Histoire des images, des symboles et de l’imaginaire
p. 595-616
Texte intégral
1Présenter dans un même rapport les acquis et les tendances récentes de l’histoire médiévale des images, des symboles et de l’imaginaire n’est pas un exercice artificiel. Non seulement ces domaines entretiennent entre eux des rapports étroits, mais ils constituent également des champs de recherche soit neufs soit entièrement renouvelés. En outre, tous trois s’appuient sur des enquêtes et des réflexions véritablement transdisciplinaires ; à l’heure où les barrières tendent (hélas !) à revenir entre les disciplines – du moins en France – il est utile de montrer ce que les études médiévales ont pu produire au carrefour de celles-ci.
2Le présent rapport ne veut pas être un « palmarès ». Par là même, il donne volontairement priorité aux idées, aux problèmes et aux méthodes sur les personnes et les institutions. A dessein il cite très peu de noms propres. On trouvera en annexe une orientation bibliographique à laquelle renvoient les numéros placés entre parenthèses.
Images
3Longtemps délaissée, l’étude des images est aujourd’hui généralement reconnue comme une science historique à part entière. Toutefois, en France, chez les historiens du Moyen Age, cette reconnaissance ne s’est pas faite sans difficulté. Malgré des travaux importants, malgré des problématiques nouvelles et ambitieuses (4, 5, 10, 22, 24), il subsiste des réticences et des oppositions : celles de nombreux historiens de l’art, qui ont du mal à admettre que l’étude des documents figurés puisse aujourd’hui se faire en dehors de la seule et stricte histoire de l’art ; celles de beaucoup d’historiens des textes, qui tiennent encore pour suspectes les informations livrées par des images qui ne sont pas confirmées par des textes. Malgré des progrès certains, malgré des changements d’attitude, malgré le rappel incessant de cette prétendue « nouvelle civilisation de l’image » dans laquelle nous serions entrés depuis une ou deux décennies, l’étude des images reste, au sein des études historiques, la parente pauvre, la dernière roue du carrosse.
4Qu’aujourd’hui, à Göttingen, après deux fructueuses journées de rencontres et de discussions, le rapport consacré aux images et à l’imaginaire soit présenté le dernier n’en est-il pas une preuve manifeste ? Involontaire, sans doute, mais combien révélatrice !
Les conditions de la recherche
5En France (mais est-ce si différent dans les pays voisins ?), pour les médiévistes, travailler sur les images reste un exercice difficile, peut-être même plus difficile – contrairement à ce que l’on pourrait croire – qu’il y a vingt ou trente ans. A cela différentes raisons, dont la principale réside dans les conditions d’accès à la documentation. Non seulement voir les images et les œuvres originales dans les musées, les bibliothèques, les collections publiques ou privées demeure un parcours semé d’embûches ou d’impossibilités, mais même commander une simple photographie demande de gros efforts. Le chercheur n’a – pour des raisons de conservation souvent légitimes – jamais le droit de photographier lui-même les documents qu’il souhaite étudier (ce qu’il pouvait faire autrefois), il est soumis au rançonnage (on peut même dire au « racket ») pratiqué par un grand nombre de musées et d’officines détentrices d’images. Acheter une photographie coûte cher, très cher, demande du temps et de l’énergie, impose de se soumettre au bon-vouloir, aux caprices, aux règlements et aux délais imposés par les institutions ou les personnes qui les vendent. Pour prendre l’exemple des manuscrits enluminés, certaines bibliothèques (françaises et étrangères) ne délivrent les photographies commandées (et payées à l’avance !) qu’au bout de six mois, un an, deux ans quelquefois. D’autres ne veulent photographier que des pages entières, même si la miniature qui intéresse le chercheur est une lettre historiée flottant au milieu d’un immense folio. D’autres encore, de plus en plus nombreuses, restreignent photographie et communication et, sans ironie aucune, proposent à l’historien des couleurs de travailler à partir de photographies en noir et blanc.
6Certes, depuis une dizaine d’années, la constitution de banques d’images informatisées permet de contourner une partie de ces problèmes. Mais elle en créent à leur tour de nouveaux. Notamment elles éloignent de plus en plus le chercheur du document original. Quand il existe un CD-Rom, un vidéodisque, un document numérisé et présent dans une banque d’images, la plupart des institutions qui conservent ce document ne le communiquent plus. Or, dans le domaines des images, consulter le document original est absolument indispensable. Comment, par exemple, faire l’étude codicologique d’un manuscrit enluminé à partir d’images sur écran ? Comment observer les jeux de lumière exercés par le soleil sur un vitrail à partir d’une diapositive ? Comment retrouver sur la sculpture ou l’architecture des traces de polychromie quand on ne peut pas aller les observer in situ. Et, pour tout objet, toute image, toute œuvre d’art, comment travailler sur l’or ou sur la couleur à partir de photographies, si bonnes soient-elles ? C’est impossible.
7Mais les difficulté du chercheur ne s’arrêtent pas là. Une fois franchis les obstacles pour accéder aux documents, il faut pouvoir publier le corpus d’images autour duquel s’est construite la recherche. Ici aussi les barrières matérielles, financières et juridiques sont multiples, presque infranchissables. L’historien des couleurs se verra évidemment interdire toute planche en couleur, beaucoup trop chère pour une publication savante (42, 44). Le chercheur verra le nombre d’images dont il a besoin pour accompagner son étude, limité à trois ou quatre (alors que tout le monde s’accorde aujourd’hui pour reconnaître qu’il faut travailler sur des séries et non pas sur des images isolées). Et l’éditeur de la publication concernée se verra imposer par les musées, les bibliothèques ou les institutions qui ont vendu les photographies, des droits de reproduction de plus en plus élevés, parfois extravagants.
8Cette situation n’a rien d’anecdotique. Ses conséquences sur la recherche sont considérables. Pourquoi, quoi qu’on en dise, les médiévistes français sont-ils restés si peu nombreux à travailler sur les images ? Pourquoi les historiens de l’art ne parlent-ils jamais des couleurs ? Pourquoi préfèrent-ils disserter sur la biographie des artistes ou sur la philosophie de l’art plutôt que d’étudier les œuvres et les images elles-mêmes ? Parce que cela reste un luxe. Un luxe qui aujourd’hui, à l’heure des images numérisées, scannérisées, transmises à distance, paraît parfois plus inaccessible qu’il y a vingt ou trente ans. L’écart est immense entre ce que permettent les technologies de pointe et la vie quotidienne de l’étudiant ou du jeune chercheur qui doit se battre férocement pour accéder aux documents figurés.
9Enfin, à quoi bon le cacher, l’histoire des images, parce qu’elle touche à l’histoire de l’art, se fait parfois dans un contexte peu chaleureux, pesant ou agressif : querelles de personnes et d’institutions (dont sont toujours victimes les étudiants) ; conflits en matière de financements, de locaux, de matériels ; incompréhensions réciproques, mépris, comptes rendus d’ouvrages ou de thèses qui peuvent être d’une méchanceté insensée. Certes, cela est en général pire pour l’époque moderne que pour le Moyen Age (et bien pire dans les pays anglo-saxons qu’en France). Mais il faut bien reconnaître que l’étude des images ne dispose pas en France de toute la tolérance ni de toute la sérénité dont elle aurait besoin. En va-t-il autrement en Allemagne ?
Le renouveau de l’approche iconographique
10En France, malgré les travaux pionniers d’Emile Mâle (admirables en leur temps mais aujourd’hui dépassés), les études iconographiques ont longtemps été méprisées par l’histoire de l’art, tant à l’université que dans le milieu des musées. Pour celle-ci, les recherches « nobles » devaient porter sur les questions de style et d’influence, les problèmes d’attribution et de datation, la biographie des artistes. Il était hors de question de faire carrière en travaillant sur l’iconographie. Même le renouveau insufflée à celle-ci par l’approche iconologique à partir des années 1930 (en France à partir des années 1960) n’a pas réussi à lui donner ses lettres de noblesse.
11Sur ce terrain de l’iconographie-iconologie, la France a donc pris au fil des décennies un retard considérable par rapport aux pays voisins, notamment l’Allemagne. Du moins pour ce qui concerne le Moyen Age (il en va un peu différemment pour l’art de l’Antiquité et celui de la Renaissance). Ce mépris de l’histoire de l’art « institutionnelle » pour l’iconographie n’a pas totalement disparu aujourd’hui. Une partie de celle-ci continue de croire à « la vie autonome des formes » et au peu d’importance des sujets ou des thèmes représentés (ce qui pour l’historien des sociétés est incompréhensible). Mais depuis une quinzaine d’années, chez de jeunes chercheurs, des curiosités nouvelles pour l’iconographie sont apparues et ont réussi, non sans mal, à trouver place dans le cursus et les travaux universitaires. Elles ont donné lieu à plusieurs livres de qualité qui laissent espérer des lendemains meilleurs pour cette discipline (2, 3, 17-21, 23).
12Ce renouveau des études iconographiques prend du reste des aspects variés. Tantôt il s’inscrit dans la continuité – actualisée évidemment – des fondements jetés par Emile Mâle et ses épigones : les textes sont la source des images ; mais ce point de vue doit aujourd’hui être nuancé ou repensé, comme l’a montré l’étude des relations entre hagiographie et iconographie (7, 11, 21, 23). Tantôt il cherche, parfois peut-être trop systématiquement (14), à mettre en valeur l’existence d’une « grammaire de l’image » et s’attache à en étudier la morphologie et la syntaxe. La question des attributs iconographiques, notamment, a donné lieu à des réflexions nouvelles et établi un pont avec le problème des signes d’identité et des emblèmes (42). Tantôt au contraire ce renouveau est l’œuvre d’archéologues et d’historiens de la culture matérielle qui cherchent dans les images des documents pour étudier les realia. Cette dernière approche demande beaucoup de prudence (les images médiévales n’ont jamais pour but de « photographier » le réel) et n’a de sens que si elle s’appuie sur une méthode comparative et transdocumentaire (45). Elle semble du reste plus pertinente lorsqu’elle concerne des signes ou des symboles sociaux (gestes, attitudes, positions et dispositions, emblèmes, vêtements) (18) ou bien des problèmes d’histoire religieuse (23) et culturelle (1,8) que les seuls realia archéologiques.
13Toutefois, chez plusieurs chercheurs, les curiosités pour l’iconographie se situent bien ailleurs. Il ne s’agit plus du tout d’une approche iconographique telle que la pratiquaient Emile Mâle ou Louis Réau, c’est à dire l’étude de la traduction en images d’un savoir purement livresque à des fins d’enseignement. Ni même d’une iconologie à la façon de Aby Warburg ou Erwin Panofsky. Cette dernière, du reste, a fini par montrer ses limites : opposer le sujet des œuvres d’art à leurs formes, leurs matériaux, leurs couleurs et postuler la préexistence de leur signification (à chercher dans les textes, encore et toujours !) avant même leur réalisation, mutile fortement l’analyse. Pour l’approche iconographique nouvelle, les formes, les couleurs, les matériaux sont pleinement producteurs de sens et font partie intégrante de la signification de l’œuvre ou de l’image (6). Il est impossible de séparer ou d’opposer la forme et le sens comme le faisait l’iconologie panofskienne (4).
14Cette approche nouvelle de l’iconographie, et plus largement de l’étude historique des images, s’inscrit en France dans la lignée des travaux de Pierre Francastel (peu connus en Allemagne) et du concept de « pensée figurative » : les images pensent (13). Elles pensent parce que les individus et les sociétés qui les produisent « pensent en images ». Dès lors, la forme et le fond sont indissociables. Les procédés formels ou chromatiques pour réaliser les images ne sont pas de simples habillages d’un sens préétabli mais produisent eux-mêmes du sens ; ils constituent un « langage figuratif » qui ne se superpose pas ni ne se réduit pas au langage verbal.
Méthodes et problématiques nouvelles
15Etudier cette pensée figurative nécessite des méthodes d’analyse spécifiques. Plusieurs ont été mises en œuvre mais toutes ne conviennent pas pour toutes les époques ni pour toutes les catégories d’images. Deux méthodes, parmi d’autres, se sont ces dernières années révélées particulièrement fructueuses pour ce qui concerne les images médiévales : l’étude sérielle et l’analyse structurale interne. La première – que pratique depuis longtemps l’iconographie traditionnelle – part du principe qu’on ne peut pas étudier une image isolément ; seule, elle ne dit rien, ou presque ; il faut la comparer à d’autres images, la replacer dans une ou plusieurs séries. Ces séries peuvent être le produit de l’histoire et donc livrées par les documents eux-mêmes, ou bien être constituées par le chercheur (3, 20, 21). L’analyse ne sera évidemment pas la même ; mais l’ensemble, ainsi que chacune de ses composantes, devra d’abord être analysée de manière structurale.
16Cette notion de structure, empruntée ici à l’anthropologie, est essentielle. Elle permet au chercheur de ne pas continuer à plaquer systématiquement sur les images ce que lui apprennent les textes mais au contraire à tirer du sens des images elle-même. L’analyse structurale interne consiste à étudier les distributions, les répartitions, les associations ou oppositions d’abord dans la série puis dans chaque image : haut/bas, droite/gauche, centre/périphérie, devant/derrière, dessus/dessous, etc. (6, 7, 43). La notion de structure permet aussi et surtout de penser les images en termes de « fonctions » et de faire de celle-ci la problématique fondamentale de l’étude historique des images. Formes, couleurs, structures, sens et fonctions ne sont pas séparables. Les étudier globalement permet de comprendre comment il n’y a pas de vie autonome des formes artistiques (comme le croyait Focillon et comme le croient encore certains historiens de l’art), mais comment, au contraire, tous les changements de formes correspondent à des changements de structures sociales et/ou idéologiques (3, 4, 8, 18, 23).
17C’est pourquoi les images et les œuvres d’art ne peuvent pas s’étudier hors contexte, hors du temps et de l’espace, comme des pièces intemporelles placées dans des musées. Elles doivent s’étudier par rapport aux supports et aux lieux auxquels elles étaient destinées (2, 12, 20), aux rituels auxquels elles s’intégraient (19, 31), aux fonctions qui étaient les leurs dans une société donnée (11, 23, 29). Plusieurs ouvrages, individuels ou collectifs, ont brillamment montré comment il existait toujours un lien très fort entre l’iconographie, le lieu et le rituel, comment les programmes s’articulaient dans l’espace, selon des dispositifs, des orientations et des parcours précis, toujours fortement signifiants (2, 4, 12, 20).
18De telles affirmations semblent aujourd’hui banales. Elles ne l’étaient pas, en France, il y a vingt ans et elles ne sont pas encore acceptées par tout le monde (comme le montrent plusieurs expositions récentes).
L’apport de l’informatique
19Point n’est besoin de s’attarder longuement sur les bénéfices que les historiens des images ont retiré de l’informatique. Ils ont été en France ce qu’ils ont été en Allemagne. Sauf qu’en France les équipes de recherche en sciences humaines disposent de crédits d’équipement très modestes et que les techniques évoluent toujours trop vite par rapport aux délais que demandent les projets de financement et la mise en pratique de ces projets. Quand une équipe peut enfin se mettre au travail, c’est souvent sur un projet décidé deux ou trois ans auparavant et, bien évidemment, entre-temps l’informatique a fait des progrès.
20Plusieurs banques d’images médiévales ont été constituées. Les plus riches et les plus fréquemment consultées concernent l’enluminure et la peinture murale (au CNRS-IRHT à Orléans, au Centre de civilisation médiévale de Poitiers, à la BNF, à l’EHESS-GAHOM et à l’Inventaire monumental à Paris). Elles sont malheureusement construites à partir de programmes et de thesaurus différents (15, 16), pour l’instant peu compatibles. Elles créent également un grand déséquilibre entre les différentes catégories d’images : la sculpture, le vitrail, les sceaux ont pris en ce domaine un retard énorme par rapport à l’enluminure. Cependant, partout le problème reste le même : la saisie de l’information est longue et lente, alors que la technologie évolue vite et que les demandes des chercheurs sont de plus en plus nombreuses et pressantes. Ici aussi l’écart est grand entre ce que permettent en théorie les technologies nouvelles, et les réalités de la recherche pratiquée au quotidien. La documentation iconographique sur support papier ou diapositives semble avoir encore de belles années devant elle ! D’autant que les quelques CD-Rom proposés par les éditeurs ont jusqu’à présent été, dans le domaine des images médiévales, très décevants.
21Il reste néanmoins que les technologies nouvelles s’adaptent parfaitement aux problématiques évoquées ci-dessus : l’étude sérielle, l’analyse structurale, la mise en contexte des images (4, 11). Elles sont promises à un grand développement et apporteront certainement beaucoup aux recherches à venir. Mais cela à plusieurs conditions : ne pas subir la dictature de ces technologies nouvelles ; ne pas transformer l’historien en informaticien ; ne pas non plus faire de l’historien des images un « collectionneur » d’images, obsédé par la quête de l’exhaustivité ; et surtout, toujours donner priorité à la problématique historique sur la technologie et la documentation. Réunir, classer et analyser des images sans définir au préalable une problématique n’a, ici comme ailleurs, aucun sens.
Les problèmes de la couleur
22Enfin, parmi les curiosités nouvelles des historiens des images il faut mettre l’accent sur les problèmes de la couleur. En raison de l’absence presque totale de travaux sur ce sujet, les premières réflexions et les premières enquêtes ont surtout été historiographiques, épistémologiques et méthodologiques (42, 44). Avant toute étude portant sur des images ou des objets précis, on a légitimement cherché à savoir pourquoi, jusqu’à des dates très récentes, les historiens des œuvres d’art et des images avaient si rarement parlé des couleurs. A cela différentes explications, qui sont en elles-mêmes des documents d’histoire et qui ont trait aux difficultés qu’il y a à travailler sur les problèmes de la couleur. Elles peuvent être regroupées en trois catégories.
23Les premières difficultés sont d’ordre documentaire : nous voyons les images telles que le temps les a faites et non pas dans leurs couleurs d’origine ; nous les voyons en outre dans des conditions de lumière qui n’ont souvent aucun rapport avec les sources d’éclairage qu’on connues les sociétés médiévales ; enfin, pendant des décennies et des décennies, nous avons pris l’habitude de les étudier au moyen de reproductions en noir et blanc et nos modes de pensée et de sensibilité sont devenus, eux aussi, noirs et blancs.
24Les deuxièmes difficultés sont méthodologiques : dès qu’il s’agit de la couleur, tous les problèmes se posent en même temps : chimiques, matériels, techniques, mais aussi iconographiques, idéologiques, symboliques. Comment sérier ces problèmes, dans quel ordre poser les bonnes questions, comment établir des grilles d’analyse, comment comparer les informations tirées de différents documents (miniatures, vitraux, peintures murales, mais aussi textes de toutes natures) sans trahir aucun de ces documents ni généraliser abusivement. Aucun chercheur, aucune équipe, aucune méthode n’ont encore su résoudre ces difficultés, chacun ayant tendance à sélectionner dans les multiples enjeux de la couleur ce qui l’arrange et à laisser de côté tout ce qui le dérange. Ce n’est évidemment pas une bonne façon de travailler. Méthodologiquement, tout reste à inventer.
25Les troisièmes difficultés sont d’ordre épistémologique : il est impossible de projeter tels quels sur les images du Moyen Age nos classements, nos définitions et nos conceptions actuels de la couleur. Ce n’étaient pas ceux des sociétés médiévales. Et ce qui est vrai des connaissances et des définitions, l’est aussi des sensibilités : l’œil médiéval ne perçoit pas tout à fait les contrastes de couleurs comme l’œil du XXe siècle : au XIIIe siècle, par exemple, juxtaposer du rouge et du vert était un contraste faible ; en revanche juxtaposer du jaune et vert – deux couleurs pour nous voisines dans le spectre – constituait un contraste extrêmement fort (42). Le regard est toujours culturel, étroitement culturel. Par là même, le danger de l’anachronisme, des naïvetés ou des surlectures guette toujours l’historien des images. Lorsqu’il s’agit de la couleur, et notamment de tout ce qui aujourd’hui nous semble constituer des vérités scientifiques (par exemple le spectre, inconnu avant la fin du XVIIe siècle ; ou bien la théorie des couleurs primaires et complémentaires, qui ne se met en place qu’au XVIIIe siècle ; ou encore la distinction entre couleurs chaudes et couleurs froides, pure convention sociale : au Moyen Age le bleu était chaud, aujourd’hui il est froid), ce danger devient immense.
26Ces réflexions épistémologiques ont permis de repenser les problèmes de la couleur dans leur globalité et de souligner comment toute étude les concernant doit d’abord se placer sous l’angle de l’histoire sociale. Quels que soient l’époque ou le document, c’est d’abord la société qui « fait » la couleur, bien avant les artistes, les artisans, la nature ou le couple œil-cerveau (43, 44).
Emblèmes et symboles
27Depuis une vingtaine d’années s’est lentement dégagée en France la notion d’histoire des systèmes symboliques, une histoire qui a pris partiellement le relais de celle autrefois dite « des mentalités ». Cette histoire ne s’intéresse nullement à l’ésotérisme, aux prétendus archétypes ou à l’effroyable « psychologie des profondeurs » qui ont fait (et continuent de faire !) tant de mal aux sciences humaines. Au contraire, elle est totalement culturelle et se propose d’étudier non seulement les codes sociaux, les signes d’identité, les emblèmes et les attributs des sociétés anciennes et modernes, mais aussi les systèmes de valeurs, les modes de sensibilité et les enjeux idéologiques et politiques (26, 28, 30, 36) qui les sous-tendent. Un bel exemple en a été donné par la publication, sous la direction de Pierre Nora, des sept volumes des Lieux de mémoire (1984-1992). Malgré des réticences, malgré des dangers certains, liés à tout ce qui touche au monde des symboles (ésotérisme, « psychologisme », anachronisme surtout), cette nouvelle forme d’histoire a suscité chez les médiévistes des travaux de qualité. Tous s’appuient sur des études transdocumentaires, au sein desquels l’image occupe une place importante.
Les armoiries
28C’est peut-être dans le domaine de l’héraldique que se sont produits les changements les plus précoces et les plus décisifs. En une génération, cette vieille « science auxiliaire de l’histoire », passablement assoupie en France depuis de longues décennies, a su entièrement renouveler sa problématique et ses méthodes (35). Profitant de l’éclatement des barrières entre les différentes sciences humaines, ainsi que des apports de la sémiologie et de l’anthropologie historique, elle a très largement dépassé ses buts traditionnels (identifier les possesseurs d’armoiries présentes sur les œuvres d’art, les monuments et les objets de la vie quotidienne afin de fournir à leur étude des éléments de datation, de localisation et d’attribution) et a donné naissance à une héraldique totalement nouvelle. Née en France dans les années 1970, celle-ci est restée longtemps ignorée ou incomprise dans les pays voisins, très attachés aux aspects traditionnels des « sciences auxiliaires ». Aujourd’hui, cependant, elle est reconnue et pratiquée dans toute l’Europe.
29Cette héraldique nouvelle s’avance dans plusieurs directions. Elle étudie par exemple les motifs qui ont présidé au choix des couleurs et des figures composant les armoiries d’une famille ou d’un individu. La relation entre l’élément signifiant et l’idée signifiée peut se situer à différents niveaux (linguistique, politique, allégorique, symbolique), mais son étude apporte toujours des informations pertinentes sur les aspirations, les croyances, la culture ou les modes de sensibilité de ceux qui ont créé ou qui se sont composé des armoiries (42).
30De même, l’héraldique nouvelle cherche à savoir pourquoi et comment à telle époque, tel ou tel personnage imaginaire ou ayant vécu avant l’apparition des armoiries (héros de roman, figures bibliques, créatures mythologiques, rois et empereurs de l’Antiquité, saints ou papes du haut Moyen Age, vices et vertus personnifiés, etc.) a été doté d’armoiries et comment celles-ci ont été composées, représentées, imitées, transformées. Ces armoiries littéraires et imaginaires sont très nombreuses à la fin du Moyen Age et au début de l’époque moderne. Leur étude constitue un des domaines les plus fructueux des études héraldiques actuelles (34).
31Puis, dépassant les cas individuels, l’héraldique nouvelle se fonde sur des méthodes quantitatives et statistiques – pour l’Europe occidentale, les documents médiévaux nous font connaître environ un million d’armoiries différentes, et ceux de l’époque moderne, plus de vingt millions – afin de dresser les indices de fréquence et de rareté des figures et des couleurs dans les armoiries d’une époque, d’une région, d’une classe ou catégorie sociale. En interprétant les résultats obtenus, en les comparant avec ceux que fournissent d’autres disciplines, l’héraldique met en valeur des phénomènes de mode, de vogue et de goût et débouche sur l’histoire des systèmes culturels et des faits de sensibilité (33). L’examen de la fréquence des couleurs, par exemple, permet de suivre l’étonnante promotion de la couleur bleue qui, dans les armoiries comme dans le vêtement, la création artistique ou les faits de lexique, devient au fil des siècles en Occident, à la place du rouge, la couleur la plus valorisée, la première des couleurs (39, 44). Cette évolution, commencée au XIIIe siècle, s’achève au XVIIIe ; l’héraldique en porte constamment le témoignage et, contrairement aux autres documents, permet même de l’étudier par des enquêtes statistiques.
32De la même façon, l’analyse de la fréquence des figures héraldiques a permis de mettre en valeur des traits d’ordre culturel dépassant de beaucoup le seul cadre du blason. Citons pour exemples : l’opposition politique entre l’aigle et le lion dans les armoiries des XIIe et XIIIe siècles (28) ; la permanence du rôle de roi des animaux tenu par l’ours dans une bonne partie de l’Europe du Nord jusqu’à la fin du Moyen Age ; le caractère péjoratif de certaines figures dans les armoiries imaginaires jusqu’au XVIIe siècle (léopard, chat et animaux diaboliques, structures en damier, rayures et lignes brisées) ; le « snobisme » dans le choix d’autres figures (fleurs de lis, rose, licorne, lévrier) par les roturiers à partir du XVe siècle (33).
33Enfin, dans une perspective à la fois sémiologique et anthropologique, l’héraldique nouvelle se propose d’étudier le blason en tant que systèmes de signes. Appuyée sur une langue ayant son vocabulaire et sa syntaxe propres – qui mériterait d’attirer davantage l’attention des linguistes et des philologues – et sur des codes de représentation spécifiques, l’armoirie apparaît comme la plus théorisée de toutes les images médiévales (11).
Les sceaux
34Ce renouveau des études héraldiques a grandement profité a un document qui, en France, depuis la première guerre mondiale, restait sous-étudié : le sceau (25). A la fois objet et image, le sceau, malgré sa petite taille, est pour l’historien un document d’une richesse exceptionnelle. Parmi tous les documents que le Moyen Age nous a laissés, il semble bien être l’un de ceux qui apportent les informations les plus nombreuses, les plus variées et les plus dignes de foi. Engageant la responsabilité juridique et la crédibilité sociale de son possesseur c’est un objet fabriqué avec soin ; les renseignements qu’il fait connaître sont toujours précis et exacts (du moins au moment de la gravure de la matrice). Appendu ou plaqué sur un acte, il est daté et localisé avec précision par celui-ci. C’est là un cas presque unique parmi toutes les sources figurées ; même les monnaies, souvent difficiles à dater pour le haut Moyen Age et l’époque féodale, ne fournissent pas de grilles chronologiques aussi rigoureuses. Enfin, à partir du XIIe siècle, l’usage du sceau est largement répandu et concerne toutes les classes et catégories sociales. Le grand nombre des sceaux conservés (plus de trois millions pour l’Europe médiévale dans son ensemble) permet même l’application de méthodes quantitatives ou statistiques dans des domaines (iconographie, faits de mentalité et de sensibilité, culture matérielle) où elles sont encore peu habituelles (4).
35En France, jusqu’à une date récente, cette richesse documentaire demeurait méconnue de beaucoup de médiévistes. Certains n’avaient même jamais vu un sceau. Aujourd’hui les choses ont bien changé. Comme l’héraldique, la sigillographie française a su, en une génération, renouveler ses méthodes et enrichir considérablement sa problématique (27, 29, 32). Non seulement elle s’est dotée de règles de critique spécifiques et rigoureuses, a précisé son vocabulaire et ses méthodes de classement, mais elle a surtout étendu ses horizons théoriques et problématiques. La plupart des anciens manuels de sigillographie privilégiaient l’aspect archéologique du sceau, pensé comme une source d’images banalement documentaire, ou bien son rôle strictement diplomatique (valider et authentiquer les actes). Tous les travaux récents s’attachent à mettre en valeur la fonction sociale de cet objet-image à nul autre pareil. Ils soulignent ses enjeux idéologiques (mettre en ordre et contrôler la société) (27, 29) et sa forte dimension anthropologique : le sceau est une image qui se touche, qui se porte sur soi, qui accompagne son possesseur dans la tombe, qui entretient avec le corps des rapports physiques et symboliques privilégiés (4).
Du nom au vêtement
36Ces réflexions et enquêtes nouvelles concernant les armoiries et les sceaux sont le produit des mutations fructueuses qui ont affecté les sciences sociales à partir des années soixante et des pistes ouvertes par l’anthropologie historique. Mais à leur tour, au sein de la médiévistique, elles ont dynamisé les recherches portant sur le monde des emblèmes et des signes d’identité, depuis les noms individuels et patronymiques – le nom est toujours le premier des emblèmes – jusqu’aux devises et aux « portraits » réalistes qui font leur apparition à la fin du Moyen Age (30, 31). L’anthroponymie, notamment, a cessé d’être un territoire réservé aux seuls philologues ; les historiens en ont fait une véritable science sociale qui joue désormais en France, au sein des études médiévales, un rôle particulièrement actif et prometteur (40, 41).
37Toutefois, parmi les signes sociaux, celui qui a le plus profité de la problématique « héraldique » et de l’attention de plus en plus grande portée aux images, n’est sans doute pas le nom mais le vêtement. Il était en effet regrettable que pendant si longtemps les historiens français de la société médiévale se soient si peu intéressés au vêtement et aux pratiques vestimentaires. Ils avaient abandonné ces domaines à la « petite histoire » et aux travaux d’amateurs, ou bien s’étaient contentés d’une étude archéologique des formes du costume, étude souvent envisagée sous un angle esthétique ou positiviste. Or ce n’est évidemment pas cela qui est en jeu dans le fait vestimentaire : le vêtement est un véritable système social (39). Heureusement, depuis une ou deux générations, sous l’influence de l’anthropologie et de la sémiologie (pensons ici à l’ouvrage pionnier de Roland Barthes, Le système de la mode, élaboré en 1957), plusieurs historiens du Moyen Age ont entrepris des enquêtes nouvelles, considérant le vêtement comme un objet d’histoire à part entière et les pratiques vestimentaires comme un terrain pleinement transdisciplinaire et transdocumentaire. Par là même, nos connaissances se sont considérablement enrichies et les problématiques se sont diversifiées (37, 39, 45, 47).
38Dans le vêtement médiéval, en effet, tout est signifiant : les tissus (matière, texture, provenance, décor), les pièces et les formes, les couleurs (qualité des colorants, solidité, luminosité, tons et nuances), le travail de coupe et d’assemblage, les dimensions, les accessoires et, bien sûr, la façon de porter le vêtement. Il s’agit d’exprimer par des signes conventionnels, toujours fortement codés, un certain nombre de valeurs et d’en assurer les contrôles correspondants. Chacun doit porter le vêtement de son état et de son rang. Se vêtir plus richement ou plus pauvrement qu’il n’est d’usage dans la classe ou dans le milieu auxquels on appartient, est un péché d’orgueil ou une marque de déchéance ; c’est en outre une transgression de l’ordre social et donc une cause de scandale (37). Partout la fonction taxinomique du vêtement prime sa fonction utilitaire. Bien avant d’aider à se protéger contre les effets du climat ou à s’adapter à telle ou telle activité matérielle, le vêtement dit qui l’on est, en soulignant l’appartenance à un groupe (familial, politique, domestique, professionnel, militaire, religieux, ethnique, culturel) et en signalant souvent la position, le rang ou la dignité au sein de ce groupe. Le vêtement médiéval est une réalité institutionnelle et normative et non pas une réalité individuelle, qu’elle soit affective, esthétique, ludique ou psychologique. On ne porte pas les vêtements que l’on aime, on porte ceux que l’on doit porter.
39Par là même, les morales vestimentaires sont nombreuses et contraignantes. Elles ont longtemps été le fait des théologiens et des hommes d’Eglise (l’habit monastique en est l’exemple le plus ancien), avant d’être reprises et renouvelées par les autorités laïques à partir des ΧΙIe-ΧΙΙΙe siècles. A la fin du Moyen Age, les lois somptuaires et les décrets vestimentaires prolifèrent partout, spécialement dans les villes. Ces lois, qui sous des formes diverses perdureront parfois jusqu’au XVIIIe siècle, attendent encore (du moins en France) leurs historiens.
40Ce qui est vrai du vêtement dans la société véritable l’est encore plus dans la société iconographique. Ici, plus que partout ailleurs, le costume est support de signes et instrument de classification. Dans les images, en effet, les attributs et les codes sont toujours plus accentués, plus systématiques, plus redondants que dans la société. Plus que jamais il faut savoir à qui l’on a affaire et ne pas confondre un apôtre avec un simple prophète, un saint avec son bourreau, un roi avec son vassal, un maître avec son apprenti ou bien un évêque avec un abbé et encore moins un prélat avec un simple clerc. Mais ici deux axes s’entrecroisent qui obligent l’image à faire preuve de souplesse et de subtilité dans ses codes et dans ses procédés : un axe social et un axe moral. Il faut non seulement distinguer les personnages bien nés de ceux qui se situent plus bas dans l’échelle sociale, mais il faut aussi mettre en valeur ceux qui, du point de vue éthique, sont pris en bonne part et ceux qui, à un titre ou à un autre, sont dévalorisés ou dévalorisants. Il y a des nobles et des vilains et il y a des bons et des méchants. L’image doit dire tout cela et le dire avec nuance (42). Comme elle doit aussi souligner l’appartenance de tel personnage à tel ou tel groupe institutionnel, les intentions qui l’animent dans telle ou telle scène, les relations qu’il entretient avec les autres personnages de l’image, voire avec ceux qui prennent place dans d’autres images. Pour ce faire, le vêtement – avec ses formes, ses couleurs, son décor, ses insignes et ses accessoires – est toujours un attribut privilégié. Il obéit à des codes dont certains sont récurrents à travers différentes catégories d’images et de documents, dans une chronologie et une géographie larges, et d’autres plus spécifiques à tel ou tel document, telle ou telle œuvre d’art, tel ou tel artiste ou atelier. Plusieurs travaux récents ont pertinemment souligné cette fonction « iconographique » du vêtement dans l’image (37, 42).
Qu’est-ce que la symbolique médiévale ?
41Du monde des emblèmes et des codes sociaux, les recherches se sont peu à peu étendues à celui des symboles. Sur ces terrains, les médiévistes français ont fait des efforts fructueux pour préciser un vocabulaire souvent flottant – en grande partie hérité des XVIe et XVIIe siècles – et pour distinguer plus nettement qu’on ne le faisait précédemment le symbole de l’emblème. Les deux mots ne sont pas synonymes, même si la frontière qui les sépare est perméable et si dans l’usage courant le français tend à les confondre. Aujourd’hui, sous la plume des médiévistes, ils ne sont plus confondus : l’emblème est un signe (généralement figuré) qui a pour fonction de dire l’identité d’une personne ou d’un groupe de personnes ; le symbole au contraire est un signe qui exprime une idée, un concept, une notion. Le signifiant peut être identique (une armoirie par exemple) mais le signifié n’est pas le même dans les deux cas.
42Cette distinction – arbitraire mais opératoire – a permis à quelques chercheurs de s’aventurer efficacement sur le terrain de la symbolique médiévale, un terrain jusque-là particulièrement maltraité en France (victime de l’ésotérisme, de la quête de prétendus archétypes et d’anachronismes de toutes sortes). Des travaux importants ont ainsi pu être consacrés aux gestes (38, 46), aux couleurs (42, 44), aux nombres, aux animaux (52, 53), aux végétaux (48, 51), aux matériaux (49). Ils ont permis de mieux cerner la notion même de symbole dans l’Occident médiéval, en quittant pour un temps les hautes spéculations philosophiques et théologiques héritées de saint Augustin (et bien étudiées depuis longtemps) pour prendre plus largement en compte une symbolique « ordinaire », à l’œuvre dans la pensée du plus grand nombre, dans la vie quotidienne et dans la culture matérielle. Ces deux « niveaux » symboliques ne sont évidemment nullement étrangers l’un à l’autre.
43Au Moyen Age, en effet, le symbole se construit presque toujours autour d’une relation de type analogique, c’est-à-dire sur une relation appuyée sur la ressemblance plus ou moins vague entre deux objets, deux mots, deux notions, ou bien sur la correspondance entre une chose et une idée. Cette pensée analogique s’efforce notamment d’établir un lien entre quelque chose qui est apparent et quelque chose qui est caché ; et, plus particulièrement encore, entre ce qui est présent dans le monde d’ici-bas et ce qui a sa place parmi les vérités éternelles de l’au-delà. Un mot, une forme, une couleur, une matière, un nombre, un geste, un animal, un végétal et même une personne peuvent ainsi être revêtus d’une fonction symbolique et, ce faisant, représenter ou signifier autre chose que ce qu’ils prétendent être ou montrer. L’exégèse consiste à cerner cette relation entre le matériel et l’immatériel et à l’analyser pour retrouver la vérité cachée des êtres et des choses.
44Toutefois, dans la symbolique médiévale comme dans tout autre système de valeurs ou de correspondances, rien ne fonctionne hors contexte. Un animal, un végétal, un nombre, une couleur ne prend tout son sens que pour autant qu’il est associé ou opposé à un ou plusieurs autres animaux, végétaux, nombres, couleurs. Il faut donc se méfier de toute généralisation abusive, de toute quête d’une signification transdocumentaire, comme ont parfois tendance à le faire les étudiants et les jeunes chercheurs.
45En outre, il est impossible de séparer les pratiques symboliques des faits de sensibilité. Dans le monde des symboles, suggérer est souvent plus important que dire, et évoquer que prouver. C’est pourquoi l’analyse que nous faisons aujourd’hui des symboles médiévaux est souvent anachronique parce que bien trop mécanique. Les nombres en constituent le meilleur exemple. Au Moyen Age, ils expriment autant des qualités que des quantités. Souvent ils ne doivent pas être interprétés en termes arithmétiques ou comptables mais en termes symboliques. Trois, quatre, cinq ou sept, par exemple, signifient toujours plus que les seules quantités de trois, quatre et sept. Douze ne représente pas seulement une douzaine d’unités mais aussi une totalité, un ensemble parfait. Quant à quarante, si récurrent en tous domaines, il ne doit nullement se comprendre comme un nombre précis mais comme l’idée générique d’un grand nombre, un peu comme nous employons aujourd’hui cent ou mille. Sa valeur n’est pas quantitative mais qualitative et suggestive. Elle s’adresse plus à l’imaginaire qu’à la raison (42).
46Les recherches récentes ont ainsi montré que le symbole était à l’œuvre en toutes circonstances et sur tous les terrains. Ainsi sur celui des matériaux, domaine où à première vue on pourrait penser qu’il intervient peu. On se trompe : il y est fortement présent et cette présence explique pourquoi au Moyen Age tout matériau est d’abord un animal, un végétal ou un minéral avant d’être de la corne, de l’ivoire, du bois ou de la pierre. Un bois, par exemple, n’est jamais n’importe quel bois. C’est toujours une essence précise, qui possède son histoire, ses légendes, ses propriétés. Et celles-ci ne sont pas seulement physiques et chimiques. Certes, il existe des bois durs et des bois tendres, des bois poreux et des bois imperméables, des bois lisses et des bois rugueux. Mais il y a également des bois masculins et des bois féminins, des bois nobles et des bois roturiers, des bois justiciers (l’orme, le chêne), d’autres punitifs (le bouleau), d’autres encore guerriers (le frêne) ou musiciens (le tilleul). Il existe surtout des bois bénéfiques (le chêne, le hêtre, le noisetier) et des bois jugés plus inquiétants (l’aulne), plus néfastes (le noyer) voire mortifères (l’if). L’artisan qui fabrique un outil ou un instrument en tiendra compte, et de même que les textes savants expliquent qu’il existe des arbres masculins et des arbres féminins, de même il ne taillera jamais un outil manié par un homme dans un bois réputé féminin ni le contraire (49).
47Ces distinctions, que plusieurs travaux récents ont mis en valeur (et que les ethnologues connaissent bien pour d’autres sociétés), étaient pratiquement ignorées des archéologues médiévistes. Elles devront désormais être prises en compte.
Le monde animal
48Dans ce domaine renouvelé de l’étude des symboles, une place à part doit être faite au monde animal. C’est là que les études ont été les plus nombreuses et les plus fructueuses.
49Pendant longtemps les érudits et les historiens français ne se sont guère préoccupés de l’animal. Ils ont abandonné celui-ci à la « petite histoire », comme ils avaient l’habitude de le faire pour tous les sujets qui leur semblaient futiles, anecdotiques ou marginaux. Seuls quelques philologues et quelques historiens des religions s’étaient intéressés à tel ou tel dossier spécifique au sein duquel l’animal pouvait être concerné. Mais lui consacrer une véritable thèse ou un livre savant était proprement impensable en France jusque dans les années soixante-dix ou quatre-vingts.
50Depuis, la situation a bien changé. Grâce aux travaux de quelques historiens pionniers, au premier rang desquels il faut citer Robert Delort (50), et grâce à la collaboration de plus en plus fréquente avec des chercheurs venus d’autres horizons (anthropologues, ethnologues, linguistes, zoologues), l’animal est enfin devenu un objet d’histoire à part entière. Son étude se situe même désormais à la pointe de la recherche et au carrefour de plusieurs disciplines. Elle ne peut, en effet, elle aussi, être que « transdocumentaire » et « transdisciplinaire », deux adjectifs qui aujourd’hui sont certes galvaudés (en raison de l’usage abusif que l’on en a fait depuis deux ou trois décennies au sein des sciences humaines), mais qui qualifient parfaitement les recherches que doit conduire tout historien s’intéressant à l’animal. Envisagé dans ses rapports avec l’homme, celui-ci touche à tous les grands dossiers de l’histoire sociale, économique, matérielle, culturelle, religieuse et symbolique (52). Il est présent partout, à toutes époques, en toutes circonstances, et partout il pose à l’historien des questions importantes, nombreuses et complexes.
51Dans cette attention nouvelle portée par les historiens au monde animal, les médiévistes ont joué le rôle principal. A cela plusieurs raisons. La première tient peut-être à leur curiosité sans limite et à la façon dont ils ont su, précocement et efficacement, faire tomber les barrières entre des secteurs de la recherche par trop cloisonnés (notamment entre les sciences sociales et les sciences naturelles). Mais la raison essentielle s’en trouve dans les documents médiévaux eux-mêmes : ceux-ci sont particulièrement bavards sur l’animal et sur ses relations avec les hommes, les femmes et la société. Textes et images, bien sûr, mais aussi matériaux archéologiques, pratiques religieuses, rituels et codes sociaux, héraldique, toponymie et anthroponymie, folklore, proverbes, chansons, jurons ; quel que soit le terrain documentaire sur lequel il s’aventure, l’historien médiéviste ne peut pas ne pas rencontrer l’animal. Il semble bien qu’en Occident, aucune autre époque ne l’ait aussi fréquemment et intensivement pensé, raconté et mis en scène. Les animaux prolifèrent jusque dans les églises, où ils constituent une bonne part du décor et de l’horizon figuré – sculpté ou peint – que les prêtres, les fidèles et les moines ont quotidiennement sous les yeux.
52Le Moyen Age s’étendant sur près d’un millénaire, il faut évidemment sérier les enjeux, périodiser les problèmes et distinguer des attitudes qui ne sont nullement immobiles. Les systèmes de valeurs de l’époque carolingienne (53) ne sont pas ceux des XIIe-XIIIe siècles, encore moins ceux de la fin du Moyen Age. Cependant, d’un point de vue général, il faut souligner combien la culture médiévale chrétienne est curieuse de l’animal et comment s’expriment à son sujet deux courants de pensée et de sensibilité apparemment contradictoires. D’une part, il lui faut opposer le plus nettement possible l’homme qui a été créé à l’image de Dieu, et la créature animale, soumise et imparfaite, sinon impure. Mais de l’autre, il existe chez quelques auteurs chrétiens le sentiment, plus ou moins diffus, d’une véritable communauté des êtres vivants et d’une parenté – pas seulement biologique – entre l’homme et l’animal.
Imaginaire
53Tous les domaines nouveaux de la recherche évoqués ci-dessus s’appuient sur des études transdocumentaires, au sein desquels l’image occupe une place importante. Tous soulignent en outre avec force qu’au sein d’une société donnée l’imaginaire fait toujours partie de la réalité. Mais ce terme « imaginaire » ne doit pas être pris dans un sens vague, comme on l’a fait naguère du terme « mentalités ». Plusieurs médiévistes ont cherché à en donner une définition rigoureuse, condition première de son efficacité heuristique (58, 65, 73). Il faut ici nettement distinguer la notion d’« imaginaire » de celle d’« imagination », qui a un sens plus individuel (et plus psychologique, dans le bon sens du terme), ainsi que de celle d’« idéologie », qui met avant tout l’accent sur les fonctions sociales.
54Par « imaginaire », on entend l’ensemble diffus des mythes, des valeurs, des lieux communs, des croyances et des aspirations collectives d’une société. Ceux-ci peuvent s’exprimer de manière très diverse mais sont présents sur quelques terrains documentaires que l’historien du Moyen Age peut et doit privilégier : la littérature, et plus spécialement la « littérature de l’imaginaire » (55, 58), les rituels (spécialement tous ceux qui ont à voir avec les métamorphoses (60, 69), les rites de passage et les superstitions), les représentations au sens le plus large, parmi lesquelles, bien évidemment, les rêves, les visions et les images. En ce domaine, en effet, il ne faut pas seulement retenir les images matérielles (miniatures, peintures murales, vitraux, panneaux peints et sculptés, etc.). Au contraire, les historiens de l’imaginaire ont montré comment ces images matérielles sont inséparable d’autres images – images de rêve, images de la mémoire – qui toutes transgressent les cadres objectifs et matériels de l’espace et du temps et que le latin médiéval désigne pourtant par le même mot : imago (imagines).
55Comme l’ont montré plusieurs études récentes (57, 64, 67, 74), c’est sans doute sur ces différents terrains que l’historien de la société peut rencontrer et prolonger le plus fructueusement le travail de l’historien de l’art ou de la littérature (58, 59) ainsi que celui d’autres spécialistes.
Problèmes de mots et de concepts
56Jacques Le Goff, dans l’introduction à son recueil d’articles L’imaginaire médiéval, publié en 1985, a proposé un cadre lexical, conceptuel et heuristique qu’ont ensuite fructueusement repris d’autres chercheurs (65). En ces matières, il importait en effet de préciser les mots et les notions, notamment de distinguer l’imaginaire du symbolique (lequel, pour l’historien du Moyen Age occidental, renvoie presque toujours à un système de valeurs idéologiques et sociales), puis, au sein de l’imaginaire même, le merveilleux du miraculeux et du magique. Dans le miracle, c’est toujours Dieu qui est à l’œuvre ; dans le magique, c’est le Diable ou ses créatures. Avec la merveille, en revanche, nous entrons dans un domaine qui échappe quelque peu aux taxinomies du christianisme. C’est le monde de l’étrange, de l’inexpliqué et de l’inexplicable, des êtres et des choses surnaturels (68, 71). D’abord occulté et réprimé, ce merveilleux, dont les racines sont souvent pré-chrétiennes, se fait moins discret après l’an mille, puis explose véritablement dans les documents des XIIe et ΧΙΙIe siècles, spécialement dans les textes littéraires (58, 59, 71). Par la suite, il trouve une place reconnue dans la création artistique et littéraire et subit l’influence (et le contrôle) des codes esthétiques ; ce qui le rend plus mièvre, moins transgressif.
57Ce sont surtout les historiens des textes littéraires du Moyen Age central qui ont travaillé sur ce merveilleux et ses marges. Parmi les thèmes qui ont retenu leur attention, il faut particulièrement mettre en valeur celui des êtres étranges ou surnaturels : fées (59), nains et géants, monstres (63), animaux fabuleux, êtres mi-hommes mi-animaux (60, 67). Sur toutes ces créatures, longtemps abandonnées elles aussi à la « petite histoire », nos connaissances se sont enrichies et des problématiques nouvelles et nombreuses sont apparues. Elles devraient continuer à favoriser, dans les années qui viennent, la publication de travaux de qualité.
58Les historiens, quant à eux, ont gardé à cet imaginaire ses horizons sociaux et religieux (parfois hérétiques) et par là même plutôt mis l’accent sur les pratiques et les rituels (la prédication, le « folklore » (72), les jeux (66, 70), les superstitions (73), la sorcellerie), sur les lieux – Enfer, Paradis, Purgatoire (64) – et sur les images.
De l’image à l’imaginaire
59Plusieurs travaux importants ont en effet montré que les images constituaient pour l’historien la voie la plus riche pour étudier l’imaginaire (4). Non pas seulement les images matérielles dont il a été parlé plus haut, mais aussi les images immatérielles, celles de la langue et du discours et, plus encore, les images mentales, celles des rêves et des apparitions, des extases visionnaires, des fantasmata. La notion d’imago est en effet très large ; mais même si chacun des territoires qui la compose est en partie autonome et possède ses modes d’énonciation et de fonctionnement propre, tous entretiennent des rapports étroits. Par là même, la notion d’imago ne peut se comprendre que dans sa plénitude et les études qui la concernent ne peuvent être qu’interdisciplinaires (22, 74).
60Désormais, en plus des images matérielles – si nombreuses et jusqu’à présent peu étudiées (du moins si on les compare aux documents écrits), l’historien des images doit aussi prendre en compte les images immatérielles. Ce n’est qu’à cette condition que pourra se constituer, au carrefour de l’histoire sociale, religieuse, artistique et littéraire, une véritable et fructueuse « histoire des images », aux fondements de laquelle les chercheurs français, au cours des quinze dernières années, ont solidement contribué.
Quelques exemples de travaux récents concernant l’histoire des images, des symboles et de l’imaginaire au Moyen Age
61La présente liste est une simple orientation bibliographique. Elle non plus ne constitue nullement un « palmarès », à peine un florilège. Elle souhaite seulement donner quelques pistes de lecture pour compléter le rapport qui précède et donner une idée des tendances nouvelles de la recherche en France. Nous nous sommes limités aux ouvrages parus depuis une quinzaine d’années. Nous n’avons pas pris en compte les travaux – nombreux et souvent de qualité – concernant les méthodes ou les domaines traditionnels de l’histoire de l’art, de l’histoire littéraire et de la vie quotidienne. Ce n’était pas l’objet de notre rapport ni des réflexions et perspectives qui l’accompagnent.
62Pour des raisons de place, les articles ont arbitrairement été exclus de cette liste, mais il va sans dire que c’est d’abord dans des articles qu’ont été publiées les travaux nouveaux, et c’est sur eux que s’appuie en partie notre rapport. Au reste, un certain nombre d’articles importants sont parus dans des actes de colloques ou des recueils collectifs mentionnés ici (voire republiés par tel ou tel auteur dans un recueil de ses propres articles).
I. Les images
631. D. Alexandre-Bidon éd., Le pressoir mystique. Actes du colloque de Recloses, Paris, 1990.
642. J. Baschet, Lieu sacré, lieu d’images. Les fresques de Bominaco (Abruzzes, 1263). Thèmes, parcours, fonctions, Paris-Rome, 1991.
653. J. Baschet, Les justices de l’au-delà. Les représentations de l’enfer en France et en Italie (XIIIe-XVe), Rome, 1993.
664. J. Baschet et J.-C. Schmitt dir., L’image. Fonctions et usages des images dans l’Occident médiéval, Paris, 1996 (Cahiers du Léopard d’or, 5).
675. F. Bœspflug et N. Lossky éd., Nicée II. (787-1987). Douze siècles d’images religieuses, Paris, 1987.
686. J.-C. Bonne, L’art roman de face et de profil. Le tympan de Conques, Paris, 1984.
697. C. et J.-C Deremble, Les vitraux légendaires de Chartres, Paris, 1988.
708. J. Devisse et M. Mollat, L’image du noir dans l’art occidental. II. des premiers siècles chrétiens aux grandes découvertes, Fribourg, 1979, 2 vol.
719. G. Didi-Huberman, Fra Angelico. Dissemblance et figuration, Paris, 1990.
7210. G. Didi-Huberman, Devant l’image. Question posée aux fins d’une histoire de l’art, Paris, 1990.
7311. G. Duchet-Suchaux éd., Iconographie médiévale Image, texte, contexte, Paris, 1990.
7412. L’Emplacement et la fonction des images dans la peinture murale du Moyen Age. Actes du 5e séminaire international d’art mural (Saint-Savin, 1992), Saint-Savin, 1993.
7513. P. Francastel, L’image, la vision et l’imagination, Paris, 1983.
7614. F. Garnier, Le langage de l’image au Moyen Age, Paris, 1982-1989, 2 vol.
7715. F. Garnier, Thésaurus iconographique. Système descriptif des représentations, Paris, 1984.
7816. Groupe d’anthropologie historique de l’Occident médiéval, Thésaurus des images médiévales pour la constitution de bases de données iconographiques, Paris, 1993.
7917. C. Heck, L’échelle céleste dans l’art du Moyen Age. Une image de la quête du ciel, Paris, 1997.
8018. R. Jacob, Images de la justice. Essai sur l’iconographie judiciaire du Moyen Age à l’âge classique, Paris, 1994.
8119. E. Palazzo, Les sacramentaires de Fulda. Etude sur l’iconographie et la liturgie à l’époque ottonienne, Munster, 1994.
8220. D. Rigaux, A la table du Seigneur. L’eucharistie chez les primitifs italiens (1250-1497), Paris, 1989.
8321. D. Russo, Saint Jérôme en Italie. Etude d’iconographie et de spiritualité, Paris-Rome, 1987.
8422. J.-Cl. Schmitt, L’historien et les images, dans Der Blick auf die Bilder. Kunstgeschichte und Geschichte im Gespräch, O.G. Oexle éd., Göttingen, 1997.
8523. H. Toubert, Un art dirigé. Réforme grégorienne et iconographie, Paris, 1990.
8624. J. Wirth, L’image médiévale. Naissance et développements (VIe-XVe siècles.), Paris, 1989.
II. Le monde des emblèmes et des symboles
Armoiries, sceaux, emblèmes
8725. Archives nationales, Corpus des sceaux français du Moyen Age. T. II : Les sceaux de rois et de régence, par Martine Dalas-Garrigues, Paris, 1991.
8826. C. Beaune, Naissance de la Nation France, Paris, 1985.
8927. B. Bedos-Rezak, Form and Order in Medieval France. Studies in Social and Quantitative Sigillography, Aldershot (G.-B.), 1993 (Variorum Collected Studies Series, 424).
9028. A. Boureau, L’aigle. Chronique politique d’un emblème, Paris, 1985.
9129. J.-L. Chassel, Signes, mémoire et institutions. Etudes d’histoire médiévale, Nanterre, 1993, 3 vol.
9230. A.-M Lecoq, François Ier imaginaire. Symbolique et politique à l’aube de la Renaissance française, Paris, 1987.
9331. C. de Mérindol, Le roi René et la seconde maison d’Anjou. Emblématique, art, histoire, Paris, 1987.
9432. M. Pastoureau, Les sceaux, Turnhout-Louvain, 1981 (Typologie des sources du Moyen Age occidental, 36).
9533. M. Pastoureau, L’hermine et le sinople. Etudes d’héraldique médiévale, Paris, 1982.
9634. M. Pastoureau, Armorial des chevaliers de la Table Ronde, Paris, 1983.
9735. M. Pastoureau, Traité d’héraldique, 2e éd., Paris, 1993.
9836. H. Pinoteau, Vingt-cinq ans d’études dynastiques, Paris, 1982.
Codes sociaux : noms, gestes, couleurs, vêtements
9937. O. Blanc, Parades et parures. L’invention du corps de mode à la fin du Moyen Age, Paris, 1997.
10038. Y. Carré, Le baiser sur la bouche au Moyen Age. Rites, symboles, mentalités (XIe-XVe s.), Paris.
10139. L’Etoffe et le vêtement, Paris, 1995 (Médiévales, 29).
10240. Genèse médiévale de l’anthroponymie moderne, Tours, 1989-1997, 4 tomes en 6 vol.
10341. C. Klapisch-Zuber, La maison et le nom. Stratégies et rituels dans l’Italie de la Renaissance, Paris, 1990.
10442. M. Pastoureau, Figures et couleurs. Etudes sur la symbolique et la société médiévales, Paris, 1986.
10543. M. Pastoureau, L’étoffe du Diable. Une histoire des rayures et des tissus rayés, Paris, 1992.
10644. M. Pastoureau, Jésus chez le teinturier. Couleurs et teintures dans l’Occident médiéval, Paris, 1998.
10745. F. Piponnier et P. Mane, Se vêtir au Moyen Age, Paris, 1995.
10846. J.-C. Schmitt, La raison des gestes au Moyen Age, Paris, 1990.
10947. Le Vêtement. Histoire, archéologie et symbolique vestimentaire au Moyen Age, Paris, 1989 (Cahiers du Léopard d’or, 1).
Animaux et végétaux
11048. J.-P. Albert, Odeurs de sainteté. La mythologie chrétienne des aromates, Paris, 1990.
11149. L’Arbre. Histoire naturelle et symbolique de l’arbre, du bois et du fruit au Moyen Age, Paris, 1993 (Cahiers du Léopard d’or, 2).
11250. R. Delort, Les animaux ont une histoire, Paris, 1984.
11351. Flore et jardins. Usages, savoirs et représentations du monde végétal au Moyen Age, Paris, 1997 (Cahiers du Léopard d’or, 6).
11452. Le Monde animal et ses représentations au Moyen Age. Actes du XVe congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur Public (Toulouse, 1984), Toulouse, 1985.
11553. J. Voisenet, Bestiaire chrétien. L’imagerie animale des auteurs du haut Moyen Age (Ve-XIe s.), Toulouse, 1994.
III. L’imaginaire
11654. P. Amargier, La parole rêvée. Essai sur la vie et l’œuvre de Robert d’Uzès O.P. (1263-1296), Aix-en-Provence, 1982.
11755. J. Berlioz, C. Brémond et C. Velay-Valentin éd., Formes médiévales du conte merveilleux, Paris, 1989.
11856. J. Chiffoleau, La comptabilité de l’au-delà. Les hommes, la mort et la religion dans la région d’Avignon à la fin du Moyen Age (vers 1320-vers 1480), Rome, 1980.
11957. F. Clier-Colombani, La fée Mélusine au Moyen Age. Images, mythes et symboles, Paris, 1991.
12058. F. Dubost, Aspects fantastiques de la littérature narrative médiévale (XIIe-XIIIe s.), Paris, 1991,2 vol.
12159. L. Harf-Lancner, Les fées au Moyen Age. Morgane et Mélusine. La naissance des fées, Paris, 1984.
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12361. C. Lecouteux, Fantomes et revenants au Moyen Age, Paris, 1986.
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