Chapitre 9. Faire du marché la terre d’élection de la démocratie communautaire
p. 189-202
Texte intégral
Le processus de l’économie du marché est donc en quelque sorte un « plébiscite de tous les jours » ; chaque franc dépensé par le consommateur représente un bulletin de vote et les producteurs font, par leur publicité, de la « propagande électorale » en faveur d’un nombre illimité de partis (c’est-à-dire d’articles). Cette démocratie des consommateurs a évidemment un défaut d’ailleurs corrigible dans une certaine mesure : les bulletins de vote sont distribués très inégalement. Mais ce défaut est en partie compensé par l’avantage d’une représentation proportionnelle parfaite : les minorités ne sont pas écrasées par les majorités et chaque bulletin de vote est valable. Nous avons ainsi une démocratie du marché qui, dans sa précision implicite, surpasse la démocratie politique la plus parfaite.
Wilhelm Ropke, La crise de notre temps, trad. par H. Faesi et C. Reichard, Neuchâtel, La Baconnière, 1945 [1942], p. 115.
1Nous venons de voir que le marché concurrentiel, encadré par une Constitution et une stricte séparation des pouvoirs, poursuivait des objectifs à la fois économiques et sociaux. L’efficacité que cet équilibre institutionnel a eue sur l’économie allemande a légitimé sa traduction dans l’ordre communautaire européen, de sorte que l’économie sociale de marché est bientôt devenue l’emblème du processus d’intégration dans les années 1980-1990.
2Il s’agit à présent de nous intéresser aux répercussions politiques de ce retour à l’ordre par le marché. Dans quelle mesure le marché concurrentiel peut-il servir de métaphore à la compétition politique qui se joue dans une démocratie libérale ? Jusqu’à quel point la monnaie remplace-t-elle le bulletin de vote, les articles les partis, les producteurs les campagnes électorales, les consommateurs les citoyens en somme, la « démocratie du marché » la « démocratie politique » ?
3Plutôt que de ne voir dans la métaphore de Ropke qu’une image frappante et commode, prenons-la au sérieux. En 1942, soit l’année même où Ropke publie sa Crise de notre temps, Schumpeter écrit dans Capitalisme, socialisme et démocratie :
La méthode démocratique est le système institutionnel, aboutissant à des décisions politiques, dans lequel des individus acquièrent le pouvoir de statuer sur ces décisions à l’issue d’une lutte concurrentielle portant sur les votes du peuple1.
4Ce qui fait dire à Lucien-Pierre Bouchard qu’avec Schumpeter
la démocratie devient un marché politique. [...] La bataille pour la direction politique remplace la concurrence industrielle, l’électeur tient le rôle du consommateur, le politicien, celui de l’entrepreneur, le parti, celui des entreprises, et le profit se calcule en pouvoir2.
5L’image est donc dans l’esprit du temps. Néanmoins, Ropke semble franchir un pas supplémentaire en concluant que, « dans sa précision implicite », « la démocratie du marché surpasse la démocratie politique la plus parfaite ». Non seulement, la perfection reposerait sur un critère de précision, ce qui place indubitablement l’efficacité du côté de la rigueur, et la légitimité du côté de l’efficacité. Mais de surcroît, la « démocratie du marché » n’est plus « la forme la plus parfaite de démocratie » ce qui semble encore être le cas chez Schumpeter -, elle est autre chose, qui « la surpasse ». À tel point qu’à terme, le marché concurrentiel pourrait se substituer au pluralisme démocratique et à la compétition électorale.
6Ce positionnement « radical », pour reprendre la terminologie de Ropke, nous semble devoir être analysé à l’aune de son discours explicite et implicite. Commune à la plupart des penseurs du retour à l’ordre, la dimension explicite de la thérapeutique ordolibérale met en avant la nécessité de « déprolétariser » la société européenne. Pour ce faire, une « élite » devrait momentanément diriger les affaires de la cité de manière à « revitaliser » les forces productives. Celles-ci n’étant plus en capacité de s’autogouverner à cause de la « crise de civilisation » dans laquelle les a jetées le libéralisme « manchestérien », elles auraient tout intérêt à se laisser guider vers le recouvrement de leur « souveraineté économique » plutôt que politique. La dimension implicite du diagnostic ordolibéral est, quant à elle, perceptible dans l’intertexte de La crise de notre temps, notamment dans ce terme intraduisible que Spinelli a si justement perçu comme l’un des enjeux clés de l’ouvrage de Ropke : la Vermassung ; soit le processus de « massification » qu’ont connu l’ensemble des démocraties libérales européennes au début du xxe siècle. Le traducteur français recourt, sans conviction, au terme « grégarisme » pour définir ce terme ; la limite de ce choix étant qu’il ne rend pas compte du processus à l’œuvre dans le terme allemand de Vermassung. Par ailleurs, selon les contextes, Vermassung peut renvoyer à l’idée de nivellement, ce que ne recouvre pas « grégarisme ». Toujours est-il que ce « devenir-masse » inhérent à la démocratie est ce contre quoi des penseurs comme Ropke, Eucken ou Rüstow tentent d’immuniser les sociétés post-totalitaires d’Europe. Parce que la démocratie politique peut toujours se transformer en « pléthocratie », elle demeure structurellement inférieure à la « démocratie du marché » dans laquelle la multiplication des consommateurs s’avère un facteur de rendement. Puisque la Vermassung est un phénomène inévitable, il s’agit de la canaliser dans un espace où elle sera vectrice de richesse plutôt que de désordre. On retrouve ici les critiques du Nombre qui affleuraient déjà dans les généalogies personnaliste et fédéraliste. Mais la critique est ici prescriptive puisqu’elle entend transformer le citoyen en « entrepreneur de lui-même » ce qui se concrétise, dans la pensée de Ropke par une diminution du nombre d’ouvriers au profit des artisans et des paysans et en consommateur.
7Après avoir étudié, dans un cadre strictement théorique, les principaux enjeux du diagnostic et de la thérapeutique mis en avant par les penseurs du retour à l’ordre, nous verrons comment cette vision a influencé la matrice de démocratisation de la Communauté européenne. Si la citoyenneté européenne semble s’être, en partie, calquée sur la praxis des droits et de la souveraineté des consommateurs, nous nous demanderons si un « peuple européen » peut se construire sur le double postulat d’une « démocratie de marché » et d’une « communauté de consommateurs ».
La théorie démocratique de la pensée ordolibérale
8Avant d’aborder la théorie démocratique de la pensée ordolibérale, il convient de la recontextualiser. L’ordolibéralisme est né dans les rangs de la résistance au régime nazi et s’est développé dans une dénonciation radicale du totalitarisme. Précisément, pour Ropke, c’est la Vermassung produit du « laissez-faire » manchestérien et du désordre politique de la République de Weimar qui a rendu possible l’avènement d’un État-Léviathan de type totalitaire. En témoigne à son tour Rüstow :
La structure parlementaire, démocratique, de certains États économiquement leader a rendu possible que la corruption économique se propage à la politique interne de l’État, aux partis politiques, et au parlementarisme lui-même. Les partis politiques furent progressivement transformés en agences parlementaires de groupes de pression économique, et financés par ces derniers. [...] Une crise du parlementarisme, en réalité une crise de l’État lui-même, en fut le produit inévitable [...].
En conséquence, en Italie et en Allemagne [...] le jeu du pluralisme
aboutit à la dictature totalitaire d’un parti unique3.
9Une économie politique capable de s’attaquer aux insuffisances de la démocratie libérale pluraliste s’avère donc capitale pour les penseurs du retour à l’ordre. Sur le plan économique, cela revient à encadrer le libéralisme afin de prévenir tout risque d’anomie. Sur le plan politique, cela passe par une lutte contre l’instabilité du débat parlementaire et l’immunisation du pluralisme contre la pénétration du Nombre. À la faiblesse de la République de Weimar, il s’agit dès lors d’opposer une nouvelle organisation du pouvoir politique. Comme le résume Raphaël Fèvre : « Le gouvernement doit être exercé par un État “fort”, dans un sens premier d’incorruptibilité et d’imperméabilité totale aux pressions potentielles des groupes d’intérêt4. » L’État ne doit plus se contenter d’arbitrer le dissensus, il doit neutraliser la dimension cacophonique de la démocratie afin de rendre au pouvoir son autorité et son audibilité. Dans ce contexte, la réaction politique des penseurs ordolibéraux se manifeste sur deux fronts : l’immunisation de la démocratie contre toute dérive pléthocratique totalisante et la substitution, par les élites et pour les consommateurs, du pouvoir de l’État à la souveraineté du peuple.
Du diagnostic : « grégarisme » et « pléthocratie »...
10Dans son introduction, intitulée « Le grand interrègne. Le grégarisme le tiers chemin », Ropke fait de la Vermassung l’une des explications capitales de la crise de civilisation qui corrompt l’Europe depuis une centaine d’années :
Les maux qui accablent la société des pays occidentaux depuis plus de cent ans sont caractérisés par un effritement et un tassement détruisant peu à peu toute sa structure. En allemand on a appelé ce phénomène : Vermassung difficilement traduisible par le terme : grégarisme pour désigner la formation de masses amorphes et sans cohésion5.
11Se référant tantôt à Tocqueville, tantôt à Ortega y Gasset, Ropke part du postulat que l’égalisation des conditions, fruit « pourri » de l’état démocratique moderne, a nivelé la communauté humaine. L’ancienne organisation s’est ainsi « décomposée en masses d’individus abstraits, aussi isolés et solitaires en leur qualité d’hommes qu’entassés comme des termites, en tant que porteurs de fonctions sociales6 ». Outre le fait que la terminologie de Ropke résonne singulièrement avec celle de Mounier quand il se réfère à la « structure hiérarchique », à l’« ordre des fonctions », au « rôle des vraies communautés », en l’occurrence « la famille, la commune, la profession », son portrait de la décadence contemporaine dévoile en creux une théorie politique radicalement « antidémocratique »7. De fait, le peuple-demos est la figure absente du texte de Ropke. Si le peuple-ethnos est brièvement suggéré pour saluer ceux qui se reconnaissent dans « l’amour [du] pays, l’attachement aux traditions nationales, culturelles et historiques8 », deux autres figures l’une explicite, l’autre implicite expriment la méfiance que l’auteur nourrit à l’endroit du peuple : celle du peuple-plethos (la masse) et celle du peuple-okhlos (le vulgaire). Là où ces deux notions sont théoriquement distinctes le plethos relevant du nombre inhérent à la démocratie tandis que l’okhlos renvoie à l’infection de ce nombre par les supposés instincts uniformisants et totalisants qui suturent la multitude -, Ropke arrime le nombre au vulgaire. La masse, précise l’auteur, n’est pas entendue dans son acception sociale ; elle ne renvoie pas ici au « petit peuple » mais à la société « dégénérée » qui a s’est progressivement détournée de ses repères cardinaux (religion, famille, profession) :
Il serait aussi faux que présomptueux d’assimiler ce terme de « masse » aux couches populaires à petits revenus ou de peu de propriété. Bien au contraire, il s’agit d’un processus de dégénérescence indépendant de l’échelle des revenus, dont certaines classes peu aisées sont encore le moins atteintes, comme par exemple celles des paysans et des artisans9.
12« Terribles, en masses innombrables10 », les individus « atomisés » de la nouvelle société « prolétarisée » constituent deux types d’organisation humaine : l’une socio-économique (le « grégarisme »), l’autre politique (la « pléthocratie11 »). La première s’exprime par un ensauvagement de l’esprit, du goût et de la culture12 ; la seconde, par l’avènement de « l’État autoritaire et collectiviste des masses13 ». Reprenant et informant le diagnostic de Tocqueville selon lequel l’état social démocratique influence nécessairement l’organisation du pouvoir politique, Ropke considère que le grégarisme et la pléthocratie concourent ensemble à une « crise de la démocratie » sans précédent, autrement dit :
Méconnaissance dogmatique des conditions et des limites régissant le principe démocratique et libéral ; [...] revendications brutales formulées par des multitudes d’intéressés ; fanatisme des minorités ; baisse du niveau général ; méconnaissance des conditions nécessaires à une structure démocratique bien ordonnée et des sacrifices indispensables qu’elle entraîne14.
13En conséquence de quoi,
une centralisation et un bureaucratisme toujours plus puissants ont mécanisé l’État, aux dépens de sa structure verticale et organique, fondée sur le fédéralisme ou sur l’autonomie communale, précipitant ainsi le mouvement niveleur du grégarisme [...], et le transposant ensuite dans le domaine de la constitution et de l’administration15.
14Si bien que grégarisme social et pléthocratie politique se nourrissent l’un l’autre aux dépens de l’État, pilier de l’ordre social et de la stabilité politique. La « crise de la démocratie » ne renvoie donc pas tant ici à un dysfonctionnement mécanique de ses institutions qu’à une dégénérescence sociale à l’origine du désordre politique. Seule une thérapeutique fondée sur la réappropriation des affaires politiques par une élite raisonnable et sur la traduction du plethos politique en une communauté de consommateurs peut encore prétendre sauver la société européenne d’après-guerre.
... à la thérapeutique : « aristocratie » et « démocratie des consommateurs »
15Pour Ropke, l’administration des affaires publiques doit être ventilée dans une nouvelle économie du pouvoir politique. Méfiant vis-à-vis de la représentation parlementaire et proportionnelle, l’idéologue du retour à l’ordre entend recréer les conditions de possibilité d’une « aristocratie » composée d’experts et d’« hommes raisonnables ». Ce faisant, il s’agit de tourner la page d’un siècle d’« anarchie organisée » au cours duquel parce qu’on avait « trop de Rousseau et de Voltaire et pas assez de Montesquieu » ont été « confondu[s] la violence avec l’ordre, la tradition, l’autorité et la hiérarchie »16. À tel point qu’on n’a plus su « distinguer l’aristocratie de l’aristie » (sic) et qu’on a « cru devoir se débarrasser non seulement d’une hiérarchie vivant d’exploitation [...] mais encore de la hiérarchie tout court ». On a alors oublié « que sans hiérarchie, c’est-à-dire sans ordonnance verticale et horizontale, une société ne peut exister et qu’un système social et économique dont le seul élément d’ordre est la liberté, signifie d’abord la dissolution, puis le despotisme17 ». Afin de rendre à l’aristocratie sa capacité de commandement sans risquer de retomber dans l’« aristie » de l’Ancien Régime, Ropke revendique une stricte délimitation entre les affaires relevant du public donc de l’État et celles relevant du privé domaine des communautés naturelles prépolitiques (famille, religion, profession)18 . S’agissant des affaires qui échouent à l’État, Ropke défend l’idée que le « bon gouvernement » doit reposer sur une épistémocratie au sein de laquelle la magistrature domine :
Nulle part ailleurs, l’intégrité et l’impartialité de la magistrature ne semblent si entières que parmi les juges. Nulle part on ne trouve une confiance plus grande et une disposition plus évidente à accepter comme décision souveraine les solutions adoptées. Nulle part ailleurs, non plus, nous ne trouverons exprimée à un pareil degré l’aversion d’exercer une influence illégitime sur les décisions. Les tribunaux d’un pays sont, en effet, la dernière citadelle de l’autorité de l’État et de la confiance en l’État, et un gouvernement n’est pas encore en voie de dissolution tant que cette citadelle tient19.
16La légitimité des ordres politique et économique doit donc reposer sur une Constitution que seuls les juges seront à même de faire respecter20. Non seulement ceux-ci sont supposés incorruptibles contrairement aux parlementaires mais, de surcroît, ils échappent aux aléas des scrutins électoraux, ce qui immunise la démocratie libérale de son penchant pour l’« anarchie organisée ». En effet, comme le précise Fèvre, « [l’]élitisme [ropkien] s’incarne non seulement dans une certaine méfiance vis-à-vis de la capacité des masses à choisir les meilleures solutions et à s’exprimer en leur faveur, mais également dans leur capacité à élire les bons représentants21 ». Ropke va même jusqu’à remettre en cause l’iségorie du suffrage universel en revenant au principe du vote censitaire. Celui-ci ne repose plus alors sur le patrimoine mais sur la compétence et le mérite. Ainsi propose-t-il que « plusieurs voix [soient accordées] aux chefs de famille et à ceux qui se sont distingués dans leur profession22 ».
17Cela étant, pour Ropke, ce n’est pas tant dans le domaine politique institué par la constitution et sauvegardé par les tribunaux juridictionnels que les citoyens les plus méritants sont appelés à exprimer leur souveraineté. En fait, observe Févre, « tout se passe comme si la souveraineté populaire se déplaçait de la sphère politique vers la sphère économique » :
La souveraineté n’existe plus tellement par la représentativité ou par
l’impact de la volonté populaire sur les décisions politiques [...], mais
passe directement par la capacité à faire des choix sur le marché23.
18Ce progressif transfert d’une citoyenneté politique vers une citoyenneté économique se trouve formulé dans l’idée de « souveraineté des consommateurs24 ». La souveraineté renvoie ici à la capacité qu’ont les consommateurs d’orienter et de déterminer l’offre productive en faisant librement valoir leurs intérêts. Là où la souveraineté politique permettait aux citoyens de choisir l’orientation publique de la cité au travers d’une discrimination de l’offre politique lors de campagnes électorales, par exemple -, la souveraineté économique permet à chaque consommateur de « faire le marché » en privilégiant la consommation de tel ou tel bien. La souveraineté est donc à la fois économique et sociale puisque « son caractère social réside dans le fait qu’elle est en situation de proposer une masse diversifiée de biens de consommation à des prix que le consommateur peut contribuer à déterminer par la demande25 ». Cela étant, pour que ce choix demeure libre et non faussé, l’État doit maintenir une concurrence parfaite, sans quoi la demande sera influencée par des conglomérats de producteurs tout comme l’opinion publique l’était auparavant par les groupes d’intérêts. À terme, cette « souveraineté des consommateurs » doit permettre l’avènement d’une « démocratie des consommateurs » dans laquelle « l’intérêt général est réalisé lorsque l’intérêt de l’ensemble des consommateurs, puisque chaque individu est consommateur, l’emporte sur l’intérêt privé des producteurs »26.
19Pour revenir à notre point de départ, si cette démocratie « surpasse » la « démocratie politique » la plus parfaite, c’est qu’elle substitue l’ordre constitutionnel domaine de la loi et des experts ainsi que l’ordre économique domaine du marché et des consommateurs au désordre inhérent et toujours latent de la démocratie électorale fondée sur la manipulation des intérêts de la masse et représentative orientée par les intérêts particuliers des gouvernants. De sorte que la « démocratie des consommateurs » expulse de son modèle de représentation l’incertitude et l’instabilité implicites de la démocratie politique.
Démocratiser par le marché : l’avènement d’une « démocratie de consommateurs » dans l’espace européen ?
20Interrogeons à présent la manière dont l’union par le marché a tenté d’apporter un certain nombre de réponses au « déficit démocratique » de l’Europe. Pourquoi et comment le constitutionnalisme économique ordolibéral a-t-il été perçu comme un meilleur tremplin vers la satisfaction démocratique d’un « peuple européen » que le constitutionnalisme fédéraliste et politique des hamiltoniens ? La question peut surprendre : premièrement, si le mouvement ordolibéral naît dans une remise en cause radicale du système démocratique27, comment ses théories auraient-elles pu servir de fondement à la démocratisation de l’Europe ? Deuxièmement, qu’est-ce qu’une intégration par le marché et une constitution économique ont à voir avec la constitution d’un peuple et d’un système politique institutionnel ? Dans quelle mesure la constitution économique a-t-elle investi la sphère politique pour offrir sa propre réinterprétation de la communauté, de la démocratie, de la citoyenneté et du peuple dans l’espace européen ?
21Le système politique européen a largement hérité des principes inhérents au constitutionnalisme économique. Dans un premier temps, nous verrons en quoi la citoyenneté européenne peut être lue comme le produit de la constitution économique de l’Europe28. Puis, nous nous demanderons dans quelle mesure l’union par le marché s’est précisément adossée à la vacance du peuple européen pour forger une communauté de consommateurs qui dépasse à la fois le cadre de la « société de consommation » et l’approche néo-foucaldienne d’une « démocratie de consommation29 ».
Repenser la citoyenneté européenne à l’aune de la constitution économique
22Si la dimension transnationale de la citoyenneté européenne permet, au moins théoriquement, de « démocratiser la démocratie », sur quels principes fondateurs repose cette greffe de citoyenneté et quel type de droits nouveaux mobilise-t-elle ? À l’article 8A du TFUE, il est écrit que « tout citoyen de l’Union a le droit de circuler [...] librement sur le territoire des États membres ». Mis à part la protection consulaire et le droit de vote aux élections locales et européennes, cet accès à la libre circulation constitue le principal droit de la citoyenneté européenne. Il fait d’ailleurs l’objet de politiques incitatives par le biais notamment du mécanisme Erasmus qui est devenu l’un des symboles de la construction d’un espace intégré et délivré de toutes frontières internes. La libre circulation de tous les résidents européens s’inscrit dans une histoire longue puisqu’elle s’enracine dans une interprétation maximaliste du traité de Rome qui prévoyait à terme l’établissement des quatre libertés (biens, services, hommes, capitaux). Si la libre circulation concerne d’abord les travailleurs (arrêt Van Gend en Loos, 1963), elle s’étend progressivement au tourisme (convention de Schengen, 1985) puis à l’ensemble des citoyens d’Europe. Cela étant, qu’est-ce qui justifie à l’origine cette croyance dans la liberté de circulation ?
23La libre circulation renvoie à un espace marqué par une vision libreéchangiste des relations (commerciales) interindividuelles et à une conception libérale du marché. Pour prendre un exemple, pourquoi fallait-il donner gain de cause au travailleur dans l’arrêt Van Gend & Loos ? Parce qu’une limitation de la circulation transfrontalière menaçait de porter atteinte au marché libre et de freiner l’émergence d’un ordre concurrentiel dans le processus d’intégration. C’est bien une motivation économique en l’occurrence la constitution d’un marché libre et concurrentiel qui est mobilisée politiquement pour faire de la liberté de circulation l’un des principes fondamentaux de la citoyenneté européenne.
24Par ailleurs, ce constat gagne en épaisseur lorsque l’on s’intéresse aux deux principes éthiques qui caractérisent la citoyenneté européenne : la reconnaissance mutuelle et la non-discrimination. Là encore, les mots sont importants et renvoient à des schémas d’interprétation précis. Tout comme le principe de non-discrimination, le principe de reconnaissance mutuelle qui vise essentiellement à reconnaître l’égale validité des qualifications académiques et professionnelles européennes trouve son origine dans la sphère juridico-économique. En 1979, un arrêt de la CJCE dit « Cassis de Dijon30 » sanctionne l’État allemand pour s’être opposé à l’importation de la liqueur française au nom du fait que son degré d’alcoolémie n’était pas conforme à la législation outre-rhinoise31. La Cour rejette cet argument, qu’elle assimile à du protectionnisme déguisé, en déclarant qu’« il n’y a aucun motif valable d’empêcher que des boissons alcoolisées, à condition qu’elles soient légalement produites et commercialisées dans l’un des États membres, soient introduites dans tout autre État membre32 ». Se fondant sur la jurisprudence de la Cour, la Commission décide d’adopter une « Communication interprétative » élevant la « reconnaissance mutuelle » au rang de principe inclusif. Plutôt que de continuer à adopter un nombre de plus en plus important de normes visant à harmoniser les législations nationales, le principe de reconnaissance mutuelle invite les États membres à évaluer la validité des autres législations sur la base de la confiance davantage que sur celle du droit. Alors qu’initialement la jurisprudence de la Cour visait à prévenir le risque de mesures anticoncurrentielles, la Commission confère à la reconnaissance mutuelle qui servira ensuite de base au principe de non-discrimination une dimension plus proprement politique. Ainsi, dès 1985, ce principe est invoqué par le Conseil pour justifier la nécessité de reconnaître l’égale validité des diplômes de l’enseignement supérieur. L’établissement de règles destinées à défendre l’ordre concurrentiel du marché commun nourrit donc en profondeur la lecture qui est aujourd’hui faite de la citoyenneté européenne.
25Notons enfin pour faire la transition avec le point suivant que l’ordre concurrentiel a très tôt été considéré comme un élément fédérateur susceptible d’être défendu par une majorité de citoyens d’Europe. En effet, la seule caractéristique qui relie tous les Européens depuis le traité de Rome, c’est de consommer des biens et des services. Or, si tous les producteurs européens ne partagent vraisemblablement pas les mêmes intérêts, tous les consommateurs ont intérêt à ce que les prix demeurent bas, voire à la baisse. Comme l’écrivent Dardot et Laval :
Les consommateurs ont en cette qualité un intérêt constitutionnel commun [...]. En termes ordolibéraux, on dira qu’ils ont même une « préférence constitutionnelle » pour le processus concurrentiel. C’est précisément cette préférence commune qui définit un « intérêt général constitutionnel » et qui permet un contrat entre le consommateur électeur et le gouvernement33.
26De sorte qu’en construisant la fable de l’intégration européenne sur la promesse d’une démocratisation de la consommation, les défenseurs de la constitution économique semblaient déjà préparer la fidélisation d’une partie de l’opinion publique européenne.
Le « peuple européen » : une communauté de consommateurs ?
27Peut-on pour autant en déduire que la défense d’une concurrence libre et non faussée a réellement « acheté » la loyauté des citoyens européens ? Si, comme le pensent Dardot et Laval, le système ordolibéral fonde son succès sur la mise en place d’une « démocratie de consommation », est-il pertinent ou souhaitable d’analyser l’unité du peuple européen à l’aune de son identité consumériste ? Il y a, selon nous, trois manières de répondre à cette question.
28La première, que nous pourrions nommer empirique, consiste à s’appuyer sur les analyses institutionnelles et les enquêtes d’opinion pour constater que l’Europe-marché semble bel et bien rassembler les Européens par-delà les clivages nationaux, idéologiques ou générationnels. Non seulement la libre circulation est perçue favorablement par ceux qui en profitent à des fins consuméristes (simplification des formalités touristiques avec la disparition des frontières internes34 et mise en place de l’euro), mais elle est complétée par une vision majoritairement positive du marché commun et de la libre concurrence. Ainsi, selon l’enquête Eurobaromètre no 66 (automne 2006), 64 % des interrogés considèrent encore que « la libre concurrence est la meilleure façon de garantir la prospérité35 ». Cet enjeu s’avère plutôt consensuel puisqu’il réunit plus de la moitié des sympathisants de « gauche » (61 %) et près des trois quarts des sympathisants de « droite » (73 %). Dans cette même enquête, 52 % des interrogés estiment également avoir bénéficié d’« une plus grande variété de biens provenant d’autres pays de l’Union ». Si bien que la suppression des contrôles frontaliers et une plus grande variété de biens apparaissent comme les principaux avantages tirés des réalisations de l’Union européenne. Ces résultats semblent aller dans le sens de la Commission qui faisait déjà référence à l’« identité commerciale de la Communauté » dans son « Livre blanc » sur « l’achèvement du marché intérieur » (1985).
29Une autre manière de répondre consisterait à affirmer que non seulement le peuple européen n’est pas réductible à un demos consumériste, mais qu’il ne doit pas se réduire, ou être réduit, à cette « identité commerciale ». Cette grille interprétative, que l’on pourrait décrire comme normative, refuse qu’une notion politique (le peuple, la démocratie, la communauté) soit « contaminée » par l’économique. Parce qu’elle serait l’affaire de tous et de n’importe qui, donc du commun et du partagé, la politique serait profondément distincte de l’économique, dont l’origine étymologique renvoie à la gestion intime et matérielle du foyer (oikos). Si bien que, du côté du pouvoir, gérer la polis avec la science du « bon père de famille » dénoterait une incompréhension du politique ; tandis que, du côté des administrés, choisir ses combats en fonction d’intérêts matériels et personnels marquerait le triomphe de la société de consommation et du capitalisme individualiste36 celui-ci raisonnant par « têtes » (caput) et non par « masse ». L’hypothèse selon laquelle l’union par le marché aurait donné naissance à une « communauté de consommateurs », unie dans sa célébration des valeurs libre-échangistes de l’Union, serait donc une ruse de la raison capitaliste : l’inclusivité apparemment plus grande de l’économique par rapport au politique ne ferait que dissimuler la compétitivité croissante qui désunit celles et ceux qu’elle unit de manière aléatoire et opportuniste. En cela, l’union d’un « peuple européen » par le marché serait aussi illusoire que le voile tissé par Pénélope.
30Enfin, une dernière manière d’aborder l’émergence d’un « peuple européen » uni dans son identité de consommateur consisterait à s’emparer politiquement et non plus seulement empiriquement ou normativement de cet enjeu. Il s’agirait alors de prendre au sérieux cette « démocratie des consommateurs » que déplorent Dardot et Laval pour se demander si elle ne possède pas en elle-même un potentiel de « démocratisation de la démocratie37 ». Cette hypothèse qui refuse à la fois le réalisme de l’approche empirique et le pessimisme de l’approche normative voit dans l’acte consumériste l’esquisse d’une possible stratégie populaire visant à « jouer le jeu » du capitalisme tout en le destituant de l’intérieur, en le faisant imploser de manière durable mais non frontale par le biais d’une consommation politiquement assumée38. Parce que la consommation repose non seulement sur des intérêts mais également sur des choix éthiques39, une « démocratie des consommateurs » ne serait pas moins efficace qu’une démocratie institutionnelle pour renverser un modèle socio-économique considéré injuste. La fuite du politique ferait dès lors partie de la stratégie : il s’agirait de faire « un pas de côté », d’accepter de jouer le jeu du capitalisme pour mieux le « domestiquer » et mieux le réformer « par le bas » de manière transcatégorielle.
31Bien qu’il soit postérieur à la période que nous traitons ici, l’exemple des fortes mobilisations collectives qui ont animé les débats sur l’adoption des traités de libre-échange transatlantiques (Ceta et Tafta40) est à ce titre significatif. C’est en tant que consommateurs, et au nom de la préservation de leurs intérêts de consommateurs, que de nombreux citoyens d’Europe se sont élevés contre les risques sanitaires notamment qui entouraient la signature de ces contrats. Et de fait, l’UE représentant actuellement le premier marché économique mondial, les Européens disposent vraisemblablement d’un pouvoir disruptif plus important en tant que consommateurs qu’en tant que seuls « citoyens européens ». L’union par le marché d’une « communauté de consommateurs » pourrait dès lors s’avérer une stratégie éminemment politique, ce qui répondrait « par le bas » à la subversion que l’économique tente d’opérer à partir du politique. Reste toutefois à déterminer si les valeurs progressistes qui soutiennent ces préférences éthiques sont suffisamment partagées à l’échelle européenne pour représenter un contre-pouvoir crédible au capitalisme. Pour reprendre les résultats de l’Eurobaromètre, il est certes intéressant de noter que pour la grande majorité des citoyens d’Europe (73 %) « protéger l’environnement devrait être une priorité [...] même si cela a un impact sur la croissance économique », mais il n’en demeure pas moins hasardeux d’en conclure que cela se répercutera nécessairement sur une approche plus éthique des choix de consommation si ceux-ci sont mis en balance avec des intérêts économiques contraires.
Notes de bas de page
1Joseph A. Schumpeter, Capitalisme, socialisme et démocratie, Paris, Payot, 1990, p. 355.
2Lucien-Pierre Bouchard, La démocratie désenchantée, Paris, Michalon, 2000, p. 82.
3Alexander Rüstow, « General Sociological Causes of the Economic Disintegration and Possibilities of Reconstruction Appendix », art. cité, p. 276-277.
4Raphaël Fèvre, « Retour sur le libéralisme conservateur de Wilhelm Ropke », Revue européenne des sciences sociales, 53/2, 2015.
5Wilhelm Ropke, La crise de notre temps, op. cit., p. 20.
6Ibid.
7Ainsi Jean Solchany (L’Allemagne au xxe siècle : entre singularité et normalité, Paris, PUF, 2003) évoque-t-il « l’antidémocratisme des élites, dans leur majorité nostalgiques de l’ordre impérial » pour décrire la pensée politique des théoriciens du retour à l’ordre (p. 23).
8Wilhelm Ropke, La crise de notre temps, op. cit., p. 12.
9Ibid., p. 24.
10Ropke (ibid., p. 25) cite ici un passage des Perses d’Eschyle.
11Ibid., p. 30.
12Ainsi, selon Ropke, « le phénomène d’effritement moral et spirituel a atteint toutes les sphères de la culture et marque de son sceau toute la vie de la société occidentale. On change de convictions comme de chemise. [...] On perd le sens du style, ce qui engendre un manque de respect à l’égard de la langue et une anarchie regrettable dans l’art d’écrire, marquant la décadence irrémédiable des possibilités d’expression logique [.] Tout dégage ce parfum légèrement frelaté du “haut goût” qui choque même une sensibilité robuste » (ibid., p. 17).
13Ibid.
14Ibid., p. 29-30.
15Ibid., p. 30.
16Ibid., p. 51.
17Ibid.
18Comme le résume Ropke (ibid., p. 136), « la démocratie doit avoir des sphères soustraites à l’État pour qu’elle ne tourne pas au despotisme outrancier ».
19Ibid., p. 218-219.
20Tout en nous gardant de toute explication trop linéaire, notons que cette promotion de la magistrature dans le gouvernement ordolibéral n’est pas sans résonner avec la place prépondérante que les juges vont occuper, dès le début des années 1960, dans le processus de construction européenne. À ce sujet, voir Julie Bailleux, Penser l’Europe par le droit. L’invention du droit communautaire en France, Paris, Dalloz, 2014 ; et Antoine Vauchez, « Judge-made law. Aux origines du “modèle” politique communautaire (retour sur Van Gend & Loos et Costa c. ENEL) », dans Olivier Costa, Paul Magnette (dir.), Une Europe des élites ?, Bruxelles, Presses de l’université de Bruxelles, 2007, p. 139-165.
21Rémi Fèvre, « Retour sur le libéralisme conservateur de Wilhelm Ropke », art. cité.
22Wilhelm Ropke, Civitas humana, Paris, Librairie Médicis, 1946 [1944], p. 169.
23Rémi Fèvre, « Retour sur le libéralisme conservateur de Wilhelm Ropke », art. cité.
24Wilhelm Ropke, La crise de notre temps, op. cit., p. 116.
25Alfred Müller-Armack, Genealogie der Sozialen Marktwirtschaft, Berne, Haupt, 1981.
26Rémi Fèvre, L’ordolibéralisme (1932-1950) : une économie politique du pouvoir, thèse de doctorat soutenue en 2017, p. 312.
27Sébastien Caré, Gwendal Châton, « Néoliberalisme(s) et démocratie(s) », art. cité ; dans le même numéro de la Revue de philosophie économique : Jean Solchany, « Le problème plus que la solution : la démocratie dans la vision du monde néolibérale », Revue de philosophie économique, 17/1, 2016, p. 135-169.
28Sur ce point, voir par exemple la contribution de Loïc Azoulai intitulée « Constitution économique et citoyenneté de l’Union européenne », Revue internationale de droit économique, 25/4, 2011, p. 543-557.
29Pierre Dardot et Christian Laval, La nouvelle raison du monde, op. cit., p. 206.
30Affaire 120/78, dite « Cassis de Dijon », 20 février 1979. Source : EUR-Lex, http://eur-lex.europa.eu.
31En l’occurrence, le taux d’alcoolémie de la liqueur Cassis de Dijon était trop bas pour rentrer dans la législation allemande concernant ce type d’alcool.
32Affaire 120/78, dite « Cassis de Dijon », 20 février 1979, je souligne.
33Pierre Dardot et Christian Laval, Ce cauchemar qui n’en finit pas, op. cit., p. 67.
34La majorité des citoyens de l’Union déclarent que l’un des avantages de l’UE est qu’il n’y a plus ou moins de contrôles aux frontières lors de voyages (59 %). Source : Eurobaromètre 66, automne 2006, p. 80, http://ec.europa.eu.
35Ibid., p. 53.
36Loin d’être nouvelle, cette critique du peuple berné par la consommation est déjà présente dans le Manifeste du parti communiste (1848). On peut notamment y lire que la bourgeoisie « a fait de la dignité personnelle une simple valeur d’échange : elle a substitué aux nombreuses libertés si chèrement conquises l’unique et impitoyable liberté du commerce » (cité dans Jacques Rancière, La haine de la démocratie, op. cit., p. 25, je souligne). Bien entendu, ces critiques prennent une dimension toute particulière avec l’avènement du marché commun européen.
37Voir par exemple le dossier dirigé par Emmanuelle Chessel et Franck Cochoy, Marché et politique. Autour de la consommation engagée, dans la revue Sciences de la société, 62, mai 2004.
38Michele Micheletti, Political Virtue and Shopping, New York, Palgrave Macmillan, 2003.
39Sophie Dubuisson-Quellier, « De la souveraineté à la gouvernance des consommateurs : l’espace du choix dans la consommation », L’économie politique, 39/3, 2008, p. 21-31.
40Le Comprehensive Economic and Trade Agreement (Ceta) est un projet d’accord bilatéral entre l’Union européenne et le Canada. Quant au Trans-Atlantic « Free Trade » Agreement (Tafta), il concerne des accords bilatéraux avec les États-Unis.
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