Semi-piétonisation du vieux-port de Marseille : d’une incomplétude assumée à l’amorce d’une piétonisation de l’hypercentre
p. 177-204
Texte intégral
Introduction
1L’examen de la mise en œuvre effective de la boîte à outils de la mobilité urbaine durable permet d’éclairer les objectifs réellement poursuivis, en dépassant la seule analyse des discours (Hernandez, 2018 ; Reigner et al., 2013). En la matière, cet article interroge l’ambiguïté du « semi » contenu dans l’expression « semi-piétonisation » mobilisée à Marseille pour qualifier la transformation des espaces publics bordant le Vieux-Port. Les résultats présentés complètent des travaux antérieurs interrogeant les effets d’opérations de piétonisation de centre-ville et leur contribution au développement durable (Brenac et al., 2013), ou montrant à travers le cas de Marseille que l’aménagement de l’espace public pour le piéton favorise une « marche dynamique », qui privilégie les fonctions de transit et de circulation au détriment d’une « marche contemplative », nécessitant des lieux de pause et de déambulation (Bertoncello et al., 2013).
2Plus globalement, l’étude du cas de la semi-piétonisation du Vieux-Port, replacée dans la stratégie de réorganisation des déplacements à l’échelle de la ville, participe des réflexions scientifiques sur l’évolution des référentiels en matière d’organisation des réseaux de circulation (Leheis, 2011 ; Romeyer, 2016).
3À Marseille, la semi-piétonisation du Vieux-Port est plus qu’un projet d’espace public redonnant une plus large part aux piétons, c’est aussi un maillon de la transformation du système de circulation du centre-ville. Les partis pris adoptés en matière d’aménagement du réseau viaire méritent d’être analysés, ils sont des révélateurs des représentations à l’œuvre en matière de gestion et d’organisation des déplacements dans la ville. Mais pas seulement. Le réaménagement du Vieux-Port en secteur semi-piéton s’inscrit également dans une politique d’attractivité et de redynamisation du centre-ville, rythmée par l’accueil de grands événements, et en premier lieu les manifestations de « Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture ». Cet élément a joué un rôle dans la rapidité de réalisation de l’aménagement, bénéficiant à ce titre d’un portage politique fort.
4Le travail de recherche présenté ici1 a permis, avec quelques années de recul, d’observer les dernières phases de travaux de l’opération et de mesurer certains premiers effets du réaménagement en matière de reports de trafics et d’accidentologie. Outre ces démarches de nature plutôt quantitative dont les fondements méthodologiques sont détaillés plus loin, l’étude de cas proposée se nourrit aussi de l’analyse de plusieurs corpus complémentaires :
les plans de déplacements urbains (PDU) de la ville de Marseille (2000) et de la communauté urbaine (2006, 2013) ;
les études exploratoires conduites en vue du projet de semi-piétonisation (études de l’Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise, études des services municipaux et communautaires) ;
les pièces relatives au concours de maîtrise d’œuvre de la semi-piétonisation du Vieux-Port proprement dit (cahier des charges et études préalables au concours, réponses des équipes retenues, études d’impact et rapport d’enquête publique du projet) ;
des articles de la presse locale issus d’une veille opérée sur plus de dix années ;
des présentations afférentes au projet de semi-piétonisation émises dans diverses scènes plus ou moins formelles (politiques, médiatiques, pédagogiques) par ses parties prenantes (politiques, techniciens, élus).
5L’analyse de ces sources diversifiées a servi d’assise à la passation d’une série d’entretiens semi-directifs conduits auprès d’acteurs de la maîtrise d’œuvre – concepteurs et ingénieurs – et de la maîtrise d’ouvrage – techniciens des services de la Métropole marseillaise. Ces entretiens, menés documents à l’appui, ont visé à expliciter les logiques à l’œuvre et objectifs assignés à la semi-piétonisation dans ses différentes phases de planification, programmation, conception et mise en œuvre. Leur conduite s’est également appuyée sur un ensemble d’observations in situ commencées en 2009.
6Cet article présente dans un premier temps le contexte ayant présidé à l’émergence d’un projet de « semi-piétonisation » pour le Vieux-Port de Marseille. Les transformations induites par le réaménagement en matière d’usages, de trafic et d’accidentologie dans le centre-ville font l’objet d’une deuxième partie. Enfin, dans un troisième temps, nous replaçons ces transformations au sein d’un périmètre et d’une trame circulatoire élargis. Ce changement de focale a pour but d’interroger les reports de trafic induits par un tel projet, en même temps que leur prise en compte par les concepteurs et gestionnaires.
La « semi-piétonisation » du Vieux-Port : contexte, élaboration, partis pris et mise en œuvre
D’un hypercentre réceptacle du trafic de transit à un hypercentre apaisé : la semi-piétonisation comme levier
7Point central en même temps que limite poreuse entre quartiers nord et sud, le site du Vieux-Port est investi de nombreux usages, qui tiennent aussi à sa fonction de lieu de rassemblement populaire, ses nombreux cafés et restaurants, ou encore son activité de plaisance maritime et d’entretien des bateaux. À ce titre, le projet de semi-piétonisation dont il a fait l’objet a pu être investi de multiples ambitions. Nous mettrons ici en exergue deux d’entre elles, directement relatives aux évolutions souhaitées en matière de conditions d’accueil des différentes mobilités dans le centre de Marseille :
la suppression du trafic de transit dans l’hypercentre, engageant un bouleversement profond des habitudes installées en termes de choix d’itinéraire pour traverser la ville, en lien avec l’ouverture planifiée de la rocade L2 – nous y reviendrons ;
la mise en œuvre d’un meilleur accueil du piéton, lui-même inscrit dans un ambitieux programme de redynamisation du centre-ville de Marseille.
8Pour bien en saisir les enjeux respectifs, ces deux objectifs sont à replacer au sein des transformations urbanistiques que le réseau viaire de l’hypercentre de Marseille a connues au fil des siècles. D’un dessin majoritairement hérité d’un plan de composition élaboré au xviie siècle prévoyant le développement de la ville autour des quais du port, sa trame viaire donne aux axes nord-sud (rue d’Aix, cours Belsunce, rue de Rome) et est-ouest (la Canebière, débouchant sur les quais du port) un rôle majeur dans la distribution et le développement du tissu urbain. Ce plan de composition est complété au xixe siècle par la percée de la rue de la République, qui permet de relier le plus directement possible le port originel (désormais dénommé Vieux-Port) et les quais du nouveau port de la Joliette. Puis, au cours du xxe siècle, deux autoroutes sont réalisées, visant notamment à connecter le centre de Marseille ainsi que son port à son arrière-pays. Celles-ci ont alors la particularité de déboucher sur deux de ces axes historiques majeurs. Ainsi l’autoroute A7 arrive, via la porte d’Aix sur la rue d’Aix et le cours Belsunce, tandis que l’autoroute A55 donne sur les quais du port et la rue de la République.
9Dans les années 1960, la réalisation du tunnel sous le Vieux-Port vise à fluidifier ces échanges nord/sud en permettant un accès facilité aux bassins du port de la Joliette et à l’autoroute A55. Parallèlement et en vue de répondre aux mêmes objectifs, un statut de voie primaire est attribué aux axes République-Paradis et Belsunce-Rome, supports de ces flux nord-sud. Dans cette configuration, les quais du Vieux-Port se voient affublés d’un rôle « d’échangeur » entre les principales infrastructures irriguant le nord, le sud et l’est de la ville.
10Ainsi depuis plusieurs décennies, ces axes historiques, de même que les quais du Vieux-Port, sont devenus le support de flux motorisés particulièrement importants, notamment aux heures de pointe. L’organisation du territoire sur l’aire métropolitaine marseillaise amène en effet les résidents des quartiers sud et est de la ville à les utiliser pour traverser l’hypercentre et rejoindre les zones d’emplois situées au nord de Marseille, et au-delà, dans les zones d’activité de Marignane, Vitrolles et Berre. En vue de répondre à cette demande, le quai des Belges accueille alors neuf voies de circulation et les quais latéraux quatre voies (on relève de l’ordre de 15 000 véhicules par jour par sens de circulation sur le quai des Belges).
11Cette situation commence à être remise en question quand, dans le contexte des années 1990 où Marseille multiplie les réflexions sur son devenir (Tirone, 1991), émergent parallèlement au niveau national des dispositions législatives visant la réduction de la circulation automobile urbaine et le développement des modes de transports alternatifs. La ville va alors chercher à réorganiser la place de la voiture dans son centre. Il s’agit alors à l’inverse de faire en sorte que ce « transit » ne traverse plus l’hypercentre et libère les axes historiques, voués à une meilleure mise en valeur, notamment permise par l’insertion du tramway (Hernandez, 2003).
12La transformation de l’hypercentre est alors intégrée à un ambitieux programme de requalification, visant l’amélioration du cadre de vie et l’attractivité résidentielle et commerciale du centre de Marseille (Bertoncello et Hernandez, 2015). La prise en compte du piéton dans l’espace public participe de cet objectif de redynamisation et apparaît comme un élément incontournable de la qualité urbaine. Dès le début des années 2000, des projets de piétonisation plus ou moins partiels et ambitieux figurent dans différents documents produits par la Ville, dont le plan de déplacements urbains et le schéma directeur des espaces publics. Les diagnostics contenus dans ces travaux mettent en évidence d’importantes carences en matière d’accueil du piéton : des espaces publics inconfortables pour la marche, encombrés de divers obstacles et offrant des itinéraires discontinus, un nombre trop réduit de zones piétonnes. En réponse, ces documents recommandent une action globale et d’ampleur en faveur des modes doux, dépassant la simple création de mini-zones piétonnes sur quelques rues éparses (Bertoncello et al., 2013).
13En 2009, la « semi-piétonisation » du Vieux-Port est adoptée de façon conjointe par la Ville et la communauté urbaine, et donne lieu à un document programmatique précisant les orientations, en vue du lancement d’un concours pour cette opération. Parmi les objectifs principaux assignés à l’opération, on relève notamment : « faire du Vieux-Port la “place centrale” de la ville à l’échelle métropolitaine », « créer des espaces ouverts, simples, sobres, disponibles pour l’accueil d’animations et de grands événements, faciles d’entretien, de maintenance et de réparation », « réduire fortement la circulation automobile à l’intérieur d’une ceinture de boulevards […] tout en assurant la desserte locale », « assurer une continuité piétonne large et confortable […] et requalifier le centre-ville en faveur des piétons, des modes doux de déplacement et des transports en commun2 ».
14L’opération, d’un coût total estimé à 80 millions d’euros, y est appréhendée selon plusieurs périmètres imbriqués :
un périmètre large d’environ 400 ha épousant en grande partie le tracé des remparts du xviie siècle et formant aujourd’hui une ceinture de boulevards encadrant l’hypercentre ;
un périmètre restreint aux quais du Vieux-Port et au plan d’eau ;
un périmètre dit « opérationnel » comprenant le bas de la Canebière, le quai des Belges et les amorces du quai de Rive-Neuve et du quai du Port.
15Le dernier périmètre correspond à la première phase de l’aménagement et est destiné à accueillir une partie des manifestations de « Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture ». C’est à l’échelle du premier périmètre qu’il a été demandé aux équipes concurrentes de réfléchir à un plan guide intégrant la question de la circulation.
16Par ailleurs, le cahier des charges du concours appelle les équipes à se projeter sur deux horizons temporels, l’étape 1, correspondant à la tranche ferme et livrée en deux phases (2013 et 2016) et l’étape 2, correspondant à la tranche conditionnelle et affichée à horizon 2020.
Deux visions de la « semi-piétonisation » pour un nouveau fonctionnement circulatoire de l’hypercentre
17La perspective du concours international pour la semi-piétonisation du Vieux-Port a ainsi conduit à la production d’une série d’études et de propositions visant la réorganisation du système circulatoire de l’hypercentre. Celles-ci émanent aussi bien de la maîtrise d’ouvrage et de ses diverses assistances (services de la ville de Marseille et de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise), que des équipes de maîtrise d’œuvre participantes. Leur mise en regard fait apparaître deux grandes approches.
18La première peut être appréhendée comme abordant le terme « semi » contenu dans « semi-piétonisation » dans une acception plus temporelle que spatiale, dans le sens où une piétonisation complète du Vieux-Port est perçue comme inenvisageable à court terme du fait de contraintes fortes : le rôle du quai des Belges dans les échanges entre les parties nord et sud de l’hypercentre, la présence de nombreuses lignes de bus convergeant vers un pôle d’échange situé à proximité (Bir-Hakeim), et le maintien de l’accessibilité aux parkings souterrains. Néanmoins, à moyen ou long terme, l’arrivée programmée de la rocade L2, couplée à la résolution progressive de ces différentes contraintes, laisse envisager une piétonisation potentiellement totale de certains secteurs de l’hypercentre. Tout en rendant plus difficile son accessibilité automobile, par des modifications des sens de circulation, il ne s’agit pas pour autant, à l’horizon 2013, d’interdire toute possibilité de traversée nord-sud3. Cette approche correspond à la vision effectivement mise en œuvre, portée par l’équipe lauréate mandatée par le paysagiste français Michel Desvigne et concordant avec les préconisations portées par la direction du pôle grandes infrastructures de Marseille Provence Métropole, chargé du projet, et l’Agence d’urbanisme marseillaise.
19La seconde vision renvoie à un ensemble de propositions « alternatives » et ayant pour trait distinctif de prendre ce terme de « semi » dans un sens cette fois plus spatial que temporel. Le parti d’une suppression complète du trafic automobile des quais du Vieux-Port – mais ne présageant pas de sa suppression future sur un périmètre plus large – apparaît ici comme le dénominateur commun de ces démarches. Son application repose sur une autre forme de refonte du fonctionnement de la trame circulatoire de l’hypercentre. Les implications urbaines et techniques d’une telle vision ont pu être explorées sur la base de diverses sources, parmi lesquelles une étude préparatoire traitant de la desserte du secteur Centre-ville / Vieux-Port dans l’optique de la désignation de la ville comme capitale européenne de la culture 2013, des documents de travail internes aux services techniques de la Direction des transports qu’il nous a été donné de consulter et, de manière plus significative encore, l’autre projet de maîtrise d’œuvre porté par l’architecte marseillaise Corinne Vezzoni. En corollaire à ce parti d’une suppression du trafic automobile sur les quais du port, ces propositions alternatives ont pour second point commun de préconiser un plan de circulation dit « en pétales ». Celui-ci consiste en la sectorisation d’un périmètre en différentes poches (les pétales) conçues comme étanches entre elles par la mise en œuvre de boucles de circulation, interdisant ainsi les flux automobiles traversants. Pour aller d’une poche à l’autre, les automobilistes doivent emprunter une voie de ceinture. La conception de ce modèle circulatoire paraît avoir été guidée par un objectif de blocage des itinéraires historiques de traversée nord-sud de part et d’autre du Vieux-Port.
20Selon les acteurs porteurs de cette vision, cette sectorisation de la circulation dans l’hypercentre serait techniquement assez facile à mettre en œuvre (moyennant des adaptations liées aux contraintes géographiques du site), mais plus difficile à porter politiquement4.
21Si l’approche « spatiale » de la semi-piétonisation consiste à réserver aux seuls piétons les quais du Vieux-Port (tout en permettant l’accès automobile à proximité grâce au plan de circulation en pétales), l’approche « temporelle » s’inscrit dans une logique de mise en place de cheminements piétonniers privilégiant la qualité et la continuité des itinéraires sans exclure totalement l’automobile des quais. Le pari est ainsi fait que la diminution des volumes de circulation sur le périmètre élargi, couplée à un agrandissement des trottoirs et un désencombrement de l’espace public, favorisera une animation qui pourra, à terme, justifier une restriction de plus en plus forte et étendue de la circulation sur certains espaces de l’hypercentre.
22Ces deux approches se rejoignent néanmoins dans la manière dont elles envisagent l’aménagement de la ceinture de boulevards. La quasi-intégralité d’entre elles tend ainsi à appréhender l’infrastructure ainsi dessinée comme un « anneau » de protection du centre-ville, plus ou moins perméable. Il s’agit dès lors de rendre cette infrastructure plus fluide et plus lisible en tant qu’infrastructure unitaire et homogène par un aménagement plus qualitatif de cette succession d’axes majeurs. La ceinture de boulevards devient ainsi un « boulevard de ceinture ».
23Sans entrer dans les coulisses du choix – dont la presse s’est alors largement fait l’écho – entre ces deux grands partis pris de recomposition de la circulation automobile dans le centre-ville de Marseille, nous examinons ci-après les conditions de mise en œuvre du projet de réaménagement effectivement adopté.
Stratégie d’élaboration et caractéristiques du projet lauréat
24L’ensemble du processus d’élaboration et de mise en œuvre s’étale de novembre 2009 (publication de l’avis d’appel public à concurrence pour le concours de maîtrise d’œuvre international) à juin 2016.
25L’apaisement de l’hypercentre a pour levier le réaménagement du Vieux-Port, en réduisant fortement les fonctions des quais et en interdisant certains itinéraires. Pour ce faire, le dispositif « concours international de maîtrise d’œuvre », a été considéré comme stratégique. En effet, pour porter une telle transformation, politiquement délicate, la maîtrise d’ouvrage a souhaité un maître d’œuvre d’envergure internationale, hors d’atteinte des débats locaux5. En outre, la maîtrise d’ouvrage n’avait pas de solution consensuelle à proposer et a laissé aux concepteurs la charge de définir un mode de circulation. Il n’y avait en effet pas de certitude dans les services sur le nombre de voies à conserver ou à supprimer pour atteindre l’objectif escompté d’une réduction d’au moins 50 % de la circulation dans l’hypercentre.
26Sur le plan technique, le pilotage du processus est confié à la Direction des infrastructures de la communauté urbaine, reconnue pour sa capacité à conduire des projets complexes et à respecter les délais. Cette contrainte temporelle constituait un enjeu fort de l’opération, car la majeure partie du projet, le périmètre dit opérationnel, devait être livrée en janvier 2013, pour le lancement des manifestations de « Marseille Provence 2013, capitale européenne de la culture ». La livraison de la deuxième phase est également adossée à l’accueil d’un grand événement médiatique, l’Euro de football de juin 2016.
27Au printemps 2010, quatre équipes sont retenues pour imaginer et formaliser un projet. En novembre 2010, le groupement constitué par Michel Desvigne, Foster et Partners, Tangram, Ingerop et Yann Kersalé est désigné lauréat. L’année 2011 est consacrée aux procédures d’enquête publique et de concertation publique. En 2012, les travaux démarrent et durent dix mois, temps considéré comme très court au regard des transformations profondes appelées par la mise en œuvre du projet : réorganisation des circulations de surface et de l’occupation du port par les activités maritimes, transformation complète de l’espace public sur plusieurs hectares intégrant notamment le maintien des circulations des voitures et des nombreux bus sur le nouveau revêtement du sol. Nous reviendrons sur le détail du phasage de réalisation après avoir présenté les principales caractéristiques du projet.
28Le projet lauréat porte le parti pris d’un espace épuré, relativement peu pourvu en mobilier urbain, faisant ressortir la minéralité du Vieux-Port. Celle-ci a pour contrepoint l’aménagement paysager des extrémités maritimes des quais autour des forts Saint-Nicolas et Saint-Jean. Nommé « chaîne des parcs », cet aménagement paysager, offrant de nouveaux cheminements piétons en bord de mer, constitue la deuxième étape du projet, et reste encore à ce jour en attente d’un financement dédié. L’équipe propose pour les quais un réaménagement complet du sol, revêtu de granit clair, sans différenciation de niveau entre les chaussées circulées et les espaces de déambulation piétonne. Seul le quai des Belges (désormais renommé quai de la Fraternité) garde un double sens de circulation, en voyant néanmoins grandement diminuer le nombre de voies dédiées aux véhicules légers, puisqu’il n’en subsiste plus que deux (une dans chaque sens), contre sept auparavant. C’est ce double sens qui permet de conserver l’itinéraire de traversée nord-sud République-Breteuil.
29Le quai du Port perd la voie de circulation qui permettait aux automobilistes arrivant de la Joliette de remonter le quai en direction de la Canebière ou de la rue Breteuil. Il ne conserve ainsi qu’une voie de circulation dans le sens « sortant6 ». Les véhicules sont déviés vers les rues Caisserie et Grand Rue (deux sections de la « voie historique », artère principale de la ville de l’époque antique), irriguant aujourd’hui le quartier du Panier et débouchant sur la rue de la République. Le trafic va d’ailleurs considérablement y augmenter, nous y reviendrons plus loin.
30Le quai de Rive-Neuve, sur sa partie terminale, passe de trois voies circulées (deux dans le sens entrant, une dans le sens sortant) à une seule voie dans le sens entrant, ce qui permet notamment le maintien des accès aux parkings souterrains.
31C’est au niveau du quai des Belges que l’emprise gagnée est la plus large, permettant de faire du quai une grande place publique agrémentée d’une ombrière conçue par l’architecte britannique Norman Foster. L’espace libéré, du fait de la suppression des voies de circulation et du déplacement des activités des clubs nautiques sur huit plateformes flottantes, est donné aux piétons et aux cyclistes. De plus, deux voies en site propre réservées aux bus sont mises en place sur chaque quai (une dans chaque sens). La circulation autour des quais est réglementée par une zone 30.
32La mise en œuvre du réaménagement de l’espace public des quais du port, est amorcée concomitamment à la modification de certains sens de circulation au sein de la trame circulatoire de l’hypercentre d’une part, et à des réaménagements de carrefours et mesures d’exploitation visant à la fluidification de la ceinture de boulevards, d’autre part.
33Les travaux de la première phase de réalisation débutent en mars 2012 et durent dix mois. Celle-ci concerne le périmètre opérationnel du « fond du port », allant de l’hôtel de ville (quai du Port) à la place aux Huiles (quai de Rive-Neuve) et englobant la totalité du quai de la Fraternité. Il s’agit de faire en sorte que, pour les automobilistes, les quais du Vieux-Port ne soient plus les cheminements naturels d’accès aux tunnels, et le point de croisement des différents flux. À cette fin, la Canebière est mise en sens unique, il n’est plus possible de la « descendre » depuis la ceinture de boulevards. De plus, la partie basse de la Canebière jouxtant le quai de la Fraternité est piétonisée (mais ouverte aux bus, aux taxis et aux livraisons).
34Parallèlement aux travaux sur les quais, la ceinture de boulevards fait l’objet de plusieurs réaménagements visant à améliorer la configuration de ses carrefours (place du Quatre-Septembre, place des Capucines) et certaines de ses sections (boulevards d’Athènes, de la Corderie, avenue de la Corse), pour rendre plus fluide la circulation. Dans le même temps, des mesures d’exploitation, telle la vidéo-verbalisation, ou un meilleur jalonnement des parkings, y sont déployées.
35La deuxième phase de réalisation devait initialement concerner des parties terminales des quais nord et sud, en y poursuivant le traitement qualitatif du sol et les principes d’aménagement amorcés par la première phase. Elle ne va concerner que la partie du quai de Rive-Neuve, de la place aux Huiles au bassin du Carénage. Les travaux démarrent en septembre 2015, pour une durée de neuf mois.
36À l’intérieur du périmètre de l’hypercentre, d’autres opérations d’apaisement de la circulation sont impulsées par la transformation de l’espace public du Vieux-Port et de ses usages. Ainsi en 2017, la rue Paradis est requalifiée, il n’y subsiste plus qu’une seule voie de circulation, les trottoirs sont élargis et plantés d’arbres. La rue fait depuis l’objet d’animations commerciales régulières. La piétonisation de la Canebière, initiée en 2013, tend à se prolonger jusqu’au cours Lieutaud, puis à terme, jusqu’aux Réformés. Un projet en ce sens est actuellement présenté à la population. Il s’agit de pérenniser la piétonisation temporaire de l’axe mise en place dans le cadre des « dimanches de la Canebière ».
37Ainsi, les réaménagements, visant à restreindre la place de la voiture et à favoriser la déambulation piétonne, se multiplient dans l’hypercentre, confirmant l’interprétation d’une approche progressive et temporelle de la notion de semi-piétonisation.
Effets du réaménagement du Vieux-Port à l’échelle de l’hypercentre : usages, trafics et accidentologie
Le Vieux-Port réalisé, usages et ambiances in situ
38Le projet de réaménagement du Vieux-Port a également porté sur la complète remise à plat d’un vaste espace public à forte valeur paysagère, symbolique et patrimoniale. Par cette transformation, il s’est agi de redonner à celui-ci une configuration ainsi qu’une matérialité plus adaptée à la déambulation des chalands, touristes et autres promeneurs, en même temps qu’à l’accueil de grands événements et manifestations. Il convient en effet de rappeler que l’accessibilité piétonne de ce site s’était vue progressivement restreinte au cours du xxe siècle, en lien avec une double dynamique d’« envahissement automobile » de ses abords d’une part, et de privatisation de ses rives par les clubs nautiques, induisant la perte d’un rapport direct et immédiat à l’eau, d’autre part. La double reconquête de ces espaces, permise par le projet, s’est traduite par la libération d’un vaste plateau piétonnier prenant place sur le nouveau quai de la Fraternité. En lieu et place des nombreuses barrières physiques caractérisant l’aménagement précédent, la déambulation sur ce quai rencontre aujourd’hui comme seules entraves la présence de mâts d’éclairages, de quelques édicules et sorties d’aération liés à la présence souterraine du métro, en plus des poteaux de la désormais célèbre ombrière. Lieu incontournable de la prise de photos-souvenirs surplombantes caractéristiques, permises par son plafond-miroir réfléchissant sol, mer et passants, l’élégante construction est aussi progressivement devenue le lieu d’accueil de diverses manifestations du registre des arts de la rue.
39Tendant d’ailleurs à s’étendre de plus en plus largement sur les quais, ces manifestations de plus ou moins grande envergure participent de la nouvelle ambiance d’inspiration plus « méditerranéenne » que l’on a souhaité conférer au lieu. Celle-ci pourrait à certains égards être rapprochée de ce subtil mélange entre lieu de rassemblement et itinéraire de flânerie, à la fois populaire et touristique, qui caractérise les ramblas barcelonaises. La pertinence d’un tel parallèle mérite toutefois d’être pondérée par la prise en considération d’autres éléments caractérisant cet aménagement. Peut ainsi être évoquée la très importante minéralité du lieu que seule la présence d’un figuier, rescapé des travaux sur la rive nord, et d’un laurier-rose sur la rive sud vient contredire, faisant du Vieux-Port un lieu particulièrement exposé à l’ensoleillement et aux phénomènes météorologiques. Mérite aussi à ce titre d’être mentionnée la relative absence de mobilier urbain qui caractérise cet aménagement, et en particulier sur le quai de la Fraternité où l’absence de mobilier d’assise est manifeste7. Cette faible incitation à la halte couplée au redéploiement des lignes de bus sur les deux voies en site propre participe d’un paradoxal maintien du caractère mobile du lieu.
40Au-delà de la modification radicale du site du Vieux-Port, dans sa matérialité, ce sont donc aussi les usages, pratiques et représentations associés à ce lieu qui ont été profondément transformés par ce réaménagement : moins routier, plus accessible, plus piéton, plus vivant, plus animé, plus ouvert, plus touristique. Ainsi, l’objectif de repenser le Vieux-Port pour en faire un espace « rassembleur » dans la ville (dont témoigne le slogan « Le Vieux-Port, on s’y retrouve » accolé au projet) semble avoir été en grande partie atteint. Si le Vieux-Port nouvelle formule a toujours vocation à drainer les flux, ce sont toutefois des flux d’une tout autre teneur qui le traversent aujourd’hui, en lien avec le démantèlement du nœud de trafic routier que celui-ci avait fini par devenir au fil du temps.
41La réduction considérable du trafic automobile dans le secteur du Vieux-Port ressort d’ailleurs clairement des analyses ex post présentées dans le paragraphe suivant.
Évolution des volumes de trafic suite aux aménagements, à l’échelle de l’hypercentre
42L’évolution des trafics journaliers8 entre la période 2010-2011, antérieure aux aménagements du Vieux-Port, et la période 2014-2015, postérieure à ceux-ci, a été étudiée en s’appuyant sur les données provenant de la Métropole Aix-Marseille Provence issues de compteurs permanents.
43L’évolution des trafics horaires à une période correspondant à la pointe du soir a été également examinée. Elle a nécessité de procéder à des comptages manuels, sur la tranche horaire de 17 heures à 19 heures (en jour de semaine entre le lundi et le jeudi), en mai 2017. Les sites et le plan d’observations ont été définis de façon à permettre la comparaison avec les comptages manuels réalisés en mai 2010 par le bureau d’études Horizon Conseil pour le compte de la Métropole.
Évolution des trafics journaliers
44Des éléments sur l’évolution des trafics journaliers, consécutive aux aménagements du Vieux-Port, sont présentés dans la figure 7. Il faut noter que les données de trafic journalier ne sont disponibles pour les deux périodes d’analyse que sur une partie des rues du secteur d’étude, ce qui ne permet pas d’accéder à une vision complète de l’évolution des trafics. En outre, les évolutions observées ne traduisent pas nécessairement « l’effet » du réaménagement du Vieux-Port, puisque d’autres changements, liés à d’autres transformations de la ville ou à des tendances nationales, ont pu également jouer un rôle.
45De fortes réductions des trafics (baisses de 50 % à 80 %) sont observées sur les quais du Vieux-Port, et à un moindre degré (baisses de 10 % à 30 %) sur certains axes à l’approche du port (Canebière, rue Breteuil) et sur les voies sortant du tunnel du Vieux-Port à son extrémité sud. L’augmentation du trafic journalier dans le tunnel du Vieux-Port (de l’ordre de 12 %) ne surprend pas, puisqu’une partie du trafic écarté du secteur du Vieux-Port du fait de la piétonisation a pu se reporter sur cette infrastructure. Notons qu’une augmentation est également observée dans le tunnel Prado-Carénage, situé au sud9.
46Sur la ceinture de boulevards entourant le secteur du Vieux-Port, les données de trafic journalier sont souvent manquantes et ne permettent pas de tirer de conclusions claires. Le cas du cours Lieutaud fait apparaître une baisse (de l’ordre de 12 %) qui peut étonner en première analyse, puisque les trafics écartés du secteur du port auraient pu se reporter aussi sur cet axe. Mais il faut noter que le cours Lieutaud joue aussi un rôle pour l’écoulement des trafics à plus longue distance entre le sud et le nord de la ville. À cet égard, pour les trajets reliant le sud de la ville aux importantes zones d’emploi situées au nord (Marignane, Vitrolles, etc.) ou aux destinations plus lointaines (Salon, Avignon, etc.), l’ouverture du tunnel Prado-sud en 2013 a entraîné un gain de temps supplémentaire de l’ordre de 3 à 4 minutes pour l’itinéraire passant par les tunnels et l’autoroute A55, par rapport à l’itinéraire passant par le cours Lieutaud et l’autoroute A7. Ce changement, sans rapport direct avec l’aménagement du Vieux-Port, pourrait avoir contribué à détourner une partie du trafic du cours Lieutaud vers les tunnels. En outre l’évolution globale des flux de transit provenant (ou en direction) du nord de la ville sur la période étudiée s’inscrit dans une tendance générale à la baisse, si l’on se réfère à la diminution observée sur les grands axes autoroutiers au nord de Marseille (figure 1410).
Évolution des trafics horaires à l’heure de pointe du soir
47L’évolution des trafics horaires à l’heure de pointe du soir, telle qu’elle ressort de la comparaison des observations de 2010 et de 2017, apparaît sur la figure 8. Les résultats de cette comparaison sont à considérer avec précaution, car ils reposent sur des comptages manuels effectués sur un nombre nécessairement limité de périodes d’observation. On constate une baisse importante des trafics sur les quais. Une baisse apparaît aussi sur quelques voies importantes à proximité immédiate du Vieux-Port (rue de la République, Canebière), même si le trafic horaire s’est maintenu sur d’autres rues comme la rue Breteuil.
48Sur la ceinture de boulevards entourant le secteur du Vieux-Port, les trafics horaires à l’heure de pointe du soir paraissent généralement en augmentation. C’est le cas, entre autres, sur le cours Lieutaud. Le trafic est aussi en augmentation sur la rue Caisserie, où le trafic de desserte du quartier situé juste au nord du Vieux-Port a pu se reporter suite à la piétonisation partielle des quais. Globalement, ces résultats sont conformes à l’hypothèse que la piétonisation partielle du secteur du Vieux-Port se traduit, en heure de pointe du moins, par un report d’une partie du trafic sur la ceinture de boulevards.
49On remarque que deux axes importants, rue de la République et rue Breteuil, maintiennent un niveau de trafic très élevé (saturation aux feux) dans le sens nord-sud aux heures de pointe du soir. Par contre, le trafic traversant du Vieux-Port dans le sens sud-nord est en très forte baisse. Le trafic total sur le quai des Belges a ainsi été réduit de moitié durant les heures de pointe du soir. On note également la part importante des deux-roues motorisés dans le trafic, très certainement en augmentation par rapport à la période précédente.
50L’augmentation du trafic en heure de pointe du soir sur le cours Lieutaud peut paraître, au premier abord, contradictoire avec les résultats exposés plus haut dans la mesure où le trafic journalier est en baisse sur cet axe (entre les périodes 2010-2011 et 2014-2015). La comparaison entre pointe horaire et moyenne journalière est cependant toujours délicate11. Nous avons avancé plus haut l’hypothèse que le gain de temps sur les trajets traversant la ville par les tunnels (lié à l’ouverture du tunnel Prado-Sud) pourrait contribuer à expliquer la baisse du trafic journalier sur le cours Lieutaud ; ce mécanisme ne semble pas jouer en heure de pointe, alors que le gain de temps évoqué vaut également pour cette tranche horaire. Les tunnels étant, comme le cours Lieutaud, très chargés en heure de pointe, il est possible que le risque important de congestion dissuade à ces heures-là une partie des usagers de s’engager dans ces tunnels ou sur leurs voies d’accès, dont il est difficile de s’échapper s’il y a un blocage de la circulation, contrairement à la voirie de surface. Cette hypothèse resterait cependant à confirmer. Notons aussi que certaines mesures mises en œuvre sur le cours Lieutaud, comme le développement de la vidéosurveillance pour la verbalisation du stationnement en double file (fréquent auparavant), ont pu augmenter sa capacité d’écoulement du trafic en période de pointe, alors que la capacité sur d’autres infrastructures concurrentes comme le tunnel du Vieux-Port n’a pas été accrue.
Évolution des nombres d’accidents de la circulation
51Les projets de piétonisation sont généralement considérés comme porteurs d’une mobilité plus sûre et plus durable. Dans le cas du réaménagement du Vieux-Port, la sécurité des déplacements a-t-elle été effectivement améliorée ? Nous analysons ici l’évolution des nombres d’accidents corporels de la circulation avant et après le réaménagement du Vieux-Port et de ses alentours, en distinguant quatre zones : le Vieux-Port et ses alentours, la ceinture de boulevards12 entourant ce secteur, le tunnel du Vieux-Port, et le reste de la commune de Marseille.
52Les résultats concernant l’ensemble des accidents de la circulation sont présentés dans le tableau 1. L’évolution entre les deux périodes est assortie d’un intervalle de confiance à 95 % (nécessaire pour relativiser les conclusions à tirer de ces chiffres, qui portent sur des accidents, donc des phénomènes rares et en partie aléatoires).
53Tableau 1 Évolution des nombres d’accidents corporels
Période 2009-2011 | Période 2014-2016 | Évolution (%) (et intervalle de confiance à 95 %) | ||
Vieux-Port et alentours | 409 | 299 | – 27 % | (– 37 % à – 15 %) |
Ceinture de boulevards entourant ce secteur | 235 | 233 | – 1 % | (– 17 % à + 19 %) |
Tunnel du Vieux-Port | 12 | 33 | + 175 % | (+ 44 % à + 426 %) |
Restant de la commune de Marseille | 7 034 | 6 900 | – 2 % | (– 5 % à + 1 %) |
Ensemble de la commune de Marseille | 7 690 | 7 465 | – 3 % | (– 6 % à + 0 %) |
54Les évolutions diffèrent significativement entre ces différentes zones (test du χ2 : p-value de 1,66 × 10–5) : le nombre d’accidents baisse notablement sur le Vieux-Port et ses alentours, alors qu’il évolue peu sur la ceinture de boulevards comme sur le reste de la commune de Marseille ; il augmente fortement dans le tunnel du Vieux-Port, ce qui s’explique sans doute en partie par l’augmentation du trafic.
55Si l’on restreint l’analyse aux accidents corporels touchant des piétons, les évolutions observées sont celles présentées dans le tableau 2. Le tunnel a été écarté car aucun accident impliquant un piéton ne s’y est produit. Les chiffres suggèrent des évolutions différentes entre les divers secteurs, mais la différence n’est pas significative (test du χ2 : p-value de 0,244).
56Tableau 2 Évolution des nombres d’accidents corporels touchant des piétons
Période 2009-2011 | Période 2014-2016 | Évolution (%) (et intervalle de confiance à 95 %) | ||
Vieux-Port et alentours | 155 | 117 | – 25 % | (– 41 % à – 4 %) |
Ceinture de boulevards | 48 | 53 | + 10 % | (– 25 % à + 63 %) |
Restant de la commune de Marseille | 1 353 | 1 186 | – 12 % | (– 19 % à – 5 %) |
Ensemble de la commune de Marseille | 1 556 | 1 356 | – 13 % | (– 19 % à – 6 %) |
57Concernant les cyclistes, les effectifs d’accidents limités ne permettent pas de tirer de conclusion ferme : le nombre d’accidents touchant des cyclistes semble stable sur la ceinture de boulevards (3 cas avant et 3 cas après), en augmentation sur le Vieux-Port et ses alentours (11 cas avant et 14 cas après), et en légère croissance sur le reste de la commune de Marseille (141 cas avant et 149 cas après). Mais la différence entre ces évolutions n’est pas significative (test exact de Fisher : p-value de 0,85). Aucun cas impliquant un cycliste n’est survenu dans le tunnel.
58D’autre part, le nombre d’accidents impliquant des bus ou des trams est en baisse sur le Vieux-Port et ses alentours (de 12 à 4), paraît stable sur la ceinture de boulevards (2 cas avant et 2 cas après), et augmente sur le reste de la commune de Marseille (de 130 à 165 cas). Ces différences d’évolution sont significatives sur le plan statistique (test exact de Fisher : p-value de 0,0397). Aucun cas impliquant ce type de véhicule ne s’est produit dans le tunnel.
59S’agissant des accidents corporels touchant des usagers de deux-roues motorisés, les tendances observées semblent peu différentes de celles concernant l’ensemble des accidents : l’évolution est en effet plus favorable sur le Vieux-Port et dans ses alentours que sur la ceinture de boulevards, où le nombre d’accidents suit la tendance générale observée sur la ville de Marseille ; à l’inverse, ces accidents sont en forte augmentation dans le tunnel du Vieux-Port. Ces différences d’évolution sont statistiquement significatives.
Le cas des quais du Vieux-Port
60Si l’on restreint l’analyse aux quais du port, il apparaît que le nombre d’accidents impliquant des piétons est en augmentation entre les deux périodes étudiées, passant de 9 à 19 cas, ce qui diffère significativement de la baisse observée sur les autres rues situées dans les alentours du Vieux-Port (diminution de 146 à 98 cas) (test du χ2 : p-value de 0,00506). L’hypothèse que les piétons aient réinvesti l’espace viaire suite à la forte baisse du trafic sur les quais, mais sans nécessairement prêter suffisamment attention à la circulation plus rare mais encore présente, serait à considérer, notamment en recourant à une analyse qualitative approfondie des cas d’accident.
61Pour les accidents n’impliquant pas de piétons, on observe au contraire une baisse qui semble plus marquée sur les quais (diminution de 56 à 28 cas) par rapport aux autres rues des alentours du Vieux-Port (baisse de 198 à 154 cas). Cette différence n’est pas significative sur le plan statistique au seuil de confiance usuel de 95 % (p-value de 0,0819).
En bref, des effets plutôt conformes aux attentes à l’échelle de l’hypercentre
62L’observation des usages, des pratiques, des ambiances, comme la mesure des flux de trafic et de leurs conséquences sur les accidents, tendent à montrer que globalement les évolutions constatées dans le secteur du Vieux-Port et de ses alentours ont été conformes aux attentes des décideurs et des concepteurs. Le site est devenu plus vivant, plus agréable pour les piétons, plus ouvert et attirant pour les touristes, le trafic automobile y a été fortement réduit, ainsi que les nombres d’accidents. La seule ombre au tableau concerne les accidents touchant des piétons sur les quais eux-mêmes, en augmentation ; faut-il y voir les effets d’une piétonisation qui reste partielle, et d’une organisation des circulations résiduelles parfois peu lisible ?
Une semi-piétonisation réinterrogée à l’échelle de la ville
Le report des trafics sur différentes ceintures : un corollaire de la semi-piétonisation
63Au début des années 2000, l’argument selon lequel le bouclage complet de la rocade L2 est un préalable à la mise en place d’un hypercentre semi-piéton est omniprésent dans les études et les discours produits par la Ville et la communauté urbaine. Ainsi, la semi-piétonisation s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre d’un schéma circulatoire reposant sur trois anneaux interdépendants (la ceinture de boulevards protégeant l’hypercentre, la rocade du Jarret et la rocade L2) sur lesquels un report en cascade des flux est censé s’opérer. Il s’agit d’offrir des itinéraires permettant d’éviter l’hypercentre et d’assurer une distribution interquartiers, sans pour autant générer de trafic supplémentaire. Dans cette stratégie, la rocade du Jarret est amenée à être réaménagée en boulevard urbain (avec une réduction de capacité) au fur et à mesure des mises en service des tronçons de la rocade L2. Cette organisation, qui formalise sur la commune de Marseille un modèle générique d’organisation des déplacements, appliqué généralement à l’échelle d’une agglomération, est préconisée dans les plans de déplacements urbains de Marseille (adopté en 2000) et de la communauté urbaine (2006).
64Dans ces deux plans de déplacements urbains, la mise en place d’un « plan de circulation coercitif », dissuadant l’utilisation de la voiture dans l’hypercentre, la « semi-piétonisation » des voies les plus attractives, la réalisation de lignes de tramway, et la mise en service de la rocade L2 sont associées pour former un système de projets interdépendants (Hernandez, 2003).
65L’argument de la mise en service des tronçons nord et est de la rocade L2, comme préalable à une série de mesures limitant les possibilités de circulation dans l’hypercentre, s’incarne dans l’échéancier de réalisation produit en 1999, à l’occasion de l’élaboration du premier plan de déplacements urbains. On peut y observer une mise en service concomitante de la rocade L2 est, de la première ligne de tramway et de la requalification de la section est de la rocade du Jarret. Également, une mise en service concomitante de la rocade L2 nord, de la deuxième ligne de tramway et de la requalification de la section nord de la rocade du Jarret. Les dernières mesures permettant l’apaisement de l’hypercentre y sont programmées pour 2012, date à laquelle une mise en œuvre complète de la rocade L2 est alors envisagée.
66Enfin, bien que n’apparaissant pas explicitement dans les documents relatifs au plan de déplacements urbains, une succession de tunnels, formant voie de contournement souterraine par l’ouest, est envisagée, et vise à accueillir une partie des échanges nord-sud. Rarement mis en avant en tant que tel dans les discours, ces tunnels seront réalisés entre 2002 et 2013, et vont tenir un rôle particulièrement important dans la réorganisation effective des déplacements, en recevant une partie des flux écartés de l’hypercentre.
67Au-delà du seul plan de déplacements urbains, cet argumentaire est repris dans différents documents produits par les services de la Ville, tels que le schéma directeur des espaces publics du centre-ville, ainsi que dans la presse locale.
68En 2008, dans les études exploratoires en vue de la semi-piétonisation du Vieux-Port, et plus tard dans les documents relatifs au concours, l’articulation entre la semi-piétonisation de l’hypercentre et les différentes ceintures organisant les déplacements à travers la ville est réactivée.
69Cet argumentaire est sous-tendu par l’idée selon laquelle, au moment de sa mise en œuvre, la semi-piétonisation de l’hypercentre engendrera un report des trafics sur l’anneau de protection de l’hypercentre (la ceinture de boulevards) et sur la rocade du Jarret. Par ailleurs, la réalisation de la rocade L2 n’a cessé de prendre du retard, et lorsque la semi-piétonisation est engagée la rocade est loin d’être achevée.
Le phasage prévisionnel à l’épreuve des faits : des liens entre la réorganisation de la circulation dans l’hypercentre et les rocades successives réinterrogés
70Dans les faits, le chantier de la rocade L2 accuse de nombreux retards, et les mesures visant à restreindre les traversées automobiles sont néanmoins mises en œuvre, sans attendre le bouclage de cette rocade. Il s’agit de la réalisation des trois lignes de tramway empruntant tout ou partie des artères de pénétration dans l’hypercentre (rue de la République, cours Belsunce, Canebière, rue de Rome), puis du réaménagement des quais du Vieux-Port, accompagné de la refonte de la trame circulatoire.
71Si la rocade L2 prend du retard, en revanche les tunnels envisagés vont être réalisés selon les programmations annoncées. Ainsi, les évolutions du phasage donnent une place stratégique aux tunnels et aux trémies (dont certains sont payants) pour accueillir les flux déviés de l’hypercentre. Ces tunnels (tunnel de la Joliette, tunnel du Vieux-Port, tunnel Prado-Carénage et tunnel Prado-sud) permettent une traversée de la ville, évitant la congestion de surface, en l’absence d’une rocade L2 achevée. Moyennant 4 euros, les résidents des quartiers sud peuvent directement accéder aux autoroutes situées au nord de Marseille. Un état de fait qui, conjointement aux améliorations apportées à la circulation sur la ceinture de boulevards, améliore l’accessibilité des quartiers sud.
72Si la rocade L2 n’est pas achevée au moment où est actée la semi-piétonisation du Vieux-Port en 2009, sa réalisation a été par la suite (2013) « assurée » par la signature d’un partenariat public-privé (PPP). In fine sa mise en service effective date de fin novembre 2016, pour le tronçon est, et de fin octobre 2018, pour le tronçon nord. Malgré cet échéancier bouleversé, l’interdépendance des trois anneaux et de la semi-piétonisation est toujours affichée par les élus et les techniciens. Ainsi, la mise en service de la rocade L2 est présentée comme le levier autorisant le lancement des travaux de requalification du cours Lieutaud et de la rocade du Jarret. Sur ces deux anneaux des projets sont menés visant à supprimer certaines voies de circulation et à dessiner un nouveau partage de la voirie. Cette mise en service est également évoquée lorsqu’il s’agit d’étendre la piétonisation à l’intérieur du périmètre de l’hypercentre, et à terme d’interdire les dernières possibilités de traversée nord-sud.
73La rocade L2, dont le tracé est relativement éloigné de l’hypercentre et dont les caractéristiques routières donnent peu de place à des échangeurs, tient-elle véritablement un rôle stratégique dans les reports de circulation ? La question reste ouverte chez les différents acteurs que nous avons rencontrés. Quoi qu’il en soit, la perspective de son ouverture a joué, et joue encore, un rôle d’argumentaire dont se sont saisis les politiques, les techniciens et les maîtres d’œuvre de la semi-piétonisation à chaque présentation publique.
Éléments sur l’évolution des trafics mesurés, à l’échelle de la ville
74L’évolution des trafics journaliers a été étudiée sur quelques grands axes à l’échelle de la ville, entre la période 2010-2011, antérieure au réaménagement du secteur du Vieux-Port, et l’année 2015, postérieure à ce réaménagement13. Quelques résultats principaux sont présentés dans la figure 14.
75Les observations réalisées conduisent aux conclusions suivantes :
sur les infrastructures autoroutières situées au nord de Marseille, en amont et en approche de la ville, on observe une augmentation du trafic de 4 % à 5 % sur l’autoroute A55, et une baisse de 4 % à 6 % sur l’autoroute A7. Globalement, le trafic étant plus important sur l’autoroute A7, cela se traduit par une légère réduction globale du volume de trafic circulant sur ces axes ;
le trafic est stable sur l’autoroute A50, juste à l’est de l’échangeur avec la rocade du Jarret ;
une baisse du trafic d’environ 7 % est observée sur la rocade du Jarret (sur sa partie orientée nord-sud) ; nous ne disposons pas de données concernant l’évolution du trafic sur le boulevard de Plombières, qui prolonge la rocade du Jarret vers le nord-ouest et vers l’autoroute A7 ;
une baisse du trafic journalier de l’ordre de 12 % est observée sur le cours Lieutaud, comme nous l’avons vu plus haut ;
une augmentation de l’ordre de 12 % est relevée dans le tunnel du Vieux-Port, où le volume de trafic est très important (près de 90 000 véhicules par jour). On note que cette augmentation est dissymétrique et concerne essentiellement le sens sud-nord.
76Si l’on considère globalement les flux s’écoulant par ces trois principaux axes nord-sud (tunnel du Vieux-Port, cours Lieutaud, rocade du Jarret), l’évolution globale est une quasi-stagnation du trafic (+0,9 % correspondant à environ 1 500 véhicules par jour, sur un total de plus de 170 000 véhicules par jour), la baisse observée sur la rocade du Jarret et le cours Lieutaud étant compensée par l’augmentation relevée dans le tunnel. Un quatrième axe nord-sud est constitué par l’itinéraire traversant le Vieux-Port lui-même ; au niveau du quai des Belges, la baisse de trafic peut être évaluée (en l’absence de mesures précises) à 8 000 à 10 000 véhicules/jour. La prise en compte de cette forte diminution du trafic de transit par le Vieux-Port, nous incite à évaluer, globalement, une « évaporation » d’un volume de trafic de l’ordre de 6000 à 8000 véhicules/jour par rapport à l’évolution du trafic total de l’ensemble des grands axes de transit de la ville.
77Ainsi, malgré le retard pris par la rocade L2, qui n’a été achevée qu’à la fin 201814, le report anticipé des trafics du secteur du Vieux-Port vers la ceinture de boulevards n’apparaît pas si clairement dans les faits, en tout cas s’agissant du cours Lieutaud (si l’on excepte du moins certaines heures de pointe, pour lesquelles la capacité améliorée de cette infrastructure a permis une augmentation du trafic). Le trafic a d’autre part bien augmenté dans les tunnels, l’ouverture du tunnel Prado-sud en 2013 ayant également renforcé l’intérêt de cet itinéraire pour une partie des liaisons entre sud et nord de la ville.
78Ces données, et particulièrement la baisse des trafics journaliers sur le cours Lieutaud et la rocade du Jarret ont plutôt étonné les techniciens des services infrastructures, transports, circulation rencontrés lors des entretiens, d’autant que la rocade L2 n’était pas encore mise en service. La plupart ont également fait état de l’absence de démarche de recueil et d’analyse systématiques des données de trafic permettant un réel suivi de l’évolution des volumes de circulation suite à ce projet – particulièrement concernant les trafics journaliers (au-delà des seules heures de pointe). Ce constat interroge, compte tenu de l’importance donnée en amont aux enjeux liés aux reports de trafic qu’impliquent ces réaménagements d’espaces publics.
Conclusion générale : la « semi-piétonisation » du Vieux-Port, piétonisation à moitié ou piétonisation progressive ?
79Au terme de cet examen du projet de réaménagement du Vieux-Port et de ses effets en matière de redistribution des trafics aux deux échelles de l’hypercentre et du centre-ville, il s’agit maintenant d’opérer une forme de bilan des observations conduites, et de les mettre en regard de nos interrogations initiales quant à l’ambiguïté du terme de « semi-piétonisation » par lequel il a été désigné.
80Du point de vue des objectifs affichés en matière de réduction de la place de la voiture dans l’hypercentre, l’aménagement semble avoir globalement répondu aux attentes. Des baisses de circulation très fortes ont ainsi pu être mesurées sur les quais (baisse de 50 à 80 %) ainsi que dans une moindre mesure, sur certains axes à l’intérieur de la ceinture de boulevards (baisse de 10 à 30 %). Cette dernière fait aujourd’hui office de « rempart » délimitant un hypercentre désormais clairement identifié comme secteur d’interventions publiques.
81Du point de vue des conditions d’accueil du piéton dans l’hypercentre, le lieu est effectivement fréquenté et investi par une pluralité d’usages et de pratiques que cet aménagement a pour une large part permis de susciter. Ce bilan positif peut néanmoins être nuancé sur au moins deux points. Le premier renvoie au fait que, eu égard au caractère de lieu pivot du Vieux-Port pour les échanges nord/sud, au parti pris d’un espace épuré et faiblement pourvu en mobilier d’assise, et à la présence de nombreuses lignes de bus transitant sur les quais, la transformation opérée favorise une marche « utilitaire », dans la lignée des aménagements d’espaces publics privilégiant le transit à la pause qui tendent à se généraliser depuis déjà quelques années dans le centre-ville de Marseille (Bertoncello et al., 2013).
82Ce qui nous amène au second point : la lisibilité pas toujours évidente, pour les usagers, de cet espace semi-piétonisé. En effet, nous avons vu que le modèle choisi n’a pas été celui d’une piétonisation complète des quais. Ainsi, et malgré la circulation réduite, il existe encore de nombreuses traversées de voirie nécessitant l’attention du piéton, en particulier sur certains espaces où les sens de circulation ont été réorganisés, et dont les modes de fonctionnement s’écartent parfois des configurations usuelles (arrivée de véhicules par la gauche en deuxième partie de traversée, par exemple). L’augmentation des accidents piétons évoquée précédemment, mériterait à ce titre, de faire l’objet d’une investigation plus fine pour conforter cette analyse.
83En conclusion, cette spécificité marseillaise qu’a été l’emploi du terme de « semi-piétonisation » a été principalement mobilisée en amont de l’aménagement en tant que terme susceptible de ne « faire peur à personne15 ». Il a ensuite été jugé dévalorisant, car pouvant sous-entendre une action réalisée à moitié, ou restant trop ambigu quant aux intentions de l’aménagement. À ce titre, les services techniques marseillais n’hésitent aujourd’hui plus à employer le terme « piétonisation » pour qualifier les aménagements à venir. Ainsi, et même si la place laissée in fine au piéton demeure imparfaite, la semi-piétonisation du Vieux-Port peut rétrospectivement être appréhendée comme ayant favorisé l’acceptation sociale et politique d’autres aménagements piétons plus ambitieux – et donc plus défavorables aux modes motorisés – dans l’hypercentre marseillais.
Références
84Bertoncello B., Hernandez F., 2015, « Les fragilités d’un centre-ville au prisme de la dialectique inconfort résidentiel/confort urbain », dans Bourdin A. (dir.), La métropole fragile, Antony, Moniteur, p. 153-173
85Bertoncello B., Hernandez F., Bertoni A., 2013, « L’accueil du piéton dans les espaces publics du centre-ville de Marseille : discours, pratiques, actions », Recherche transports sécurité, 29, p. 279-293.
86Brenac T., Reigner H., Hernandez F., 2013, « Centres-villes aménagés pour les piétons : développement durable ou marketing urbain et tri social ? », Recherche transports sécurité, 29, p. 267-278.
87Hernandez F., 2003, Le processus de planification des déplacements urbains entre projets techniques et modèles de ville, thèse de doctorat, Aix-en-Provence, université Aix-Marseille.
88Hernandez F., 2018, « Analyser le projet de territoire au prisme des assemblages de projets techniques », dans Martouzet D. (dir.), Le projet fait les acteurs. Urbanisme, complexité, incertitude, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, p. 381-400.
89Leheis S., 2011, La ville et sa rocade : un projet d’infrastructure au risque du temps long : le cas de Marseille, thèse de doctorat, Paris, université Paris-Est.
90Reigner H., Brenac T., Hernandez F., 2013, Nouvelles idéologies urbaines. Dictionnaire critique de la ville mobile, verte et sûre, Rennes, Presses universitaires de Rennes (Espace et territoires).
91Romeyer B., 2016, Refaire la rue pour recomposer la ville : rues artérielles en théories et en projets. Mise en regard de deux cas d’études à Londres et à Lyon, thèse de doctorat, Aix-en-Provence, université Aix-Marseille.
92Tirone L., 1991, « Marseille en 1990, crises et métamorphoses », Méditerranée, 73/2-3, p. 59-65.
Notes de bas de page
1 Réalisé avec le soutien de l’Agence nationale de la recherche dans le cadre du projet « Risques émergents de la mobilité durable ».
2 Aménagement urbain du centre-ville incluant la semi-piétonisation du Vieux-Port à Marseille, Programme, produit en 2010 par la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (Déplacements et aménagement des espaces, Direction des infrastructures, Service des études opérationnelles).
3 Itinéraires : République-Breteuil et Paradis-Belsunce-pôle d’échanges Bir Hakeim-Rue d’Aix.
4 Entretiens avec un chef de projet à la Direction des transports de la Métropole Aix-Marseille-Provence (juillet 2018) et avec un mandataire d’une des équipes retenues (mars 2017).
5 Entretien, décembre 2018.
6 Il s’agirait même, aux dires de son ingénieur transport, d’un des partis pris techniques structurant directement apporté par l’équipe de maîtrise d’œuvre lauréate.
7 Même si cette absence a été tempérée par l’ajout ultérieur de certains dispositifs en béton visant à se prémunir contre de possibles actions terroristes, qui sont en pratique utilisés pour s’asseoir (figure 5).
8 L’indicateur pris en compte est la moyenne annuelle du trafic journalier (souvent appelée « trafic moyen journalier annuel » ou TMJA).
9 Source : Rapports annuels des exploitants de ce tunnel à péage.
10 L’augmentation du trafic sur l’autoroute A55 ne compensant pas la baisse observée sur l’autoroute A7.
11 En effet, les limites de capacité des voies sont déterminantes pour les reports de trafic éventuels en heure de pointe (alors que ces limites ne sont jamais atteintes sur l’ensemble de la journée, des reports de trafics restant toujours possibles en moyenne journalière). En outre, les caractéristiques des trajets en période de pointe (origine et destination, motif, portée du déplacement, etc.) diffèrent des caractéristiques moyennes sur l’ensemble de la journée.
12 Boulevard Charles-Livon, avenue de la Corse, boulevard de la Corderie, cours Pierre-Puget, boulevards Paul-Peytral et Louis-Salvator, cours Lieutaud (partie nord), boulevards Garibaldi et Dugommier, boulevard d’Athènes, boulevards Maurice-Bourdet et Charles-Nédelec, boulevard des Dames.
13 Pour des raisons de disponibilité des données sur certains axes, seule l’année 2015 est retenue ici pour la période après aménagement.
14 La première partie de cette rocade (la section est) n’a été ouverte qu’en novembre 2016, donc postérieurement aux périodes d’étude considérées. La section nord a parachevé cette rocade en octobre 2018.
15 Entretien avec le directeur des études opérationnelles, pôle Infrastructures de la métropole Aix-Marseille-Provence, décembre 2018.
Auteurs
Frédérique Hernandez, docteure et HDR en aménagement-urbanisme, directrice de recherche, département Transport, santé, sécurité, laboratoire Mécanismes d’accidents, université Gustave-Eiffel, Ifsttar.
Benoît Romeyer, maître de conférences en urbanisme et aménagement, Laboratoire interdisciplinaire en urbanisme UR 889, Institut d’urbanisme et d’aménagement régional, Aix-Marseille Université.
Jean-Emmanuel Michel, ingénieur d’études en cartographie et accidentologie, département Transport, santé, sécurité, laboratoire Mécanismes d’accidents, université Gustave-Eiffel, Ifsttar.
Thierry Brenac, chercheur, docteur en transports, département Transport, santé, sécurité, laboratoire Mécanismes d’accidents, université Gustave-Eiffel, Ifsttar.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Mobilités alimentaires
Restaurations et consommations dans l’espace des chemins de fer en France (xixe-xxie siècle)
Jean-Pierre Williot
2021
Policer les mobilités
Europe - États-Unis, xviiie-xxie siècle
Anne Conchon, Laurence Montel et Céline Regnard (dir.)
2018
Les faux-semblants de la mobilité durable
Risques sociaux et environnementaux
Hélène Reigner et Thierry Brenac (dir.)
2021
Mobilités et changement climatique : quelles politiques en France ?
Jean-Baptiste Frétigny, Caroline Bouloc, Pierre Bocquillon et al.
2024