« Né trop tard dans un monde trop vieux »
La liste comme support de la remémoration nostalgique : une étude de cas
p. 401-429
Texte intégral
Qui plus, ou est ly tiers Calixte
Dernier decedé de ce nom,
Qui quatre ans tint le papalixte,
Alfonce, le roy d’Arragon,
Le gracïeux duc de Bourbon,
Et Artus le duc de Bretaigne,
Et Charles septiesme le bon ?
Mais ou est le preux Charlemaigne ?
1On aura probablement reconnu la première strophe de la Ballade des seigneurs du temps jadis de François Villon1, que j’ai choisi de mettre en exergue à cet essai, notamment parce qu’elle emploie à la rime le mot « papalixte », liste des papes, qui me paraît être un hapax ; or, il sera abondamment question de listes pontificales dans la suite de mon propos. Plus généralement, on sait bien, grâce aux travaux de J. Cerquiglini-Toulet, de M. Jeay, de J.-C. Mühlethaler, que l’énumération de noms propres est un topos très fréquenté des poètes mélancoliques de la fin du Moyen Âge, nostalgiques de grandeurs révolues ou en quête d’ancêtres prestigieux2 – selon une image inverse de celle, optimiste, des nains sur les épaules des géants : il n’est plus question en effet de porter le regard plus loin qu’eux, mais au contraire d’être enténébrés par leur masse imposante. Mais où sont les neiges d’antan ?
2Le personnage dont je vais ici esquisser le portrait est, plutôt qu’un virtuose, un obsessionnel de la composition sérielle et de la rhétorique du Vbi sunt ? Son nom, Niccolò di Michele Bonaiuti, ne dit plus rien à personne, malgré les efforts pathétiques qu’il a déployés pour en assurer la pérennité. Au cours des dix dernières années, ou à peu près, de son existence, il compose quelque trente mille hexamètres, qu’il transcrit de sa main, en double, voire triple exemplaire, sur du parchemin de récupération. Mais la postérité n’est pas toujours injuste : si l’on mettait au concours le titre de plus mauvais poète de toute la latinité, le Florentin Bonaiuti, admirateur de Pétrarque, son aîné d’environ un demi-siècle, serait un postulant sérieux à la victoire. Les hexamètres qu’il compose à la chaîne sont certes corrects du point de vue de la prosodie, fruit d’un ancien apprentissage scolaire, mais au prix de quantité de chevilles maladroites, de formules stéréotypées et répétitives, de rudes contorsions syntaxiques, d’un mélange bizarre des niveaux de langue3.
3Pourtant, si l’on parvient à surmonter les réticences que ne peut manquer d’inspirer une telle phraséologie, l’œuvre de Bonaiuti me paraît mériter un regard tant soit peu attentif. Parce que c’est l’œuvre d’un médiocre, d’un demi-savant, elle est doublement représentative. D’abord, elle porte témoignage des angoisses et des rêves des hommes de son temps et de son milieu. D’autre part, elle illustre jusqu’à la caricature les procédés littéraires – alors en vogue, comme on l’a dit –, qui constituent l’un des objets de la vaste enquête conduite dans le cadre du projet POLIMA. J’ajouterai, motif d’intérêt moins avouable peut-être, qu’en rouvrant pour la circonstance un dossier abandonné par moi depuis plus de trois décennies4, j’ai été ému par la figure pathétique d’un homme qui n’a pas dû être très différent, dans ce qu’on appelle « la vraie vie », de la persona littéraire de vaincu, de déchu, sous les traits de laquelle il se peint.
4Esquissons-en donc le portrait, tel qu’on peut le déduire de la collection d’épîtres en vers que, sur ses vieux jours, il adresse à des amis, des protecteurs ou des proches. Né avant le milieu du XIVe siècle dans une famille d’aisance moyenne, si je puis interpréter dans ce sens les maigres traces archivistiques que j’ai pu repérer5, il appartient à l’entourage de Filippo Adimari, le chef de l’une des branches de cette illustre et ancienne famille de magnati stigmatisée par Dante pour son arrogance et sa cruauté6. Notre homme, après une jeunesse qu’il prétend orageuse – mais il faut peut-être faire la part du topos dans une telle allégation –, essaie d’entrer dans les ordres, mais doit essuyer plusieurs refus humiliants. Il est enfin contraint par son impécuniosité de s’exiler de Florence en 1407, vu l’incapacité où il se trouve de s’acquitter des lourds impôts levés par le gouvernement oligarchique de la république pour faire face à ses dépenses militaires. Grâce à la protection d’Alamanno Adimari, le fils aîné de Filippo, archevêque de Pise et bientôt cardinal, et sans doute à celle du chapitre de Saint-Pierre, il trouve refuge à Rome. Mais ses malheurs ne s’arrêtent pas là. Lorsque les troupes du roi de Naples Ladislas de Durazzo s’emparent de la ville en 1413, elles mettent à sac son logis et font main basse sur ses maigres biens, surtout des livres7. Il connaît dès lors une vieillesse acrimonieuse et morose, essentiellement consacrée à l’écriture, et ne doit pas survivre très longtemps à son protecteur, le cardinal Adimari, mort en 1422, dont son avant-dernier poème porte le deuil8.
5C’est vraisemblablement au cours de ses années romaines que Bonaiuti s’est adonné à une activité proprement compulsive d’écrivain et d’écrivant, de poète et de copiste. On peut en effet dater des années 1410, d’après les événements historiques auxquels elles se réfèrent, la rédaction de quatre massives épopées religieuses, le Liber sanctae Jerusalem, en 12 livres de 8 chants, soit 10 249 vers (il en existe même une version augmentée en 16 livres), le Liber sanctae Basilicae, 6 livres de 6 chants pour 4543 vers, le Liber in figura Paradisi deliciarum de quattuor virtutibus cardinalibus, 4 livres de 6 chants, 2542 vers, et enfin le Liber in figura sancti Sepulcri, 6 chants pour 1382 vers – à quoi il faut ajouter une collection de 40 épîtres métriques de longueur variable (53 à 420 vers). Il nous reste en tout dix manuscrits de l’œuvre de Bonaiuti, chacune des épopées ayant été copiée en deux exemplaires au moins. Quatre d’entre eux, soit l’œuvre complète, se trouvent aujourd’hui conservés à la Bibliothèque vaticane, dans le fonds Archivio di San Pietro, sous les cotes G 51 à G 54. Ils correspondent de toute évidence au legs explicitement fait par l’auteur au chapitre de la basilique dans un poème intitulé De testamento librorum9, puisqu’ils figurent déjà dans l’inventaire de sa bibliothèque dressé en 1436, et n’ont sans doute jamais été ouverts avant que le cardinal Mercati, dans les années 193010, puis moi-même, un demi-siècle plus tard, n’ayons la curiosité de les examiner. Les six autres témoins, un dans le fonds Barberini de la Bibliothèque vaticane, quatre à la Bibliothèque Laurentienne et un à la Riccardienne de Florence11, ont une histoire un peu plus difficile à reconstituer12. Ce n’est pas ce qui nous importe ici. Ce qu’il convient en revanche de remarquer, c’est l’absolue homogénéité graphique et codicologique de ces dix volumes. Ils sont tous écrits en palimpseste, sur du parchemin de récupération13, selon les mêmes règles de mise en pages, concernant notamment la distribution des rubriques et des pieds-de-mouche, par une main élégante et plutôt sûre – si ce n’est lors de la transcription des derniers poèmes du recueil de lettres, inachevé –, qui pratique une graphie curieusement archaïsante. Il semble difficile d’imaginer que cette main soit autre que celle de l’auteur, qui aurait donc, en un peu moins de dix ans, si est vrai ce qu’il dit des spoliations dont il a été victime de la part des troupes napolitaines, en tous les cas pas plus de quinze, non seulement composé environ trente mille vers, mais en aurait aussi transcrit plus de quatre-vingt mille14. On conçoit que sa poésie ait tendance à tirer à la ligne !
6Un obsessionnel, ai-je dit. Et dont l’obsession paraît se traduire entre autres par un détail curieux : plusieurs manuscrits portent régulièrement, dans le coin inférieur gauche de leurs pages, une indication chiffrée en tout petits caractères, dont j’ai pu observer qu’à de légères erreurs de calcul près, elles correspondaient au nombre de vers que compte le chant, ou le livre, qui s’achève sur la page en question. Je ne vois pas quelle fin pratique assigner à ce genre de mention. Oserai-je rapprocher cette frénésie du quantitatif – comme si dire plus, c’était dire mieux – des pratiques rituelles observées à la même époque par J. Chiffoleau, où se manifeste la même folie du nombre ? Faut-il y voir avec lui un symptôme de l’éthos mélancolique des hommes du temps15 ? Comme les testateurs comtadins étudiés par Chiffoleau, Bonaiuti est un déraciné : sa patrie, Florence, l’a exilé, sa patrie spirituelle, l’Église, en proie au Grand Schisme, est divisée contre elle-même. Et surtout, sa poésie, comme on va le voir, est traversée d’images de massacres et de destructions. Je ne m’aventure pas plus loin sur le terrain scabreux de la psychologie historique et, me bornant au point de vue littéraire pour lequel seul j’ai compétence, je constate que la poétique de Bonaiuti se fonde sur l’accumulation, la répétition, l’organisation numérique et la distribution sérielle.
7Prenons par exemple le Liber in figura Paradisi deliciarum de quattuor virtutibus cardinalibus. Chacun des quatre livres qui le constituent est consacré à une vertu cardinale – dans cet ordre : justice, tempérance, prudence et force, assimilées chacune, selon un jeu de correspondances on ne peut plus traditionnel, à l’un des quatre fleuves du paradis terrestre. À l’intérieur de ces livres, chacun des six chants fournit une masse d’exemples et de contre-exemples des vertus en question empruntés tour à tour à la Bible, à l’histoire ancienne et à l’histoire italienne contemporaine, et ventilés selon une typologie d’« états du monde » : les rois, les guerriers, les marchands, les prêtres, les pontifes et les simples particuliers ou privati. On est donc en présence du croisement assez savant, peut-être un peu moins mécanique que je ne le laisse entendre par souci de brièveté, entre trois séries : quatre vertus, trois moments de l’histoire et six statuts sociaux. Une telle structure a pour effet la production quasi mécanique de listes d’exempla ordonnés en fonction de ces trois critères. Avec des contraintes comme celles-là, il n’est pas si difficile de fabriquer des poèmes à la chaîne.
8Pour en venir à la question du temps, il faut dire quelques mots du monumental Liber sanctae Jerusalem. Comme le suggère son titre, c’est un poème d’orientation fortement eschatologique, qui embrasse selon l’ordre des temps l’histoire du monde, des origines aux événements les plus contemporains. Après un préambule auquel on va brièvement revenir, le poème enchaîne une longue série de récits exemplaires empruntés d’abord, par l’intermédiaire de l’Histoire scolastique de Pierre Comestor, aux livres historiques de la Bible (les chants 1 à 6 du poème couvrent les événements de l’Ancien Testament, les livres 7 à 9 ceux du Nouveau) ; il poursuit sur le même mode avec l’histoire de l’Église, illustrée par des exemples tirés peut-être du Liber pontificalis, plus probablement de la chronique de Martin le Polonais, pour terminer sur l’actualité la plus immédiate et l’appel à la fin du schisme. Dans ce parcours au fil de l’histoire humaine, il y a quelque chose du De casibus de Boccace, en nettement plus prophétique et imprécatoire. Mais tandis que Boccace ramène tous ses récits à un dénominateur commun qui est la puissance malfaisante de la Fortune, Bonaiuti prend prétexte de son fil conducteur pour aborder toutes sortes de questions psychologiques, sociales, politiques, morales et théologiques. Je soupçonne qu’avec le Liber sanctae Jerusalem, qu’il n’a pas copié moins de cinq fois, notre auteur s’est imaginé rédiger sa Divine Comédie – la référence aux modèles, tant admirés par lui, de Dante et de Boccace ne procède pas de ma part d’une intention purement ironique, tant ces auteurs sont les champions de la composition par listes…
9Il est exclu de fournir ici une analyse, même sommaire, des plus de douze mille vers que compte le Liber sanctae Jerusalem. Je me borne, pour donner une idée de sa manière, à en paraphraser brièvement quelques passages significatifs dans la perspective qui est celle de notre enquête.
Livre 1- Le poème s’ouvre sur une invocation à Dieu le Père, seul capable d’insuffler à l’auteur l’inspiration nécessaire à l’accomplissement de son grand œuvre (chant 1). Le chant 2 évoque la perfection de la création, qui s’oppose à la fragilité des constructions humaines : voir le destin de Rome, de Constantinople, de Carthage, de Babylone, première liste d’un poème qui en comptera beaucoup d’autres. Après une description de la cité céleste, dont le sanctuaire est curieusement comparé aux baptistères de Saint-Jean-de-Latran et de Florence ainsi qu’à l’église romaine de Santo Stefano Rotondo (chant 3), vient la liste hiérarchisée des habitants de la cour céleste, les neuf chœurs d’anges, les « quatre vivants » du tétramorphe, les apôtres, les prophètes, les disciples, les martyrs, les autres saints répartis en fonction des « états du monde » auxquels ils appartiennent (chant 4). Le récit de la chute de Lucifer est l’occasion pour le poète d’énumérer ses compagnons d’élection en enfer, les assassins (Horodès, Hérode, Romulus, Antiochus, Xerxès) et les superbes (Sennachérib, Nemrod, Cambyse, Domitien) (chant 5). La suite du livre paraphrase les premiers chapitres de la Genèse et reprend certaines légendes relatives aux premiers temps de l’humanité, comme celle des trois races de géants qui peuplent alors la terre, symbolisées par Goliath, l’archétype des orgueilleux, Antée, celui des cruels et modèle des tyrans modernes, et par les assaillants de l’Olympe, prototypes des envieux, et notamment de ceux qui peuplent la curie avignonnaise. D’ores et déjà se manifeste ici une vision typologique de l’Histoire (chant 8).
Livre 2- Après le récit du déluge universel (chant 1 à 3), le chant 4 évoque la descendance de Noé, qui se répartit entre trois races d’hommes pieux (envers leurs proches, envers leur patrie, envers la divinité) et trois races d’impies. Les chants qui suivent décrivent les empires disparus d’Asie, Babylone, Assyrie et Perse, puis la vocation d’Abraham (chant 7) et le sacrifice de Melchisédech (chant 8) ; le lien entre les deux personnages est comparé à celui qui unit Moïse à Aaron, Constantin au pape Sylvestre, suggérant ce qu’il en est de l’intérêt de notre auteur pour le rapport entre le religieux et le politique.
Livre 3- On notera au chant 1, à propos de l’histoire de Sodome et Gomorrhe, une violente tirade contre l’homosexualité, comme expression de la concupiscence charnelle et comme péché contre nature ; cette diatribe qui fait écho à celle de prédicateurs du temps, comme Bernardin de Sienne, est illustrée d’une suite d’exemples, ceux de Ganymède, du Macédonien Pausanias, de Néron et, en bloc, des musulmans.
Livre 5- L’histoire des rois d’Israël est pour Bonaiuti le prétexte à appuyer de nouveau sur des énumérations ses obsessions politiques : les mauvais rois de la Bible, Roboam, Achab, Joram ou Jéhu (chant 1) et ceux du monde païen, de Balthasar à Néron (chant 2), préfigurent les mauvais dirigeants d’aujourd’hui, comme les oligarques florentins (chant 3). L’évocation de l’exil de Babylone (chant 4) fournit l’occasion d’une très longue énumération de royaumes que la vengeance divine a punis pour les péchés de leurs souverains (chants 5 et 6).
Livre 8- Le récit de la vie du Christ, aux livres 6 et 7, présente moins d’énoncés de forme paradigmatique. On notera quand même, à titre de curiosité, que, posant au chant 4 du livre 8 la question de savoir si le sacrifice de la croix ne peut pas être assimilé à un suicide16, notre auteur, pour combattre cette opinion impie, énumère a contrario des suicides que la tradition tient parfois pour honorables, mais que lui-même réprouve, ceux de Didon, Pyrame et Thisbé, Sophonisbe, Lucrèce.
Livre 10- C’est le livre des martyrs. Tout d’abord, Jean Baptiste, victime de l’incestueux Hérode ; le nom de ce dernier sert d’embrayeur à une liste de personnages punis pour leur sensualité, Sémiramis, Macarée, Phèdre, Scylla, la femme du roi Candaule, Médée (chant 1). Toute la suite du livre sera consacrée au châtiment des bourreaux. Notons en particulier au chant 7 la liste des empereurs romains persécuteurs, Néron, Sévère, Dèce, Valérien, Aurélien, Dioclétien, Maximin, Galère, dont le trépas cruel est détaillé avec un certain sadisme.
Livre 12- On passera pour faire bref sur le livre 11, consacré aux hérésies, pour donner une description un peu plus précise du livre 12 et dernier, qui fournit un aperçu polémique de l’histoire de la papauté dans son rapport avec le pouvoir séculier, selon les termes d’une sorte d’ecclésiologie sauvage. C’est ainsi que sont loués l’empereur Otton II, pour avoir déposé quelques mauvais papes, et les rois de France très chrétiens, promoteurs des croisades, mais dont les descendants corrompus ont fait main basse sur le siège pontifical en l’exilant en Avignon (chant 3). Les chants 4 et 5, à l’inverse, invectivent des souverains impies, Henri IV, qui suscite le schisme de l’antipape Guibert, l’empereur byzantin Maurice, qui soutient sans succès Crescenzi dans sa révolte contre le pape légitime, Frédéric II surtout, ferox tamquam coluber, dont l’impiété sera vengée par la mort misérable de ses fils. Le chant 6 s’en prend aux antipapes Benoît X, Jean le Grec, alias Jean XVI, déposé par Otton III, Burdino (Grégoire VIII), Pietro di Corvaro (Nicolas V) imposé par Louis de Bavière. Quant à l’antipape actuel, Benoît XIII, ou Pedro de Luna, que Bonaiuti poursuit d’une hargne tenace au fil de toute son œuvre, il n’a aucun fondement juridique à ses prétentions, puisque l’élection d’Urbain VI fut canonique. Le chant 7 enfin attaque les partisans de l’obédience avignonnaise, la reine Jeanne de Naples, à qui cela a porté malheur, puisqu’elle a été déposée par Charles de Duras, le roi de France, qui essaie sans succès de faire valider par l’université de Paris l’élection de Clément, le roi d’Aragon, qui interdit à ses évêques de se rendre au concile de Pise, le roi de Naples, qui divise pour régner sur Rome. Le dernier chant désignera de nouveau Rome comme siège nécessaire de la papauté, et rend gloire à la puissance et à la bonté divines.
10De dimensions plus propres à autoriser l’analyse dans le cadre du présent volume, les lettres rassemblées dans le manuscrit Archivio de San Pietro G 51 incluent elles aussi de façon très systématique des catalogues de noms propres, en vue d’illustrer les divers aspects d’une question d’ordre le plus souvent moral ou politique, ou bien de rendre compte d’un état de fait en général calamiteux. J’ai choisi un peu au hasard dans le corpus un exemple de chacun de ces deux cas de figure. Mais si l’on prend en compte l’ensemble de la collection, on constate qu’une lettre sur deux – vingt sur quarante exactement – comprend au moins une liste17. Quelle est donc la fonction, et quel est le fonctionnement, de ces catalogues généralement historiques, parfois géographiques, dans le contexte qui est le leur ? De façon peu surprenante, ils servent soit de support à l’argumentation, soit d’aliment à la déploration.
11Premier type de cas. Au fil des lettres, on voit maintes fois Bonaiuti répondre, ou prétendre répondre, à un problème que lui a soumis son interlocuteur, en général un homme d’action, avec le respect dû à son grand âge et à ses vastes connaissances. Ainsi Benedetto, le plus jeune fils de Filippo Adimari, lui a demandé de l’éclairer sur ce qu’est la vraie noblesse18. Niccolò lui répond que, plus que celle du rang ou de la fortune, la noblesse est soit celle des mœurs, plutôt valorisée, quand bien même elle est l’apanage de non-nobles (Cicéron, David, Numa, Aristote, Socrate et ainsi de suite), soit celle de la puissance militaire, mais qui expose à une fin souvent lamentable (Tibère, Caligula, Frédéric Barberousse et Frédéric II, Alexandre, Hannibal, etc.). Quelques-uns, comme Otton Ier, Robert le Pieux, Ladislas Ier de Hongrie, Scipion ou Fabricius ont le rare privilège de cumuler les deux.
12À un autre fils de Filippo Adimari, Silvestro, qui lui a demandé ses lumières sur les origines du Grand Schisme19, notre auteur répond que l’élection mouvementée d’Urbain VI en 1378 fut parfaitement légitime, sur la base non pas d’arguments juridiques, mais au motif que les élections des papes Vigile au VIe siècle, Grégoire VI et Victor II au XIe siècle, acquises pourtant dans des conditions autrement plus tendancieuses, sont reconnues par la tradition ecclésiale. Les cardinaux qui se sont déjugés pour élire Clément VII ont donc agi sous la seule emprise de la perversité et de la cupidité. On jugera de la pertinence et de la solidité d’une telle démonstration…
13Le modèle que j’ai choisi de développer pour illustrer ce type de démarche est la lettre à Averardo de’ Medici, dont on trouvera le texte et l’analyse en annexe. Il s’agit d’un neveu de Giovanni di Bicci, le fondateur de la prospérité de la famille, et donc d’un cousin de Cosme l’Ancien, d’abord connu pour sa carrière de banquier : c’est lui qui représente à Rome l’établissement familial20. Quoi qu’il en soit, il doit songer à se lancer dans une carrière politique lorsqu’il demande à Bonaiuti de lui révéler le fond de sa pensée à ce sujet : « Tu exiges [cogis] que je relate en toute franchise avec mes mots ce que je tiens enfermé dans mon cœur pensif sur ce genre d’occupation21 ». En réalité, notre homme avait déjà annoncé la couleur dès la toute première phrase, amphigourique, de son poème, qui conclut à ce que les honneurs qu’on se donne tant de mal pour conquérir conduisent en général au désastre (ruit extemplo series turgentis honoris et convertitur in luctum). Le bon magistrat n’est décrit que négativement, en une quinzaine de vers, comme celui qui ne succombe ni à la cupidité, ni à l’ambition. Tout le corps du poème va marteler cette leçon en dénonçant avec opiniâtreté ces deux vices sur la base d’exempla tirés de l’histoire récente : la liste est donc mise au service de la vituperatio, soit dit pour reprendre l’expression qui, dans le livre de Madeleine Jeay, donne son titre au chapitre sur Eustache Deschamps22. De la vituperatio et quand même un peu aussi de la laus, la louange, lorsqu’il est brièvement question par contraste des vertueux magistrats grecs et romains, Scipion, Camille, Livius Salinator, Regulus et Thémistocle – tous exemples empruntés à Valère Maxime –, qui, bien que détenteurs de la force, se sont soumis aux décrets même injustes pris à leur encontre.
14Laus et vituperatio : la liste s’inscrit donc bien dans un cadre rhétorique. C’est dire qu’elle vise à une intention persuasive, si ce n’est démonstrative, ce que semble mettre en évidence l’usage très calculé d’un signe de ponctuation, le pied-de-mouche, qui a atteint dans la première moitié du XIIIe siècle sa forme définitive en vue de marquer les articulations du raisonnement scolastique23. Le problème, c’est que la rhétorique qui se déploie ici est purement émotive, et que sa puissance argumentative me semble limitée. Je m’explique : les exemples par lesquels Bonaiuti illustre les méfaits de la cupidité et de l’ambition sont respectivement associés aux deux épisodes les plus traumatiques de l’histoire florentine au XIVe siècle, la dictature du duc d’Athènes, Gautier de Brienne, en 1342-1343, et la révolte populaire des Ciompi en 1378, le régime d’arbitraire qui s’ensuit et la répression qui finit par l’étouffer. Or, c’est vraiment faire preuve d’une capacité d’analyse politique des plus rudimentaires que de rapporter ces deux séquences historiques au déchaînement des vices en question. Ce n’est que très indirectement sous l’effet de la cupidité, mais bien poussée par la nécessité, que la bourgeoisie florentine fait appel au duc d’Athènes, qui n’est guère plus qu’un aventurier : ruinée par la terrible crise bancaire du début des années 1340, elle doit en outre faire face à une guerre contre Pise plutôt mal engagée24. Et la révolte populaire des ouvriers du textile, les Ciompi, en 1378, n’est évidemment pas le fait de l’ambition, même si, l’occasion faisant le larron, certains opportunistes, qui auront à s’en repentir, essaient de profiter de la situation pour asseoir leur autorité en faisant assaut de démagogie25.
15Ce que je suggère par là, c’est que le lien entre les exemples et la thèse qu’ils sont réputés établir a quelque chose de très arbitraire. Ou plutôt, on peut ne voir là que la réactivation par Bonaiuti du très vieux schéma historiographique, passé au rang de lieu commun, selon quoi, comme le voulait déjà Salluste dans la préface au Catilina comme dans celle au Jugurtha, le malheur des cités est l’effet de la perversion de leurs élites. Et pourtant, si le propos de notre poète parvient à une certaine efficacité, c’est au moyen des listes : l’énumération, à l’intérieur du cadre rigide et solennisant de l’hexamètre épique, des membres des grandes familles florentines victimes des événements – des personnages dont la mémoire encore récente parle assurément à l’esprit du correspondant de Bonaiuti – sert en réalité de socle à une rhétorique du pathos, qui fournit une réponse claire, mais tout sauf rationnelle, à la question de départ : « Est-ce qu’il faut faire de la politique ? »
16Cela m’amène au second type d’usage de la liste, celui qui a été désigné plus haut par la périphrase « aliment de la déploration ». On l’a compris, la vision de la condition humaine que développe notre auteur à la lumière d’une expérience personnelle malheureuse et du spectacle d’un monde violent et déchiré n’est pas des plus souriantes. Cela ressort notamment de la plus longue de ses lettres, l’une des dernières qu’il ait composées, « Sur la folie des hommes », De insipientia hominum26. Après avoir fait retour sur lui-même et déploré les péchés de sa jeunesse (la luxure), de son âge mûr (la cupidité) et de sa vieillesse (la vaine gloire), le poète, pour établir que nul n’est sage que Dieu, va déployer sur quelque trois cent quarante vers le catalogue de soixante-douze hommes illustres qui, en dépit de leur talent ou de leur réputation, ont d’une façon ou d’une autre forfait. Cette liste, la plus longue de celles compilées par Bonaiuti, s’organise moins en fonction de la condition sociale des personnages qui la composent ou de l’état du monde qu’ils représentent que du titre qu’ils ont à une certaine renommée. Sont ainsi évoqués tour à tour des prophètes, des prêtres, des philosophes, des savants, des astronomes, des juristes, des médecins, des historiens, des artifices (artistes ou artisans), des marchands, des hommes de guerre et des hommes d’État. Ces listes sont plus ou moins fournies : parmi les philosophes, on trouve dans cet ordre Socrate, Platon, Aristote, Averroès, Albert le Grand, Varon, Épicure et Anaxagore ; parmi les artifices, l’agriculteur Caïn, le chasseur Ésaü, l’architecte Dédale, le sculpteur Pygmalion et le peintre Giotto. Inutile de dresser ici le catalogue entier de ces « insensés sans le savoir » : avec ce qu’il peut avoir d’hétéroclite, il amène le lecteur à éprouver ce qu’Umberto Eco appelle le « vertige de la liste27 ».
17Plus cohérent semble celui, édité en annexe, des églises de Rome endommagées ou détruites par la fureur des envahisseurs napolitains28. Ce poème, le no 30 de la collection, appartient, avec les nos 2, 6, 7, 8, 20, 29, 32 et 38, à une série dans laquelle l’auteur prétend s’exprimer in figura Romae, au nom de Rome (ou encore, selon les cas, du palais du Latran, de la chaire de saint Pierre, de la basilique Saint-Paul-Hors-les-Murs), pour s’indigner ou se lamenter de la détérioration actuelle de l’ancienne capitale des empereurs et des papes. Il y a là, me semble-t-il, pour qui aurait la patience de percer l’opacité de la langue de Bonaiuti, un tableau saisissant de la ville de Rome, à un moment spécialement déprimé et mal documenté de son histoire, les dernières années du Grand Schisme.
18Pour ce qui est des églises dévastées (une vingtaine dont la description morose et monotone s’étend sur une centaine de vers), la liste et les pieds-de-mouche qui la scandent dessinent le mouvement non plus certes d’une argumentation, mais d’une accumulation pure et simple. Nous sommes en présence d’une litanie pitoyable, d’une sorte d’antiguide du pèlerin. J’ai essayé de comprendre si un motif quelconque organisait l’ordre de l’énoncé. Une fois qu’on aura constaté, ce que nous invite à faire Bonaiuti, que les trois premiers items sont placés sous le vocable de saint Étienne, on sera bien en peine, je le crains, de trouver la moindre logique à cette énumération. Il ne semble pas en tous cas que ce soit une logique géographique. Pour qui connaît la Ville, et pour peu que j’aie correctement identifié les sanctuaires mentionnés par Bonaiuti, on constatera que leur succession dans l’ordre du poème correspond à un itinéraire des plus erratiques. Tout au plus peut-on considérer que les établissements situés dans le sud de Rome, c’est-à-dire sur le chemin qu’ont dû emprunter les troupes de Ladislas, ont payé un tribut spécialement lourd à leur furie destructrice. On peut se demander si cette déambulation aléatoire, et qui reste ouverte à des développements infinis – « si je le voulais, je pourrais encore en ajouter cent autres », dit en substance le poète aux vers 157-162 – n’entend signifier autre chose que le chaos dont l’ancien caput mundi est désormais le lieu. Et dont est le lieu le cœur de celui qui s’exprime in figura Romae, c’est-à-dire Bonaiuti lui-même. Sous les traits de la ville dévastée, de ses églises aux mosaïques arrachées désertées par leur clergé, de sa population vautrée dans la bassesse et dans la sottise, c’est de son propre malheur que parle notre auteur.
19Cependant – et l’on en reviendra donc enfin à la question du temps –, il ne s’en tiendra pas à ce constat désespéré. Non seulement le pire n’est pas toujours sûr, mais il peut être ferment de renaissances radieuses. Au niveau personnel d’abord : dans un poème De vita humanae generationis, « L’existence de la race humaine29 », qui fait en quelque sorte pendant au De insipientia hominum dont il vient d’être question, Bonaiuti évoque tour à tour les six âges de l’homme, de l’infantia au senium, l’extrême vieillesse, en passant par la pueritia, la juventus, l’âge mûr (virilis aetas) et la senilitas, et analyse les misères physiques qui s’attachent à chacun d’entre eux. Et pourtant, l’histoire fournit des exemples de perfection attachés à chacun de ces âges : Jacob et Jean Baptiste pour la condition de nouveau-né, Samuel et saint Benoît pour l’enfance, Daniel et saint Jean pour la jeunesse, Josué et saint Pierre pour l’âge adulte, Élie et saint Augustin pour la vieillesse, David et saint Jérôme pour le temps de la décrépitude, senium30.
20Le pire n’est pas non plus sûr au niveau de l’histoire universelle. Une autre lettre in figura Romae est adressée au pape Martin V dont l’élection récente est le signe heureux de la fin du schisme31. À l’opposé du texte que je viens de commenter, ce poème offre de Rome un visage triomphal, soutenu par deux longues listes, celle des régions du monde jadis assujetties par l’empire païen32, celle des papes qui, après avoir gouverné l’Église au cours des six premiers siècles de son histoire, ont accédé au rang de saints – une cinquantaine de noms au total. Fort de ce double héritage, le pape Martin est appelé par notre auteur, qui retrouve exceptionnellement ici le ton de Virgile et de sa quatrième églogue33, à régénérer le monde.
21C’est également sur la célébration du règne renouvelé de Rome que s’achevait, comme on l’a dit plus haut, le Liber sanctae Jerusalem. Les autres longs poèmes connaissent le même genre de conclusion. Je me borne ici pour finir à évoquer le chant 6 et dernier du plus exalté d’entre eux, le Liber sancti sepulcri : c’est un panégyrique de Florence, Florence naguère martyrisée par le duc d’Athènes et les Ciompi, dont sont énoncés, sous forme de deux longues listes (respectivement de citoyens illustres et d’actions glorieuses), les titres à la gloire littéraire et à la gloire militaire – Florence qui est de ce fait légitimement fondée à prendre la tête de la future croisade qui assurera la domination définitive et complète de Dieu sur le monde d’ici-bas. On peut sourire de ces utopies, comme l’on peut s’agacer des pleurnicheries incessantes que font entendre les lettres. Tant par son pessimisme que par son prophétisme, Bonaiuti me paraît, comme je l’indiquais en commençant, assez représentatif des passions de son temps. Il était intéressant de constater ici qu’il a mis la liste au service de l’un et de l’autre.
Annexe
Analyse et édition de deux lettres en vers de Niccolò di Michele Bonaiuti
1- Lettre de Niccolò di Michele Bonaiuti adressée à Averardo de’ Medici
Analyse :
Les risques du pouvoir sont tels que la course aux honneurs étonne toujours Bonaiuti (v. 1-7). Il va cependant donner à son correspondant, qui le lui a demandé, son avis sur la question (v. 8-10). Averardo, qui a de qui tenir, sera un magistrat vertueux, ne serait-ce que pour éviter l’exil et la mort (v. 11-21). Le poète annonce ensuite le plan de son exposé : il décrira d’abord le bon, puis le mauvais magistrat (v. 22-31).
Le bon magistrat est sage et honnête (v. 32-38) ; à l’égard de ses concitoyens, il se montre équitable, généreux et courageux (v. 39-48). Les deux vices qu’il convient d’éviter, et dont l’exemplification entraînera la bien plus longue description du mauvais magistrat, sont la cupidité (1) et l’ambition (2).
(1) L’avidité des chefs fait tort aux particuliers, surtout les plus modestes, victimes des exactions du fisc (v. 58-70), et à l’État, soumis au régime de la terreur et de l’arbitraire (v. 71-80). Les Florentins, urbani, y ont succombé lorsqu’ils ont fait appel au cruel duc d’Athènes, Gautier de Brienne, dont sont énumérées les illustres victimes (Giovanni di Bernardino de’ Medici, Cenni Rucellai, Guglielmo degli Altoviti) (v. 81-93)34. Les autres cités italiennes ne sont pas en reste, qui se sont vendues au tyran Giangaleazzo Visconti : Sienne, Pérouse, Pise, Venise ont monnayé leur liberté ; seule Gênes a résisté à la tentation (v. 94-114)35. Elles imitent en cela le tribun Curion, qui vend Rome à César contre l’or des Gaulois (v. 115-122).
(2) L’ambition est à la racine des guerres civiles entre Florentins, guelfes et gibelins, magnati et popolani, « noirs » et « blancs » : le destin des tristes ou valeureux héros de ces luttes, Farinata degli Uberti, Giano della Bella, Vieri de Cerchi, chef des « blancs », Corso Donati, chef des « noirs », est ici évoqué (v. 123-156). Les magistrats généreux (probi), comme Scipion l’Africain, Camille, Livius Salinator, Regulus, Thémistocle, se soumettent aux décisions même injustes prises à leur encontre par leurs concitoyens (v. 157-187). Les chefs florentins, tout au contraire, se sont entredéchirés pendant le régime des Ciompi et après sa chute : voir le sort sinistre – condamnation à mort ou bannissement – de Gregorio di Pagnozzo Tornaquinci, Donato Barbadori, Pietro di Filippo degli Albizzi, Pagno degli Strozzi ( ?), Giorgio degli Scali, Donato del Ricco, Tommaso degli Strozzi, Salvestro d’Alamanno de’ Medici, Benedetto degli Alberti (v. 188-216)36.
Instruit par ces exemples, Averardo doit mesurer les risques de la carrière qu’il entreprend, surtout dans des circonstances marquées par une extrême instabilité politique : qu’il soit donc sage et prudent (v. 217-238).
Texte (d’après le ms. Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, Archivio di S. Pietro G 51 [A]37, fol. 83-87)
[NB : Les mots en gras signalent les rubriques, les retraits en tête de vers, la place des pieds-de-mouche. L’apparat critique est en fin de texte.]
f. 83 Epistula Nicolai Michaelis Bonaiuti florentini missa ad Averarduma de Medicis incipit
Cum uigilans meditor patrie fastigia uirge,
Siue magistratus pondus, uel dona regendi,
Non paulo mecum dubitanti pectore miror
Quod totiens homines tanto sudore laborant
5 Pro causa ipsius capiendi culmine fasces,
Quod ruit extemplo series turgentis honoris
Et conuertitur in luctum formidine fultum.
O, clemens Auerarde, meo sermone referri
Quicquid ego teneo meditanti corde reclusum
10 Pro tali studio, dempto uelamine cogis.
Tu quoque de Medicis ueneranda stirpe creatus, f. 83v
Que fuit a tanto crebrob feruore grauata,
Hoc repetens satis absque dolo spectare ualebis.
Si recte loquar, ambiguo dictamine pulso,
15 Denique prudenti cum animo, sine pondere litis,
17 Lora magistratus digne captare parabis,
16 Damnando uicium presto cum corde modesto,c
Ne, sicut uarii tali pro crimine ciues
Sepe ruerunt, tu manens merore coactus,
20 Desertis laribus, patrum et statione relicta,
Uel nimium fuso doleas de uentre cruore.
Qualiter est istud plenum dulcedine munus
Siue dolore diu fultum, replicare parabo,
Sicut et illud mordaci discrimine querunt
25 Multotiens multi sociorum sanguine leso
Nec non insidiis adeo cum fraudibus horum,
Qualiter ille, pio qui cum sermone ministrat
Ipsum uel iusto pariter cum pectore saluat,
Exercet uotum Domini stellantis Olimpi
30 Ceu praue satagit contra precepta Tonantis
Siquis homo fallaci illud caligine gestat.
Uir probus et iustus digna ratione gubernat
Frena magistratus, capta probitatis habena,
Etd dat cuique suam sincero pondere sortem ;
35 Crimen auaritie deuoto corde recusat,
Ne sua cum prauo stimulo precordia ledat ;
Ambitionis onus prudenti mente refutat
Ne sua cum fremitu fortassis uota coartet.
Ciuibus et uulgo reddit sine litee labanti
40 Uerum iudicium, depulso tegmine ficto.
Et diros socios propriaf dicione coercet f. 84
Ne faciant aliis noxam cun pectore forti.
Presidium patrie mordacis tempore sortis :
Dat sibi thesaurum famis et sub pondere diro,
45 Aduersos eius fugitat cum uiribus hostes
Et uiduas auget, paruos et in ede colonos,
Et placet eterno Domino qui sidera uertit
Et satis adquirit uenerande nomina laudis.
Porro due species uiciorum turbine ledunt
50 Lora magistratus caram seriemque iubendi :
Nam fallax stimulus nimis ambitionis amoris,
Fixus auaritie polluto et pectore sensus,
Que generant prauas soboles in corde prophano,
Scilicet insidias, odium et plerumque rapinas
55 Et stragem procerum, diffuso sanguine, cedem
Plebis et excidium, cum proditione uirorum,
Supplicium patrie et uastas quandoque ruinas.
Pondus auaritie multorum pectora cogit
Tam quodg iudicium falso uelamine pressum
60 Dant populo, maculant dominandi lora sub aula,
De spoliis uacuant uiduas turbasque labantes,
Thesaurum fisci rapiunt cum fraudibus horum,
Iura magistratus uendunt et culmina sedis.
Qui tali uicio constant in mente grauati
65 Non collaudant Fabritium cum uocibus altis
Nec sua cum puro studio precordia gliscunt,
Qui potius firmauith paupertatis in arce
Uiuere, laudando fame prefultus honore,
Quam secum claudi cumulate pondera gaze,
70 Cum uicio simul accipendo nomina culpe.
Non isti cupiunt patrie saluare uigorem, f. 84v
Nec sibi presidium prestanti pectore donant,
Nec pulchrum decus ipsius firmare laborant,
Nec seruant uenerande libertatis habenam,
75 Sed potius reprobant ipsius culmine fasces
Et pariter stolide damnant sua lora regendi.
Sic ea configunt rigida sub lege tiranni
Et semet simul et socias natosque labantes
Ac eius ciues gladio cum turbine prebent,
80 Discindi satagunt adeo sua colla securi.
Qualiter urbani, uiciato corde grauati,
Gesserunt, quando tribuerunt frena feroci
Gualterio, qui prostrauit cum sanguine multo
Tot uarios homines in eadem sorte creatos
85 Qua degis, proprioi partier de semine natum,
Quo tu discindi fecit mucrone Iohannem,
Militie tituli laudando nomine comptum.
Tunc de Rucelais prestanti germine cretum
Cennim cum rigido leto mandauit ad urnam,
90 Pro causa lacerandi atroci corde latenter
Famosos homines, uulgi et plerumque cateruas.
Nec non Altouitis alium de prole creatum
Cum rabida pena rutilo de sole fugauit.
Nec minus infando sistunt liuore coacti
95 Qui tribuunt uasto dominandi frena tiranno,
Pro nitidis gazis, et libertatis honorem,
Siue magistratus uendunt solamina sedis
Et ciues externa cum dicione coartant.
Ut Galeazo Mediolani qui arma tenebat
100 Frena Senarum thesauri pro pondere fuluo
Turpiter urbani fallaci mente dederunt. f. 85
Perusinaj palam rabies a crimine uincta
Pro simili studio tribuit sua iura potenti
Uirge que stabat Papie statione iubendi.
105 Uir fallax ab eodem illusus principe mansit
Et reprobandus rutila pro mole metallik
Qui fuit in proprial qua constas urbe creatus
Et stetit in pulchra mandando sede priorum.
Et Venetorum laribus cum crimine ciues
110 Corrupti ducis eiusdem liuore fuerunt
Munus auaritie querendo mente prophana.
Janua reclusit lata statione colonos
Qui tali uicio maculati corde manebant
Et simul actabant tanto seruire tiranno.
115 Isti, ceu Curius romanam uendidit urbem
Pro uariis spoliis Gallorum a Cesare sumptis38,
Querebant patriam uasto pro pondere gaze
Sub seuo domino Papie cum lege ligari ;
Quod reprobandi sunt digna probitate sub axem,
120 Ceu recte noscis, dempto uelamine fraudis.
Ergo nephas horum iusto cum pectore damna
Ne tua cum simili uicio precordia ledat.
Et meditans tecum prudenti corde, latenter
Respice quam stimulus trux ambitionis inepte
125 Cum rabido fremitu procerum rea uota fatigat,
Inter magnates scelerato pectore patrat.
Ipse palam gessit binas caligine sectas
In laribus quarum soboles Florentia nouit ;
Altera Guelforum titulum pro nomine seruat,
130 Altera Ghibellino eius sermone uocatur.
132 Ac alie secte ipsius statione fuerunt
131 Que sibi multotiens turgendom damna dederuntn,
Pellebant ciues cara de sorte parentum. f. 85v
Ceu miles Farinata fuit deiectus ab una,
135 Qui patrie renuit uastari menia ferro,
Aduersos quando proiecit ab ede colonos.
Et pulsus Iandellabella furore prophano
De propriis laribus doluit uexamine litis,
Qui quoque magnates rigida sub lege ligauit,
140 Frena magistratus ipsis feruore negauit.
Et Veris egregio de Cerchis germine cretus
Pro simili stimulo mansit fugitatus ab aula,
Qui fuit in secta princeps precinctus honore.
Sed Corsus mordax ab eodem pondere uictus
145 Uixit in exilio ; postquam defunctus ad urnam
Denique migrauit uiolata et morte coactus,
Qui breuiter dedit aduerse tormentao caterue
Nec non et sociis nimium solamen iniquum.
Sic agitat fallax amor ambitionis atrocis,
150 Sic ualidos ciues nigrum depellit ad antrum,
Sic fasces patrie cenum conducit ad ymmum,
Sic mouet insidias adeo cum tegmine fraudis,
Inuidiam generat, generat rubigine fastum
Ac odium, seuas etiam formidine rixas,
155 Scandala committit procerum per corda latenter
Nec non et rabiem fragilis per uiscera uulgi.
Uir probus aduersis miranda pace colonis
Parcit et auxilium patrie plerumque ministrat ;
In semet furiam placato code coartat,
160 Ceu quondam uarii ciues gessere per orbem,
Presidium laribus dando probitate repleti.
Scipio cum ualido bello Cartaginis arcis
Urbanos pressit, lesit proceresque potentes f. 86
Qui populo Rome luctum quandoque dederunt.
165 Postquam, deserta patria merore flagranti,
Mansit in externa tantum statione remotus
Ac tamen aduersis damnum prebere colonis
Derenuit, quando potuit cum uiribus eius,
Cum sibi subsidium cetus prestare parabat.
170 Uixit in exilio depulsus sede parentum
Qui fulxit cinctus Martis legione Camillus,
Nec uoluit fesse patrie tormenta referre,
Cum tribuit Gallis diro certamine cladem.
Nec Liuius statuit laribus discrimina reddi,
175 Cum rabies Penorum contra tela quiritum
Cum rigido fastu superando bella gerebat,
Quamuis depulsus ciuili sede fuisset ;
At dedit aduersi luctum tironibus hostis.
Punica tela coegit amando carcere claudi
180 Actilius semet potius quam damna tueri
Defesse Rome, quando cum pectore forti
Consilio uetuit fieri solamina pacis.
Et citius uoluit rabidum captare uenenum
Cor Themistoclis ingensp quam frangere pactum
185 Persarum ducis, aut patrie prestare ruinam,
Quamquam uixisset rigide fugitatus Athenis,
Uictus et exilio migrauit tempore longo.
Non sic fecerunt scelerato pectore capti
Urbani, quando gesserunt colla recidi
190 Militis egregio stirpis de semine creti
Tornaquincis qui diffuso sanguine cessit ;
Nec cum Donatus pulchra de prole creatus
Barbadoris, uel legum sermone peritus, f. 86v
Defunctus fuit et uiolata cede coactus ;
195 Nec quando Petrus soboles preclara Phylippi
Albizis lesus rigidam descendit ad urnam,
Qui tenuit caput excelso pro culmine secte.
Sed taceo sicut magna de stirpe uocatus
De Strozis cecidit Petrozus uulnere tactus,
200 Sicut Mastinus simili cum pondere mansit.
At recito tamquam, mutato pignore secte,
Miles de Scalis cecidit pugione grauatus
Ipse Georgius infando discrimine pressus ;
Et sicut fuit a gladio percussus atroci
205 Doctor de Riccho uulgari nomine dictus.
Narro uelut ualidi ciues pepulere parentum
De laribus Thomam, prestanti semine natum
De Strozis, qui militie prefulxit honore ;
Qualiter et fuit a simili dicione reprensus
210 Postquam Siluester Medicis de germine cretus
Qui caput in populo tenuit cum turbine plebis.
Et Benedictus de Albertis uiolatus eodem
A stimulo doluit patrum de sede remotus.
Ac tamen a multis uixit decoratus honore
215 Pro miro sensu fragilis super agmina uulgi,
Frena magistratus quando staurare parabat.
Ergo uides quantum digne fugitare tenetur
Quisque probus ciuis talis delicta furoris,
Si patrie gliscit defendiq lora iubendi.
220 Si pacem sociis optat prebere patenterr,
Si querit caram populi saluare quietem,
Defessis adeo requiem donare colonis,
Concedi simul et fragili solamina uulgo, f. 87
Presidium sibi prebendo pro turbine noxe.
225 Tu quoque cognoscis quantum discrimen adheret
Illis qui nimium cupiunt fastigia sedis,
Cum rabido fastu, celso captare theatro.
Cognoscis quotiens nostris labentibus annis
Mutatum fuit, astrorum sub lumine, pondus
230 Ducendi fasces patrie statione iubendi,
Ceu tali cecidere coactis pignore ciues ;
Quod paulo tecum moderatot pectore sume
Lora magistratus, depulso crimine litis,
Ne pereas forsan rigido merore grauatus,
235 Ne caris genitis reddasu tormenta doloris
Aut miseram patrum demptav ratione ruinam.
Sed potius sibi retribuasw dulcedine pacem ;
Denique tu, capias laudande sortis honorem.
Nicolai Michaelis Bonaiuti florentini epistula missa ad Averardum de Medicis explicit
a Averardum scripsi : -randum A || b crebro pc : crebo ac || c versus 16 post 17 transtulit scriba || d Et in marg. || e sine lite in ras. || f propria pc : propia ac || g quod in ras. || h firmauit in ras. || i proprio pc : propio ac || j Perusina pc : Peruisina ac || k versus 106 adiunctus est in marg. sup. (reproband)us in ras. || l propria pc : propia ac || m versus 131 post 132 transtulit scriba || n turgendo in ras. || o tormenta in ras. || p Cor Themistoclis (-todis A) ingens in ras. || q defendi in ras. || r patenter in ras. || s coacti in ras. || t moderato in ras. || u reddas in ras. || v dempta in ras. || w retribuas in ras.
2. Lettre de Niccolò di Michele Bonaiuti sous forme de prosopopée de Rome adressée aux habitants de l’Ausonie
Analyse
L’auteur de la lettre pleure sur les dévastations dont elle est la victime (v. 1-4). Les églises dont elle déplore la ruine s’élevaient jadis, glorieuses, au temps de Constantin guéri de la lèpre et du pape Sylvestre (v. 5-13), étaient embellies et réparées par les pontifes (v. 15-17) et les nobles (v. 18-21), et accueillaient les pèlerins en foule (v. 22-26). Aujourd’hui, les rares habitants sont trop pauvres pour réparer les sanctuaires, ou préfèrent (c’est le cas des prélats) s’adonner au lucre et à la luxure (v. 27-39) : les temples croulent, leurs toits s’effondrent, leurs portes sont brisées, leurs autels souillés de fientes d’oiseaux, leurs fresques ravagées par les intempéries (v. 40-48).
Si l’auteur de la lettre se lamente si fort, rien d’étonnant à cela : c’est Rome elle-même qui parle (v. 49-56). Elle se propose d’énumérer les églises ruinées ou désertées (v. 57-61) et en établit la longue liste. Chacun des items qui la composent est caractérisé plus ou moins précisément par une particularité historique, topographique ou architecturale, et par les traits spécifiques de sa déréliction actuelle (v. 62-159). Il s’agit, dans cet ordre, de : S. Stefano Rotondo (v. 64-70), S. Stefano delle Carozze (ou : al fiume) (v. 71-74), S. Stefano minore (v. 75-78), S. Salvatore della Porta ( ?) (v. 79- 81), S. Marcellino e Pietro (v. 82-84), S. Vitale (v. 85-87), S. Croce a Monte Mario ( ?) (v. 88-94), S. Prisca (v. 95-97), SS. Apostoli (v. 98-101), S. Ciriaco de Camiliano (v. 102-104), S. Maria Nuova (v. 105-108), S. Salvatore in Unda (v. 109-118), S. Anastasio ad aquas Salvias (v. 119-126), S. Lorenzo fuori le mura ( ?) (v. 127-130), S. Anastasia (v. 131-133), S. Maria della Navicella (v. 134-136), S. Susanna (v. 137-139), S. Giorgio in Vaticano ou S. Giorgio in Velabro (v. 140-142), S. Costanza (v. 143-146), S. Sebastiano (v. 147-149), l’église Domine quo vadis (v. 150-153), S. Maria in Cosmedin (v. 154-156)39. Ce développement se conclut par le « topos de l’ineffable » : il serait trop long d’énumérer toutes les églises endommagées... (v. 157-162).
Alors que Saint-Paul-Hors-les-Murs est complètement ruinée, plutôt que de la restaurer, les clercs préfèrent thésauriser (v. 163-175), les laïcs se livrer à des danses impudiques (v. 176-188) ou se passionner pour les jeux ridicules du Testaccio (v. 189-204) ; les nobles romains, bien oubliée l’ancienne vaillance guerrière de leur patrie, aiment mieux se battre contre des bêtes que de repousser l’ennemi (v. 205-215).
Aussi Rome fait-elle appel aux souverains d’Italie, aussi bien qu’aux citoyens des villes libres, pour entreprendre les restaurations nécessaires, surtout celle de Saint-Paul-Hors-les-Murs (v. 216-232). Ce sera une preuve de piété et de courage (v. 233-257). Qu’ils entreprennent donc cette grande œuvre (v. 257-261) !
Texte (d’après le ms. Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, Archivio di S. Pietro G 51 [A], f. 108v-113).
f. 108v Epistula Nicolai Michaelis Bonaiuti florentini missa in figura Rome ad homines Ausonie incipit
Cum mea respicio caro deserta uigore
Uiscera, seu magis a rabido lacerata furore,
Nil aliud mecum trepidanti pectore uoluo
Quam rigidum luctum seuo cum pondere pene. f. 109
5 Si mea corda forent celso †concessa† Tonante,
Templa Ihesu intus non essent uiolata ruinis,
Que totiens uideo in nostris penetralibus amplis,
Sed potius starent digno prefulta decorea,
Ceu quando ualidius princeps pietate perenni
10 Mundatus fuit e turpi purrigine lepre,
Cum sibi Siluester tribuit cum mente fideli
Iussa Dei uiui, depulso crimine prauo ;
Quod fieri statuit, commotus corde benigno,
Plures ecclesias sanctorum nomine dictas.
15 Postquam, pontifices magni feruore flagranti
Saluabant illas, adeo fundare parabant
Cum gazis alias almo pro lumine Christi.
Magnates homines pariter proceresque potentes
Et ualidi ciues sincero more citati
20 In laribus nostris quondam gessere libenter
Basilicas, ornando multis cum artibus ipsas.
Sic ego templorum miro splendore manebam,
Culta satis circumstabam, pulcherrima mater
Christicole turbe, miranda et sponsa ministri,
25 Sedes ecclesie toto sub cardine solis
Et laudata diu uariis regionibus orbis.
Menia nunc cerno solitis deserta colonis,
Templa Jhesu sistunt diruptis undique muris,
Paupertatis onus diro cum pondere ciues
30 Uexat et ipsorum rigide precordia ledit ;
Ymmo luxuriis cupiunt gaudere caterue,
Thesauros in eis etiam dispergere querunt
Et mea non curant deuote damna tueri, f. 109v
Nec digne querunt regis reparare superni
35 Basilicas sicut debent cum pondere gaze.
Pontifices pigro constant in corde grauati ;
Sic me dimittunt, caro feruore remoto,
Nullum presidii cupiunt prebere fauorem
Pro causa restaurandi cum uiribus illas ;
40 Quod restant uariis intus repleta ruinis,
Templa caduntb, adeo fracti fastigia tigni,
Sepe ruunt uaste nimio terrore columpne,
Quod rupte ualue sistunt in limine postis ;
Sunt altaria cum fimo maculata frequenter,
45 Sanctorum pictas species liuore procelle
Deuastant simul et sedes de marmore gestas,
Multotiens corrupto implent oracula ceno,
Sic intus maculant commotis imbribus ipsa.
Si totiens doleo tristi merore coacta,
50 Nil mirum, quoniam fulxi matrona sub axem
Regibus et ducibus populi et uenerata cateruis,
Famosis simul armigeris Mauortis in armis.
Non ego uana loquor, ficto cum tegmine uocis :
Roma quidem sum, mordaci repleta dolore
55 Cum uideo circum regis confractac perennis
Templa, simul fedo ceni precincta liquore.
Quod cupio fari, tristi merore citata,
Basilicas quasdam vasto pro turbine lesas,
Ut noscant homines iusto si pectore mota
60 Sum, quando recito luctus in corde refixos
Qui mea cum diro stimulo precordia torquent.
Tres quoque basilice dirupte nomen habebant f. 110
Sancti Stephani caris pro moribus eius.
Prima quidem speciem seruat formamque rotundam,
65 Que pulcherrima fulxit Celomonte locata.
Ipsius paries mansit de marmore cultus
Porfidii simul et uariis cum floribus actus ;
Et fuit intus cum multis ornata columpnis,
Nunc iacet in ceno, defracto tegmine tecti ;
70 Sunt altaria deiectis temerata lapillis.
Una quidem formam retinet seriemque rotundam
Marmoreis petris, iuxta namd fluminis undas
Est, sed habet quassatum sub uelamine tignum,
Siue ruunt uasto nymbi pro turbine muri.
75 Terna satis longo fruitur cum tramite forma,
Que fundata manet recto uestigia sancti
Basilice Petri ; fracti sunt undique postes
Ac are nimio ceni liuore comate.
Sed procul ad portam sacras que tendit ad edes
80 Doctoris Pauli, uideo constare sacellum,
Diruptis ualuis adeo sub cardine petris.
Non recito ceu Marcellini tecta ruerunt,
Nullus adhuc pastor digne reparauit et illa,
Quod sedes iacet infando sub pondere lesa.
85 Nolo monasterii uastam narrare ruinam
Sancti Vitalis, procerum que lumina turbat
Quando respiciunt ipsam cum ardore benigno.
Sed paulo replicans nostro sermone fatebor
Ceu templum cadit obscuram telluris ad aluum,
90 Quod, procul ad portam dictam cum nomine sancti
Petri, continuo pretendit limina postis, f. 110v
Quod, quando ueniunt peregrini a partibus amplis
Que lato solio Gallorum regis adherent
Aspiciunt ipsum, turbato et corde uacillant.
95 Prisca sui fractum cognoscit tegmen asili
Et sacras aras, necnon oracula lesa,
Sepe tuens illum maculari grandine densa.
Discipuli Domini Iacobus, pius inde Phylippus
Tecta ipsorum basilice pro uoce uocate
100 Rapta nimis, dempto solito uelamine, cernunt,
Quamuis pastor ea eximius reparare laboret.
Et sanctus Ciriacus habet sub fronte capellam
Quassatam ; simul absque suo cantore moratur,
Qui nimise atroci percussus principe cessit.
105 Et de musaico semet splendore comatum
Cognouit templum, precelsa parte locatum
Quam uere secum maiora Palactia seruant ;
Absque suis ualuis confracto limine sistit.
Hu mihi quam doleo uigilanti mente putando
110 Sicut opus Saluatoris mirabile mansit :
Musaico fulgore diu prefulxit et auro,
Marmore disculpto tenuit speciemque decoris,
De terra cocta cincte liuore columpne
Sunt eius. Crepitans ignis uastauit et illud :
115 Nemo uelut pridem pastor reparare citauit,
Et caput ecclesiarum amplis regionibus orbis
Est tamen imperiali pro sermone patratum
Nec non prestantis sincero pro ordine pape.
Sed quis homo puro fidei sermone citatus
120 Dicere Ladylai delictum corde reclusum f. 111
Nollet, cum, rabide maculato pectore uictus,
Ipse monasterio stabulas cum crimine gessit
Mitis Anastasii, precinctus milite seuo ?
Sic aras fedauit, sic oracula lesit,
125 Quod templum manet absque pio nunc ordine cleri,
Sed brute uacce fortassef locantur in illo.
Nunc replico sicut sancti deserta Lorei
Sunt altaria de ceno et sociata nefando ;
Quod pandit populo pariter quam ciuibus urbis
130 Dedecus ipsorum turpi liuore patratum.
Sicut Nastasie nimium dimissag moratur
Basilica et quasi tecta palam defracta fuerunth,
Quod crimen reprobat clerorum mente reclusum.
Non minus ecclesie sedes prefata Marie
135 Exigue puppis sacro sermone relicta
Restat adhuc ; recluse sistunt undique ualue.
Narro uelut templum Susanne stare uidetur
Absque suo clero, depulso pignore sacro,
Quod facinus procerum demonstrati pectore trusum.
140 Ipse Georgius infando liuore grauatum
Magnum pontificem, dempto uelamine, noscit,
Quod manet ipsius sedesj cantore fugato.
Et Constantia nunc eius spectare sacello
Sepe boues ualet ; et prestanti rege creata
145 Ipsa fuit, puro studio qui nomina Christi
Laudauit, quando Siluestri dicta recepit.
Stat Sebastianus simili cum pondere tactus,
Quod uidet ipsius templumk sine uoce canenti
Esse, simul sanctorum deuote ossa reseruat. f. 111v
150 Ac sine prepositis discernit cantibus edes
Eius asilus, ubi Petrus iam dixit Olimpi
Regi : « Quo cedis ? » Dominus respondit : « Ad Urbem
Pro causa rursus crucifiggi pondere leti. »
Nec non basilica eximie narrata Marie
155 Grecorum studii crebro clamore sonanti
Sepe relicta suo sacro cantore moratur.
Dicere si cunctas tardarem tempore longo
Ecclesias uellem clausas et turbine fractas,
Siue monasterii sancto cum nomine sedes
160 Diruptas ac hospitalis sermone repertas :
Quod plus quam centum, depulso corde labanti,
Esse palam fari ualeo, si uera fatemur.
Sed paulo cupio nostris sermonibus ipsas
Nunc dimittere, querendo recitare parumper
165 Flagitium fixum fallaci mente priorum
Clerorum, sacra qui conducunt frena fidelis
Ecclesie Christi, uano quod pectore uicti
Basilicam sancti Pauli sine tegmine cernunt
Ac altaria cum fractis sunt undique saxis
170 Nec reparare suis curant cum uiribus illa,
Nec digne tribuunt thesauri dona colonis
Pro causa merito seruandi oracula sacra
Ipsius, et latis almas penetralibus aras,
Et quassatum sub celso uelamine tignum
175 Siue fores sculptas adeo cum limine ualuas.
Non minus infando constant liuore grauati
Ciues et proceres nostro de semine creti,
Qui neque deuote celestis templa uigoris f. 112
Restaurare putant quodam cum pondere census,
180 Sed potius luxum uesano corde ministrant.
Infandas agitant prauo feruore calatas,
Cum sonitu ludos actant et cantibus, illas
Cum genitis socias ducunt dementer ad ipsas,
Siue †procas†, nimis optando lasciua Dyones,
185 Tunc uarias epulas pateras sumuntque Lyei.
Sic quoque thesauros malesano pectore perdunt
Luxuriis cito, quod potius prebere deceret
Pro causa circum reparandi templa Tonantis.
Nec minus insanol satagunt cum pectore ludos
190 Testacci40, quando stolide superare fatigant
Cornigeros tauros tectos et tegmine currus
Et fragiles porcos, sumptis fulgentibus armis,
Assatas carnes postquam captare laborant,
Cum sociis laudando dulcis munera Bacci,
195 Uel quicquid captis gladiis gessere patenter
Robustos tauros quando mactare citabant.
Sic ludos simulacrorum liuore grauati
Exagitant, nimium pressi uelamine falso
Mendacis Sathane, fictis et fraudibus eius.
200 Sic quoque thesauri cumulati pondera mittunt
In uiciis stolide fragili cum mente peractis
Quem citius debent animo donare fideli
Pro causa saluandi sancta oracula Christi
Ecclesiasquem simul positas in corpore nostro.
205 Heu pro me ! ualidi ciues pugnare solebant
Fortiter aduersum reges et tela falangis,
Multotiens ipsos ui debellare ualebant,
Latrones adeo rigida sub morte ligabant. f. 112v
Nunc sumunt coram brutis animalibus arma ;
210 Sic rixandon, uesane sua bella ministrant.
Si contra fultos longis legionibus hostes
Taliter in castris presto sua tela mouerent,
Sepe palam captarent mirum Martis honorem
Ac ego non essem rabidis spoliata tirannis
215 Nec totiens circum seuo predone grauata.
Postquam quod cleri tardando corde morantur
Ad restaurandum deuote templa Tonantis
Et ciues simili sistunt liuore coacti,
Uos precor, o ualidi proceres qui frena iubendi
220 Ducitis Hesperie, dominando partibus amplis,
Necnon urbanos, qui libertatis in aulis
Ausonie fasces caro feruore tenetis,
Quod mihi presidium cum animo donetis ameno,
Fortificando Dei uiui pulcherrima templa,
225 Que tantum nostra resident statione locata,
Sed potius Pauli celsi fastigia tecti
Que cecidere nimis quondam sub tempore longo.
Discite quod doctor socius pro culmine sacro
Stat primo pape simul et descendit ad edes
230 Constantini, cum Superi precepta recepit ;
Quod fieri statuit princeps regionibus orbis
Plurima templa Ihesu motus feruore fideli.
Discite quod tribui famam sub cardine solis
Ytalie ducibus uastis et honore colonis,
235 Uincendo reges urbes pariterque potentes,
Armigeras acies etiam cum pondere Martis,
Quod decus est uobis lato sub tramite mundi. f. 113
Ergo, depulso dubio, mea templa libenter
Cum feruenti debetis reparare uigore,
240 Cum multis opibus pariter tutamine denso,
Pro merito quoniam mirande laudis honorem
Exhibui uobis coram tot regibus orbis.
Pro caro decet et Pauli feruenter amore
Fortificare suam, fisci cum pondere, sedem,
245 Pro tali causa censum prebere colonis
Qui faciant illam solito uelamine cingi,
Quod fuit a Domino sancta de uirgine nato
Electus, causa dandi solamen Olimpi
Christicolis coram prestantis numine patris,
250 Quod dedit auxilium Superi cum lumine sacro
Regibus et populis, alme dictamina fando.
Necnon debetis caro pro nomine Christi,
Cum firmo studio pariter cum mole metalli,
Restaurare sui serui mirabile templum,
255 Si fidei donum sincero corde locetur,
Si Domini genitum puro laudatis amore,
Si Pauli dictus animo seruatis ouanti.
Cur ergo pigra tardando mente manetis ?
Cur neque cum gazis illud reparare citatis ?
260 Si cupitis secum celi gaudere theatroo,
Solicite sedes eius decorare parate.
Epistula Nicolai Michaelis Bonaiuti florentini missa in figura Rome ad homines Ausonie explicit
a Versus 7-8 in ras. || b cadunt scripsi : caduunt A || c confracta in ras. || d nam pc supra lineam || e nimis in ras. || f fortasse in ras. || g di(missa) in ras. || h fuerunt in ras. || i procerum demonstrat in ras. || j ipsius sedes in ras. || k templum in ras. || l insano scripsi : insauo A || m (Ecclesias)que pc supra lineam || n rixando scripsi : rissando A || o theatro in ras.
Notes de bas de page
1Je cite la première strophe de la ballade de Villon d’après l’édition de J. Cerquiglini-Toulet, François Villon. Œuvres complètes, Paris, Gallimard (Bibliothèque de la Pléiade), 2014, p. 53-55.
2J. Cerquiglini-Toulet, « À la recherche des pères : la liste des auteurs illustres à la fin du Moyen Âge », MLN – Modern Language Notes , 116/4, 2001), p. 630-643 ; M. Jeay, Le Commerce des mots. L’usage des listes dans la littérature médiévale (XIIe-XVe siècles), Genève, Droz (Publications romanes et françaises, 241), 2006, spécialement les p. 21-56 et 400-432 ; J.-C. Mühlethaler, « Liste de poètes, énumération des victimes d’amour : les enjeux d’un choix dans Le Cœur d’Amour Épris de René d’Anjou », dans A. Paschoud, J.-C. Mühlethaler (dir.), Poétiques de la liste (1460-1620). Entre clôture et ouverture (Versants, 56/1), Genève, Slatkine, 2009, p. 67-82.
3Les poèmes édités en annexe suffiront sans doute à donner une idée claire de ce naufrage poétique.
4J.-Y. Tilliette, « Un cas d’archaïsme littéraire au début du Quattrocento : l’œuvre poétique de Niccolò de Michele Bonaiuti », Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes, 94, 1982, p. 337-391 ; Id., Culture latine et public lettré à Florence vers 1400. Autour de Niccolò Bonaiuti, mémoire de l’École française de Rome présenté en 1983, 2 vol. Ce travail inédit est consultable dans les bibliothèques de l’École française de Rome et de l’Institut de France. Depuis lors, la bibliographie ne s’est guère enrichie que de l’article de P. Casciano, « Il pontificato di Martino V nei versi degli umanisti », dans M. Chiabò, G. D’Alessandro, P. Piacentini, C. Ranieri (dir.), Alle origini della nuova Roma (1417-1431), Rome, Istituto Storico Italiano per il Medio Evo, 1992, p. 143-161 (voir aussi, n. 19 et 28).
5Le seul renseignement sur sa famille que j’ai pu repérer est l’existence d’un frère, Jacopo, né en 1355, qui déclare 719 florins de fortune imposable au catasto florentin de 1427 (Catasto 777, fol. 281).
6Cacciaguida les qualifie d’oltracotata schiatta, che s’indraca/dietro a chi fugge (Commedia. Paradiso, 16, 115-116), « Outrecuidante race, qui s’endragonne sur ceux qui fuient » (trad. J.-C. Vegliante). Une présentation plus neutre de cette famille se trouve au t. 11 des Delizie degli eruditi toscani du P. Ildefonso di San Luigi, Florence, 1776, p. 219-263.
7Ces informations autobiographiques proviennent de trois lettres en vers adressées par Bonaiuti au cardinal Alamanno Adimari (ep. 3 et 19) et à l’humaniste Roberto de’ Rossi (ep. 13), transmises par le manuscrit Città del Vaticano, Archivio di San Pietro G 51, dont il sera abondamment question ci-dessous, aux folios 11v-12v, 53-55 et 73-75. La numérotation des lettres est due à J.-Y. Tilliette, « Un cas d’archaïsme littéraire… », art. cité, p. 380-391.
8Ms. Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, Archivio di San Pietro G 51, fol. 136-137, ep. 39 Carmina Nicolai Michaelis Bonaiuti florentini supra morte domini Alanni [sic].
9Ibid., fol. 123-123v, ep. 35.
10G. Mercati, Codici latini Pico Grimani Pio e di altra biblioteca ignota del secolo XVI... con una digressione per la storia dei codici di S. Pietro in Vaticano, Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, (Studi e testi, 75), 1938, p. 151-154. Le manuscrit G 52 contient le Liber sanctae Jerusalem, le manuscrit G 53 le Liber sanctae Basilicae, le manuscrit G 54 le Liber in figura Paradisi (fol. 1-50) et le Liber in figura sancti Sepulcri (fol. 51-80).
11Ms. Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, Barb. lat. 1786 (Liber sanctae Basilicae, fol. 1-90, Liber in figura Paradisi, fol. 91-138) ; Florence, Biblioteca Mediceo-Laurenziana, Plut. 25 sin. 3 (Liber sanctae Jerusalem) ; Plut. 35.40 (Liber sanctae Jerusalem en 16 livres) ; Plut. 91 sup. 47 (Liber in figura sancti Sepulcri) ; Plut. 91 sup. 48 (Liber sanctae Jerusalem) ; Biblioteca Riccardiana, 280 (Liber sanctae Jerusalem en 16 livres).
12J.-Y. Tilliette, « Un cas d’archaïsme littéraire… », art. cité, p. 361-364.
13S. J. Voicu, « Note sui palinsesti conservati nella Biblioteca apostolica vaticana », dans Miscellanea Bibliothecae apostolicae vaticanae, XVI, Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, 2009, p. 445-454, ici p. 453.
14Ce rythme pour le moins soutenu correspond toutefois à la déclaration triomphale que Bonaiuti formule à l’intention d’un de ses correspondants, l’humaniste Roberto de’ Rossi, Tunc ibi composui tribus in labentibus annis/Cum calamo texens, plus quam octo milia metra, « Au cours des trois ans écoulés, j’ai tissé avec mon calame plus de 8 000 vers » (ms. cité, fol. 54v).
15J. Chiffoleau, « Sur l’usage obsessionnel de la messe pour les morts à la fin du Moyen Âge », dans Faire croire. Modalités de la diffusion et de la réception du message religieux du XIIe au XVe siècle. Actes de la table ronde de Rome (22-23 juin 1979), Rome, École française de Rome, 1981, p. 236-256.
16La question est posée par Thomas d’Aquin, Summa theologiae, pars IIIa, qu. 47. 1.
17J.-Y. Tilliette, « Un cas d’archaïsme littéraire… », art. cité, p. 380-391.
18Epistula... missa ad Benedictum domini Phylippi de Adimaris, ms. cité, fol. 63-69v (ep. 17).
19Epistula... missa ad Siluestrum domini Phylippi de Adimaris, ms. cité, fol. 43-45v (ep. 10). Édition et commentaire de cette lettre par J.-Y. Tilliette, « Les leçons de l’Histoire : un document inédit sur le conclave mouvementé de 1378 », dans É. Mornet, F. Morenzoni (dir.), Milieux naturels, espaces sociaux. Études offertes à Robert Delort, Paris, Publications de la Sorbonne, 1997, p. 635-651.
20R. De Roover, The Rise and Decline of the Medici Bank, 1397-1494, Cambridge/Londres, Harvard University Press (Harvard Studies in Business History, 21), 1963, p. 37-39 ; D. Kent, The Rise of the Medici. Faction in Florence, 1426-1434, Oxford, Oxford University Press, 1978, p. 37-49 et passim. Averardo sera l’un des artisans les plus efficaces de la prise du pouvoir par son cousin Cosme.
21…meo sermone referri / quicquid ego teneo meditanti corde reclusum/pro tali studio dempto uelamine cogis (ep. 22, v. 8-10, ms. cité, fol. 83).
22M. Jeay, « Eustache Deschamps : la liste au service de la vituperatio », dans Id., Le Commerce des mots, p. 365-432.
23M. Melot, Livre,, Paris, L’Œil neuf, 2006, p. 73-75.
24Il échappe bien sûr tout à fait à mon propos de faire ici le point sur l’historiographie pléthorique de Florence à la fin du Moyen Âge. Sur les circonstances qui ont amené les élites économiques florentines à faire appel au duc d’Athènes, on peut se reporter à la synthèse récente de J. M. Najemy, A History of Florence. 1200-1575, Oxford, Blackwell, 2006, p. 124-144. Sur les effets culturels et moraux de l’événement, voir M. Becker, Florence in Transition, vol. 1, The Decline of the Commune, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1967, p. 123-230.
25J. M. Najemy, History of Florence, op. cit., p. 156-181. Sur le traumatisme durable que reflète la mémoire florentine, voir L. Baggioni, É. Leclerc, « Après les Ciompi : regards florentins sur le tumulte et construction politique de l’après-crise », Astérion, 15, 2016, mis en ligne le 15 novembre 2016, consulté le 4 août 2018, http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/asterion/2793 ; DOI : 10.4000/asterion.2793
26Ep. 37, ms. cité, fol. 127v-134.
27U. Eco, Vertige de la liste, trad. fr. M. Bouzaher, Paris, Flammarion, 2009.
28C. Revest, « La prise de Rome le 8 juin 1413, vue par les curialistes de Jean XXIII », dans S. Diacciati, L. Tanzini (dir.), Società e poteri nell’Italia medievale. Studi degli allievi per Jean-Claude Maire Vigueur, Rome, Viella, 2014, p. 131-146.
29Epistula… de uita humane generationis missa ad socium Achatem (ep. 31), ms. cité, fol. 113v-118.
30Les sources de ces contre-exemples parfois inattendus ne sont pas très faciles à repérer – scripturaires sans doute (Samuel, Daniel, David), peut-être hagiographiques (Benoît), mais la référence principale est selon toute vraisemblance aux sources figurées que commence à véhiculer alors la peinture toscane.
31Epistula… missa in figuram Rome ad papam Martinum quintum (ep. 20), ms. cité, fol. 75v-81.
32La source est ici l’Historia adversus paganos d’Orose, explicitement invoquée au fol. 77v.
33Le nouveau pape y est qualifié d’inclita progenies (voir P. Casciano, « Il pontificato di Martino V… », art. cité, p. 145).
34Les allusions plutôt elliptiques que fait Bonaiuti aux péripéties de la dictature du duc d’Athènes coïncident avec le récit plus circonstancié qu’en donnent les historiens du temps, Giovanni Villani (Nuova Cronica 13, 1-8, Giovanni Porta [éd.], Parme, Guanda, 1991, t. 3, p. 1424-1443) et Marchionne di Coppo Stefani (Cronaca Fiorentina, rubr. 553-585, Niccolò Rodolico éd., Città di Castello, Rerum Italicarum Scriptores, t. 30/1, 1903, p. 193-209).
35Sur le contexte historique, voir J.-Y. Tilliette, Culture latine…, op. cit., p. 187-188.
36Ibid., p. 188-189. On trouvera des détails sur le destin malheureux de ces personnages et les circonstances de leur chute dans la Cronaca fiorentina de Stefani, aux rubriques 814, 835-836 et 901-910 (éd. citée, p. 342-345, 358-360 et 392-401).
37Une bonne copie numérique de ce manuscrit est accessible sur le site de la Bibliothèque vaticane,
38Voir Lucain, Pharsale 4, 820, à propos de Curion : Gallorum captus spoliis et Caesaris auro.
39Pour l’identification de ces églises d’après les éléments de description parfois plutôt minces qu’en fournit Bonaiuti, voir J.-Y. Tilliette, Culture latine…, op. cit., p. 192-195.
40Sur le déroulement, et les enjeux sociaux et symboliques, des jeux du Testaccio, voir J.-C. Maire Vigueur, L’autre Rome. Une histoire des Romains à l’époque communale (XIIe-XIVe siècle), Paris, Tallandier, 2010, p. 178-184.
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