Chapitre 4. Les Rois des nations et la fin des temps
p. 319-342
Texte intégral
1Il a souvent été fait mention dans les pages précédentes de l’entrée des Mages dans la cité sainte au moment de l’Adoration, d’abord par un processus de projection architecturale du symbolisme virginal, puis par celui de fusion des lieux d’une géographie mystique. En entrant dans la crèche, les Mages pénètrent dans un espace sacré, préfiguration sur terre du royaume céleste à venir. Plus important encore, en scrutant les Mages sur près d’un millénaire, nous les avons vus personnifier progressivement les nations chrétiennes et se faire la synecdoque tripartite de la Christianitas, dans sa diversité et son unité. Par l’Adoration de la Vierge-Église, le thème devient donc intrinsèquement sotériologique. Ce raisonnement demande à être précisé par l’analyse de décors où la réflexion eschatologique est dominante, soit par l’implantation du thème dans un contexte iconographique significatif, soit par l’intrusion dans l’image d’éléments apocalyptiques ou deutéroparousiaques (Ap 21‑22 et Mt 24‑25). La question posée pourrait être résumée ainsi : la mise en image de l’entrée des Rois de la terre dans le sein de l’Église pourrait-elle, dans certains cas, être littéralement celle des nations dans la Jérusalem céleste annoncée au chapitre 21 de l’Apocalypse, cela pour illustrer un épisode qui ne connaît pas d’iconographie définie ? Une analyse eschatologique exclusive du thème est-elle possible dans certains cas, sans passer par une extension interprétative ? L’analyse des décors de Pompierre, Moissac, Neuilly-en-Donjon, Fleury-la-Montagne et Mimizan, fournira quelques éléments de réponse pour comprendre l’entrée des Mages dans les deux cités augustiniennes, deux facettes d’une même réalité du Royaume du Christ.
L’exégèse eschatologique appliquée aux Mages
2À notre connaissance, l’exégèse est muette sur ce point de connexion. L’unique rapprochement entre la péricope de Matthieu et la révélation de Jean est l’usage de la mention « Je suis l’étoile rayonnante du matin », référence à Ap 22, 16 : « Je suis le rejeton de la race de David, l’Étoile radieuse du matin1 ». En revanche, aucun de ces commentaires ne rapproche la crèche ou du sein virginal de la Jérusalem nouvelle dans un contexte épiphanique, ou du moins, rien qui n’outrepasse une analyse tropologique. Même constat dans les sources liturgiques : le seul indice évocateur est un répons intégré dans l’Opus Dei aux nocturnes de l’Épiphanie, construit sur Is 60, 3 et Ap 21, 24 : « Illuminare, illuminare, Jerusalem : Venit lux tua, et gloria domini super te orta est. Et ambulabunt gentes in lumine tuo, et reges in splendore ortus tui2 ». En revanche, de nombreuses images portent une certaine ambiguïté, en raison d’un vocabulaire iconographique que nous nommerons pour le moment « apocalyptique ».
3Définissons dès à présent comment le traitement anagogique de l’image est compris ici. Puisque la notion est empruntée à l’exégèse, non comme axe de recherche, mais comme repère théorique, la question doit être abordée avec une grande prudence. Pour Henri de Lubac3 et sa définition du périmètre de chacun des quatre niveaux de l’herméneutique médiévale, le sens anagogique doit être considéré sur deux niveaux principaux. Le niveau eschatologique ne concerne que la première anagogie, sans la recouvrir en intégralité. Pour le théologien, elle concerne la Seconde Parousie, branche dogmatique pouvant toutefois s’étendre au salut individuel. L’autre niveau est, quant à lui, à envisager hic et nunc comme une contemplation mystique de Dieu.
4En histoire de l’art, plusieurs auteurs ont invité à cette nuance pour analyser les images d’inspiration apocalyptique, en réduisant considérablement l’usage du terme « eschatologie4 ». La plupart de ces travaux proposent de distinguer les théophanies présentes de celles du Jugement dernier lui-même. Ces réflexions se restreignant cependant aux visions christiques glorieuses, prenons garde de ne pas en appliquer les conclusions directement aux images de l’Épiphanie, épisode atemporel pouvant vivre par réitération séculière tout en préfigurant une théophanie future, sans jamais sacrifier sa fonction narrative qui relate un épisode de l’Évangile5. Plusieurs auteurs ont décelé le potentiel eschatologique du thème dans l’iconographie6 sans toujours prendre en compte ces nuances.
5Ainsi construisons le propos sur deux termes anachroniques issus des recherches théologiques modernes, l’eschatologie réalisée et l’eschatologie conséquente, distinction qui ne trahit pas la partition générale du concept dans l’esprit médiéval.
Le tympan de Pompierre
6L’iconographie du tympan de Pompierre convaincra des difficultés que pose ce questionnement (figure 62). Cette pièce sculptée construit sur trois registres répartis sur le linteau et le tympan un cycle christologique dont le choix de chaque scène est significatif7. Chronologiquement, la lecture devrait commencer au registre inférieur du tympan sur lequel se suivent, de gauche à droite, l’Annonce aux Bergers et l’Adoration des Mages, pour se poursuivre, dans la partie supérieure de la lunette, par le Massacre des Innocents, la Fuite en Égypte et un autre tableau difficilement identifiable pouvant à la fois évoquer l’Annonciation et la Visitation. Le linteau accueille quant à lui l’Entrée à Jérusalem sur toute sa surface. Dans sa partie droite, le Christ couronné, à la tête d’un cortège de quatre apôtres munis de palmes, chemine, monté sur l’ânesse suivie de l’ânon, vers la Porte dorée où s’est massée la foule. Ainsi décrite, une connexion se tisse entre la sainte famille fuyant Jérusalem habitée par la folie meurtrière d’Hérode et le retour messianique du Christ dans la cité. De même, une relation se crée entre le sacrifice des Innocents auquel échappe le Christ pour un temps, et la marche de ce dernier vers sa Passion que rappellent les apôtres porteurs de palmes. Un lien tout aussi fort connecte la visite des Mages et l’entrée royale du Christ qui a pour conséquence d’insuffler à l’Épiphanie un apparat royal rarement égalé. Les trois Rois, très richement vêtus et coiffés de couronnes complexes, se suivent dans une imposante salle palatiale au fond de laquelle la Vierge couronnée les attend sous un large dais architecturé orné de motifs fleuronnés. Elle porte l’Enfant, coiffé de la même couronne que celle qu’il portera pour fuir en Égypte et pour entrer triomphalement à Jérusalem. L’agencement des diverses séquences évangéliques en frises distinctes suggère que, si le registre supérieur annonce l’immolation de l’Enfant, l’Adoration du registre médian annonce son triomphe royal et l’établissement de son royaume qui s’opère sur le linteau.
7Un détail éclairant est la femme voilée qui allaite son enfant à l’extrême gauche du linteau, juste derrière la cité de Jérusalem réduite à un édicule quadrangulaire et crénelé. Il s’agit à première vue de la virgo lactans qui, couplée à la cité de Jérusalem, devient une figure composite de la fille de Sion et de l’Église. La fille de Sion est une métaphore transversale aux deux testaments, présente dans le livre de Zacharie (Za 9, 9), dans le Cantique des cantiques (Ct 3, 11) et dans l’Évangile de Jean (Jn 12, 15), qui préfigure l’entrée royale du Christ à Jérusalem. Sur le linteau, l’intrusion de ce personnage en personnification de l’Église et surtout, sa juxtaposition avec la cité, en fait une personnification de Jérusalem. De plus, le champ interprétatif de la fille de Sion trouve son prolongement dans les noces de l’Agneau de l’Apocalypse : « Alors j’entendis comme le bruit d’une foule immense […] ; on clamait : “Alleluia !” Car il a pris possession de son règne, le Seigneur, le Dieu Maître-de-tout. Soyons dans l’allégresse et dans la joie, rendons gloire à Dieu, car voici les noces de l’Agneau, et son épouse s’est faite belle » (Ap 19, 6‑7). C’est à la lumière de ces versets que l’entrée royale dans la cité doit être comprise et c’est sur ce même registre qu’intervient la visite des Mages.
8La venue des trois Rois est ornée de plusieurs motifs décoratifs qui accompagnent la lecture apocalyptique. L’architecture fictive de l’Aula regia soutenue par cinq colonnes est par exemple entièrement façonnée d’acanthe, le végétal paradisiaque par excellence. Ce même feuillage réapparaît sous une forme buissonnante derrière le trône de la Vierge, comme une synthèse du Paradis dont la Vierge-Mère se ferait une nouvelle fois la porte. Relevons enfin le liseré décoratif épousant toute la courbure du tympan. Celui-ci est traité en bandeau perlé sur toute sa longueur, sauf au registre de l’Épiphanie où il est alors remplacé par un motif crénelé pour circonscrire un espace autonome, assimilable à la Jérusalem céleste. Les Rois mages, en se présentant devant la Mère de Dieu pour adorer le roi de l’univers issu de la lignée de David, préfigurent donc l’Entrée des nations dans son Royaume établi sur terre.
9Une structure apocalyptique donne toute sa cohérence à l’ensemble sculpté. La thématique nuptiale du chapitre 19 est complétée par le triomphe des chapitres 21‑22 pour l’Épiphanie et pressentie par la menace du Dragon et le refuge de l’Enfant au désert (Ap 12, 5‑6) contenues dans la Fuite en Égypte et le Massacre des Innocents.
10L’Adoration des Mages illustre-t-elle pour autant littéralement les nations du chapitre 21 de l’Apocalypse ? En réalité, il n’est aucunement question de fin des temps dans cet ensemble, mais de l’histoire de l’Église, de son élection par le Christ et du rôle qui lui a été transmis de conduire les peuples au salut. Le portail pris dans son ensemble montre bien les Rois mages s’orienter vers les portes paradisiaques, mais la dynamique inverse du linteau montre les noces de l’Église et du Christ. Le buisson d’acanthe du registre des Mages, selon une composition d’ensemble en chiasme, fait écho à la Fille de Sion, derrière Jérusalem. Le portail apparaît donc comme le fruit iconographique de la lecture médiévale du récit apocalyptique, compris comme une structure narrative non chronologique, mais universelle, juxtaposant les récits historiques (évangéliques), prophétiques et de l’histoire contemporaine.
Le porche de Moissac
11L’Épiphanie des Mages du porche sud de l’abbatiale Saint-Pierre de Moissac est justement célèbre pour être intégrée à un univers visuel proprement apocalyptique. Le porche lui-même, conçu comme une imposante architecture fictive et autonome, abrite la façade sud du clocher-porche8. Véritable arc de triomphe coiffé de créneaux et abritant un ensemble sculpté dans sa profondeur au milieu duquel rayonne la théophanie du tympan sculpté, le porche se présente comme la matérialisation sur terre de la Jérusalem céleste. La thématique que véhicule l’image de l’Épiphanie sur le massif oriental ne répond pourtant absolument pas à une lecture des fins dernières.
12Le principal problème que pose le décor du porche est l’interprétation de la théophanie de son tympan qui rayonne sur l’intégralité des sculptures. Depuis l’analyse de Peter Klein, il est retenu que la vision du tympan est d’essence apocalyptique, mais ne figure pas un Christ parousiaque9. Au contraire, elle construit une vision complexe et synthétique du Christ en gloire, couronné, assis sur un imposant trône lui servant de mandorle. Il est flanqué de deux anges porteurs de rouleaux (les séraphins d’Is 6, 2‑3), encadré du tétramorphe (Ap 4, 2‑11 ; Is 6, 1‑5 ; Éz 1) et adoré par les vingt-quatre Vieillards, tous couronnés, barbus, munis de coupes et d’instruments de musique (Ap 4, 4 et 5, 8). L’ensemble de la cour laudatrice se répartit sur trois registres délimités par un ruban ondulé figurant les nuées (Ap 4, 1‑2) ou la mer de cristal (Ap 4, 6). La théophanie adorée par les Vieillards n’est ainsi ni historique, ni future, elle est atemporelle, traverse tout le champ scripturaire et relève du présent eschatologique de la Majesté du Christ auquel participe le décor des murs latéraux.
13Sur les murs latéraux du porche s’opposent, en miroir, deux écrans sculptés aux discours antinomiques. Sur le mur oriental, un cycle de l’Enfance disposé sur trois registres est enchâssé dans une architecture factice à double arcature. L’Annonciation, la Visitation et l’Adoration des Mages occupent les deux premiers étages. La frise supérieure poursuit chronologiquement le cycle de l’Enfance avec la Présentation au Temple, la Fuite en Égypte10, l’entrée triomphale de la sainte famille à Héliopolis et la Chute des idoles qui en résulte. Sur le mur opposé, face à l’économie du salut par l’Incarnation, la parabole du Mauvais riche apparaît comme une psychomachie composée sur une structure architectonique strictement identique. Au registre inférieur se côtoient les personnifications de l’Avarice et de la Luxure et, en surplomb, la mort et les tourments du Mauvais riche (Luc 16, 19‑31). La frise supérieure compose enfin une dialectique entre le banquet du Mauvais riche jouissant égoïstement de son opulence et le pauvre Lazare perclus d’escarres. Le cycle se conclut par l’âme de Lazare dans le Sein d’Abraham alors que, sous l’arc inférieur, celle du mauvais riche, tourmentée par une nuée de démons, tente de l’appeler à l’aide. La parabole connaît une amplification unique, mais reste, comme à son habitude, intégrée à un discours eschatologique, appuyé par les âmes tourmentées des chapiteaux des colonnettes, issues d’une imagerie du Jugement deutéroparousiaque des plus violentes. L’image orne d’ailleurs, non sans raison, le revers occidental du porche, direction habituelle du Jugement. Il n’est pourtant pas question ici de la damnation après le Jugement dernier. La parabole parle au présent, elle met en garde en vue du Jugement individuel, ce que conforte l’accueil de l’âme du juste dans le Sein d’Abraham qui constitue à Moissac un lieu paradisiaque intermédiaire dans l’attente du Jugement des corps ressuscités11.
14L’Incarnation décrite sur le mur oriental se comprend en regard de la vision terrifiante du mur occidental. Selon un axe strictement orthogonal, transversal à l’espace du porche, se construisent plusieurs correspondances visuelles entre les deux écrans sculptés. Pour exemple, à la figure hideuse de la Luxure, répond la Vierge de l’Annonciation ; à l’entrée dans Héliopolis, au plus près de la porte, et la chute des idoles suggérant celle du péché, fait écho la profusion infâme du banquet du Mauvais riche ; Lazare dans le sein d’Abraham renvoie à la Présentation de l’Enfant sur l’autel du Temple, préfiguration de son immolation rédemptrice. L’Adoration des Rois mages12 occupe la double arcature du registre médian, en regard de la mort du Mauvais riche et au tourment de son âme. Or, pour unir les deux images dans un même discours, le sculpteur n’hésite pas à modifier la structure iconographique de l’Adoration. Il choisit la crèche comme lieu de l’Adoration et intègre au fond le bœuf et l’âne et place Joseph derrière le lit de Marie, fusionnant ainsi les types de la Vierge de la Nativité et de l’Épiphanie pour confectionner l’image unique d’une Vierge trônant sur le lit de la Naissance. Relevons à ce propos l’attitude singulière de Joseph, à sa place habituelle de témoin, mais très diminué par rapport aux autres personnages. Il tient le dos et le coude de Marie comme s’il présentait lui-même la Vierge, comme elle-même présente l’Enfant aux Mages. Se dessine ainsi une logique de transmission de la lignée royale de David par Joseph à Marie et de Marie au Christ. L’étoile sous sa forme végétale au-dessus de la tête de la Vierge confirme la logique généalogique de la composition. L’inventivité iconographique a ici pour but d’opposer le lit de mort du Mauvais riche et celui de la Vierge d’où naissent le salut et la rédemption. Les trois Rois s’inscrivent donc à l’un des segments les plus importants d’un argumentaire principalement moralisateur. Ils exemplifient la vertu et sa récompense dans le champ du Jugement individuel de l’âme13. Les Mages s’extraient du récit de l’Évangile pour entrer dans le champ de la vision christique centrale et participer ainsi à construire un discours qui abolit les frontières entre le temps historique évangélique, la fiction de la parabole et l’atemporalité de la théophanie.
15Un point oblige cependant à relocaliser l’analyse du mur oriental. Comme le remarquait Peter Klein, le porche avec ses créneaux et les deux anges à l’olifant placés en son sommet14, est la matérialisation sur terre de la Jérusalem céleste. Les trois Rois sont intégrés à cette structure architecturale et participent donc à sa signification. Or, pourquoi ne s’orientent-ils pas vers la vision christique du tympan et donc, vers la porte de l’édifice ? Les concepteurs du porche se privent ici d’une utilisation avantageuse du thème dans son contexte visuel qui aurait fait de la procession des Mages la préfiguration de celle des élus entrant dans le royaume tout autant que celle de l’Adoration éternelle des Vieillards du tympan15. Pourtant, ni la citadelle qu’évoque le porche, ni le tympan, ni même les écrans sculptés latéraux ne se rapportent à une vision future et il n’existe aucune frontière temporelle entre les différents segments de l’ensemble iconographique.
16Le porche semble plutôt exprimer très concrètement le rôle que l’abbatiale clunisienne s’octroie dans l’aide et l’intercession pour les défunts, et qu’elle revendique dans le siècle. Dominique Iogna-Prat relevait l’essor du culte pour les morts, dès la fin du xe siècle, dans la liturgie clunisienne et les proportions qu’il avait prises au xiie siècle16. Hugues d’Amiens († 1164) écrit en tant que prieur de Saint-Martial de Limoges dans ses Dialogues (contemporains du porche de Moissac) que le sacrement de l’autel et l’Hostia generalis engendrent les fidèles et rachètent l’âme du défunt. Le sacrement est opéré pour les fidèles passés, présents et futurs, il est adressé aux vivants comme aux morts dans l’espoir que tous rejoignent le Sein d’Abraham17. La communion des mondes des vivants et des morts autour de l’autel relève d’une ecclésiologie universelle clunisienne qui englobe les deux sphères et qui gagne en importance.
17Avec ce filtre de lecture, l’apparente anomalie du mur oriental prend sens. Remarquons d’abord que le relief de l’Incarnation couvre le mur oriental, soit la direction du sacrifice, alors que celui du jugement individuel orne le mur occidental. Sans aucun doute, les Mages en adoration annoncent les Vieillards mais c’est bien l’offrande qui est la thématique la plus prononcée sur ce relief18, ce que souligne l’étroite connexion avec la Présentation au Temple du registre supérieur qui fait se superposer le don des Mages avec celui fait à l’autel. Elle rappelle au fidèle, qui a dû faire acte de pénitence à l’entrée du porche devant l’image saisissante des tourments infernaux, de soutenir l’activité sacramentelle et spirituelle de l’abbaye pour le salut des morts et des vivants. La cité, en apparence céleste, est donc ici implantée sur terre, parmi les fidèles laïcs. Elle est l’image de la citadelle clunisienne, de la Castra coelistica, monument élevé pour la revendication d’un pouvoir spirituel et financier face aux élites laïques et séculières.
L’Entrée des nations dans la Jérusalem céleste
La ville peut se passer de l’éclat du soleil et de celui de la lune, car la gloire de Dieu l’a illuminée, et l’Agneau lui tient lieu de flambeau. Les nations marcheront à sa lumière, et les rois de la terre viendront lui porter leurs trésors. Ses portes resteront ouvertes le jour – car il n’y aura pas de nuit et l’on viendra lui porter les trésors et le faste des nations. Rien de souillé n’y pourra pénétrer, ni ceux qui commettent l’abomination et le mal, mais seulement ceux qui sont inscrits dans le livre de vie de l’Agneau (Ap 21, 23‑27).
18La mise en image de ces versets choisit habituellement pour motif privilégié la cité elle-même, construite d’après la description du chapitre 21. L’édifice est très diversement figuré, souvent dévoilé, peuplé d’élus ou encore investi du rayonnement de l’Agneau. La marche des nations à la lumière éternelle ne connaît pourtant pas d’iconographie définie et nous proposons l’idée que plusieurs processions des Mages en sont l’illustration directe. Néanmoins, là encore, le développement tiendra compte de l’interprétation eschatologique des images qui nécessite d’être modulée. Trois décors serviront la réflexion : le portail très problématique de la Madeleine de Neuilly-en-Donjon, celui de l’enceinte du prieuré d’Anzy-le-Duc et celui de l’église Saint-Barthélemy de Fleury-la-Montagne, tous trois chronologiquement et géographiquement proches. Le tympan de la prieurale Notre-Dame de Mimizan apportera enfin quelques éléments d’interprétation dignes d’intérêt.
19Le tympan de l’église Sainte-Marie-Madeleine de Neuilly-en-Donjon (figure 65) est une pièce célèbre du corpus d’œuvres attribuées à un ou plusieurs ateliers actifs en Brionnais entre 1120 et 114019. Il se compose d’un tympan sur linteau inséré dans un arc légèrement outrepassé retombant sur deux colonnes d’ébrasement coiffées de chapiteaux historiés. Par ses dimensions et sa sobriété, le portail est à la mesure d’un édifice modeste qui tranche avec sa grande qualité plastique et la complexité de son iconographie.
20L’Épiphanie des Mages centralise toute la construction iconographique. Au centre du tympan, les trois Rois, imberbes, coiffés de petites couronnes plates selon l’art de l’atelier du Donjon, marchent l’un derrière l’autre. Le premier s’incline et embrasse la main de l’Enfant qui tient déjà la première offrande alors que les deux autres élèvent chacun un livre scellé, reconnaissable à ses pentures métalliques20. Au-dessus du second mage éclôt l’étoile végétale à double corolle inhabituellement grande21. La Vierge à l’Enfant est assise sur un haut trône architecturé et abritée sous un arc retombant sur deux colonnes en faible relief. Le reste de la composition est unique. À la place du témoin se tient un ange porteur d’un livre, détail commun à quelques reliquaires émaillés de l’Œuvre de Limoges, notamment celui conservé au Musée national du Moyen Âge22. Toutefois, l’ange du tympan diffère en tenant son livre ouvert pour visiblement y écrire. Quatre anges à l’olifant sortent en buste d’une muraille qui occupe toute la partie basse du tympan et qui semble contenir l’ensemble des personnages. Enfin, un bœuf et un lion ailés, adossés dans la partie inférieure, servent littéralement de plateforme à l’Épiphanie.
21Deux scènes se partagent le linteau. À gauche, Adam et Ève flanqués de l’Arbre de vie et de l’Arbre de la connaissance commettent la Faute ; à droite, la Cène occupe les deux tiers de la pièce, avec ses treize personnages nimbés répartis derrière la table. À ceux-ci s’ajoute Marie Madeleine pénitente extraite du Repas chez Simon pour créer une synthèse iconographique. Pour finir, Daniel dans la fosse aux lions recevant le secours d’Habacuc porté par l’ange et deux figurations de péchés23 occupent respectivement les chapiteaux d’ébrasements droit et gauche.
22Plusieurs auteurs ont compris l’incohérence apparente des sculptures du portail comme le résultat d’un agencement d’éléments triomphaux disparates sans souci de cohérence globale24. Richard Hamann relevait, le premier, l’orientation eschatologique du tympan en rapprochant les anges à l’olifant de ceux réunissant les « élus des quatre vents » (Mt 24, 29‑31), tout en y voyant une simple évocation inaboutie du Jugement dernier25. L’auteur ne prête en revanche aucune attention aux deux bêtes du registre inférieur qui concentrèrent par la suite toutes les attentions. Émile Mâle identifiait les puissances maléfiques terrassées par le triomphe de la Vierge nouvelle Ève26, idée que précisait l’abbé Terret en reconnaissant l’aspic et le basilic du Psaume 91 foulés aux pieds par la Vierge en référence à la prophétie faite au serpent de la Genèse (Gn 3, 15)27, reliant ainsi Ève pécheresse, Madeleine pénitente et Marie nouvelle Ève. Henri Focillon et Jurgis Baltrušaitis, dans une optique formaliste28, proposaient une réminiscence de l’art sumérien alors que Marcel Aubert tentait une nouvelle approche en associant le bœuf, le lion et l’ange au livre aux symboles de Luc, Marc et Matthieu, les trois évangélistes de l’Enfance29. L’absence de l’aigle invalide cette hypothèse, le tétramorphe ne pouvant être amputé, d’autant que le lion et le bœuf, certes ailés, ne tiennent aucun livre alors que le supposé ange de Matthieu se sert du sien pour écrire30. Walter Cahn, pour sa part, rejette l’idée d’un triomphe sur le mal en raison de la morphologie des animaux clairement définie31. Tout en intégrant l’idée d’un tétramorphe tronqué, il proposait d’y associer seulement le lion et le bœuf, les habituels gardiens du trône des Majestas domini32, alors que l’ange guiderait les Mages. Les anges à l’olifant seraient alors la personnification des vents diffusant le message auquel répondent les Mages. Marie-Louise Thérel proposait une lecture apocalyptique développée33 en opposant à Marcel Aubert et Walter Cahn la posture soumise des deux animaux, tout en rejetant l’illustration du Psaume 91. Elle identifiait un récit apocalyptique condensé en quelques scènes clés, débutant avec les anges buccinateurs du septénaire des trompettes (Ap 8, 1‑9, 21) se poursuivant par l’annonce de la consommation du mystère de Dieu avec l’ange au codex qui serait celui de l’épisode du livre amer (Ap 10). Le reste du tympan concentrerait les dernières prophéties consignées dans ce livre : la femme parturiente (Ap 12) figurée par la Vierge à l’Enfant terrassant les deux bêtes au service du Dragon, issues de la terre et de la mer (Ap 13, 1‑11). Pour conclure, les Mages, personnifications des nations, entreraient dans la Jérusalem nouvelle (Ap 21, 24).
23L’interprétation apocalyptique de Marie-Louise Thérel, particulièrement celle des deux monstres, est séduisante. Le lion pourrait en effet se rapporter à la panthère surgie des mers ou au léopard que le sculpteur semble avoir voulu tacheter34. Mais l’agneau parlant comme un dragon sorti de terre (Ap 13, 11) ne correspond pas au bœuf que le sculpteur veut faire reconnaître. Il serait enfin peu probable qu’un cycle apocalyptique si étendu puisse être condensé en un seul épisode de l’Enfance. Avec ces réserves, la lecture apocalyptique paraît donner la bonne orientation.
24Sur cette base, remarquons pour notre part que l’Adoration des Mages du tympan porte le souvenir de l’entrée des Mages dans le palais de la Vierge que nous avions vu absorbé par la Vierge en trône elle-même. Les Mages s’apprêtent ainsi à franchir l’arcature placée en retrait, dont Marie constitue la porte, le premier mage pénétrant ainsi dans l’espace sacré que délimite le dais du trône. La remarque, formelle, serait fragile si elle n’était pas tout aussi valable pour l’ébrasement de Chassenard et pour le tympan de l’enceinte du prieuré d’Anzy-le-Duc (figure 66) dont l’iconographie a maintes fois été liée à celle de Neuilly-en-Donjon. À Anzy-le-Duc, le premier mage pose le pied sur la base de la colonne du dais pour venir, comme à Neuilly, embrasser la main du Christ. Dans les deux cas, Marie figure donc la Vierge-Église féconde mais aussi la porte close du temple du livre d’Ézéchiel (Éz, 44, 1‑2).
25Toutefois, plusieurs éléments du récit apocalyptique enrichissent une Épiphanie somme toute classique dans son noyau élémentaire. Les anges à l’olifant d’abord, sans qu’ils puissent être reliés à un passage scripturaire précis, portent le message au monde. L’ange scribe, quant à lui, crée une relation avec un élément jusqu’à présent passé sous silence. Derrière la table de la Cène, un apôtre plus jeune que ses voisins (imberbe) est le seul à tourner le visage vers le spectateur en lui présentant un livre ouvert. Il paraît légitime de reconnaître là saint Jean et son livre ouvert offrirait un indice pour comprendre le fonctionnement de l’image.
26La Vierge est donc la nouvelle Ève destinée à ouvrir les portes que la mère originelle du linteau avait fermées. L’entrée des Mages dans le palais se monumentalise en conséquence, ce que le sculpteur traduit par les murailles de la Jérusalem nouvelle qui traversent de part en part la base de la lunette du tympan. Dans ces conditions, le Verbe incarné présenté aux trois Rois devient une image condensée de la ville céleste. Les Mages sont les rois des nations élues, consignées dans le Livre de Vie que tient l’ange scribe et c’est ce même livre révélé aux hommes qui est préfiguré par la prophétie scellée que tiennent les rois35.
27Ceci étant établi, comment interpréter les animaux adossés sous le trône de la Vierge ? Toute la difficulté résidait jusqu’à présent dans leur définition soit positive, soit négative. Les interprétations d’Émile Mâle, Victor Terret et celle plus exégétique de Marie-Louise Thérel sont construites, cohérentes et confortées par plusieurs exemples de Vierge à l’Enfant sauroctones dans un contexte d’Adoration des Mages. Sur l’un des chapiteaux du musée des Augustins de Toulouse (figure 23), sur son semblable du cloître disparu de Lombez (figure 24)36, ou encore sur le fragment sculpté remployé de l’église Santa Maria della Pieve d’Arezzo, un monstre est en effet lové sous les pieds de la Vierge37. D’autres exemples montrent la Vierge seule, enrichie du même détail : celle du relief remployé à l’entrée de l’église de Saint-Aventin qui écrase un monstre hideux38, celle de Solosona qui foule aux pieds un oiseau et un monstre simiesque décrivent la victoire de la nouvelle Ève sur le démon. Tous diffèrent pourtant du tympan du Donjon où ce sont deux bêtes immenses, serviles sans être agonisantes, qui sont placées sous les pieds de la Marie.
28Remarquons en premier lieu que le sculpteur a insisté sur les attributs anatomiques de chaque animal : cornes, museau et sabots fendus pour le bœuf, crinière et pattes griffues pour le lion. Peu d’images associent les deux animaux mais l’ornementation des façades plus importantes intègre bien souvent un tel couple zoomorphe. Les protiri italiens reposent souvent sur des lions et griffons stylophores39, placés de part et d’autre des portes comme des gardiens du sanctuaire et, dans quelques exemples, un bœuf et un lion sont ainsi couplés.
29La remarque ne se limite aucunement à l’art roman padouan. Dans un article de 1862 paru dans la Revue de l’art chrétien, l’abbé Corbet répondait à l’interrogation d’un curé vendéen sur la présence au portail de son église, Saint-Pierre de Mortagne (Deux-Sèvres), d’un lion et d’un bœuf opposés de part et d’autre du portail40. Les deux auteurs expliquent cette curiosité à l’aide d’un extrait du Manuel des divins offices de Guillaume Durand : « Des peintures ou des représentations, les unes sont sur l’église, comme le coq ou l’aigle, les autres hors de l’église, à savoir : aux portes et au front du temple, comme le bœuf et le lion41 ». L’abbé Corbet fait également un intéressant rapprochement avec les deux statues d’évêques provenant de l’abbaye Notre-Dame de Moreaux (Vienne), respectivement posées sur un lion et un bœuf sculptés sur les consoles. Ces deux statues flanquaient le portail de l’abbaye au niveau des archivoltes sur lesquelles on pouvait lire jusqu’au xixe siècle : vt fvit introitvs templi s [an] c [t] i salomonis sic est istvs in medio bovis atq[que] leonis42 (« telle que fut l’entrée du saint-Temple de Salomon, ainsi que se présente celle de ce temple, au milieu, entre le bœuf et le lion »)43. Cette précieuse inscription donne en toute lettre une explication qui pourrait convenir aux nombreux autres couples de lion et de bœufs aux façades de plusieurs édifices des xiie-xiiie siècles. L’épigraphie évoque le temple de Salomon et plus particulièrement les animaux qui en flanquent l’entrée, absents des descriptions bibliques (1R 5, 9‑9, 25 et 2Ch 3, 1‑7, 11), en opérant une confusion avec les lions du trône royal, les douze bœufs de la mer d’airain et les deux colonnes qui sont les seuls éléments placés devant l’entrée du Temple44. Il est à noter que ces cerbères des sanctuaires médiévaux respectent souvent les mêmes modalités, placés en hauteur selon un ordre apparemment défini (le bœuf à gauche et le lion à droite) et humblement inclinés, tels qu’ils apparaissent par exemple au sommet des deux colonnes de la façade occidentale de Chartres45. Nous proposons donc d’envisager les animaux du Donjon comme la retranscription dans l’image d’un élément architectonique visant habituellement à sanctuariser la porte de l’édifice. Adossés sous la Vierge, elle-même posant un pied sur la croupe de chacun d’eux, ils flanquent la porte du ciel et amplifient l’allégorie de la porte close du temple en la transposant dans un registre céleste.
30La lecture apocalyptique devrait ainsi être réduite aux deux derniers chapitres du livre. Au milieu des anges à l’olifant annonçant la consommation du mystère, la Vierge à l’Enfant trône sous son dais, au milieu des remparts de la Cité sainte qui s’est faite belle, comme une jeune mariée (Ap 21, 2). Au sommet brille une gigantesque étoile végétale, le rejeton de la race de David, l’Étoile radieuse du matin. (Ap 22, 16), le flambeau qui rayonne au milieu d’une ville qui peut se passer de l’éclat du soleil et de la lune (Ap 21, 23). À la lumière de l’agneau marchent les Rois mages, rois des nations de la terre qui lui portent leurs trésors (Ap 21, 24). L’Ange scribe inscrit le nom des élus dans le livre de vie de l’Agneau pour que rien de souillé n’y pénètre (Ap 21, 27). Enfin, le lion et le bœuf sacralisent la porte toujours ouverte de la cité qu’ils gardent. Au linteau, au-dessous de la vision, Jean présente la révélation au spectateur, commandé par l’ange de ne pas tenir secrètes les paroles prophétiques de ce livre (Ap 22, 10).
31Le linteau oblige cependant à recentrer le discours de l’image vers une eschatologie présente. En effet, entre Ève et Marie s’intercale Marie Madeleine pénitente, implorant sa rédemption au pied du Christ, pour établir un renvoi visuel entre la femme pécheresse et le premier mage s’humiliant devant le Christ. Les Rois mages incarnent donc ceux qui pour avoir lavé leurs robes de leurs péchés comme Marie Madeleine, sont autorisés à s’approcher de l’Arbre de Vie (Ap 22, 14)46. Cette précision fait de la vision du tympan de Neuilly-en-Donjon une promesse en réponse à l’atmosphère de supplication propre à la liturgie eucharistique au moment du libera nos. Daniel secouru par Habacuc sur le chapiteau de l’ébrasement droit, confirmerait cette idée puisque l’épisode est souvent utilisé comme l’illustration du chant « De ore leonis libera me, Domine » extrait du Psaume 21 : « salva me ex ore leonis et a cornibus unicornium humilitatem meam » (Ps 21, 22)47, trope régulièrement mobilisé pour l’office des morts. La psychomachie de l’ébrasement gauche ne ferait que renforcer encore la supplication.
32Il est donc tentant de voir se superposer sur un second niveau de lecture les animaux acrotères à ceux mentionnés par le psalmiste. La supplication et la rédemption sont en effet si marquées sur ce portail que toute lecture eschatologique future s’en trouve éludée au profit d’une eschatologie réalisée. C’est durant la vie terrestre, par la rédemption, le sacrement et le devoir du chrétien à l’autel que se joue le sort de l’âme.
33Le portail de l’enceinte du prieuré d’Anzy-le-Duc peut être compris dans le même champ thématique. L’œuvre, d’une facture proche de celle du Donjon, présente une iconographie similaire48 malgré son opposition plus explicite encore entre la Faute et l’Épiphanie. De la cîme de l’Arbre de Vie, placé immédiatement derrière le trône de la Vierge, naît un rinceau végétal épanoui sur toute la courbure du tympan et, de cette canopée luxuriante éclot au-dessus des Mages la même étoile à double corolle qu’à Neuilly-en-Donjon et Chassenard. La dialectique du discours du tympan est limpide : les Mages se présentent devant la porte fermée par Ève pour regagner le Paradis perdu. Le salut de l’âme se joue cette fois au linteau que se partagent les élus accueillis dans un petit édicule à gauche et les damnés emprisonnés dans les anneaux d’un monstre reptilien à droite. Si une telle partition évoque le Jugement dernier la lutte des deux anges contre le démon apporte une clé de lecture49. L’un protège le monument paradisiaque, l’autre, juste derrière la bête, tient la balance pour juger un groupe de personnages suppliants. Au centre, d’autres figures s’échappent des circonvolutions du Léviathan pour implorer la clémence de leurs juges. Cette dispute entre anges et démons pour le partage des âmes se comprend dans la perspective du Jugement individuel50, ce que confirme la position de ce tympan d’enceinte, élevé comme une alerte pour le fidèle sur le chemin menant au cimetière paroissial.
34Le tympan de Neuilly-en-Donjon pose une importante question. L’Entrée finale des Nations dans la Jérusalem céleste ne connaissant pas de formulation iconographique spécifique, l’Adoration des Mages peut-elle s’y substituer dans une vision eschatologique finale ? Deux décors monumentaux paraissent correspondre à cette analyse, le tympan de l’ancienne prieurale de Mimizan et celui de l’Église Saint-Barthélemy de Fleury-la-Montagne.
35Le tympan de Mimizan daté des premières années du xiiie siècle, est abrité sous un clocher-porche, seul vestige de l’ancienne église prieurale détruite en 189851. L’adoration des Mages occupe toute la surface d’un tympan en croissant adapté à l’arc brisé de la porte (figure 67), cerné de trois archivoltes historiées. Les Vierges sages et les Vierges folles se répartissent sur la voussure interne, de part et d’autre de la demeure de l’Époux placée à la clé de l’arc. Douze prophètes sont sculptés dans la circonférence de l’arc médian, pour la plupart anonymes, bien que David et la Sibylle soient identifiables. Les travaux des mois et un zodiaque désorganisé ponctuent l’arc externe. Une frise de palmettes plates s’ajoute à la décoration de l’archivolte, sur les bandeaux intermédiaires, interrompue pour l’arc interne par l’Agnus Dei. En surplomb du portail est agencé un Apostolado, un type de groupe sculpté composé de douze statues d’apôtres en pied ou en trône, fréquent en Espagne. À Mimizan, dix apôtres flanquent le Christ tandis que deux sont placés de part et d’autre de l’archivolte.
36Tous ces éléments, le collège apostolique participant habituellement au Jugement dernier (Mt 19, 28 et Ap 20, 11), la parabole des Vierges (Mt 25, 1‑13), le cosmocentrisme établi par le zodiaque et l’annonce de la consommation du mystère par les prophètes, sont autant de secteurs concourant à la composition d’un ensemble deutéroparousiaque qui influent directement sur le tympan. Ce dernier est articulé par la Vierge à l’Enfant couronnée, placée au centre d’un triptyque. À gauche, les trois Rois mages avancent en une procession reproduisant le mouvement des Vierges sages. Leurs trois montures sont parquées dans l’écoinçon du tympan. Joseph endormi et Salomé, la sage-femme incrédule élevant ostensiblement sa main guérie, se succèdent à droite. Plusieurs détails font intrusion dans la composition, en premier lieu les deux arbres élevés côte à côte derrière le premier mage. Compte tenu du contexte iconographique décrit ci-dessus, reconnaissons là les arbres de vie plantés au milieu de la Jérusalem céleste, fructifiant douze fois par an et capables de guérir les nations (les Mages de leur paganisme et Salomé de son manque de foi)52. Dans cette optique, la Vierge à l’Enfant enrichie des deux arbres fructueux est bien la Jérusalem nouvelle, au sein de laquelle trône l’Agneau. Ce dernier, roi en sa cité, est décliné à quatre niveaux sur l’axe central du portail : l’Enfant du tympan, l’Agnus Dei qui le surplombe sur la bordure du tympan, l’époux dans sa demeure accueillant les Vierges sages et refusant, à droite, les Vierges folles sur la voussure suivante, et la Majestas Domini qui surplombe l’ensemble. Évoquons enfin le dernier élément de la composition, la fontaine de vie abritée sous une arcade, dans l’écoinçon droit du tympan, détail qui se retrouve à l’identique au tympan de Conques, sous l’arc en surplomb du Royaume céleste.
37Aucun élément ne moralise donc le discours du portail de Mimizan, exception faite de la sage-femme pénitente, ce qui autorise une lecture de l’Adoration des Mages dans un contexte d’eschatologie future, comme l’entrée finale dans la ville céleste des Rois des nations élues, mentionnées allégoriquement par la parabole des Vierges sages et des Vierges folles. Plus encore, l’Entrée des nations semble littéralement se substituer à la visite des Mages avec une économie de moyens étonnante.
38Après un détour par l’église de Mimizan, revenons en Brionnais, cette fois à son extrême nord, pour interroger le portail de la petite église Saint-Barthélemy de Fleury-la-Montagne (figure 68)53. D’une sobriété propre à la sculpture bourguignonne septentrionale, il est composé d’un tympan sur linteau posé sur deux corbeaux sculptés et encadré d’une archivolte nue retombant sur deux colonnes d’ébrasement. Cet agencement architectonique est similaire aux portails géographiquement proches de Saint-Pons de Baugy, de l’église Saint-Pierre et Saint-Paul de Châteauneuf, de Saint-Marcel d’Iguerand et, plus particulièrement, de celui de l’église de Montceaux-l’Étoile.
39Le cortège des Mages s’étend sur la longueur du linteau rythmé par trois importants médaillons décoratifs. Deux d’entre eux, les plus visibles, sont placés à chaque extrémité. Le troisième, composé de palmettes, s’insèrent au centre de la composition. À l’intérieur du premier médaillon, deux chevaux au repos sont laissés aux soins d’un écuyer. Les trois Rois mages se succèdent au centre du linteau. Les deux premiers, en tenue d’apparat, sont en adoration alors que le dernier, à cheval, est encore dans le temps du voyage. La Vierge à l’Enfant est quant à elle inscrite dans le dernier médaillon, lui tenant ainsi lieu de mandorle. Ce détail constitue sans doute le point le plus remarquable de l’image.
40L’analyse de la théophanie décrite au tympan de Fleury présente également quelques difficultés. Un Christ en gloire dans sa mandorle est assis sur un trône en croissant, les pieds posés sur un support ajouré d’une arcade. Il tient dans sa main gauche une importante croix gemmée et élève la paume de sa main droite pour en exhiber la plaie. L’Alpha et l’Oméga gravés dans la lancette supérieure de la mandorle, au plus proche de son nimbe crucifère, complètent une vision conforme à celle du premier chapitre de l’Apocalypse qui intègre les signes de la Passion de la Seconde Venue (Mt 25, 31‑36)54. La théophanie de Fleury-la-Montagne est donc celle d’un Christ deutéroparousiaque glorifié des instruments de sa Passion. Elle s’accorde d’une certaine manière avec celles des portails des églises du Brionnais qui optent pour la gloire du Christ comme ornement du tympan, souvent une Majestas Domini classique, parfois accompagnée d’un couple d’anges soutenant la mandorle. D’autre pièces célèbres proposent des images développées de l’Ascension, comme à Montceaux-l’Étoile et sur les deux tympans d’Anzy-le-Duc, celui de la prieurale et celui conservé au musée du Hiéron de Paray-le-Monial. Or, le tympan de Fleury-la-Montagne construit une image synthétique différente, spécialement adaptée pour ce portail.
41Le portail de Montceaux-l’Étoile lui est pourtant très proche au point de pouvoir être étudié en parallèle. À Montceaux, le Christ de l’Ascension du tympan est inscrit dans sa mandorle, portée par deux anges, au-dessus des apôtres et de la Vierge comme sur les deux exemples d’Anzy-le-Duc. Il tient également une longue croix pattée sur une image qui superpose donc aux derniers instants terrestres du Christ le thème de son retour. Michel terrassant Satan sur le corbeau gauche de la porte et l’ange réprimandant saint Jean pour l’avoir adoré (Ap 19, 10) sur celui de droite enrichissent la dimension deutéroparousiaque55.
42Comprise sur ce registre, la théophanie de Fleury-la-Montagne prend sens en considérant que le tétramorphe ou les deux anges porteurs de mandorles, qui complètent habituellement les gloires christiques bourbonnaises, sont éludés au profit de deux personnages visiblement évangéliques. À gauche, la femme voilée contemplant la vision glorieuse en tenant un récipient et positionnée devant un édicule vide, ne peut être que Marie Madeleine myrrhophore devant le sépulcre. À droite, un second personnage lui fait pendant. Nimbé, siégeant sur un large trône de pierre, il tient dans sa main un codex et repose son visage dans son autre main. Il est possible d’identifier saint Jean, témoin et prédicateur de la vision deutéroparousiaque qui lui fait face. Jean est par ailleurs présent sur le chapiteau d’ébrasement de Montceaux-L’Étoile et il tenait un rôle important au linteau de Neuilly-en-Donjon. Pourtant, sur le tympan de Fleury-la-Montagne, compte tenu de la nature de la vision, il aurait été plus légitime de voir placée de part et d’autre du Christ, la Vierge en regard de Jean l’Évangéliste, mais c’est pourtant bien Marie Madeleine qui s’est vu attribuer pour rôle d’attester de la résurrection du Christ. Par son offrande, elle répond également à celle des Mages venant honorer la première Épiphanie.
43La Seconde Venue complétée des personnages évangéliques du tympan de Fleury-la-Montagne est ainsi complétée par une seule scène de l’Enfance au linteau, celle de l’Adoration des Mages. Cette dernière ne sert donc pas dans ce cas de précédent évangélique au récit d’événements futurs, mais s’intègre à un même champ théophanique. Au retour du Fils de l’homme sur le tympan répondent les rois des nations sur le linteau et, si la séparation persiste au niveau architectonique, notons que le portail de Montceaux-l’Étoile a su abolir cette frontière pour unifier son discours. Ajoutons que l’Épiphanie du linteau de Fleury est anormale. Le médaillon dans lequel la Vierge est confinée, loin d’être une pâle copie décorative des linteaux de Moissac et de Beaulieu56, dessine une véritable mandorle autour de la Vierge à l’Enfant. Le médaillon de gauche, que les chevaux traversent, marque le seuil de l’Aula regia mariale, et l’on reconnaît l’étoile, absente de la composition sous sa forme habituelle, dans la couronne végétale centrale. Ce n’est plus la Sedes Sapietiae qui fait face aux Mages mais une Majestas Mariae. Sur le linteau de Fleury-la-Montagne, la frange crénelée recouvrant le bord interne du premier médaillon, et démultipliée en un intéressant effet d’abstraction, évoque bien l’entrée dans la Jérusalem nouvelle alors que la Vierge, auréolée du même motif, est la cité elle-même au centre de laquelle trône l’Agneau. Ainsi isolée de tout contexte qui ne soit pas eschatologique, l’Adoration des Rois mages ne peut que se rapporter, dans ce cas précis, à l’entrée glorieuse des nations élues dans le Royaume.
44L’analyse de ces quelques décors montre que si la lecture anagogique de l’Adoration des Mages paraît intrinsèque à l’épisode, elle se fait fuyante devant toute tentative de l’isoler. Il est pourtant certain que la sotériologie dont les peintres et les sculpteurs des catacombes investissaient le thème dans un contexte funéraire, n’est pas celle des portails médiévaux. La polysémie de la problématique eschatologique s’entend ici dans une ecclésiologie plus avancée, évoluant sur deux niveaux.
45Le premier est celui de l’eschatologie réalisée dans lequel l’Église terrestre assume l’économie du salut des chrétiens. À ce premier niveau, le corps chrétien se partage entre le monde des vivants et celui des morts de part et d’autre de l’angoisse du Jugement de l’âme57. L’offrande des Mages étant essentiellement devenue une offrande à Dieu, donc une offrande à l’autel, officialisée et assumée par l’Église, le don des trois Rois peut facilement devenir une offrande votive. Celle-ci, adressée à l’autel, seul lien dans la solidarité entre les deux mondes, peut soulager l’angoisse du donateur, aussi bien celle pour sa propre rédemption que celle pour des âmes de ses morts. L’Adoration des Mages devient ainsi théophanie eschatologique, en tant que modèle évangélique de rédemption pour un au-delà immédiat.
46Le second niveau est celui de l’eschatologie conséquente, dans laquelle l’Épiphanie évangélique devient Théophanie deutéroparousiaque. Sur ce dernier niveau, les Rois mages ne sont plus seulement un modèle de foi chrétienne, un exemplum canonique que le chrétien devrait imiter en prévision des événements à venir, ils entrent littéralement dans le champ iconographique apocalyptique. Ils sont les rois des nations entrant dans la Jérusalem annoncée, projection céleste de l’Église, dans une communion directe avec le divin qui rend tout sanctuaire inutile. L’Épiphanie annonciatrice de l’Évangile devient théophanie ultime promise par la Nouvelle Alliance. Dans ce contexte, c’est encore une fois la Vierge à l’Enfant qui permet la transgression. Elle n’est plus simplement la Vierge-Église réfléchissant la cité céleste, elle est la cité elle-même, l’épouse du Christ que l’Agneau irrigue de sa lumière. Remarquons cependant avec quelle aisance les Rois mages accompagnent la Vierge sur ce dernier niveau de lecture. La formule iconographique établie au cours de cette enquête n’est aucunement altérée et seuls ses points de connexion avec le reste de l’ensemble visuel orientent la lecture vers la fin dernière. Dans ce contexte, l’image ne sacrifie rien de son cérémonial féodal. Les Rois mages, en tant que figures à la fois englobantes et diverses, pénètrent dans le Royaume comme le feraient des rois chrétiens lors d’une entrée royale. Or n’est-ce pas le propre de la persona royale de se partager ainsi sur deux dimensions selon la théorie des deux corps du roi58 ?
47Envisageons, pour conclure, l’Adoration des Mages comme une image ecclésiologique cohérente et aboutie à chaque étape de son élaboration, non dans une évolution linéaire, mais par réinitialisation de la formule par l’époque qui en prend possession. Les xe-xiie siècles témoignent d’une société en mutation et proposent donc une étape déterminante du processus. La première remarque concerne l’inflation considérable du champ d’application de l’épisode et de ses acteurs. Le thème absorbe tout autour de lui et s’impose à la fois comme une image de l’Incarnation autosuffisante et un modèle universel de l’offrande eucharistique, plus généralement de l’offrande à Dieu, seul témoignage pour l’homme médiéval de son adoration du divin. Les Mages s’immiscent de fait dans l’économie du salut en tant qu’épisode historique fondateur de la promesse de rédemption ; en tant que modèle de foi par la confusion des mystères de l’Incarnation et de l’Eucharistie ; en tant qu’illustration littérale de cette espérance lors de l’ultime théophanie.
48Conçu comme un prototype évangélique de l’union mystique entre l’homme et le divin, il est l’un des rares épisodes de l’Enfance pouvant devenir l’organe autonome et structurant de grands ensembles iconographiques tout en se projetant dans un univers séculier. Les Mages sont entrés dans la crèche et ont adoré le Christ, comme ils entreront au Royaume dans un futur indéterminé à la manière d’ambassadeurs royaux, entités enveloppantes d’une humanité diverse. Mais les deux extrémités de l’histoire évangélique sont construites sur la codification de la relation quotidienne avec le Divin établie par une église durablement implantée dans le temps et dans la société. Si l’autel se fait le socle officiel des noces du Christ avec son Église, il devient un point de connexion des diverses dimensions de la société féodale.
49Ainsi, l’union mystique entre la divinité et l’humanité qu’est fondamentalement l’Épiphanie est soumise, au xiie siècle, à cette codification des liens régissant chacun des organes de la société féodale, seule structure accessible pour penser le monde spirituel. L’offrande des Mages devient un don officialisé par une entité légitime et par son caractère public et toujours soumis au regard de Dieu. Dans ce contexte, l’épisode qui marque le plus clairement cette communion connaît une fortune exceptionnelle dans l’iconographie que les textes ne relaient que partiellement.
Notes de bas de page
1 Ambroise de Milan déclinait l’étoile ainsi : « Donc, cette étoile est la voie ; et la voie, c’est le Christ (Jn 14, 6) ; c’est que dans le mystère de l’Incarnation, le Christ est l’étoile : car “une étoile s’élèvera de Jacob, et un homme surgira d’Israël” (Nb 24, 17). Aussi bien, où est le Christ, l’étoile est aussi : car Il est “l’étoile brillante du matin” (Ap 22, 16) ; c’est donc par sa propre clarté qu’Il se signale ». Ambroise de Milan, Traité sur l’Évangile de S. Luc, livre 2, 44, op. cit., p. 92‑93. Au xiiie siècle, Antoine de Padoue écrit : « L’étoile, illumination de la grâce divine ou connaissance de la vérité. C’est pourquoi Jésus, de qui vient toute grâce, dit dans l’Apocalypse, au dernier chapitre : “Moi, je suis de la famille et de la branche de David, (je suis) l’étoile éclatante du matin” (Ap 22, 16) ». Antoine de Padoue, Sancti Antonii Patauini Sermones dominicales et festiui ad fidem codicum recogniti, B. Costa, L. Frasson, I. Luisetto, P. Marangon (éd.), Padoue, 1979, Sermo in epiphania Domini, 1, 3, vol. 3, p. 68 et 88.
2 CAO, Respons no 6882 et Antienne no 5344 ; AMS, p. 24 (Respons).
3 H. de Lubac, Exégèse médiévale. Les quatre sens de l’Écriture, Paris, 1993 [1959], p. 621‑681 ; G. Dahan, Lire la Bible au Moyen âge : essais d’herméneutique médiévale, Genève, 2009, p. 199‑224.
4 Y. Christe, L’Apocalypse de Jean : sens et développements de ses visions synthétiques, Paris, 1996 ; Id., Jugements derniers, Saint-Léger-Vauban, 1999, p. 53‑95 ; P. K. Klein, « Programmes eschatologiques, fonction et réception historiques des portails du xiie siècle : Moissac-Beaulieu-Saint-Denis », CCM, 33, 1990, p. 317‑349, Id., « Entre paradis présent et jugement dernier : les programmes apocalyptiques et eschatologiques dans les porches du haut Moyen Âge », dans Avant-nefs et espaces d’accueil dans l’église entre le ive et le xiie siècle, C. Sapin (dir.), Paris, 2002, p. 464‑483 ; G. Lobrichon, « Jugement dernier et Apocalypse », dans De l’art comme mystagogie : Iconographie du Jugement dernier et des fins dernières à l’époque gothique, Y. Christe (dir.), Poitiers, 1996, p. 9‑18.
5 Y. Christe, « À propos des peintures de Saint-Aignan de Brinay : les Innocents du mur est », dans L’emplacement et la fonction des images dans la peinture murale du Moyen Âge, Saint-Savin, 1992, p. 5‑33.
6 J. Lacoste, « Le portail de Mimizan et ses liens avec la sculpture espagnole du début du 13e siècle », Revue de Pau et du Béarn, 2, 1974, p. 35‑69 ; M.‑L. Thérel, Le triomphe de la Vierge-Église, op. cit., et son analyse du tympan de l’église de Neuilly-en-Donjon aux p. 162‑166.
7 Portail provenant de la façade nord de l’église détruite entre 1858‑59 et remonté sur la façade occidentale de l’actuelle église Saint-Pierre de Pompierre construite au xixe siècle. N. Müller-Dietrich, Die Romanische Skulpture in Lothringen, Munich-Berlin, 1968 ; M. Hans-Günter ; J. A. Schmoll, « Sion, apokalyptisches Weib, ecclesia lactans: zur ikonograph. Deutung von zwei roman. Mater-Darstellungen in Metz u. Pompierre », dans Miscellanea pro arte: Ermann Schnitzler zur Vollendung des 60, Düsseldorf, 1965, p. 91‑110.
8 M. Schapiro, « The Romanesque Sculpture of Moissac », AB, 13 (3), 1931, p. 249‑352 et 13 (4), 1931, p. 464‑531, publication partielle de sa thèse de doctorat, The Romanesque Sculpture of Moissac, Ph.D, Columbia University, 1929, publiée dans La Sculpture de Moissac, Paris, 1987. L’analyse spatiale du décor a été tentée par L. Seidel, « The Moissac Portico and the Rhetoric Appropriation », dans Studien zur Geschichte der europäischen Skulptur im 12/13. Jahrhundert, H. Beck, K. Hengevoss-Dürkop (éd.), Francfort, 1994, vol. 1, p. 287‑302 ; Id., « Scriptural Story in Romanesque Sculpture: Architectural Space and Narrative Time », Kunsthistorisches-Jahrbuch-Graz, Erzählte Zeit und Gedächtnis: Narrative Strukturen und das Problem der Sinnstiftung im Denkmal, 29‑30, 2005, p. 21‑28.
9 P. K. Klein, « Programmes eschatologiques… », art. cité.
10 Le mur oriental du porche a subi des dommages dus à l’humidité, accélérés depuis les années 1970. Une campagne d’étanchéisation eut lieu en 1974 sans empêcher la dégradation des parties basses de la structure. Cela concerne les reliefs de l’Annonciation et de la Visitation et les chapiteaux des arcatures (restaurations modernes pour deux d’entre eux) presque entièrement disparus aujourd’hui. Il faut se reporter aux clichés de Jean Dieuzaide dans Quercy roman, Saint-Léger-Vauban, 1959 [1979], pl. 23 et aux moulages fidèles conservés au Musée des Monuments historiques. B. Voinchet, « Le portail de Moissac », Les monuments historiques de la France, 4, 1976, p. 20‑25.
11 J. Baschet, Le sein du père : Abraham et la paternité dans l’Occident médiéval, Paris, 2000.
12 Moissac est un témoin précoce de la royauté des Mages dans les arts monumentaux (1120‑1130). Pour la datation du portail, la chronique de l’abbaye de Moissac mentionne le portail en ces mots : « Fecit fieri (…) portale pulcherrimum et subtilissimi operis constructum ecclesiae dicti monasteri. » Elle a été utilisée pour situer l’élévation du portail sous Ansquetil (abbé de 1085‑1105) croisée avec une épigraphie du cloître (anno incarnation eterni principis millesimo centesimo factum est claustrum istud tempore domini ansquitil abbatis amen) : M. Vidal, Moissac, Saint-Léger-Vauban, 1981 [1976] ; Pour M. Schapiro, La Sculpture de Moissac, op. cit., le portail est le résultat de deux campagnes : le portail en lui-même, édifié en 1115 complété par les murs latéraux entre 1120 et 1130. L’hypothèse a été réfutée. I. H. Forsyth, « Narrative at Moissac: Schapiro’s Legacy », Gesta, 41 (2), 2002, p. 71‑93. Une seule campagne est ajourd’hui acceptée, achevée sous l’abbatiat de Roger (1115‑1131), peu après l’achèvement du cloître.
13 P. K. Klein, « Programmes eschatologiques… », art. cité, J. Baschet, « Jugement de l’âme, Jugement dernier : contradiction, complémentarité, chevauchement ? », RM, 6, 1995, p. 159‑203.
14 Le porche crénelé de Moissac résulte d’une réédification complète par Viollet-le-Duc au xixe siècle mais la restauration est fidèle à l’original : M. Durliat, « Les crénelages du clocher-porche de Moissac et leur restauration par Viollet-le-Duc », Annales du Midi, 78, 1966, p. 433‑447.
15 M. Vidal, Quercy roman, op. cit., p. 34‑38, relie l’adoration céleste des Vieillards et l’Opus Dei assuré par l’abbaye. Les Mages seraient un témoin de la déclinaison thématique de l’Adoration universelle.
16 J.‑C. Schmitt, Les revenants, les vivants et les morts dans la société médiévale, Paris, 1994. Pour l’usage clunisien : D. Iogna-Prat, Ordonner et exclure, op. cit., part. p. 219‑232 ; J. Wollash, « Les Moines et la mémoire des morts », dans Religion et culture autour de l’an Mil : Royaume capétien et Lotharingie, D. Iogna-Prat et J.‑C. Picard (éd.), Paris, 1990 p. 47‑54 ; D. Iogna-Prat, « Les morts dans la comptabilité céleste des Clunisiens de l’an Mil », ibid., p. 55‑69.
17 Hugues d’Amiens, Dialogorum libri VII, PL 192, col. 1137‑1352, d’après D. Iogna-Prat, Ordonner et exclure, op. cit., l’auteur paraphrase le texte p. 220‑221.
18 I. Forsyth, « Moissac: Schapiro’s Legacy », Gesta, 41 (2), 2002, p. 71‑79, interprète ce relief comme un encouragement à la philanthropie des élites locales. L’histoire du Mauvais riche condamnerait les vices de ces mêmes élites. L’auteur remarque que ce qui semble être l’épouse du Mauvais riche, présente dans chaque séquence (gloutonne comme son mari, pleureuse au chevet du défunt et âme tourmentée au côté de celle de son époux) serait l’extension de la personnification de la Luxure, comme son mari serait celle de l’Avarice.
19 N. Stratford « Le portail de Neuilly-en-Donjon », Caf : Bourbonnais, 146, 1988 [1991] p. 311‑338 ; M.‑L. Thérel, Le triomphe de la Vierge-Église, op. cit., p. 162‑166 ; W. Cahn, « Le tympan de Neuilly-en-Donjon », CCM, 8, 1965, p. 351‑364 ; A. de la Morena, « Temas iconograficos en la pintura romanica española: Esterri de Cardos y Maderuelo », Miscelanea de arte, 1982 p. 20‑24, R. Hamann, « Die Salzwerdeler Madonna », Marburger Jahrbuch, 3, 1927, p. 103 ; J. Rodriguez, Neuilly-en-Donjon, Lyon, 1973 ; W. R. Cook, « A New Approach to the Tympanum of Neuilly-en-Donjon », Journal of Medieval History Amsterdam, 4 (4), 1978, p. 333‑345 ; R. Oursel, Les églises romanes de l’Autunois et du Brionnais : Cluny et sa région, Mâcon, 1956, p. 102‑103. N. Stratford, « Le portail roman de Neuilly-en-Donjon », art. cité, propose d’identifier un atelier brionnais, l’« atelier du Donjon », actif entre 1130 et 1140, à l’origine des tympans de Saint-Georges de Chassenard et du portail de l’enceinte du prieuré d’Anzy-le-Duc, des chapiteaux de des églises de Saint-Léger-sur-Vouzance et de Chenay-le-Châtel (détruite), de Melay, de Bois-Sainte-Marie et de Fautrière (déposés).
20 Un livre identique se retrouve sur le chapiteau d’Autun et sur le portail de Vézelay, mais il est exceptionnel de le trouver dans les mains de deux Mages.
21 Étoile identique aux tympan de l’église de Saint-Georges de Chassenard et du prieuré d’Anzy-le-Duc.
22 no d’inv. Cl. 23822.
23 Un démon velu, à la chevelure hérissée enfonçait visiblement une lance ou une tenaille dans la bouche d’un homme couché sur le dos. Sur la face interne, un personnage assis, pieds nus et vêtu d’une aube (il pourrait s’agir d’un ange s’il n’était dépourvu d’ailes) abat une hache sur un homme en cotte de mailles, tenant dans sa main un rouleau non identifié. W. Cahn, « Le tympan de Neuilly-en-Donjon », art. cité, p. 352, identifie l’exécution du messager Amalécite qui apporte la couronne de Saül à David (2Sam 1, 15‑16), sur la base d’un rapprochement avec un chapiteau de Vézelay ; J. Rodriguez, « Neuilly-en-Donjon », art. cité, reconnaît la chute de Simon mage ; N. Stratford, « Le portail de Neuilly-en-Donjon », art. cité, voit un combat de vices et de vertus sur la base d’un rapprochement avec d’autres œuvres du même atelier ; M. Angheben, Les chapiteaux romans de Bourgogne : thèmes et programmes, Turnhout, 2003, interprète le châtiment des péché (de langue et de discorde), p. 427 et 499, interprétation la plus raisonnable.
24 G. Beaudequin, « Les représentations sculptées de l’Adoration des Mages… », art. cité, p. 484.
25 R. Hamann, « Die Salzwerdeler Madonna », art. cité, p. 103.
26 É. Mâle, L’art religieux du xiie siècle, op. cit., p. 430.
27 V. Terret, La sculpture bourguignonne au xiie et xiiie siècle : ses origines et ses sources d’inspiration, t. 2, Autun, Autun, 1914 [1925], p. 35.
28 J. Baltrušaitis, Art sumérien, art roman, Paris, 1934, p. 53‑54. Pour l’auteur, le lion et le bœuf sont des attributs divins dans l’imagerie cappadocienne. H. Focillon, L’art des sculpteurs romans, Paris, 1995 [1931], p. 214 est du même avis.
29 M. Aubert, La Bourgogne, la sculpture, Paris, 1927, p. 72.
30 Pour N. Stratford, « Le tympan de Neuilly en Donjon », art. cité, l’interprétation de Marcel Aubert reste convaincante.
31 W. Cahn, « Le tympan de Neuilly-en-Donjon », art. cité, Pour l’auteur, l’illustration du Ps. 91 respecte une logique de bêtes affrontées alors que les bêtes du tympan sont opposées. On reconnaît par ailleurs sans ambiguïté un lion et un bœuf et non un dragon et un aspic.
32 Ibid., l’auteur remarque que nombre de Majestas Domini circonscrivent le bœuf et le lion au rôle d’acrotères au registre inférieur du tétramorphe. Il cite plusieurs tympans anglais qui ne conservent que deux symboles d’évangélistes dans leur composition (Fownhope, Aston). Ces exemples pourraient toutefois être contestés.
33 M.‑L. Thérel, Le triomphe de la Vierge-Église, op. cit., p. 162‑166.
34 M. Pastoureau, Une histoire symbolique du Moyen Âge occidental, Paris, 2004, p. 56‑59.
35 Le portail de Neuilly-en-Donjon compte cinq livres : deux entre les mains des Mages, le Livre de vie tenu par l’ange, le livre tenu par saint Jean au linteau et celui, fermé, que tient le troisième apôtre en partant de la droite. On peut s’interroger sur la connaissance de légendes sethiennes dont certains points sont transmis par l’Opus Imperfectum in Matthaeum et que nous retrouverions en Bourgogne (Vézelay, Autun, Chassenard).
36 Provenant respectivement des cloîtres de Saint-Étienne de Toulouse (musée des Augustins de Toulouse, no dinv. ME. 28) et de l’abbatiale Sainte-Marie de Lombez (V&A, no d’inv. A.58‑1935).
37 W. Cahn, « Le tympan de Neuilly-en-Donjon », art. cité, p. 356, propose une référence au lion de Juda ainsi que M.‑L. Thérel, Le triomphe de la Vierge-Église, op. cit., p. 164.
38 M. Durliat, Pyrénées romanes, Saint-Léger-Vauban, 1969 [1978], p. 61‑62, fig. 25.
39 C. V. Bornstein, Portals and Politics in the Early Italian City-State: the Sculpture of Nicholaus in Context, Parme, 1988, p. 22‑45.
40 J. Corbet, « Le lion et le bœuf sculptés aux portails des églises », Revue de l’art chrétien, 6, 1862, p. 82‑99. Le père Poisson qui écrit alors à J. Corbet décrit le portail occidental de l’église Saint-Pierre de Mortagne, daté du xiiie siècle et très restauré, mais flanqué d’un lion et d’un bœuf, provenant apparemment de plaques plus anciennes. Aucun des deux animaux ne semble provenir d’un tétramorphe dispersé : aucun ne tient de livre et tous deux adoptent une posture de soumission.
41 Guillaume Durand, Manuel des Divins offices, op. cit., livre I, chapitre 3, p. 41.
42 L’inscription est aujourd’hui perdue (le monument à été détruit entre 1934‑1939), mais elle a été relevée par de nombreux auteurs, voir, CIFM, t. 1, Poitou-Charentes, no 2 : Département de la Vienne, R. Favreau, J. Michaud, E.‑R. Labande, Poitiers, 1975, p. 8‑12. Les deux sculptures sont conservées au Allen Memorial Art Museum du Oberlin College avec leur épigraphie donnant le nom des deux évêques (sans doute Guillaume II Adelelme et son successeur Grimoard). W. Stechow, « Two Romanesque Statues from Poitou », Allen Memorial Art Museum Bulletin, 7 (2), 1949‑1950, p. 28‑38, qui les date entre 1142 et 1155 ; K. Horste, « Romanesque Sculpture in American Collection XX: Ohio and Michigan », Gesta, 21 (2), 1982, p. 122‑125 qui publie deux bons clichés des œuvres (fig. 14 et 15).
43 W. Stechow, « Two Romanesque Statues… », art. cité, et les révisions apportées par G. Gaillard, « Deux sculptures de l’abbaye des Moreaux à Oberlin (Ohio). Études d’art roman », GBA, 1954, p. 81‑90.
44 L’Abbé Guy Villette interprète ainsi les colonnes de la façade occidentale de Chartres, dans deux articles qui seront lus avec précautions : « Le bœuf et le lion : Yakîn et Boaz » et « Le bœuf et le lion à la façade des églises », dans Id., La cathédrale de Chartres : Œuvre de Haut savoir, Chartres, 1994, p. 105‑142 ; 143‑145.
45 À Vézelay, sur la façade occidentale, les deux animaux ornent la base de la voussure externe de l’archivolte du portail central (ca. 1240). Cette partie n’est pas restaurée et les deux bustes apparaissent déjà sur le relevé de Viollet-le-Duc : L. Saulnier et N. Stratford, La Sculpture oubliée de Vézelay : catalogue du Musée lapidaire, Paris, 1984, pl. I, fig. 2, pl. II, fig. 6, pl. III fig. 8 et pl. XI, fig. 41 ; sur la façade de l’église Saint-Sauveur de Dinan, le lion et le bœuf issus d’un tétramorphe perdu (les deux animaux sont porteurs de livres) ont été placés de part et d’autre de la porte, au niveau de l’archivolte.
46 Le linteau témoigne de la diffusion de Marie Madeleine pénitente en Bourgogne ce qui correspond à l’expansion du culte magdaléen vézélien en Bourgogne au xiie siècle : X. Barral I Altet, « L’image pénitentielle de la Madeleine dans l’art monumental roman », MÉFREM, 104 (1), 1992, p. 181‑185 ; D. Iogna-Prat, « La Madeleine du Sermo in veneratione sanctae Mariae Magdalenae attribué à Odon de Cluny », ibid., p. 37‑70 et J. Dalarun, « La Madeleine dans l’Ouest de la France au tournant des xie‑xiie siècles », ibid., p. 71‑119.
47 CAO, Verset no 8005 et Respons no 6395 ; AMS, p. 85‑86, Antienne (Dominica in Palmas) : « Domine ne longe facias auxilium tuum a me a defensionem meam aspice libera me de ore leonis et a cornibus unicornuorum humilitatem mea » (« Seigneur, n’éloignez pas de moi votre secours, voyez à me défendre : délivrez-moi de la gueule du lion, et ma faiblesse, des cornes des licornes. »). R. Favreau, « Le thème iconographique du lion dans les inscriptions médiévales », Comptes-rendus des séances de l’année, Académie des inscriptions et belles-lettres, 135 (3), 1991. p. 613‑636 ; W. Deonna. « Salva me de ore leonis. À propos de quelques chapiteaux romans de la cathédrale Saint-Pierre à Genève », Revue belge de philologie et d’histoire, 28 (2), 1950, p. 479‑511.
48 Le tympan est attribué par N. Stratford à l’atelier du Donjon. La relation entre les deux œuvres a été évoquée par la plupart des auteurs cités précédemment.
49 M. Angheben, « L’iconographie du portail de l’ancienne cathédrale de Mâcon : une vision synchronique du Jugement individuel et du Jugement dernier », CSMC, 32, 2001, p. 73‑87.
50 M. Hamann, Die burgundishe Prioutskirche von Anzy-le-Duc und die romanische Plastik im Brionnais, Wurtzbourg, 2000, p. 165‑169 ; C. S. Pendergast, The Romanesque Sculptures of Anzy-le-Duc, Ph.D, Yale University (1974), 1976, p. 174‑180 ; R. Oursel, « Le portail eschatologique du prieuré d’Anzy-le-Duc, Enfer et Paradis », dans Enfer et paradis : l’au-delà dans l’art et la littérature en Europe, publié dans Les Cahiers de Conques, 1, 1995, p. 103‑110.
51 J. Lacoste, « Le portail de Mimizan… », art. cité, F. Salet, « Mimizan », Caf : Bordeaux, 102, 1939, p. 336‑344, S. Thoin, « L’ancienne église abbatiale de Mimizan, Landes : la restauration du clocher-porche et du porche occidental », Monumental, 2002, p. 140‑143.
52 J. Lacoste, « Le portail de Mimizan… », art. cité, p. 48‑49.
53 G. Beaudequin, « Les représentations sculptées de l’Adoration des Mages… », art. cité, R. Duvernoy, « Remarque sur le portail de Fleury-la-Montagne », BM, 101, 1943, p. 291‑297.
54 R Duvernoy, ibid. Avant lui, A. Mayeux « Le tympan du portail de Montceaux-l’Étoile », BM, 80, 1921, p. 239‑244 excluait l’Ascension du Christ pour ne voir qu’une théophanie apocalyptique.
55 W. J. Travis, « Of Sirens and Onocentaurs: A Romanesque Apocalypse at Montceaux-l’Etoile », Artibus et Historiae, 23 (45), 2002, p. 29‑62. L’auteur utilise les commentaires sur l’Oracle d’Isaïe à Babylone et ceux de l’Apocalypse : Id., The Romanesque Sculpture of Montceaux-l’Etoile : Cross Roads of Cluny and the Brionnais, Ph.D, New York University, 1994, p. 70‑110. Son analyse du portail est complexe mais l’identification de saint Jean est pertinente, le saint paraissant important dans l’iconographie en Brionnais : linteau de Neuilly-en-Donjon, tympan de Fleury-la-Montagne. F. Salet, Cluny, Cluny et Vézelay, l’œuvre des sculpteurs, Paris, 1995, p. 134 et M. Angheben, Les chapiteaux romans…, op. cit., p. 413, ont rejeté cette hypothèse.
56 R. Duvernoy, « Remarques sur le portail de Fleury-la-Montagne », art. cité, p. 296.
57 J. Le Goff, La naissance du Purgatoire, Paris, 1981 ; J.‑C. Schmitt, Les revenants : les vivants et les morts dans la société médiévale, Paris, 1994.
58 E. Kantorowicz, Les deux corps du roi, op. cit.
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