L’essence de l’amour dans les Dialogues d’amour de Léon l’Hébreu et dans le Court Traité
p. 163-178
Texte intégral
1Dans le Court Traité, et plus particulièrement dans le Dialogue entre l’entendement, l’amour, la raison et la concupiscence inséré entre les chapitres II et III de la première partie, un certain nombre de commentateurs, comme Zimmels et Gebardht, soulignent l’influence dominante des Dialoghi d’amore de Léon Abrabanel, alias Léon l’Hébreu1, sans que pour autant une confrontation suivie entre les deux auteurs ait été menée. On sait que le philosophe hollandais possédait une traduction espagnole des Dialogues d’amour dans sa bibliothèque, de sorte que la question se pose de savoir quel rôle Léon l’Hébreu a pu jouer dans l’élaboration de la conception spinoziste de l’amour. Publiés en 1535, après la mort de Léon l’Hébreu, les Dialoghi d’amore connurent un grand succès non seulement en Italie, mais dans toute l’Europe. Le livre fut très vite traduit en hébreu, en espagnol, en français et en anglais. La traduction française Les Dialogues d’amour par Ponthus de Tyard2 remonte à 1551. La traduction espagnole dont Spinoza disposait a été réalisée par le cabaliste Gedaliah Ibn Jachjah et a été publiée à Venise en 1568.
2L’auteur relate les entretiens de « l’amoureux et passionné Philon » avec « sa sage Sophie », selon l’expression du traducteur, entretiens qui portent successivement sur l’essence de l’amour et du désir dans le Dialogue I, sur son universalité dans le second, et sur son origine et sa naissance dans le troisième. Si Spinoza ne reprend pas la démarche tripartite de son prédécesseur, il n’en reste pas moins que l’une des toutes premières définitions qu’il donne de l’amour dans le Court Traité est étonnamment proche de celle qui est formulée par Philon dans le Dialogue I. Sous la plume de Léon l’Hébreu, « l’amour est une volontaire affection d’avoir fruition et jouir en union de la chose estimée bonne »3. Sous celle de Spinoza, « l’amour n’est autre chose que la jouissance d’une chose et l’union avec elle, suivant la nature de l’objet dont l’homme cherche à jouir et auquel il cherche4 à s’unir »5.
3Les deux auteurs insistent, primo sur l’aspect de la fruition, de la jouissance et de l’union qui caractérise l’amour, secundo sur le fait qu’il implique une évaluation de la nature de l’objet et tertio ils mettent l’accent sur la dimension intentionnelle, voire volontaire de l’affection. C’est pourquoi la confrontation entre les conceptions léonienne et spinoziste de l’essence de l’amour s’attachera à l’examen de ces trois caractéristiques communes aux deux définitions. L’enjeu sera de savoir s’il est possible de dégager l’existence d’un moment léonien de la pensée de Spinoza et de mettre en perspective le Court Traité par rapport à l’Éthique.
NÉCESSITÉ DE L’UNION AMOUREUSE
4Chez Léon, comme chez Spinoza, l’amour est d’abord la recherche d’une union et d’une jouissance sans laquelle l’être ne saurait ni subsister ni avoir d’essence ni éprouver de la félicité. En effet dans le Dialogue II, Philon insiste sur la nécessité de l’amour, comme principe d’union qui confère au monde son unité et son essence.
« Non seulement à faute de l’amour défaudrait la béatitude, mais encore ni le monde aurait essence ni en icelui sans l’amour aucune chose se trouverait. »6
5À Sophie qui demande pourquoi il en est ainsi, Philon fait valoir que « le monde et ses choses ont essence d’autant qu’il est tout uni et assemblé avec ses choses, comme l’individu à ses membres : autrement la division serait cause de son entière ruine et perdition ; et puisque rien ne fait unir l’univers avec toutes ses diverses choses que l’amour, il s’ensuit que l’amour est cause de l’essence du monde et de ses choses. »7 L’amour est donc un lien nécessaire qui empêche la dissolution des choses, la déperdition de leur essence et leur évanouissement dans le néant. Il leur confère la force et la vitalité qui leur fait défaut sans lui. Sophie le présente ainsi comme « un esprit vivifiant qui pénètre tout le monde »8, comme « un lien avec lequel tout l’univers est uni et lié »9.
6On retrouve une idée analogue dans le chapitre V du Court Traité où Spinoza affirme que « en raison de la faiblesse de notre nature, sans quelque chose dont nous jouissions, à quoi nous soyons unis et par quoi nous soyons fortifiés, nous ne pourrions exister »10. Cette remarque n’est pas anodine car Spinoza insiste sur ce point et le rappelle un peu loin : « Il est nécessaire, avons-nous dit, à cause de la faiblesse de notre nature, que nous aimions quelque objet et que nous nous unissions à lui pour exister. » Ainsi, les êtres ne peuvent subsister sans amour, car ils n’ont pas de force propre et ne peuvent se soutenir dans l’être sans s’unir à un objet. Tandis que dans l’Éthique, les choses possèdent en elle une force d’exister qui s’exprime sous la forme du conatus, dans le Court Traité où cette théorie ne figure pas encore, les êtres se caractérisent par leur faiblesse ontologique et leur incapacité à vivre sans amour. C’est probablement de cette ontologie léonienne de la faiblesse marquée par l’inexistence des êtres sans amour que Spinoza s’inspire dans le Court Traité, avant de promouvoir une ontologie de la puissance dans les ouvrages de la maturité. C’est pourquoi le choix de l’objet d’amour est aussi décisif, car c’est une question de vie ou de mort. Il y va en effet de notre salut et de notre félicité suprême.
7Ainsi, s’il est possible de s’unir avec divers objets, de les élire ou de les rejeter, le salut passe nécessairement en dernière instance par l’amour de Dieu. C’est le cas chez Léon l’Hébreu qui affirme que la perfection et la félicité suprême résident dans l’union à Dieu. Chaque chose peut se magnifier et s’élever en l’amour du Dieu souverain. Philon proclame notamment au sujet des âmes intellectives humaines que « leur dernière perfection, fin et vraie béatitude ne consiste [pas] en elles-mêmes, mais en leur élévation et union avec la divinité »11.
8Il en va de même pour Spinoza. Parmi les trois types d’objets qui s’offrent à notre amour, à savoir les choses périssables, les choses impérissables par leur cause, et l’être éternel, il n’y a guère à hésiter :
« Il est certain que, par l’amour des choses périssables, et notre union avec elles, nous ne serons aucunement fortifiés dans notre nature, considérant qu’elles sont faibles elles-mêmes et qu’un invalide ne peut pas en porter un autre. »12
9Spinoza précise même que, loin d’être salutaires, elles peuvent être nuisibles et nous conduire à notre perte en tant qu’elles sont sujettes à des accidents et qu’elles n’ont point d’essence. Quant aux objets éternels et immuables qui ne le sont pas par leurs propres forces, ils sont en réalité des modes de Dieu et ne peuvent être connus sans lui de sorte qu’ils nous conduisent nécessairement à l’aimer13. C’est pourquoi notre salut et notre souveraine félicité consistent dans l’amour de Dieu14.
10Quoique le concept d’union ne fasse pas l’objet d’une définition expresse de la part des deux auteurs, il apparaît cependant que le lien entre les choses et Dieu est pensé sur le modèle de l’unité entre le tout et ses parties. En témoigne chez Léon l’Hébreu la comparaison entre l’unité du monde et des choses avec l’individu et ses membres15, et chez Spinoza l’assimilation expresse de l’union de l’amant et de l’aimé à la formation d’un tout, d’une seule et même chose16.
11Bien que l’union consécutive à l’amour apparaisse comme une nécessité ontologique aussi bien chez Léon l’Hébreu que chez Spinoza, elle n’a cependant pas exactement la même portée chez les deux auteurs. Dans les Trois Dialogues, l’amour est un principe universel et commun qui traverse l’univers et lie toutes les choses entre elles. Il est une puissance cosmique qui régit la totalité de l’être et de l’univers. Prenant sa source en Dieu, il rayonne jusqu’aux êtres finis. L’amour, comme le fait valoir Philon, ne concerne pas seulement les vivants, hommes et animaux, mais s’étend aux êtres inanimés. L’amour « se trouve entre les hommes et les animaux, sur lesquels toutefois il ne se contente d’avoir puissance, mais étend encore communauté en plusieurs autres choses de ce monde »17. Il existe ainsi une communauté universelle de l’amour, comme le souligne Saverio Ansaldi dans son article « Un nouvel art d’aimer : Léon l’Hébreu, Descartes, Spinoza »18. Les conceptions de Léon l’Hébreu s’inscrivent dans la lignée du courant néo-platonicien de la Renaissance et restent fortement marquées par la thématique de l’amour développée dans le Banquet de Platon auquel il est explicitement fait référence à plusieurs reprises19. Ainsi toutes les analyses concernant le caractère général de l’amour qui s’étend à tous les êtres animés et non animés, aux hommes aussi bien qu’aux planètes apparaissent comme une reprise et une amplification du discours d’Éryximaque dans le Banquet.
12Spinoza rompt avec cette conception cosmologique et interplanétaire de l’amour, et cesse de penser l’origine et la naissance de l’amour sur la base d’une procession qui va du Dieu aimant vers le monde créé angélique puis céleste et corruptible, et qui remonte au Dieu aimé. L’émergence d’une nouvelle conception du monde régi par le mécanisme universel et la destruction de la vision d’un cosmos hiérarchisé et finalisé rendent caduque cette idée d’une communauté universelle de l’amour qui anime tous les êtres. Bien qu’il partage avec son prédécesseur l’idée que nous ne pouvons subsister sans amour, Spinoza ne reprend pas à son compte la thèse d’un amour cosmique, universel. Ses analyses concernant la nécessité d’un objet d’amour pour exister se cantonnent à la sphère anthropologique de sorte qu’il ne se prononce pas au sujet de l’ensemble des modes de la nature. Contrairement à Léon, jamais Spinoza ne va jusqu’à dire que les corps insensibles sont sujets à l’amour, et jamais il ne souscrit expressément à la thèse d’une communauté universelle de l’amour.
13C’est pourquoi il paraît difficile de souscrire entièrement à la thèse soutenue par Filippo Mignini dans son commentaire du Court Traité, thèse selon laquelle « la Nature peut être considérée […] comme un réseau infini de connaissances et d’amour, puisqu’il est impossible d’exister sans être uni à quelque chose »20. S’il est indéniable que la nature peut être considérée comme un réseau infini de connaissances, il n’est pas certain que dans le Court Traité elle puisse être appréhendée comme un réseau infini d’amour. L’impossibilité d’exister sans être uni à quelque chose vaut certes pour les hommes, mais rien ne dit que cette proposition est universelle et qu’il existe une communauté d’amour au-delà du vivant. Jamais Spinoza ne dit que toute chose ne peut subsister sans être unie à Dieu et sans l’aimer. Il prend au contraire soin de préciser dans la préface de la seconde partie qu’il traite seulement des choses concernant l’homme. La question se pose donc de savoir si ce qui vaut pour l’homme en raison de sa faiblesse peut être étendu à tous les modes.
14Une chose est certaine : Spinoza ne limite pas l’amour à la sphère anthropologique, puisque les animaux y sont sujets et l’éprouvent notamment à travers l’affect de libido. Dans l’Éthique, en effet la libido est définie comme désir et amour de l’union des corps21, et est explicitement imputée aux animaux, aux chevaux du moins, dans le scolie de la proposition LVII de la partie IV. Mais peut-on aller au-delà du vivant et considérer à l’instar de Léon l’Hébreu que les corps insensibles aiment ? À la rigueur, les corps insensibles possèdent une âme, car selon le § 4 du chapitre XX du Court Traité II, la Nature « s’exprime en une infinité d’idées correspondant à une infinité d’objets qui sont dans la nature. » À l’appui de cette hypothèse, il faut observer que dans l’Éthique II, au scolie de la proposition XIII, Spinoza affirme explicitement que les hommes et les autres individus de la nature « sont tous animés (animata tamen sunt) quoique à des degrés divers. Car d’une chose quelconque il y a nécessairement une idée en Dieu, dont Dieu est la cause de la même manière qu’il l’est de l’idée du corps humain… ». Il y a donc bien une communauté universelle de la connaissance ou de l’idée mais de là à dire qu’il y a chez Spinoza une communauté universelle de l’amour, il y a un pas qu’il ne semble pas légitime de franchir. Si Spinoza se risque à soutenir que dans une certaine mesure toutes choses sont animées, jamais il n’écrit que toutes choses aiment. Au mieux, il ira jusqu’à affirmer dans le scolie de la proposition LVII de l’ III que chaque individu éprouve non pas de l’amour, mais du gaudium, du contentement, qui n’est rien d’autre que l’idée ou âme de cet individu. Or l’individu chez Spinoza se définit comme une union de corps, et peut désigner aussi bien un être inerte que vivant. Dans ces conditions, l’affect de gaudium touche aussi des êtres insensibles. Il n’a rien cependant d’un sentiment humain, car il n’est que l’expression de l’idée ou de la nature de l’individu.
15À défaut de pouvoir en affirmer l’universalité absolue vu l’absence de texte explicite sur ce point, il est possible de conclure qu’il existe une communauté d’amour chez Spinoza qui se manifeste notamment par le partage de l’union à Dieu et de la félicité avec le prochain. C’est ce qui ressort notamment du dernier chapitre du Court Traité lorsque Spinoza écrit :
« La fin que je m’efforce d’atteindre est de pouvoir goûter l’union avec Dieu, et de produire en moi des idées vraies et de faire connaître ces choses à mes prochains. Car nous pouvons tous également avoir part à ce salut, comme il arrive quand il excite en eux le même désir qu’en moi et fait ainsi que leur volonté se confonde avec la mienne, et que nous formions une seule et même nature s’accordant toujours en tout. »22
16De ce point de vue, la communauté d’amour qui lie les hommes à travers l’union à Dieu apparaît comme un héritage et une transposition de la communauté universelle d’amour de Léon à la sphère anthropologique et à la figure du prochain. Mais cette communauté d’amour impliquée par l’union à Dieu est d’abord d’ordre intellectuel, car elle présuppose la connaissance vraie de la substance. Et c’est là le second trait commun entre les définitions des deux auteurs. La condition de possibilité de tout amour réside dans la connaissance d’une chose et l’évaluation de sa nature.
LA CONNAISSANCE, PRINCIPE DE L’AMOUR
17Outre la thèse selon laquelle l’amour consiste dans la jouissance et l’union avec une chose, Spinoza partage avec Léon l’Hébreu l’idée que la cause première de l’amour est nécessairement la connaissance.
18Dans les Trois Dialogues, la connaissance est la condition sine qua non de la naissance de l’amour.
« Nulle chose ne peut être aimée sans être premièrement connue. »23
19Cette thèse ne va d’ailleurs pas sans poser problème, car l’amour selon Léon l’Hébreu ne se borne pas aux êtres animés, mais s’étend aux êtres inanimés et aux corps insensibles. S’il n’y a pas d’amour sans connaissance, comment ce sentiment pourrait-il être universel et naître chez des créatures sans raison ni sensibilité ? Sophie, dans le Dialogue II, se fait l’écho de cette difficulté.
« Ce qui n’a aucune connaissance, comme peut-il aimer ? »24
20À Philon qui lui rétorque qu’« il faut croire que puisqu’ils aiment et haïssent, ils connaissent aussi »25, Sophie demande alors « si ce qui est sans raison, sans sentiment ou imagination comme le sont les corps inférieurs, peut […] être pourvu de quelque connaissance »26.
21Philon résout la difficulté en faisant valoir que les corps insensibles, certes, n’ont pas en eux-mêmes les mouvements de la puissance connaissante, mais qu’ils ne sont pas dépourvus pour autant de connaissance. En effet, la nature ou l’âme de l’univers les instruit et les guide à la connaissance de leur fin, de leur lieu propre et particulier, les incite à aimer et à appéter et à se mouvoir pour trouver ce lieu quand ils en sont séparés.
« Les corps inférieurs cherchent leurs propre fin et lieu, non de leur propre connaissance, mais par la vraie et droite connaissance du premier créateur infuse en l’âme du monde et de l’universelle nature des choses inférieures : tellement que tout ainsi que l’inclination de la flèche vient de connaissance, appétit ou amour artificiel, ainsi l’inclination des corps inférieurs vient d’une connaissance et amour naturelle. »27
22Quelles que soient ces formes, par conséquent, c’est la connaissance qui dicte l’amour et préside à sa naissance. Cette connaissance ne passe pas nécessairement par une conscience claire et réfléchie, elle peut être un pur mouvement de la sensibilité chez les animaux ou de la nature chez les êtres inanimés. Léon l’Hébreu admet en effet que la connaissance, l’appétit et l’amour sont de trois sortes : naturels, sensitifs et raisonnables volontaires.
« La connaissance, l’appétit ou l’amour que je nomme naturel est celui qui se trouve aux corps non sensibles, comme tu dirais les éléments et les corps mixtes des éléments insensibles ; pour exemple : les métaux et espèces de pierres, aussi les plantes, les herbes, lesquels ont connaissance naturelle de leur fin et naturellement sont inclinés d’une inclination laquelle les meut à icelle, comme les corps graves et pesants de descendre en bas, les légers de monter en haut, comme à leur propre lieu connu et désiré. Cette inclination donc est et s’appelle vraiment appétit ou amour naturel. La connaissance, l’appétit ou l’amour sensitif est celui qui incite les animaux irraisonnables à suivre ce qui leur duit, et fuir le contraire, comme à chercher de manger, de boire, d’être en lieu où l’air soit tempéré selon leur nature, de s’accoupler avec les femelles : prendre le repos, et maintes autres et semblables choses desquelles la connaissance précède l’appétit : et de ces deux naît l’amour qui cause la poursuite, car si l’animal ne connaissait la chose, comme la pourrait-il désirer et aimer ? et ne la désirant à quelle fin tendrait la poursuite qu’il fait pour l’avoir ? et ne l’ayant comment pourrait-il vivre ? Vois donc comme il ne peut vivre sans amour. Bien est-il vrai que sa connaissance n’est raisonnable, ni son appétit et amour volontaires : pour ce que la volonté ne peut être sans la raison, mais c’est une opération de la vertu sensitive. Voilà pourquoi nous l’appelons connaissance et amour sensitif, ou appétit à parler proprement. La connaissance et amour raisonnable volontaire est propre et péculière de l’homme : car tous deux proviennent et sont administrés par la raison, de laquelle entre tous les corps engendrés et corruptibles l’homme se trouve seul être participant. »28
23Spinoza estime lui aussi que « c’est la connaissance qui est cause de l’amour »29. Plus généralement, il affirme dans le chapitre II que tous les affects (lijdingen) naissent de la connaissance, et de ses trois modes, la croyance ou opinion formée par ouï-dire et par expérience, la croyance droite fondée sur des raisonnements qui ne nous font pas voir directement la chose en elle-même et la connaissance claire et distincte, laquelle nous donne le sentiment et la jouissance de la chose elle-même. De l’opinion résultent les passions contraires à la raison, de la croyance droite les bons désirs. De la connaissance claire enfin naît le pur et véritable amour30. Spinoza conclut ainsi dans le § 4 que « nous posons comme cause prochaine de tous les affects31 dans l’âme la connaissance, parce que nous regardons comme tout à fait impossible que quelqu’un qui ne connaîtrait ni ne concevrait selon les modes ci-dessus, pût être poussé à l’amour, au désir ou à tout autre mode de vouloir ».
24Appliquée au cas particulier de l’amour, cette théorie implique l’existence de trois manières d’aimer qui sont fonction de la nature de la connaissance à l’origine de l’affect. C’est ce que Spinoza souligne au § 4 du chapitre III :
« L’amour naît 1° Du ouï-dire, 2° De l’opinion, 3° De concepts vrais. »
25Le premier cas, l’amour par ouï-dire, concerne, par exemple, les enfants qui se portent vers une chose sans rien savoir d’elle si ce n’est que leur père leur a dit qu’elle était bonne, ou ceux qui donnent leur vie par amour de leur patrie, et plus généralement ceux qui « s’éprennent de quelque chose pour en avoir entendu parler »32. Le second cas, l’amour né de l’opinion touche tous ceux qui voient ou s’imaginent voir quelque chose de bon et inclinent aussitôt à s’unir à lui. Il repose donc sur une expérience réelle ou illusoire de la bonté ou de l’agrément de la chose et une aspiration à l’union qui peut cesser dès lors que l’on découvre un objet meilleur. L’amour né de concepts vrais sera quant à lui analysé dans le chapitre XXII. Il est causé par la connaissance de Dieu et engendre une union et une jouissance parfaites. L’exposé de ces trois sortes d’amour qui naissent de la connaissance chez Spinoza appelle deux remarques.
26Premièrement, il faut observer que si Spinoza partage avec Léon l’Hébreu l’idée qu’il ne saurait y avoir d’amour sans connaissance, sa tripartition des manières d’aimer ne reproduit nullement celle des Dialogues d’amour. Léon établit une distinction entre les connaissances naturelles, sensitives et raisonnables, auxquels correspondent des amours du même genre. Il proportionne la connaissance et l’amour au type d’être, homme, animaux et corps insensibles, ce qui n’est plus le cas chez Spinoza. Le partage entre les trois modes de connaissance et d’amour n’épouse plus les contours des distinctions ontologiques entre les diverses espèces d’être mais les différences épistémologiques qui se font jour selon le mode d’engendrement du savoir et son rapport à l’erreur et à la vérité. Spinoza ne nie certes pas qu’il puisse y avoir une connaissance sensitive propre aux animaux. Il l’affirme à plusieurs reprises33, notamment dans le scolie d’Éthique III, LVII :
« Que les bêtes sentent, nous ne pouvons absolument plus en douter, maintenant que nous connaissons l’origine de l’esprit. »
27À ce titre, il ne serait pas faux de penser que chez Spinoza les bêtes sont sujettes à des opinions non pas en tant qu’elles forment des idées par ouï-dire, mais par expérience vague. Néanmoins la différence entre les types d’amour et les types de connaissance ne recoupe pas les types d’être.
28La seconde remarque a trait à ce qui apparaît comme une anomalie, ou à une rupture de la symétrie. Les trois types d’amour distingués dans le Court Traité ne le sont pas exactement en fonction des trois types de connaissance, croyance, croyance droite, connaissance claire et distincte. Spinoza affirme en effet que l’amour naît soit du ouï-dire, soit de l’opinion, autrement dit de la croyance, soit de concepts vrais. Or par concepts vrais, il n’entend pas la croyance droite ou raison, mais seulement la connaissance claire et distincte34. Spinoza n’envisage donc pas ici l’éventualité que l’amour puisse provenir d’une croyance droite. Est-ce une omission ou est-ce que cela signifie que l’amour ne puisse pas naître de la raison ?
29En réalité, la croyance droite ne suffit pas à elle seule pour engendrer l’amour, car elle ne nous fait pas connaître la chose immédiatement, mais seulement par des raisonnements. Du même coup, elle ne nous donne pas cette jouissance et cette union avec la chose qui sont propres à l’amour. La raison seule ne nous fait pas aimer un objet. C’est pourquoi d’ailleurs elle a moins de puissance que l’expérience vague et ne peut pas venir à bout des passions qui en résultent. Comme l’expérience nous procure une jouissance et nous unit directement à la chose, nous ne pouvons nous en détacher que si nous expérimentons ou connaissons clairement un objet meilleur. La raison peut donc à la rigueur venir à bout des opinions qui naissent par ouï-dire, mais pas des affects nés par expérience directe. C’est ce qui ressort d’une note du chapitre XXI :
« Il est clair en effet que si nous ne pouvons vaincre par la raison celles qui sont en nous par l’expérience, c’est qu’elles ne sont autre chose en nous qu’une jouissance ou une union immédiate avec quelque chose que nous tenons pour bon ; et bien que la raison nous montre ce qui est bon, elle ne nous en fait pas jouir. Or ce dont nous jouissons en nous-mêmes ne peut être vaincu par quelque chose dont nous ne jouissons pas, qui au contraire est hors de nous comme l’est ce que montre la raison. »35
30Cette remarque nous éclaire sur la nature de l’union et de la jouissance en nous montrant qu’elles consistent dans l’épreuve directe de la présence de l’objet où la chose se donne à voir et à sentir sous les deux formes, l’expérience vague ou la connaissance claire et directe. En définitive, si la connaissance précède l’amour, l’amour ne procède pas de n’importe quelle connaissance, mais seulement de la croyance ou de concepts vrais. Cette connaissance de l’objet s’accompagne en outre d’un jugement quant à sa valeur. D’après la définition léonienne, rappelons-le, « l’amour est une volontaire affection d’avoir fruition et jouir en union de la chose estimée bonne »36. Que la connaissance et le jugement soient fondés ou non, il n’en reste pas moins qu’il ne saurait y avoir d’amour sans représentation de la bonté ou de la beauté de la chose, ces deux valeurs se confondant parfois chez Léon, conformément à l’idéal platonicien. Chez Spinoza, également l’amour implique un jugement de valeur :
« Nous avons dit de l’amour qu’il est une union avec l’objet que notre entendement juge magnifique et bon. »37
31Il faut noter ici que Spinoza fait allusion non seulement à la bonté mais à la magnificence de l’objet. Cette évocation de la grandeur ou de la beauté de l’objet qui disparaissent dans l’Éthique au profit du seul concept de bonté n’est pas sans rappeler l’idée platonicienne abondamment reprise par Léon, selon laquelle l’amour est la jouissance dans le beau, et en constitue peut-être une réminiscence. Quoi qu’il en soit, le fait est que ce jugement de valeur va susciter une inclination de l’âme vers l’objet estimé bon. C’est pourquoi l’amour chez les deux auteurs présente un troisième trait commun, car il est un sentiment mettant en jeu d’une manière ou d’une autre la volonté.
L’AMOUR COMME AFFECTION VOLONTAIRE
32Il est manifeste que chez Léon l’Hébreu, l’amour présuppose non seulement la connaissance mais aussi la volonté. Dans le Dialogue I, aussi bien le désir que l’amour sont présentés comme des affections volontaires.
« Le désir est une affection ou de vouloir avoir la chose estimée bonne, laquelle nous défaut, ou de vouloir qu’une chose soit laquelle n’est point. »38
33Et « l’amour est une volontaire affection d’avoir fruition et jouir en union de la chose estimée bonne »39. Le désir est une affection de la volonté qui concerne l’être ou l’avoir d’une chose qui fait défaut. Il implique donc toujours le manque ou la défaillance tandis que l’amour est une affection volontaire de jouir en union d’une chose que nous avons ou que nous n’avons point. L’amour n’est donc pas nécessairement lié à un manque ; il n’est pas davantage lié à la possession continuelle de l’objet, mais se situe au-delà des catégories d’absence et de présence de l’objet. Léon précise que « la jouissance en union peut être affection de la volonté, tant aux choses que nous avons qu’en celles que nous n’avons point, pour ce que telle affection ne présuppose pas habitude ou défaut. J’entends que telle affection ne présuppose pas que nous ayons une chose ou que nous ne l’ayons point : ainsi est commune à tous deux »40. La volonté d’union que manifeste l’amour n’est donc pas une aspiration à la possession d’une chose de manière continue ou à venir selon que nous l’avons déjà ou nous ne l’avons point. L’union ne se décline pas selon les catégories de l’être et de l’avoir.
34Chez Spinoza, le désir et l’amour sont aussi présentés comme des modes du vouloir, notamment dans le § 4 du chapitre II du Court Traité, où il est dit « que nous regardons comme tout à fait impossible que quelqu’un qui ne connaîtrait ni ne concevrait selon les modes ci-dessus, pût être poussé à l’amour, au désir ou à tout autre mode de vouloir ». Néanmoins, le caractère volontaire de l’amour est bien moins patent que chez Léon et tend à passer au second plan. De ce point de vue, il y a une différence de traitement entre le désir et l’amour dans le Court Traité. L’aspect volontaire du désir est nettement affirmé tandis que celui de l’amour est seulement sous-entendu. Tout comme l’amour, le désir implique un jugement concernant le caractère bon de la chose.
« Le désir maintenant, soit qu’il consiste seulement, comme le veulent quelques-uns, dans l’appétit ou la convoitise d’obtenir ce dont on est privé, soit comme le veulent d’autres, qu’il s’attache à conserver ce dont nous jouissons déjà, il est certain qu’on ne le peut jamais trouver en aucune personne qu’il ne soit venu en elle, pour ce qu’une chose a paru bonne. »41
35Spinoza précise en note que la première définition, selon laquelle le désir est appétit de ce qui manque, est la meilleure, « car si l’on jouit d’une chose, le désir de cette chose cesse et la disposition qui est alors en nous de la conserver n’est pas un désir, mais une crainte de la perdre »42.
36Il faut noter au passage que l’on est bien loin de la définition de l’Éthique où le désir cesse d’être l’indice d’un manque ou d’une privation pour devenir l’expression d’une plénitude ou d’une perfection puisqu’il exprime une réalité en acte, celle l’essence de l’homme en tant qu’elle est déterminée à faire les choses nécessaires à sa conservation. En tant qu’il repose préalablement sur un jugement de valeur, le désir implique la volonté. Il présuppose en effet une décision préalable à l’inclination vers un objet et à l’exécution des actes nécessaires à son obtention. C’est ce qui ressort du chapitre XVI de la partie II, au § 2 consacré à l’examen de la volonté.
« Le désir, avons-nous dit, est l’inclination qu’a l’âme pour quelque chose qu’elle choisit comme bon ; d’où suit qu’avant que notre désir tende vers quelque objet, une décision a dû déjà être prise en nous, prononçant que cet objet est bon : cette affirmation donc, ou, pris en général, le pouvoir d’affirmer et de nier, est appelé volonté. »
37Certes cette volonté ne se présente nullement sous la forme d’un libre arbitre, d’un pouvoir de décision absolue sans détermination aucune. Il n’empêche que le désir implique indéniablement la volonté. En tant qu’il repose sur un jugement se prononçant sur la valeur de l’objet, l’amour implique, lui aussi, une affirmation de la bonté de la chose et possède à ce titre un caractère volontaire, mais cette volonté est déterminée par la nature et la connaissance de l’objet. Voilà pourquoi la dimension volontaire de l’amour est estompée dans la définition au profit de la nécessité d’une connaissance préalable de la nature de l’objet.
38Est-ce à dire alors qu’à travers cette différence concernant le rôle de la volonté chez Léon l’Hébreu et Spinoza se joue le passage d’une philosophie volontariste à une philosophie nécessitariste de l’amour ? Il ne le semble pas, car chez l’auteur des Trois Dialogues, cette affection volontaire qu’est l’amour n’est pas le fruit d’un libre arbitre, mais elle est déterminée par des causes. Ainsi chez les animaux, l’amour obéit à cinq causes, le désir et la délectation d’engendrer, comme dans le cas du mâle et de la femelle, la succession et la propagation de son semblable, comme dans le cas du père et du fils, les bienfaits et bénéfices que l’on en retire, la similitude et la conformité qui existe au sein d’une même espèce ou d’une autre semblable, « la continuelle fréquentation et compagnie moyennant laquelle non seulement ceux d’une même espèce se font amis, mais encore les différents contraires en complexion : mêmes ceux qui ont naturellement la haine mortellement jurée. De ce fait preuve suffisante le témoignage et expérience du chien et du loup et de l’agneau, qui par fréquentation et compagnie, malgré leur naturelle inclination sont l’un avec l’autre compatibles »43.
39Malgré des différences avec les animaux concernant notamment la solidité et la constance de l’affection mutuelle, les hommes éprouvent aussi de l’amour en raison de ces cinq causes, mais également pour d’autres motifs qui n’émeuvent aucunement les animaux. Philon présente ainsi deux causes supplémentaires qui poussent les hommes à s’aimer :
« L’une est la conformité du naturel et de la complexion de l’un à l’autre homme, qui au premier jour de leur connaissance seront liés ensemble d’une grande et fervente amitié : de laquelle n’y ayant plus apparente raison, l’on dit : ces deux sont d’un même naturel et symbolisent en même complexion, et (à vrai dire) entre les personnes, il se rencontre parfois une certaine similitude et harmoniale correspondance de l’une à l’autre complexion qui est cause d’amitié. »44
40La deuxième cause supplémentaire est l’existence de vertus morales et intellectuelles chez les hommes qui font naître l’amour honnête.
« Ce sont les vertus morales et intellectuelles, pour lesquelles les hommes excellents et vertueux sont des vertueux et excellents aimés, engendrant le mérite d’icelles vertus l’amour honnête. »45
41Sans entrer dans l’analyse détaillée des différents types d’amour, il faut noter que cette affection volontaire chez Léon n’est pas spontanée, mais obéit à des causes déterminées. Il est intéressant de noter à cet égard que l’amour chez les hommes peut être déterminé par une conformité de nature et de complexion et que cette idée léonienne est peut-être l’une des sources de la théorie spinoziste de la convenance en nature qui lie les hommes d’amitié et les incite à partager le souverain bien.
42En définitive, l’examen de la définition de l’amour chez Léon et Spinoza a permis de dégager la présence de thématiques communes, comme l’impossibilité d’exister sans amour, l’impossibilité d’aimer sans connaître et sans chercher à s’unir à la chose jugée bonne. De ce point de vue Spinoza, dans le Court Traité, n’a pas encore opéré sa double révolution. Il en reste à une ontologie de la faiblesse et n’est pas encore passé à une ontologie de la puissance. Il en reste à une axiologie où l’amour procède du jugement et ne le précède pas, alors que dans l’Éthique, bien que l’amour continue à être lié à la connaissance, nous ne voulons pas une chose parce que nous la jugeons bonne, mais nous la jugeons bonne parce nous la voulons. Avec l’apparition de la théorie du conatus, l’effort pour persévérer dans l’être va devenir le pivot de la puissance et du jugement, de sorte que les thèmes léoniens vont peu à peu s’estomper sans pour autant disparaître totalement de l’horizon. S’il est toujours malaisé d’évaluer la dette d’un auteur par rapport à ses prédécesseurs, il est indéniable que Spinoza doit à Léon l’Hébreu l’idée d’une communauté d’amour et d’un bien qui se communique dans et à travers l’amour de Dieu.
Notes de bas de page
1 Connu en français sous le nom de Léon l’Hébreu, en italien sous celui de Leone Ebreo, l’auteur se nomme en réalité Juda Abravanel ou encore Yehuda Abrabanel Ben Ishaq, car il est à l’origine le fils d’une figure légendaire du judaïsme ibérique, Isaac Abrabanel, un financier érudit né en Lisbonne en 1437 qui fut trésorier du roi Alphonse V, réalisa des travaux de philosophie et d’exégèse biblique parmi lesquels figurent Tsurot ha-Yesodot (Forme des éléments) et Ateret Zequenim (Le Diadème des Anciens) et qui dut fuir successivement le Portugal après une accusation de trahison, puis la Castille où il s’était réfugié, pour trouver finalement asile dans le royaume de Naples après la signature de l’édit d’expulsion de tous les juifs d’Espagne le 31 mars 1492. Né à Lisbonne en 1460, Léon suivit son père à Naples et devint médecin à la cour du vice-roi. Connu pour ses travaux de philosophie et de poésie, il enseigna à Rome et dans d’autres villes d’Italie. Les Dialogues d’amour constituent son œuvre majeure et sont marqués par la double influence de l’École néo-platonicienne de Florence, notamment de Marsile Ficin et de Pic de la Mirandole et de la philosophie juive médiévale placée sous l’égide de Maïmonide et d’Ibn Gabirol.
2 C’est cette traduction que nous citons.
3 Dialogue I, p. 16.
4 Conformément au texte hollandais où le verbe vouloir ne figure pas, il faut modifier la traduction d’Appuhn suivant les indications de F. Mignini et remplacer « auquel elle veut s’unir » par « auquel elle cherche à s’unir ».
5 Court Traité, II, V, § 1.
6 Dialogue II, p. 296.
7 Ibid.
8 Ibid., p. 297.
9 Ibid.
10 Court Traité, II, V, 6.
11 Dialogue II, p. 291.
12 Court Traité, II, V, 6.
13 Ibid., § 9.
14 Cf. Court Traité, II, XIX, 1.
15 Cf. Dialogue II, p. 296.
16 Court Traité, II, V, § 8 : « Nous avons dit de l’amour qu’il est une union avec l’objet que notre entendement juge être magnifique et bon ; et nous entendons par là une union telle que l’aimant et l’aimé deviennent une seule et même chose et forment ensemble un tout. »
17 Dialogue II, p. 109.
18 À paraître dans le volume consacré à Spinoza, philosophe de l’amour, sous la direction de Chantal Jaquet, Pascal Sévérac, Ariel Suhamy, aux Presses de Saint-Étienne : « Selon Léon l’Hébreu, l’amour est une force cosmique et “commune” qui lie et met en rapport tous les êtres – animés et inanimés. De la matière informe aux corps célestes, en passant par les corps organiques complexes (hommes et animaux), chaque chose vit et existe en vertu de la force d’amour qui la traverse et la constitue. Le lien d’amour est une nécessité naturelle – dans le sens où il représente la relation primordiale qui apporte à toutes les choses leur « bénéfice » (benefizio) d’être, c’est-à-dire qu’il les fait vivre et exister en tant que telles. C’est pourquoi les choses, quelles qu’elles soient, ne peuvent pas se libérer du lien originaire d’amour. La finalité ultime du mouvement et de la dynamique universelles de la communauté d’amour, que Léon appelle également l’ « unité du monde » (unità del mondo), sont bien entendu représentées par l’union avec la divinité – selon les degrés et les modalités propres à chaque être.
19 Cf. notamment Dialogue III, p. 112 et suivantes.
20 Breve Trattato, p. 613. (Nous traduisons).
21 Éthique III, définitions des affects, XLVIII.
22 Court Traité, II, XXVI, § 8, point 4.
23 Dialogue II, p. 118.
24 Dialogue II, p. 122.
25 Ibid.
26 Ibid.
27 Ibid., 123.
28 Ibid., p. 119.
29 Court Traité, II, XXII, § 2.
30 Cf. Court Traité, II, II, §§ 2 et 3.
31 Étant donné que le terme néerlandais est lijdingen, il vaut mieux le traduire par affects et non par passions.
32 Court Traité, II, III, 5.
33 Cf. Éthique III, XLVII, scolie ; Éthique IV, XXXVII, scolie I.
34 Cf. Court Traité, II, III, § 7, note 2, et ch. XXII.
35 Court Traité, II, XXI, § 2, note 1.
36 Dialogue I, p. 16.
37 Court Traité, II, V, 6.
38 Dialogue I, p. 16.
39 Ibid.
40 Ibid.
41 Court Traité, II, III, 9.
42 Ibid.
43 Dialogues d’amour II, p. 111.
44 Ibid., p. 116.
45 Ibid., p. 118.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Spinoza au XIXe siècle
Actes des journées d’études organisées à la Sorbonne (9 et 16 mars, 23 et 30 novembre 1997)
André Tosel, Pierre-François Moreau et Jean Salem (dir.)
2008
Spinoza transalpin
Les interprétations actuelles en Italie
Chantal Jaquet et Pierre-François Moreau (dir.)
2012
Adam, la nature humaine, avant et après
Epistémologie de la Chute
Irène Rosier-Catach et Gianluca Briguglia (dir.)
2016
La pensée comme expérience
Esthétique et déconstruction
Marc Jimenez et Vangelis Athanassopoulos (dir.)
2016