Maylet, Molherac, Nivolier, Ribenne, de Saint-Juéry, Tosqua. La rareté de quelques noms, comme La Fécange, tient à une origine lointaine et à une récente immigration, la Lorraine en l'occurrence.
32Ensuite, 23,95 % des noms sont repérés dans deux paroisses, et 42,80 % dans trois ou plus. Pour le reste, la représentation des patronymes décline vite, mais 14,65 % d'entre eux sont encore illustrés dans six paroisses ou plus, 5,25 % dans plus de huit paroisses et 3,70 % dans plus de neuf. Parmi ces derniers, des patronymes bien ordinaires, comme Arnald, Bastide, Bernard, Durand, Jourdan, de Lafont, Laurent, Pelhicier et Rotbert, ou un autre typiquement gabalitain tel que Badaros ; Dumas et Vital sont localisés dans dix-sept paroisses, Bonet, Boyer et Michel dans dix-huit. Les records sont battus par les Fabri et les Martin ; les premiers sont présents dans vingt et une paroisses du Gévaudan, ainsi qu'à Saint-Urcize en Auvergne, à Saint-Remèze et aux Vans dans le Vivarais ; alors que les seconds le sont dans vingt-trois paroisses du diocèse de Mende et à Villefort dans celui d'Uzès.
33Quelle est l'importance de la propagation des patronymes dont une famille, au moins, réside encore sur un lieu homonyme ? Proportionnellement, ceux-là ont mieux assuré leur diffusion que les autres, car 17,65 % d'entre eux seulement sont réduits à leur berceau, 26,45 % à deux paroisses et les 55,90 % restant s'étendent sur plus de trois paroisses du pays48. Ensuite, 26,45 % de ces patronymes sont localisés dans six paroisses ou plus, 14,70 % dans plus de huit et 11,75 % dans plus de neuf49. Toutefois, les plus répandus correspondent à des toponymes fréquents : Bastide, Dumas et Masel par exemple. Au contraire, les familles Chasalmartin, Gado sont issues d'un terroir particulier qu'elles n'ont pas quitté50, alors que les Saint-Bauzile ne résident qu'à Saint-Bauzile et Mende, ou les Vestit à Vestit (Rimeize) et Saziac (Laubies).
II - LES PRENOMS
34Pour dresser l'inventaire des prénoms en usage, nous avons relevé l'identité de l'ensemble des fiancés et celle de leurs parents lorsque ces derniers étaient connus, ainsi que celle des testateurs et de leurs époux. Tous les prénoms des témoins, des légataires et des tiers mentionnés dans les actes ont été volontairement laissés de côté puisqu'ils ne devaient statistiquement guère nous livrer de données complémentaires réellement utiles ; peut-être un prénom rare ou exogène serait-il apparu dans le nombre, mais sa représentativité s'avérerait presque nulle, comme "Astolonus" qui désigne un fils de la maison des Pelamorgue, issu des seigneurs de Palhayretz et qui sera par la suite seigneur de Malevieille51. Cette méthode a livré les prénoms de 6335 personnes, dont 56,63 % d'hommes. L'étude de leur dévolution et de leur transmission repose, au contraire, sur l'ensemble de notre documentation, aussi bien testamentaire et matrimoniale, que celle qui est en rapport avec le reste des instruments notariés.
A - Les prénoms en usage
35Les Gabalitains n'attribuent qu'un prénom à chacun de leurs enfants et ignorent donc le système d'allocation multiple. En règle générale, dans les actes notariés, les prénoms demeurent intangibles tout au long de la vie des intéressés ; tout au plus sont-ils occasionnellement convertis en diminutifs, comme Jehanne en Jehannette, Jacina en Jacinette ou Jaquette, Hugues en Hugon, Gonet, Aldebert en Berthon. Quelques cas d'aphérèse qui résultent plus d'une pratique orthographique que d'une volonté individuelle sont également rencontrés, comme Esclarmonde et Sclarmonde. Il n'est cependant pas exclu que certains individus aient porté des prénoms différents à diverses époques de leur vie et qu'il ne nous ait pas été possible de les considérer comme une seule et unique personne. Toutefois, nous connaissons un cas d'usage en contradiction avec le nom reçu au baptême. Ce fait nous est rapporté par la publication, en 1459, du testament de noble Raymond de Châteauneuf, seigneur de Saint-Remèze et d'Allenc, rédigé en faveur de son fils Sigismond. Jehan Montanhac, notaire de Mende, procureur de Jehanne de Cénaret, veuve de Raymond, expliqua alors devant les officiers de la Cour commune que l'héritier, fils premier né du défunt, était vulgairement appelé "Sigismond" mais avait été baptisé "Simon"52.
36Alors que le contingent d'hommes est plus nombreux, il ne fournit que soixante-quatorze prénoms, pendant que celui des femmes en a livré cent vingt-huit53. Cela signifie qu'en moyenne chaque prénom masculin est porté par 48,50 hommes et féminin par 21,50 femmes. Proportionnellement il y aurait donc près de deux fois plus de prénoms de femmes que d'hommes. En fait, trente-six prénoms sont communs aux deux sexes, sous des formes légèrement différentes, comme Anthoine-Anthonie, Astruc-Astruge, Galhard-Galharde, Pierre-Peyronne, Vital-Vidale. Toujours en moyenne, ces prénoms sont les plus utilisés puisqu'ils désignent quatre-vingt-deux hommes et trente-sept femmes, alors que les prénoms masculins restants nomment seize hommes chacun et les féminins quinze femmes. Mais la différence entre les deux sexes est encore confortée dans la mesure où les trente-six prénoms communs identifient 82,22 % des mâles54 et 48,25 % des femmes.
37Comme en Lyonnais, Jehan et Pierre sont les prénoms les plus usités par les hommes, 26 % pour le premier et 19,85 % pour le second. Ensuite nous relevons 12,45 % de Guillaume55, soit trois prénoms pour un peu plus de 58 % des mâles. 29,45 % des femmes sont prénommées Jehanne, et 11,17 % Catherine56. Après quoi, chaque prénom, Etienne, Agnès et Marguerite, est donné à plus de 5 % des contingents respectifs d'hommes ou de femmes ; puis Raymond, Anthoine, Jacques, Bernard, Vital, et Isabelle, Astruge, Béatrice et Hélix à plus de 2,50 % ; enfin Privat, André, Durand, Bertrand, et Anthonie, Guillauma, Philippa, Françoise, Raymonde, Alasacie et Delphine échoient à plus de 1 % des personnes des sexes concernés. Il apparaît donc que treize prénoms d'hommes et quinze de femmes identifient 88,35 % des premiers et 79,35 % des secondes57. En conséquence, soixante prénoms sont donnés à 11,65 % des hommes, et cent treize à 20,65 % des femmes. Parmi les prénoms masculins les plus rares, nous relevons Audin, Bonet, Ciston, Denis, Gitbert, Grégoire, Guilhabert, Léonet, Ligier, Marquez, Odilon, Rostaing, Sanchon, Véran et Vincent ; parmi les féminins, Agathe, Amblarde, Andréa, Antina, Béralde, Colombe, Dézidérade, Dragonette, Esperta, Euthine, Félicie, Garine, Gauside, Longebrune, Louise, Madeleine, Magenque, Maralde, Marcébélie, Pétronile, Primevaire, Randone, Ricarde, Salamonde, Tecle et Yrlande. Il est donc frappant de constater que les filles bénéficient de plus de noms individuels que les garçons mais que le choix est majoritairement réduit à un groupe restreint de prénoms.
38Nous observons que seuls les Evangélistes Jehan et Matthieu sont rappelés dans le choix fait par les Gabalitains. Luc n'apparaît que sous la forme du diminutif "Luquet", ou les féminins "Lucie et Luquette". Les Apôtres André, Bartholomé, Jacques, Jehan, Matthieu, Philippe, Pierre, Thomas, Simon sont présents alors que Paul est représenté par l'hypocoristique "Paulet". Détailler la liste des autres saints s'avère inutile ; tout au plus noterons-nous la présence de sainte Enimie, qui vint trouver asile sur les rives du Tarn et fut à l'origine de la fondation de la ville qui porte son nom ; de saint Véran que la tradition dit originaire de Lanuéjols, près de Mende58 ; de saint Privat, premier évêque historique de Mende ; d'Urbain, prénom adopté par Guillaume Grimoard, lorsqu'il devint pape au XIVe siècle.
39Certains prénoms rappellent les grandes dynasties méridionales comme Bérenger, porté par les seigneurs de la Provence qui furent un temps vicomte du Gévaudan, Sanche qui évoque un frère d'Alphonse, roi d'Aragon, également maître de la vicomté, Sancha, Arzinde (Arzens), illustrés par des comtesses de Toulouse59. Enfin, se manifestent des prénoms liés aux maisons nobiliaires régionales, comme Astorg, dont nous avons déjà signalé qu'il servait à désigner le fils aîné et héritier des barons de Peyre, Marquez, utilisé par plusieurs barons de Canilhac60, Odilon arboré par un grand nombre de seigneurs de la baronnie du Tournel à partir du XIIe siècle, Garin, ou Guérin, que les seigneurs d'Apcher utilisent systématiquement du XIIe au XIVe siècle61.
B - La dévolution et la transmission des prénoms
1°) La tradition familiale
40Nous avons signalé que certains prénoms étaient spécialement employés par quelques grandes familles du Gévaudan. Les Peyre, par exemple, sont illustrés, dès le XIe siècle, par Astorg Ier, suivi sans interruption par des homonymes jusqu'au douzième Astorg qui fut chambellan du duc d'Anjou et testa en 1382. La rupture dans la succession des Astorg de Peyre résulte de l'union, demeurée stérile, d'Astorg ΧII auquel succédera son frère cadet Aldebert. Les fils et petit-fils d'Aldebert relèvent le prénom d'Astorg, mais Astorg XV, pour une raison méconnue laissa huit enfants, peut-être neuf, dont deux ou trois fils prénommés Anthoine et Aldebert62. Anthoine n'eut que des filles et son héritage passa d'abord à son frère cadet, Aldebert, puis à la maison de Cardaillac, des seigneurs de Saint-Cirq63. Les barons de Peyre adoptaient un second prénom, Aldebert, pour les cadets et nous venons de constater que deux Aldebert remplacèrent des Astorg décédés sans postérité. Une douzaine de ces Aldebert de Peyre frirent voués à l'Eglise, comme Aldebert Ier, frère d’Astorg Ier, évêque de Mende de 1050 à 1095, et son neveu, Aldebert II, chanoine de Brioude puis évêque de Mende de 1099 à 1123. Par la suite, les Aldebert abondent dans les Ordres, avec des prévôts de la cathédrale de 1242 à 1267 et en 1361, un préchantre en 1282 qui deviendra évêque de Viviers de 1298 à 1306, et un autre évêque de Mende de 1441 à 1443. Chacun des deux Aldebert qui se substituèrent à un Astorg avait d’ailleurs dû résigner son bénéfice et renoncer à son état d'ecclésiastique. C'est là un comportement typique de la grande aristocratie régionale, les seigneurs du Tournel se prénomment Odilon ou Guigue, ceux d'Apcher Guérin, ceux de Canilhac Marquez et ceux de Mercoeur Béraud ; mais d'autres maisons échappent à cette attitude, comme les barons de Cénaret, et toutes ces maisons, à partir du XVe siècle, commencent à être moins régulières dans cette répétition et innovent parfois. C'est à cette époque qu'Anthoine de Peyre hérita de son père Astorg. Chez les Apcher, Guérin VIII, sénéchal du Rouergue en 1386, eut bien un fils, Guérin qui lui succéda mais qui mourut sans postérité et fut suivi par Béraud. Ce dernier a trois fils légitimes, Claude, Jehan et François. Jehan en a trois, Jacques, Anthoine et Guy, et le prénom Guérin s'efface de la tradition sans pour autant être remplacé par un autre. En fait, à la fin du Moyen Age, les prénoms héréditaires disparaissent et les grandes familles, qui s'identifiaient par un patronyme et distinguaient leurs aînés, voire leurs cadets, par un prénom spécifique, recourent à un autre système dans lequel les maisons s'enrichissent, à chaque génération, de prénoms nouveaux64.
41Dans la petite noblesse, le comportement anthroponymique s'avère moins rigoureux. La généalogie des Villaret démontre que quelques prénoms revenaient, comme Gaucelm, Guillaume, Guy et Foulques, mais leur usage précaire ne durait qu'un temps ; les Renard n'ont aucune tradition à long terme. Les Merle, coseigneurs de Serverette, partagés en plusieurs branches, ont une attitude mitigée. La branche des Montmerle choisit surtout Pierre et Guillaume ; celle de La Baume Artaud, mais plusieurs de ses fils sont nommés Pierre et Raymond ; celle de Chazaux est représentée par des Hugues et des Raymond65. Là aussi, à compter du XVe siècle, la tradition s'affaiblit comme si la fin du Moyen Age favorisait le développement d'un nouveau comportement où les moeurs anthroponymiques ancestrales seraient moins respectées, même si leur observance s'affirme encore épisodiquement. Si nous consultons les tableaux généalogiques placés en annexe, nous constatons que les Bressoles et les Atger ne s'encombrent pas de telles dispositions. Les fils et petit-fils aînés de Pierre Atger "Fresquet" sont Jehan et François, ceux de Pierre de Bressoles, Louis et Jacques. Chez les Corsac, Bertrand est suivi par Jehan et par Jacques, mais il est vrai qu'un frère de ce dernier est prénommé Bertrand. Et les exemples se renouvellent avec noble Gervais, Jehan et Guynet Dumond, ou Bartholomé, Vital et Jehan de Recoules66.
42Chez les roturiers, les cas de non-reconduction des prénoms sont nombreux. Anthoine Basset, tisserand de Mende, qui teste en 1466, a deux filles et un fils, André ; ce dernier fut le père de Bertrand. Les Blanquet, de Grèzes, sont représentés, sur trois générations, par Bernard, Jehan et Pierre. Dans la seconde moitié du XVe siècle, Jacques Boyer, notaire de Nîmes, originaire de Mende, est le successeur de son père, Urbain, et de son grand-père, Raymond, qui furent marchands dans la capitale du Gévaudan67. Bien d'autres familles pourraient être ainsi citées, mais cela ne ferait que surenchérir sur une attitude commune. Au contraire, plusieurs maisons dans lesquelles les héritiers portent le même prénom sont dévoilées par nos sources. En 1435, Jehan Chabanon est institué héritier universel par sa grand-mère. Il est le fils et le petit-fils de deux Jehan. En 1472, Jehan Salanson senior, de Bramonas (Barjac), frère de Jehan junior, de Saint-Bauzile, est le fils de Jehan et le petit-fils d'un autre Jehan68.
43Souvent, le prénom n'est pas dévolu aussi régulièrement à l'héritier de l'oustau, mai » ; il appartient au fonds patrimonial, comme s'il ne sortait pas de la parenté, sans servir, cependant, à désigner un ordre successoral. Chez les André, de Vébron, l'aïeul, Bertrand, est le père de Jehan Ier, Jehan II, Pierre et Anne. Jehan Ier, notaire de Vébron en 1375, laisse un fils Jehan qui semble lui succéder. Jehan II a plusieurs enfants, dont Jehan et Pierre, le second étant l'héritier. Pierre, le fils de Bertrand, utilise de nouveaux prénoms pour ses deux garçons, Martin et Gaspard, mais le testament du deuxième mentionne plusieurs mâles dont Pierre, l'hoir, et Jehan69. Une question subsiste : ces derniers ont-ils été baptisés par respect de la perpétuation anthroponymique ou bien bénéficièrent-ils d'un apport exogène ? La seconde hypothèse ne doit pas être ignorée dans la mesure où la femme de Gaspard, Alaycette Atger, était la fille d'un autre Pierre.
44Un regard sur les tableaux généalogiques placés en annexe offre de nouvelles informations. Chez les Dumas, originaires d'Altayrac (Saint-Gervais), l'une des branches, issue de Pierre Dumas Ier, s'installe à Mende où se succèdent, de père en fils, Pierre Dumas II dès 1417, Pierre ΙII en 1469, Pierre IV en 1480 et Pierre V en 1496. Guillaume Robin Ier est suivi par ses fils et petit-fils, Guillaume second et troisième. Deux Privat et deux Bernard Robin siègent comme chanoines dans la cathédrale de Mende. Chez les Alamand, les Valdin et les Robin, les prénoms jouent un rôle successoral, selon que l'enfant est un héritier ou un cadet voué à l'Eglise ; mais ils ne sont pas le fruit d'une tradition ancienne et ils ne parviennent pas à s’affirmer dans la "geste familiale". Les Michel, paysans originaires des Violes (Chirac), dont plusieurs fils s'établissent dans la ville même, jouent de quelques prénoms : Etienne, Raymond et Guillaume, auxquels ils en ajoutent d'autres pour les enfants excédentaires. En revanche, les Badaros, de Saint-Gervais, n'assurent pas de continuité anthroponymique, Guillaume Ier est le père de Guillaume II et Jehan Ier. Guillaume II laisse un Jacques, Jehan Ier un fils Jehan II qui ne semble pas avoir de fils70.
45En fait, conjointement à la dévolution d'un prénom sur plusieurs degrés s'opèrent souvent des apports récents, comme chez les Dumas de Mende, où fleurissent provisoirement des Jehan, Vital, Bérenger et Guillaume, alors que deux cousins sont voués à saint Anthoine. Artus est même alloué au fils du notaire Anthoine, secrétaire du roi et fermier de l'Equivalent Ce prénom, totalement exogène à la famille Dumas et au pays, a sans doute été inspiré par noble Artus de La Forêt, gouverneur de Mende dès 1479 et bailli du Gévaudan peu après. Et nous constatons que les familles en pleine ascension sociale n'éprouvent pas systématiquement le besoin d’adopter une attitude qui caractérisait les nobles des siècles précédents. Les Monbel attribuent des prénoms identiques à un oncle et un neveu, ou à un père et un fils. Guillaume Monbel Ier, marchand en 1390-1404, est le grand-père de Guillaume II, chanoine de Mende, et de Guillaume ΙII, juge de la Cour commune. Pierre premier a un fils, Pierre II, et "Jehan" sert à désigner six garçons de cette famille. Au XVe siècle, la dévolution du prénom ne répond qu'exceptionnellement à une tradition héréditaire prolongée. A l'occasion, un père est suivi par un fils homonyme, des oncles par des neveux, et nous verrons même, en étudiant les surnoms, que plusieurs frères étaient parfois prénommés de la même façon Toutefois la situation se dessine d'une façon plus complexe, comme si les prénoms ne symbolisaient plus la place individuelle de chacun dans l'ordre successoral, mais plutôt une relation moins aisée à percevoir, ou peut-être la volonté d'un individu de transmettre son nom personnel à un proche, à son filleul par exemple.
2°) Le parrainage
46Jack Goody constate que "les prénoms furent de préférence hérités des parrains ou choisis par eux"71 et nous continuerons sur cette base, non pour suivre cet auteur mais tout simplement parce que le premier regard porté sur nos sources nous pousse à conclure de la sorte. Aborder la question du choix par le parrain s'avère impossible dans la mesure où il faudrait posséder des témoignages directs permettant de savoir si c'est bien celui qui tint l'enfant sur les fonts baptismaux qui décida du prénom attribué ; celle de la transmission par le parrain serait parfaitement analysée avec des actes de baptême dont nous ne disposons pas pour cette période ; toutefois deux sortes de documents autorisent une recherche de ce type : les deux petits "livres de raison" rédigés par deux notaires en tête d'un de leurs registres et les legs consacrés par les testateurs à leurs filleuls.
47Près de 7 % des testaments mentionnent des filleuls ; toutefois nous excluons dès le départ 42 % d'entre eux car les enfants concernés ne sont pas du même sexe que leur parrain, ou marraine ; or, il est bien évident que la dévolution du prénom par la filiation spirituelle n'est envisagée qu'entre individus de sexe identique, une Agnès n'ayant guère la possibilité de nommer son filleul Agnès ! En conséquence, nous suivons le principe que cette transmission est réalisable du parrain vers le filleul et de la marraine vers la filleule. Lorsque le testateur s'intéresse à un filleul de son sexe, son prénom est alors dévolu à ce dernier dans 79,15 % des cas, sans qu'il y ait beaucoup de différence en fonction des sexes, puisque 83,35 % des filles reçoivent le nom de baptême de leur marraine, et 77,80 % des garçons celui de leur parrain. C'est donc essentiellement le prénom de celui, ou de celle, qui sera chargé de guider la spiritualité du nouveau venu dans la Chrétienté qui est transmis lors de l'onction. Toutefois, nous pouvons légitimement nous interroger sur le fait qu'une partie des enfants reçoive un autre nom personnel.
48La contradiction s'affirme très ostensiblement lorsqu'une même personne a tenu plusieurs enfants sur les fonts baptismaux. C'est ainsi que les filleuls de dom Olivon Michel, prieur de Chaudeyrac et bénéficier de Mende, sont Olivon Fenolh et Anthoine Palmier, et ceux de Déodat Hugonet, homme d'armes de Mende, Etienne Bonier et Déodat Hugonet72. Noble Agnès d’Ayres, épouse de noble Guillaume des Andes, mentionne ses filleules Catherine Gras et Nesette73 de Moysac. Toutefois, plusieurs testateurs transmettent leur prénom à l'ensemble de leurs filleuls, comme Robert Petit, prêtre bénéficier de Mende, qui cite ses trois filleuls, Robert Atrasic, Robert Pascal et Robert Suau ; ou Pons de La Roque, prêtre de Saint-Symphorien, qui constitue des legs aux deux siens, Pons Sobrier et Pons Dels Estrets74. Une seule déduction s'impose en guise d'explication : le libre arbitre des parents ou du parrain.
49Dans 42,85 % des cas où un fils reçoit le prénom de son parrain et dans un cinquième de ceux où c'est une fille qui le prend de sa marraine, le géniteur, ou la génitrice, n'est pas homonyme75. En revanche, dans 17,85 % des situations où l'enfant est prénommé comme le parrain, ce dernier portait le même prénom que le père. Ainsi Jacques Bestion, d'Aspres (Saint-Gervais), est-il le filleul de dom Jacques Julien et le fils de Jacques Bestion. Cette dernière pratique impliquerait que le père ait voulu transmettre son prénom à son fils tout en respectant la tradition du parrainage. Le parrain serait alors choisi en fonction de son propre prénom qui autoriserait la reconnaissance d'une double filiation, génétique et spirituelle. En outre, pour une raison inexplicable, l'enfant se voit parfois octroyer un prénom qui n'est ni celui de son père, ni celui de son parrain, comme Etienne Boet, frère mineur de Mende, fils de Colin et filleul de dom Jehan de Fenils76.
50La parenté entre le parrain et son filleul n’est pas stipulée dans près de la moitié des actes. Cela signifie-t-il qu'il n'y en a aucune ? C'est fort possible et c'est même prouvé dans quelques cas, comme dans le testament de Pierre d'Atgia, curé d'Esclanadès, prêtre du Collège Saint-Grégoire de Mende, originaire du Limousin, qui nomme son filleul, Pierre Vielhadent, issu d'une famille mendoise77. Quand la parenté est attestée, nous n'avons pu en établir le lien précis dans 24,25 % des cas. Pour les autres, 36,35 % des enfants sont les neveux de leur parrain, 15,15 % les nièces, 12,10 % les petits-neveux, 6,05 % des petites-filles, 3,05 % une soeur, et 3,05 % un cousin. C'est donc essentiellement la relation avunculaire qui est privilégiée.
51La meilleure synthèse de l'ensemble de ces données reste à faire à partir des deux livres de raison des notaires Jehan Julien, de Mende78, et Jehan Martin, de Vébron79. Jehan Julien eut six enfants légitimes. A chaque fois, les enfants de Jehan Julien héritent du prénom du parrain, ou de la marraine, selon qu'il s'agit d'un garçon ou d'une fille. Jehan, dont nous ignorons s'il avait de la famille en vie, opère des choix de "relations publiques". D fait appel au neveu de l'official de Mende qui était son maître, à plusieurs de ses confrères et à la femme de l'un d'eux La plupart du temps, il place le nouveau-né sous la protection de prêtres dont l'influence dans la cité gabalitaine est connue par d'autres actes. Enfin, il noue une relation plus intime avec son voisin et avec des marchands mendois. Jehan Martin "junior" agit différemment avec ses douze enfants. Jehan Martin choisit ses compères et commères dans des milieux différents. Au sein de sa famille agnatique et cognatique ; le choix de son beau-père pour le premier fils assure la transmission de son prénom par l'entremise du parrain. L'enfant décède après une quarantaine de jours et, onze ans plus tard, un autre fils sera baptisé Jehan grâce au choix de parrainage porté sur Jehan Monbel, célèbre juriste mendois. Des soeurs et des beaux-frères du notaire interviennent aux côtés des notables de la région, confrères, ecclésiastiques, officiers, nobles et même un grand seigneur comme Bertrand de Taulignan, maître de cette partie des Cévennes. En fait, sur douze enfants, dix recevront le prénom du guide spirituel ; seuls Guillaume et Louise feront exception et ce fait nous intrigue. Pour la seconde, l'explication découlerait du fait que le père de la marraine était prénommé Louis. Mais pour le premier, le mystère persiste. Une incontestable certitude se forme. En cette fin du Moyen Age, le nom de baptême est attribué au regard de celui qui porte l'enfant sur les fonts baptismaux Les exceptions ne concerneraient qu'un peu moins du cinquième des nouveau-nés et résulteraient, soit de la volonté de transmettre un prénom familial _paternel par exemple_ qui n'aurait pu être dévolu par l'intermédiaire des parrains, soit d'un désir plus énigmatique à satisfaire : vocation à un saint, souvenir d'un ami, d'un parent défunt, ou, pourquoi pas, simple tendance esthétique.
52Devons-nous conclure, comme Jack Goody, que ce mode de dévolution entraîna un appauvrissement du nombre de prénoms80 ? C'est une éventualité si nous nous référons à l'ensemble des prénoms donnés dans tout le royaume, mais c'est peu justifié dans les limites du Gévaudan. En effet, si l'élection du parrain s'était systématiquement portée sur un proche parent, le problème se serait vite posé ; toutefois le recours à des tiers est fréquent81 et les nouveaux prénoms affluent ; il suffit de rappeler nos propos sur Astolon Pelamorgue et Artus Dumas. L'existence d’une immigration constante, tant en raison des échanges matrimoniaux, que de l'arrivée dans notre pays d'ecclésiastiques ou d'officiers, assure un renouvellement, un enrichissement du fonds de prénoms, même si la plupart de ces derniers ne sont portés que par une minorité d'individus, alors que la majorité se contente des classiques Jehan, Jehanne, Guillaume et Pierre. Ce nouveau système est plus prolifique que celui qui consistait à reporter sur les enfants les seuls prénoms de la famille, ceux du père, de l’aïeul maternel, des oncles et tantes.
III - LES SURNOMS
53La théorie classique, et en partie fondée, consiste à affirmer que le surnom serait le produit d'une excessive et encombrante homonymie résultant du nombre limité de prénoms en usage. Jack Goody ne déclare-t-il pas qu'une "démographie en essor et un stock de noms en baisse rendaient plus aigu le problème des homonymes et stimulaient le développement des surnoms susceptibles de servir de carte d'identité complémentaire"82. Toutefois, les motivations conduisant à l'adoption d'un troisième élément de dénomination s'avèrent bien plus complexes et rappellent sensiblement la formation des patronymes catalans vers le XIe siècle, lorsque des noms de lieux vinrent s'ajouter au "nomen proprium" et au nom fossilisé de l'ancêtre éponyme83. D'ailleurs, la compréhension de ce phénomène, mieux éclairé à la fin du Moyen Age, serait susceptible de faciliter celle de la révolution anthroponymique des Xe-XIIe siècles.
54Aucune testatrice ou fiancée n'est identifiée à l'aide d'un surnom, mais les époux des premières et les pères des secondes le sont occasionnellement. Le surnom est donc presque essentiellement une composante masculine ; ainsi 7,35 % des contrats de mariage et 6,30 % des testaments en mentionnent-ils. Toutefois, dans le second type d'actes, les pourcentages évoluent selon le statut de l'intéressé. 7,95 % des testateurs laïcs complètent ainsi leur identité, alors que ce n'est le cas que de 5,95 % des époux de testatrices et de 2,55 % des ecclésiastiques. Cette différence tient sans doute au fait que le mari et le prêtre sont suffisamment distingués par leur situation d'époux ou de prêtre, sans qu'il soit nécessaire de rapporter d'autres informations que le prénom et le patronyme. Cependant, ces appréciations calculées à partir des deux principales sortes d'instruments composant nos sources ne doivent pas être considérées comme exhaustives car tous les contractants n'ont pas forcément éprouvé le besoin de révéler leur surnom. Opérer une classification s'avère toujours difficile, mais la distinction entre deux catégories principales de surnoms est fondée dans la mesure où certains servent à compléter le prénom et ne sont pas héréditaires, alors que les autres s'ajoutent au patronyme et se transmettent généralement de génération en génération84.
55Le premier type se réfère uniquement à un ordre d'ancienneté de l'individu concerné par rapport à un homonyme. En présence de deux Pierre, l'un sera le "senior", l'autre le "junior", et si un troisième est cité, il sera "méjan"85. Nous le rencontrons dans 51,75 % des contrats de mariage et dans 39,70 % des testaments présentant un surnom. Cette différence démontre bien leur aspect logiquement éphémère. Lors de la constitution dotale, la nécessité commande au fiancé, ou parfois au père d'une jeune fille, de se positionner face à un géniteur ou un aïeul en vie, alors qu'au moment du testament, le soussigné se trouve rarement obligé de se qualifier en tenant compte d’un ascendant ; ses descendants homonymes, s'il en est, seront nommés dans le corps de l'acte sans entraîner de confusion ; seuls subsistent alors les homonymies avec des collatéraux qui justifieraient encore une telle mention. Si aucun surnom n'est alloué à des testatrices, des femmes identiquement prénommées sont toutefois distinguées par les "senior" et "junior" accoutumés. En 1477, un extrait du testament d'Isabelle, veuve (l'Egide Chauce, précise qu'elle avait deux neptes86 Catherine "junior" et "senior". Dans les dernières volontés de leur père, Guillaume Michel, de Peyrefiche (Barjac), trois Béatrice sont successivement dites, Béatrice, Béatrice junior et Béatrice méjane87. Ce sont là des exceptions qui ne perdurent apparemment pas et qui résultent probablement de la volonté du testateur d'indiquer clairement ce que reçoit chaque fille en excluant tout risque de confusion. Du moins n'avons-nous pas la preuve qu'une femme ait éprouvé la nécessité de se surnommer ainsi ; sans doute parce que dans la plupart des actes elle se définit en déclinant sa filiation ou son alliance. En fait, la haute fréquence de certains prénoms masculins suscitait d'indéniables problèmes. Un regard porté sur la famille Michel, de la paroisse de Chirac, suffit à démontrer qu'aux environs de 1460, coexistaient de nombreux parents homonymes qui parvenaient toutefois à se distinguer les uns des autres grâce à leurs professions ou à leurs domiciles ; et c'est ainsi que nous avons réussi à identifier chacun d'eux. Etienne II est brassier à Chirac, son fils, Etienne ΙII, est tisserand, Etienne IV, son neveu, est fustier. Le clerc Guillaume II devient prêtre, Guillaume IV exerce le métier de tailleur, Guillaume Ier habite aux Violes, et Guillaume V se présente comme le fils de Raymond IV. Ce dernier est fustier, son cousin germain Raymond ΙII est tisserand ; quant à leur cousin, Raymond II, il réside aux Violes. Pourquoi avoir observé une telle répétition dans l'octroi des prénoms ? Le respect de la règle de dévolution par le parrainage conduisait sans doute à cette situation, et ce type de surnom différenciait des frères, des cousins, un père de ses fils, et un oncle de son neveu.
56L'exemple de la famille Sarron dévoile les limites de ce système88. A l'origine, apparaissent deux frères : Pierre senior, de Saint-Léger-du-Malzieu, et Bernard, de Vayssière. Le premier est le père de Pierre junior et l'aïeul de Catherine junior et senior. Le second eut deux fils Pierre junior et senior, un petit-fils, Jehan junior, né de Pierre junior, et trois autres issus de Pierre senior : Pierre "le plus vieux", Pierre junior et Jehan senior. La première distinction s'imposa entre Pierre senior et son fils junior, de Saint-Léger du Malzieu, puisqu'ils étaient mentionnés ensemble dès 1434. Mais, à la même époque, Pierre senior, fils de Bernard, était déjà un homme mûr avec plusieurs enfants. Chacun des deux cousins était marié à une Raymonde, ce qui multipliait les risques de confusion. Heureusement, les lieux de domicile étaient différents, mais aucun des deux ne semblait vouloir compléter son identité en reprenant le toponyme. En fait, Pierre senior, de Vayssière, résout le problème en se présentant comme "senior" et fils de Bernard, alors que Pierre junior, de Saint-Léger-du-Malzieu, se disait "junior" et fils de Pierre senior. Pierre senior, fils de Bernard, énumère ses enfants, dont Pierre le plus vieux et Pierre junior. Il décède peu après, puisque sa mère, Dézidérade Galtier, teste le en 1439 en faveur de l'autre Pierre, dont elle dit simplement qu'il s'agit de son fils, et de Jehan Sarron, son petit-fils né du défunt Pierre dont elle rappelle le titre de "senior". En 1447, Jehan Sarron, prêtre de Vayssière, teste en faveur de son frère Pierre senior, qui est en fait l'ancien junior, et du fils de celui-ci, Jehan. Peu auparavant, un autre Jehan Sarron se marie en se présentant comme fils de feu Pierre senior. Ainsi le premier Pierre senior, par-delà sa mort, n'en continue-t-il pas moins à être ainsi dénommé, pendant que son frère est luimême devenu "senior". Assez curieusement, le second Pierre senior, après sa disparition, est nommé "junior", lors du mariage de son fils Jehan junior. Tout cela était logique : en 1447, un Pierre senior vit, un autre est mort, et le fait de vivre sert de différence entre les deux, mais permet aussi de distinguer celui qui vit de ses neveux, Pierre "le plus vieux" et Pierre junior. En 1450, le statut de défunt des deux Pierre issus de Bernard imposait un retour à l’ancienne terminologie. Pierre junior, fils de Bernard, ne pouvait plus être confondu avec son neveu, Pierre junior, fils de Pierre "senior" ; et la distinction à faire se recentrait uniquement sur les deux fils de Bernard. Ces surnoms, junior, senior, méjan, ont donc une valeur personnelle et non transmissible, et leur perpétuation ne se maintient après la mort de l'intéressé que pour continuer à l'identifier par rapport à ses prédécesseurs ou à ses successeurs.
57Les autres surnoms épousent l'apparence d'un patronyme et sont supposés s'attacher à distinguer, comme les précédents, des homonymes ; toutefois leur transmission héréditaire n'infirme-t-elle pas cette assertion et ne pouvons-nous pas pousser plus loin l’analyse en considérant qu'ils différencient les familles ayant un nom identique lorsqu'elles habitent un même lieu, ou les branches différentes d'une maison, quand bien même elles résideraient dans des localités distinctes. La multiplication des homonymies développe la pratique d'une anthroponymie à trois éléments. A Saint-Léger-du-Malzieu, la famille Melhier se scinda en usant de surnoms. En 1441, Jehanne Fossas, veuve de Guillaume Melhier, alias Paschal, testa en citant ses fils Jehan et Pierre Melhier, alias Paschal. En 1446, Agnès, fille de Jehan Melhier, alias Paschal, épouse Bertrand Régis. La même année, Pierre Melhier, alias del Rieu, institue des oeuvres pies au nom de sa femme. A la même époque, vivait Etienne, Jehan senior, Jehan junior, Pierre senior, tous enfants de Jehan Melhier, alias Pastre. Lorsqu'il testa, en 1458, Pierre senior était surnommé Pastre, alors qu'en 1448, Jehan Melhier junior portait le sobriquet de "Pane" »89. En conséquence, chez les Melhier, il y a accumulation des surnoms éphémères et héréditaires, mais également création de nouveaux afin de distinguer deux branches issues d'une même souche. Les surnoms héréditaires adoptent la même forme que les patronymes, comme le montrent les exemples suivants : "Boscos, Boyer, Fenal, Gay, Fizet, Laurens, Rastel, Vern". De plus, certains sont portés par des familles différentes, tel que "Panc" qui identifie Jehan Melhier à Saint-Léger-du-Malzieu, et Jehan Aucet à Chirac90. Cette pratique risque de créer une nouvelle homonymie si le surnom en vient à supplanter le patronyme.
58Le premier type de surnoms de cette catégorie est formé à partir d'un prénom éponyme et cette pratique a déjà été découverte en Haute-Provence par Alain Collomp qui cite un Martin Chailan, vivant au début du XVIIe siècle, et dont les descendants reprirent le prénom en guise de surnom91. En Gévaudan, en 1415, Marcelin Garinholes était cordonnier à Chirac ; il se maria à deux reprises, avec Morette Ladet et avec une certaine Isabelle dont il eut au moins deux fils, Pierre et Vital. Le second se retira dans le diocèse de Cahors, alors que le premier resta à Chirac où il travailla comme brassier. En 1446, lorsqu'il vendit un ort, Pierre Garinholes complétait son patronyme d'un "Marcilli", forme génitive de Marcel. Après quoi, Obvier, fils de Pierre, clerc à partir de 1466, toujours cité en 1471, continue à se dénommer en reprenant son prénom, le nom de famille et le prénom de son aïeul92. D'autres familles adoptent un tel procédé anthroponymique.
59Le second type de surnoms confirme l'habitude d'allouer un sobriquet à un homme. En 1461, le tisserand mendois, Pierre Chalmond, est dit "lo Gibrat", ce qui correspond au substantif occitan du genre féminin "gibrado" signifiant "gelée, frimas", masculinisé par l'article "lo". Les parents de Pierre ne sont jamais nommés "Gibrat" ; par contre un autre Pierre Chalmond, hôtelier de son état, vivait vers la même époque, et il n'est pas invraisemblable qu'il ait Mu distingua les deux. Les proches de Pierre Chalmond "lo Gibrat" ont-ils voulu signifier qu'il était "givré" ou "frileux" ? L'état social sert également de fondement à l'attribution du surnom. En 1464, Jehan Brunei est clerc ; en 1471, il se déclare clerc et tisserand ; mais dans son testament rédigé en 1465, il est identifié comme Jehan Brunei, alias "lo Clerc"93. Des surnoms supposés exprimer une origine sont également choisis. En 1435, Johannes Adam Lombarde reçut un lods de la Communauté des prêtres de Mende. L'année suivante, il assiste au contrat de mariage de Pierre Gordon ; il est alors dénommé Jehan Adam, alias lo Lombart. Nous ignorons tout sur le passé de Jehan Adam ; était-il réellement Lombard ou bien ce surnom ne venait-il que d'un comportement particulier, voire même d'un ancêtre ? Impossible de trancher. Jehan Atger, de Saint-Sauveur-de-Peyre, teste en 1459. Il est alors surnommé lo Catala, mais il est douteux que ce soit là une origine géographique car le nom Atger est typiquement gabalitain. Faute de connaître les ascendants directs de cette famille, nous ignorons si "lo Catala" désigne le seul Jehan ou sa maison. En effet, son frère, Pierre Atger, porte le sobriquet "Fresquet". "Fresquet" perdura tout au long du siècle, puisque Pierre fut suivi par ses fils et petit-fils, Jehan Atger Fresquet et François Atger Fresquet Ces sobriquets se transmettent héréditairement de façon aussi régulière que des patronymes. En 1418, Jehan Boyer, alias Fenal, de Badaroux, reçut donation d'un champ. Son fils, Jehan, testa en 1432, en faveur du petit-fils, Jehan, sans mentionner de surnom. En 1445, le petit-fils vendit un pré et s'identifia avec son patronyme auquel était ajouté "alias Fenal". Enfin, en 1457, Raymond Boyer, dit Fenal, fils du troisième Jehan, se maria avec Anthonie Badaros94. Ce furent donc quatre générations de Boyer, vivant à Badaroux, qui arborèrent le même sobriquet, et cela démontre combien le surnom n'est pas seulement destiné à distinguer des personnages homonymes, tant en raison d'un patronyme que d'un prénom identique, mais plutôt à compléter un nom de famille trop répandu.
60Le troisième type de surnoms héréditaires est toponymique et a aussi été révélé dans l'étude d'Alain Collomp qui constatait que les Provençaux ajoutaient le nom de leur localité aux prénom et patronyme95. Dans certains cas, l'allusion est topographique, comme "del Verdier". En 1447, Etienne Aostet, fils de Jehan Aostet, alias "del Verdier", se marie avec Philippa Galmara ; par la suite, en 1456, le même Jehan Aostet, alias del Verdier96, teste en faveur de ses fils Jehan et Etienne. Le processus d'attribution de ces surnoms demeure inconnu alors qu'il est aisé à deviner avec les toponymes. En 1470 et en 1473, Etienne Borrel, clerc de Mende originaire du Bruel, acquiert des biens sis au Villard. Peu après, en 1476, son beaupère, Jehan Nutrit, le nomme Stephanum Borrelli, aliter de Brolhio97. De même, en 1472, Jacques Runel, alias Rossuègne, marchand de Mende, s'oblige envers son frère98. Or, nous savons par de nombreux actes que les Runel étaient originaires de La Rossuègne, en la paroisse de Brenoux, où ils apparaissent dès l'année 1317, et que c'est en ce lieu que Jacques naquit et grandit. En 1483, un acte reçu par un notaire de Marvejols révèle que Jacques Itier, alias "Vineralh", vivait dans cette ville, alors que son frère, Pierre Itier, résidait au manse de "Vineralh" (Lachamp)99. Le surnom est donc attribué par référence à la localité dont est issu le premier porteur, et sa transmission héréditaire, qui n'a pu être suivie avec les Borrel et les Runel, est attestée par l'exemple de la famille Dumond qui tenait son surnom "Chapelle" du manse dont elle était originaire, à Grandrieu100.
61Les fiefs se transforment également en surnom ; comme les précédents, ces derniers indiquent une origine géographique. Mais ce phénomène ne concerne évidemment que la noblesse détentrice des seigneuries. En conséquence, la confusion surgit souvent entre le patronyme et la terre, comme si la reconnaissance de l'un ou de l'autre devenait conflictuelle. C'est flagrant avec les Pelamorgue, une famille de la petite noblesse relativement bien connue depuis le XIIIe siècle. En 1420, noble Guillaume de Malevieille, seigneur de Malevieille, prévoit une substitution testamentaire en faveur de Pierre Pelamorgue, seigneur de Palhayretz (Grè-zes101). En 1419, ce dernier est désigné par son seul surnom de Palhayretis. En 1424, le fils de Pierre, noble Astorg de Palhayretz, cellérier du château épiscopal de Chanac, reçoit quittance du trésorier de l'évêque, mais, en 1426, le même est nommé Astorg Pelamorgue, seigneur de Palhayretz. Par la suite, et jusqu'en 1466, Astorg est toujours désigné par son patronyme, le nom du fief étant réservé à l'usage d’un surnom. Dès 1461, apparaît noble Guinot de Pelamorgue, aliter de Palhayretis, dont nous savons qu'il s'agit du fils d’Astorg. Mais, en 1483, le même Guinotus de Palhayretis est élu représentant de l'évêque. Enfin, en 1497, nous découvrons mention de noble Hébrard Pelamorgue, alias de Palhayretz, seigneur de la Baume au nom de sa femme, fils de Guinot102.
62Dans la noblesse, la substitution au patronyme du nom de la seigneurie est courante, en particulier lorsque le personnage en question est un ecclésiastique. Seule une parfaite connaissance des généalogies permet à l'historien de suivre la filière, et la situation devient très confuse quand ce n'est pas le cas. La famille Recoulettes illustre bien la complexité de cette question anthroponymique103. Si nous suivons le vicomte de Lescure, la famille Albert, ou Atbert, tenait le château de Recoulettes (Barjac) depuis un hommage rendu à l'évêque de Mende en 1267. L'auteur livre les degrés de généalogie suivants, de père en fils : Etienne (en 1267), Guillaume (en 1336), Pierre (en 1358), Etienne (en 1399), Albert Ier (en 1428), et Albert II (en 1498)104. Noble Albert Atbert, époux de Delphine, dame de Semelh, est cité comme seigneur de Montméjan et de Recoulettes de 1414 à 1424. En 1420, il est nommé "Albert de Montméjan, seigneur de Recoulettes". Par la suite, et à plusieurs reprises, son fils Albert II porte le nom de Montméjan, et celui d'Atbert disparaît des actes notariés. Assez curieusement, en 1455, Albert II de Montméjan, fils et héritier d'Albert Ier, défunt seigneur de Recoulettes, contracte une obligation aux côtés de son oncle paternel noble Jehan de Recoulettes, prieur de Saint-Frézal-de-Ventalon105. En conséquence, les deux hommes issus du même lignage n'hésitent pas à se présenter différemment. Jehan n'ayant pas hérité de Recoulettes, alors qu'Albert de Montméjan II est seigneur de Recoulettes, Montméjan et Semelh, cette distinction ne provient pas d'une éventuelle possession des terres par l'un ou l'autre. D'ailleurs, dans un acte de 1468, tous les mâles de cette famille sont identifiés à tour de rôle par le patronyme "Recoulettes" : le défunt Albert Ier ses frères doms Jehan et Etienne, et ses fils Albert II et Bernard106. En fait, dans ce cas précis, il n'y a pas réellement mutation du nom de la terre en surnom, mais hésitation entre plusieurs patronymes pour désigner les individus : l'éponyme "Atbert", et les toponymes "Recoulettes" et "Montméjan", le dernier finissant par s'imposer pour désigner le chef de la maison.
63Le problème précédent peut paraître éloigné de celui des surnoms dans la mesure où la terre, chez les Atbert, n'est généralement pas transformée en surnom et concurrence directement l'éponyme dans un système anthroponymique à deux éléments, "nomen proprium" et "nomen paternum", alors que le fief est ajouté ensuite comme titre nobiliaire des aînés, ou comme nom de famille chez les cadets ou chez les ecclésiastiques. Toutefois, chez les Pelamorgue, le fief plus modeste, se transforme directement en troisième élément de la "fiche individuelle d'identité". Le processus du conflit entre le nom ancestral et le nom de la terre est le même, mais l'importance de la seigneurie modifie légèrement la formulation.
64A plusieurs occasions, les surnoms se dressent en compétiteurs des patronymes. En 1381, "Jehan Bestiol, alias Julien", de Mende, reçut donation de Catherine, fille de Guillaume Dumas, mais l'acte hésite et le nomme aussi "Jehan Julien, alias Bestiol". La même année Jehan Julien, alias Bestiol, obtint quittance de Jehan Brun. En 1396, le susdit "Jehan Julien, Bestiol" bénéficia d'un lods107. A Mende, toujours, Jehan Capion108, alias Negret, est un marchand renommé de 1475 à 1502, plusieurs fois élevé au consulat comme conseiller ou consul. A diverses reprises il est nommé "Capion, alias Negret", ou "Capion", tout seul, voire "Negret". Par la suite, son fils, Jehan, bachelier ès lois, est cité dès 1502, à ses côtés, sous le seul nom de Negret et continue à l'être ainsi ; mais le même est nommé "Capion, alias Negret" en 1503 et en 1507109. De multiples exemples de ce genre fourmillent dans nos documents, mais les énumérer ne conduirait qu'à de vaines redondances sans offrir d'intérêt particulier.
65Le dernier type de surnoms concerne une originale dévolution du patronyme par l'intermédiaire des femmes et découle d'une pratique relativement courante dans la noblesse du Moyen Age qui consistait à prescrire qu'au cas où les descendants mâles feraient défaut, ceux qui recevraient la succession devraient relever le patronyme de la famille en voie d'extinction, assurant ainsi sa pérennité. Six testaments envisagent une telle clause et démontrent que cette attitude frétait pas exclusivement nobiliaire puisqu'ils émanent de la bourgeoisie, à savoir trois de marchands, un d'un juriste, un d'un notaire et le dernier d'un chanoine"110.
66A chaque fois, le testateur appelle d'abord ses descendants mâles et c'est ensuite qu'il a recours à ses parents alliés par les femmes. En principe, les premières élues sont les filles. En 1471, Pierre Malel institue héritiers universels ses deux fils, Vital et Claude, et leur substitue sa fille Hélix, en affirmant qu'elle sera tenue de résider en permanence dans ses maison et biens et que son mari devra porter le nom des Malel111. Si Jehan Linhol, alias "Bardel", mari d'Hélix, refusait de respecter cette clause, le notaire Jehan Malel, frère de Pierre, serait substitué112. En 1466, Guillaume Robin II remet d'abord son hoirie à ses fils Privat et Guillaume, puis il désigne sa fille, Isabelle113, en dernier lieu et exige qu’elle, son mari et ses enfants "importent le nom de Robin" et "se fassent nommer Robin". Le chanoine Guillaume Martin s'en remet d'abord à ses neveux nés de son défunt frère Pons, puis à sa nièce, Anthonie, épouse d'Anthoine d'Ylice, de Saint-Germain-de-Calberte, en prescrivant que ces derniers viendront vivre dans la demeure paternelle des Martin, à Lanuéjols, et que les Ylice porteront le nom des Martin. En cas de renonciation de la part d'Anthoine, un Martin dont la parenté, sans doute assez éloignée, n'est pas spécifiée, recueillera la succession. Jehan de Salvanhac, juriste issu d'une très ancienne famille mendoise, fut sans doute bien embarrassé car il ne laissait qu'un fils mineur, sans autre famille de son sang. Prévoyant le décès de ce dernier, il lui substitua le frère de sa femme, Théobald Dalmas, et par carence, dom Pierre Puel, licencié èslois. L'inobservance de l'obligation de relever le patronyme des Salvanhac entraînait l'ouverture d’une clause révocatoire au profit de la chapelle qu'il avait fondée.
67Mais plusieurs de ces substitutions fixaient un ordre parmi les descendants de la bénéficiaire de la succession. En 1482, Claude Taurand laisse ses biens à sa fille, Hélix Taurand, à laquelle il substitue sa femme, Flore Albusson, tant que cette dernière demeurera en état de viduité. Après quoi il s'en remettait au premier-né de sa nièce Hélix Taurand, qui porterait le nom du testateur et résiderait dans sa maison. Puis, il désignait, successivement, les autres enfants d'Hélix, et Aldebert Albusson, fils de maître Jehan Albusson, neveu de Flore, avec la même contrainte ; à défaut, tous les biens écherraient à la chapelle des Taurand fondée au début du siècle par son aïeul, maître Guillaume Taurand. Claude Taurand prenait un risque en choisissant le fils aîné de ses héritiers substitués puisqu'il contraignait une maisonnée à renoncer à son propre nom, à son histoire et à sa tradition. C'est sans doute ce qui explique la décision de Pierre Monbel114. Pour héritier, Pierre désigne d'abord, et l'un après l'autre, ses fils, Jehan et Guidon, puis le second mâle de sa fille Agnès, femme Cayrel, à défaut le deuxième garçon de son autre fille, Françoise, veuve Clapier, enfin celui de Valence, femme Plantavit, ou encore celui de Claudie, également mariée à un Plantavit. Chaque fois, il précise que le second fils Cayrel, Clapier, ou Plantavit, devra porter le nom des Monbel et séjourner en sa demeure. Pierre Monbel a donc trouvé le moyen de pallier l'inconvénient d'exiger qu'un aîné renonçât à son propre nom en s'appuyant sur un cadet. Ainsi, les deux maisons pouvaient-elles survivre, l'une en gardant le nom du père, l'autre en prenant celui de la mère, ou plutôt du grand-père maternel, voire dans d'autres cas d'un parent éloigné.
68Que se passait-il dans la pratique ? La descendance de Pierre Monbel paraît s'éteindre dans le courant du XVIe siècle et une branche des Plantavit prendra le surnom de Monbel115, mais nous n'avons pu suivre cet exemple dans le temps et dans des documents authentiques puisqu'il se situe après notre période. Toutefois, d'autres exemples répondent à notre question. Le 11 avril 1376, noble Maralde de Montferrand, veuve de noble Lordet de Chirac, seigneur de Cassanhol116, rédigea son testament en faveur de noble Aldebert de Cayres, seigneur d'Entraigues en Vivarais, qui semble être son gendre ou son petit-fils. Par cet acte, les Cayres devenaient coseigneurs de Chirac en Gévaudan et, le 20 juin 1376, Aldebert demandait au bailli de Marvejols de faire procéder à l'inventaire des biens de la défunte. Une clause importante avait toutefois été imposée par Maralde. Si Aldebert avait deux fils, le second hériterait et serait tenu de porter le nom des Lordet117 ; les substitutions successives établies en faveur des familles Mostuéjols et Mirmont ordonnaient la même contrainte à propos du second garçon de chacune de ces maisons118. La généalogie des Cayres dressée par Lescure est vraisemblablement erronée119 ; toujours est-il qu'en 1414, noble Étienne de Cayres, alias Lordet, est le patron de la chapelle Saint-Sauveur et Saint-Lazare de Mende, en tant qu'héritier universel de Lordet de Chirac. Il est alors cité avec son frère Albert, seigneur d'Entraigues. En 1423, le même, toujours surnommé Lordet, reçut une reconnaissance féodale120. Par la suite, Etienne, sans doute décédé sans postérité, fut remplacé par son frère, Albert, parfois nommé Aldebert, coseigneur de Chirac dès 1432, et patron de la chapelle Saint-Lazare en 1435. Albert mourut en 1449 sans avoir jamais porté le patronyme des Lordet et sa succession échut à Guillaume de Cayres, seigneur d'Entraigues en Vivarais, coseigneur de Chirac, de Quintinhac et de Serverette en Gévaudan. A une seule reprise, et malgré la volumineuse documentation concernant Guillaume, nous découvrons la mention de "Guillaume de Cayres, alias Lordet" en 1464121. La reprise du nom des Lordet de Chirac ne fut donc que très rarement adoptée sous la forme d'un surnom et nous sommes même surpris de constater que Guillaume de Cayres continue à commémorer le souvenir des Lordet. Si les nouveaux coseigneurs de Chirac n'ont pas souhaité perdre leur nom de famille, il était sans doute intéressant de rappeler, dans leur fief chiracois où ils avaient décidé de résider la plupart du temps, qu'ils étaient les successeurs de la maison renommée des Lordet qui avait réussi à placer deux de ses fils sur le siège épiscopal du pays.
69L'adoption du patronyme du grand-père maternel ne paraît pas toujours liée à la substitution d'une maison à une autre, mais découle parfois d'une simple succession à la tête d'une partie des biens familiaux. En 1397, Guion de Montpeyroux, seigneur du Bousquet en Rouergue, épouse Amorose, fille de Raymond Merle, coseigneur de Serverette et seigneur de plusieurs fiefs en Gévaudan. Hugues, fils de Raymond hérite de la plupart des biens, mais sa soeur reçoit les seigneuries de Chazaux et de Rocheredonde122. Or, en 1450, sont cités nobles Guiot et Garin Merle, alias de Montpeyroux, fils de feu Anthoine Merle, seigneur de Chazaux. Anthoine n'était autre que le fils aîné de Guion de Montpeyroux et d'Amorose Merle. En 1466 et en 1467, les deux frères relèvent le nom des Merle et occultent complètement celui de leur maison d'origine123. Toutefois cette reprise du patronyme des anciens seigneurs de Serverette124 ne fut que temporaire et les descendants des Montpeyroux revinrent à leur nom paternel.
70Comme la noblesse, la bourgeoisie perpétue le patronyme de l'aïeul maternel transmis par l'intermédiaire de la mère. En 1450, Jehan Regordel teste en faveur de sa fille, Isabelle, épouse de Jehan Borses125. Les deux Jehan font partie de l’un des clans composant l'oligarchie qui s'accapare la maîtrise du syndicat de Chirac126. Le premier était fils, petit-fils d'hôtelier et sa famille était anciennement implantée dans le pays, alors que Jehan Borses, marchand de draps, arrivait du Rouergue. De l'union d'Isabelle et de Jehan Borses, naquit un fils, également prénommé Jehan, établi avec son père, comme marchand. A partir de 1481, Jehan Borses junior se fit surnommer "Regordel" bien que son grand-père maternel ne l'eût pas exigé127. En fait, il n'est pas improbable que les Borses qui étaient en quête de reconnaissance sociale, aient estimé judicieux de prendre le nom des Regordel apparemment tombé en désuétude dans la ville de Chirac.
71De même, dès 1438, Bérenger de Bozène, fils d'un marchand de Clermont128, hérita du bourgeois mendois Jehan Galtier129. Bérenger suivit des études en droit et devint docteur ès lois dès 1471130 ; avant cela il avait été nommé juge du petit sceau de Montpellier, fonction qu'il occupa de 1460 à 1485, et il est même cité comme Conseiller et maître de la chambre des requêtes de l'Hôtel du roi en 1471131. Ce personnage en impose donc par sa réussite sociale, mais il n'hésite pas à reprendre le nom des Galtier, et se présente ainsi : "dom Bérenger de Bozène, alias Galtier", en 1460, "dom Bérenger Galtier de Bozène" en 1479. En 1472, le notaire écrit "dom Bérenger Gautier Bozène" avant de raturer "Bozène"132. Mais, il est vrai que dans de nombreux actes, Bérenger est seulement identifié par son patronyme paternel. En fait, les Galtier furent une très grande famille mendoise qui s'allia dans la noblesse et produisit même un official de Mende133 : se rattacher à un tel lignage ne nuisait pas à la carrière de Bérenger.
72La transformation d'un patronyme maternel134 en surnom répond donc à la rencontre de deux intérêts. La famille donatrice est en voie de disparition faute de mâle, ou proche d'une telle carence, pour perpétuer le nom de la maison ; aussi le dernier chef de famille envisage-t-il par testament, toutes les substitutions assorties de l'obligation de relever le patronyme. La famille donataire est susceptible de bénéficier de deux choses : un héritage dont l'importance est généralement attractive et non négligeable, et parfois le prestige d'une notabilité locale.
73Toutefois, nous constatons que la plupart du temps, les deux noms sont accolés, le plus récent sous la forme d'un surnom, et il est rare que ce dernier parvienne à effacer définitivement le plus ancien ; la tendance conduirait même à faire disparaître celui qui aurait pu, ou dû, être adopté, au bout de deux ou trois générations, quand la nouvelle famille s'est bien établie sur les avoirs matériels ou honorifiques de la première ; mais rien n'exclut que le nom maternel, plus prestigieux que le paternel, parvienne à supplanter ce dernier135.
CONCLUSION
74A la fin du Moyen Age, l'anthroponymie gabalitaine se caractérise par son rattachement à un système à deux éléments. Le "nomen proprium" est généralement transmis par celui qui tient l'enfant sur les fonts baptismaux, la marraine pour la fille et le parrain pour le garçon, alors que le patronyme est classiquement hérité du père. Toutefois, le second exprime à un point tel le rattachement à une famille que la femme est souvent identifiée par son prénom et par son lien filial ou matrimonial avec un homme, que ce soit le père ou le mari. En outre, lorsqu'un fils hérite des biens de la lignée maternelle il se sent occasionnellement obligé de relever le nom de celle-ci, ne fut-ce que sous la forme d'un surnom. Cette pratique est très inintéressante ; elle n'est pas nouvelle et les substitutions d'une maison noble à une autre en voie d'extinction sont assez connues ; toutefois c'est un phénomène qui ne semble pas avoir été suffisamment pris en compte dans les études anthroponymiques, puisqu'il est souvent limité au domaine nobiliaire alors que nos documents démontrent que les roturiers agissaient de la même façon. Tout se passe comme si les héritiers par les femmes adoptaient, dans un système à trois éléments, le nom du grand-père maternel qui représente aussi bien la maison en tant que lignage, que la maison d'habitation.
75Conjointement à l'anthroponymie à deux noms coexistait donc un système à trois éléments, dont le dernier ne résultait pas toujours du phénomène que nous venons d'énoncer mais découlait également de la double nécessité de distinguer des parents portant le même prénom, les branches distinctes d'une maison, ou des familles homonymes vivant dans une même localité. De cette concomitance entre patronyme et surnom s'élève une concurrence entre les deux qui assure parfois, mais très rarement, la suprématie au second.
Notes de bas de page
1 Brunel (Cl), Les plus anciennes chartes en langue provençale, 1926-1952, réédité Genève, 1973 ; "Documents linguistiques du Gévaudan", Extrait de la bibliothèque de l'Ecole des chartes, Paris, 1916, t. 77, p. 1-102 ; "Un nouveau document linguistique du Gévaudan : censier des seigneurs de Peyre au XIIe siècle", Extrait de la bibliothèque de l'Ecole des Chartes, Paris, 1960, t. 118, p. 37-50.
2 Aldebert de Peyre, évêque de Mende de 1054 à 1095.
3 "Documents linguistiques …", no l, p. 13.
4 Encore l'exemple d'Aldebert de Peyre lui-même n'est-il pas probant dans la mesure où la dignité épiscopale mentionnée dans les chartes exclut généralement le patronyme.
5 Il est vrai que son fief de Randon suffit à compléter l'identification, comme étant le seigneur de Randon.
6 La virgule placée par Clovis Brunel semble abusive ; il s'agit probablement de "Jeremias Manent".
7 "Les plus anciennes chartes ...", no 26, p. 29.
8 "Les plus anciennes chartes ...", No 44, p. 52. Tous les témoins laïcs appartiennent à des lignages nobles.
9 Aldebert du Tournel, évêque de 1150 à 1187.
10 "Les plus anciennes chartes... ", no 70, p. 72.
11 "Les débuts de la révolution anthroponymique en Catalogne (Xe-XIIe siècles)", Annales du Midi, "Hommage à Charles Higounet", Toulouse, janvier-juin 1990, t. 102, no 189-190, p. 289-308.
12 Jausion (3E. 1711/1, 56), Alègre (3E. 1586/48), Bert (3E.2780/88).
13 Soit 1,71 % de l'ensemble des testatrices.
14 "Petrota" (G.1413/73v°), Fisto (3E.2018/51).
15 Cette liste a été publiée par l'archiviste Charles Porée, dans "Le consulat et l'administration municipale de Mende", Bulletin trimestriel de la Société des Lettres, Sciences et arts de la Lozère, 1901, p. 11-17. La préexistence de ces patronymes en 1262 n'implique pas qu'il s'agisse des familles citées au XVe siècle.
16 3E.2895/175.
17 3E.2890/77, 10.
18 Armorial du Gévaudan, Lyon, 1929, réédité à Marseille, 1979, p. 437.
19 Soit 5,75 % des patronymes.
20 Codonh, Codonch, Codonha correspondent indéniablement à l’occitan "Coudoun" qui désigne le coing (le fruit au goût âpre, ou un ressentiment, et peut-être un homme aigre ou revanchard).
21 59,55 % des patronymes dont la forme latine est connue sont déclinés en "i".
22 La désinence "is" est utilisée pour 17,30 % des formes latines. Elle pourrait parfois correspondre à un ablatif pluriel de la première déclinaison, sans qu'il soit possible de trancher à ce sujet
23 Contrairement aux prénoms accordés en fonction des cas de la déclinaison à laquelle ils sont rattachés.
24 5,40 % des patronymes sont ainsi déclinés à l’ablatif "o".
25 3,55 % des patronymes sont déclinés à l’ablatif "e".
26 Il est vraisemblable que ces nuances d'accords aient parfois servi à représenter des orthographes différentes, à moins qu'elles n'expriment simplement, chez certains notaires, la volonté de se rattacher à un lien filial "génitif" ou d'origine "ablatif", et qu'elles soient parfois de purs barbarismes dus aux difficultés de la latinisation.
27 Soit 26,85 % du corpus des patronymes. Afin d'identifier les toponymes gabalitains nous sommes aidés des publications de Boullier de Branche (H.), Feuda Gabalorum, Nîmes, 1940-1949 ; Bernard (R.J.), Paroisses et communes de France-Lozère, Paris, 1982, et des divers renseignements puisés dans les registres de notaires.
28 Soit 4,05 % du "corpus" de patronymes. Ces individus localisés dans un lieu dont ils portent le nom ne sont pas toujours des mariés ou des testateurs et peuvent avoir été identifiés dans d'autres actes.
29 A D. Bouches-du-Rhône, 56H, 2747/228v°, 229v°, 234, 256, 258v°, 263.
30 3E.61 l/149v°, 1087/60, 2275/111 v°, 129, 2895/129.
31 Le 7 octobre 1397, contrat de mariage de noble Longebrune d'Ancette (G. 1409/161).
32 Au Moyen Age, deux maisons, ainsi dénommées, possédaient un fief nommé "Solatges", l'une résidait à Saint-Privat-de-Vallongue (Hommage au chapitre de Mende, en 1392, par Arnald de Solatges : G.1375/3) ; l'autre à Auroux (contrat de mariage de Guillaume de Solatges, en 1397 : G. 1409/161).
33 Soit 2 % du "corpus" des patronymes.
34 Ces patronymes peuvent aussi bien être des sobriquets qu'indiquer réellement une origine.
35 La présence d'une particule dans les patronymes dont l'étymologie n'est pas d'origine géographique est presque nulle et les quelques cas connus pourraient se rattacher à cette catégorie : "de Fenils, de Corsac" par exemple.
36 Masauric (3E.2018/63,2039/23v°, 2033/146v°), Masel (3E.2044/79v°).
37 3E.2012/37v°, G.1391/19.
38 3E.2275/104, 105.
39 G. 1423/14.
40 3E.2897/206, 215, et 2925/108, G. 1403/156, G. 1405/144
41 "Les débuts de la révolution anthroponymique en Catalogne ...", p. 295.
42 3E. 1087/287.
43 Il n'en reste pas moins que des patronymes formés à partir d'un toponyme sont déclinés à l'ablatif, avec ou sans particule, alors que d'autres sont accordés au génitif, qu'il y ait ou non la préposition "de”.
44 3E.2040/8v°, 2044/72v°, G. 1410/11.
45 3E. 1086/69, 135v°, 1711/76, G.1398/153, 1405/100v°, 1425/138, 1426/4, 193.
46 3E.1086/99v°, 1708/10, G.1405/133v°, 164.
47 Nous avons refusé d'évaluer la fréquence des patronymes en fonction du nombre de testaments et de contrats de mariage passés par leurs titulaires. A défaut d’autres méthodes, ce procédé est toujours intéressant, mais il présente le risque de surévaluer les familles qui tiennent régulièrement clientèle chez un notaire. Nous avons préféré utiliser les fiches familiales que nous avons dressées. Ces fiches inventorient tous les personnages, ou presque, que nous avons pu rencontrer, en qualité de témoins ou de contractants dans les actes de tous les types possibles qui ont été conservés dans les registres de notaires.
48 Au lieu des 33,25 %, 23,95 % et 42,80 % que nous venons d'évoquer.
49 Au lieu de 14,65 %, 5,25 % et 3,70 % pour l'ensemble des patronymes.
50 Dans nos relevés du moins, car il est évident que des fils sont partis s'établir ailleurs, sans parvenir à fonder des dynasties susceptibles de laisser des traces dans notre documentation.
51 Noble Astolon (ou Ostolon) Pelamorgue, alias "Palhayretz", seigneur de Malevieille (Chanac) en 1454 (3E.1568/130v°, 2027/49). Le prénom d'Astolon est alors inconnu en Gévaudan où il a indéniablement été importé par Ostolomé de Lescure, chevalier de l'ordre de Saint-Jehan-de-Jérusalem et commandeur de Palhers, près de Palhayretz, en mars 1403 (3E. 1558/2v°).
52 La procédure de publication s'étala du 27 novembre au 3 décembre 1459 (E.208).
53 Les diminutifs ont été regroupés avec les prénoms entiers comme une seule unité, telle que Guigon, Guigot, Gui, Guinet, Guidon. De plus, nous avons considéré comme différents des prénoms qui pourraient être les mêmes sous une autre forme, comme "Astruc" et "Astorg". En effet, Astrugii Borrel se marie en 1418, mais une quittance de 1419 le dénomme Astorgio (G.1378/18v°, 42v°). En conséquence, Astorg et Astruc, estimés comme différents par Dauzat, pourraient fort bien n'être qu'un seul prénom.
54 En Lyonnais, Marie-Thérèse Lorcin a relevé le même chiffre pour les XIVe et XVe siècles (Vivre et mourir en Lyonnais, à la fin du Moyen Age, Paris, 1981, p. 160).
55 En Lyonnais, Jehan est porté par 24,70 % des hommes, Pierre par 14,10 %, Guillaume par 7,30 % et Etienne par 8,70 %. Ensuite, Marie-Thérèse Lorcin avance les prénoms : Anthoine et Barthélémy (4,20 %chacun), Jacques (3 %), André (2,30 %), François (2,10 %), puis Claude, Martin, Humbert, Michel, Mathieu, Simon, Thomas et Guichard (entre 1 % et 1,9 %). Ibid, p. 161.
56 En Lyonnais, Marie-Thérèse Lorcin relève les fréquences suivantes pour les prénoms féminins : Jehanne (19,70 %), Catherine (4,70 %), dérivés de Pierre (8,80 %), Marguerite (7 %), Guillemette (6,20 %), Stéphanette (5 %), Anthonia (3,5 %), Mariette (2,70 %), Alise (2,20 %), Isabelle (2 %), puis Isabelle, Françoise, Claudie, Jacquette, Huguette, Antoinette, Pennelle, Simone, Agnès, Anne, Andrée, Béatrice, Benoîte et Guicharde (entre 1 % et 1,90 %). Ibid, p. 201.
57 En Lyonnais, Marie-Thérèse Lorcin note que dix-sept prénoms d'hommes et vingt-trois de femmes sont portés par plus de 1 % de chacun des contingents, au lieu de treize et quinze pour le Gévaudan.
58 Remize (F.), Biographies lozériennes, Toulouse, 1948, réédité à Mende, 1989, p. 375.
59 Debax (H), "Les comtesses de Toulouse : notices biographiques", Annales du Midi, tome 100, no 182, avril-juin 1988, p. 215-234.
60 Armorial du Gévaudan, p. 100-104.
61 Ibid, p.33-38, et 69-74.
62 Un troisième garçon, prénommé Louis, fut peut-être le fils d'Astorg XV.
63 Armorial du Gévaudan, p. 138-146.
64 Ibid, p. 11-161.
65 Ibid, p.805-809, 713, 598-602.
66 Voir en annexe les généalogies des Atger nobles, Corsac et Dumond.
67 Basset (3E.2894/30), Blanquet (G.1416/7v°), Boyer (3E.2665/281v°).
68 Chabanon (3E.171 1/53v°, 75v°, 105v°, 121v°), Salanson (G. 1418/118v°).
69 3E.2017/117, 2024/116v°, 118 ; 2027, 2038/30v°.
70 Voir en annexe les généalogies des Dumas, Alamand, Michel et Badaros.
71 L'évolution de la famille et du mariage en Europe, Paris, 1985, p. 203.
72 Michel (3E2887/24v°), Hugonet (G. 1370/24).
73 Diminutif d'Agnès. Testament du 27 avril 1405 (3E.2274/5).
74 Petit (G. 1431/33), La Roque (3E.171 l/80v°).
75 Nous ignorons le prénom du père de 39,30 % des filleuls et de 70 % des mères des filleules.
76 Julien (3E. 1089/2v°), Fenils (G. 1396/11).
77 Testament du 23 juin 1478 (3E.2885/248).
78 G· 1416/début du registre.
79 3E.2044/quatrième feuillet non numéroté en tête du registre.
80 "L'évolution de la famille …", p. 203.
81 Dans son étude "Le parrainage à la fin du Moyen Age : savoir public, attentes théologiques et usages sociaux", Annales E.S.C., 47e année, no 2, mars-avril 1992, p. 480, Bernhard Jussen cite Pierre Bourdieu, Le sens pratique, Paris, 1980, 300-303, en déclarant : "il n'y avait pas de parents parmi les parrains" ; propos excessif pour le Gévaudan, comme nous venons de le voir, mais qui confirme l'appel à des personnes étrangères à la parenté pour tenir un enfant sur les fonts baptismaux.
82 "L'évolution de la famille p. 203.
83 "Les débuts de la révolution anthroponymique...", p. 305-306.
84 Le second type de surnom est introduit, après le patronyme, par l'adverbe "aliter", correspondant à "alias", alors que le premier suit directement le prénom, ou le prénom et le patronyme de l'intéressé.
85 Les testaments retiennent le terme mediocrum pour un garçon (3E.2897/201v°), ou mediam pour une fille (G. 1405/169), qui peut être traduit par "moyen” ou "milieu", toutefois, en occitan, il est fort probable que les gabalitains disaient "méjan" ou "méjane", d'ailleurs repris comme patronyme. De même, "senior" et "junior" devaient souvent correspondre à "l'aisné" et "le jeune".
86 Il est impossible de trancher entre "nièces" et "petites-filles" (G. 1431/97).
87 G. 1405/169.
88 Voir en annexe le tableau généalogique de la famille Sarron, ainsi que la troisième partie du chapitre VI sur les structures familiales. (3E.2779/23, 63v°, 81, 2780/71, 77, 92).
89 3E.2779/8v°, 16v°, 97v°, 137v°, 2781/34v°, 2782/79.
90 3E. 1576/87v°.
91 La maison du père. Famille et village en Haute-Provence aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, 1983, p. 90.
92 126-B-2/8 ; 3E. 1564/175v°, 1572/9v°, 1573/12, 1574/130v°.
93 Chalmond (3E.1586/25v°), Brunei (3E.2892/155v°, 2893/99, 2897/58).
94 Adam (3E.1709/113, 1710/11v°), Atger (3E.2890/93. En occitan, "fresquet" signifie "vif, éveillé". Voir en annexe la généalogie des Atger nobles), Boyer (3E. 1477/1, 90 et 2/38v°, 2275/131).
95 La maison du père..., p. 96.
96 3E.2779/163v°, 2781/132. Ce surnom est latinisé sous les formes ablatives Viridario et génitive Verderii
97 Le Brolio ou Brolhio, correspond à Bruel. Il s'agit très certainement du manse sis en la paroisse de Chanac, en raison des biens qu’Etienne achète au Villard, plus proche que le Bruel de la paroisse de Pin-Moriès, également peu éloigné. 3E.1086/83v°, 88, G. 1428/121 v°.
98 3E.2665/182.
99 3E.625/220v°. Il semble que ce lieu de "Vineralh" ait disparu avant la fin du XVIIIe siècle.
100 Voir la généalogie de cette famille en annexe.
101 F.2664, citant le registre 3E. 1386. La terre de Palhayretz était tenue du roi par les Pelamorgue depuis 1307 au moins (Feuda Gabalorum, tome II, 1ère partie, p. 160).
102 3E.2669/116, 2673/213v°, G.1375/56, 1387/90v°, 1392/38, 1416/187, 199v°.
103 Voir en annexe, le tableau généalogique de la famille Corsac.
104 Armorial du Gévaudan, p.273-274.
105 3E.2892/123, G.1372/148v°, 1373/56, 1378/36, 86v°, 1398/5, 68, 82v°.
106 G. 1413/153, 1419/47v°.
107 G.1369/3v°, 14,1381/67.
108 Ce patronyme est écrit Capionis et Chapionis
109 3E.718/126, 1088/183v°, 1089/225, 275, 335, 2669/147, 2671/6, 37v°, 2674/153, G.1414/61.
110 Testaments de : Jehan de Salvanhac, licencié ès lois de Mende, en 1396 (G.1384/21), Guillaume Martin, chanoine de Mende, en 1463 (3E.2892/134), Guillaume Robin, marchand de Mende, en 1466 (G.1413/76v°), Pierre Malel, marchand de Mende, en 1471 (G.1426/161v°), Pierre Monbel, marchand de Mende, en 1482 (3E. 1087/238), Claude Taurand, notaire de Mende, en 1482 (3E. 1087/261 v°).
111 Continuant moram facere in eius domo et bonis, et maritus suus portare cognonem dels Malels.
112 Voir en annexe le tableau généalogique de la famille Malel.
113 Voir en annexe le tableau généalogique de la famille Robin.
114 Voir en annexe le tableau généalogique de la famille Monbel.
115 Armorial du Gévaudan, p. 690.
116 Selon Lescure, ce Lordet de Chirac est le frère de Guillaume Lordet, évêque de Mende en 1361-1366, et le neveu d'Albert Lordet, évêque de Mende en 1331-1361 (Armorial du Gévaudan, p. 575).
117 Cette famille offre une curiosité anthroponymique sur laquelle nous ne pouvons nous étendre faute de pouvoir consulter de plus nombreux documents. Il semble que les héritiers reçoivent le prénom "Lordet", avec le patronyme "de Chirac" ; alors que les cadets auraient un autre prénom, avec le patronyme "Lordet".
118 3E. 902/168-172.
119 Lescure cite, de père en fils, Albert, en 1376, Guillaume, Anthoine, et Anthoine, en 1519.
120 Il semble donc y avoir eu deux Albert. Le premier fut le père d'un autre Albert qui hérita de lui la seigneurie d'Entraigues en Vivarais, et d'Etienne, substitué aux Lordet (G.1373/48, 3E. 1563/30).
121 3E. 1571/81, 1560/20, 2277/35.
122 "Armorial du Gévaudan", p. 601, p. 631-632.
123 3E.2894/52,202.
124 Les Merle, partagés en trois branches, sont surtout connus comme coseigneurs de Serverette.
125 3E. 1565/4v°.
126 Sur cette question consulter notre étude "Un exemple d'organisation municipale au XVe siècle : le syndicat de Chirac", Annales du Midi, tome 105, no 202, avril-juin 1993, p. 183-208.
127 3E.44/101v°, 1574/225.
128 Actuelle commune de Clermont-l'Hérault, dans l'Hérault.
129 G. 1388/90v°.
130 Vente d'un champ, le 6 août 1471, par Bérenger (G. 1411/88).
131 3E.2891/13,2668/221vo ; G.1411/91.
132 3E.2891/13,2897/103v°, 2900/36.
133 Voir en annexe le tableau généalogique de la famille Valdin.
134 Ou du patronyme d'un parent auquel l'intéressé est suffisamment apparenté pour qu'une succession lui soit dévolue.
135 Le cas est attesté dans la grande noblesse régionale. A la fin du XIVe siècle, les Châteauneuf-Randon qui tiennent les seigneuries d'Allenc et de Saint-Remèze s'éteignent et ce fief revient à Guillaume de Laudun, second fils de Raymond de Laudun, baron de Laudun, et de Maragde de Châteauneuf-Randon. Guillaume renonce à ses nom et armes paternels dont la perpétuation est assurée par son frère aîné, et relève ceux des Châteauneuf. Et les descendants de Guillaume ne feront jamais allusion au lignage des Laudun.
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La famille en Gévaudan au XVe siècle (1380-1483)
Ce livre est cité par
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- Dubois, Adrien. (2016) Quitter son époux à la fin du Moyen Âge. Histoire & Sociétés Rurales, Vol. 45. DOI: 10.3917/hsr.045.0007
- GRAVELA, MARTA. (2017) The primacy of patrimony: kinship strategies of the political elite of Turin in the late Middle Ages (1340–1490). Continuity and Change, 32. DOI: 10.1017/S0268416017000303
La famille en Gévaudan au XVe siècle (1380-1483)
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