Conclusion
p. 355-361
Texte intégral
1Les Français de l’entre-deux-guerres considèrent que l’image de Paris est celle de la France, que Paris donne une image de la France. La capitale est au cœur du sentiment national.
2Paris, capitale de la Victoire le 14 juillet 1919, célébrant les funérailles nationales de Foch le 26 mars 1929, de Joffre le 8 janvier 1931 offre aux yeux du monde l’image d’une ville unie, fervente dans le souvenir de la Victoire et du Deuil de la Grande Guerre.
3Attaché à la France, Paris en représente la puissance. La capitale devient un instrument des relations culturelles internationales dont les ambassadeurs ont nom Paul Valéry, Jean Giraudoux, Paul Morand. Elle est un véritable atout de la politique française. Il n’est plus possible de dire que « Paris est le Nombril du monde », la « Capitale de l’Univers » mais le qualificatif de « Ville-Lumière » semble encore lui convenir. La comparaison entre « Paris 1900 » et « Paris 1930 » souvent invoquée met en lumière ce sentiment de fin d’une époque, d’un monde, que le « Tout-Paris » semblait si bien représenter. Les réflexions s’accumulent sur les raisons de la puissance et sur celles de la décadence. L’Exposition Coloniale Internationale de 1931 affirme pourtant que la capitale est le centre d’un vaste Empire de 100 millions d’habitants.
4Tous les intellectuels sont appelés à donner leur point de vue : Paul Valéry regardant le « monde actuel » considère que la puissance de Paris est liée à sa capacité unificatrice, à sa fonction centralisatrice. Paris apparaissait comme le centre d’une nation vers lequel tout convergeait, s’unifiait, un véritable « organe », cœur et cerveau d’une France personnifiée.
5Les migrations de population ont bouleversé ces équilibres entre Paris et « la » province, entre Paris et les populations étrangères immigrées. Alors que, depuis la Révolution Française, s’affirmait avec de plus en plus de force le thème de Paris, ville tentaculaire qui domine la province, qui absorbe ses alentours, nous voyons ce thème battu en brèche par celui des provinces à Paris, des provinces qui conquièrent Paris. Edmond Labbé commissaire de l’Exposition des Arts et Techniques dans la vie Moderne affirme, citant Gambetta que « Paris n’est pas la France ». Les idées du régionaliste Charles-Brun se voient reconnues au fil des Expositions Internationales qui se succèdent entre 1925 et 1937 et accordent une grande importance aux pavillons du « Village Français » en 1925, à ceux du « Centre Régional » en 1937. Les progrès du régionalisme culturel à Paris sont manifestes. Les nouveaux Parisiens ne changent plus leurs habitudes. Ils osent parler avec leur accent, ils ouvrent des restaurants. La gastronomie est un des premiers lieux d’expression des provinces à Paris. Les Auvergnats sont fiers de se dire Auvergnats. La droite parisienne valorise ce provincialisme, qu’elle est heureuse de rencontrer dans les quartiers peuplés des derniers immigrants. La gauche modérée, proche des radicaux voudrait ouvrir une voie qui soit celle de la conciliation entre régionalisme et modernité. Les pavillons régionaux des Expositions Internationales reflètent les débats qui opposent déjà les partisans conservateurs d’un retour en arrière vers des provinces françaises parées des vertus de la Terre de France et ceux, comme Edmond Labbé qui tentent de trouver un nouvel équilibre entre Paris et les régions.
6Parallèlement la présence des étrangers dans Paris transforme la capitale en ville bigarrée. Montparnasse est entre 1910 et 1929 le centre mondial reconnu des avant-gardes internationales de l’art, de la culture. La droite nationaliste agite alors le thème de « Paris transformée en Cosmopolis », envahie par la bohème, dont elle ne partage pas l’idée de la culture. De son côté le « Tout-Paris » des « Beaux-Quartiers » n’hésite pas à se mêler aux riches étrangers amateurs de culture. L’accueil réservé aux étrangers est une ligne de clivage qui devient de plus en plus importante dans le contexte de la crise économique.
7L’image de Paris, ville des avant-gardes du domaine artistique et du domaine politique, celle de Paris comme ville des Droits de l’Homme et du Citoyen sont éprouvées par les questions soulevées par la présence massive des étrangers dans Paris. Les étrangers rappellent ce que Paris et la France symbolisent pour eux. Paris est une ville qui naturalise ses habitants dont ils peuvent se dire les « citoyens ». Le thème des « pays » Parisiens, lieux où l’on s’enracine en conservant ses traditions, est le pendant de celui de la citoyenneté plus égalisateur. La capitale propose du travail, sauf en temps de crise, offre des perspectives d’ascension sociale. Elle demeure à ce titre la ville de l’Égalité. Elle est aussi un lieu de refuge pour les exilés politiques.
8Dans ce contexte, les signes de la puissance, les lieux du pouvoir, de la gloire, du prestige sont également un enjeu de première importance. L’étude des parcours des cortèges des funérailles nationales des maréchaux de la Grande Guerre, celle des guides de tourisme consacrés à Paris nous ont permis de délimiter un périmètre glorieux, majestueux, dans l’ouest parisien dominé par la stature de l’Arc de Triomphe de l’Étoile, les Invalides, la statue de Clemenceau sur les Champs-Elysées devenus « Voie Triomphale ». Ainsi le pouvoir, le luxe, l’argent, glissent inexorablement vers l’ouest de Paris qui est aussi le lieu des « Beaux Quartiers », confirmant l’évolution engagée depuis la construction de l’Arc de Triomphe de l’Étoile, confirmée à l’époque du préfet Rambuteau, affirmée par Haussmann. Le centre politique de Paris se situe Place de la Concorde, en un point d’équilibre entre l’ouest et l’est de la ville. L’avenue des Champs-Elysées, autrefois réservée à une élite d’élégants devient la Voie Triomphale. Elle se démocratise tout en restant le joyau, la vitrine que l’on montre aux étrangers, aux touristes, celle que l’on illumine la nuit. L’orientation du Paris de demain vers l’ouest est confirmée par les concours des urbanistes « pour l’Aménagement de la Porte Maillot » en 1930.
9Les hésitations autour du choix des emplacements des Expositions Internationales et Universelles sont très révélatrices. Paris, soucieux de son image craint de déplacer hors du véritable centre le cœur des Expositions. Une seule Exposition internationale a pu être organisée dans l’est parisien, curieusement en raison de l’énergie et des idées d’haussmannisation de l’est parisien exprimées par la droite missionnaire et colonialiste représentée par le maréchal Lyautey.
10Un seul monument d’origine républicaine se trouve dans l’ouest de Paris, la Tour Eiffel construite pour le centenaire de la Révolution de 1789. Mais il est particulièrement important que ce monument se soit progressivement transformé : impressionnant par sa hauteur, symbole de communication, de progrès, il exprime l’ouverture à la modernité dans la ville de l’histoire et des monuments nationaux. Cette image devient celle de Paris dans le monde, comme l’a démontré l’étude des Tours Eiffel des peintres et des photographes étrangers qu’elle obsède. Elle est le signe de Paris, un signe audacieux dressé dans le ciel de Paris.
11Paris personnifie la France. Représentant la nation, elle incarne tour à tour la ville de la droite ou celle de la gauche républicaine et des Droits de l’Homme. Si l’on s’en tient aux résultats électoraux, Paris élit une majorité de droite au Conseil Municipal comme au Parlement. La droite Parisienne investit la rue, considère que Paris est sa ville. L’extrême droite de l’Action Française occupe le Quartier Latin. Le peuple parisien, comme dépossédé, se replie vers l’est et la banlieue. La gauche a ses repères symboliques dans l’est parisien, la droite est familière de l’ouest, des Beaux-Quartiers, du Faubourg Saint-Germain et de la Rive droite.
12Nous avons cependant remarqué avec le plus grand intérêt le goût prononcé de la droite pour les quartiers populaires. Ceux-ci lui semblent dépositaires d’un véritable esprit national français, encore proche de la Terre de France. La droite pare les Parisiens d’une personnalité nationaliste : selon elle le Parisien l’est par la naissance ; bien français, il véhicule les valeurs et les traditions des villages et des provinces françaises. Il représente une élite en voie de disparition pour tous les amateurs des charmes désuets d’une tradition révolue confrontés à la démocratisation de Paris. « La Parisienne » apparaît comme un souvenir, un personnage du passé dont on évoque l’élégance, les mœurs plaisantes.
13Un autre rameau de la droite parisienne nous a semblé mériter l’attention. Il s’agit de l’ensemble formé par les « Équipes Sociales » de Robert Garric, le milieu drainé par le Maréchal Lyautey et Henri Prost, auteur du premier plan d’aménagement de la région parisienne, le groupe de la « Ligue urbaine » constitué autour de Raoul Dautry, Jean Giraudoux. Cette droite parisienne considère le peuple parisien d’un œil militant. Elle veut l’entraîner, le convaincre, dans un esprit marqué par un christianisme missionnaire. Elle se tourne vers l’est de Paris de la même manière que le maréchal Lyautey et Henri Prost ont traité les mœurs des colonies, l’habitat des agglomérations indigènes, dans une volonté de mise en ordre, d’haussmannisation autoritaire. Cependant il faut souligner que dans l’entre-deux-guerres peu d’aménageurs regardent vers l’est ou la banlieue. Leur intérêt est donc remarquable. Il serait probablement intéressant d’étudier la rencontre intellectuelle, entre cette droite missionnaire, qui a une vision du monde qui la conduit à penser l’union de l’ouest et de l’est parisiens réunis dans un esprit qui rappelle la fraternité des tranchées et la pensée de l’aménagement du Polytechnicien spécialiste des transports urbains et du réseau ferroviaire, Raoul Dautry.
14L’extrême-droite représentée par Léon Daudet, Robert Brasillach, Lucien Rebatet célèbre Paris comme ville de la culture nationale et nationaliste. Elle focalise toute sa haine contre le Paris des étrangers. Chez Léon Daudet cette haine de l’étranger s’accompagne d’un esprit moralisateur d’une droite d’ordre chrétienne, revancharde, hostile aux plaisirs parisiens. La droite Parisienne est hantée par l’image de Paris comme ville des révolutions. Elle se sent menacée par la présence des étrangers dans Paris. Sous une forme plus tempérée dans le Conseil Municipal, sous une forme haineuse chez Léon Daudet, Robert Brasillach et surtout Lucien Rebatet, elle exprime sa volonté de chasser les étrangers de Paris qui sont selon elle, la véritable menace pour la France.
15Paris est couramment représenté par l’opposition qui se manifeste entre l’ouest et l’est, deux moitiés de signe contraire. Comme le démontre l’étude des guides de tourisme, la capitale est partagée en fonction de repères symboliques, de critères politiques, de lignes de répartition de la richesse. Le défilé de la Victoire avait traversé Paris d’ouest en est. La Panthéonisation de Jean Jaurès en novembre 1924 démontre la division. Le rassemblement républicain ne se fait pas autour du Panthéon symbole de discorde, d’opposition, de conflit entre deux camps, celui des républicains, renforcés par les forces rouges du Parti Communiste, et celui de la droite si bien représentée près du Faubourg Saint-Germain. A partir de novembre 1924, il est clair que la droite se considère comme la propriétaire de la rue à Paris, alors que la gauche communiste développe en réaction le thème de la reconquête nécessaire du centre, encerclé par des murailles de travailleurs, constituant la ceinture rouge de Paris. La gauche repoussée de Paris prend le parti de considérer Paris et d’agir depuis la banlieue, en fonction de ses intérêts. Ceci vaut aussi bien pour les maires réformateurs comme Henri Sellier à Suresnes, André Morizet à Boulogne que pour les communistes attachés au développement de zones rouges autour de Paris.
16C’est de l’est et de la banlieue que partent les défilés qui, à partir du 9 février 1934 s’organisent en réponse aux ligues factieuses.
17En 1867, Victor Hugo affirmait dans l’introduction de Paris-Guide la suprématie de Paris, la ville des Révolutions : « [...] 1789. Depuis un siècle bientôt, ce nombre est la préoccupation du genre humain. Tout le phénomène moderne y est contenu [...]. Paris est la ville-pivot sur laquelle à un jour donné, l’histoire a tourné. Palerme a l’Etna, Paris a la pensée [...] »1.
18L’image de Paris, ville des révolutions, ville des droits de l’homme semble maintenant s’estomper derrière celle d’un peuple travailleur, docile, aspirant à la petite propriété. La mobilisation des associations de mal-lotis dans la banlieue en donne une idée.
19Cette banlieue déployée autour de Paris s’est développée à partir de crises de croissance successives, dans un mouvement concentrique. Dès Philippe Auguste, l’espace parisien est marqué par une configuration à trois termes : la Cité, la Ville (rive droite), l’Université (rive gauche). L’essor de la banlieue parisienne de la fin du xixe siècle et du début du xxe s’est fait par un débordement de la ville au-delà de ses fortifications dont l’inutilité militaire apparaissait de plus en plus évidente. Les fortifications de Paris sont démolies entre 1919 et 1930. L’espace du Grand Paris pourrait donc être un grand espace unifié, verdoyant. D’immenses possibilités semblent s’ouvrir devant la libération d’un espace vécu comme un corset pour la ville. Mais le poids des mentalités est lourd. Si les fortifications de Paris sont détruites physiquement, ce n’est pas pour autant que la réalité du Grand Paris s’impose aux contemporains. Nous sentons une différence de point de vue profonde entre ceux qui perçoivent la dimension de l’espace parisien nouveau, qui veulent y construire un Paris des Temps Modernes, qui s’y intéressent et ceux qui vivent repliés dans des fortifications intérieures. Dès 1928, le gouvernement a créé, sur la pression de plusieurs groupes d’urbanistes, de réformateurs, d’hygiénistes, un Comité supérieur d’Aménagement de la Région Parisienne. Ce comité est à l’origine de la loi de 1932 qui crée la région parisienne, et du premier plan d’aménagement. Nous avons pu remarquer que les guides de tourisme ne prenaient pas souvent en compte les dimensions de ce « Grand Paris », mais que pourtant dès 1937, les Guides Bleus l’adoptent. L’étude des perceptions littéraires de l’espace parisien nous a montré l’extension progressive de l’espace littéraire dans notre période. La parution de Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, en 1932, la réception qu’elle eut montrent bien la prise de conscience par l’opinion de l’existence des banlieues et de leur monde, aux portes de la capitale. Au même moment paraît la première version du [Le] piéton de Paris de Léon-Paul Fargue qui, à l’opposé montre un regard sur un Paris émietté en « pays », aux dimensions toujours pareilles, celle d’un piéton et encore plus celle d’un piéton de la bonne société.
20Aux premières loges, les urbanistes sont appelés à donner leur avis, à produire, devant la demande politique et sociale de mise en ordre de l’espace parisien des propositions de plan, de transformations qui prennent en compte l’extension de Paris, la libération de l’espace des fortifications. Ils présentent Paris comme une ville malade, inadaptée aux exigences d’une société moderne qui doit loger le plus grand nombre, fournir du travail, développer la circulation, permettre le loisir. Les urbanistes ont conscience de l’unité nécessaire de l’espace à créer. Ils se partagent principalement en deux courants : les culturalistes pensent Paris en termes d’« extension », dans le respect de la structure ancienne concentrique de la ville. Leurs théories contribuent au maintien tout autour de Paris d’un anneau de logements qui comprend les « Habitations à Bon Marché », le Parc des Expositions, la Cité Internationale Universitaire, qui empêchent Paris de se déployer dans un espace unifié. A l’inverse, Les progressistes autour de Le Corbusier veulent une transformation radicale de l’espace qui annule la distinction entre Paris et sa banlieue. Le Corbusier propose des gestes audacieux qui, dans la tradition d’Haussmann et de la Tour Eiffel, n’hésiteraient pas à démolir les vieux quartiers, en conservant quelques monuments jugés essentiels. Ceci permet de comprendre l’importance dans toute pensée concernant Paris de la question du lien, de l’articulation entre la Ville de l’histoire et la Ville de la modernité. Cet enracinement de Paris dans un espace historiquement marqué, révélant un destin continu de la ville et de la France dans sa capitale est un des grands enjeux du moment.
21Les hommes de lettres, dans leurs analyses montrent bien que Paris est à leurs yeux une ville qui allie ces deux dimensions de l’histoire et de l’innovation politique, artistique, culturelle. Les urbanistes par leur réflexion sur le Paris de demain permettent de situer les enjeux en œuvre dans ces pensées sur l’aménagement de la région parisienne. En premier lieu se pose la question de la compétition avec les autres capitales internationales. Il faut une capitale qui remplisse sa mission, qui soit susceptible de rivaliser avec New-York ou Berlin. Le débat oppose aussi les partisans, dont Le Corbusier fait partie, d’une capitale très centralisatrice dominée par un pouvoir fort et ordonnateur, et ceux qui sont favorables à une déconcentration : parmi eux les culturalistes comme Marcel Poëte, les réformateurs de gauche comme Henri Sellier, André Morizet qui sont préoccupés par l’alliance nécessaire entre les besoins centralisateurs et la décentralisation de la gestion quotidienne. Face à tous ceux qui pensent à la nécessaire unité de l’ensemble « Paris-Banlieue » le portrait généralisé des conseillers municipaux de Paris en « Topaze », attachés à des intérêts électoralistes étroits ressort d’autant mieux dans un climat marqué par plusieurs affaires spéculatives.
22Pourtant, en dehors de ces points de clivage, de séparation qui opposent la ville de la droite et celle de la gauche, celle de l’ouest et celle de l’est, Paris et sa banlieue, l’étude que nous avons menée en particulier dans les guides de tourisme et dans le corpus des intellectuels parisiens a fait ressortir des éléments d’une image globale2.
23Paris est une ville personnifiée, dont la personnification, comme l’a analysé Ernst-Robert Curtius renvoie à celle de la France. Elle est parée d’attributs. Elle est la ville de la culture, celle du patrimoine national, la ville de l’histoire, de l’art, des plaisirs, du travail. Parmi tous c’est l’attribut de la Culture qui prime. Pour cette raison Paris draine les intellectuels du monde entier qui se créent de petites patries, des ports d’attache sur sa Rive gauche. Elle est la ville de la culture dans ses épaisseurs successives, une ville littéraire par excellence puisque les intellectuels la lisent comme les lignes de la main ou comme celles d’un livre, que chaque rue de Paris peut s’associer à une référence ; elle est à la fois lieu du dépôt, de la conservation du patrimoine culturel et lieu de l’innovation. Le déplacement dans Paris des lieux de l’avant-garde culturelle de Montmartre à Montparnasse, à Saint-Germain-des-Prés témoigne de cette évolution.
24Il nous a semblé remarquable qu’il existe un consensus sur les principaux monuments parisiens de Paul Morand à Le Corbusier ; de façon presque surprenante, certains semblent irréfutables, essentiels au paysage : l’Arc de Triomphe, la place de la Concorde, les Invalides, Notre-Dame, le Louvre, la Tour Eiffel. Deux monuments représentent des enjeux pour la droite et pour la gauche : ce sont le Panthéon et le Sacré-Cœur. Quoi qu’il en soit Paris, ville narcissique entretient le débat sur son apparence sur la beauté et la laideur de sa physionomie. Comme l’ont montré les portraits de Paris que nous avons consultés, une sorte d’image stéréotypée se dégage en même temps que l’opinion se focalise sur la laideur et le trop-plein des statues parisiennes. L’image de Paris est autant son image réelle que celle qu’elle est censée montrer aux autres. De plus, son renom alimente partout dans le monde des chroniques de journaux, publications,... si bien qu’il y a une sorte de circulation de cette image dans le monde qui quelquefois revient vers Paris par le canal des étrangers qui y vivent.
25L’image de Paris comme ville des plaisirs, de tous les plaisirs, la cuisine, la mode, la promenade, la danse, le sexe est tout aussi répandue mais elle est souvent occultée, camouflée d’autant plus vilipendée qu’elle fascine. Le contenu des plaisirs évolue : après la guerre, la gastronomie devient régionale ; dans l’ambiance des années folles, la danse est un plaisir largement partagé. Les Expositions universelles organisent les plaisirs tout en mettant en avant leurs propos didactiques.
26La personnalité parisienne est celle d’un femme. Les villes sont en général représentées par des statues de femmes. Mais Paris peut changer de genre. Quand on parle du pouvoir politique, sur un ton impersonnel on utilise plutôt le masculin comme dans les journaux « Paris dit, Paris décide... ». Paris est une ville féminine dans la plupart des cas. C’est une femme guerrière pendant la première guerre mondiale. Elle est la ville de la mode, des plaisirs. Féminine, elle est faite pour les femmes. Elle suscite des sentiments, des déclarations d’amour. Paris est un mythe moderne.
Notes de bas de page
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