Vie, information, connaissance : l’âme selon Cureau de La Chambre
p. 119-133
Texte intégral
LA QUERELLE DE L’ÂME DES BÊTES
1La connaissance est bel et bien le problème à élucider dans la question de l’âme des bêtes, car celle-ci s’enracine là : le savoir-faire des animaux, dont tous les philosophes conviennent, est-il un savoir, donc l’indice d’un pouvoir de connaître, d’une intelligence... donc d’une âme ? Or, la question est très tôt devenue querelle et le problème philosophique enjeu polémique, chaque parti se renvoyant la balle et utilisant les mêmes arguments pour prouver le pour et le contre, sans rien résoudre.
2Le débat né avec le philosophème cartésien dit des « animaux-machines » fut un intermède très court : avant Descartes, l’âme des bêtes va de soi ; de son temps, l’animal-machine est largement contesté ; après lui, personne n’y croit plus1. Or, il fut faussé car immédiatement théologisé : l’animal doué d’âme tantôt soutient, tantôt détruit la religion ; mais 1'animal privé d’âme parle aussi à la fois pour et contre. La physique des modernes de même : car si le mécanisme cartésien se concilie mal avec l’héritage thomiste, le mécanisme leibnitien par la dynamique s’en arrange fort bien. En bref, les « animaux-machines » mènent tout droit tantôt à l’athéisme – car si les bêtes sont capables, sans âme, d’actions étonnantes et semblables aux nôtres, on est en droit de douter de l’âme humaine –, tantôt à Dieu, puisque lui seul peut opérer en eux si parfaitement. Mais l’argument se renverse aussitôt : si Dieu agit en elles et donne une sorte d’infaillibilité à leurs actions, que n’en fait-il autant pour les hommes ? Inversement, l’âme animale peut aussi bien prouver l’ordre divin uniforme dans la Création que conduire à l’abaissement de l’homme, car si une âme dite matérielle peut sentir, la frontière se déplace entre hommes et bêtes. En somme, un rationalisme soutenu par la métaphysique et la théologie (Pardies, Bossuet), et un scepticisme chrétien parfois teinté de matérialisme (Charron, les gassendistes) y trouvent également leur compte.
3Enjeu stratégique et décisif (mais pour quoi, au juste : la théologie, la métaphysique, la morale ?) ou faux problème ? Leibniz analysera fort bien l’enjeu réel, en le radicalisant : ou les bêtes sont sans âme, ou il faut être pythagoricien2 – c’est dire clairement que l’âme est uniforme dans son essence. Or, après la réhabilitation des formes substantielles ancrée dans la notion dynamique de force, il en tient (sans être végétarien) pour l’âme des bêtes, et c’est un problème, car il va beaucoup plus loin que les gassendistes, et que Pardies, en affirmant que cette âme n’est pas matérielle ni destructible. Voici donc des bêtes que l’on va manger bien qu’elles aient une âme immatérielle, indestructible, qui sent et perçoit – ce qui est une forme de connaissance –, une âme bien proche de l’humaine. Mais dire que la spécificité de l’âme humaine est dans le caractère démonstratif, universel de sa capacité cognitive est une échappatoire qui suppose la question résolue : car il faudrait fonder ontologiquement cette distinction, sous peine de maintenir une différence de degré plus que de nature. Or, Leibniz n’a pas de réponse strictement métaphysique, la question reste de fait, donc indémontrable – nous n’en avons qu’une « certitude morale » –, donc résoluble, comme toutes les vérités contingentes, par la révélation ou par l’expérience. L’humain ne diffère vraiment de l’animal que par et pour la foi... L’émergence du sujet, de la personne se mesure : par les degrés de perception, la conscience de soi, les représentations du moi, bref, l’expérience psychologique des Nouveaux Essais.
4C’est dans cette direction que les encyclopédistes réfléchiront sur les états de l’âme plus que sur l’âme : l’homme est tantôt machine, ou plus que machine, ou plante, cela dépend de ses états – y aurait-il seulement des lieux, des seuils propices à l’âme3 ? Bonnet, pourtant remarquable naturaliste, ira même jusqu’à imaginer une transformation de l’âme sensitive des animaux en intellective dans le long processus qui mène à la résurrection palingénésique4...
5Au-delà de la querelle théologique, il y va, bien sûr et comme toujours, de la question de l’homme, de sa spécificité, de son excellence, de son privilège. Il est clair dans cette affaire que l’on s’intéresse à l’âme exclusivement définie comme mens, esprit ou entendement ; et donc, l’enjeu est ici l’émergence d’une doctrine du sujet qui rejette tous les vivants dans le champ de la pure nature, et les hommes seuls dans celui de la liberté. De fait, si l’on définit l’âme comme entendement et la connaissance comme l’effet de la pensée réflexive d’un sujet, la question de l’âme des bêtes est vite réglée : ils n’en ont point. Mais que se passe-t-il si l’on varie sur ces trois termes (âme, connaissance, sujet) et sur leur liaison ? Ce que fera Cureau de La Chambre, médecin et philosophe, dans son Système de l’âme (1664) qui – malgré un vocabulaire scolastique déjà dépassé par son propos – débouche sur un système de la connaissance original, pour être parti de cette intuition fondamentale que la connaissance est le propre du vivant. C’est ainsi que, approfondissant la question autrement, plus et mieux que ses contemporains, il s’écarte de la question obligée du privilège ontologique de la mens humaine, sans se préoccuper des implications métaphysiques et théologiques de ses hypothèses.
UN NOUVEAU SYSTÈME DE L’ÂME
6Cureau de La Chambre ne fait pas de l’âme des bêtes un enjeu polémique, mais un objet de réflexion riche en implications, et même l’objet théorique le plus intéressant, le plus pertinent pour qui veut élucider la question de l’âme : car c’est chez les bêtes que l’on comprend le mieux ce qui se passe. Pourquoi ? Parce que, chez les hommes, l’âme étant immédiatement visible comme mens, l’activité cognitive est accaparée par l’entendement qui recouvre tout ce qui ne relève pas de lui – ce pour quoi, peut-être, les médecins observent celle-ci mieux que les philosophes. Dans l’activité réflexive d’un cogito bavard, l’âme humaine est vraiment plus facile à connaître que le corps... mais du silence obscur que gardent les animaux, que peut-on conclure quant à ce qui gouverne leurs actions ? L’âme des bêtes est en somme un lieu privilégié pour comprendre les fonctions de l’âme ; si elle n’a pas la faculté intellective, elle a, en commun avec l’âme humaine, la sensitive, dominante et plus lisible ; et de plus, elle excelle dans l’instinct qui relève de la faculté végétative, qui est universelle et la plus difficile à élucider.
7Si l’auteur – polémique oblige5 – traite de l’âme des bêtes par le biais de la connaissance, il est clair que ce qui l’intéresse vraiment est bien la connaissance elle-même ; et cela parce que, en tant que médecin, il s’interroge sur la vie et veut comprendre ce dont a besoin un vivant pour exister : non un principe ontologique mais la fonction primordiale indispensable à ce phénomène qu’il observe dans des corps ramenés à leurs fonctions vitales, corps humains, animaux, voire végétaux, à savoir l’exercice, le maintien, dans les individus et dans les espèces, de la capacité à être et à durer. Il ne cherche pas une substance, ou un principe d’unification de la matière – l’âme n’est pas la forme du corps – mais seulement à comprendre comment fonctionne le vivant.
8Et c’est très étrange, à y bien songer, qu’en ce siècle dit cartésien un philosophe réponde : ce qui fait fonctionner le vivant en tant que tel, c’est la connaissance.
9Qu’on ne s’y trompe pas : sous le vocabulaire aristotélicien, sous la reprise de la classification des âmes (qui traditionnellement fonde une échelle des êtres ; mais ce n’est pas le cas ici) en végétative, sensitive, raisonnable, il s’agit de bien autre chose – d’un système de l’âme nouveau et si singulier que son lecteur et critique Pierre Chanet ne l’a pas compris et le ramène aux songeries scolastiques d’avant Descartes ; pourtant, son auteur prend soin d’en signaler la nouveauté : il dit son système peu conforme aux idées reçues, son titre extraordinaire et sa matière obscure... Or, à relire ledit système, il semble bien que nous puissions le comprendre aujourd’hui autrement et mieux que Chanet.
10La question de l’âme des bêtes en est le point de départ, avec le Traité de la connaissance des animaux de 1648 qui s’intéresse, plus qu’à l’âme, aux capacités cognitives des bêtes – la présence de l’âme en suit logiquement dans le contexte épistémologique où il se trouve : en suit-elle nécessairement ? L’auteur ne le démontre pas, il prend l’âme comme un concept philosophique reçu, qu’il cherchera aussi à redéfinir.
PENSER, PARLER
11Cureau de La Chambre renverse le critère cartésien, repris par Chanet, à son bénéfice : si les bêtes parlent, alors elles pensent6. Loin de desservir la cause des bêtes, l’objection lui donne des armes, car il est aisé de montrer que les animaux parlent véritablement (non comme un perroquet, mais à propos). Le Traité donc analyse le langage animal, afin de clore la polémique dans son contexte cartésien, car l’auteur pour sa part n’a pas besoin de cette preuve : dans son système général, elle est superfétatoire, et le Système de l'âme de 1664 n’y reviendra pas. Il ne s’agit évidemment pas de dire que les bêtes parlent comme les hommes, pour exprimer un verbe intérieur déjà formulé en paroles, mais seulement d’expliquer qu’il y a en elles une capacité linguistique qui n’est pas machinale : les sons quelles émettent ne sont pas une simple réaction à un stimulus, ou un effet des causes physiques, ils ont une intentionnalité, certes réduite au désir de communiquer telle chose à tel moment ; ce que nous interprétons comme cri ou chant est une parole qui a un destinataire – le père Bougeant en tirera un Amusement célèbre7 résumé à l’article « Âme » de l'Encyclopédie. N’ignorant pas que les grammairiens définissent la parole comme une « voix articulée », l’articulation étant signe d’une intention d’exprimer, Cureau de La Chambre raffine ce critère (dans une théorie continuiste du mouvement de la voix qui va de la modulation, animale, à l’articulation, humaine, portée par syllabes et consonnes) : le concept générique d’« inflexion » rend compte de ces deux modes du parler, l’articulation est une inflexion dure, la modulation une inflexion douce sur le flux des voyelles par ce moyen différencié.
12Alors, si les bêtes parlent, elles pensent, et aucun cartésien ne saurait dissocier la pensée d’une âme douée de raison.
13Mais au-delà de ce détail de polémique, plus intéressant est le « partage de la raison », car celle des bêtes n’est pas celle des hommes : comment se distribue-t-elle dans les êtres ? L’ambition du nouveau système, nonobstant son titre, n’est pas de définir la nature de l’âme : « Je suppose que c’est une substance spirituelle, indivisible et immortelle, et je ne veux pas affaiblir par mes preuves une vérité que la religion a établie8 » – le philosophe se débarrasse ainsi de l’impact théologique sur la querelle. Son propos consiste à définir l’âme comme fonction, en analysant ses actions principales, qui sont des « mouvements » – ce qui impliquera une situation, une figure, une grandeur... questions pour le moins étranges s’agissant d’une substance spirituelle indivisible occupant intensivement toute l’étendue du corps. De quoi parle-t-on exactement lorsqu’on dit « âme » ?
CONNAÎTRE
14La réponse passe par une théorie de la connaissance.
15Lecteur de Montaigne et de Charron, Cureau de La Chambre convoque le catalogue d’exemples du savoir-faire animal, de ces conduites si proches des nôtres sur lesquelles on s’émerveille (que l’éthologie, discipline devenue sérieuse, nous apprend aujourd’hui à comprendre) et qui montrent sinon de l’âme, assurément de l’intelligence, capable de perfectionnement et même d’invention.
16Comment prouver, à partir de l’expérience et de l’observation, que le comportement des bêtes se fonde dans un savoir ? Le connaître s’exprime dans la ratiocinatio, le raisonnement. Connaître, c’est percevoir (avoir une représentation des choses), juger (former une proposition, affirmative ou négative, en liant ou séparant lesdites représentations), enfin raisonner (enchaîner les propositions vers une conclusion, c’est-à-dire passer du connu à l’inconnu). La tradition philosophique accorde les deux premières opérations aux bêtes, car elles ont des images mentales imprimées dans la mémoire (qui est matérielle) qu’elles savent associer ou dissocier. Toutes les opérations de l’imagination sont communes aux bêtes et aux hommes. C’est dans la dernière opération que l’on veut voir la différence essentielle de l’animal à l’homme : le raisonnement – appelé le discours, terme qui lie d’emblée langage et pensée. Reste à prouver que les animaux en sont capables, en montrant que le raisonnement n’exige pas d’autre faculté cognitive que l’imagination. Les titres des trois premières parties du Traité sont significatifs : l’imagination « conçoit », « juge », « raisonne » – opérations que Chanet (et les cartésiens, et Scipion Dupleix, et Bossuet, et même Pardies) réservait à l’entendement. Mais alors, que se passe-t-il si l’âme simplement sensible et matérielle connaît ? – et que va devenir notre âme ?
17Toute la question est en effet là : à partir de quelle opération y a-t-il connaissance ? Or, en la posant, Cureau de La Chambre ira très loin dans ses exigences, ne se hâtant pas de faire de la connaissance le propre d’une substance immatérielle et immortelle nommée âme raisonnable. D’où son hypothèse que la connaissance ne se limite pas à la ratiocination : elle désigne une opération plus fondamentale et largement partagée par les vivants, les êtres et les choses du monde.
18La ratiocination consiste à établir des liaisons : des rapports (ratio). Le syllogisme en est la forme de base ; or les animaux peuvent en fabriquer, car l’imagination, étant capable d’associer et dissocier, sait construire des liaisons, et il n’est pas plus difficile de lier deux jugements que de lier deux représentations. Les trois opérations du connaître sont donc de même ordre et relèvent de la même capacité cognitive. La ratiocination animale est concluante, puisque la dernière proposition est la jonction des deux premières. Simplement, le syllogisme, ici, n’est pas démonstratif, car lorsque l’animal lie des représentations (« ce blanc est doux – ce doux est bon à manger – ce blanc est bon à manger ») il construit un syllogisme de la 4e figure, classée incorrecte dans la syllogistique aristotélicienne – mais, dit l’auteur, un syllogisme vicieux est toujours un syllogisme... et c’est toujours raisonner que de raisonner mal. Soulignons de plus qu’une inférence non nécessaire reste une inférence : il y a des inférences contingentes, ainsi vont les vérités de fait. Le privilège du raisonnement humain est incontestable en ce qu’il mobilise quelque chose de plus que l'imagination. Conclusion : « Les règles de la logique ne détruisent point le raisonnement des bêtes9. »
19Voici donc une forme de raisonnement chez les bêtes, témoignant de la présence d’une faculté de raisonner : en conclura-t-on légitimement à la présence d’une âme ?
20Deux objections se présentent : l’une cartésienne (Dieu même agit dans la machine animale), mais – les non-cartésiens l'ont dit – l’hypothèse est dépensière et sans raison. On oppose surtout l’instinct, par quoi les animaux sans aucune faculté cognitive accompliraient correctement certaines choses dont ils n’ont aucune expérience sensitive ni aucune image ; mais là encore l’hypothèse de deux sources distinctes dans les actions vitales est dépensière : car les comportements qui mobilisent les sens, l'imagination et la mémoire pourraient aussi bien être pris en charge par l’instinct ; ou inversement : les effets de l’instinct assumés par la faculté imaginative... Cureau de La Chambre refuse la notion courante d’instinct « aveugle », au nom d’une définition de la nature : rien ne s’y fait aveuglément, il faut plutôt y chercher l’ordre et l’économie. Ce vers quoi il s’oriente, c’est une faculté cognitive générale assumant et les comportements contingents individualisés (qui laissent place à l’expérience et au choix, car les bêtes ont des tempéraments et des passions propres) et les nécessaires, automatiques, liés à l’espèce – il ira même plus loin en montrant que cette faculté cognitive assume toutes les actions liées au vivant même... et encore plus loin en disant : à toute chose. Le Système de l’âme construit cette nouvelle théorie – mais qu’advient-il exactement de l’âme ?
CONNAÎTRE : LE PROPRE DU VIVANT
21Cureau de La Chambre entend bien donner une définition de la connaissance qui n’implique pas la conscience ni la réflexivité : cette connaissance qui enveloppe la connaissance d’un sujet en tant que connaissant est une forme très élaborée du connaître, et du même coup une forme très élaborée du sujet qui se constitue en tant que moi. Elle est aussi la plus visible, ce qui explique qu'elle s’impose comme règle alors qu'elle est un cas particulier.
22Cas particulier de l’universelle connaissance qui est le propre du vivant en général, hommes, bêtes et anges, plantes aussi. Les formules sont décisives et frappantes : la connaissance est une action vitale, tout ce qui vit connaît, et tout ce qui connaît vit10. C’est une idée nouvelle, son auteur y insiste, mais qui ne fut pas entendue comme telle : on y voit simplement une pensée fidèle à Aristote et Thomas d’Aquin. Ce n’est pas faux, mais ce n’est pas tout. Car s’il est scolastiquement correct de classer les âmes en végétative, sensitive et raisonnable, suivant les actions auxquelles elles président, il est nouveau d’affirmer l’identité de la connaissance et de la vie.
23À condition de définir autrement la connaissance : elle n’est pas, essentiellement, l’effet de l’activité pensante d’un sujet ni l’expression volontaire et libre d’une intériorité. Elle est d’abord et par définition l’activation d’un système de signes ou plutôt de signaux inhérents aux êtres vivants.
24Ce système est celui de l’imagination, qui est la faculté cognitive par excellence, parce qu'elle est présente en tous les animaux, humains inclus ; l’image est l’invariant du nouveau système. Si les notions d’image et imagination ne sont certes pas nouvelles dans les théories de la connaissance, de l’Antiquité à l’Âge classique, l’usage et les définitions, et surtout les exemples et les métaphores prennent un sens inusité.
25L’imagination est une fonction qui permet de recevoir, produire, mobiliser et traiter des images, lesquelles informent le sujet percevant sur son état (sa santé ou sa maladie, ses appétits, ses besoins, ses passions) et sur son rapport à un environnement quelconque. Ni le discernement ni l’attention volontaires ne sont nécessaires à la connaissance que fournissent les images : le sujet en est le lieu et non la source. « Image » est un terme générique, qui désigne d’abord les « images naturelles » dont la nature a doté les objets afin qu’ils s’offrent à l’imagination (objets des sens externes ; ou des choses qui ne sont pas des objets : opérations, comportements, conduites spécifiques ; phénomènes physiologiques : rapport des parties du corps, mouvements des fluides, des corpuscules) ; viennent ensuite les images représentatives nommées « phantomes », fabriquées par l’imagination sur le modèle des premières qui en sont comme les « patrons » ; enfin les images que produit l’entendement en agissant par réflexion sur des phantomes : c’est-à-dire les « idées », qui sont spirituelles, différant en cela des deux précédentes qui sont matérielles.
26La connaissance à proprement parler est un traitement des images : une action et une altération du matériau que fournit la nature ; lequel matériau est déjà de l’ordre du cognitif (peut-on dire que les objets, qui ne connaissent pas, sont porteurs de connaissance ? dirait-on aujourd’hui : émetteurs d’information ?) ; l’altération est « perfective » lorsque le travail de l’entendement traduit le matériel en spirituel – mais, nonobstant cette traduction, toutes les données cognitives (images, phantomes, idées) sont semblables par leur fonction représentative, et l’auteur, comme malgré lui, minimise la distinction du matériel au spirituel lorsqu’il explique que la différence n’est que dans le choix du matériau : car le portrait reste bien le même, qu’il soit peint, gravé ou sculpté. La métaphore déborde sa pensée – ou révèle un impensé ? Car il écrit aussi : « La nature subtilise et spiritualise les choses matérielles11. » Matérielle ou spirituelle, c’est encore et toujours de la connaissance, c’est-à-dire réception d’images, et reconnaissance immédiate même sans définition (l’agnelet nouvel et ne sait pas ce qu’est un loup mais sait immédiatement qu’il est à fuir). L’imagination suffit non à comprendre ni expliquer, mais à « faire connaissance », prendre connaissance des choses et réagir adéquatement. L’intérêt de ce concept générique est de parler univoquement de choses dissemblables, donc de mieux comprendre, en éclairant les modes du connaître les uns par les autres, ce qu’est la connaissance... – et, par suite, ce qu’est l’âme ?
27Où est-il intéressant de repérer l’activité cognitive ? Non sous sa forme rationnelle, évidente puisque discursive et réflexive, donc peu instructive, quoique la plus perfectionnée ; non plus sous la forme sensitive commune aux hommes et aux bêtes (et à certaines plantes sensitives), observable dans l’exercice des actions et passions, dans l’expression des sensations et du sentiment. La connaissance sensitive est le partage des vivants, capables de « connaître et se mouvoir » : tous sont munis de facultés aptes à recevoir et transformer les images – au minimum, les organes des sens, l’imagination, la mémoire. Dans les deux cas, donc, l’acte de connaître est assignable à des dispositifs appropriés. Mais les fonctions du vivant en tant que tel ne s’arrêtent pas à ce niveau : la médecine travaille en deçà. Comment repérer le connaître en l’absence de ces dispositifs ? La fonction végétative en effet, qui gouverne tout ce qui est simplement vital dans les organismes, ne perçoit ni n’agit par l’intermédiaire des organes des sens : elle est seule à opérer dans les plantes, et dans les animaux (humains compris), elle opère sans mobiliser lesdits organes. Il faut comprendre qu’il y a une fonction connaissante là où l’on ne peut assigner des moyens, ni même une façon de procéder, ni même un sujet percevant, encore moins une volonté d’agir. Mais d’où viennent les images ? Et en l’absence de faculté sensitive agissante, comment sont-elles activées pour le fonctionnement élémentaire du vivant ?
28C’est en ce point qu’il faut convoquer l’instinct, ce concept mal compris (qui fonctionne épistémologiquement comme un asile de l’ignorance, même chez les encyclopédistes), que l’on accorde largement aux bêtes parce que c’est là qu’il est le plus observable, dans les conduites spécifiques surtout, et partiellement aux hommes (car certaines actions se font sans mobiliser la perception ni l’entendement). L’instinct ne mobilise ni l’âme sensitive ni la rationnelle, il fait à lui seul toute la connaissance végétative, transversale à tous les êtres puisqu’elle concerne plantes, bêtes et hommes... – et, qui sait, encore plus ? Il faudrait méditer aussi sur les anges et les choses, les uns ayant comme un instinct rationnel, les autres un instinct sourd. C’est dans l’instinct que l’activité cognitive se montre pour ainsi dire à l’état brut et dans son extension la plus large – et c’est en ce point que le texte devient le plus inattendu, le plus intéressant : car l’instinct bien conçu se révèle être l’opérateur, universel dans la nature, de la connaissance prise en général ; or, cette connaissance est sans sujet... Mais alors, derechef, que devient l’âme ?
LE VÉGÉTATIF COGNITIF
29Cureau de La Chambre souligne que tous les philosophes accordent que les actions de l’âme végétative se font par l’instinct, mais n’ont pas vu que cela implique que cette âme est elle aussi une faculté cognitive. On fait de l’instinct une cause secrète qui agit en se réglant sur des connaissances innées ; mais puisque les images ne lui viennent pas du système sensitif, il faut bien quelles soient inscrites dans le végétatif : le poussin sitôt né reconnaît le milan, mais d’où sait-il d’avance que c’est son prédateur ? C’est qu’il a, enfoui au niveau végétatif, une image qui n’est pas du milan, mais de son rapport au milan ; non une image d’objet, mais une instruction de comportement que la vue de l’objet déclenchera automatiquement – sans cette instruction, la perception visuelle du milan ne lui servirait à rien. Ces images sont naturelles ou « connaturelles » parce qu’elles sont coextensives aux espèces, c’est-à-dire essentielles à la définition du vivant, de tout être qui est né de la nature, naturé. L’image connaturelle n’a pas à proprement parler d’objet déterminé qui serait son « patron » : elle est elle-même un patron que l’imagination représente à l’instinct comme un schéma ou une procédure à suivre, un protocole, une ordonnance – on dirait volontiers un programme, en s’autorisant de la comparaison de l’auteur : « Comme un homme qui aurait ses ordres par écrit, qui fait simplement ce qui est couché en ses mémoires12. » Le changement de métaphore est intéressant : l’automatisme ne renvoie pas à la machine, par transmission de mouvements, mais au texte : non à des forces ou énergies matérielles, mais à des signes et des instructions conservés dans une mémoire. Dira-t-on : du logiciel ?
30Il est difficile de décrire cette connaissance qui se fait en deçà du sensitif. Elle n’est pas connaissance stricto sensu mais seulement une « ombre de connaissance », parce qu'elle n’agit pas sur les images, mais les applique ; or, cela même la rend infaillible (donc parfaite) puisque l’image connaturelle est pour ainsi dire performative, commandant, déclenchant immédiatement l’action inscrite en elle. L’auteur la dit « basse et matérielle », répandue dans toutes les parties organiques, et pourtant fine et subtile, délicate, plus exacte, plus différenciée que la sensitive. La connaissance végétative concerne les viscères, les tissus, les humeurs, la bile, les sucs digestifs, le pouls... tout ce qui se passe sourdement dans les corps, à l’insu de la perception. Chez l’homme même, elle est préalable à des actions volontaires : ainsi, dans le mouvement, l’âme choisit infailliblement les muscles appropriés, sans connaître leur existence, leur position ni leur usage ; l’entendement même tient de l’instinct une secrète connaissance de la liberté, du bonheur et de la beauté...
31Ce modèle de connaissance est particulièrement significatif pour nous en ce qui concerne la médecine et la biologie : les processus vitaux demandent d’autres informations que celles que fournissent les sens et supposent des dispositifs permettant aux vivants de résoudre des problèmes qui échappent au sentir, à la conscience et à la volonté, où il faut pourtant discerner la rupture d’un équilibre et choisir le bon moyen de le rétablir. L’auteur en donne maints exemples : le système immunitaire qui reconnaît (accepte) ou méconnaît (expulse) une modification, d’où suit, ou non, la bonne réaction : ainsi la peau répond différemment à la piqûre d’une aiguille et à celle d’une abeille bien que la sensation soit identique – l’inflammation prouve que la peau distingue ce que le toucher confond13. Dans le métabolisme, l’estomac refuse certains mets que le goût approuve : il sait mieux que lui ce dont l’organisme a besoin ; les palpitations, les changements de pouls, les vomissements, les diarrhées travaillent à l’équilibre de l’organisme à l’insu du cerveau et des sens. Les songes mêmes prouvent, en l’absence de stimulation sensorielle, une connaissance de ce qui a lieu « dans le profond des veines » et qui dans les humeurs se transmet à l’imagination. La reproduction14 est de toute évidence une copie, car si les semences portent le caractère des choses qu’elles doivent produire, c’est qu’elles en ont pris la forme grâce aux images naturelles, c’est pourquoi un lion engendre un lion (la « vertu formatrice » des scolastiques n’explique pas, mais suppose ce dispositif cognitif sous-jacent). L’auteur souligne qu’il s’agit là encore de « connaissance » : « conception » se dit aussi bien de l’entendement que de la reproduction. Relèvent enfin de la connaissance tous les automatismes génétiques (l’habitat des hirondelles, le travail de la ruche ou de la fourmilière, la reconnaissance immédiate du prédateur). Il est clair que dans tous les cas ici décrits s’applique la métaphore (ou le modèle ?) du programme, du traitement et de la transmission d’information ; il n’y a pas de sujet agissant par l’entendement ou les sens, et pourtant il y a discernement et choix. Mais quelle âme faut-il à cette intelligence ?
32Comment comprendre cette façon de décrire la vie ? Est-ce une régression vers des archaïsmes d’avant Descartes, ou une nouveauté, comme l’affirme son auteur ? Mais pensons-nous aujourd’hui différemment ? Savons-nous exactement ce que nous disons (est-ce une métaphore, ou le modèle d’une structure ?) lorsque nous parlons de programme génétique, de codage des molécules ? Lorsque nous disons que l’ADN se recopie, que l’ARN messager transmet de l’information, que les acides se répliquent ? Que les hormones ont des récepteurs pour capter des signaux ? Que la sensation, la perception impriment des traces sur des supports ? Que la mémoire stocke ? Qu’il y a de la stéréospécificité dans les composés chimiques et physiques ? Et que même les choses inertes : atomes, molécules, cristaux, liquides, étoiles, sont également des mémoires ?
33Le vocabulaire de notre science est aussi bien étrange...
34L’auteur est conscient du progrès qu’apporte son système par rapport à la physique des qualités. Il n’est en effet pas question de revenir aux scolastiques, car leurs notions ne sont pas explicatives mais à expliquer, ce que fait le nouveau système en les rangeant sous un même concept : cette connaissance qui est cachée mais non point occulte, parce qu'elle s’explique partout par un mode unique de fonctionnement. Toute la question sera de l’exporter – et ce pour la cohérence du système – en deçà des corps organiques vivants : cette connaissance végétative visible dans l’instinct, les plantes la montrent pour ainsi dire en elle-même, isolée, seule à fonctionner ; or, les plantes ne sont pas des êtres animés car leur manque « la faculté vitale qui réside dans le cœur », et pourtant elles sont capables d’« altération » c’est-à-dire de modifications internes, comme si elles agissaient pour leurs conservation et reproduction. Il faut donc qu’il y ait en elles du cognitif (des images et de la mémoire), de la même manière qu’il est diffus dans les parties des organes des vivants.
35C’est en ce point que l’auteur a conscience de franchir une limite : « Que cette entreprise est difficile ! Et qu’il y aura de peine à se faire jour dans ces profondes obscurités [...] il faudrait que la Nature s’expliquât elle-même »... pour « parler de choses qui sont ineffables [...] entrer dans des pays inconnus où les lois et les coutumes sont différentes des autres », car « les images naturelles observent une autre conduite que celle qui est observée dans les choses vivantes15. » Et pourtant, si l’on ne comprend pas la connaissance végétative, si basse et matérielle soit-elle, on ne saura pas ce qu’est la connaissance en général (y compris la plus noble, celle de l’entendement), car la connaissance naturelle est l’origine et le modèle.
TOUTES CHOSES CONNUES OU CONNAISSANTES
36La connaissance commence avec le traitement de ces images dont la nature a doté tous les objets afin qu’ils s’offrent à l’imagination. Tout se passe comme si chaque chose dans la nature et par nature portait en elle ce qui la rend connaissable, c’est-à-dire homogène aux systèmes cognitifs actifs, à savoir une image d’elle-même – une information qu'elle émet, ou du moins dont elle est le support ; ainsi, les rapports entre toutes les choses se règlent non sur une connaissance à proprement parler, mais sur une « ombre de connaissance ».
37Le système de l’âme bascule dans le débordement de la formule : « Tout ce qui est vivant connaît, tout ce qui connaît est vivant », vers la suivante : « Toutes les choses ont deux vertus, de connaître et de se mouvoir16. » Au troisième chapitre du Livre III, l’article 6 énonçait l’identité de la connaissance et de la vie : comment comprendre alors le titre de l’article 8 sur 1'« instinct des choses inanimées » ?
38Il faut donner au concept d’« imagination » une signification telle qu’il s’applique sans référence à une âme ou à un corps muni de cerveau, de membres, d’organes, d’esprits animaux... La connaissance n’a pas toujours besoin de « tant d’apparat17 » : tel est le cas des choses inertes, où les images font pour ainsi dire « toutes seules » ce qui se fait dans les vivants de façon dépensière. Il n’y a là aucune action d’aucune âme, il y a seulement des images naturelles conservées dans une mémoire qu'il faut bien accorder, contre l’avis des philosophes, à la faculté végétative, car pour que les organes et les fibres s’accoutument, aient une facilité à reproduire des effets, il faut que les images aient été conservées dans une mémoire diffuse dans la matière et qui n’a rien à voir avec celle du cerveau. Les images naturelles sont des « propositions » inscrites dans les choses qui les portent nécessairement vers tel ou tel mouvement : la pesanteur, l’aimantation en sont les effets ; même l'impetus qui est, dit l’auteur, merveilleux et inexplicable, s’explique ainsi : « La flèche ne va à son but que parce que la corde de l’arc lui a imprimé l’image de son mouvement », comme si la trajectoire de la flèche recopiait à sa façon, traduisait ce qui est inscrit dans la courbure de l’arc et la tension de la corde. Les fluides prennent la forme des récipients : la figure du solide n’est pas cause de celle du fluide, celui-ci s'y conforme et se 1'approprie. Ainsi s’explique le rapport de cause à effet : communication, reconnaissance et traitement d’images.
39Or justement, Fauteur au début de son ouvrage proposait comme métaphore de la connaissance – de celle qui est la plus observable, à savoir celle de l’entendement, donc la plus éloignée de la connaissance naturelle – non le cachet imprimé sur la cire, mais le passage de la lumière à travers un verre coloré18 : le rayon en passant se teinte, en transportant avec lui la couleur mais sans l’ôter à son support, comme s’il prenait connaissance de la couleur pour se transformer – il en va de même dans le savoir : chacun acquiert de 1'information sans préjudice pour elle. Or, si le phénomène physique peut servir de modèle à l’activité intellective, n’est-ce pas qu’il s’agit, en somme, de la même chose ? Qu’il y a déjà du cognitif dans la nature et que l’intelligence en est une application, que la connaissance et la physique sont homogènes, et qu’il n’est donc pas étonnant que la nature soit intelligible à l’entendement. Du modélisant au modélisé, l’on ne sait plus trop lequel est explicatif. De fait, le Système de l’âme est circulaire : la fonction dite la plus basse et matérielle tient ses images d’une « plus haute source » : la nature universelle ; et l’instinct n’est pas autre chose qu’une raison universelle, et la raison en général n’est pas la différence spécifique de l’homme19. Certes, les âmes des vivants sont capables de produire les images, mais sans ces âmes, la nature n’en serait pas moins remplie d’images. Le fondement du système de la connaissance (car c’est de cela qu’il s’agit, plus que d’un système de l’âme) est bel et bien enraciné dans les profondeurs de la matière.
CONCLUSION
40La réflexion sur l’âme des bêtes est ici largement dépassée par son résultat : connaître consiste à produire et traiter des images inscrites dans les choses du monde, toutes, au fond, étant connues et connaissantes, sous des formes et des degrés divers. Qu’en est-il du privilège de la connaissance intellective lorsqu’on lit ceci : « La faculté naturelle est la première de toutes, en temps, en ordre, et en fonction », elle est l’« instrument général de toutes les fonctions de l'âme, et qui supplée au défaut de tous les autres ». L’article 8 du livre III livre le fond du système : c’est l’ordre naturel instauré par Dieu qui fait que les images naturelles sont les « sources de toutes les actions vivantes et inanimées, spirituelles et corporelles20 ».
41Mais alors, qu'en est-il même de l’âme ? A-t-on vraiment besoin du concept d’âme ? Il n’y a pas d’âme du monde, ni non plus une multiplicité d’âmes conçues comme des forces occultes préposées à chaque action dans la nature, mais il y a de l’âme partout – au sens où rien ne se fait sans mobiliser une fonction connaissante traditionnellement liée à la notion d’âme. Sous un lexique parfaitement recevable, on assiste à la dilution du concept d’âme, celle-ci deviendrait plutôt l’effet d’une fonction connaissante inhérente à tout ce qui est. La connaissance, au terme d’une complexification des processus naturels, devient intellective et fait émerger une âme dite immatérielle et immortelle – émerge alors aussi l’idée d’un sujet du connaître... mais il est clair qu’il n’en est pas le principe originaire. Cureau de La Chambre dit-il « âme » faute d’un autre terme ? Ou pour faire passer une doctrine subtilement matérialiste ? On est en effet peu convaincu lorsqu’il rapproche son nouveau système de celui de Platon, puis affirme : « Quoi qu’il en soit, cette doctrine est née avec notre théologie21. »
42Le résultat le plus intéressant, que n’oublieront pas les philosophes du siècle d’après, tient dans l’affirmation que la pensée est une fonction du vivant : si les bêtes et les hommes pensent, c’est parce que, en tant que vivants, ils usent déjà partout de signes, d’un dispositif de reconnaissance de signaux à l’œuvre dans leurs organismes. Et lorsque l’auteur dit que la cognition naturelle est la clef de tout le système, c’est bien de cela qu’il s’agit : la capacité à parler et penser vient de ce que notre organisme est une machine cognitive.
43C’est aussi soutenir, contre Chanet qui voit dans l’instinct un moyen surnaturel immédiatement issu de Dieu, une conception de la nature comme uniforme et immanente à elle-même, et suffisant à ses propres actions : tous les effets sont naturels, de ipsa naturel22 – et en cela Cureau de La Chambre doit être rangé parmi les « modernes ».
Notes de bas de page
1 Antoine Guer, Histoire critique de l’âme des bêtes (1749) : « Un vieux système délabré » ; abbé Yvon, article « Âme » de l'Encyclopédie : « Les animaux-machines sont devenus ridicules. »
2 Lettre à Conring, 1678, trad. C. Frémont, dans Leibniz, Discours de métaphysique, Paris, Garnier-Flammarion, 2001, p. 145.
3 Je renvoie aux nombreux travaux de Francine Markovits concernant Diderot et La Mettrie.
4 Cf. C. Frémont, « La métaphysique et la théologie dans les sciences naturelles : Bonnet et Leibniz » (revue Corpus, Paris, Fayard, no 43, 2003).
5 L’opuscule De l’instinct et de la connaissance des animaux (1646) de Pierre Chanet contre celui de Cureau : Quelle est la connaissance des bêtes ? (1645), est à l’origine de la polémique.
6 Cf. O. Le Guern, « Cureau de La Chambre et les sciences du langage » (revue Corpus, no 16/17, Paris, Fayard, 1991), et C. Frémont, « Cureau de La Chambre, la connaissance et la vie » (ibid., no 49, 2005).
7 Amusement philosophique sur le langage des bêtes, Paris, 1739.
8 Système de l’âme, éd. M. Le Guern (Paris, Fayard, « Corpus des œuvres de philosophie en langue française », 2004, cité Système), p. 16.
9 Traité de la connaissance des animaux (éd. Corpus, 1989, cité TCA), p. 106.
10 TCA, p. 38 et 316. Système, p. 144.
11 Système, p. 36 et p. 180.
12 Ibid., p. 132 ; TCA, p. 346.
13 Système, p. 113, 114, 139.
14 Ibid., p. 136-137.
15 Système, p. 147.
16 Système, p. 262.
17 Ibid., p. 14, cf. p. 133, 157.
18 Ibid., p. 31.
19 Titre du TCA, p. 222.
20 Système, p. 139, 136, 150.
21 Ibid., p. 138.
22 Ce n’est pas sur ce point qu’une confrontation avec Leibniz serait intéressante, mais sur la théorie globale de l’« expression » qui est un genre dont la perception monadique, le sentiment animal et la connaissance intellectuelle sont les espèces. L’âme des bêtes y trouve logiquement sa place. Toutes choses étant représentées/représentantes, le monde est globalement une sorte de système cognitif ou informationnel.
Auteur
Chargée de recherche au centre Georges-Chevrier (UMR-CNRS 5605, université de Bourgogne). Ses recherches ont porté principalement sur la philosophie de Leibniz (entre autres ouvrages, Singularités : individus et relations dans le système de Leibniz, Paris, Vrin, 2003), mais aussi sur plusieurs philosophes des xviie Hobbes, Bossuet, Arnauld et Malebranche) et xviiie siècles, en étudiant, pour ce dernier, le rapport de la philosophie à la méthode littéraire (Voltaire, cf. ouvrage cité ci-dessus ; « Diderot, le paradigme du comédien », revue Dix-Huitième Siècle, Paris, PUF, no 38, 2006). Avec Bonnet (« La métaphysique et la théologie dans les sciences naturelles : Bonnet et Leibniz », dans la revue Corpus, no 43, Paris, Fayard, 2003) et Cureau de La Chambre (« Cureau de La Chambre : la connaissance et la vie », dans la revue Corpus, no 49, 2005), elle a voulu montrer en quoi des intuitions originales (et incomprises par les contemporains) dans les sciences de la vie peuvent faire sens à notre époque.
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