Une analyse rétrospective de la justification du projet « Paris berges de Seine rive droite »
Les risques de l’évaluation : mobilisation, confusion et devoir de contrition
p. 87-104
Texte intégral
Introduction
Puis-je, afin de me tirer d’embarras, faire une promesse que je n’ai pas l’intention de tenir ? (Emmanuel Kant, cité par Morana, 2003, p. 7)
1« Comment penser […] qu’en fermant une infrastructure automobile, on ne réduit pas l’impact en terme de pollution1 ? » Cette citation met en exergue deux éléments centraux du raisonnement qui suit. Le premier tient à la permanence d’une rhétorique déterministe associée aux infrastructures de déplacements par le monde technico-politique (Offner, 1993). À Paris, la fermeture d’une infrastructure générerait mécaniquement une diminution de la pollution quand à Nice la construction d’un tramway engendrerait automatiquement une diminution des émissions de gaz à effets de serre2. Le second tient à un changement de registre de cette rhétorique déterministe. Jusqu’à présent cette rhétorique servait essentiellement à justifier la construction de nouvelles infrastructures de déplacements. Ainsi, l’amélioration de la compétitivité productive des territoires métropolitains justifiait l’investissement dans des infrastructures augmentant la vitesse des déplacements, ce qui permettait in fine d’étendre la taille effective du marché de l’emploi (Prud’homme et Lee, 1999). Or, depuis plusieurs années le paradigme de la mobilité durable s’impose dans les agendas métropolitains et donne une nouvelle raison d’être à la critique, que l’on doit à Jean-Marc Offner (1993), de la schématisation déterministe en matière de politique de transport. Cette critique déconstruisait le mythe des « effets structurants » des infrastructures de transport (Offner, 1993). Elle pourrait aussi s’appliquer aujourd’hui, sous d’autres formes, au questionnement des effets environnementaux prêtés à des choix de politiques de mobilité visant surtout l’amélioration du cadre de vie dans certains secteurs de la ville dans la perspective d’une meilleure attractivité urbaine.
2Le travail présenté ici porte sur les « effets » prêtés à des projets de réaménagements viaires qui tendent à réduire la place accordée à l’automobile en ville afin d’apprécier la qualité de vie de certains espaces métropolitains. D’ampleur parfois limitée, ces projets n’en sont pas moins nombreux et peuvent être coûteux. En atteste la multitude de projets de piétonisation (Brenac et al., 2013) ou encore les politiques relatives au stationnement dans les centres-villes (Claux, 2016). Le projet Berges de Seine rive droite est celui sur lequel notre attention s’est arrêtée et pour lequel nous avons souhaité retracer finement l’enchaînement des arguments qui justifient le réaménagement de cet espace urbain singulier. À la différence des autres projets urbains de piétonisation, le projet parisien se singularise à première vue par le poids accordé aux préoccupations environnementales, notamment celles liées à la qualité de l’air. Là où les politiques de piétonisation et de stationnement qui réduisent la place de la voiture s’inscrivent essentiellement dans des stratégies d’attractivité et d’appréciation de la qualité du cadre de vie et délaissent les questions relatives à l’environnement, le projet parisien est porté par un discours singulièrement différent puisque ces questions sont présentées comme d’irréductibles valeurs au nom desquelles l’action d’aménagement est menée. Étayée par une étude d’impact, la mise en avant de l’évaluation environnementale du projet est donc assez originale. Afin de retracer la construction de l’argumentation du projet et son évolution dans le temps, nous avons mobilisé et croisé des informations éparses mais disponibles dans un corpus large : étude d’impact du projet, rapport de l’enquête publique, bulletins municipaux officiels des débats, communiqué de presse, presse nationale généraliste, évaluation ex post de la mesure, jugements des tribunaux administratifs et de la cour administrative d’appel.
3S’il est nécessaire de reconnaître l’ambition de mener une étude d’impact pour ce projet, alors qu’aucune obligation légale n’y obligeait le conseil de Paris, les résultats qui en sont issus montrent avant tout l’optique mobilisatrice dans laquelle elle a été menée. Nous entendons par évaluation mobilisatrice une action d’évaluation qui cherche à persuader l’opinion publique du bien-fondé du projet mis en avant et dans laquelle le système de valeurs est imposé et l’appréciation est essentiellement positive (Offner et Ollivier-Trigalo, 1987). Il s’agit alors de produire dans ce cas précis un consensus autour de la décision en ayant recours à un argument d’autorité. Plus qu’une réponse à de réels enjeux climatiques et de santé publique, cette action de piétonisation s’insérerait dans une urgence communicationnelle (Flonneau, 2018). En cela, cette évaluation mobilisatrice nous semble être porteuse d’un risque. En effet, en entretenant la confusion et en privilégiant la capacité de convaincre sur celle de jauger la pertinence de l’action, cette évaluation ne porte-t-elle pas le risque de cautionner durablement une interprétation simpliste des enjeux climatiques et de santé publique de la mobilité durable et de soumettre cette dernière aux impératifs entrepreneuriaux de la production urbaine (Latouche, 2003) ? La dimension mobilisatrice de cette évaluation est retracée en trois temps. Premièrement, nous questionnons la robustesse des hypothèses de l’étude d’impact, qui aboutit à présenter une réduction de 38 % des circulations automobiles comme un effet du projet de réaménagement. Deuxièmement, nous nous intéressons à la conversion monétaire de cette valeur et au paradoxe temporel singulier qu’elle soulève. Troisièmement, nous observons la façon dont le discours politique soutenant la mesure se structure progressivement autour d’une opposition binaire, pour ou contre l’automobile, qui relève davantage de la passion que de la raison. Finalement, nous proposons de tirer quelques modestes enseignements de cette évaluation d’un projet symbolique et médiatisé en matière d’évaluation de ces projets de réaménagement viaire dits favorables à la mobilité durable.
De l’hypothèse de « l’évaporation » du trafic à son instrumentalisation
4Les gains environnementaux de la mesure de fermeture à la circulation automobile des berges de Seine rive droite sont évalués à partir d’un raisonnement, d’une succession d’hypothèses dont il est nécessaire de retracer les grandes étapes et la façon dont chacune d’elles est mobilisée au profit de la construction d’un consensus autour de la décision.
5Afin d’apprécier les effets environnementaux de l’interdiction de la circulation automobile sur un axe de 3,3 km, il est nécessaire de quantifier l’effet espéré de la mesure sur la circulation des véhicules motorisés. Il s’agit alors de calculer la variation dans le temps d’un indicateur que les ingénieurs des transports connaissent bien, celui des véhicules kilomètres (total des kilomètres parcourus). Si l’on connaît cet indicateur pour la période qui précède l’aménagement, en multipliant le nombre de véhicules par la longueur du tronçon, l’évaluation sert à approcher ce que pourrait être cette valeur après l’aménagement. Pour cela, la modélisation du trafic automobile est mobilisée par l’étude d’impact. Or, on sait que les modèles de trafic urbain en tant que science opérationnelle assument un rôle idéologique fondamental (Dupuy, 1975). De la définition des comportements des agents à l’aire sur laquelle est appliqué le modèle, la succession des hypothèses qui permettent de caler techniquement le modèle joue un rôle central dans la prévision. Ainsi, et quelle que soit la sophistication du modèle prévisionnel, les résultats ne valent que ce que valent les hypothèses initiales. Il semble donc important de revenir sur deux hypothèses prises lors de la prévision du trafic suite à l’aménagement des berges de Seine rive droite : « l’évaporation » du trafic et l’aire d’étude. Celles-ci semblent déterminantes dans les conclusions de l’étude d’impact selon laquelle l’interdiction de la circulation automobile sur ces voies permet une réduction de la circulation automobile de 38 %.
6La notion d’évaporation du trafic, apparue ces dernières années dans le vocabulaire politique, médiatique et académique, semble s’appuyer notamment, à l’origine, sur les résultats d’une revue de littérature portant sur une grande diversité de mesures ayant conduit à fermer des infrastructures au trafic et qui montre qu’en général le trafic n’est qu’en partie reporté sur d’autres infrastructures ou d’autres modes de déplacements (Goodwin et al., 1998). Ces auteurs notent cependant que ces évaluations ne peuvent prendre en compte de possibles reports de trafic vers des voiries très éloignées, et n’emploient pas le terme d’évaporation.
7La fermeture durant deux années du pont Mathilde à Rouen a été l’occasion d’étudier ce phénomène en comparant l’évolution des trafics traversant la Seine avant et après la fermeture de l’axe (Cerema, 2017). Trois constats sont faits. La fermeture de cet axe de circulation a généré : des reports de trafics vers d’autres axes pour 77 % des véhicules, une évaporation du trafic pour 12 % des véhicules et un changement de mode de déplacement pour les 11 % restants (Cerema, 2017, p. 26). L’hypothèse d’une évaporation du trafic élaborée dans l’étude d’impact paraît donc fondée, en première analyse. La notion d’évaporation du trafic, par opposition à celles de report de trafic ou de report modal, suggère bien une disparition du trafic (malgré le sens physique du terme, qui renvoie plutôt à un changement d’état). Or l’imperfection des méthodes fait qu’il est délicat de prouver cette disparition : l’étude du Cerema pointe bien le fait que cette apparente baisse de la mobilité peut être le résultat de facteurs multiples, dont certains remettent en cause l’hypothèse d’une disparition pure et simple des déplacements. À titre d’exemple, le report modal vers les deux-roues motorisés n’a pas été pris en compte, alors même qu’il est un fait important depuis plusieurs années3. Notons en outre que cette notion d’évaporation, qui est prise au sens d’une disparition du trafic (et qui semble de ce point de vue relever davantage de l’alchimie ou de la magie que de la physique) n’est curieusement pas interrogée dans sa signification économique : s’il y a bien disparition, ce sont des déplacements en moins, mais quels sont ces déplacements « évaporés », des renoncements à un emploi, à des relations sociales ou familiales, à des achats, à une visite touristique ? Ou bien encore l’abandon d’un marché de transport, d’une prestation de service, le renoncement à une livraison ? Les politiques qui se réjouissent de cette évaporation adhèrent-ils à cette décroissance de la mobilité, quelle que soit la nature des déplacements concernés ?
8L’étude d’impact menée pour le projet Paris berges de Seine rive droite indique que des hypothèses ont été faites quant à l’évaporation du trafic, sans interroger réellement cette notion et sans indiquer clairement la façon dont elles sont formées et prises en compte lors de la phase de modélisation.
9À ce premier manque de précision, relevé par la commission d’enquête et le tribunal administratif, s’en ajoute un second, relatif à l’aire d’étude. L’indicateur crucial à partir duquel sont évalués les impacts environnementaux et de santé publique de la fermeture d’un axe, l’évolution des véhicules kilomètres à la suite de l’aménagement, dépend en grande partie de l’aire sur laquelle les reports de trafics sont projetés par le modèle puis comptabilisés. En la matière, le périmètre à partir duquel est modélisé l’impact de la fermeture de la voie sur la circulation ne semble guère être sujet à controverse. Par contre, l’aire à partir de laquelle est comptabilisée l’évolution du trafic, et ses effets sur l’environnement, est résolument trop restreinte. Elle se limite à une bande de 100 mètres autour du projet d’aménagement et à quelques axes adjacents. Qu’il s’agisse de la direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie (DRIEE)4, de la commission d’enquête5, du tribunal administratif6 ou de la cour administrative d’appel7, les acteurs impliqués dans l’appréciation de l’étude d’impact mettent en cause sa sincérité du fait d’une aire d’étude trop restreinte à partir de laquelle sont évalués les effets engendrés par la fermeture à la circulation des quais bas de la Seine rive droite. Jouer sur les limites du périmètre au sein duquel les circulations sont prises en compte pour évaluer les gains en matière environnementale revient à modifier artificiellement le résultat. En rejetant hors de l’aire d’étude une partie des reports de circulation, des véhicules kilomètres, une partie des effets environnementaux de la mesure est éludée8.
10Finalement, sous couvert d’une hypothèse d’évaporation de la circulation automobile, c’est en réalité une occultation d’une partie des reports de circulation par un habile jeu sur l’aire d’étude qui permet à l’étude d’impact de présenter comme résultat de la piétonisation des voies sur berges rive droite une amélioration de l’environnement et particulièrement de la qualité de l’air. À ce biais lié au périmètre d’étude s’ajoute une curieuse préférence pour le présent dans l’évaluation de la mesure.
Une mobilité durable paradoxale : préférence pour le présent ou le passé ?
11Le champ de l’évaluation des projets d’infrastructures, et notamment l’évaluation ex ante, est dominé par des approches utilitaristes. Cette situation renvoie au poids des ingénieurs et économistes dans la constitution du champ des transports (Gallez et Kaufmann, 2009). Bien qu’indispensables à tout dispositif d’évaluation, ces approches utilitaristes sont critiquables pour différentes raisons. Nous en relevons deux principales. Premièrement, elles produisent une forte hiérarchie des mondes possibles tout en ayant de grandes difficultés à intégrer la diversité des informations (Hollard et Vion, 2006). Deuxièmement, ces approches utilitaristes sont dites anthropocentrées au sens où « les biens et services environnementaux n’ont de valeur que du fait de leur utilisation directe ou indirecte par l’homme » (Faucheux et Noël, 1995, p. 35). C’est par exemple le cas des pollutions environnementales imputables à l’automobile dont les coûts sont essentiellement évalués à partir de leurs conséquences sur la santé humaine (CE Delft, 2011, p. 35). Toutefois, depuis le début des années 1990, le développement de l’approche néoclassique dans le champ de l’économie de l’environnement et des ressources naturelles aboutit à un renouveau des méthodes d’évaluation des gains et coûts associés aux politiques environnementales qui percole progressivement et durablement dans le champ de l’évaluation utilitariste des projets d’infrastructures, et notamment de l’évaluation ex ante. Progressivement, les enjeux environnementaux sont mieux intégrés dans l’évaluation des projets d’infrastructure, de nouvelles valeurs ne cessent d’être prises en compte et actualisées (Boiteux, 1994, 2001 ; Quinet, 2013). En témoigne, l’augmentation de certaines valeurs tutélaires à prendre en compte lors de ces évaluations (tableau 1). Ainsi, la valeur moyenne attribuée à la pollution atmosphérique d’origine automobile pour un milieu urbain très dense a été multipliée par 8,5 en vingt années. L’augmentation de cette valeur peut paraître très importante dans la mesure où la pollution atmosphérique en ville diminue sur cette même période. Néanmoins, elle est liée au développement et à l’enrichissement des méthodologies dose-réponse que l’on retrouve en économie de l’environnement9 et qui permettent de mieux évaluer le coût que représente cette pollution en termes de santé publique, et aux modalités de transfert de ces méthodes au cas français (CE Delft, 2008, 2011 ; Ducos, 2014 ; Quinet, 2013).
Tableau 1 Évolution de quelques valeurs tutélaires en France, 1994-2013
Rapport Boiteux (I) (1994) | Rapport Boiteux (II) (2001) | Rapport Quinet (2013) | |
Effet de serre* (valeur par tonne de CO2, en euros 2010) | 22,8 € | 32 € sur la période 2010-2030 Au-delà : +3 % par an | 22,8 € en 2010 Entre 2010 et 2030 : +4 % par an 100 € en 2030 Au-delà : +4 % par an |
Pollution atmosphérique** (valeur pour 100 véh.km, en euros 2010) | Milieu urbain : 1,82 € Rase campagne : 1,21 € | Milieu urbain dense : 3,44 € Milieu urbain diffus : 1,82 € Rase campagne : 0,12 € | Milieu urbain très dense : 15,8 € Milieu urbain dense : 4,3 € Milieu urbain : 1,7 € Milieu urbain diffus : 1,3 € Rase campagne : 0,9 € |
* Le prix du carbone du rapport Boiteux (I) a été converti en prix du CO2. ** Les données sont celles de la route et plus particulièrement de la voiture particulière. |
12Il faut toutefois préciser que cette valeur moyenne de 0,158 €/véh.km a vocation à diminuer dans le temps du fait de l’évolution du parc automobile et de la diffusion progressive du progrès technique (Ducos, 2014). Autrement dit, l’amélioration de la qualité de l’air imputable directement à une réduction du trafic automobile s’estompe dans le temps du fait de la diffusion des améliorations et innovations de la motorisation des véhicules. Ainsi, pour un véhicule diesel de norme Euro 1, la valeur tutélaire à prendre en compte lors des analyses coûts-bénéfices est de 32,3 € pour 100 véh.km tandis qu’elle est de 1,1 € pour 100 véh.km pour un véhicule diesel de norme Euro 6 ; norme qui est appelée à se diffuser dans le temps. Finalement, à moyen et long terme, cela se traduit par une diminution des gains issus de la fermeture des voies sur berges. Ainsi, le choix de l’horizon temporel à l’aune duquel est évaluée la mesure de restriction de la circulation joue un rôle primordial dans l’évaluation des gains directement imputables à la mesure publique. Plus cet horizon temporel est court, plus il permet de mettre en avant l’effet bénéfique de la mesure de fermeture. Plus cet horizon temporel est éloigné, plus les effets négatifs des circulations automobiles sur la santé publique ont été internalisés par le secteur automobile sous l’effet des normes environnementales et plus l’effet positif d’une potentielle réduction du trafic routier par la fermeture des voies sur berge s’amenuise.
13Ces éléments mettent en avant un certain paradoxe dans le choix de l’horizon temporel de l’étude d’impact parisienne. Alors même que les méthodes issues de l’économie de l’environnement utilisées dans le champ de l’évaluation sont critiquées pour leur présentisme (Faucheux et Noël, 1995, p. 269), l’évaluation des gains d’une mesure mise en œuvre en 2016 à l’horizon 2016, laisse le lecteur averti dubitatif. L’objectif de développement durable n’impliquerait-il pas de prendre en compte un autre horizon temporel ? Sur ce point, les discours tenus lors des débats nous renseignent. Cette action d’aménagement est perçue comme un moyen d’effacer, dans ce lieu symbolique et patrimonial, les stigmates automobiles de la période moderne, où il fallait adapter la ville à l’automobile. Il s’agit alors de préserver ce lieu précis des circulations automobiles afin de restaurer un état initial, celui d’une ville pré-automobile.
14Le manque de clarté des hypothèses faites lors de l’étude d’impact laisse à penser que l’évaluation est largement entreprise pour mobiliser à travers un argument d’autorité. Le discours politique va en ce sens.
Stabilisation opportuniste du discours, confusions environnementales
15Les discours tenus par les partisans de la piétonisation défendent les dimensions environnementales de la mesure avec d’autant plus de vigueur qu’ils font l’objet de critiques. Ce discours qui use de la rhétorique pour rechercher l’adhésion émotionnelle est l’une des caractéristiques de l’évaluation mobilisatrice (Offner et Ollivier-Trigalo, 1987).
16Les discours portant le projet ne le réduisent jamais à une opération d’essence uniquement environnementale. Les premiers débats relatifs à la piétonisation des berges de Seine rive droite ne mettent d’ailleurs pas en avant outre mesure ce registre de justification de l’action. C’est un objectif parmi d’autres. S’il participe de la décision, il n’en est pas le point cardinal10. La piétonisation des berges de Seine rive droite est alors présentée à travers un discours ambigu qui a d’ailleurs déjà été identifié sur d’autres terrains d’analyse (Brenac et al., 2013). L’attractivité urbaine y tient une place importante. La reconquête de ce site emblématique et central doit permettre d’apprécier la qualité du cadre de vie afin de renforcer l’attractivité de la capitale. Ce discours ne disparaîtra pas. Bien au contraire, il représente un élément invariant et stable du discours motivant cette action. Pour preuve, même quand le cadrage du projet sera définitivement dominé par des enjeux environnementaux et de santé publique, l’exécutif parisien relèvera que la « qualité du cadre de vie, dont participe fortement la qualité de l’air et des espaces publics, constitue un facteur essentiel dans le choix d’implantation des entreprises11 ».
17Cet axe de légitimation du projet sera néanmoins détrôné à partir de l’été 2016 par un autre, construit autour du caractère « indispensable sur le plan environnemental et sanitaire12 » de la fermeture des voies sur berges. Cette évolution du discours peut être qualifiée d’opportuniste dans le sens où elle est fortement corrélée à l’actualité médiatique13. En septembre 2016, la pollution est mise à l’honneur par les propos tenus dans l’assemblée délibérante du conseil de Paris14. À cette période, les membres de la majorité municipale s’expriment alors sur l’importance des objectifs environnementaux du projet. Ces objectifs sont de deux ordres principaux : la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui contribuent au réchauffement climatique ; et des émissions de polluants locaux, qui détériorent la qualité de l’air. Une certaine confusion est perceptible dans les propos tenus entre ces deux considérations environnementales distinctes. Par exemple, la préservation de la santé des populations par l’amélioration de la qualité de l’air est présentée comme l’opérationnalisation des engagements issus de la COP 21, qualifiés d’accord historique de Paris15. Au-delà de cette construction rhétorique qui recourt à l’amplification en énumérant afin de mobiliser un consensus plus large, la diminution des émissions de polluants locaux responsables de la dégradation de la qualité de l’air occupe une place centrale dans ce discours. Celui-ci établit une relation causale d’ordre immuable qui impute clairement à l’automobile les effets sanitaires de la mauvaise qualité de l’air. Les débats au sein du conseil de Paris se structurent progressivement autour du refoulement de l’automobile pour des considérations environnementales et essentiellement de santé publique. Ce refoulement n’est en rien nouveau, l’automobile a toujours eu à composer avec un rejet certain, notamment pour des considérations sécuritaires (Flonneau, 2010). En cela, les propos contre la libre circulation automobile tenus par les partisans du projet lors des débats ne sont en rien exceptionnels. Les partisans du projet défendent une action historiquement située visant à diminuer la place de la voiture en ville en réduisant l’espace dévolu à la circulation au moyen de l’aménagement des voiries, cette conception s’opposant à celle de la période moderne16 (où il s’agissait « d’adapter la ville à l’automobile ») et s’inscrivant dans une optique impérieuse de santé publique. Du fait de la mobilisation de la cause environnementale, les opposants au projet sont disqualifiés : ce sont des « probagnole[s]17 » dont le refus de soutenir la piétonisation est un comportement « assassin18 » qui dégradera la santé des publics « les plus vulnérables, les bébés, les enfants, les personnes âgées19 ». Ces débats autour de la piétonisation des berges de Seine rive droite créent ainsi un clivage passionnel dans lequel il faut choisir son camp : pour ou contre l’automobile.
18L’évaluation mobilisatrice et le cadrage passionnel du problème qui en a découlé se sont avérés juridiquement irrecevables pour motiver la fermeture des voies sur berges rive droite. C’est donc la nécessaire valorisation touristique et esthétique d’un patrimoine mondial authentique et préservé qui justifie l’intérêt public de la piétonisation des voies sur berges rive droite20. En cela, cette piétonisation s’inscrit dans la lignée de celle réalisée sur la rive gauche quelques années plus tôt et l’action ne se singularise pas par rapport aux autres opérations de piétonisation étudiées par ailleurs (Flonneau, 2014). Cette justification patrimoniale permet de mieux comprendre le périmètre étriqué sur lequel l’étude d’impact évalue les reports de trafic : il ne s’agit pas de réduire les circulations automobiles à l’échelle de l’agglomération mais plus simplement de réduire la pression circulatoire à l’échelle du périmètre classé au patrimoine mondial de l’Unesco, d’un haut lieu de la ville.
Conclusion
19Évaluer une décision relève et relèvera toujours de la gageure. Néanmoins, c’est un travail nécessaire, indispensable et salutaire. À l’heure où l’on observe une certaine crispation autour des actions d’aménagement questionnant la place de la voiture en ville, à Paris comme ailleurs, il nous semble nécessaire de ne pas décrédibiliser la pratique évaluative.
20L’exemple de l’évaluation mobilisatrice de la piétonisation des voies sur berges rive droite à Paris met en avant un risque qui doit être considéré : celui qui consiste à faire d’un discours environnemental que l’on qualifierait de conservationniste un argument d’autorité au service d’impératifs entrepreneuriaux de la production urbaine éludant les considérations sociales.
21En effet, les acteurs favorables à ce projet de « reconquête pacificatrice » y voient l’expression d’un urbanisme tactique au service d’un nouvel urbanisme durable (Boulanger, 2018). Or, il nous semble que dans ce projet, l’urbanisme durable se soumet aux impératifs entrepreneuriaux de la production urbaine par le recours à l’improbable plus petit dénominateur commun qu’est l’amélioration de la qualité du cadre de vie que procure le refoulement de l’automobile. Selon nous, l’évaluation de ce projet révèle une vision de l’écologie politique que l’on peut qualifier de réductionniste, dans au moins deux de ses dimensions, et dont l’imparfaite étude d’impact est un marqueur flagrant.
22La première réduction simplificatrice réside à notre sens dans la confusion qui est entretenue entre amélioration de la qualité du cadre de vie et gains environnementaux, et sur un autre plan, entre les pollutions locales ou régionales et les rejets de gaz à effet de serre aux effets plus globaux. Or il ne faut pas écarter l’hypothèse qu’à l’écart de ces espaces urbains où les circulations automobiles sont réduites et la qualité de vie améliorée, les distances parcourues augmentent durablement dans les autres espaces, ceux d’une ville volontairement rendue invisible ici. Du point de vue des émissions de CO2, le refoulement de l’automobile hors des centralités ne serait alors qu’un trompe-l’œil. D’une part parce que la préservation des centres et le développement des circulations périurbaines et interurbaines peuvent être vus comme les deux facettes d’un même processus, s’inscrivant dans un contexte général de compétition entre villes et de métropolisation. D’autre part parce que l’enjeu, en matière de réduction des émissions de CO2, se situe principalement à l’échelle des déplacements à longue distance (Bouzouina et al., 2011 ; Flonneau et Orfeuil, 2016 ; Crozet, 2017). Ainsi, une simple répartition kilométrique des émissions de gaz à effets de serre imputables à l’automobile nous indique que plus de 60 % de ces émissions s’effectuent hors de la ville21. Pour cette raison, nous estimons à la suite d’autres auteurs que l’urbanisme et l’aménagement ne peuvent jouer qu’un rôle relativement restreint dans la diminution des consommations énergétiques et des émissions de gaz à effet de serre issues de l’automobile (Desjardins, 2017 ; Dupuy, 1999 ; Massot et Orfeuil, 2007). Du point de vue des émissions de polluants locaux, il ne faut pas éluder par principe l’hypothèse que le refoulement de l’automobile hors du centre-ville puisse avoir des impacts nuls ou négatifs sur la qualité de l’air. L’évaluation ex post de l’évolution de la qualité de l’air à l’issue de la fermeture des voies sur berges rive droite met en avant ce constat : cette mesure n’a pas eu d’impact positif en termes de qualité de l’air, la pollution a été déplacée (IAU, 2017)22. Ici encore, il nous semble que l’urbanisme et l’aménagement de l’espace ne jouent qu’un rôle relativement restreint, quoique nécessaire, dans la diminution de cette pollution.
23Ces questions d’échelle nous amènent à la seconde forme de réduction simplificatrice que cette pensée urbanistique nous semble opérer vis-à-vis de l’écologie politique, mais aussi des faits : celle qui consiste à ne prendre en compte que quelques fragments de la ville dense et historique. Le phénomène urbain n’est alors appréhendé qu’au prisme de la ville dense et historiquement constituée, désormais labellisée et patrimonialisée. Le reste du territoire n’est alors qu’une sous-ville sans intérêt et complexité particulière amenée au mieux à suivre de façon linéaire le mouvement impulsé au centre dans un horizon temporel plus lointain (Héran, 2017). Dans cette perception singulière du fait urbain, il n’y a nulle référence à la complexité et à la diversité des modes de vies et aux mobilités originales qui caractérisent la ville diffuse, l’entre-ville (Grosjean, 2010 ; Sieverts, 2004). On trouve là une vision fantasmée d’une ville durable libérée des circulations automobiles et faisant la part belle aux modes de déplacements dits durables, comme le vélo, la marche à pied et les transports collectifs. L’image des villes de l’Europe du nord est alors présentée comme un idéal à atteindre. Dans le cas des villes hollandaises, l’image présentée est épurée de toute sa complexité. Au-delà des cartes postales mettant en scène les vélos hollandais, il ne faut pas oublier la densité des infrastructures routières et autoroutières de ce pays qui s’apparente à une région métropolitaine où la dépendance à l’égard de l’automobile est forte et problématique (Jeekel, 2013) et où d’ailleurs les émissions de CO2 imputables aux circulations motorisées sont comparables à celles constatées en France, aux alentours d’une tonne par an et par personne23. Cette forte réduction spatiale du fait urbain tranche avec l’échelle urbaine de référence des promoteurs de l’écologie politique dans les sciences régionales et urbaines des années 1990. Il faut se souvenir qu’Alain Lipietz, il y a plus de vingt ans, n’étudiait pas Paris au prisme des voies sur berges ou de la seule commune de Paris mais bien à l’aune d’un territoire mégapolitain à l’envergure spatiale démesurée (2000). De la même façon, Marc Wiel n’étudiait pas la mobilité urbaine au prisme des centralités denses et historiquement constituées mais bien à l’aune des territoires métropolitains créés par la mobilité facilitée et à partir desquels il était nécessaire de repenser la planification urbaine (1999, 2007). Il nous semble que cette seconde forme de réduction simplificatrice ne permet pas d’évaluer intelligiblement les effets des politiques urbaines qui visent à refouler la voiture de leurs centralités constituées.
24L’identification de ces visions réductionnistes nous invite à proposer des pistes de réflexions pour l’élaboration des politiques urbaines de transports et de déplacements ou d’aménagements de l’espace public qui modifient les conditions de déplacements.
25Premièrement, il s’agit de tirer parti de l’indispensable dialogue entre les évaluations utilitaristes et procédurales dont les méthodes de prise en compte de l’information et de hiérarchisation des mondes possibles diffèrent fortement. À la suite de ce que relevaient Guillaume Hollard et Antoine Vion, il nous semble que ces démarches ne sont pas exclusives l’une de l’autre (2006, p. 117). Le cas étudié ici nous le rappelle, tant l’enquête publique a joué un rôle dans l’expression de l’opposition au projet. Il nous semble que l’imbrication de ces procédures peut être un moyen de qualifier avec précision la diversité des demandes sociales qui s’exprime sur un territoire et de calibrer au mieux l’action publique urbaine. C’est bien là une difficulté à laquelle les politiques urbaines dans le champ des déplacements sont confrontées depuis longtemps : la définition et la hiérarchisation collective des problèmes locaux (Offner, 2003). Est-ce une demande sociale d’amélioration de la qualité du cadre de vie qui s’exprime ? Une demande de diminution des impacts environnementaux de la mobilité ? Une demande de renforcement de l’attractivité résidentielle et touristique ? Pour définir et hiérarchiser les problèmes locaux que posent les déplacements, les évaluations procédurales semblent particulièrement adaptées, comme nous le démontre l’exemple des débats publics relatifs à la ligne à grande vitesse PACA (Hollard et Vion, 2006, p. 116).
26Deuxièmement, il s’agit d’opter pour des échelles spatiales et des indicateurs appropriés selon l’objectif de l’évaluation. Il faut alors nécessairement distinguer amélioration localisée du cadre de vie et amélioration des performances environnementales des déplacements urbains. Potentiellement, ces objectifs peuvent être contradictoires. Pour évaluer dans le temps long les effets environnementaux de la mobilité que génèrent les mutations urbaines, il est nécessaire de suivre, à l’échelle de la région urbaine, des indicateurs relatifs aux kilomètres parcourus et à leur répartition modale. Cela permet d’avoir quelques ordres de grandeur et semble être une première approche pertinente en matière d’évaluation (Offner, 2003 ; Orfeuil, 2008). L’exemple de la piétonisation des voies sur berge nous le rappelle, il ne faut pas négliger le fait que les reports de trafic puissent dépasser, et de loin, les périmètres d’évaluation pris en compte. Finalement, pour évaluer l’amélioration localisée de la qualité du cadre de vie, les indicateurs classiques de répartition modale des déplacements, issus des enquêtes ménages-déplacements ou de l’enquête globale transport pour l’Île-de-France, peuvent être enrichis par un indicateur de pression automobile traduisant utilement les désagréments de l’auto dans la vie quotidienne (Flonneau et Orfeuil, 2016, p. 26). Le choix et la pondération de ces indicateurs supposent néanmoins d’approcher la hiérarchie des problèmes que posent les déplacements au territoire.
Références
27Boiteux M., 1994, Transports. Pour un meilleur choix des investissements, Paris, La Documentation française.
28Boiteux M., 2001, Transports. Choix des investissements et coût des nuisances, Paris, La Documentation française.
29Boulanger A., 2018, « Nouvelles mobilités et mutations de l’espace public parisien », dans Landau B., Diab Y. (dir.), Le nouveau monde de la mobilité, Paris, Presses des Ponts, p. 179-192.
30Bouzouina L., Nicolas J.-P., Vanco F., 2011, « Évolution des émissions de CO2 liées aux mobilités quotidiennes : une stabilité en trompe-l’œil », Recherche transports sécurité, 27/2, p. 128-139.
31Brenac T., Reigner H., Hernandez F., 2013, « Centres-villes aménagés pour les piétons : développement durable ou marketing urbain et tri social ? », Recherche transports sécurité, 29, p. 267-278.
32CE Delft, Infras, Fraunhofer ISI, 2011, External Costs of Transport in Europe: Update Study for 2008, Delft, CE Delft.
33Cerema, 2017, Fermeture du Pont Mathilde à Rouen : impact sur la mobilité au sein de l’agglomération, Bron, Cerema.
34Claux M., 2016, « Réguler le stationnement en ville : les coûts sociaux et environnementaux de l’attractivité urbaine », Flux, 103-104, p. 57-71.
35Crozet Y., 2017, Hyper-mobilité et politiques publiques : changer d’époque ?, Paris, Economica (Anthropos).
36Desjardins X., 2017, Urbanisme et mobilité : de nouvelles pistes pour l’action, Paris, Éditions de la Sorbonne.
37Ducos G., 2014, « Valorisation de la pollution atmosphérique dans le calcul socio-économique », dans Quinet É., L’évaluation socio-économique en période de transition, t. 2, Paris, Commissariat général à la stratégie et à la prospective.
38Dupuy G., 1975, Une technique de planification au service de l’automobile : les modèles de trafic urbain, Paris, ministère de l’Équipement.
39Dupuy G., 1999, La dépendance automobile. Symptômes, analyses, diagnostic, traitement, Paris, Economica (Anthropos).
40Faucheux S., Noël J.-F., 1995, Économie de l’environnement et des ressources naturelles, Paris, Armand Colin.
41Flonneau M., 2010, L’autorefoulement et ses limites, Paris, Descartes & Cie.
42Flonneau M., 2014, « Candide sur les nouvelles berges de la Seine. Un Paris pour Woody Allen ? », Métropolitiques (https://www.metropolitiques.eu/Candide-sur-les-nouvelles-berges.html.
43Flonneau M., 2018, « Pour une histoire récente, équilibrée et réaliste de l’écosystème des mobilités grand-parisien. Et pour un pas de côté face aux “urgences” communicationnelles… », dans Landau B., Diab Y., Le nouveau monde de la mobilité, Paris, Presses des Ponts, p. 41-46.
44Flonneau M., Orfeuil J.-P., 2016, Vive la route ! Vive la République ! Essai impertinent, La Tour-d’Aigues, Aube.
45Gallez C., Kaufmann V., 2009, « Aux racines de la mobilité en sciences sociales : Contribution au cadre d’analyse socio-historique de la mobilité urbaine », dans Flonneau M., Guigueno V. (dir.), De l’histoire des transports à l’histoire de la mobilité ?, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 41-45.
46Goodwin P., Hass-Klau C., Cairns S., 1998, « Evidence on the Effects of Road Capacity Reduction on Traffic Levels », Traffic Engineering and Control, 39, p. 348-354.
47Grosjean B., 2010, Urbanisation sans urbanisme : une histoire de la « ville diffuse », Wavre, Mardaga.
48Héran F., 2017, « À propos du report modal. Les enseignements du cas parisien », Les cahiers scientifiques du transport, 71, p. 99-124.
49Hollard G., Vion A., 2006, « Quelle prise en compte des informations pour quelle hiérarchisation des mondes possibles ? Une typologie des démarches d’évaluation », Cahiers du Cevipof, p. 87-123.
50IAU Île-de-France, 2017, Fermeture des voies sur berges rive droite à Paris. Bilan du suivi et de l’évaluation un an après.
51INFRAS, CE Delft, Fraunhofer ISI, 2008, Handbook on Estimation of External Costs in the Transport Sector: Internalisation Measures and Policies for all External Cost of Transport (IMPACT), Delft, CE Delft.
52Jeekel H., 2013, The Car-Dependent Society: a European Perspective, Farnham, Ashgate.
53Latouche S., 2003, « L’imposture du développement durable ou les habits neufs du développement », Mondes en développement, 31/121, p. 23-30.
54Lipietz A., 2000, « Face à la mégapolisation, la bataille d’Île-de-France », dans Benko G., Lipietz A., La richesse des régions. La nouvelle géographie socio-économique, Paris, Presses universitaires de France, p. 151-167.
55Massot M.-H., Orfeuil J.-P, 2007, « La contrainte énergétique doit-elle réguler la ville ou les véhicules ? Mobilités urbaines et réalisme écologique », Les annales de la recherche urbaine, 103, p. 18-29.
56Morana C. (dir.), 2003, Le droit de mentir, Paris, Mille et une nuits.
57Offner J.-M., 1993, « Les “effets structurants” du transport : mythe politique, mystification scientifique », L’espace géographique, 22/3, p. 233-242.
58Offner J.-M., 2003, Les plans de déplacements urbains, Paris, La Documentation française.
59Offner J.-M., Ollivier-Trigalo M. (dir.), 1987, Les grands projets de transports. Langages de l’évaluation. Discours de la décision, Arcueil, Inrets (Synthèse Inrets).
60Orfeuil J.-P., 2008, Une approche laïque de la mobilité, Paris, Descartes & Cie.
61Prud’homme R., Lee C. W., 1999, « Size, Sprawl, Speed and the Efficiency of Cities », Urban Studies, 36/11, p. 1849-1858.
62Quinet É., 2013, Évaluation socio-économique des investissements publics, Paris, Commissariat général à la stratégie et à la prospective.
63Sieverts T., 2004, Entre-ville. Une lecture de la Zwischenstadt, Marseille, Parenthèses.
64Wiel M., 1999, La transition urbaine ou le passage de la ville pédestre à la ville motorisée, Sprimont, Mardaga.
65Wiel M., 2007, Pour planifier les villes autrement, Paris, L’Harmattan.
Notes de bas de page
1 Anne Hidalgo, septembre 2016, Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 10.
2 C’est le cas à Nice où le maire tient, le 17 avril 2018, les propos suivants dans une émission radiophonique matinale : « Nous avons en chantier un tramway de 11 kilomètres de long qui va faire baisser, à partir du mois de juin prochain et de sa mise en service, de près de 20 % la circulation automobile en ville […] et cela nous permettra de faire baisser de 30 % les émissions de CO2 dans la ville. »
3 Voir le chapitre rédigé par Nicolas Clabaux, Jean-Yves Fournier et Jean-Emmanuel Michel dans cet ouvrage.
4 « L’impact du projet sur la qualité de l’air est évalué de manière trop partielle, puisqu’il est restreint à un secteur situé aux abords du projet : les quais hauts et quelques voiries adjacentes », Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie d’Île-de-France, Avis de l’autorité environnementale sur le projet d’aménagement des berges de Seine rive droite à Paris dans les 1er et 4e arrondissements, 10 mai 2016, p. 9.
5 Rapport d’enquête publique sur le projet d’aménagement des berges de Seine rive droite à Paris, 8 août 2016.
6 Tribunal administratif de Paris, jugements nos 1619463, 1620386, 1620420, 1620619, 1622047 du 21 février 2018, p. 12.
7 « L’étude d’impact s’est bornée à analyser les effets de l’opération sur la qualité de l’air dans une bande de 100 mètres de part et d’autre du projet et elle a ainsi exclu de l’analyse plusieurs axes de report dont cette étude indique pourtant qu’ils connaîtront des augmentations de trafic […] il résulte […] de ce choix […] [que] l’étude d’impact a négligé d’analyser les effets du projet sur la pollution atmosphérique autour des principales voies qui subiraient un report, alors même qu’il était manifeste que ce phénomène de report […] aurait également un impact sur la qualité de l’air dans les zones concernées », Cour administrative d’appel de Paris, jugements nos 18PA01325, 18PA01326 et 18PA01649 du 22 octobre 2018, p. 19.
8 D’une façon générale, pour le projet visé d’une longueur de 3,3 km emprunté quotidiennement par 43 000 véhicules, en prenant en compte une hypothèse d’évaporation du trafic et de report modal de l’ordre de 23 % des flux initiaux et sans prendre en compte les débats relatifs aux effets de la vitesse sur la pollution atmosphérique, on peut considérer qu’à partir du moment où les 77 % de flux restant, tout itinéraire de report confondu, effectuent un détour moyen d’environ 985 mètres, les gains environnementaux de la mesure sont nuls. Ils sont intégralement contrebalancés par l’allongement des circulations reportées.
9 Les méthodes dose-réponse reposent sur une relation de cause à effet où l’intensité de la réponse dépend du niveau de la dose. La qualité de l’environnement y est alors considérée comme un facteur de production. Il s’agit dans un premier temps de fixer la relation dose-réponse, autrement dit, d’estimer le lien entre une pollution et ses effets (dégradations des matériaux, augmentation de la morbidité, de la mortalité…). Ensuite, il s’agit de convertir le dommage physique en un dommage monétaire.
10 Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 16 et mardi 17 juin 2014, p. 33-51 ; Bulletin municipal officiel. Débats, séance des mardi 26, mercredi 27 et jeudi 28 mai 2015, débats relatifs à la délibération 2015 SG 14 d’aménagement des berges de seine, p. 180-204.
11 BMO-débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 11.
12 Anne Hidalgo, septembre 2016, Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 10.
13 Entre les discours tenus sur la période 2014-2015 et ceux qui le seront à partir de l’été 2016, la scène médiatique a été occupée par le rapport sénatorial de juillet 2015 sur les coûts économiques et financiers de la pollution de l’air, le scandale Volkswagen de l’automne 2015 et finalement la tenue à Paris de la COP 21.
14 Tandis qu’il ne faisait que 21 apparitions en juin 2014, 17 apparitions en mai 2015, le terme « pollution » apparaît 84 fois lors des débats au conseil de Paris en septembre 2016.
15 Voir par exemple : Anne Hidalgo, septembre 2016, Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 10 ; Communiqué de presse de la ville de Paris du 22 août 2016.
16 « Reconquérir nos berges n’est pas une opération d’aménagement classique, sortir de la philosophie du tout-voiture hérité des années 1970 n’est pas aisé », Anne Souyris, Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 12, mardi 13 et mercredi 14 décembre 2016, p. 172. Voir aussi la prise de parole de Christophe Girard, Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 26-28.
17 Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 28.
18 Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 26.
19 Bulletin municipal officiel. Débats, séance des lundi 26, mardi 27 et mercredi 28 septembre 2016, p. 26.
20 Arrêté no 2018 P 10661, du 6 mars 2018, portant réglementation de la circulation sur les berges de Seine rive droite à Paris, 1er et 4e arrondissements, Bulletin municipal officiel de la ville de Paris, vendredi 9 mars 2018, p. 996.
21 Calculs de l’auteur à partir de CITEPA – SERRE – format SECTEN (avril 2017) pour les données d’émissions et Flonneau et Orfeuil (2016, p. 31) pour la répartition des circulations automobiles.
22 Si la pollution est déplacée d’une zone très peuplée vers une zone moins peuplée, il peut cependant y avoir des conséquences sur le nombre de personnes touchées par certaines pathologies. Du point de vue utilitariste, le déplacement de la pollution se justifie mais d’un point de vue éthique et juridique, il n’y a pas de justification à augmenter le risque pour certaines personnes – au motif qu’elles sont moins nombreuses – en diminuant le risque pour d’autres plus nombreuses.
23 Source : Agence européenne de l’environnement.
Auteur
Martin Claux, maître de conférences en urbanisme et aménagement, Institut de géoarchitecture, université de Bretagne-Occidentale.
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