Ancien monde, monde nouveau et quête de modèle
Henri Ciriani ou le pouvoir de la figure du maître
p. 201-219
Texte intégral
1Remise en cause de l’autorité et entrée dans l’âge de l’« individualisme de singularité1 », cette forme sociale qui se met en place en exigeant que chacun puisse trouver une voie personnelle : l’entre-deux-mai, de 1968 à 1981, constitue un moment de transition entre l’ancien et le nouveau monde. Au cours de cette période de mutation pendant laquelle se développe d’après l’analyse de Pierre Rosanvallon une « nouvelle culture de l’émancipation2 », se produit un double mouvement à l’origine d’un phénomène paradoxal en ces années d’interrogation sur les rapports de pouvoir : entre demande de changement et besoin d’ordre, des groupements charismatiques prennent forme. Créateurs d’idéaux désirables et figures-modèles, quand ils représentent l’incarnation du projet qu’ils défendent, des leaders mobilisent. Ce qu’observe le sociologue Jean-Louis Violeau, à propos du monde de l’architecture, dans son étude du mouvement de renouvellement des institutions après 1968 : « À bien y regarder, il n’y a finalement jamais eu autant de maîtres que dans ces années-là, anti-autoritaires et anti-mandarinales3. »
2Dans cet entre-deux-mai donc, en architecture en général et dans la sphère pédagogique en particulier, notamment depuis la suppression en 1968 de la section architecture de l’École des beaux-arts et la création des unités pédagogiques (UP), se forment des « “communautés” autour d’enseignants charismatiques et porteurs d’une certaine vision de l’architecture4 ». Henri Ciriani, à l’UP7 Grand Palais de 1969 à 1977 puis à l’UP8 (Paris-Belleville) jusqu’en 2002, est l’une de ces figures autour desquelles des étudiants gravitent [FIG. 1 et 2]. C’est autour de cette personnalité, née en 1936 au Pérou, que s’organise, de fait, un courant, celui dit néomoderne et attaché au modèle de l’intellectuel spécifique au sens où celui-ci serait « transformateur d’espaces ». Paradoxe d’une position et plus largement d’une époque, c’est, à vouloir imaginer « autre chose », un nouvel enseignement empreint du désir de réinvention de ces années qui est mis en place, mais, affichant une direction ferme et la volonté d’une remise en ordre, cette pédagogie est marquée en même temps par un retour à l’autorité. C’est donc un regard sur la transmission que l’enseignement d’Henri Ciriani donne à voir, un regard ouvert aux tensions et révélateur finalement de l’état d’une société.
3Qu’en est-il alors, dans le monde de l’architecture contemporaine, des maîtres et des modèles ? Entre reconnaissance et volonté d’affirmation personnelle, les uns les autres, dans un travail de construction de soi comme architectes, sont confrontés à des tensions internes. En phase avec les valeurs de création qui font valoir l’idéal de singularité5 mais en même temps face à l’impossibilité de se construire sans modèle, l’identification à un autre architecte de fait est revendiquée non pas au niveau de l’œuvre – qui se doit d’être originale – mais sur les plans de l’existence et du savoir. Au cœur de cette réalité contemporaine, Henri Ciriani, ce maître dans la mesure où il transmet des connaissances, devient également ce modèle de vie qui incarne un ordre de valeurs. Admiré notamment pour son éthique, il devient bon à imiter et un travail d’identification s’opère. Dans ce rapport au maître en régime de singularité, ce qui est problématique dès lors c’est l’identification à un modèle d’architecture : quel sens y a-t-il à s’attacher à un système de références clos sur lui-même au moment où disparaissent les doctrines unifiées ? Dans cette situation postmoderne d’éclatement des normes, entre réduction du champ d’exploration et personnalisation de la pédagogie faisant valoir les qualités spécifiques de créateur du professeur, l’enseignement d’Henri Ciriani et du groupe UNO qu’il a fondé en 1978, focalisé sur un modèle d’architecture et la figure du maître, défend finalement un mode de transmission dont ils sont les derniers représentants.
Inclination à la croyance
Une vision de la profession
4La décennie 1970 – on le sait – est celle notamment de l’émergence en France de la figure de l’architecte-intellectuel6. Ce phénomène, qui prend forme dans un contexte de crise identitaire depuis les années 1960, se produit en réaction non seulement à un état du monde en plein tourment et aux excès de l’après-68, mais aussi à la figure de l’architecte d’affaires et à l’anti-intellectualisme militant de l’ancienne École des beaux-arts. Et l’alternative envisagée pour qui veut acquérir le statut d’intellectuel – le fait est également connu – passe pendant cette période d’interrogation sur soi par l’élaboration, nourrie notamment par un mouvement d’italophilie, d’une pensée consacrée spécifiquement à l’architecture. Une « expérience à fond », au sens de Michel Foucault, se produit finalement en ceux qui ont le projet de rénover la tradition à l’aune d’idéaux progressistes pendant ces années 1968. Comme le philosophe qui, à la même période, se dit « privé de l’évidence qui le liait à l’écriture7 » à cause de la nouvelle conjoncture qui lui fait se demander, dans un désarroi existentiel, si « la bourgeoisie, la société capitaliste ont totalement dépossédé l’écriture de ces actions8 », les architectes voient leur raison d’être – l’acte de projeter et celui de construire – remise en question par le mouvement social de l’époque. Mais plutôt que d’abandonner le projet et la construction, une partie de la génération 68 réaffirme, après une période de doute et de profonde auto-analyse, qu’elle ne peut se détacher de ce qui jusque-là donnait un sens à la pratique de la discipline. Ces architectes – Henri Ciriani en fait partie – doivent alors réinventer les motivations, la signification, l’exigence et la nécessité de leur conception de l’architecture.
5Henri Ciriani, au regard de ses prises de position sur le statut et le rôle de l’architecte restées inchangées de ses débuts à ses derniers moments dans l’enseignement en France, est l’une des figures emblématiques de l’architecte-intellectuel spécifique – lequel, par sa maîtrise d’un domaine de savoir en particulier, se trouve engagé au cœur de la société. Pour celui qui veut être un maître et une figure-modèle en incarnant ainsi une vision de la profession, contre la perte de spécificité de la discipline, ce domaine de savoir serait la maîtrise de la conception. Être architecte, en tant donc que professionnel engagé, ce serait être compétent avant d’être original, éclairé au lieu d’être copiste. Vouloir redonner au projet toute sa noblesse et l’associer à la poursuite d’un idéal de transformation sociale, c’est défendre finalement une vision de la figure de l’architecte attachée au modèle construit depuis la Renaissance. Comme l’explique Olivier Chadoin, à cette époque, l’architecture étant devenue un art libéral, s’était établie « véritablement la différenciation d’une activité comme secteur particulier du champ artistique » et s’était mis en place « la représentation charismatique de l’architecte, celle de “l’homme du dessein et du dessin”, la figure du “chef d’orchestre”, placé à la tête du processus de construction, ordonnant le travail des corporations depuis le point de vue de la perspective et du plan »9.
6Adopter cette attitude, alors, c’est vouloir faire la démonstration, assez paradoxale eu égard au déploiement pendant les années 1970 de pratiques participatives et à la mise en place des Ateliers publics d’architecture et d’urbanisme (APAU), qu’un fort ancrage à gauche pouvait être compatible avec une défense de la figure traditionnelle du concepteur et plus largement de celle de l’architecte comme professionnel libéral. Dès le milieu de la décennie 1970 – c’est un fait –, cette manière de travailler n’est plus rejetée : « Les premiers symptômes d’épuisement apparaissent chez les enseignants qui s’étaient engagés jusqu’ici dans la formation au travail collectif, dans la mise au point de contre-projets émanant de groupes d’étudiants motivés et militants, dans les diplômes de groupes… Nombre d’entre eux ont ouvert leur agence ou vont l’ouvrir pour s’investir dans une pratique libérale qu’ils avaient jusqu’alors rejetée10. » Il est bien question de défendre une vision de cette pratique libérale à la condition d’agir selon des valeurs fondamentales. L’acte projectuel et celui – rejeté avant d’être réhabilité au tournant des années 1980 – de la construction auraient toujours un sens, mais seulement s’ils sont effectués dans l’ascèse, loin donc de ce que pourrait évoquer un « esprit Beaux-Arts » associé désormais à « l’absence de réflexion, l’afflux de commandes et un système de production effroyablement productiviste11 ». Chez Henri Ciriani, cette approche rigoureuse – de la maîtrise du domaine du savoir de l’architecte au maintien de valeurs politiques et sociales – est particulièrement revendiquée. C’est ce même discours, conjuguant compétences et utilité sociale, qui revient tout au long des années.
Espoir
7Grandeur, largesse, création sans recherche pour autant d’originalité : Henri Ciriani transmet et incarne une vision du rôle de l’architecte partiellement en phase avec la réalité contemporaine. Le métier, comme l’a montré Raymonde Moulin dès 1973, connaît alors une crise structurelle12. Depuis l’entre-deux-mai – à cause, comme le résume Olivier Chadoin, « de la division du travail accrue, de la diversification des modes d’exercice et de l’élargissement de son recrutement social13 » –, il y a une difficulté à saisir les contours de ce groupe professionnel. « Profession menacée » repliée sur une expertise esthétique loin d’être clairement identifiable selon Florent Champy14, ou « indétermination vertueuse » d’après Olivier Chadoin, qui, cherchant à « abandonner la volonté de caractériser la “compétence” ou l’“identité professionnelle” », fait la démonstration que « le titre d’architecte fonctionne avant tout comme une “croyance” ou un “crédit” de compétence permettant des repositionnements et des adaptations constantes »15.
8Et là se trouve, finalement, la principale force de l’enseignement d’Henri Ciriani : plutôt que de se soucier d’imaginer et d’incarner une vision en accord avec la réalité du monde de la construction, il s’agit davantage de transmettre et de donner à voir une représentation de la profession idéalisée. Cette pédagogie, en se référant à une figure positive de l’architecte qui – fidèle à sa mission d’origine – inventerait le lieu d’une possible utopie sociale, a la capacité d’entretenir la croyance, nécessaire pour débuter et par la suite quand il s’agit d’exercer, en la valeur du titre d’architecte. Ce discours ouvre de nouvelles perspectives pour ceux – étudiants – en quête d’un modèle à la hauteur de l’idée qu’ils se font du statut d’architecte et en accord avec les symboles et les valeurs auxquels ils l’associent, notamment au tournant des années 1970 dans un contexte de désarroi général de l’architecture contemporaine face à la crise d’identité de la profession et à l’absence de système de hiérarchie alternatif à celui – supprimé – d’avant 196816. Ce dont témoigne notamment Bernard Desmoulin, diplômé en 1979 : « Il y avait une sorte de désarroi dans l’enseignement et Ciriani apparaissait comme quelqu’un qui avait des principes et qui, manifestement, voulait reconstruire quelque chose17. »
9Ces propos rappellent la proposition de Max Weber sur la filiation symbolique, qui, d’après lui, serait « psychologiquement un abandon tout à fait personnel, plein de foi, né ou bien de l’enthousiasme ou bien de la nécessité et de l’espoir18 ». Henri Ciriani, d’ailleurs, assume qu’il entend faire naître une telle croyance chez ses étudiants, lorsqu’il confie près de vingt ans après avoir commencé à enseigner en France que « c’est dans des périodes d’incertitude comme la nôtre que les élèves doivent être entourés de gens qui transmettent l’énergie de l’espoir19 ». Pour les aspirants architectes, il se veut, et finalement devient, un maître à penser et à vivre. À travers les valeurs qu’il incarne et auxquels s’identifient ses élèves, Henri Ciriani présente l’image prestigieuse du professionnel qu’ils voudraient être. Situation assez ordinaire finalement d’après Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron : « Un groupe défini par l’aspiration à la culture favorise naturellement l’adhésion aux valeurs culturelles et à la valeur de ceux qui les transmettent ou qui les incarnent20. » Il y a adhésion à des principes, et cette adhésion est un passage obligé pour s’engager dans un monde social. Processus d’adaptation qui prend la forme, alors, d’une conversion.
Position de chef charismatique
Identification
10Depuis qu’il dirige l’atelier de l’UP7 en 1971, Henri Ciriani est le transmetteur de valeurs, de discipline et de comportements que les étudiants, pour ce qu’il est et ce qu’il incarne, approuvent et entourent. La « domination charismatique » mais aussi la « reconnaissance libre » de cette domination, pour reprendre les notions de Weber, sont deux phénomènes sans lesquels la filiation académique prendrait difficilement forme. Cette manière de procéder et de transmettre est assez commune dans ce champ spécifique qu’est l’architecture : les ateliers des Beaux-Arts notamment, « dans toutes leurs splendeurs au xixe siècle, dans leur pérennité au début du xxe siècle, dans leur décadence (si cela a un sens) après la Seconde Guerre mondiale », sont « à la fois des structures élémentaires de la paternité et de la filiation symbolique »21. Et Henri Ciriani ne fait pas table rase de ces habitudes. Avec lui, il y a bien constitution d’une « paternité symbolique22 ». D’autant que, pour les relations sociales, plus il y a abolition des normes institutionnalisées, plus est élevé le degré de charismatisation. Ainsi, au tournant des années 1970, moment d’une crise généralisée de la croyance en l’ancien système de domination et quand prend forme un mouvement de réévaluation de l’identité d’architecte en même temps que s’amorce un travail de reconstruction de l’enseignement dans les UP, la figure du maître – cette figure-modèle donc – peut de manière assez paradoxale être réhabilitée dans un contexte anti-hiérarchique.
11Recherche de soi et identification à un « père symbolique » dans un cadre personnalisé, la pédagogie étant associée à la figure de l’enseignant : l’efficacité persuasive d’Henri Ciriani mobilise des forces subjectives. Ce que révèle notamment le témoignage de Jean-Paul Robert, diplômé en 1979 : « Le bénéfice, dont nous étions conscients à voir nos camarades pris dans d’autres études, était que nous ne séparions rien de nos vies et de notre travail. […] Nous étions entrés en architecture, heureux de l’unité ontologique qu’elle nous donnait. Ciriani en était évidemment le modèle, montrant que le travail n’était pas une astreinte, mais un service 23. » Auprès de l’enseignant, à l’écouter et le voir faire, il y a intériorisation des traits distinctifs d’un habitus professionnel et d’un comportement de vie. C’est un arbitraire, impactant durablement l’imaginaire, qui est élaboré et transmis : la figure de l’architecte, cet intellectuel spécifique, ce créateur refusant l’impératif de singularité et reconnu comme une autorité. Et cette transmission passe par un jeu de séduction faisant appel à la fois à des outils rhétoriques et graphiques.
12C’est le cas avec le dessin notamment, le maître possédant une virtuosité dans ce domaine24. Il y a réhabilitation finalement, avec cet enseignement, d’attributs du corps, mais réhabilitation critique qui veut donner une dimension intellectuelle à la figure de l’architecte-artiste. Dès le milieu des années 1970, en pleine période d’« architecture de papier25 », les élèves de l’atelier de l’UP7 ont une pratique graphique intense et vouent une admiration sans borne à l’acte de représenter [FIG. 3 à 5]. D’autant que les tenants de cet enseignement revendiquent la capacité de répondre aux problèmes de la société par la maîtrise du processus projectuel. La capacité de synthèse et d’exécution de l’enseignement d’Henri Ciriani impressionne, comme l’explique Pierre Bolze, diplômé en 1981 : « Ses corrections étaient fascinantes, il faut l’avouer. On le voyait dessiner avec son feutre Pilot. […] c’étaient toujours des schémas, jamais il ne dessinait de bâtiment. C’était assez théorique : il s’agissait de figures, de formes26. » Au point de faire des émules, dans la mesure où des étudiants sont tentés d’imiter son coup de crayon et finalement de s’adjuger les insignes du père spirituel. Pierre Edeikins, diplômé en 1976, rapporte à propos de l’un d’entre eux : « Dès que Ciriani griffonnait quelque chose, il subtilisait le morceau de papier27. » Et Pierre Bolze d’expliquer lui aussi : « Il y avait une telle émulation autour de lui que tu t’emparais nécessairement de sa façon de dessiner28. »
13Autant que par le dessin, c’est par sa manière d’être que le pouvoir d’Henri Ciriani trouve sa puissance et sa consistance. De la parole à l’attitude, alors, c’est une mise en scène de soi. De fait, il y a un « corps éternel », pour reprendre l’expression de l’historien Ernst Kantorowicz29 ou de l’écrivain Pierre Michon30 : celui immatériel et inaltérable qui a à voir avec le statut d’enseignant, contrairement à l’autre, biologique et vulnérable. Notamment, la cravate et la veste – et non plus le « nœud pap’ » –, pour celui qui veut « [représenter] l’enseignant31 », seraient les insignes du savoir. Mais aussi, « le regard chaud, la voix accentuée, la gaieté presque forcée, comme au bord du rire32 ». Si à l’UP7 le jeune maître pouvait faire penser à Serge Gainsbourg33, à l’UP8 il rappelle plutôt Leonard Cohen ou Alain Bashung34. « Mémoire d’accent et de poussière de craies35 », pour citer Alain Dervieux, ancien étudiant et enseignant d’UNO.
14Quand Henri Ciriani enseigne, il semble monter sur « scène ». Et bien qu’UNO soit un groupe d’enseignants, il y a personnalisation de la pédagogie, dans les années 1990 surtout. De manière symptomatique, d’ailleurs, quinze ans après la création du collectif, il est désormais question à Paris-Belleville du « groupe “Ciriani”36 ». Ce que confirme Alain Dervieux : « Vint ensuite la décennie des années 90, dont on peut considérer qu’elle était plus “cirianesque” que la précédente37. » D’un lieu d’enseignement à l’autre, les aphorismes et les phrases chocs d’Henri Ciriani, au lieu de références ou de citations, continuent de surprendre et de galvaniser les esprits : « Nous n’aimons pas ceux qui font du ski » ; « Reflet : c’est le double, sans être le même » ; « Le poteau parle » ; « La lumière naturelle, c’est mieux qu’Edison » ; « L’atypique et le typique ne se mélangent pas. Comme l’eau et l’huile, comme la droite et la gauche avant Mitterrand »38. Pour Jean Bocabeille, diplômé en 1993 : « Il restait très énigmatique : on ne savait pas trop ce qu’il avait dit, on passait une semaine à décrypter pour essayer de comprendre. Au final, cela importait peu parce qu’on réfléchissait. C’était une méthode un peu cathartique. C’était une phrase qu’il disait avec un côté gourou. Il jouait aussi de son accent, de sa façon de manier le français en faisant de fausses fautes39. »
15Henri Ciriani, par son discours et son attitude à l’origine de plus d’une conversion, induit des croyances communes – une doxa – auxquelles restent attachés ceux, pragmatiques ou fidèles invétérés à l’idéal transmis, qui l’ont eu comme enseignant. La figure de l’architecte que le maître défend et incarne ne laisse pas insensible pendant les études, cette période particulière d’adaptation et de conformité à un modèle donnant du sens à l’engagement dans le monde de l’architecture. Comme l’a remarqué Jean-Louis Violeau quand il revient en 2012 sur le parcours de dix agences issues de Paris-Belleville, Henri Ciriani, « par son indéniable charisme », a finalement contribué à populariser « cette posture de l’architecte, celui que l’on voit évoluer dans le roman d’Ayn Rand The Fountainhead, dont King Vidor tirera le film Le rebelle en 1949 » : l’architecte, de ce point de vue, est « un homme libre et un esprit indépendant, toujours en lutte face aux taxes, parasites, normes et contraintes diverses qui cherchent sans cesse à endiguer son génie créateur »40.
16Éloquence, démonstration par le dessin, mais aussi mystère et certitude, sans oublier de rappeler à l’étudiant qu’il fait partie d’un cénacle privilégié : en resserrant les liens entre étonnement et connaissance, et finalement en laissant des traces dans les esprits de ceux qui sont dans l’attente, Henri Ciriani joue un rôle de transformation. Avec cet enseignant, qui donne le sentiment à chacun qu’il peut fonder en lui-même le sens de son action tout en faisant valoir par ailleurs l’accomplissement d’une mission d’intérêt général, c’est un « individualisme d’universalité41 » qui est mis en avant. C’est-à-dire un individualisme constructeur d’un monde commun, au lieu de celui, qui prend forme dans cette ère postmoderne, de singularité : « être l’expression singulière de sa propre vie42 ». La période de conversion auprès d’Henri Ciriani obéit donc au double principe d’élection et d’engagement social : c’est cette étiquette qui est apposée et imposée aux étudiants et, dès lors, c’est ce qui les distingue et les oblige. De l’UP7 à Paris-Belleville, les uns et les autres apprennent à se conformer à ce modèle attendu et incarné par l’enseignant.
Un modèle de transmission à l’épreuve du temps
17Mais ces valeurs et le modèle d’enseignement à l’origine de leur transmission semblent diviser dès la fin des années 1980. Ce que résume plus largement le chercheur Jean-Pierre Martinon, à propos de la formation d’architecte au xixe siècle et dans la première partie du xxe siècle : « Les bagages multiples engrangés durant la période de chrysalide et d’inculcation resserviraient, comme acide ou tisane, durant toute la vie professionnelle de l’architecte43. » Chez UNO, entre la figure du « self-made man » qui se serait « forgé sa propre doctrine », pour reprendre l’analyse générale de Jean-Louis Violeau sur le rapport à l’enseignement, et les partisans du « legs respectueux » ou de « l’émancipation consciente »44, les avis sont partagés. Si certains élèves continuent d’être en quête d’un ou de plusieurs maîtres à penser, d’autres cependant, bien qu’ils restent souvent sensibles au prestige des exemples, remettent en question cette manière de transmettre centrée sur la personnalité de l’enseignant. Pour ceux-là, la figure du maître, pour des raisons à la fois contextuelles et spécifiques à l’atelier, n’est plus toujours suffisante pour faire adhérer aux valeurs d’Henri Ciriani-UNO. Notamment, du fait de la pratique collective de l’enseignement et d’effectifs exponentiels, il se met en place une certaine distance dans les relations, avec parfois pour certains cette impression d’une position de surplomb prise par le professeur.
18Mais aussi, comme l’ont démontré Juliette Pommier et Jean-Louis Violeau dans leur analyse sur les lauréats du concours Europan de 1987 à 2007, c’est une affaire de « génération ». Absence d’« aîné reconnaissable et admis comme tel 45 » et filiation à l’architecture « moderne » « nuancée, filtrée par la critique “post-moderne” et ses suites46 » : pour cette « génération intermédiaire […] amenée à gérer les contradictions de double héritage “soixante-huitard” et “quatre-vingt-unard”47 », « le “maître” demeure un médium plutôt qu’un professeur et la recherche de la singularité créatrice demeure parmi ces architectes une priorité collective (paradoxale)48 ». Les certitudes d’Henri Ciriani et des enseignants d’UNO sur la modernité et ce qu’elle sous-tend – « l’énergie de la conquête et le goût de la raison49 » en plus des « notions d’individu et de valeurs universelles50 » –, n’enthousiasment plus autant ceux, jeunes diplômés ou à peine sortis des études, qui sont face à « un ordre instable et transitoire, tissé de rapports avec lesquels l’architecte contemporain doit pactiser autant qu’imposer51 ». Ils refusent alors de se limiter à une grille de lecture unique du monde et de l’architecture.
19En contrepoint de cette attitude, entre acceptation et rébellion, Pascale Richter, diplômée en 1992, confie : « Je n’ai jamais eu le sentiment, avec UNO, qu’on était interdit d’aller voir autre chose. Pas du tout. Pour moi, c’était un espace de liberté. » Avant de préciser : « Il est évident que les premières années – le “30 × 30” et les “quatre logements” – avaient beaucoup à voir avec l’œuvre de Le Corbusier. Mais très vite, ça devenait autre chose. »52 Si les attitudes diffèrent sur la question de la filiation et de l’attachement à la figure du maître, il y a malgré tout une commune interrogation envers l’architecture néocorbuséenne liée à cet enseignement. Florence Bousquet, d’ailleurs, dans son mémoire de fin d’étude, explique à propos des dernières promotions d’UNO : « Pour eux, il faut se servir de références sans chercher à les perpétuer et éviter de s’enfermer dans un type d’architecture particulier53. » Phénomène révélateur, parmi les anciens étudiants de l’UP7 puis de l’UP8, ceux que les élèves des années 1990 préfèrent, ce sont les architectes dont la filiation sur le plan de l’écriture ne va pas de soi. Ou, autrement dit, ceux qui ont manifesté une volonté de rupture ou de reformulation. Pour Pascale Richter, Michel Bourdeau – cet « électron libre » ou ce « Schindler d’UNO » – « était l’un des anciens étudiants [qu’elle aimait] le plus54 ». Jean Bocabeille, après avoir évoqué Michel Bourdeau également – « un enfant terrible du mouvement UNO » –, cite Bernard Desmoulin qui serait « rapidement sorti du moule55 ». Tandis que pour Nicolas Ziesel, diplômé en 1994, la rencontre avec Philippe Madec notamment a été un « point de bascule56 ». Mais plus encore, dans cette perspective d’ouverture et par-delà les trajectoires des diplômés d’Henri Ciriani-UNO, ils cherchent ailleurs et vont vers d’autres mouvances : les partisans de l’high-tech ou les conceptuels… Et Jean Bocabeille notamment de citer Rem Koohlaas, Jean Nouvel, Francis Soler et Robert Venturi, avant de poursuivre :
Surtout, il y avait les internationaux. On regardait aux Pays-Bas, au Japon, en Espagne. On s’était abonné à El Croquis. On avait besoin de regarder ailleurs. D’un seul coup, on découvrait que les Espagnols travaillaient, eux, avec de la matière. Du bois, de la pierre, du béton qui pouvait être de différente nature. Et on achetait Detail, qui couvrait l’architecture allemande, suisse. Je me demandais comment les bâtiments qui y étaient présentés pouvaient être construits. J’étais allé en Finlande découvrir [Alvar] Aalto, je dessinais ses bâtiments, je rapportais des détails. Je découvrais un monde en regardant d’autres architectures, d’autres architectes57.
Incarnation d’un monde désirable, symbole d’un monde impossible
20Henri Ciriani, partisan d’un mode de transmission et d’une vision univoque du monde qui ne pouvaient pas tenir ? Dans cet enseignement, progressivement, les références extérieures au monde d’UNO ont disparu, au cours des premières années du cursus du moins. Et parmi les figures-modèles, dominent Le Corbusier mais aussi Henri Ciriani lui-même, ce maître incarnant l’idéal et les valeurs que défend cet enseignement. Incarner pour convertir, donc, à une éthique et un savoir – et dans une certaine mesure, au regard des références qui sont choisies, à un modèle d’architecture. L’admiration apparaît ainsi comme le moteur de ce mode de transmission maître-élève. Mais quand il y a désillusion à cause notamment d’un trop grand écart entre le modèle défendu et la réalité contemporaine, si des valeurs générales sont gardées et l’idéal réaménagé, les incarnations se retrouvent démystifiées, voire parfois reniées.
21C’est un autre monde, de fait, qui prend forme après l’entre-deux-mai. Comme l’analyse Jean-Louis Violeau, « le tournant 1981-1983 se dessine comme un temps de suspens, au moment de changer d’époque, au moment où devant l’effritement fatal des mythes, les intellectuels – et donc, les architectes – doivent redéfinir l’ambition et les ressorts de leurs interventions58 ». Et l’on sait qu’une décennie après, une mutation s’annonce avec l’apparition de la figure hybride d’artiste des affaires59. Désormais, « au rôle historique de chef d’orchestre se substitue une identité plus fragile et plus labile60 ». Attachement à la valeur du titre d’architecte et à l’engagement social de la profession, mais en même temps nécessité de s’adapter et volonté d’élargissement du champ d’horizon : ce qui tombe finalement avec le déclin d’une partie d’un projet empreint d’idéal, c’est l’attachement à des figures-modèles – le maître, notamment – représentant un certain système de valeurs. Incarnations d’un monde désirable quand s’opère une demande généralisée de figures charismatiques au tournant de la décennie 1970, elles deviennent alors par la suite les symboles d’un monde impossible.
Notes de bas de page
1 Pierre Rosanvallon, « Une histoire longue de la modernité et de l’émancipation », Collège de France, leçon du 11 janvier 2017 (https://www.college-de-france.fr/site/pierre-rosanvallon/course-2017-01-11-10h00.htm, consulté le 12 février 2017).
2 Ibid.
3 Jean-Louis Violeau, Les architectes et Mai 68, Paris, Éditions Recherches, 2005, p. 116.
4 Ibid., p. 342.
5 Nathalie Heinich, L’élite artiste. Excellence et singularité en régime démocratique, Paris, Gallimard, 2018 [2005].
6 Heinich, L’élite artiste, op. cit. ; également Jean-Louis Cohen, La coupure entre architectes et intellectuels, ou les enseignements de l’italophilie, Bruxelles, Mardaga, 2015.
7 François Ewald et Bernard E. Harcourt, « Situation du cours », dans Michel Foucault, Théories et institutions pénales. Cours au Collège de France, 1971-1972, Paris, EHESS/Gallimard/Seuil, 2015, p. 253.
8 Cité dans ibid., p. 252.
9 Olivier Chadoin, Être architecte : les vertus de l’indétermination. De la sociologie d’une profession à la sociologie du travail professionnel, Limoges, Presses universitaires de Limoges, 2013, p. 21.
10 Violeau, Les architectes et Mai 68, op. cit., p. 286.
11 Ibid., p. 91.
12 Raymonde Moulin et al., Les architectes. Métamorphose d’une profession libérale, Paris, Calmann-Lévy, 1973.
13 Chadoin, Être architecte…, op. cit., p. 23.
14 Florent Champy, Sociologie de l’architecture, Paris, La Découverte, 2001, p. 108.
15 Chadoin, Être architecte…, op. cit., p. 28.
16 Le système académique de l’avant-68 était à l’origine d’une oligarchie dont le prestige tenait aux titres et aux postes – avec, en haut de la hiérarchie, le corps des Architectes des bâtiments civils et des palais nationaux, largement composé de lauréats du grand prix de Rome. Au cours du bouleversement profond des légitimités qui s’est opéré dans les années suivant immédiatement 1968, ces positions ont été remises en cause et un système de concours s’est mis progressivement en place, destiné à ouvrir plus largement l’accès des praticiens à la commande publique. Voir, notamment, Véronique Biau, La consécration en architecture. L’émergence de nouvelles élites architecturales en France, thèse de doctorat, sous la direction de Monique de Saint Martin, Paris, École des hautes études en sciences sociales, 2000.
17 Propos de Bernard Desmoulin, recueillis par Françoise Arnold et Daniel Cling, dans Transmettre en architecture. De l’héritage de Le Corbusier à l’enseignement de Henri Ciriani, Paris, Le Moniteur, 2002, p. 57.
18 Cité dans Jean-Pierre Martinon, « De l’atelier à la signature », dans Gilles Maury et Corinne Tiry (dir.), Filiation(s), Villeneuve d’Ascq, Éditions de l’École d’architecture de Lille (Cahiers thématiques, 4), 2004.
19 « It is in periods of uncertainty like ours that students need to be surrounded by people who convey the energy of hope. » Courrier d’Henri Ciriani à H. M. Morris, responsable des services du personnel à la Polytechnic of Central London, 24 septembre 1987. Archives personnelles d’Henri Ciriani.
20 Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Les héritiers, Paris, Minuit, 1964, p. 62.
21 Martinon, « De l’atelier à la signature », art. cité, p. 79.
22 Ibid.
23 Email de Jean-Paul Robert, 2 juillet 2016.
24 Voir à ce propos, pour une autre époque, le texte d’Estelle Thibault dans le présent volume, p. 133.
25 Jean-Louis Violeau, Les architectes et Mai 81, Paris, Éditions Recherches, 2011, p. 27.
26 Entretien avec Pierre Bolze, 10 juillet 2019.
27 Entretien avec Pierre Edeikins, 11 janvier 2018.
28 Entretien avec Pierre Bolze, 10 juillet 2019.
29 Ernst Kantorowicz, Les deux corps du roi, Paris, Gallimard, 1989.
30 Pierre Michon, Corps du roi, Lagrasse, Verdier, 2002.
31 Entretien avec Henri Ciriani, 17 mai 2018.
32 Email de Jean-Paul Robert, 2 juillet 2016.
33 « À vrai dire, Ciriani évoquait irrésistiblement Gainsbourg. Même laideur séduisante, mêmes gestes avec la cigarette, tenue entre index et majeur déployés en V, paume tournée vers le visage, au bout de longues et fines mains au bout de longs et maigres bras collés au corps. Vêtements étriqués, épaules soulignées, patte de pantalon légèrement éléph, légère excentricité dans le choix des couleurs voire des motifs de tissu qui soulignaient le côté rastaquouère du personnage… Nous n’étions coquets en rien : Ciriani l’était. » Ibid.
34 « L’enseignement d’Henri Ciriani est passé cela est indéniable par la force de son parlé oral parfait, voix musicale, mots ralentis, entre Leonard Cohen auquel on trouvait qu’il ressemblait physiquement et Alain Bashung et un accent resté présent et puissant les années passant. » Emmanuel Delabranche, « Syntaxe », 31 mars 2019 (http://àpeineperdue.fr/spip.php?article965, consulté le 2 mai 2019).
35 Alain Dervieux, « Mémoire d’accent et de poussière de craies : archiver la transmission de l’enseignement du projet d’Henri Ciriani », Colonnes, 34, mai 2018, p. 63-66.
36 Compte-rendu d’une réunion des enseignants de Paris-Belleville, 20 octobre 1993, Archives nationales (AN), 20100187/30.
37 Propos d’Alain Dervieux, recueillis par Olivier Namias, « “Travailler la dimension de l’imaginaire” », dans Olivier Namias et al., 10 ans après 10 ans déjà !, Paris, Éditions Recherches, 2012, p. 72-73.
38 Cité par Emmanuel Delabranche à l’occasion de la table-ronde « Le projet selon Henri Ciriani. Recherche, influences, héritages », Paris, École nationale supérieure d’architecture de Paris-Val de Seine, 25 avril 2018.
39 Entretien avec Jean Bocabeille, 27 avril 2018.
40 Propos de Jean-Louis Violeau, recueillis par Olivier Namias, « “Pas de génération sans événement fondateur” », dans Namias et al., 10 ans après…, op. cit., p. 109.
41 Rosanvallon, « Une histoire longue… », art. cité.
42 Ibid.
43 Martinon, « De l’atelier à la signature », art. cité, p. 83.
44 Propos de Jean-Louis Violeau, recueillis par Namias, « “Pas de génération sans événement fondateur” », art. cité, p. 109.
45 Juliette Pommier et Jean-Louis Violeau, Notre histoire. Europan à 20 ans, Paris, Archibooks, 2007, p. 46.
46 Ibid., p. 57.
47 Ibid., p. 43.
48 Ibid., p. 88.
49 Ibid., p. 63.
50 Ibid., p. 95.
51 Ibid., p. 60.
52 Entretien avec Pascale Richter, 9 octobre 2019.
53 Florence Bousquet, Que sont devenus les modernes ? La modernité entre continuité, rejet et assimilation de 1980 à aujourd’hui, mémoire de fin d’étude, sous la direction de Jean-Louis Violeau, Paris, École nationale supérieure d’architecture Paris-Malaquais, 2016, p. 41.
54 Entretien avec Pascale Richter, 9 octobre 2019.
55 Entretien avec Jean Bocabeille, 27 avril 2018.
56 Entretien avec Nicolas Ziesel, 18 octobre 2019.
57 Entretien avec Jean Bocabeille, 27 avril 2018.
58 Jean-Louis Violeau, Prince Jean II. Le côté obscur, Paris, Éditions B2, 2014, p. 32.
59 Margaux Darrieus, Architecture et communication. Construire les valeurs, des auteurs et de leurs œuvres, au xxie siècle, thèse de doctorat, sous la direction de Jean-Louis Violeau, Université Paris-Est, 2019.
60 Chadoin, Être architecte…, op. cit.
Auteur
Alison Gorel-Le Pennec est doctorante en histoire de l’architecture à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Sa thèse, qui porte sur l’enseignement d’Henri Ciriani en France à l’UP7 et l’UP8 (Paris-Belleville), s’intitule : Les « modernes », pour une nouvelle élite de l’architecture. Henri Ciriani, le maître et les siens. En lien avec son sujet de doctorat, elle a récemment publié aux éditions B2 Les dessous du Grand Palais (préface de Jean-Philippe Garric et souvenir d’Yves Lion). Elle a également contribué à l’ouvrage dirigé par Caroline Maniaque, Les années 68 et la formation des architectes (Point de vues et Architecture territoire environnement, 2018) avec l’article « Henri Ciriani avant UNO : les années UP7 Grand Palais (1969-1977) ».
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