La défense passive à la CMP et à la RATP de 1930 à 1970
p. 93-103
Texte intégral
1Le métro a très vite su se rendre indispensable, en temps de paix, mais également en cas de grave menace militaire. Ainsi, durant la Seconde Guerre mondiale, le métro servit à la fois d’unique moyen de transport et de refuge pour plusieurs centaines de milliers de Parisiens. 11 fut au cœur du programme de protection des Parisiens. La particularité du métro parisien est de faire l’objet de nombreux débats, dès le début des années trente, sur une possible utilisation des souterrains comme abri pour la population civile. Il est, sur ce point, une exception mondiale1.
2Par ailleurs, la CMP, tout comme la STCRP, a montré très tôt un intérêt particulier pour la Défense passive et n’a cessé de collaborer activement avec les autorités en vue de protéger son personnel et les Parisiens de la manière la plus efficace possible. Les compagnies parisiennes de transports en commun sont, de ce point de vue, une exception nationale.
3Sur la question de la Défense passive (devenue après la Seconde Guerre mondiale la Protection civile), la RATP a conservé des fonds très importants. Ces archives inédites, très complètes2, témoignent à la fois de l’importance de cette question pour la CMP et de la place tenue par le métro dans le programme de Défense passive de Paris. Elles montrent également de quelle façon l’entreprise a protégé son personnel pendant la guerre.
4La notion de « Défense passive » se développe progressivement dans les années trente. Elle vise, par toutes les mesures possibles prises par les autorités, à limiter les conséquences de la guerre pour la population civile et, en tout premier lieu, celles des bombardements aériens. L’intérêt des pouvoirs publics pour la Défense passive est né d’une double constatation : l’instauration en Italie, puis en Allemagne, de gouvernements autoritaires crée une tension européenne croissante3 ; d’autre part, l’aviation, par les progrès considérables réalisés, constitue une menace pour Paris.
5La réflexion sur le type de protection à mettre en œuvre s’inspire d’un précédent : la Première Guerre mondiale a montré comment les Parisiens réagissaient face aux bombardements. En 1916 et 1918, la capitale a été bombardée à plusieurs reprises par des avions ou des zeppelins allemands et les Parisiens se réfugièrent, instinctivement, dans les stations du métro. Les autorités durent réagir4 et classèrent en abri, au second semestre 1916, « trente-sept stations du réseau métropolitain et du nord-sud »5, d’une profondeur supérieure à cinq mètres. La liste de ces abris était affichée dans les trains et les stations. Celles-ci bénéficiaient d’un aménagement sommaire, constitué principalement d’un éclairage de secours bleu et de motifs lumineux « Refuge », permettant de les repérer de l’extérieur. Il ne devait pas y avoir plus de 1 000 occupants par abri et les compagnies précisaient « [qu’]elles déclin[ai]ent, relativement aux incidents et aux accidents qui pourraient se produire dans ces stations, toute espèce de responsabilité »6. Les quelques aménagements ont été supprimés en 1919.
6Ces mesures empiriques servent de base à la réflexion menée durant la décennie 1930. Celle-ci évolue en parallèle constant avec le contexte européen. Il n’y a pas une doctrine, mais une multitude de projets modifiés et remis en cause, selon les changements politiques ou en fonction des progrès de l’industrie militaire. Un seul postulat semble incontournable : la Défense passive doit protéger la population des gaz. Les ravages qu’ils ont provoqués pendant la Première Guerre mondiale ont profondément traumatisé la population et les responsables politiques. Durant toute cette période, les gaz sont bien plus redoutés que les bombes incendiaires ou les bombes de 1 000 kilos7.
7Dès le début des années trente, les pouvoirs publics étudient la possibilité d’utiliser les souterrains du métro comme abri pour la population. En mai 1931, la préfecture de la Seine (service technique du métro) examine une possible « utilisation comme abris des lignes métropolitaines existantes » et envisage favorablement une « protection contre les gaz toxiques lourds »8. A partir de 1934, les premiers véritables projets s’organisent. Ils reprennent, en grande partie, les enseignements de la Première Guerre mondiale, en particulier la liste des abris classés en 1916. Les souterrains du métro sont au cœur des débats car « la population considère qu’elle trouverait dans le métropolitain un abri et d’elle-même s’y réfugierait [...] et les services de police se reconnaissent dans l’impossibilité de s’y opposer »9. La Compagnie du métropolitain est associée à ces réflexions et fournit une importante documentation sur les caractéristiques de son réseau. Les pouvoirs publics réclament, avant d’engager des sommes considérables, une expérience afin de prévoir les délais et les coûts de la transformation du métro en abri anti-gaz. En juillet 1935, ils demandent à la CMP de construire dans une station un abri prototype étanche aux gaz pour une éventuelle généralisation en cas de réussite. En quelques mois, deux abris sont construits dans les stations Place des Fêtes et Maison-Blanche10 à un coût unitaire très modeste de deux millions de francs.
8La construction de ces abris, achevée en mars 1936, est une prouesse technologique. Les essais effectués « sont beaucoup plus favorables [que la CMP] n’osait l’espérer »11. Ces abris se révèlent totalement étanches aux gaz et sont présentés comme les abris les plus grands12 et les plus sûrs du monde ce que ne manque pas de saluer la presse. Ils sont considérés comme invulnérables. En configuration anti-gaz, le tunnel est fermé par deux grandes portes métalliques et un poste de filtrage purifie l’air extérieur. Dans l’abri, un ventilateur assure une pression de l’air supérieure à l’air extérieur entrant avec les réfugiés. Devant le succès de l’expérience, la CMP estime qu’il est possible de construire ce type d’abri dans quatre-vingts, voire cent trente stations suffisamment profondes. La presse relaie largement cette information. La compagnie propose également la mise à l’abri des gaz de l’ensemble de la ligne 11 Châtelet-Porte des Lilas où « plus de 100 000 personnes pourraient [...] trouver refuge »13.
9Les pouvoirs publics doivent désormais décider de la création (ou non) d’un programme de Défense passive et de sa configuration. Mais les désaccords entre élus, administrations et experts sont source d’innombrables débats et retardent considérablement les décisions. La notion même de protection de la population civile en temps de guerre est combattue par certains qui la trouvent inutile ou dangereuse. Chez de nombreux élus et experts existe, en effet, une peur de « provoquer » l’adversaire. Développer la Défense passive pourrait faire croire à l’ennemi que la France se prépare à la guerre. En 1934 et 1935, le Parti communiste de Saint-Denis s’oppose énergiquement à la Défense passive, dénonce des « préparatifs guerriers », des « exercices odieux » et estime « [qu’] une telle évocation des horreurs les plus cruelles de la prochaine guerre traduit la menace des conflits qui se préparent ! »14. La majorité des élus estime au contraire qu’il n’est pas possible de laisser la population à la merci des raids aériens, d’autant que la presse exige des abris dans le métro.
10La Compagnie a participé très tôt et de façon constante aux projets d’aménagement du métro en abri. Cette attitude exceptionnelle pour une entreprise commerciale est déterminée par plusieurs raisons. D’une part, selon son directeur, la CMP tient à « justifier sa réputation en temps de guerre comme en temps de paix ». D’autre part, elle connaît la valeur des souterrains du métro (propriété de la Ville de Paris) et craint de subir, dans l’urgence, des aménagements très nuisibles à l’exploitation du réseau. Pour la compagnie, « la transformation des souterrains en abri [lui] pose [...] le grave problème de lui faire perdre, en cas d’hostilités, sa fonction de transporteur »15. Ainsi, durant la décennie 1930, la Compagnie adopte une position assez subtile en orientant progressivement les pouvoirs publics vers sa conception : elle milite pour que la partie du réseau exploitée soit totalement mise à l’abri des gaz et pour la construction d’abris anti-gaz dans la partie non exploitée16.
11Mais, de 1936 à 1938, en raison de positions techniques et politiques opposées et de coûts de construction très importants17 , la Défense passive en région parisienne se résume à une absence totale de décisions. Le premier programme visant à protéger Paris n’est voté que le 11 avril 1938, un mois après l’Anschluss. Près de quarante pour cent des sommes sont réservés à la mise à l’abri du réseau exploité et à la construction de grands abris publics, dans quelques stations très fréquentées. Lors de la grave crise de Munich, en septembre 1938, tout le monde constate que les Parisiens sont à la merci d’un bombardement. Devant la menace, les décisions sont désormais prises dans l’urgence et des coupes claires réduisent à plusieurs reprises le programme voté en avril 1938. La position de la Compagnie du métropolitain évolue également : face à une doctrine « qui consiste à tenir les stations fermées [tant] qu’elles ne seront pas [...] défendues contre les gaz », elle estime que « les parties non exploitées pourraient très bien recevoir des gens avec leur masque »18. Selon la compagnie, « la population ne manquerait pas de juger inhumaine la solution consistant dans la fermeture des souterrains qui sont tous à l’abri des éclats, [et] des bombes incendiaires »19. Cette conception d’une protection, sommaire mais disponible, dès la première alerte, est adoptée en 1939, en raison de son coût très inférieur et de son efficacité immédiate. Parallèlement, les travaux de protection contre les gaz du « réseau d’exploitation réduite » sont activement menés. Durant l’été 1939, vingt-huit stations profondes sont aménagées en refuges pour la population. La liste de ces refuges correspond à peu près à celle de la Première Guerre mondiale et leur répartition est tout aussi inégale puisque seulement trois se trouvent situés sur la rive gauche. Les stations aménagées ne sont pas étanches aux gaz et les réfugiés doivent y descendre avec leur masque.
12Lors de l’entrée en guerre, en septembre 1939, la protection offerte par le métro, bien que préparée depuis plusieurs années, apparaît très sommaire. Deux abris sont étanches au gaz (ceux de 1936), vingt-huit stations peuvent servir de refuge, et le réseau exploité est en cours d’aménagement contre les gaz. Les réalisations de la Défense passive de Paris ne semblent pas à la hauteur de la menace et n’ont, en tout cas, pas grand-chose à voir avec les grands projets du milieu des années trente20. Le métro est pourtant au cœur du dispositif de protection des Parisiens et doit, de fait, assumer une responsabilité considérable. Les autorités ont confié un autre rôle majeur au métro lors des premiers jours de guerre. Il doit contribuer à l’évacuation vers la province de ce que les militaires appellent les victimes gratuites (en particulier les enfants), et favoriser la mobilisation. Pour cela, le métro roule jour et nuit, môme pendant les alertes21, jusqu’au 14 septembre. De plus, avec la disparition du réseau de surface, le métro devient le seul transporteur de la capitale et supporte durant toute la guerre un trafic considérable. Pour le directeur de la CMP, « le transport doit primer l’abri. Mais il est certain que la population exigera l’abri pendant les alertes »22.
13Les deux compagnies de transports en commun ont aussi beaucoup travaillé pour protéger leur personnel. En raison de leur importance stratégique, elles devaient « assurer leur propre Défense passive »23. En premier lieu, celle de leur personnel. Des abris étanches aux gaz ont été construits, avant la guerre, dans plusieurs dépôts de la STCRP et sont en travaux dans les ateliers du métropolitain24. Ces derniers ont un rôle stratégique en cas de guerre, puisque le métro doit impérativement rouler. Au début de 1939, la CMP a proposé un vaste programme de protection de son personnel, comprenant des abris de soixante ou quatre cents places dans chacun des ateliers. Devant le coût important des travaux, elle demande une participation de l’État, qui est refusée en avril 1939 : « les abris envisagés par la Compagnie du métro pour son personnel sont d’une importance hors de proportion »25. Selon l’État, « il y a lieu de surseoir à [l’]exécution de ce programme »26. Malgré cette restriction, la protection du personnel est d’un très bon niveau. Les agents sont bien informés et protégés par des casques et des masques à gaz. Il est clair qu’en septembre 1939 « les transports en commun ont assurément la meilleure organisation de toute l’agglomération parisienne, en réalité du pays tout entier »27.
14Les premiers jours de l’entrée en guerre se caractérisent par une succession de fausses alertes. De nombreux Parisiens utilisent les stations-refuges du métro. Leur nombre est limité, car il n’y a pas assez de policiers pour en assurer la sécurité. Toutes les autres stations du réseau sont « interdites au public en cas d’alerte en raison du danger d’occupation »28. La liste des stations-refuges et des stations fermées est affichée dans les trains et à l’entrée des stations. Progressivement, le nombre de celles-ci augmente pour atteindre cinquante, au début de 1940. L’adaptation est rapide et les Parisiens se familiarisent, sans panique, avec les nombreuses coupures du courant de traction, la descente dans les stations lorsque l’on vient de l’extérieur et l’attente de la vérification des tunnels après l’alerte.
15L’entrée des Allemands à Paris modifie profondément la perception de la Défense passive. La France, vaincue et occupée, ne semble plus avoir à assurer une protection contre les bombardements. Devant l’absence de menace, la préfecture de Police remarque une « propension à l’insouciance [et une] facilité à tourner en plaisanterie les mesures de Défense passive »29. Ainsi, de moins en moins de réfugiés descendent dans les abris avec leur masque à gaz et les agents de la Défense passive ont du mal à se faire obéir. La compagnie elle-même reçoit plusieurs contraventions pour défaut d’occultation des lumières de ses locaux. Après plusieurs semaines d’hésitation, les Allemands décident de poursuivre les travaux dans le métro, en particulier ceux visant à le protéger des gaz. Ils font preuve de bien plus de sévérité que les autorités françaises dans l’application des mesures de Défense passive.
16A partir de 1942, les alertes deviennent extrêmement fréquentes. Le gros bombardement du 3 mars 1942 sur Boulogne permet d’apprécier le niveau réel de protection des stations-refuges. Une des conséquences de ce bombardement est peu connue, mais bien illustrée par les archives de la RATP. Les Allemands, prenant conscience de la valeur du métro comme abri et de la vulnérabilité de leurs troupes, réquisitionnent progressivement plusieurs dizaines de stations et les classent en « refuges réservés aux autorités d’Occupation ». Quelques stations, proches des casernes ou des cinémas allemands, avaient déjà été retenues en 1940 et 1941. La CMP soulignait alors que cette « utilisation toute nouvelle d’une station du métro » posait des problèmes « [puisqu’] elle nécessitera la discrimination des entrants »30. Ces stations réservées aux troupes d’Occupation sont moins profondes et, par là, moins sûres31. Pourtant, il est fréquent que des Français partagent ces stations avec les Allemands32, l’inverse étant beaucoup moins courant. En 1944, on compte près de quarante stations réservées aux Allemands.
17Plusieurs bombardements démontrent la résistance des abris du métro. Alors qu’on déplore des centaines de victimes dans les caves des immeubles pendant la guerre, peu d’incidents graves sont à relever dans les stations du métro, malgré une affluence considérable33. Certains journaux dénoncent les caves - ces abris « qui ne le sont que de nom »34 - et les autorités constatent que le métro, même à faible profondeur, est de loin l’abri le plus sûr. Il en est de même lors des bombardements d’avril 1943 et du printemps 1944. Plusieurs dizaines et parfois centaines de milliers de Parisiens se réfugient dans le métro. Le 26 avril 1944, 475 863 personnes (dont 14 648 Allemands) sont comptabilisées dans les stations-refuges, soit le double de leur capacité théorique35. Mais les importants bombardements, d’avril 1944, entraînent parfois un phénomène de panique dans la population. Le directeur de la CMP signale « la frénésie de certain public qui, non satisfait d’envahir les stations classées comme refuges, force l’entrée de stations ordinaires voisines du sol où la protection est à peu près nulle »36. Face au danger immédiat, la population retrouve un comportement instinctif, presque animal, impossible à maîtriser ainsi que l’avaient prévu les pouvoirs publics avant guerre.
18À la Libération de Paris, les travaux d’aménagement de la ligne 4 contre les gaz sont entièrement achevés et très avancés sur les lignes 3 et 7. A la fin de la guerre en 1945, les mesures de Défense passive deviennent inutiles et sont levées. Les travaux en cours sont arrêtés, mais le matériel et certaines installations sont entretenus pendant de nombreuses années car il y a « pénurie d’abri [pour le] public »37. En 1971, l’ensemble du matériel conservé (en particulier les portes) est liquidé, car obsolète.
19La fin de la Seconde Guerre mondiale a révélé au monde une arme terrifiante, la bombe atomique. Les rapides progrès dans ce domaine et l’intensité de la guerre froide apparaissent vite comme une nouvelle menace pour les grandes métropoles. Après le gaz dans les années trente, l’arme nucléaire devient pour les responsables militaires la hantise des années cinquante et soixante. Une fois encore, la RATP est l’une des premières entreprises à s’intéresser à cette question. Dès 1952, et plus spécialement à partir de 1959, des études secrètes menées par la Régie présentent des « devis relatifs à diverses installations pour rendre utilisables comme abris en cas de bombardement atomique [certaines] parties du souterrain du métro »38. De même, les pouvoirs publics envisagent une possible utilisation des futurs tunnels du RER mais renoncent, en raison d’un coût prohibitif. La qualité de la protection potentielle des souterrains contre les radiations et l’onde de choc est néanmoins soulignée. Régulièrement, des études font le point sur les différentes menaces (chimiques, bactériologiques et nucléaires) pour la population, mais les archives RATP des vingt dernières années dans ce domaine ne sont pas encore publiques.
20Il faut remarquer que le métro joue, depuis le début du siècle, un rôle particulier en cas de guerre ou de crise grave menaçant la capitale. Pour les responsables politiques et militaires, il représente un formidable équipement apte à protéger massivement et relativement facilement la population civile. L’organisation de la Défense passive à la CMP pour la protection de son personnel ou de celle des Parisiens fut une réussite saluée par tous les spécialistes’39. Les deux abris anti-gaz de 1936 et la cinquantaine de stations-refuges peuvent être considérés comme des premières mondiales. Le métro, envisagé très tôt comme possible abri pour la population, fut un élément essentiel du programme de Défense passive de la région parisienne pendant la Seconde Guerre mondiale.
21Cependant, les grands projets envisagés au milieu des années trente n’ont été que partiellement réalisés. Ce sont en fait les propositions de la CMP, plus modestes mais plus réalistes, qui ont été appliquées. Il faut toutefois remarquer que le métro et ses usagers ont été à la merci de l’utilisation des gaz durant toute la guerre. Néanmoins, la protection offerte par les souterrains du métro s’est révélée très efficace, à la fois en quantité (plusieurs centaines de milliers de personnes pouvaient s’y réfugier en même temps) et en qualité. Les abris du métro ont ainsi limité les conséquences de la guerre pour la population civile et ont parfaitement rempli leur mission de Défense passive. Le métro fut en réalité le meilleur abri de Paris.
Notes de bas de page
1 Les métros de Madrid, Londres et Moscou ont accueilli des réfugiés pendant les bombardements mais n’avaient pas été aménagés dans ce but.
2 Ces archives proviennent de plusieurs directions de la CMP et sont constituées de la correspondance avec les autorités (françaises mais également allemandes), de textes législatifs, de plans, de photos, de nombreux articles de presse et de documentations étrangères.
3 De plus, les Allemands ont pris d’importantes mesures de défense passive depuis 1927 et les développent considérablement à partir de l’arrivée des nazis au pouvoir en 1933. Ils ont alors beaucoup d’avance sur la France.
4 Les premières lignes de métro ayant été construites près du sol, de nombreuses stations n’étaient pas assez profondes pour protéger des obus et étaient donc potentiellement dangereuses.
5 Archives RATP, Cote 2T. Ces stations étaient principalement situées dans les 18e et 19e arrondissements, sous la butte Montmartre et les Buttes-Chaumont.
6 Archives RATP, cote N, archives de l’ex-direction des Travaux neufs, sous-série GAL, CH.7, D.1. « Liste des [trente-sept] stations classées comme abris en cas d’alerte » de 1916, affichée dans les trains et les stations.
7 Les autorités françaises connaissent bien les très importants progrès techniques de l’industrie allemande. Elles redoutent en particulier les éventuelles « trouvailles » chimiques voire bactériologiques des puissantes entreprises germaniques. La crainte d’une utilisation massive des gaz est corroborée, en 1934, par la révélation, par la presse, d’essais de propagation de microbes par les Allemands dans les métros de Paris et de Londres.
8 Archives RATP, Cote 2T (cote N, sous-série GEN). Note sommaire concernant le métro du 18 mai 1931, Service technique du métro.
9 Archives RATP, Cote 2T. Note du 11 mai 1935 du directeur général des Travaux [préfecture de la Seine] au directeur général des Transports, de l’Extension et de l’Inspection générale [préfecture de la Seine] sur l’utilisation du métro.
10 Archives RATP, Cote 2T (cote N, sous-série GAL, CH. A, D.3, S/D. 3). Le choix de ces deux stations a des origines bien distinctes. La station Place des Fêtes (ligne 11) est une des plus profondes du réseau (vingt-quatre mètres). Pour Maison-Blanche (peu profonde), la sélection correspond à des motivations politiques : pour la commission de Défense passive (conseil général de la Seine), « on ne peut envisager [...] que cet essai ait lieu dans un quartier bourgeois, 16e ou 17e par exemple, de crainte de subir des critiques d’ordre politique. Le 13e arrondissement possède au contraire une population essentiellement ouvrière dont on ne paraîtrait pas ainsi négliger la protection ».
Compte rendu du 7 mai 1935 d’une conversation confidentielle entre le directeur des Travaux neufs de la CMP et l’inspecteur adjoint du service technique du métropolitain [préfecture de la Seine], sur l’utilisation des souterrains du métro pour la Défense passive contre les gaz.
11 Archives RATP, lettre personnelle du 22 mars 1939 du directeur général de la CMP au secrétaire général du ministère de la Défense nationale.
12 N. Didon, op. cit., p. 25-28. Selon les sources, ils peuvent contenir de 4 000 à 8 000 personnes chacun, à raison d’une personne par mètre carré.
13 Archives de Paris, Cote D33Z/3. Document sans auteur du 7 août 1936 intitulé : « Au sujet des abris à prévoir pour la Défense passive ».
14 Archives de Saint-Denis, extrait d’un article du 9 juin 1934 de l’hebdomadaire communiste de la ville de Saint-Denis, L ‘Emancipation. À noter que les militants du Parti communiste vont jusqu’à saboter les quelques manœuvres de Défense passive organisées à Paris (en particulier l’occultation de l’éclairage) en utilisant des feux de Bengale.
15 Archives RATP, Cote 21. Rapport du 20 mai 1936 de la CMP.
16 En cas de guerre, toutes les lignes aériennes (ou ayant une portion aérienne) cesseront d’être exploitées, en raison de leur vulnérabilité.
17 La Défense passive a cette caractéristique, pénible pour les élus, d’être très onéreuse sans que l’on soit sûr de l’utilité des aménagements. Sans guerre, l’argent est dépensé pour rien !
18 Archives de Paris, Cote D33Z/3. Procès-verbal de la réunion de la sous-commission des abris du conseil général de la Seine du 27 octobre 1938.
19 Idem.
20 Quatre-vingts stations devaient être protégées des gaz.
21 Durant la Seconde Guerre mondiale, il y a en tout 427 alertes dont dix-huit durant la mobilisation, 403 durant l’Occupation et six après la Libération de Paris.
22 Archives RATP, Cote 2T. Note du 7 septembre 1939 du directeur de la CMP.
23 Archives RATP, Cote 2T. Rapport classé confidentiel du 28 mars 1935 de la direction de la CMP.
24 À la fin de la guerre, sont achevés les abris anti-gaz des ateliers de Vaugirard et de Saint-Ouen (400 places) et ceux des gares Massy-Palaiseau, Massy-Verrières et Antony. Par ailleurs, depuis 1936, la Boucle de Villiers (ex-terminus de la ligne 3) est aménagée en abri de commandement étanche aux gaz. Il est à noter que quelques abris ont été conservés jusqu’à ce jour dans certains dépôts de bus.
25 Archives RATP, Cote 2T. Note du 18 avril 1939 de la direction générale des Travaux de Paris au préfet de la Seine.
26 Archives RATP, Cote 2T. Lettre du 19 mai 1939 du service de surveillance de la gestion du métro à la CMP.
27 Archives RATP, Cote 1G. Rapport des conseillers techniques de la RATP, en matière de protection civile : « la protection civile et la RATP », octobre 1964. De nombreuses entreprises (par exemple la société Citroën) sollicitent la CMP pour utiliser les stations-refuges lors des premières alertes car elles n’ont rien prévu pour protéger leur personnel.
28 Archives RATP, Cote 2T. Note interne sans date [juillet 1940 ?] de la direction des Services techniques et des Travaux de la CMP. Malgré cette interdiction, de nombreux Parisiens se réfugient lors des premières alertes dans des stations non protégées. Comme l’avait prévu la CMP, la réaction est instinctive et impossible à empêcher.
29 Archives RATP, Cote 3R, fonds Bus, sous-série 39-45, boîte 16, VIN. Compte rendu classé Secret de la conférence du 17 au 21 novembre 1941 inclus [sur la demande des autorités d’occupation] à la préfecture de Police. Cette même constatation est faite dans les mois précédant l’occupation allemande
30 Archives RATP, Cote 1G., boîte 038-007, A/1.4.2, VIN. Le directeur du métro indiquait en 1940 que « si l’alerte se produit pendant les heures de service, le public devrait être invité à quitter la station alors que les [Allemands] seraient admis à y pénétrer ». Lettre du 2 novembre 1940 du directeur de la CMP au secrétaire général permanent de la Défense passive.
31 Toutes les stations, suffisamment profondes pour protéger la population, servent déjà d’abri. Les Allemands doivent réquisitionner des stations qui ont moins de six mètres de profondeur.
32 Ainsi, par exemple, il y a le 13 novembre 1942 à Marbeuf, 1 500 Allemands et 500 Français, à Rond-Point des Champs-Elysées, le 15 novembre 1942, 400 Allemands et 500 Français, et le 18 novembre 1942 dans la même station 350 Allemands et 450 Français. Ces stations offrent un « complément » aux stations-refuges classiques, très mal réparties dans Paris. La rive gauche, en particulier, bénéficie d’une dizaine de ces stations.
33 Les archives de la RATP relèvent le plus souvent des chutes (dans l’escalier ou sur la voie), des bousculades ou des malaises. Ces incidents ont souvent lieu les jours suivants les bombardements. Le réseau a toutefois été plusieurs fois endommagé, en particulier en avril 1943, aux stations Billancourt et Pont-de-Sèvres et, en avril 1944, autour de la gare de La Chapelle. En juin 1944, les gares de Massy-Palaiseau et Massy-Verrières sur la ligne de Sceaux sont presque entièrement détruites.
34 Archives RATP, Les Services publics, 11 mars 1942. 27 250 caves ont été recensées à Paris avant-guerre comme pouvant servir d’abri, mais leur inventaire a souvent été fait de manière trop rapide. En 1938, plusieurs conseillers municipaux de Paris estimaient que l’éloge de ces caves « est un bourrage de crânes comme au mois d’août 1914 ». Séance du conseil municipal de Paris du 16 mars 1938.
35 Archives RATP, Cote 2T. Lors de cette alerte, il y a plus de trois personnes par mètre carré (une seule est théoriquement admise) dans les stations situées autour de la butte Montmartre. Cote N, sous-série GAL, CH.6, D.5, cette promiscuité n’est pas sans inconvénient : un réfugié témoigne qu’à la station Havre-Caumartin le « 26 courant, pendant l’alerte de nuit, une dangereuse quantité de moustiques incommodait les occupants de cet abri » et que « les waters sous tunnel sont dans un état de saleté repoussante, des centaines de personnes les occupent et tout cela sans eau », réclamation d’un réfugié, le 27 avril 1944, à la direction du service de l’Hygiène (préfecture de la Seine). Ce témoignage est un des rares documents relatant la « vie quotidienne » dans les abris du métro.
36 Archives RATP, Cote 2T. Lettre du 25 avril 1944 du directeur de la CMP au préfet de Police.
37 Archives RATP, Cote 1G. Note du directeur général adjoint de la RATP du 15 janvier 1962.
38 Archives RATP, Cote 1G. Étude de la RATP du 23 décembre 1959 sur l’utilisation du souterrain du métro comme abri en cas de bombardement atomique.
39 Archives de la RATP, Cote 1G. Un rapport de 1964 des conseillers techniques de la Régie, en matière de protection civile, souligne qu’« aucun grand organisme officiel ou privé n’a aussi bien œuvré, dans le passé, pour la protection de la population parisienne et pour la sauvegarde de son personnel que la CMP et la STCRP ».
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