Du Brésil aux Antilles : lorsque des jeux de pouvoir limitent l’archéologie précolombienne
From Brazil to the West Indies: When Power Games Limit Pre-Columbian Archaeology
Résumés
De quelle(s) façon(s) la colonisation a-t-elle impacté l’archéologie précolombienne sur le long terme ? À travers les exemples du Brésil et des Antilles, nous pouvons observer que l’archéologie d’une aire culturelle et géographique peut se voir limitée (ou rendue difficile) par deux schémas d’expansion et de domination coloniale différents. Ces schémas ont à chaque fois pour conséquence la modulation des résultats archéologiques obtenus, découlant soit directement et sciemment du pouvoir local en place, qui filtre et manipule des données ; soit d’une mise en place plus inconsciente, par le biais de déplacements forcés de populations et par la reprise d’anciens écrits erronés ou biaisés. Le présent article cherche à questionner et à comprendre les choix et les mécanismes de pensée qui se sont appliqués par le passé au Brésil et dans les Antilles, car l’intérêt de l’archéologie ne réside pas seulement dans la production et l’étude de données primaires, mais aussi dans l’analyse de son histoire.
To what extent did colonization impact Pre-Columbian archaeology in a long-term perspective? A focus on Brazil and the Antilles presented below shows that archaeology in specific cultural and geographic areas can be limited (or challenged) because of two different colonial patterns of expansion and domination. These patterns each time lead to archaeological data modulation. On the one hand, this modulation may deliberately and directly result from the locally-established power (filtering and manipulating scientific results). On the other hand, it can be more unconscious and associated with population shifts as well as the use of early biased documentation. This article attempts to question and understand choices and mindsets from the past in Brazil and in the Antilles. For archaeology’s worth does not only lie in the production of primary data, but also in the analysis of its own history.
Entrées d’index
Mots-clés : Brésil, Antilles, colonisation
Keywords : Brazil, Antilles, colonization
Texte intégral
1Traversons ensemble l’Atlantique pour partir vers les basses terres amazoniennes et l’aire Caraïbe, afin de discuter de la difficulté à mener des études archéologiques au Brésil et dans les Antilles (fig. 1).
2On ne traitera pas ici de difficultés physiques de terrain, de difficultés techniques rencontrées par les professionnels sur les chantiers de fouilles et qui sont liées au climat ou à l’environnement. On ne traitera pas non plus des conséquences de certains de ces milieux physiques sur la préservation des vestiges archéologiques sud-américains. Un sol spongieux ou acide peut entraîner la disparition rapide des matières organiques composant les corps et de nombreux artéfacts. Il peut aussi s’agir, selon l’endroit où l’on se trouve, de perturbations des sites et structures archéologiques liées à l’érosion littorale ou bien à une végétation luxuriante qui pousse à l’intérieur de structures, et cache ainsi un paysage anthropisé. Notons également que des villages amérindiens amazoniens modernes disparaissent totalement de la surface du sol après seulement quelques années d’abandon (Rostain, 2019). La nature reprenant ses droits très rapidement, il peut être difficile pour les archéologues de retrouver des traces de villages précolombiens ayant été fondés des centaines, voire des milliers d’années plus tôt.
3Nous nous intéressons dans le présent article à un type de difficultés que l’on pourrait qualifier d’entraves sociopolitiques et institutionnelles. À travers les cas du Brésil et des Antilles, nous allons voir que la colonisation a impacté – de façon diverse mais décisive – la discipline archéologique en freinant, en conditionnant, en biaisant, en faussant ou en limitant les études et les résultats. Avant d’aller plus loin, nous tenons à préciser que le but de cette publication n’est nullement de procéder à des condamnations morales sur la base de pratiques anciennes, qui avaient cours dans la discipline par le passé, mais bien de redonner un contexte idéologique aux faits, de questionner et de comprendre des choix et les mécanismes de pensée qui se sont appliqués du xvie au xxe siècle, à travers nos deux études de cas.
4Nous étudierons les populations amazoniennes et caribéennes ensemble dans cet article, car celles-ci peuvent être vues comme de lointaines cousines. Leur proximité géographique ainsi que leur passé commun les ont poussés à échanger, commercer et former des alliances jusqu’à l’époque coloniale. Ceci amena un brassage culturel qui continua avec leur mise en esclavage à l’arrivée des Européens. Par la suite, elles sont devenues des populations colonisées rencontrant des problèmes et clivages culturels et sociopolitiques comparables, dont les traces sont encore visibles dans les sociétés modernes.
L’archéologie au Brésil : un long sommeil forcé
5Si le xixe siècle apparaît comme étant celui du collectionnisme, le xxe siècle est celui où se forge la discipline archéologique en tant que science. Alors que l’archéologie centrée sur diverses zones géographiques ou culturelles se développe rapidement (en Égypte, en Mésopotamie, mais aussi au Mexique et dans les Andes), tel n’est pas le cas de l’archéologie amazonienne1. Si une impulsion scientifique est d’abord donnée par le musée Emílio Goeldi (dans le nord-est du Brésil), l’étude de la région amazonienne se heurte rapidement aux idées préconçues de la société coloniale et d’une partie des universitaires nord-américains (Meggers, 1954 et 1971 ; Estrada, Meggers et Evans, 1962). Ces derniers affublent d’ailleurs l’archéologie amazonienne d’un double handicap : d’une part, l’a priori que la présence humaine dans les Amériques ne peut remonter qu’à 2000 ans av. J.-C., avec peu de changements intervenus au fil du temps (Guidon et Arnaud, 1992). Durant la première partie du xxe siècle, l’étude du Nouveau Monde se fait par compactage chronologique et géographique de groupes culturels différents (Guidon et Arnaud, 1992). D’autre part, à partir de la seconde moitié du xxe siècle, la prédominance d’une « cloche hégémonique2 » nord-américaine freine l’étude des sociétés amazoniennes et entretient des clichés vivaces jusque dans les années 1990 (Thomas, 2015). Essayons de comprendre pourquoi en revenant sur des moments clé de l’archéologie amazonienne brésilienne.
6Le Brésil est d’abord vu comme un pays américain précurseur de la recherche archéologique. Le premier musée archéologique du pays est fondé à Rio de Janeiro dès 1818, mais ses chercheurs n’étudient pas tout de suite l’archéologie nationale. Le premier archéologue amazoniste, Domingo Soares Ferreira Penna, crée le musée d’Histoire naturelle et d’ethnographie de Belém (futur musée Goeldi) dans l’État brésilien du Pará en 1866 et le dote de ses premières collections archéologiques locales (Rostain, 2009). L’archéologie brésilienne de la fin du xixe siècle jusqu’au début du xxe siècle est marquée par la création de trois musées : le musée national de Rio de Janeiro, le musée Goeldi et le musée Paulista à São Paulo, dont les directeurs respectifs, Ladislau Netto, Emílio Goeldi et Hermann von Ihering tiennent un rôle important dans l’élaboration de la discipline. Ils alimentent tous les trois des débats scientifiques sur l’antiquité de l’occupation humaine au Brésil et cherchent à interpréter les sociétés préhistoriques du Bas Amazone (Lopes, 1997). Cependant, au Brésil, l’archéologie est une science éminemment politique. L’élan de la discipline, qui se concentre alors principalement sur l’étude de la Préhistoire3, est rapidement coupé par la chute de la monarchie en 18894. Puis, sous le régime républicain de 1889 à 1930, la discipline archéologique stagne et finit par décliner. Pour l’archéologue Pedro Funari, établir scientifiquement les origines indigènes du Brésil pose un problème idéologique au sein de la population à cette époque. L’horror indigenae (Funari, 2013, p. 271) aurait limité l’étude des vestiges autochtones, que l’on circonscrit alors uniquement à des restes céramiques5. De 1937 à 1945, le Brésil passe alors à une dictature, durant laquelle l’époque coloniale est glorifiée et érigée comme modèle sociétal. Les archéologues brésiliens s’exilent et reviennent lorsque le pays entre dans sa période libérale (1945-1964). L’archéologie brésilienne entre dans la sphère universitaire en 1952 par la création de l’Institut de la Préhistoire, rattaché à l’université de São Paulo. Son directeur, Paulo Duarte, se lie d’amitié avec Paul Rivet6, alors directeur du musée de l’Homme de Paris (Funari, 2013). Mais après avoir fleuri, l’archéologie brésilienne connaît un nouveau coup d’arrêt avec l’installation d’une nouvelle dictature de 1964 à 1985. Les institutions muséales sont alors soumises au contrôle militaire. De 1985 jusqu’en 2018, un nouvel élan démocratique porte au pouvoir plusieurs présidents se situant à gauche de l’échiquier politique, et qui sont favorables au développement de la discipline archéologique (Galeano, 1981 ; Prous, 1994 ; Funari, 2013). La situation s’inverse de nouveau au moment de l’élection de Jair Bolsonaro7.
7Alors que l’archéologie brésilienne oscille entre des périodes propices et hostiles à son développement, des études menées en parallèle par des archéologues nord-américains deviennent la référence en matière d’archéologie amazonienne. Des années 1940 jusque dans les années 1980, ces recherches se basent sur des données d’autres disciplines reposant souvent sur des préjugés. D’une part, une partie des universitaires va décider de calquer leurs conclusions sur les écrits des Lumières. Ces archéologues vont décrire des sociétés amérindiennes en piteux état et démunies de structure sociale, sans prendre en compte le choc engendré par la Conquête, ni d’autres écrits coloniaux plus anciens présentant des conclusions opposées (Thomas, 2015 ; Neves, 2015). D’autre part, dans un monde se développant au rythme des empires coloniaux puis des industries internationales exploitant en grand nombre les travailleurs amérindiens, certains scientifiques rejettent l’idée que les populations amérindiennes laborieuses contemporaines puissent avoir eu d’illustres ancêtres (Rostain, 2009 et 2019 ; Bour, 2018 et 2019). À la fin des années 1940, l’anthropologue Julian Steward applique la théorie du déterminisme environnemental au développement des sociétés précolombiennes d’Amazonie dans les volumes 1, 3 et 5 des séries « Handbooks of South American Indians », publiés par la Smithsonian Institution. Il y précise que les Amérindiens amazoniens connaissent de tout temps un faible développement social, économique, politique et culturel. Ces derniers constituaient des tribus réduites en période précolombienne, étaient moins développés que les chefferies des Caraïbes et illustrent l’extrême opposé du développement complexe inca (Rostain, 2019).
8Pour en savoir plus, intéressons-nous de plus près aux travaux des archéologues américaines Helen C. Palmatary et Betty J. Meggers sur les sociétés précolombiennes du nord-est du Brésil. Sous l’égide de l’American Philosophical Society, Helen Palmatary propose les premières études scientifiques portant sur l’île de Marajó ainsi que sur les populations Tapajós voisines dès les années 1940 (Palmary, 1940 ; fig. 2). Ses études sont principalement muséales. Palmatary ne fouille pas et ne se rend que très rarement sur des sites archéologiques. Elle travaille seule sur des milliers de pièces céramiques issues de collections publiques et privées Marajoara et Tapajós conservées en Europe, aux États-Unis et en Amérique du Sud. À partir de ses observations, elle produit deux ouvrages : The Pottery of Marajó Island (Palmatary, 1950) et Archaeology of the Lower Tapajos Valley, Brazil (Palmatary, 1960). Elle fait également figure de pionnière en publiant l’une des premières recherches sur Santarém, et établit l’existence de relations culturelles entre différentes régions du fait de liens stylistiques. Pour elle, ces études céramiques permettent d’avancer que la vallée de l’Amazone fut jadis un centre dynamique, où des populations développées faisaient preuve d’une grande créativité artistique et commerçaient entre elles (Palmatary, 1960). Palmatary fait preuve d’esprit critique, de pertinence, et semble assez en avance sur son temps, même si son travail présente des imperfections8. Ses travaux ont rapidement été critiqués et éclipsés par ceux de l’archéologue Betty Meggers, qui va travailler sur les mêmes sociétés précolombiennes mais en adoptant un point de vue beaucoup plus pessimiste et déterministe (Meggers, 1954 et 1977 ; Bour, 2019). Aucune autre information sur la vie d’Helen Palmatary n’est connue à ce jour et elle n’a plus jamais publié de recherches par la suite (Bour, 2019).
9Dans les années 1950, Betty Meggers et son époux Clifford Evans, de l’université de Columbia, produisent la première recherche orientée sur l’archéologie amazonienne. Leur thèse, parue en 1957, est le fruit de la première prospection archéologique faite sur le littoral brésilien et sur les îles fluviales à l’embouchure de l’Amazone. Dans ses travaux, Meggers reprend l’idée du déterminisme environnemental de Steward en l’appliquant à l’archéologie de l’île de Marajó, en précisant qu’il n’y aurait aucun lien entre les différentes phases culturelles attestées par la céramique retrouvée. Toutes les phases auraient connu un faible développement, sauf la phase Marajoara datée entre 300 et 1400 apr. J.-C. (Meggers, 1954)9. Celle-ci montre en effet un haut niveau d’artisanat et d’esthétisme, avec des poteries de tailles et de formes diverses au modelage et à la décoration virtuoses. Elle ne peut donc qu’être le reflet d’une culture complexe extérieure à l’Amazonie. Cette culture, après s’être installée sur l’île, aurait stagné culturellement avant de s’éteindre, car aucune innovation ni aucun maintien culturel ne pouvait venir de la forêt tropicale (Rostain, 2009). Cette forêt étant trop hostile à l’humain et à son développement, le verdict sans appel de Meggers conditionne la vision de l’Amazonie et de la discipline archéologique pendant plusieurs dizaines d’années : les peuples autochtones du passé sont vus comme identiques à ceux d’aujourd’hui, c’est-à-dire comme de petits groupes produisant peu, sans réseau d’échanges ni de grandes constructions, contrairement aux populations précolombiennes mayas, aztèques et incas. Si ses conclusions sont critiquées dès les années 1960, notamment par l’archéologue américain Donald Lathrap, puis plus récemment par Thomas Myers, Anna Roosevelt, Stéphen Rostain, Michael Heckenberger, Eduardo Neves, Denise Schaan et Roberto Carneiro (Lathrap, 1970 ; Roosevelt, 1991 ; Myers, 1993 ; Heckenberger, 2004 ; Schaan, 2009 ; Rostain, 2009 ; Carneiro, 2013 ; Neves, 2015), ces dernières restent néanmoins la lettre jusqu’au début des années 1990 (Bour, 2019).
10En plus d’installer une cloche « hégémonique » autour de la discipline dans les années 1950, Meggers se voit chargée de piloter le programme national de prospection archéologique PRONAPA. Ce programme, financé par la Smithsonian Institution de 1965 à 1970, a pour mission officielle de réaliser des sondages et des stratigraphies artificielles arbitraires dans le but d’obtenir des sériations céramiques selon la méthode Ford. Certains universitaires s’interrogent aujourd’hui sur le bien-fondé de ce programme et vont jusqu’à lier ses conclusions scientifiques à des intérêts plus politiques (Funari, 2013). En effet, ces prospections auraient pu servir les militaires en place en entérinant scientifiquement la condition de « citoyens de seconde zone » des Amérindiens brésiliens d’hier et d’aujourd’hui, et la prospection mise en place aurait permis une connaissance et une surveillance accrues du territoire afin de traquer plus facilement les opposants au régime dictatorial.
11Bien que ces éléments n’aient jamais été réellement prouvés (Prous, 1994), nous pouvons néanmoins affirmer que l’archéologie brésilienne a bien été directement impactée, censurée et retardée par la sphère politique à travers le temps, et que cela continue aujourd’hui. En effet, Jair Bolsonaro affirme publiquement en 2015 que « les Amérindiens […] n’ont pas de culture10 ». Par la suite, au lendemain de son élection présidentielle, il décide de couper d’importantes subventions aux départements universitaires de sciences humaines, et de faire passer la gestion des territoires indigènes de la Fondation nationale de l’Indien (FUNAI) au ministère de l’Agriculture11. Une même logique héritée de l’époque coloniale semble se répéter à travers le temps puisque, en 1854, l’ethnologue brésilien Francisco Varnhagen écrivait déjà que les Amérindiens n’avaient pas d’Histoire12 (Varnhagen, 1854).
L’archéologie des Antilles : l’énigme « Carib »
12Changeons désormais de région et d’approche. Voyons comment des décisions prises dans le cadre d’une politique d’expansion coloniale européenne au xvie siècle ainsi que des chroniques ont impacté et complexifié l’archéologie caribéenne sur le long terme (et peut-être, à jamais). Les Antilles sont la porte d’entrée du Nouveau Monde, et à son arrivée en octobre 1492, Christophe Colomb rencontre des autochtones présentés aujourd’hui comme des Arawaks (Lequenne, 1991).
13Dès les deux premiers voyages de Colomb, un des réflexes de l’équipage est de catégoriser et de classer les différentes populations qu’ils rencontrent. Pour ce faire, ils demandent directement aux Amérindiens qu’ils croisent leur identité et celle d’autres groupes autochtones (Sued Badillo, 1995 ; Lenick, 2012). Au fil de leurs voyages, ils recueillent des témoignages qu’ils interprètent au pied de la lettre, sans recul ni maîtrise des langues et cultures locales. En effet, les Amérindiens des Grandes Antilles répètent souvent aux hommes de Colomb qu’ils sont taíno (« bon, noble ») et évoquent des individus caribe (pouvant signifier « ennemis venant du Sud », « féroces guerriers » ou simplement « hommes du continent » selon le contexte, voir Whitehead, 1995). Très rapidement, les chroniqueurs et la Couronne d’Espagne vont traduire ces données subjectives en opposant systématiquement les « gentils » Taïnos/Arawaks vivant dans les Grandes Antilles aux « féroces » Caribs vivant dans les Petites Antilles (Sued Badillo, 1986 ; Whitehead, 1995 ; fig. 3).
14Ce raccourci ethnoculturel va avoir des conséquences désastreuses pour les autochtones. Après une succession de témoignages à charge et un décret d’Isabelle de Castille, ceux que les Espagnols appellent désormais Caribs sont raflés et mis en esclavage dans les Petites Antilles dès 1503. Ils sont envoyés dans certaines îles des Grandes Antilles propices à l’industrie minière puis sucrière, au motif d’être de sanglants combattants cannibales – argument qui leur retire toute humanité (Sued Badillo dans Whitehead, 1995). Par ces rafles, un premier brassage ethnoculturel « subit » se produit donc lorsque des Amérindiens différents sont regroupés ensemble sous le nom fourre-tout et aléatoire de « Caribs » (Bour, 2020). Ils côtoient également des Arawaks insulaires (appelés Taïnos à partir du xixe siècle), puis, dans un second temps, des esclaves africains13. Les Taïnos disparaissent vers les années 1530 (Delpuech, 2016). Quelques groupes Caribs résistent aux rafles et se mélangent aux esclaves africains, pour donner naissance aux populations Garifuna. Celles-ci se sont également mélangées aux Européens et existent encore aujourd’hui.
15Plusieurs problèmes vont découler de cette mosaïque culturelle imposée, de la catégorisation artificielle des différentes populations ainsi que des écrits coloniaux qui en font état. Quelle véracité accorder aux documents à visée politique et aux chroniques mentionnant les Caribs et les Arawaks en période coloniale, du xve au xviiie siècle ? Les chroniques espagnoles puis françaises sont des documents ethnographiques importants mais qui présentent des incompréhensions, des incohérences, voire de totales inventions. Cela est notamment le cas concernant la pratique du cannibalisme, servant d’outil de sélection ethnique aléatoire (Robiou Lamarche, 2009).
16Si les ethnonymes issus de la Conquête ne reflètent pas la réalité autochtone de l’époque, leur interprétation au pied de la lettre par les archéologues jusque dans les années 1990 s’avère problématique. Pourra-t-on retracer un jour l’origine ethnoculturelle des différentes populations amérindiennes des Antilles ? Est-ce que les Caribs insulaires ont vraiment existé en tant que tels ou sont-ils une pure construction sortie de l’imaginaire européen ? C’est ce que sous-entend dès le xvie siècle le missionnaire Bartholomé de Las Casas, lorsqu’il écrit « Le nom de Caribs fut celui choisi par les Espagnols pour faire des esclaves d’hommes libres » (cité dans Badillo, 1986, p. 11). Comprendre qui sont les Caribs et prouver leur existence fut une obsession de beaucoup d’archéologues travaillant dans les Caraïbes depuis les travaux fondateurs d’Irving Rouse dans les années 1940 (Rouse, 1948 ; Bour, 2020). Souvent, les chercheurs se fondaient sur des chronotypologies céramiques incomplètes des Antilles, et procédaient par déduction : les Caribs étaient généralement associés à des restes grossiers de traditions céramiques des Petites Antilles qu’on ne savait pas caractériser jusqu’à la moitié du xxe siècle, et qui semblaient postérieurs à l’an 1000 apr. J.-C. (Rouse, 1964 ; Bullen, 1965). On recherchait l’opposition Arawaks-Caribs issue de la littérature dans les restes archéologiques, et l’explication des mouvements tardifs de population dans les Antilles à travers les restes céramiques sans jamais cependant trouver de réponse satisfaisante (Taylor, 1958 ; Allaire, 1984 ; Goodwin, 1990 ; Granberry, 2013).
17Sans preuve scientifique, on établissait que les Caribs, moins évolués, produisaient forcément une céramique plus fruste que les Arawaks (Jesse, 1960 ; Petitjean-Roget, 2015). Aussi, afin d’expliquer à la fois la proximité culturelle et linguistique des deux groupes tout en maintenant leur supposée opposition, beaucoup avancèrent que, peu de temps avant l’arrivée des Européens, des Caribs continentaux partirent de Guyane (Rouse, 1964). Ils envahirent des Arawaks installés dans les Petites Antilles, tuèrent tous les hommes et s’approprièrent leurs femmes (Sued Badillo, 1978; Hoff dans Whitehead, 1995). Faisant l’objet de vifs débats, le questionnement entourant l’existence ou non des Amérindiens Caribs atteint son paroxysme en 1961, lors du premier congrès international sur l’archéologie précolombienne des Petites Antilles14. Lors de cet événement, les archéologues présents avancèrent trois types de conclusions : pour certains, les Caribs ont bien existé car ils sont évoqués dans les chroniques (Pinchon et Petitjean-Roget, 1961). Pour d’autres, les Caribs ont certainement existé mais ne sont pas attestés au niveau archéologique (Rouse, 1961). Et enfin, il y a ceux pour qui si aucune preuve archéologique n’a été trouvée, c’est que les Caribs n’ont jamais existé (Haag, 1961).
18Trente ans plus tard, l’anthropologue anglais Neil Whitehead a produit un ouvrage collectif rassemblant une dizaine de chercheurs présentant leurs études sur le sujet. Cet ouvrage majeur a le mérite de présenter des travaux actuels divers, aux conclusions aussi bien classiques (Boomert et Whitehead, 1995) que totalement novatrices (Sued Badillo15, 1995). Mais force est de constater que les chercheurs ne sont toujours pas d’accord entre eux.
19Depuis le début des années 2000, la question n’est toujours pas tranchée mais le statut de Carib est redéfini : certains archéologues s’attachent à prouver l’existence des Caribs au niveau archéologique par l’étude du complexe Cayo16. Du recul est aujourd’hui pris par rapport à certaines chroniques et la pertinence des termes Taïno et Carib est remise en question grâce aux évidences archéologiques. De récents travaux montrent que les divers groupes culturels se connaissaient et se côtoyaient. Les archéologues Corine Hofman, de l’université de Leiden et José Oliver de l’University College London admettent aujourd’hui que les habitants des Grandes et des Petites Antilles étaient regroupés autour de caciquats. Ils entretenaient des relations diplomatiques et commerciales de longue distance soutenues ainsi que des liens culturels matériels et immatériels forts pendant plusieurs siècles jusqu’à la Conquête (Grouard, 2005 ; Hofman et Boomert, 2007 et 2019 ; Oliver, 2009). Cela contredit alors l’opposition archétypale Arawaks-Caribs longtemps retranscrite par les Européens (Bour, 2020).
20En conclusion, les deux exemples présentés ici s’inscrivent dans le cadre de l’expansion coloniale européenne en Amérique, qui s’est déroulée sur plusieurs siècles et sous plusieurs formes avec des protagonistes variés. À travers les exemples du Brésil et des Antilles, nous avons pu observer que l’archéologie d’un pays ou d’une aire géographique peut être mise à mal soit sciemment et directement par les institutions en place, qui filtrent et manipulent les données, soit de façon plus inconsciente par des déplacements de populations subis durant l’époque coloniale et des écrits coloniaux erronés. Ces derniers sont une mine d’informations pour les sciences humaines, mais nécessitent une recontextualisation et une étude scientifique approfondie avant d’être utilisés, au risque d’écrire une Histoire qui n’a jamais existé. Depuis ces dernières années, les Antilles et l’Amazonie voient augmenter leur nombre d’étudiants archéologues natifs de ces régions, dont une première génération d’étudiants autochtones. Peut-être est-ce là la clé d’une « archéologie en attente de décolonisation » (Rostain, 2011).
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Notes de bas de page
1 Celle-ci n’est d’ailleurs pas mentionnée dans l’ouvrage Une histoire des civilisations. Comment l’archéologie a bouleversé nos connaissances (Paris, La Découverte, 2018). Voir aussi l’interview de Vera Guapindaia dans L’Archéologie de l’Amazonie. La mémoire de la Terre, Ericka Thomas, 2015, DVD.
2 Une suprématie académique faisant prévaloir certaines idées par rapport à d’autres.
3 Il était commun de penser que les premiers peuplements humains du continent américains ne pouvaient être plus anciens que quelques milliers d’années, avec des zones plus tardivement peuplées, comme l’Amazonie.
4 Durant l’Empire du Brésil (1822-1889), les monarques souhaitaient faire de Rio de Janeiro « la nouvelle Rome », à la fois siège du pouvoir et de la culture au même titre que certaines grandes métropoles de l’Ancien Monde. L’archéologie brésilienne, née sous Pedro I, fit partie de ce grand dessein. En découvrant les origines du Nouveau Monde, le Brésil souhaitait ainsi concurrencer les musées italiens, français et russes.
5 En effet, il ne fallait pas rappeler les origines non blanches dans un pays né de la colonisation européenne, au risque de remettre en question l’ordre social et politique.
6 Tous deux étudieront ensemble les sambaquis et les deux hommes amèneront plusieurs disciples de Rivet à étudier l’art rupestre brésilien.
7 L’actuel président brésilien pense en effet que les départements universitaires de sciences humaines sont un luxe dont il est préférable de se passer, surtout en période de crise économique. Il souhaite privilégier un « retour sur investissement immédiat » (voir « Au Brésil, les sciences sociales et humanités ne sont pas un luxe », Le Monde, 6 mai 2019).
8 Elle néglige toute chronologie et laisse de côté les pièces aux traits répétitifs pour s’intéresser principalement à celles qu’elle juge remarquables ou inhabituelles.
9 Parmi les cinq phases de l’île de Marajó théorisées par Meggers (Ananatuba ; Mangueiras ; Formiga ; Marajoara et Aruã), seule la phase Marajoara montre des savoir-faire et des techniques ponctuels, qui ne se sont ni développés ni transmis à travers le temps. Ces phases sont toutes vues comme indépendantes les unes des autres.
10 « Os índios não falam nossa lingua, não têm dinheiro, não têm cultura », voir « Ce que le président Jair Bolsonaro a dit des peuples autochtones du Brésil », France. Survival International, 2018. URL : www.survivalinternational.fr/textes/3561-Bolsonaro
11 La FUNAI, créée en 1967, est un organisme public chapeauté par le ministère de la Justice visant à protéger les territoires amérindiens face aux industriels, propriétaires terriens et initiatives évangélisatrices. En 2019, le transfert de gestion de ces territoires vers le ministère de l’Agriculture s’inscrit dans une politique d’expansion agricole devant booster l’économie du pays, et impliquant la spoliation des terres amérindiennes, une perte de données ethnographiques et archéologiques, ainsi qu’une assimilation forcée des populations indigènes restantes (dont certaines affichent pourtant une politique de non-contact).
12 « Os índios […] de taes povos na înfancia não ha história : ha só ethnografia » (Varnhagen, 1854, p. 107-108).
13 Nous savons qu’Africains, Caribs et Taïnos furent regroupés et exploités ensemble, sans pour autant pouvoir affirmer l’existence d’un métissage dès les premières rafles. En effet, le peu de registres tenus à l’époque utilisent souvent le terme générique « Indios » sans que cela revête une quelconque réalité ethnique.
14 Cf. Compte rendu intégral du Premier congrès international d’études des civilisations précolombiennes des Petites Antilles, Fort-de-France, 3-7 juillet 1961, Société d’Histoire de la Martinique.
15 En plus de dénoncer l’existence de distorsions historiques issues de la colonisation européenne dans les Antilles, il souligne également que l’archéologie est pour l’instant incapable de faire la lumière sur la réalité sociale amérindienne car elle ne possède pas les outils permettant d’en identifier les formations sociales.
16 Le complexe Cayo (dès 1250 ap. J.-C.) désigne un ensemble de sites dans les îles du Vent présentant des restes céramiques diagnostiques associés aux populations Caribs. Certains sites mêlent dans un même niveau stratigraphique céramique cayoïde et kraakporcelain des Flandres, attestant de possibles échanges entre Caribs et Européens au moment de la Conquête.
Auteur
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ED 112
Laboratoire ArchAm, UMR 8096
Thèse sous la direction de Stephen Rostain et André Delpuech, Les faux objets archéologiques amazoniens et caribéens : concept(s) et expertise
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