Le mas, une problématique pour la France méridionale du second Moyen Âge (xie-xve siècle)
p. 101-115
Texte intégral
1Les termes de mansus en latin ou de mas en occitan se rencontrent dans de nombreuses régions de l’Europe méridionale à la fin du Moyen Âge (avec quelques variantes locales comme le maxus savoyard ou la mansiata catalane). Pourtant l’étude de ce phénomène n’a pas dépassé les frontières régionales des monographies locales, et cela peut-être à cause de plusieurs difficultés. L’aire de diffusion est vaste mais elle est discontinue et recouvre des réalités assez différentes selon que l’on se situe ici ou là : en Provence, seul pays où le terme s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui pour désigner une maison de campagne typique, le mas était, au bas Moyen Âge, une grosse ferme ; mais ailleurs, il pouvait désigner un écart, un hameau, un terroir ou encore une tenure. Il serait cependant regrettable, sous prétexte de cette variété, de ne pas envisager le mas de façon conjointe dans ces diverses régions, pour tenter de mieux cerner ce phénomène si caractéristique et dont l’étymologie le rattache au manse carolingien. La terminologie elle-même pose problème : Jean-Claude Hélas refusait, pour le Gévaudan, de traduire manse par « mas » parce qu’il considérait que c’était un anachronisme (il datait la traduction de mansus par « mas » de l’époque moderne) et que cela prêtait à confusion avec le mas provençal1. Pourtant les sources attestent tout à fait, au moins depuis le xiie siècle (soit à partir de l’époque pour laquelle on dispose de documents écrits en langue vernaculaire), l’emploi de « mas » en langue occitane, en Gévaudan, Auvergne, Rouergue, Quercy2 ; on voit mal pourquoi on se refuserait alors à employer le terme, au nom du fait que seul le mas provençal a survécu dans notre langage contemporain3. Il semble au contraire judicieux d’utiliser le vocable de mas à partir de cette époque, à l’instar des sources occitanes, car il présente l’avantage de distinguer le manse à résonance carolingienne du mas des derniers siècles du Moyen Âge, qui désigne un terroir doublé, le plus souvent, d’un habitat.
2Après avoir dressé un panorama des divers visages que présente le mas à travers la France méridionale (sans m’interdire d’observer des situations transfrontalières), j’essaierai de montrer qu’en réalité, au-delà des divergences, les points communs l’emportent et font du mas un phénomène dont l’ampleur n’a peut-être pas été suffisamment mesurée dans l’histoire des campagnes de l’Europe méridionale.
L’arc méditerranéen : le mas, une exploitation familiale isolée
3Commençons par la Provence, région où le terme s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui pour désigner un type d’habitat spécifique : le « mas provençal ». En réalité, il faudrait plutôt parler du mas de la Provence occidentale, puisque le terme est tout à fait ignoré dans le comtat Venaissin et en Provence centrale et orientale4, tandis qu’il se rencontre en basse vallée du Rhône, en Camargue, dans l’Uzège et le pays de Nîmes. Ici, à l’époque moderne et contemporaine, le mas renvoie à une exploitation agricole isolée, habitée par une seule famille, composée de bâtiments d’habitation et de travail, et entourée d’un bloc de terres cultes et incultes. C’est la définition qu’a retenue Frédéric Mistral pour plusieurs régions du Midi de la France dans son Tresor dou Felibrige : « Maison de campagne, habitation rurale, ténement, ferme, métairie, d’Arles, en Languedoc, en Dauphiné, Forez et Cerdagne5. »
4Mais que signifiait le terme avant le xvie siècle ? En pays d’Arles, Louis Stouff a montré combien l’histoire de ces mas au Moyen Âge est riche et complexe6. Le terme carolingien de mansus y disparaît entre la fin du xie et le début du xiie siècle. Après éclipse, il réapparaît au xive siècle avec un sens nouveau, celui de bâtiment isolé au cœur d’un vaste ensemble de terres. Ce type d’habitat dispersé n’est pourtant pas nouveau : aux siècles précédents, il existait déjà, perceptible à travers les termes de turris et grangia. Le mot de turris trahit la dimension militaire de ces habitats, tandis que celui de grangia, davantage employé dans les documents ecclésiastiques, marque la fonction agricole, en désignant à la fois le bâtiment isolé et les terres qui l’entourent et constituent l’exploitation. À partir du milieu du xive siècle, ces deux vocables sont progressivement remplacés par celui de mansus, après une période de coexistence (l’expression turris seu mansus est fréquente au milieu du xive siècle). Le mas arlésien de la fin du Moyen Âge est donc un habitat isolé ancien, auparavant dénommé turris ou grangia, ou bien un habitat neuf de défrichement. Souvent, au xive siècle, il réunit en lui les fonctions militaires de la turris et agricoles de la grangia. Toutefois, il a un sens plus restreint que la grangia car il ne désigne que le bâti, et non les terres alentour ; c’est désormais un autre mot qui dénomme celles-ci : l’affar. L’affar (ou son synonyme lavor) désigne les terres (champs, prés, pâturages, bois, paluns) dont le mas (maison d’habitation et bâtiments d’exploitation) est le centre. Dans le livre terrier d’Arles de 1450, équivalent des estimes toulousaines, les exploitations isolées dans la campagne sont déclarées comme « un mas et un affar » ou « un mas et un lavor ». Elles sont la propriété de l’Église, des nobles, des bourgeois d’Arles qui les donnent à ferme ou à facherie à des laboureurs. L’affar et le mas deviennent ainsi, dans les deux derniers siècles du Moyen Âge, l’unité de base du terroir arlésien. Une cellule aux dimensions variables, mais tout de même vaste : la superficie moyenne est de 60 hectares (avec un maximum de 200 hectares), ce qui est beaucoup à cette époque. Le mas arlésien est donc souvent une grosse ferme prospère. Dans la seconde moitié du xve siècle, le mot prend son acception moderne, le mas désignant à la fois l’habitation et l’affar, soit la partie et le tout.
5À quelques pas de géant de là, dans le Lauragais des xve et xvie siècles, où l’habitat groupé domine, il existe aussi un habitat intercalaire qui, sous un vocable un peu différent, s’apparente au mas arlésien7 : le campmas (ou capmas), aussi appelé borie8. Ces termes, synonymes, sont équivalents du mas arlésien de la fin du xve siècle : ils désignent à la fois la maison d’habitation, les bâtiments à usage agricole et les terres d’un seul tenant qui les entourent, champs, prés, pâturages, vignes, bois et broussailles, souvent séparées des exploitations voisines par des routes ou des fossés. En moyenne, au xve siècle, un capmas comprend 30 à 40 sétérées de terre labourable, soit environ 10,5 à 14 hectares ; les plus grands ont plus de 60 sétérées, soit 21 hectares. Ces bories sont la propriété de marchands et bourgeois de Castelnaudary, de l’Église, de nobles qui les donnent en fermage ou en métayage ; les plus petites sont parfois possédées et exploitées par la famille résidante. Le campmas correspond donc bien au profil du mas arlésien, en moins vaste. En revanche, il connaît, à l’époque moderne, une évolution un peu différente. À partir du xvie siècle, il est souvent fractionné entre héritiers et donne alors naissance à des masatges, c’est-à-dire des hameaux de quelques feux.
6En Roussillon, région qui a vu la naissance, au tournant des xe et xie siècles, d’un habitat groupé sous la forme des celleres, le mas correspond à une réalité proche des précédentes, mais qui a sa spécificité9. Dans son sens large, le terme (synonyme de marnata) désigne une unité d’exploitation agricole qui regroupe : 1) plusieurs terres situées sur des terroirs aux aptitudes complémentaires, 2) l’habitation principale, située dans la campagne et appelée elle-même mas (ici dans son sens étroit) ou capmas, 3) des bâtiments annexes groupés autour de la maison ou plus loin sur ses terres, et 4) une ou des annexes dans le village voisin, qui sont également appelées mas. Dans le village ou plus souvent ses faubourgs (barris), certaines maisons sont donc désignées par le terme de mas. Ce dernier aspect est une spécificité roussillonnaise10, liée peut-être à la volonté des ruraux d’avoir droit à la protection de la cellera, et au fait que l’habitat groupé est dominant dans la région.
7En deçà des Pyrénées, dans la Catalogne médiévale, on pénètre pour la première fois dans une région d’habitat majoritairement dispersé. Ici, le mas correspond à une petite exploitation agricole, composée de bâtiments et de terres de nature diverse (vergers, potagers, terres, vignes, prés, etc.), d’un seul tenant, qui constituent l’« honneur » (honor) du mas, également appelé mansiota ou masada11. Le mas est la forme dominante de l’habitat, très dispersé dans cette région où les agglomérations sont rares, et ceci depuis au moins le xie et le xiie siècle, quand les mentions de mas se multiplient dans la documentation, au détriment des villae, de moins en moins nombreuses. Mais il n’exclut pas d’autres formes de peuplement rural : il existe aussi des mansiunculi, mansioli, qui semblent être des mas d’une taille inférieure ; des bordes, également de taille réduite et dont certaines sont dépendantes d’un mas ; et enfin des cabanes, construites près d’un mas et habitées par d’autres familles que celle qui réside dans celui-ci. Les mas sont de dimensions un peu supérieures à celles du campmas lauragais : dans le comté de Gérone vers 1300, la seigneurie de Cruïlles compte jusqu’à 81 mas sur 20 kilomètres carrés ; la superficie moyenne du mas est donc d’environ 25 hectares12. Exceptionnellement, le mas peut être une résidence noble, mais dans l’immense majorité des cas c’est une tenure exploitée par une famille paysanne d’un statut supérieur à celui des familles qui habitent des mansiunculi, des bordes ou de simples cabanes. Certains membres de cette élite rurale peuvent même tenir plusieurs mas qu’ils sous-acensent à d’autres. Le revers de cette situation avantageuse est la condition servile qui touche nombre de tenanciers de mas, appelés homini proprii et solidi : paiement d’une taxe de rachat en cas de départ (remença), astreinte à divers mals usos, contrôle des successions par le seigneur en faveur de l’indivisibilité du mas et du maintien d’une force de travail suffisante13. À cela s’ajoutent les redevances banales, très alourdies à partir de la seconde moitié du xie siècle, et qui sont prélevées au niveau du mas, et non plus de la paroisse – ce qui permet d’ailleurs de simplifier et d’uniformiser un système de redevances auparavant très complexe. Servant de cadre au prélèvement et à l’exercice du pouvoir seigneurial, le mas peut être considéré comme la cellule de base de la seigneurie catalane. Si l’on ajoute à cela l’hypothèse de Lluis To Figueras selon laquelle la diffusion de ces mas au xiie siècle serait moins liée au mouvement des défrichements qu’à la création volontaire de nouvelles tenures, le mas apparaît comme un instrument efficace aux mains des seigneurs, destiné à contrôler la paysannerie et son travail, à empêcher les désertions et à s’assurer des revenus élevés, constants, prélevés sur une unité territoriale cohérente. Cette politique seigneuriale expliquerait le succès et la pérennité de ce mode de peuplement dispersé.
8Il semble donc que, le long d’un arc méditerranéen et littoral qui va de la Provence occidentale à la Catalogne en passant par le Roussillon et le Lauragais (avec sa variante en capmas), et qui regroupe des pays d’habitat dispersé comme d’autres d’habitat groupé, le mas – dans les régions où il existe – désigne une exploitation agricole isolée (composée de bâtiments d’habitation, d’exploitation, et de terres cultes et incultes), habitée par une seule famille. Le terme désigne le tout et la partie, c’est-à-dire à la fois le terroir exploité et le centre bâti. Dans le paysage rural, le mas est un écart, une ferme isolée entourée de ses terres, qui offrent une belle complémentarité des sols et des usages agraires. Au-delà de cette configuration commune, on observe des variantes dans le vocabulaire (capmas, boria), la taille de l’exploitation (vaste en Provence, moindre en Catalogne et en Lauragais), son rôle dans l’organisation sociale (propriété noble et bourgeoise baillée à ferme ou à métayage en Provence et Lauragais ; tenure servile en Catalogne). Cet arc connaît quelques discontinuités, des angles morts où le mas n’existe pas. Dans le Biterrois, pays du castrum roi, les mansi de l’époque carolingienne et féodale disparaissent en même temps que monte en puissance le castrum ; les populations se concentrent dans les villages perchés, situés au centre du finage, et les manses, désertés, sont fractionnés en parcelles14. Ici le manse ne deviendra jamais mas.
Alpes et contreforts alpins : mas et pareries
9Le terme de mas (et ses variantes maxus et meix) revêt un autre sens en Savoie et dans le Dauphiné, deux régions où l’habitat sous forme de hameau est fréquent. Ici, les sources sont presque exclusivement d’origine seigneuriale ; aussi le mas semble-t-il être une tenure avant d’être un habitat. En Savoie, les reconnaissances seigneuriales et les extentes, sortes de terriers, dépeignent les mansi comme un ensemble de tenures – pas toujours d’un seul tenant – dont les détenteurs sont solidaires pour le paiement des droits seigneuriaux, qui comprennent à la fois des droits fonciers et des droits banaux (taille, garde, chevauchée...)15. Les tenanciers solidaires forment une société qu’on appelle une parerie ou une consorterie. Les pariers peuvent être jusqu’à vingt et avoir des tenures dans plusieurs mas différents. Les vastes étendues incultes que comportent les mas pourraient constituer une de leurs raisons d’être : la parerie permet la gestion commune de vastes espaces incultes. Le problème de cette documentation seigneuriale, c’est qu’elle ne permet pas de savoir clairement si les mas comprennent des habitats ou bien si les tenanciers habitent tous le village. Les mas éclatés ne semblent pas porter d’habitat spécifique, les pariers résidant au village et étant possessionnés dans plusieurs mas qui se partagent le finage villageois. En revanche, il est certain que d’autres mas comprennent plusieurs feux, qui peuvent prendre la forme de fermes dispersées ou bien d’un hameau, voire d’un village. À leur propos, Fabrice Mouthon parle de village-mas : il s’agit d’un mas d’un seul tenant, qui correspond au finage d’un village et porte le même nom.
10Les mas du Dauphiné au xiiie siècle présentent la même ambivalence : le mansus peut être une tenure non habitée, parfois éclatée, tenue par des pariers qui doivent un cens commun au seigneur ; il peut aussi désigner un hameau et son finage, tenu par des pariers dont certains n’habitent pas forcément le hameau en question16. On retrouve une situation analogue dans les Préalpes lombardes, où les mas ou sortes présentent le paradoxe de servir d’unités de base de la perception seigneuriale, alors qu’elles sont pulvérisées en une multitude de parcelles dispersées et tenues par des cultivateurs différents17.
11Ce système des pareries et cens solidaires, qui n’existe pas dans les pays méditerranéens, est remarquable. Il n’est pas la trace d’une époque antérieure où le manse était une tenure unique, mais le résultat d’une politique seigneuriale délibérée, selon Henri Falque-Vert : en Dauphiné, il aurait été mis en place tout à fait volontairement par les seigneurs dauphinois dans la seconde moitié du xiie siècle et se serait superposé aux exploitations et parcelles existantes. Il permettait une gestion rationalisée du cens et surtout garantissait au seigneur le maintien de la redevance à son niveau, en cas de départ ou de défaut de paiement d’un tenancier – les autres pariers étant tenus de payer le déficit18.
12Ainsi, dans une vaste région alpine, le mas des sources seigneuriales apparaît comme une tenure collective, mise en valeur par une communauté de tenanciers plus ou moins nombreux, solidaires du paiement des redevances et de l’exploitation de terres communes. Cette tenure peut éventuellement porter un habitat, mais il n’y a pas de lien systématique entre les deux. Le manse est avant tout une structure agraire, alors que, dans l’arc méditerranéen, il est, au moins autant, une structure de peuplement. Mais cela est peut-être dû à un effet d’optique des sources, les documents savoyards provenant uniquement de fonds seigneuriaux qui ne renseignent pas toujours clairement sur l’habitat – on reviendra sur ce problème ultérieurement.
Le Massif central : le mas, forme dominante de l’habitat et structure sociale élémentaire
13Il existe enfin une troisième aire où le mas prend un aspect encore différent des deux précédents : le Massif central et ses abords, région de l’habitat dispersé par excellence. Le mas est ici la forme dominante de l’habitat ; il correspond à un phénomène bien plus massif que dans les deux aires précédentes – Catalogne exceptée. Grâce à des sources plus nombreuses et plus variées que dans les deux zones précédentes, il apparaît aussi comme une structure socio-économique fondamentale.
14En basse-Auvergne, au xiiie siècle, le mas a une double signification : dans la partie orientale, c’est un tènement situé dans une villa, alors qu’à l’ouest il désigne un petit habitat de type hameau situé dans une paroisse, et qui correspond à l’échelon inférieur à la villa. Mais dès le début du xive siècle, cette dernière signification l’emporte aussi à l’est, l’unité d’exploitation étant désormais désignée par les termes de tenementum ou de pagesia19. Le mas désigne alors un petit habitat, un hameau, et les terres environnantes. Celles-ci, cultes et incultes, sont exploitées par les habitants du hameau : elles forment le finage du mas. Les réserves seigneuriales mises à part, le terroir est presque entièrement couvert par ces mas : chaque mas a pour limite un autre mas. Les droits seigneuriaux (fonciers et banaux) sont organisés à l’échelle du mas. Au xvie siècle, le système de la pagésie solidaire, selon laquelle les tenanciers du mas – appelés pagès – sont considérés comme solidaires du paiement d’un cens commun du mas au seigneur, est généralisé. Il permet au seigneur, en cas de défaut de paiement d’un tenancier, de réclamer le cens manquant à ses voisins. Ce dispositif est assez similaire au système de la parerie alpine ou du manse dauphinois, mais il intervient avec trois siècles de retard.
15En Limousin, la situation est très proche de celle observée en Auvergne. Le mas renvoie à un habitat du même type : un groupement de maisons en ordre lâche, isolé, qui est la forme la plus courante du peuplement rural, le chef-lieu de paroisse étant appelé bourg20. Au xve siècle, le mas abrite, la plupart du temps, un groupe familial large : frérèches, associations de cousins, oncles, ou encore comparsonneries, qui réunissent des tenanciers solidaires du paiement de la redevance au seigneur21. Généralement, les associés sont au nombre de trois ou quatre, mais peuvent être jusqu’à une vingtaine ; souvent on ignore leur nombre exact car ils sont cachés derrière un ou plusieurs chefs, seuls nommément cités dans les textes. Dans le cas d’association de deux à cinq personnes, les tenanciers habitent tous le mas en question ; pour les comparsonneries plus larges, la question n’est pas résolue, mais il semble qu’une partie des parsonniers habitent le hameau au centre des terres du mas, tandis que l’autre partie habite des mas voisins. Au xvie siècle, sous la pression démographique, le mas limousin a tendance à être fractionné et les larges comparsonneries à disparaître, mais la frérèche et l’indivision restent très vivaces22. Le système rappelle les pareries des Alpes ou du Dauphiné, sauf qu’il n’existe apparemment pas de mas éclaté sans habitat en Limousin, et qu’on ignore si ce sont les seigneurs qui l’ont imposé. Il paraît aussi proche de la pagésie auvergnate, mais, selon Jean Tricard, il s’en distingue en ce qu’il instaure une association familiale, fiscale et de travail, alors que la pagésie auvergnate du xvie siècle est une association exclusivement fiscale, déterminée par l’assiette de la redevance.
16Ce type d’association familiale dans un mas est également observable dans le Bourbonnais de la fin du Moyen Âge et de l’époque moderne, où le système s’est bien maintenu, contrairement au Limousin23. Ici le mas, synonyme de domaine ou tènement, désigne une exploitation de 30 à 50 hectares tenue par une communauté familiale plus ou moins large, qui comprend généralement un père et ses fils, voire ses gendres. Parfois ces communautés sont bien plus larges, regroupant jusqu’à huit à douze couples qui assemblent leurs domaines en un seul terroir qui peut aller jusqu’à 200 hectares ; le mas prend alors la forme d’un agrégat de maisons proche du hameau. Mais chacun reste propriétaire de son propre domaine. La transmission des biens se fait généralement aux fils mariés, mais de façon indivise. La priorité de ces communautés est en effet de préserver l’intégrité du domaine à travers les générations. Comme dans le Limousin, le mas paraît ici indissolublement lié à la communauté plus ou moins large qui l’occupe et l’exploite. Il est le siège d’une communauté familiale et de travail.
17En Quercy, en Rouergue ou en Gévaudan, le système de la pagésie ou de la parerie existe mais il est beaucoup moins fréquent24. Dans la baronnie de Sévérac-le-Château, aux confins du Rouergue et du Gévaudan, les petits seigneurs ont bien essayé, au début du xive siècle, d’imposer la solidarité du cens dans les mas, mais leur tentative, peut-être compromise par la crise qui démarre au même moment, a fait long feu25. En Quercy et en Rouergue, après les désertions massives dues à la crise des xive-xve siècles26, le mas sert de cadre au repeuplement et à la reconstruction du xve siècle. Les seigneurs baillent à nouveau cens de vastes terres incultes à des groupes de tenanciers souvent unis par des liens familiaux, avec l’obligation de (re)construire de nouvelles habitations qui (re)donneront naissance au hameau appelé mas27.
18Dans ces régions, le mas du xve siècle est une maison isolée ou, plus souvent, un regroupement de maisons entourées de leurs dépendances (bâtiments annexes, jardins, aire, cour, petit patus28,) juxtaposées, de manière lâche et informe, et entre lesquelles se trouvent des espaces ou bâtiments communs : patus (parcelle de taille moyenne qui sert au regroupement des animaux et de pacage temporaire), fontaine, abreuvoir, four commun (et non banal)29. Certains mas comprennent des bâtiments remarquables : maison forte de hobereau ou bien église paroissiale. Située à l’écart des maisons, celle-ci n’a manifestement joué aucun rôle structurant dans la morphologie du mas, au contraire de ce que l’on observe dans les villages. Nombre de ces hameaux ont gardé la même apparence aujourd’hui30.
19Là où les pareries, comparsonneries ou pagésies n’existent pas, ou en tout cas pas avec une telle ampleur, comme en Rouergue, la prégnance des structures familiales se manifeste néanmoins par la pérennité des feux habitant les mas. Au xve siècle, dans la baronnie de Sévérac-le-Château, les chefs de feu mettent en place des stratégies successorales très élaborées, qui visent à assurer la prospérité du feu sur le long terme en privilégiant la transmission de l’intégrité des biens à un héritier unique ; mais ils cherchent aussi à étendre le réseau familial en installant certains de leurs cadets déshérités à la tête de feux des mas voisins. Ces jeux successoraux permettent aux feux de constituer des lignées à la belle longévité et de couvrir le pays de réseaux de solidarités31.
20En Rouergue, les solidarités familiales se doublent d’une bonne intégration au sein de la communauté d’habitants. Dans la baronnie de Sévérac-le-Château, les mas qui appartiennent à la juridiction (mandement ou baylie) d’un bourg ou d’un village (et qui peuvent être jusqu’à une quarantaine) font partie de ce que les sources appellent la communitas castri et mandamenti, expression que j’ai restituée par « communauté de mandement32 ». Ils bénéficient d’une place reconnue au sein de celle-ci, en particulier grâce à leur représentation spécifique au sein du personnel communautaire : ainsi, sur les quatre consuls de Sévérac, la coutume veut que deux d’entre eux soient issus des mas, les deux autres du bourg. Ces dispositions empêchent tout pouvoir absolu du chef-lieu et permettent aux habitants des mas de faire entendre leurs exigences, alors même que, les mas étant le royaume des paysans et le bourg celui des artisans, marchands et juristes, les risques de mésentente et d’éclatement de la communauté sont forts. Elles sont en quelque sorte la transposition, en pays d’habitat dispersé, de la « démocratie au village » chère à Monique Bourin et Robert Durand33. Les mas sont également bien intégrés aux structures de pouvoir autres que communautaires : dans la seigneurie, ils servent de cellule de base pour la distribution de fiefs et l’organisation des droits seigneuriaux ; ils sont aussi partie intégrante du réseau paroissial puisque nombre de chefs-lieux de paroisse se trouvent dans des mas34.
21Cet habitat en mas, tel qu’il existe dans le Massif central de la fin du Moyen Âge, a une longue histoire derrière lui. Plusieurs travaux ont mis en valeur le rôle majeur du mas dans la dynamique de peuplement des xie-xiiie siècles. Dans l’arrière-pays languedocien, les mas, qui sont la forme de peuplement dominante, ont été les moteurs de la conquête des terroirs et ont accompagné l’avancement du front des défrichements à partir de l’an Mil35. Mais cet habitat en mas n’a pas surgi de nulle part. En Rouergue, Charles Higounet insistait sur la pérennité des manses carolingiens, qui forment la trame de l’habitat rural encore au xiiie siècle et dont l’on peut aujourd’hui repérer les limites sur le terrain. De fait, il existe une certaine continuité entre les manses carolingiens et les mas du Moyen Âge central. Alors que, dans l’économie domaniale carolingienne, les manses étaient subordonnés à la curtís et à la villa dans le schéma productif, ils sont devenus, à partir du xie siècle au plus tard, le pôle d’organisation du travail agricole36. Dans le contexte de l’essor démographique et de la colonisation des nouvelles terres défrichées, leurs exploitants ont tendance à s’agglutiner, à la suite de divisions successorales et d’installations conjointes dans les terres nouvellement conquises37. Les petits regroupements de manses et, partant, de maisons – qui existaient sans doute déjà mais s’inscrivaient dans le cadre de la villa – sont dès lors de plus en plus nombreux. Or il n’y a pas de terme spécifique pour désigner ces agglomérats : la villa désigne désormais un habitat groupé de dimension significative et doté d’au moins une fonction administrative, judiciaire, religieuse, marchande, etc., ce qui n’est pas le cas de ces ensembles de maisons-exploitations. C’est donc la partie – le manse – qui va servir à désigner le tout – le hameau. On ignore les étapes précises de cette évolution lexicale ; en Rouergue, elle semble prendre forme à la fin du xiie siècle et se manifester surtout au début du xiiie siècle38.
22Ainsi, dans le Massif central, le mas est, de façon indissociable, une unité de peuplement et d’exploitation agricole, qui prend plus souvent la forme d’un hameau que celle d’une ferme isolée ; c’est aussi un élément essentiel de l’organisation sociale et institutionnelle de ces pays montagnards.
Problématiques globales et pistes de recherche
23Au terme de ce panorama sur les différentes réalités auxquelles renvoie le terme de mas dans la France méridionale et la Catalogne, ce sont peut-être moins les différences que les similitudes ou les convergences qui sont les plus frappantes.
24Partout, le mas est une structure foncière. C’est un ensemble de terres cultes et incultes, généralement d’un seul tenant, bien délimité, et de dimension très variable, mais rarement inférieure à 10 hectares. Ce peut être une exploitation familiale, comme dans l’arc méditerranéen – tenure en Catalogne, ferme ou métairie en Provence ou en Lauragais ; ou bien une tenure collective, tenue de manière solidaire par des pariers qui en exploitent chacun une partie – comme dans les régions alpines à travers pareries et consorteries, et en Auvergne et Limousin à travers pagésies et comparsonneries ; ou bien encore un ensemble de tenures individuelles – comme dans l’ensemble du Massif central. Ces différentes formes ne sont pas exclusives l’une de l’autre : en témoigne la coexistence, en Rouergue, de mas soumis à un cens solidaire analogue à la pagésie auvergnate, d’autres composés de plusieurs exploitations distinctes et d’autres encore formant une seule tenure familiale.
25Dans la plupart des régions, le mas désigne aussi, et tout autant qu’une structure foncière, un habitat de petite taille, pouvant comprendre de une à une vingtaine d’habitations. Selon les cas, il prend donc l’aspect d’une ferme – c’est généralement le cas dans l’arc méditerranéen – ou d’un hameau – dans le Massif central. Dans ce dernier cas, les terres environnantes peuvent être considérées comme le finage du mas. Dans certaines régions cependant, le mas n’est pas – ou plus – un habitat. Dans le Massif central, les terroirs des hameaux désertés aux xive et xve siècles sont, pendant quelques décennies après leur abandon, encore appelés mas, avant que, répartis entre les terroirs des mas voisins, ils ne soient totalement oubliés ou ne subsistent qu’à travers la toponymie ; pendant ce laps de temps, ce sont donc bien des mas sans habitat – mais c’est une anomalie et on peut considérer que, dans le Massif central, le mas est, autant qu’une structure foncière, un habitat39. En Savoie ou en Dauphiné, comme on l’a vu, les mas sont parfois un ensemble de parcelles éclatées, non habitées, et qui forment le finage du village où habitent les tenanciers des mas ; en s’inspirant de l’exemple du Massif central, et en prenant garde au fait que les sources seigneuriales passent peut-être sous silence certaines caractéristiques du mas, on pourrait se demander si ces mas sans habitat ne seraient pas le vestige d’un ancien habitat disparu.
26Par ailleurs, en tant qu’unité foncière et d’habitat, le mas joue un rôle majeur dans l’organisation des pouvoirs institutionnels. Loin d’être un frein au pouvoir seigneurial, il sert au contraire de cellule de base de la seigneurie, que ce soit en tant qu’unité de prélèvement (dans le cas des pagésies, pareries, consorteries et autres comparsonneries), unité de conquête ou de reconquête des terroirs (en Haut-Languedoc aux xie-xiie siècles, ou en Quercy et Rouergue au xve siècle), unité de répartition des droits seigneuriaux, notamment judiciaires (en Rouergue), ou encore unité d’asservissement de la paysannerie (en Catalogne). Il est intégré en tant que tel dans le réseau paroissial, l’Église ayant visiblement cherché à encadrer au plus près les populations, même les plus dispersées, mais la politique ecclésiastique envers ces hameaux est encore assez mal connue et mériterait des recherches approfondies. Il occupe aussi une place reconnue au sein des communautés d’habitants (par exemple à Sévérac-le-Château).
27Le mas remplit aussi une fonction structurante dans l’architecture des relations sociales : tenu et/ou habité par des groupes familiaux ou des groupes de tenanciers, il est le siège d’importantes solidarités familiales et sociales, qui déterminent les formes du lien social et le développement économique local. Le mas fait donc figure de pièce maîtresse dans le contrôle des populations et l’organisation sociale de ces régions peuplées de hameaux.
28Le mas est en effet un phénomène typique des régions d’habitat dispersé de la France méridionale. Dans les quelques pays d’habitat groupé où il existe (Lauragais, Roussillon), il correspond à un établissement intercalaire ; ailleurs, il regroupe près de la majorité de la population, voire plus. À cet égard, il peut être considéré comme une alternative au phénomène villageois ; s’interroger sur le mas revient ainsi à s’interroger sur le phénomène de dispersion de l’habitat. En outre, les régions de prédilection du mas sont aussi des régions de montagne. Il y a là un trait spécifique aux « sociétés montagnardes », à l’exception notable des Pyrénées, où règnent les « maisons40 » : pourquoi cette fréquence des mas dans les montagnes ? Pourquoi des maisons dans les Pyrénées et des mas ailleurs ?
29Ces remarques nous mettent sur la voie d’une question encore assez mal résolue, celle de ses liens avec son « ancêtre », le manse carolingien. Comme Charles Higounet l’a souligné, il est manifeste qu’une continuité existe entre les deux – même si nombre de mas ont été créés après la période carolingienne, lors des grands défrichements. Cette évolution rappelle la transformation sémantique du terme villa ; et elle paraît tout aussi déterminante et problématique que cette dernière. Si l’on peut en brosser grossièrement les traits, comme je l’ai fait plus haut pour le Sud du Massif central, ses modalités sont encore mal connues et restent à préciser : quelle est sa chronologie ? Dans quelle mesure la transformation des manses a-t-elle accompagné la transformation sémantique ? À quoi ressemblait le manse/mas des xie-xiie siècles ? Pourquoi s’est-il mieux maintenu dans les zones montagnardes ? Comment est-il devenu cette tenure solidaire que l’on observe dans les régions alpines et dans certaines parties du Massif central ? Comment est-il devenu ailleurs un hameau ?
30Le mas constitue donc un phénomène vaste, complexe, multiforme, mais il n’a guère été étudié en dehors de monographies locales et régionales. Or, à mon sens, il ouvre des perspectives fondamentales pour l’histoire des campagnes du Midi. Il permet de reposer la question de l’encellulement des populations dans les pays de montagne et d’habitat dispersé, mais aussi de reconsidérer l’encadrement seigneurial, dans la mesure où il définit des régimes de tenure particuliers et, enfin, d’appréhender un type de lien social spécifique, celui qui se construit autour de ces microstructures que sont les mas. J’espère avoir montré dans cet article tout l’intérêt de cette problématique encore insuffisamment explorée.
Notes de bas de page
1 J.-C. Hélas, Une commanderie des hospitaliers en Gévaudan. Gap-Francès au milieu du xve siècle, thèse de l’université de Montpellier, 1974, dactyl., p. 187.
2 Les plus anciennes chartes en langue provençale (avant 1200), C. Brunei (éd.), Paris, Picard, 1926.
3 L’hésitation sur l’emploi du terme de mas se retrouve dans plusieurs écrits : ainsi, en Dauphiné, Henri Falque-Vert utilise toujours le terme de « manse » : Les hommes et la montagne en Dauphine au xiiie siècle, Grenoble, Presses universitaires, 1997. Pourtant, en Savoie, c’est bien la même réalité qui est décrite comme mas : F. Mouthon, « Entre familles et communautés d’habitants : les pareries des Alpes savoyardes », Les hommes en Europe. Actes du 125e congrès du CTHS (Lille, avril 2000), Paris, 2002, p. 97-120 ; N. Carrier, La vie montagnarde en Faucigny à la fin du Moyen Âge. Économie et société (fin xiiie-début xvie siècle), Paris, L’Harmattan, 2001, p. 177-180.
4 É. Pélaquier, « Du lieu aux masages : les mutations de l’espace bâti à Saint-Victor-de-la-Coste en Languedoc rhodanien du xvie au xixe siècle », dans L’habitat dispersé dans l’Europe médiévale et moderne, Actes des 28e journées d’histoire de Flaran (15-17 septembre 1996), Benoît Cursente (éd.), Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1999, p. 257-277.
5 F. Mistral, Lou trésor dou Felibrige ou dictionnaire provençal-français, Aix-en-Provence-Avignon-Paris, 1879-1886.
6 L. Stouff, « Le mas arlésien aux xive et xve siècles : à propos de l’habitat dispersé dans la Provence du bas Moyen Âge », Cadres de vie et société dans le Midi médiéval. Hommage à Charles Higounet, Annales du Midi, t.102, no 189-190 (1990), p. 161 et suiv.
7 M.-C. Marandet, « Le campmas du Lauragais au bas Moyen Âge : les biens et les hommes », dans Le paysage rural et ses acteurs, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, 1998, p. 119-162 ; id., « L’habitat intercalaire en Lauragais oriental du xive au xvie siècle », dans L’habitat dispersé..., op. cit., p. 235-256.
8 Il existe aussi, dans ces campagnes, des bordes, qui, au xve siècle, sont des granges et non pas des habitats.
9 A. Catafau, « La maison rurale en Roussillon du ixe au xive siècle. Une approche par les textes », dans Le paysage rural et ses acteurs, op. cit.
10 À l’époque moderne, Elie Pélaquier a également observé dans le Languedoc rhodanien un lien étroit entre bourg et masatges ou hameaux, qui prend la forme suivante : aux xvie et xviie siècles, certains des bourgeois de Saint-Victor-de-la-Coste (à une vingtaine de kilomètres à l’est d’Uzès) possèdent des maisons secondaires dans les masatges, qu’ils appellent mas ; alors que les autres demeures du hameau, habitées en permanence, sont bien appelées « maisons ». Ainsi, les maisons, du bourg ou des masatges, sont des résidences principales, tandis que les mas sont des résidences secondaires ou des annexes. Les propriétaires de mas disposent des avantages de l’habitat en bourg (protection, statut social...) tout en ayant une exploitation agricole. Au xiiie siècle, la situation s’inverse, les bourgeois désertent le bourg pour s’installer dans les hameaux, où les « mas » deviennent alors des « maisons ». E. Pélaquier, « Du lieu au masage... », loc. cit.
11 L. To Figueras, « Habitat dispersé et structures féodales dans l’Espagne du Nord au Moyen Âge central », dans L’habitat dispersé..., op. cit., p. 121-144.
12 E. Mallorqui, « El mas com a unitat d’explotacio agraria. Repas dels seus origens », El mas medieval a Catalunya, Quaderns del Centre d’estudis comarcals de Banyoles, no 19 (1998), p. 45-64, cité par L. To Figueras, « Habitat dispersé... », loc. cit.
13 L. To Figueras, « Le mas catalan du XIIe siècle : genèse d’une structure d’encadrement et d’asservissement de la paysannerie », Cahiers de civilisation médiévale, 36e année, no 2 (avril-juin 1993), p. 151-177·
14 M. Bourin, Villages médiévaux en Bas-Languedoc : genèse d’une sociabilité ( xe-xive siècle), Paris, L’Harmattan, 1987.
15 F. Mouthon, « Entre familles et communautés d’habitants... », loc. cit. Voir aussi M. Gelting, « Les hommes, le pouvoir et les archives : autour des reconnaissances du mas Diderens à Hermillon (1356-1529) », Études savoisiennes, no 3 (1994), p. 5-45 ; N. Carrier, La vie montagnarde en Faucigny..., op. cit., p. 177-180 ; N. Carrier, F. Mouthon, « Extentes et reconnaissances de la principauté savoyarde. Une source sur les structures agraires des Alpes du Nord (fin xiiie-fin xve siècle) », dans Terriers et plans-terriers. Actes du colloque de l’Association d’histoire des sociriés rurales et de l’École nationale des chartes (Paris, 23-25 septembre 1998), G. Brunei, O. Guyotjeannin, J.-M. Moriceau (éd.), Rennes-Paris, AHSR-École nationale des Chartes, 2002, p. 217-241.
16 H. Falque-Vert, Les hommes et la montagne..., op. cit., p. 176-201.
17 F. Menant, Campagnes lombardes au Moyen Âge, Rome, École française de Rome, 1993, p. 312-314.
18 « Les manses [...] constituaient ainsi une grille fiscale qui se surimposait aux exploitations et aux parcelles, et donc évitaient les aléas de leurs mutations et évolutions », H. Falque-Vert, Les hommes et la montagne..., op. cit., p. 199.
19 P. Charbonnier, Une autre France. La seigneurie rurale en Basse-Auvergne du xive au xvie siècle, Clermont-Ferrand, Institut d’études du Massif central, 1980.
20 J. Tricard, « L’habitat dispersé en Limousin aux xive et xve siècles : le témoignage des textes », dans L’habitat dispersé..., op. cit., p. 223-234 ; Les campagnes limousines du xive au xvie siècle : originalité et limites d’une reconstruction rurale, Paris, 1996.
21 J. Tricard, « Comparsonniers et reconstruction rurale dans le Sud du Limousin au xve siècle », Actes du 104e congrès national des Sociétés savantes (Bordeaux, 1979), Paris, 1981, t. 1, p. 51-62 ; id., « Frérèches et comparsonneries à la fin du xve siècle, un exemple limousin », Revue d’Auvergne, no 2 (1986), p. 119-127.
22 À travers la vie d’une famille de notaires de campagne du plateau de Millevaches aux xvie et xviie siècles, Nicole Lemaître a admirablement montré le fonctionnement de ces mas à base familiale, qui sont parfois le théâtre de luttes féroces pour le pouvoir et la richesse, où l’on n’hésite pas à manipuler son cousin-voisin pour le dépouiller. N. Lemaître, Le scribe et le mage : notaires et société rurale en Bas-Limousin aux xvie et xviie siècles, Paris, de Boccard, 2000.
23 B. Derouet, « Territoire et parenté. Pour une mise en perspective de la communauté rurale et des formes de reproduction familiale », Annales ESC, mai-juin 1995, p. 645-686 ; id., « Groupe domestique ou reproduction familiale ? Deux approches de la famille paysanne sous l’Ancien Régime », Enquêtes rurales, no 3 (1997) [Cahiers de la Maison de la recherche en sciences humaines de Caen, XII] p. 65-80.
24 La pagésie existe bien en Gévaudan ou en Rouergue, mais sa signification est différente : elle désigne la tenure que détient un tenancier. J.-C. Hélas, Une commanderie..., p. 187-190 ; id., « Le manse en Gévaudan », Cadres de vie..., op. cit., p. 173-178. Sur le Larzac, quelques organisations en pareries existent, mais restent marginales : M. Berthe, « L’habitat médiéval du Rouergue : l’exemple du Larzac », Revue du Rouergue, no 23 (automne 1990), p. 395-403.
25 J. Dumasy, Le feu et le lieu. La baronnie de Sévérac-le-Château à la fin du Moyen Âge, thèse de doctorat soutenue à l’université Paris 1, 2008, p. 461-474.
26 Le Rouergue aurait perdu autour de 20 % de ses mas entre le milieu du XIVe et la fin du XVe siècle. Ibid., p. 549-551.
27 J. Lartigaut, Les campagnes du Quercy après la guerre de Cent Ans (vers 1440-vers 1500), Toulouse, Publications universitaires du Mirail, 1978 ; J.-L. Dega, « L’évolution des habitats ruraux et le repeuplement du Bas-Rouergue méridional (XIVe-XVe siècles), dans Habitats et territoires du Sud, Actes du 126e congrès national des Sociétés historiques et scientifiques (Toulouse, 9-14 avril 2001), B. Cursente (dir.), Paris, CTHS, 2004, p. 215-233.
28 Le patus près de la maison est une petite parcelle en herbe qui sert de pacage temporaire aux bestiaux de la maison. Il est appelé couderc en Auvergne.
29 J. Dumasy, Le feu et le lieu, op. cit., p. 247-268.
30 A. Fel, Les hautes terres du Massif central, Paris, PUF, 1962.
31 J. Dumasy, Le feu et le lieu, op. cit., p. 369-419.
32 Ibid., p. 509-542.
33 M. Bourin, R. Durand, Vivre au village au Moyen Âge. Les solidarités paysannes du xie au xiiie siècle, Rennes, PUR, 1984, rééd. 2000.
34 J. Dumasy, Le feu et le lieu, op.cit., p. 474-481 et p. 493.
35 A. Durand, Les paysages médiévaux du Languedoc ( xe- xiie siècles), Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1998, p. 117 et suiv., p. 302 et suiv.
36 J. Morsel, L’aristocratie médiévale, ve- xvesiècle, Paris, Armand Colin, 2005, p. 190.
37 C’est ce qu’a démontré Aline Durand pour l’arrière-pays languedocien et il en est sans doute de même en Rouergue. A. Durand, Les paysages médiévaux du Languedoc, op. cit., p. 117 et suiv.
38 F. de Gournay, Le Rouergue au tournant de l’an mil. De l’ordre carolingien à l’ordre féodal ( ixe- xiie siècle), Toulouse-Rodez, Société des lettres, sciences et arts de l’Aveyron-CNRS, université Toulouse 2-Le Mirail, 2004. F. Hautefeuille, Structures de l’habitat rural et territoires paroissiaux en Bas-Quercy et Haut-Toulousain du viie au xive siècle, thèse de doctorat soutenue à l’université Toulouse 2-Le Mirail, 1998.
39 Jean-Claude Hélas, citant le cas de quelques mas sans habitat dans la seigneurie de Gap-Francès, considérait que le mas gaballitain était d’abord un ensemble foncier, puis éventuellement un habitat. Mais ces mas étaient probablement des mas désertés. J.-C. Hélas, « Le manse en Gévaudan », loc. cit.
40 B. Cúrsente, Des maisons et des hommes. La Gascogne médiévale (xie-xve siècle), Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1998 ; R. Viader, « Maisons et communautés dans les sociétés montagnardes. Le temps juridique (xiiie-xve siècles) », dans Montaynes médiévales, Actes du congrès de la SHMESP, Paris, Publications de la Sorbonne, 2004, p. 263-291.
Auteur
Université d’Orléans
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