La frontière interconfessionnelle, un concept pertinent dans l’espace urbain de la couronne d’Aragon des xiiie-xve siècles ?
p. 313-332
Texte intégral
1Il peut sembler paradoxal pour des chercheuses du groupe Jacov1 de ressusciter le concept de frontière interconfessionnelle pour réfléchir à la façon dont les juifs habitaient l’espace urbain catalano-aragonais des xiiie-xve siècles. Notre démarche scientifique et notre quête heuristique consistent en effet davantage à décloisonner l’histoire des juifs, à montrer que les juifs médiévaux étaient profondément insérés dans la société de leur temps et vivaient dans le même « monde social2 » que leurs contemporains.
2Si notre interrogation n’est pas totalement dépourvue de sens, c’est que l’entité juive reconnue juridiquement et institutionnellement dans la couronne d’Aragon à travers les communautés locales dites aljamas est aussi pourvue d’un corps, dont la forme, l’importance et le nom diffèrent selon les contextes et les lieux. Il s’agit du quartier juif ou juiverie, appelé le plus souvent call ou juderia dans la documentation, dont le développement accompagne l’institutionnalisation de cette minorité, et plus largement la communautarisation croissante de la société, dans cet espace comme ailleurs, au cours des derniers siècles du Moyen Âge3. La dimension spatiale de l’expérience juive postexilique a suscité les travaux des historiens depuis le xixe siècle4. Toutefois, le changement d’échelle et la multiplication des études qui caractérisent l’approche de cet espace à travers le quartier – notamment pour étudier les politiques ségrégatives5 – conduisent certains à y voir un « tournant spatial » des études juives6, analogue à celui observé de manière générale dans les sciences sociales depuis les années 19807. Néanmoins, les communautés juives ne forment pas des groupes monolithiques ou univoques. Elles sont traversées de diversités, notamment socio-économiques, mais aussi de divergences et parfois de conflits, dont certains les ont profondément divisées, comme les débats théologico-philosophiques, en particulier autour de la réception de l’œuvre de Maïmonide.
3Expression ou résultat du réflexe et du besoin de se rassembler, commun à de nombreux groupes minoritaires ou particuliers, un quartier juif est souvent identifié dans la topographie des villes de la couronne d’Aragon – comme dans d’autres territoires d’ailleurs. Il est caractérisé par des espaces et des infrastructures spécifiques requis notamment par les particularités du rite religieux. De ce fait, la communauté juive se distingue visiblement, dans l’espace public, aux yeux des juifs et des non-juifs. L’existence de ces lieux proprement juifs est la garantie pour la communauté de la possibilité de vivre son judaïsme de façon conforme aux prescriptions halakhiques et constitue en cela une réelle liberté. Mais l’existence d’un quartier juif représente également un danger car, en cas de tension, ses infrastructures signalent la minorité juive à d’éventuels agresseurs.
4Il nous a paru intéressant de réfléchir à la pertinence du concept de frontière – dont nous connaissons la polysémie au-delà du sens communément admis de séparation8 – pour définir les natures et les fonctions des limites des quartiers juifs. Nous nous appuyons sur une documentation émanant des autorités et des notaires, principalement issue des Archives de la couronne d’Aragon (Barcelone) et des Archives départementales des Pyrénées-Orientales (Perpignan). Elle nous permet d’examiner dans un premier temps la matérialisation des limites des quartiers juifs, d’étudier dans un deuxième temps la nature et les effets de ces limites et, enfin, les mutations qui les affectent entre les xiiie et xve siècles.
La matérialisation des limites
Un quartier ouvert ou fermé ?
5Dans certaines localités, le quartier juif est clairement identifiable car il est circonscrit par des limites visibles, ceint de murs et accessible par des portes. La documentation évoque les clefs de ces portes qui sont aux mains des dirigeants de la communauté – ou qui devraient l’être, car elles semblent parfois avoir été perdues9 – ou des portiers nommés par ces mêmes dirigeants. Tel est le cas par exemple des quartiers juifs de Barcelone, de Gérone, de Valence10 et de nombreuses autres villes de la couronne d’Aragon11.
6Dans d’autres espaces urbains, le quartier juif n’est pas délimité par une enceinte construite pour fermer le quartier. C’est ainsi le cas de Perpignan (figure 1)12. La clôture du call, situé dans la paroisse Saint-Jacques, est matérialisée au nord par le troisième rempart de la ville contre lequel les maisons n’étaient pas directement adossées, à l’ouest par le couvent des dominicains, et au sud et à l’est par des façades arrière et mitoyennes des maisons de juifs. Il s’agissait d’espaces ouverts sur le reste de la ville. La présence de portes est également attestée à Perpignan. La porte principale du call était surmontée d’une double tour construite en 1277. Elle se situait à l’entrée de la « rue du call ». En 1296, le roi imposa cette porte comme seule entrée du quartier, interdisant aux propriétaires des maisons d’ouvrir des portes donnant directement sur les rues des chrétiens et ordonnant la fermeture de celles qui existaient déjà13. La délimitation était donc de fait bien dessinée par les murs de ces maisons limitrophes à l’extérieur du quartier, avec lequel elles communiquaient de façon plus ou moins ouverte selon les périodes.
Figure 1 – Emplacement du call de Perpignan (fin xiiie-fin xve siècle), reconstitué à partir d’un plan de la ville datant de la fin du xviiie siècle

Légende : (1) emprise du call, (2) troisième rempart du xiiie siècle, (3) couvent dominicain, (4) place du Puig, (a) porte principale du call, (b) rue (principale) du call, (c) Portalet dels Juheus, (d) porte d’en Nathan (xve siècle), (A) église Saint-Jean, (B) église Saint-Jacques, (C) plaça de les Corts, (D) château royal. Fonds de carte : Maurille-Antoine Moithey, Plan de la ville et citadelle de Perpignan, capitale du Roussillon, 1760
gallica.bnf.fr / BnF
7L’expression « quartier juif » recouvre par ailleurs des réalités diverses. En fonction de leur taille, les regroupements de population juive apparaissent sous la forme de rue ou de quartier rassemblant quelques maisons ou bien, au contraire, s’étendant sur plusieurs rues et comptant des infrastructures importantes. Dans les localités plus petites abritant entre 60 et 100 juifs, comme à Valls, les structures qui leur sont propres sont beaucoup moins diversifiées. Dans ces cas, le quartier juif n’est sans doute que le regroupement des habitants juifs du lieu, sans qu’il existe forcément des infrastructures spécifiques. Néanmoins, lorsqu’elles existent, ces infrastructures ont une coloration confessionnelle. Les plus emblématiques sont les synagogues, les boucheries et les mikvaot ou bains rituels, que l’on rencontre quasi exclusivement à l’intérieur des quartiers juifs14. Le cas des cimetières, nous le verrons, est particulier.
8À Barcelone, plusieurs synagogues officielles existaient ainsi qu’un certain nombre d’oratoires informels qui ne se distinguaient pas dans le paysage urbain, puisque – et c’est une particularité du judaïsme – ce qui rend opérante l’assemblée cultuelle, c’est le nombre d’hommes qui la constituent, le minian, soit au moins dix hommes de plus de treize ans, et non un bâtiment spécifique. En revanche, le bain rituel (mikve) répond à des normes de construction bien particulières, mais il n’est pas visible dans l’espace public, puisque sa fonction (la purification par immersion des ustensiles utilisés pour cuisiner et celle du corps des femmes sept jours après la fin de leurs règles) oblige à une certaine discrétion. S’il existait des mikvaot « privés » – en Provence notamment –, le plus souvent il s’agissait d’une infrastructure communautaire localisée à proximité de la synagogue, à l’intérieur des limites du quartier15.
9Quant aux boucheries juives ou boucheries cachères, rien ne les distinguait des boucheries communes pour ce qui est de leur construction, mais elles se situaient souvent à l’intérieur des juiveries car les autorités civiles et religieuses, tant juives que non juives, veillaient à la stricte séparation des viandes pour respecter les impératifs de la cacheroute et, pour faire bonne mesure, afin de respecter le principe de hiérarchie qui devait guider les relations interconfessionnelles.
Les accroissements de population et le développement des juiveries
10L’accroissement de la population juive d’une localité, lié au mouvement naturel ou à l’apport venu de l’extérieur, est souvent évoqué dans la documentation par la mention de « nouvelle juiverie », en plus de l’« ancienne juiverie ». Les précisions d’ordre topographique qui accompagnent ces mentions permettent de localiser précisément ces extensions ou ces nouveaux quartiers sur les plans. À Barcelone, le call menor dit aussi call de Sanaüja s’ajoute ainsi au call major (figure 2).
Figure 2 – Reconstitution du call de Barcelone16

11La population juive de Ciutat de Majorque (actuelle Palma), importante et croissante depuis la conquête de l’île par les chrétiens vers 1230, n’est pas rassemblée dans un quartier juif. Les juifs sont plutôt disséminés, avec deux regroupements essentiels : autour de l’Almudaina, l’ancienne citadelle fortifiée, et autour de la plaça de Cort, dans un quartier qui prend ensuite le nom call menor. Il n’en reste aucun vestige monumental ni aucune véritable description. En 1285 est créé le nouveau call par ordonnance royale, mais c’est seulement en 1303 que Jacques II promulgue l’obligation d’y résider pour la population juive des deux quartiers précédents et pour la population encore dispersée au sein de la ville. Le call de Ciutat de Majorque est visiblement très délimité (figure 3). Il comprend une enceinte percée de quatre portes. Le portal major del call est la voie d’accès à l’espace réservé à l’aljama. L’espace connaît des agrandissements successifs liés à l’augmentation de la population qui se traduisent parfois par des élévations. Néanmoins, les juifs doivent ensuite acquérir des maisons situées au-delà des murs du call. Le fait de vivre en dehors des murs protégeant le call affaiblit la communauté juive et facilite les assauts de 139117.
12On ne trouve pas toujours la mention de call majeur et de call mineur. À Perpignan, le call connaît une restructuration spatiale lors du premier quart du xve siècle. Le « call nouvellement constitué18 » est le résultat d’une rétractation du quartier initial, désormais désigné comme l’« ancien call19 », sur sa partie est. Cette zone est constituée de grandes demeures où se concentre l’élite des marchands, prêteurs et médecins juifs, et communique directement avec la place du Puig (« colline » en catalan, attenante à la ville connaissant alors une importante urbanisation) par une porte, mentionnée au début du xve siècle20. Le call s’étend aussi de façon fluctuante sur la rue qui en constitue la limite au sud. Ce phénomène répond surtout à l’accroissement démographique de la communauté au cours du xive siècle, en raison des flux migratoires issus du Languedoc, de Cerdagne et de l’Alt Empordà.
Figure 3 – Emplacement du call de Ciutat de Majorque avant les émeutes de 1391, reconstitué à partir du plus ancien plan conservé de Ciutat, celui d’Antoni Garau datant de 1644

Légende : (1) Almudaina, (2) citadelle du temple, (3) cathédrale, (4) palais épiscopal, (5) consulat de la mer, (6) collège des marchands, (7) call major, (8) extension maximale du call, (a) plaça de Cort, (b) mercat, (c) portal major del call21
Une obligation de résidence ?
13Jusque dans les années 1340, la résidence dans les quartiers juifs n’est ni obligatoire ni exclusive. Lorsque, en 1303, Jacques de Majorque promulgue l’obligation de se regrouper dans le call, il impose réellement de dormir et prendre ses repas à l’intérieur du call, mais les juifs peuvent maintenir, de jour, leur négoce à l’extérieur22.
14Il faut par ailleurs distinguer la possession d’un bien et le fait d’y habiter, ce sur quoi semble se jouer la porosité du quartier, en termes non pas d’activités mais de résidence. Le cas de la rue sur laquelle s’effectue le débordement du call de Perpignan est tout à fait emblématique. En 1366, les syndics de l’universitas signalent au roi Pierre IV que plusieurs juifs y ont acheté « des demeures où ils font foyer et habitent ensemble avec lesdits chrétiens23 ». Le roi ordonne leur expulsion et leur en interdit la demeure. Il rappelle à ces fins l’obligation pour les juifs de résider dans les limites de leur quartier, obligation formulée très tôt à Perpignan par une lettre de la reine Yolande. Adressée en 1251 sous la forme d’un privilège à destination des habitants chrétiens du Puig, elle force les juifs à établir leur domicile dans le quartier qui leur a été assigné, sous peine d’amende et de poursuite24. Dans ces deux actes, ce n’est pas la propriété à proprement parler qui est remise en cause, mais la résidence, c’est-à-dire le fait de demeurer habituellement dans un lieu. Le droit de propriété des juifs relève quant à lui des privilèges octroyés par Jacques Ier en 1243 et 127525, qui leur permettent de posséder en franc-alleu les maisons et lieux encore non bâtis situés dans le call et d’être exemptés du foriscape – taxe foncière habituellement perçue par le propriétaire du bien lors de sa mutation –, lorsque la vente ou l’aliénation se fait à d’autres juifs. Il est donc plus avantageux pour les juifs d’être propriétaires au sein du quartier où ils doivent vivre, mais cela n’empêche pas certains d’acheter des maisons à la périphérie du quartier, lorsque cela est nécessaire ou s’avère suffisamment fructueux pour payer des taxes auxquelles ils pourraient normalement échapper. Acquérir un bien foncier, posséder des droits dessus, jouir de son usufruit ne conduisent pas automatiquement à y habiter et y faire son domicile. D’ailleurs, plusieurs des juifs qui détiennent des maisons dans cette rue limitrophe en possèdent également d’autres à l’intérieur du call.
15Sous les règnes d’Alphonse IV (1327-1336) et de Pierre IV (1336-1387), l’incitation à résider dans les juiveries se fait de plus en plus ferme et des mesures volontaristes de transformation des quartiers et de relogement des habitants sont prises. L’étude du quartier juif de Cervera permet de constater le caractère irrévocable de l’évolution, et la transformation de la nature du quartier juif en vingt ans, entre les années 1320 et 134026. Toutefois, épisodiquement, lorsque le contexte l’exige – par exemple lorsque l’afflux de juifs étrangers rend la pression démographique insupportable dans la juiverie –, le pouvoir royal accorde des exemptions et des juifs de confiance sont autorisés à résider à l’extérieur du quartier. Cinquante ans plus tard, après les violences de 1391, plus aucune latitude n’est possible.
Nature et effets de la limite
Proximité
16On s’est parfois interrogé et on s’interroge encore sur les origines et les motifs de la délimitation d’un quartier juif dans une localité. Celui-ci est fréquemment situé à proximité du cœur des villes et des bâtiments emblématiques du pouvoir : ensemble épiscopal, palais royal, etc. Les interprétations divergent : certains y voient la preuve de l’ancienneté des implantations juives en Occident, d’autres la volonté du pouvoir de « garder à l’œil », d’encadrer ou d’avoir sous la main ce groupe minoritaire, dont les élaborations politiques du xiiie siècle font de plus en plus souvent des sujets, voire des soumis particuliers du prince27.
17À Barcelone, le call se situe non loin du cœur politique et religieux de la ville. Cette proximité est mise en évidence, en creux, à travers des documents qui évoquent les troubles qu’elle occasionne, notamment lors de la célébration de la fête de Purim, qui commémore le salut des juifs menacés de massacre par le roi perse Assuérus au ve siècle av. J.-C. Cette fête donne lieu à des réjouissances et parfois à une dérision rituelle comparable à celle du carnaval chrétien28. Les documents de la pratique, comme les responsa rabbiniques de Salomon ben Adret dans les années 1280, évoquent les plaintes formulées par des membres de la familia de l’évêque de Vilafranca et de Lérida, gênés par le bruit des festivités de leurs voisins juifs29.
18De même à Ciutat de Majorque, le call est délimité au nord par le couvent Sant Francesc, à l’est par la citadelle du Temple, et au sud par le monastère de Santa Clara. Et là encore, la frontière ne filtre ni les bruits ni les prières. La première synagogue du nouveau call voit le jour en 1290, lorsque le roi Alphonse III d’Aragon en autorise la construction contre une donation de 12 000 sous. En 1297, le lieu d’implantation du centre religieux juif a été désigné par l’évêque Ponç de Jardí et les travaux sont bien avancés. Toutefois, les franciscains protestent en affirmant, sans véritable fondement, que les oraisons et les chants des juifs gênent la célébration de leurs rites30. Ce voisinage, cette proximité et cette visibilité mettent en évidence les deux effets possibles de l’existence d’un quartier juif : la coercition ou à l’inverse la protection.
Mesures coercitives ou mesures de protection ?
19Les quartiers juifs font assurément l’objet de mesures de protection de la part du pouvoir. Ils sont protégés par des gardes stipendiés à cet effet en cas d’émeutes ou lorsque des individus s’en prennent aux résidents juifs du quartier. Les juiveries sont en effet régulièrement la cible de violences, spontanées ou rituelles, perpétrées notamment à l’occasion de la célébration des fêtes de Pâques31. Gérone et Majorque sont caractérisés par la fréquence de ces épisodes, au point que sont prises des mesures de prévention à l’approche des fêtes. Le roi enjoint à ses agents de veiller à la fermeture des portes des quartiers juifs et de surveiller les enfants et les petits clercs, c’est-à-dire ceux qui sont susceptibles de se livrer aux violences. On a parfois interprété les injonctions du pouvoir à rester derrière les limites du call dans un sens infamant ou coercitif. Or, de nombreux documents mentionnent les démarches entreprises par les juifs eux-mêmes pour se protéger des violences en renforçant la fermeture du quartier.
20En temps normal, hors période de crise, qu’en était-il de la nature des limites du quartier ? La frontière infra-urbaine et interreligieuse était-elle complètement étanche et infranchissable ? En dehors des activités soumises à des spécificités halakhiques ou religieuses et qui, de ce fait, supposaient des infrastructures identifiables, il existait des activités exercées par des juifs hors de la juiverie : l’artisanat, le commerce, l’intermédiation (courtage), entre autres. Jusqu’à la fin du xive siècle, la liberté d’action et de circulation des juifs dans la ville était totale, mais, à partir des années 1410, des restrictions de plus en plus fréquentes vinrent entamer la marge de manœuvre des juifs.
21Quant à savoir si les limites du quartier juif constituaient un espace polarisateur, un lieu où s’exerçaient des activités spécifiques, il est difficile de donner une réponse catégorique. Pour Barcelone, la documentation municipale mentionne deux types de localisation pour la vente de la viande cachère : le marché de la Portaferrissa et l’entrée du call32. Mais, on le sait, la viande cachère ne pouvait pas être vendue aux non-juifs. À Perpignan, plusieurs maisons-boutiques et étals étaient localisés au croisement de la rue principale du call et de la rue neuve, où se situait la porte principale. Deux des bouchers juifs de Perpignan possèdent des maisons à cet endroit33. En 1411, l’usufruit de l’étage d’une maison occupée au rez-de-chaussée par Abram Momet, boucher juif, est vendu pour quatre ans à un marchand chrétien qui a affermé l’impôt sur les viandes du call34. La présence quotidienne de chrétiens au sein du call est confirmée par quelques indices, à l’instar d’une criée sur les modalités de la perception de la leude royale sur la viande des juifs. Il s’agit d’une taxe imposée sur la viande lors de son entrée dans la ville de Perpignan, ce qui obligeait les juifs à déclarer toute marchandise importée dans leurs habitations auprès d’un boutiquier chrétien, percepteur de cette imposition, installé devant la boucherie juive, à l’intérieur du call35. La cohabitation entre juifs et chrétiens à l’intérieur du call apparaît à chaque fois liée et justifiée par l’implication des seconds dans les affaires de la communauté en matière de fiscalité et par la nécessaire collaboration que celle-ci impliquait. La question de la résidence s’avère plus délicate si l’on tient toujours compte de la distinction entre propriété et habitat. Nous voyons des chrétiens recevoir des cens sur certaines maisons du call, mais celles-ci sont bien habitées par des juifs.
22En dehors du franchissement des limites du quartier lié aux activités, il existait d’autres motifs qui imposaient mécaniquement la sortie hors du call, comme la célébration des funérailles. La plupart du temps, les cimetières juifs étaient situés à l’extérieur ou en périphérie des localités, les morts juifs n’étant pas enterrés avec les morts chrétiens36. Les grandes communautés juives disposaient donc souvent d’un espace consacré à l’inhumation des morts, négocié avec le roi. En revanche, les petites communautés faisaient enterrer leurs morts ailleurs, ce qui posait divers problèmes, notamment pour l’acheminement des défunts. À Barcelone, le cimetière juif était situé sur le Montjuïc et les inhumations devaient souvent être accomplies discrètement, à la tombée de la nuit car les processions auxquelles elles donnaient lieu ne devaient pas être susceptibles d’attiser la curiosité37. À Ciutat de Majorque, les trois cimetières connus, situés à l’extérieur de l’enceinte urbaine (à l’ouest, à l’est et au nord), étaient éloignés du call. L’espace des morts était en lui-même circonscrit et identifié, mais les cérémonies auxquelles il donnait lieu devaient être invisibles38. Quant au fossar judeorum de Perpignan, il était plus proche, puisque localisé de l’autre côté de la muraille contre laquelle se trouvait le call. Pour s’y rendre, les juifs empruntaient probablement le Portalet dels juheus, une petite porte percée dans le mur de la ville et qui donnait sur les terrains environnants, évitant ainsi une traversée de l’espace urbain. Autrement dit, ce sont les mêmes règles qui s’appliquaient à la communauté des morts et à la communauté des vivants : circonscription territoriale identifiée et discrétion.
23Il est également question des limites du call à propos du serment more Iudaico prêté par les juifs dans le cadre des contrats conclus avec des non-juifs. Traditionnellement, à Barcelone, ce serment était prêté devant les portes du call sur la place Saint-Jacques, ce qui garantissait une certaine sécurité. Or, à partir des années 1330, on observe la multiplication des requêtes formulées par des juifs qui se plaignent des incidents auxquels la prestation du serment donne lieu. En effet, par une coutume récente, la cérémonie avait été déplacée sur la place Saint-Just, distante de 150 mètres seulement, à l’ouest du quartier. La procédure était devenue plus visible à un moment où le contexte économique s’était aggravé et où l’activité de prêt, entre autres, cristallisait l’agressivité interconfessionnelle. Les troubles justifient en 1331 la plainte collective de l’aljama qui se fait la porte-parole des prêteurs juifs refusant de prononcer le serment.
24Un autre exemple de l’insécurité vécue par les juifs en dehors du call nous est fourni par l’enquête testimoniale réalisée à l’été 1396 à propos des malversations perpétrées par Joan Garrius, régent de la trésorerie royale à Perpignan sous le règne de Jean Ier39. Cet officier parvint entre autres à extorquer une importante somme d’argent aux juifs de la ville. Le moyen de pression qu’il utilise nous intéresse parce qu’il induit une sortie du call. En effet, après avoir fait enfermer une dizaine de juifs parmi les plus riches au sein du quartier juif, il les fait transférer à la cour et prison du bailli, situées à l’extérieur, sur la plaça de les Corts40, et les menace du pilori. C’est seulement à cette étape que l’aljama cède à la demande de Joan Garrius. Si cet événement ne peut pas être interprété comme antijuif à proprement parler, Joan Garrius s’étant enrichi sur d’autres petites communautés, telles que les universitates des environs de Perpignan, il n’en reste pas moins qu’il a su jouer sur une faiblesse spécifique des juifs. Il parvient à les intimider en leur faisant franchir la frontière physique et mentale du call au sein duquel ils semblaient se sentir assez protégés pour lui résister. Garrius sait combien la circulation des juifs dans l’ensemble de la ville leur est nécessaire pour la bonne marche des affaires et l’entretien des circuits économiques. En assimilant la présence des juifs en dehors du call à la punition et à la soumission vectrices d’infamie, il réactive leur peur de l’agressivité des citadins, cinq ans seulement après les événements de 1391.
Le remaniement des limites après 1391
25Les massacres qui se produisent dans les royaumes hispaniques au cours de l’été 1391 constituent un tournant majeur pour les juifs, non seulement parce que les communautés sont profondément affectées et, pour certaines, annihilées, mais parce que la qualité même de la présence juive est altérée. Ces émeutes entraînent des baisses de population significatives dans les quartiers juifs de certaines villes, soit parce que les habitants sont tués, soit parce qu’ils se convertissent, soit encore parce qu’ils fuient. Flocel Sabaté estime qu’entre le milieu du xive siècle, qui correspond sans doute à un maximum démographique, et le dernier quart du xve siècle, qui correspond quant à lui à un étiage, le nombre de localités qui abritent des juifs est passé d’une centaine à une trentaine tout au plus, en raison de leur diminution numérique, mais aussi de leur choix de se regrouper davantage dans les grandes villes pour être mieux protégés41.
26Au cours des années 1410, dans le cadre de la prédication du dominicain Vincent Ferrier aux accents souvent anti-juifs42, la résidence dans la juiverie prend un tour de plus en plus exclusif. Les dispositions prises pour accentuer la séparation entre juifs et non-juifs sont appliquées dans de nombreuses villes. Les termes mêmes segregación et apartamiento sont employés à Teruel en 1413, lorsque les autorités de la ville évoquent la séparation des juifs et des musulmans, qui ne doivent plus habiter au milieu des chrétiens43. Le roi lui-même emploie le mot segregar en août 1414 dans un document relatif à la juiverie d’Aínsa dont le cas fait l’objet de plusieurs mises au point royales. Quelques mois plus tôt, les juifs, craignant les effets collatéraux de la prédication du dominicain, ont préféré quitter la ville et ont été empêchés d’y revenir par leurs concitoyens. Après avoir enjoint à ses officiers de laisser les juifs retourner chez eux, l’infant Alphonse évoque « la séparation et la ségrégation des juifs de cette ville et des autres villes du royaume, qui doit être accomplie rapidement44 ». Il y a donc deux facettes dans la politique royale : l’une conforme à l’attitude traditionnelle qui consiste à protéger les juifs ; l’autre qui pousse le plus loin possible la séparation des communautés que les citoyens non juifs de la ville considèrent comme impérative.
27Le durcissement est officialisé dans tout le royaume avec la promulgation de la bulle Etsi doctoris gentium par Benoît XIII en 1415 – obligeant notamment les juifs à assister aux sermons des frères prêcheurs trois fois par an –, suivie de celle d’une ordonnance royale qui va dans le même sens45. Les mesures prises à Barcelone comme ailleurs tendent au renforcement de la séparation et de la distinction, conformément au principe qui guide désormais les relations entre juifs et chrétiens. Ces mesures semblent plus strictes encore en ce qui concerne les convertis, qui doivent être écartés de leur famille et de leurs anciennes relations pour éviter leur rechute. Ils doivent donc quitter la juiverie.
28Pourtant, ce n’est pas toujours le cas dans les faits. Le 24 octobre 1391, un mois est donné aux conversos possédant des biens dans le call de Majorque pour déclarer s’ils souhaitent continuer à y vivre ou bien louer leur bien. Leur non-présentation doit entraîner la séquestration du bien. De nombreux convertis, dont nous possédons les noms juifs et chrétiens, retrouvent alors leurs logements dans le call sous une nouvelle identité. À cette occasion, on grave une croix sur les maisons des conversos. Il s’agit d’une christianisation symbolique du lieu, mais la mixité est bel et bien présente. Les convertis et les juifs partagent un même espace urbain. Les conversos participent également au paiement de la dette contractée par les juifs46.
29Si les émeutes de 1391 ont également touché la communauté perpignanaise avec d’importantes destructions de maisons, elles ne semblent pas avoir provoqué un remaniement immédiat des limites du call. Les maisons saccagées, abandonnées par leurs anciens occupants, sont à nouveau louées ou données en emphytéose avec la mention de travaux à réaliser. La documentation pour les années suivantes mentionne toujours les mêmes délimitations du quartier. C’est l’année 1417 qui constitue un moment charnière pour sa restructuration. La communauté juive de Perpignan connaît depuis deux ou trois ans de nombreuses conversions. La majorité des maisons du quartier est alors détenue par les créanciers chrétiens de l’aljama, auxquels le roi avait concédé les droits de seigneurie directe et de mutation au début du xve siècle. Beaucoup de ces maisons sont restituées à leurs propriétaires en raison des conversions, voire abandonnées par les juifs partis de la ville. À la suite de cette désertion, les créanciers décident de rassembler les juifs restants en un même lieu47, dans la partie située à l’est du quartier. Tout le reste de ce qui est alors appelé l’« ancien call » doit être réhabilité afin d’en tirer des revenus plus intéressants. Si plus aucun juif n’habite en dehors du call récemment délimité, des chrétiens et des nouveaux convertis y vivent au sein de maisons nouvellement acquises ou occupées dès avant leur conversion en ce qui concerne les néophytes, c’est-à-dire les juifs ayant récemment été baptisés. Les actes de vente et de location permettent de reconstituer un voisinage interconfessionnel. D’autres documents, plus originaux, rendent compte des effets qui peuvent en résulter. En 1417, le néophyte Joan Bonet rapporte devant un agent de la Procuration royale – administration chargée du domaine royal, dont dépendent les juifs – avoir entendu pendant la nuit, depuis son lit, des bruits de porte chez Samiel Jacob. Après s’être levé et rendu devant la maison, il constate l’absence du juif en question, mais y trouve l’épouse d’un autre néophyte, ce qu’il s’empresse de signaler à l’un des secrétaires de l’aljama48. La promiscuité est ici palpable, la dénonciation du néophyte s’appuyant sur un contact sonore et visuel direct. Plus tard, en 1436, le protecteur des créanciers de l’aljama fait savoir, par une lettre, son opposition à l’interdiction envisagée par certains néophytes d’échanger et de converser avec les juifs. Il avance qu’une telle mesure pousserait les juifs à l’exil et empêcherait la bonne perception des cens et des rentes qu’ils doivent continuer à verser, au grand dommage du patrimoine royal49. Il faut donc encore permettre et autoriser la proximité, du moins avec les nouveaux chrétiens, pour maintenir sur place les juifs et ne pas compromettre la survie d’une communauté intéressante sur les plans fiscal et économique.
30Malgré des mesures de ségrégation spatiale de plus en plus drastiques, on assiste parallèlement à une normalisation des relations intercommunautaires sur le plan économique. Les écritures en caractères hébraïques présentes dans les registres de la compagnie Datini de Majorque témoignent des rapports étroits entre les groupes de négociants juifs et chrétiens, en dépit d’une ségrégation physique et spatiale de plus en plus forte et de la multiplication des mesures visant à prohiber toute relation sociale entre eux. Les juifs continuaient de traverser l’espace urbain pour régler leurs affaires et se rendre dans la boutique du marchand florentin, située de l’autre côté de la ville, pour apposer leur témoignage de remise en mains propres d’argent comptant50. Malgré des tensions, la population vivait ensemble et était bien plus mélangée que ne le laissent supposer les écrits officiels. Tous les acteurs de la société avaient certainement conscience d’une norme globale, et tous se l’appropriaient.
Conclusion
31Nous avons mené une réflexion sur la frontière interconfessionnelle au sein de l’espace urbain de la couronne d’Aragon des xiiie-xve siècles en mobilisant les cas de plusieurs quartiers juifs de différentes localités sans pour autant omettre leurs singularités. L’exemple bien documenté de la ville de Perpignan suit ainsi une temporalité plus tardive que ceux de Barcelone et de Ciutat de Majorque. La limite du quartier juif est matérialisée et/ou rendue visible assez systématiquement et les infrastructures communautaires qui s’y trouvent participent à l’identification du quartier. Néanmoins, cet espace est également un lieu de passage pouvant être régulièrement franchi. Le quartier juif est donc un espace ouvert, mais qui peut être fermé lorsque la nécessité s’en fait sentir.
32Jusqu’au milieu du xive siècle, si la densité de la population juive est plus importante dans le quartier juif qu’ailleurs dans la ville, sa résidence n’y est pas exclusive. Même après, bien que l’obligation de résidence dans le call soit explicitement formulée et rappelée par les autorités, elle n’est jamais absolue en pratique puisque les débordements en périphérie continuent d’exister. Si l’on entend cantonner la vie des juifs au sein du call, celui-ci ne constitue pas l’unique lieu de leur socialisation et de leurs activités au sein des villes. De même, les limites du quartier peuvent aussi être des espaces polarisateurs, juifs et chrétiens se mêlant quotidiennement sur les places, au croisement des rues ou devant les portes des maisons et des boutiques.
33À partir de la fin du xive siècle et durant les premières décennies du xve siècle, le durcissement général à l’égard des communautés juives provoque un repli de celles-ci au sein de quartiers urbains restructurés par une volonté ségrégative. Pourtant, ces limites remaniées ne constituent pas partout une frontière interconfessionnelle à proprement parler : dans certains cas, la population de ces quartiers était mélangée, contrairement aux injonctions des autorités.
Notes de bas de page
1 Jacov (« de Juifs À Chrétiens : à l’Origine des Valeurs au Moyen Âge ») est un groupe fondé, il y a treize ans par Claude Denjean, dont les travaux visaient à étudier les formes et les modalités de l’insertion économique des juifs dans la société médiévale
2 Le concept est emprunté à la sociologie. Voir Daniel Cefaï, « Mondes sociaux. Enquête sur un héritage de l’écologie humaine à Chicago », SociologieS, Pragmatisme et sciences sociales : explorations, enquêtes, expérimentations, 2015, en ligne : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/sociologies/4921 (consulté le 20 novembre 2020). Pour l’application du concept à l’histoire, voir Annliese Nef, « La Sicile de Charybde en Scylla ? Du tout culturel au transculturel », Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, 128/2, 2016, en ligne : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/mefrm/3394 (consulté le 20 novembre 2020).
3 Pour une réflexion sur les processus comparés de « communautarisation », voir Annliese Nef, « Les groupes religieux minoritaires et la question de leur structuration en communautés dans les sociétés médiévales chrétiennes et islamiques », dans Jocelyne Dakhlia, Wolfgang Kaiser (dir.), Les musulmans dans l’histoire de l’Europe, t. 2, Passages et contacts en Méditerranée, Paris, Albin Michel, 2013, p. 413-440.
4 Voir les entreprises d’Heinrich Gross, Gallia Judaica. Dictionnaire géographique de la France d’après les sources rabbiniques, Paris, Cerf, 1897 ; Marcus Brann, Ismar Elbogen, Aron Freimann, Germania Judaica, Francfort, Kauffmann, 1917, s’inscrivant pleinement dans l’esprit de la Wissenschaft des Judentums.
5 Parmi une bibliographie pléthorique, on pourra consulter Gilbert Dahan, « Quartiers juifs et rues des Juifs », dans Bernhard Blumenkranz (dir.), Art et archéologie des Juifs en France médiévale, Toulouse, Privat, 1980, p. 15-32 ; Alfred Haverkamp, « The Jewish Quarters in German Towns During the Late Middle Ages », dans Ronnie Po-chia Hsia, Hartmut Lehmann (dir.), In and Out of the Ghetto: Jewish-Gentile Relations in Late Medieval and Early Modern Germany, Cambridge, Cambridge University Press, 1995, p. 13-28 ; Michele Luzzati, Il ghetto ebraico. Storia di un popolo rinchiuso, Florence, Giunti, 1987 ; Kenneth Stow, Il ghetto di Roma nel Cinquecento. Storia di un’acculturazione, Rome, Viella, 2014 [2001].
6 Charlotte E. Fonrobert, « The New Spatial Turn in Jewish Studies », AJS Review, 33/1, 2009, p. 155-164 ; Barbara E. Mann, Space and Place in Jewish Studies, New Brunswick (New Jersey), Rutgers University Press, 2012.
7 Angelo Torre, « Un “tournant spatial” en histoire ? Paysages, regards, ressources », Annales HSS, 5, 2008, p. 1127-1144. Pour une bibliographie assez complète sur la question, voir « Qu’est-ce que le “Spatial Turn” ? », Revue d’histoire des sciences humaines, 30, 2017, p. 207-238.
8 Chris Rumford, « Theorizing Borders », European Journal of Social Theory, 9/2, 2006, p. 155-169 ; Nira Yuval-Davis, « Borders, Boundaries, and the Politics of Belonging », dans Stephen May, Tariq Madood, Judith Squires (dir.), Ethnicity, Nationalism and Minority Rights, Cambridge, Cambridge University Press, 2004, p. 214-230.
9 C’est le cas notamment à Calatayud en 1452, Archives de la couronne d’Aragon (désormais ACA), Reg 2551, fol. 164v-165, 09/12/1452.
10 Pour Valence, voir ACA, Reg 19, fol. 56v-57, Alcira 19/09/1273, Régné no 566.
11 À Borja, où le quartier juif fut longtemps ouvert, les tensions croissantes incitent le roi, en 1328, à en ordonner la fermeture à la demande des juifs eux-mêmes, désireux de se protéger (ACA, Reg. 431, fol. 42r).
12 Aymat Catafau, « Le call juif de Perpignan : nouveaux aperçus », Revue des études juives, 177, 2018, p. 79-84.
13 Julien-Bernard Alart, Documents sur la langue catalane des anciens comtés de Roussillon et de Cerdagne, Paris, Maisonneuve et Cie, 1881, p. 115-116.
14 Claire Soussen, Judei Nostri. Pouvoir royal, communautés juives et société chrétienne dans les territoires de la couronne d’Aragon (xiiie-première moitié du xive siècle), Toulouse, Méridiennes, 2011, p. 61-71.
15 Paul Salmona, Laurence Sigal (dir.), L’archéologie du judaïsme en France et en Europe, Paris, La Découverte, 2011.
16 Reconstitution tirée du site : http://todosobrebarcelona.com/call-barcelona-conoce-historia-del-barrio-judio/ (consulté le 20 novembre 2020).
17 Sur le call de Majorque, voir Margalida Bernat i Roca, El Call de Ciutat de Mallorca a l’entorn de 1350, Palma de Majorque, Lleonard Muntaner, 2005 ; David Abulafia, « From privilege to Persecution: Crown, Church and Synagogue in the City of Majorca, 1229-1343 », dans Id., Michael Franklin, Miri Rubin (dir.), Church and City, 1000-1500, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, p. 111-126 ; José María Quadrado, La judería de Mallorca en 1391, Palma de Majorque, Lleonard Muntaner, 2008 (1886) ; Ingrid Houssaye Michienzi, « Coexistence et réseaux de relations à Majorque vers 1400 à travers le témoignage des marchands florentins », dans Marie-Louise Pelus-Kaplan, Anne-Marie Bernon-Gerth, Liliane Crips, Nicole Gabriel (dir.), Être citoyen du monde no 2. Entre destruction et reconstruction du monde : les enfants de Babel (xive-xxie siècle), Actes du séminaire doctoral du laboratoire ICT-EA 337, Paris, Diderot, 2015, p. 27-45.
18 Archives départementales des Pyrénées-Orientales (désormais ADPO) 1B219, fol. 98, 17/08/1420 : dins lo call antich e nou constituits, cité dans Aymat Catafau, « Le call juif de Perpignan », art. cité, p. 89.
19 ADPO 3E1/2158, fol. volant, 10/12/1420 : intus olim callum dicte ville Perpiniani.
20 Ibid. 3E1/2149, fol. 43, 25/10/1400 : cum quodam portale ipsius calli vocato den Nathan.
21 Le plan d’Antoni Garau peut permettre de comprendre la structure du call puisque l’enveloppe de la ville resta inchangée jusqu’aux grandes transformations qui débutèrent à la fin du xixe siècle. Au xive siècle, l’espace urbain était percé de neuf portes et scindé en deux par un torrent, la Riera, qui n’apparaît pas sur le plan puisque son cours a été dévié en 1613 pour passer à l’extérieur des murailles. Document d’origine : La ciutat de Mallorca Ab. Antonio Garau, 1644, Talleres del Servicio Geográfico del Ejército [Madrid], 1978, 32-H-15. Nº 281 du catálogo de Fondos Cartográficos del Instituto Geográfico Nacional, Gobierno de España, 2000, en ligne : https://www.ign.es/web/catalogo-cartoteca/apibadasid/cartoteca/searchAuthority/T700&26640 (consulté le 20 novembre 2020).
22 Estanislao de K. Aguiló, « Ordenes de Jaime II que los judíos moren todos dentro del Call (1303) », Boletín de la Sociedad Arqueológica Luliana, 7, 1898, p. 34 : extra predictum callum possint tenere operatoria et operare in illis sua ministeria, et vendere merces suas de die, ita tamen quod ibi non jaceant nec comedant ; Antonio Pons, Los judíos del reino de Mallorca durante los siglos xiii y xiv, Palma de Majorque, Miguel Font, 1984, vol. 2, document 17.
23 Vicent Garcia Edo (dir.), El llibre Verd Major de Perpinyà (segle xii-1395), Lérida, Pagès Editors, 2010, p. 622-623 [doc. 238].
24 François Fossa, Mémoire pour l’ordre des Avocats de Perpignan, Toulouse, Jean-Florent Baour, 1777, p. 66 ; Julien-Bernard Alart, Privilèges et titres relatifs aux franchises, institutions et propriétés communales de Roussillon et de Cerdagne depuis le xie siècle jusqu’à l’an 1660, Perpignan, Charles Latrobe, p. 200 ; Pierre Vidal, Les Juifs des anciens comtés de Roussillon et de Cerdagne, Perpignan, Mare Nostrum, 1992, p. 22. La lettre est aujourd’hui perdue.
25 ADPO 1B133, fol. 9 : Translat del privilegi dels juheus ab que són franchs de foriscapis de les cases que tenen al kayl de Perpenyà (8 des calendes de juillet 1275).
26 Soussen, Judei Nostri, op. cit., p. 208 et suiv.
27 Dahan, « Quartiers juifs et rues des Juifs », art. cité, p. 21 ; Flocel Sabaté, « L’espace des minorités ethniques et religieuses : les Juifs dans les villes catalanes au bas Moyen-Âge », dans Id., Christian Guilleré (dir.), Morphologie et identité sociale dans la ville médiévale hispanique, Chambéry, Université de Savoie, 2012, p. 231-287.
28 Elliott Horowitz, Reckless Rites. Purim and the Legacy of Jewish Violence, Princeton, Princeton University Press, 2008.
29 ACA, Reg 90, fol. 12v, Barcelone 28/08/1291, Régné no 2385 ; Cecil Roth, « The Feast of Purim and the Origins of the Blood Accusations », Speculum, 8, 1933, p. 520-526 ; Responsum de Rashba no 389, 3e partie, édité dans le CD-Rom Responsa Project.
30 Margalida Bernat i Roca, « Llocs perduts: cementeris i sinagogues de Ciutat de Mallorca (segles xiii-xv) », Bolletí de la Societat Arqueològica Lullana, 63, 2007, p. 7-40. La distance en ligne droite entre le couvent franciscain et la synagogue était toutefois de près de cent mètres, avec des constructions interposées.
31 Claire Soussen, « La question de la violence rituelle et de ses enjeux dans l’espace aragonais », Medieval Encounters, 13, 2007, p. 524-545.
32 Arxiu Historic de la Ciutat de Barcelona (désormais AHCB), Ordonnances spéciales, 1BV-1, 1350, fol. 8v.
33 ADPO 3E1/5091, pièce volante, 04/05/1403 ; ibid. 3E1/1367, fol. 30r-v, 02/08/1409.
34 Ibid. 3E1/5095, fol. 36v-37, 13/10/1411.
35 Ibid. 1B133, fol. 30v et fol. 36v-37, 28/11/1371.
36 Sylvie Anne Goldberg, « La mort dans le monde juif », dans Maurice Godelier (dir.), La mort et ses au-delà, Paris, CNRS, 2014, p. 119-157.
37 Soussen, Judei Nostri, op. cit., p. 72-75.
38 Bernat i Roca, « Llocs perduts », art. cité.
39 ADPO 1B169 : fragment de l’enquête testimoniale menée dans le cadre du procès initié contre plusieurs conseillers de feu Jean Ier par sa belle-sœur et nouvelle reine Marie. Voir Marina Mitjà, « Procés contra els consellers domèstics i Curials de Joan I, entre ells Bernat Metge », Boletín de la Real Academia de Buenas Letras de Barcelona, 27, 1957-1958, p. 375-417.
40 Pierre Vidal, Histoire de la ville de Perpignan, Paris, Welter, 1897, p. 191.
41 Sabaté, « L’espace des minorités ethniques », art. cité, p. 272.
42 Moisés Orfali, « La prédication chrétienne sur les juifs dans l’Espagne du bas Moyen Âge », Revue de l’histoire des religions, 1, 2012, p. 31-52.
43 Yitzhak Baer, Die Juden im christlichen Spanien. 1, Urkunden und Regesten, t. 1, Aragonien und Navarra, Berlin, Akademie Verlag, 1929, p. 789.
44 Jesús Ernesto Martínez Ferrando (dir.), San Vicente Ferrer y la casa real de Aragón : documentación conservada en el Archivo Real de Barcelona, Barcelone, Balmesiana, 1955, p. 74 et Baer, Die Juden, op. cit., p. 806 : ACA, Reg 2446, fol. 88, Saragosse 21/08/1414 : Certificantes vos, que sobre lo appartar e segregar los ditos judíos de los christianos, assín de la dita villa, como de otras villas e lugares desti regno, se deve provedir breument o cada e quando querredes, non supplicados por part de vostros provediremos en esto como cumple.
45 Sabaté, « L’espace des minorités ethniques », art. cité, p. 261.
46 Enrique Fajarnés, « Los bienes de los judíos y conversos de Mallorca después del saqueo del call (1391‐1393) », Boletín de la Sociedad Arqueológica Luliana, 8, 1900, p. 441‐444 ; Natalie Oeltjen, « A converso confraternity in Majorca : La Novella Confraria de Sant Miquel », Jewish History, 24/1, 2010, p. 53-85.
47 ADPO 3E1/1451, fol. 51v et fol. 55, 08/07/1417.
48 Ibid. 1B209, fol. 120, 17/02/1417.
49 Ibid. 1Bp831, pièce volante, 12/03/1436.
50 Ingrid Houssaye Michienzi, Judith Olszowy-Schlanger, « Échanges marchands et pratiques langagières : la communication entre chrétiens, juifs et convertis à Majorque vers 1400 », dans Écrits, langages et cultures du commerce. Cahiers électroniques d’histoire textuelle du LaMOP 10, Paris, LaMOP, 2018, en ligne (1re éd. en ligne 2019) : https://lamop.univ-paris1.fr/menu-haut/publications-et-ressources/publications-du-lamop/cahiers-electroniques-dhistoire-textuelle-du-lamop-cehtl/cehtl-10-2017/ (consulté le 20 novembre 2020).
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