Chapitre 7. La géographie des savoirs
p. 115-129
Note de l’éditeur
Version remaniée du chapitre « La géographie des savoirs après Foucault », dans Jean-François Bert, Jérôme Lamy (dir.), Michel Foucault, un héritage critique, Paris, CNRS Éditions, 2014, p. 219-235. Une version différente de ce texte est parue sous le titre « Les savoirs situés : les usages des concepts foucaldiens dans les Science and Technology Studies », dans Pascal Hintermeyer (dir.), Foucault post mortem en Europe, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2015, p. 83-96.
Texte intégral
1La localisation des savoirs, l’implantation des lieux de sciences et la distribution géographique des manières de connaître travaillent en profondeur, depuis une vingtaine d’années, la géographie, l’histoire, la sociologie des sciences, ensemble de domaines d’études que l’on rassemble sous le syntagme science and technology studies (STS)1. Ce qu’il est désormais convenu d’appeler le « tournant spatial » (spatial turn) a contribué au renouvellement des études sur les sciences en faisant de la composante géographique des savoirs un point nodal des problématiques2. Dans ce grand remuement épistémologique, les travaux de Michel Foucault sur l’espace et la géographie (lato sensu) ont été fréquemment mobilisés. Le philosophe reconnaissait lui-même ses « obsessions spatiales3 », symptômes de son intérêt, plus profond, pour « les rapports qu’il peut y avoir entre pouvoir et savoir. Dès lors qu’on peut analyser le savoir en termes de région, de domaine, d’implantation, de déplacement, de transfert, on peut saisir le processus par lequel le savoir fonctionne comme un pouvoir en en reconduisant les effets ». L’œuvre de Foucault est tramée par ce repérage incessant des lieux d’articulation du savoir/pouvoir : où la folie est-elle cantonnée4 ? Dans quels espaces les corps sont-ils (re)dressés5 ? Comment l’architecture organise-t-elle la coercition6 ? comment fonctionnent les hétérotopies, ces « espaces autres » qui réfléchissent et recombinent les composantes structurantes de la société7 ? Les géographes, les premiers, se sont intéressés à ces propositions théoriques et les ont mises à contribution pour en tester l’efficace et la robustesse8. Edward Soja soulignait que la spatialisation du pouvoir mise en exergue par Foucault ne se départissait pas d’une hégémonie historiciste9. Christopher Philo, quant à lui, envisageait la notion « d’espace de dispersion » comme une possibilité d’évoquer la géométrie des lieux sans la réduire à une abstraction, mais en y traçant les relations de pouvoir et en y plaçant les artefacts. Le lieu, tel que Philo l’envisage dans sa lecture foucaldienne de la géographie, est marqué, déterminé, construit par le réseau de relations : l’« ontologie spatiale » permet de cerner les conditions de possibilité locale des événements10. Cette intégration des thèses foucaldiennes au corpus conceptuel des géographes11 n’est cependant qu’une étape dans le tournant spatial : les historiens et sociologues des sciences ont, eux aussi, travaillé les concepts géographiques de Foucault pour saisir les polarités spatiales des façons de faire de la science et des manières de connaître. J’examinerai dans une première partie les difficultés rencontrées pour mettre en œuvre la constellation théorique de Foucault relative à la géographie des savoirs : usage partiel et partial, empirie débordant les cadrages théoriques, surinterprétation manifeste ou forçage heuristique constituent les points aveugles d’une historiographie se référant à Foucault davantage par réflexe que par nécessité. Dans une seconde partie, j’exposerai les différentes références faites au concept d’hétérotopie : de la salle des urgences à la bibliothèque de Montaigne, c’est une série variée de lieux de sciences recomposés en « espace autre » qui émerge de l’historiographie. En récapitulant ainsi la difficulté à se saisir de certaines propositions foucaldiennes ainsi que la prolifération de terrains hétérotopiques, il est possible de relire l’histoire récente des sciences en pointant leurs partis pris théoriques et, en miroir, les points aveugles qu’une géographie foucaldienne des savoirs permet de révéler.
L’embarrassante géographie foucaldienne des savoirs
2Le vocabulaire foucaldien est particulièrement évocateur en ce qui concerne la géographie12 : région, territoire, domaine, espace de dispersion… Cette lexicologie suggestive permet des rapprochements hâtifs, voire parfois approximatifs. Elle pose surtout le problème d’une incorporation des concepts foucaldiens (saturés de cette nomenclature spatiale) à une narration socio-historique plus ou moins rétive à cet arraisonnement théorique.
3Jeremy W. Crampton, en étudiant les opérations de cartographie qui suivent le premier conflit mondial et leurs implications eugénistes, propose de reconsidérer les propositions foucaldiennes susceptibles d’éclairer les opérations politiques de découpages territoriaux. Il reconnaît, tout d’abord, que les discussions que Foucault mène sur la cartographie doivent être comprises au sens large (expansive sense)13. Il retient finalement l’idée d’un lien entre les modes de gouvernement et la nécessité d’avoir « un plan rationnel pour contrôler l’espace14 ». La notion de quadrillage (surtout requise dans Surveiller et punir) permet ici de replacer les opérations cartographiques dans l’ordre du politique. Plus exactement, Crampton s’appuie sur les archives du groupe secret de recherche américain Inquiry, institué par le président Wilson en 1917, pour mettre en exergue le référentiel raciste qui sert notamment au redécoupage de la carte des Balkans. Cette « biopolitique de la race15 » combine une réflexion sur les démarcations géopolitiques et les prétendues connaissances eugénistes. Le groupe Inquiry fait appel à Charles B. Davenport, fondateur du Eugenics Record Office et promoteur d’un savoir sur les races qui disposent, aux États-Unis, d’une forte crédibilité scientifique16. Cet intérêt (qui se manifeste jusqu’au sommet de l’État) pour les thèses racistes recoupe les propositions de Foucault sur la gouvernementalité, le racisme d’État et la quête de pureté17. Ce sont donc les critères racistes qui vont déterminer les tracés de frontières européennes telles que le groupe Inquiry les envisage, sous l’influence de Davenport. Ce dernier souhaite notamment que ces travaux cartographiques soient l’occasion de repenser l’immigration aux États-Unis. Il s’agirait en particulier de repousser les Européens des zones méridionales, accusés d’une infériorité génétique18. Finalement, Jeremy Crampton conclut que la cartographie sert d’instrument à une forme de biopouvoir qui relie les « principes eugéniques d’une discrimination biologique » à un exercice concret du gouvernement19. L’étude de Jeremy W. Crampton est particulièrement probante pour mettre en exergue la mobilisation des savoirs aux fins d’une politique d’État raciste ; elle discerne la diagonale qui fait se rejoindre les puissances d’assujettissement des individus discriminés (au nom de principes racistes et eugénistes) et la densité d’un savoir cartographique qui, sans réflexivité, s’adapte et se conforme aux demandes politiques. Mais il n’est nullement question, ici, des propositions géographiques de Foucault. Que le pouvoir soit spatialisé, c’est-à-dire qu’il opère selon des échelles particulières et sur des territoires spécifiques, constitue une proposition très générale du corpus foucaldien. Les « obsessions spatiales » du philosophe se prêtent aisément à ce type d’emprunt qui fournit des outils passe-partout pour l’analyse. En convoquant la biopolitique (sous une modalité un peu moins générale, notamment dans sa composante raciste), Crampton ne propose pas de densifier la géographie foucaldienne, ni même d’en exploiter les vertus heuristiques potentielles. Il reste à ce niveau de généralisation qui permet d’incorporer, sans les travailler véritablement, des concepts déshistorisés.
4Une autre saisie embarrassée des concepts géographiques de Foucault réside dans la tentative de mesurer l’adéquation des schémas théoriques aux études de cas. Christopher Philo s’est ainsi intéressé à l’architecture panoptique des asiles en Angleterre au xixe siècle. Les groupes minoritaires (en particulier les fous) ont très fréquemment fait l’objet, de la part des pouvoirs politiques en place, de mesures d’exclusion spatialisées. Cette mise à l’écart est aussi une manière de nommer la discrimination et les discriminées20. C’est ici l’interprétation foucaldienne du panopticon de Bentham qui est mobilisée. Philo retient des travaux de Foucault que l’architecture panoptique capture, en ses murs et ses agencements, des pratiques institutionnelles (une administration de la folie) et des techniques disciplinaires21. Mais la généralisation du panoptique a fait l’objet de nombreuses critiques (notamment de la part de Michael Dear22) ; d’autres « modèles alternatifs » existent qui remettent en question le supposé hégémonisme architectural du panoptisme asilaire. Philo propose de prendre le problème « de biais ». En considérant l’asile comme un instrument qui permet aux médecins de faire leur travail et donc d’articuler une pratique savante avec une distribution sociale des individus, il restitue aux asiles leur fonctionnalité élémentaire. En suivant dans l’Asylum Journal toutes les propositions d’architecture asilaire, Philo met au jour des stratégies très variées de localisation et de segmentation de la folie : chambres individuelles, « système de blocs détachés », soins hors de l’institution, les réponses immobilières sont multiples et empruntent très peu souvent au panoptisme23. Cependant c’est bien la question de la surveillance, du regard porté sur les déambulations des fous, des modalités de contrôle de leurs déplacements qui suscitent les plus vifs débats architecturaux. Christopher Philo soutient, en conclusion, que Foucault n’a jamais « associé trop étroitement » panoptisme et panopticon : le philosophe a surtout questionné la diffusion des modèles de surveillance davantage que la prévalence d’un modèle architectural précis24. S’agit-il, pour Philo, de « sauver » le modèle foucaldien de géographie du disciplinaire ou bien de saisir les traits saillants d’une technologie de surveillance de la folie ? Le lecteur hésite entre ses deux interprétations possibles qui laissent en suspens l’usage véritablement historien d’une généalogie diffusionniste des canons architecturaux de l’asile en Europe au xixe siècle. La conclusion de Philo, plus prosaïque, bat en brèche l’idée d’un lien univoque entre l’asile et « la reproduction socio-spatiale de la folie25 ». La spatialisation du disciplinaire (appuyé sur les savoirs médicaux) n’est guère interrogée pour elle-même ; elle demeure un point aveugle du questionnaire géographique.
5Cet embarras à l’endroit des concepts spatiaux foucaldiens se retrouve dans l’œuvre de Sophie Forgan et surtout dans les usages qui sont faits de ses travaux. Ses principales publications concernent l’architecture des lieux de science : universités26, musées27, sociétés savantes28. Elle s’est efforcée de montrer comment la construction des espaces savants combinait des impératifs matériels, culturels, urbains, scientifiques, techniques et politiques29. Autant de thématiques qui indubitablement pourraient s’articuler avec les thèses foucaldiennes sur les espaces striés et constitués par les relations de pouvoir. Pourtant, Sophie Forgan ne mobilise presque pas l’œuvre de Michel Foucault et lorsqu’elle le fait, c’est pour s’en éloigner. Ainsi dans sa contribution à l’ouvrage dirigé par Crosbie Smith et Jon Agar, Making Space for Science30, Forgan s’intéresse au vocabulaire employé pour désigner la location spatiale des activités scientifiques ; elle met en relation « ce langage avec les espaces réels et les sites institutionnels31 ». Elle reconnaît que les historiens doivent à Foucault une attention plus soutenue aux corrélations fines « entre les espaces physiques et les structures politiques et sociales du pouvoir ». Elle souligne cependant les limites d’une telle approche. D’une part, les « analyses foucaldiennes des espaces ne s’intéressent qu’à deux catégories de personne, celles qui contrôlent et celles qui sont contrôlées32 » : cette distribution des rôles sociaux n’est pas opératoire pour l’époque victorienne où les formes de contrôle se superposent et s’emboîtent. D’autre part, les propositions de Foucault concernent principalement le moment de la mise en plan ou de la construction. Mais les « immeubles sont rarement construits exactement comme ils sont planifiés […]33 » ; il existe une multitude d’arrangements, de modifications, de transformations qui performent la texture des lieux et changent leurs usages. Finalement, Sophie Forgan reconnaît que « si l’espace, dans un sens foucaldien n’occupe pas une place proéminente dans [son étude], c’est parce que les analyses de l’espace dans une perspective foucaldienne stricte ne tiennent pas suffisamment compte du fait que les immeubles ont différentes significations selon les époques, et que la manière dont ils changent et évoluent est aussi importante que celle dont ils ont été construits34 ». Sans préjuger du bien-fondé de ces critiques, remarquons que Forgan prend clairement ses distances avec les concepts géographiques développés par Foucault ; elle s’en tient à une séparation nette entre les lieux tels qu’ils sont conçus et les lieux tels qu’ils sont pratiqués. Cela n’empêche pas Jan Golinski, dans son ouvrage de synthèse Making Natural Knowledge35, de réinterpréter les travaux de Sophie Forgan à la lumière des analyses foucaldiennes. S’appuyant sur un article intitulé « The Architecture of Science and the Idea of University36 » qui s’interroge sur la transformation concomitante de l’architecture des universités et des nouvelles demandes socio-épistémiques (notamment la division en grands domaines de savoirs), Golinski en vient à faire une lecture foucaldienne des transformations des espaces savants au xixe siècle. Il retient de l’étude de Sophie Forgan qu’en « cartographiant les arrangements internes des laboratoires, [elle] a éclairé la dimension spatiale des formations disciplinaires […]37 ». Le panopticon benthamien sert, selon Golinski, de matrice architecturale pour penser la « connexion entre les structures du pouvoir et les configurations de l’espace […] » : les étudiants peuvent être surveillés depuis un point unique, les structures en amphithéâtre renversant le panoptisme foucaldien, puisque c’est vers l’orateur que les étudiants doivent regarder38. Cette lecture, par l’entremise des thèses de Foucault sur le disciplinaire, des propositions explicitement non foucaldiennes de Forgan sur l’architecture des espaces savants, dit assez le travail de forçage théorico-empirique qui consiste à requérir Foucault dans toutes les circonstances (même lorsqu’elles ne semblent pas s’imposer). On sait à quel point la French Theory a fait office d’attracteur conceptuel pour les mouvements des STS39, et Foucault semble, à son corps défendant, pris dans les rets d’une analyse des espaces, des structures immobilières et des architectures scientifiques qui se contente de noter un parallèle, une analogie, voire une simple corrélation entre les structures de pouvoir et les espaces construits. C’est une interprétation a minima, et quelque peu paresseuse, des réflexions sur l’espace et la géographie des savoirs telles qu’elles sont présentes dans l’œuvre de Foucault. D’une part, le philosophe a proposé une réflexion sur les « relations spatiales substantives40 » qui fait la part belle aux évolutions historiques ; d’autre part, il a envisagé une analytique des pouvoirs toujours située41. Autrement dit, ce n’est pas seulement parce qu’il y a des plans, des lieux, des bâtiments où l’on produit et transmet du savoir que les relations de pouvoir se calquent sur les couloirs, les pièces, les amphithéâtres, les laboratoires. Les dissymétries qui peuvent apparaître entre les acteurs tiennent surtout aux conditions politiques d’un arrangement spatial qui exploite au mieux la distribution sociale des dominations à une époque donnée.
6L’embarras que certains auteurs des STS semblent nourrir à l’endroit des concepts spatiaux de Foucault se mue parfois en une utilisation partielle sinon partiale de ces éléments théoriques. Ainsi, Michael Lynch, tenant d’une ethnométhodologie stricte qui suppose un suivi rigoureux de la gestuelle des acteurs et une transcription de leurs propos qui fasse, le plus possible, abstraction des tentations objectivistes de l’observateur-sociologue, s’est essayé à coupler les dispositifs de Foucault à la phénoménologie de Merleau-Ponty. Lynch soutient que le laboratoire comme lieu de travail n’est pas « espace physique unique » puisqu’il est constitué de toutes les actions qui se composent à travers lui42. Le laboratoire est moins affaire de dénomination que « grammaire des concepts spatiaux associés avec des pratiques particulières ». Les « contextures » d’Aron Gurwitsch permettent de considérer les espaces savants comme des « constellations particulières de détails » plutôt que comme « une matrice spatiale invariante43 ». De Merleau-Ponty, Lynch retient le « corps phénoménal » qui est une « spatialité incarnée », vécue par la saisie organique et somatique44. Foucault, enfin, est mobilisé pour son travail sur les médiations entre technologie et textualité. Lynch ne retient du philosophe que les « études historiques en un sens très limité ». En suivant la trame de Surveiller et punir, il s’agit de comprendre comment des complexes « d’actions humaines et de technologie » peuvent transformer les « prédicats spatiaux ». Foucault envisage les panopticons comme des « “observatoires” de la multiplicité humaine45 » qui donneraient corps à ces complexes intriqués d’acteurs et d’instruments. Lynch passe au trébuchet de l’ethnométhodologie les apports de Foucault ; il retient une lecture appropriée des textes et rejette les généralisations théoriques autour du doublet savoir/pouvoir46. Le panopticon n’est qu’un exemple parmi d’autres des « complexes topiques » associant acteurs et instruments ; l’ethnométhodologue tient surtout à conserver une « écologie discontinuiste qui incorpore l’hétérogénéité47 » sans qu’on sache exactement en quoi consiste cette écologie ni ce qu’elle a d’hétérogène. En tordant les principes théoriques que Foucault s’est efforcé de développer, il ne reste pas grand-chose de leur puissance d’analyse. Pourquoi mobiliser le panopticon et l’auteur de Surveiller et punir, si ce n’est que pour l’« aligner » sur les canons ethnométhodologiques et n’en retenir qu’un truisme épistémologique (à savoir que les instruments sont fondamentaux dans la pratique scientifique) ? Quel intérêt y a-t-il à ne prendre d’une proposition théorique qu’une portion congrue ? Ces questions sont d’autant plus importantes en ce qui concerne l’étude de terrain de Michael Lynch que Foucault, après avoir été sollicité et malmené au début de l’article, se trouve vite oublié dans les méandres d’une observation participante au demeurant très éclairante. Lynch envisage deux sortes de combinaison intellectuelle et gestuelle qui définissent des espaces spécifiques du laboratoire : l’opticisme et la digitalité. Le premier désigne la « théorie orthodoxe » de la vision qui construit tout à la fois un langage de description et un rôle pour l’observateur qui coordonne « des espaces et des pratiques48 ». La digitalité suppose, de la part des acteurs, une incorporation des « formes d’efficacité pratique49 ». La main est l’instrument privilégié de la digitalité puisqu’elle va convertir les complexes technologiques qu’elle manipule en espace de recherche. C’est ainsi que les claviers d’un instrument astronomique de Harvard sont, dans la description de Lynch, des médiums digitalisés capables de convertir des chiffres en images50. Les observateurs finissent par composer « une image digitale pour évoquer le réalisme photographique […]51 ». L’éthnométhodologue conclut de son enquête que la notion de lieu de sciences ne peut se limiter aux plans, mais qu’elle doit être capable de rendre compte des « contextures topiques » (topical contextures) qui désignent des associations d’actions et d’instruments. Finalement, Foucault n’est convoqué qu’à titre d’ornement : ses propositions sur le panoptisme ne sont exploitées que dans la mesure où elles viennent soutenir une argumentation ethnométhodologique qui n’avait pas besoin d’elles pour être établie. On retrouve cet usage décoratif de Foucault dans certains développements de Bruno Latour. L’article « Les vues de l’esprit », publié pour la première fois en 1984 dans la revue Culture technique, est une synthèse enlevée des principes de cette « anthropologie des sciences et des techniques » défendue par Latour : l’importance des écrits et des images, l’œil comme point nodal des opérations de connaissance et la finalisation des pratiques scientifiques au sein du laboratoire transformé en « centre de calculs ». Foucault est requis – toujours à partir du panopticon – afin de soutenir l’idée qu’un espace de recherche est un « dispositif qui mobilise, enregistre et assemble52 ». Une nouvelle fois, quel est l’intérêt de convoquer le panoptisme pour décrire le laboratoire en lieu d’accumulation et d’articulation des données ? La citation foucaldienne ne vient ici que pour signaler une connivence (supposée) entre un auteur réputé et une heuristique sociologique (les STS) en pleine expansion au moment où Latour publie son article. Signalons que cette tentative d’arraisonnement forcé trouve son paroxysme dans l’ouvrage que Bruno Latour cosigne avec Steeve Woolgar, Laboratory Life : Surveiller et punir est cité en bibliographie53, mais n’apparaît jamais dans le corps du texte. Cet acte manqué éditorial signale assez bien les embarras d’une sociologie des sciences travaillant la question de la géographie des savoirs et cherchant, chez Foucault, des légitimités dont, au fond, elle aimerait se passer.
7Les STS, lorsqu’elles ne visent pas à se parer d’un label les affiliant à la French Theory usent (et abusent) des emplois controuvés. Ainsi Joseph Rouse, dans son ouvrage Knowledge and Power. Toward a Political Philosophy of Science, offre une vue ample sur l’épistémologie des STS. Foucault est convoqué pour comprendre comment s’organisent les relations de pouvoir dans le laboratoire. Les « micro-mondes » que les chercheurs mettent en exergue dans leurs expériences n’adviennent que parce qu’un espace de recherche est compartimenté, structuré, organisé : cet isolement relatif permet de faire advenir les « choses » ou les « événements54 ». La normalisation foucaldienne permet de décrire l’ordonnancement comme la pratique savante par excellence. Parallèlement, la « production de signes » (les écrits scientifiques notamment) organise les relations de pouvoir dans le laboratoire. Rouse va jusqu’à comparer la mise par écrit des résultats au rituel de la confession étudié par Foucault55. Avec Yves Gingras, nous ne pouvons que constater l’extraordinaire capacité des auteurs STS à transformer en langage théorique pseudo-descriptif des truismes épistémologiques ou à composer des rapprochements incongrus par goût de la provocation56.
8Si les emprunts à Foucault sont nombreux pour questionner la géographie des savoirs et la localisation des opérations de connaissance, ce sont surtout des usages malaisés ou ornementaux qui caractérisent le champ des STS. Cependant, une notion foucaldienne a fait l’objet d’une attention plus soutenue et d’une utilisation plus rigoureuse : l’hétérotopie.
Vitalité hétérotopique
9Michel Foucault expose à deux reprises le concept d’hétérotopie57. Tout d’abord dans Les mots et les choses, la liste de l’encyclopédie chinoise imaginée par Borges révèle un désordre inextricable et presque inintelligible. L’hétérotopie désigne alors cette tentative de miner « secrètement le langage » en arrêtant « les mots sur eux-mêmes58 ». Foucault reprend le terme d’hétérotopie dans une conférence qu’il donne en 1967 devant le cercle des architectes. Il décrit ainsi ces « espaces autres » : « Dans toute culture, toute civilisation, des lieux réels, des lieux effectifs qui sont dessinés dans l’institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d’utopies effectivement réalisées dans lesquelles les emplacements réels, tous les autres emplacements réels que l’on peut trouver à l’intérieur de la culture sont à la fois représentés, contestés et inversés, des sortes de lieux qui sont hors de tous les lieux, bien que pourtant ils soient effectivement localisables59. » Adi Ophir et Steven Shapin ont montré l’importance du concept foucaldien et assurent : « On peut soutenir que dans l’Occident Moderne, la science a été très fortement liée aux sites hétérotopiques60. » Les deux historiens insistent sur cette particularité des espaces savants qui, à partir du xviie siècle en Europe, cherchent à faire émerger des objets jusque-là invisibles. Dans le même temps, les laboratoires, observatoires, jardins botaniques et cabinets de curiosités développent des mécanismes d’exclusion qui réduisent le nombre de personnes autorisées à examiner ces objets et capables d’en certifier la présence. Parce qu’il circonscrit l’analyse sur une modalité spatiale (l’occupation d’un lieu susceptible d’être décrit par des propriétés matérielles et cognitives), le concept d’hétérotopie a suscité des études plus précises, plus rigoureuses et, finalement, plus fécondes que les tentatives floues d’articulation des relations de pouvoir avec la géographie des savoirs.
10Robert J. Topinka a proposé de densifier le concept d’hétérotopie. Il décrit ces « espaces autres » comme des lieux « d’intensification du savoir61 », c’est-à-dire que l’affrontement entre des forces contradictoires permet de faire émerger une connaissance stabilisée. Ainsi, les hétérotopies ne sont pas des espaces de résistance, mais des lieux de réordonnancement des savoirs62. En tant qu’espaces spécifiquement consacrés à la restitution/constitution des connaissances, les sites hétérotopiques présentent une « vue de leur formation structurale […]63 » qui serait, sinon, invisible. Les savoirs ont besoin d’un espace pour s’ordonner (et donc, d’une certaine façon, pour se constituer en tant que savoirs). L’intérêt d’une telle démarche réside principalement dans la reconnaissance des jeux antagonistes qui travaillent la production de connaissances et surtout, les effets d’érosion sur les conditions mêmes des pratiques scientifiques qu’ont ces affrontements. On pourra regretter le lexique un tantinet flou qui obscurcit les propositions de Robert J. Topinka, mais il s’agit, à n’en pas douter, d’une proposition solide pour questionner les lieux de savoir.
11Cependant, ce sont moins les prolongements et sophistications théoriques qui donnent corps au concept d’hétérotopie que la façon dont il peut permettre d’éclairer un cas précis. Adi Ophir a ainsi proposé de mesurer à quel point la bibliothèque de Montaigne était un site hétérotopique. Ce lieu de retraite et de solitude est d’abord l’espace de constitution d’un soi-Montaigne qui est précisément l’objet de ses Essais. Comme l’hétérotopie procède d’un arrangement spatial et social différent de celui qui prime à l’extérieur, les frontières en espace public et espace privé revêtent ici une importance considérable64. En première analyse, la bibliothèque de Montaigne semble avoir les mêmes caractéristiques qu’un monastère, un campus universitaire, un laboratoire d’alchimie ou un observatoire, autant de thébaïdes (relativement) closes sur elles-mêmes. Mais cette similitude n’est qu’apparente : les laboratoires ou les observatoires s’organisent selon des schémas types qui peu à peu se normalisent. La bibliothèque personnelle de Montaigne est éphémère (elle disparaît avec lui, puisqu’en tant que sujet d’étude il fait corps avec elle) et unique. Elle n’est pas un lieu d’archives : elle « contient des livres dans lesquels des idées sont transcrites, non pas nécessairement parce qu’elles sont mémorables, mais elles sont mémorables parce qu’elles sont transcrites65 ». Ce qui fait de la bibliothèque privée de Montaigne un espace véritablement autre, c’est la séparation qu’elle autorise avec le reste de la résidence et qui permet l’accès au soi. Les livres qui peuplent les rayonnages offrent la possibilité de connaître les représentations des autres, en « miroir » d’une subjectivation construite dans le retrait66. Ce double « estrangement » (la solitude et la confrontation aux autres par les livres) constitue la bibliothèque de Montaigne en hétérotopie : devenue « observatoire de soi67 », elle permet la description du « vrai » Montaigne. Inversant les rapports classiques aux relations sociales (qui participent de la constitution de soi) et aux pratiques épistémologiques (qui supposent un échange direct avec d’autres savants), Montaigne fait de sa bibliothèque personnelle un espace autre, seul capable de faire advenir son auctorialité (de et sur lui-même)68. Et ce n’est pas le lieu matériel lui-même qui est une hétérotopie, c’est ce qu’il est et ce qu’il permet (la solitude, la lecture des autres…). Ophir convainc en travaillant les pratiques d’écriture et de lecture de Montaigne : sa bibliothèque renverse les polarités des relations sociales et savantes habituelles, elle est une invention topique totalement liée à l’auteur des Essais, inséparable d’un soi constitué par l’isolement et la confrontation livresque aux autres. L’hétérotopie n’est, ici, interchangeable avec aucun autre lieu : elle délimite, en propre, un territoire recombinant les règles socio-épistémiques qui ont cours dans le reste de la société.
12Simon Schaffer, dans une communication au colloque « Foucault in Cambridge » qui s’est tenu en 2005 à l’université de Cambridge, a, plus radicalement encore, envisagé la puissance explicative des hétérotopies foucaldiennes en histoire des sciences69. Il soutient que les observations astronomiques méridiennes des pays anglo-saxons sont un enjeu colonial au xixe siècle. Au même titre que d’autres observations (comme le magnétisme terrestre), ces pratiques savantes prennent place dans une vision spécifique du « monde civilisé ». La multiplication des espaces savants capables de rendre « les techniques scientifiques effectives » joue un rôle considérable dans la « géopolitique de leur pouvoir séculaire ». Distinguant chez Foucault une version linguistique des hétérotopies (celle des Mots et des choses) et une version plus concrète (celle « Des espaces autres »), Schaffer s’appuie sur la seconde pour questionner la possibilité d’analyser les observatoires astronomiques en termes d’espace autre. L’accumulation de données sur les étoiles au xixe siècle s’est doublée d’une discipline au sein des observatoires qui imposait à chaque astronome de cerner son « équation personnelle », c’est-à-dire l’écart physiologique systématique qu’il pouvait faire dans ses examens célestes. C’est « la rigueur de l’ordre social » qui entre dans les observatoires. Mais, dans le même temps, ce sont les premiers programmes expérimentaux de psychologie qui sont mis en œuvre : les observatoires, en plaçant l’espace, et non plus le temps, au cœur des problématiques de subjectivation/objectivation des observateurs, ont permis la mise en place de la psychodynamique. C’est ainsi que les laboratoires de Wilhelm Wundt et de ses disciples, qui étaient « exactement des observatoires astronomiques mais sans étoiles », ont constitué des hétérotopies. Le schème dominant (propre aux postkantiens) au xixe siècle est celui d’un accès privilégié au travail intellectuel par le temps : tous les lieux qui renversent cette proposition (ou plus exactement qui ne la prennent pas pour unique mode d’action) deviennent des espaces autres, capables de faire travailler les normes socio-épistémiques différemment en leur sein. Simon Schaffer conclut en élargissant sa proposition : c’est tout le « pouvoir de l’astronomie » qui est hétérotopique. L’isolement des astronomes, en même temps que la discipline collective et les impératifs d’une science quasiment industrielle dans sa collecte massive de données, tout cela transforme les observatoires en d’étranges lieux où la discipline socio-épistémique côtoie le chaos des étoiles.
13Ni idéal type, ni matrice générique, l’hétérotopie foucaldienne constitue un instrument d’analyse puissant et efficace pour donner à voir l’importance des géographies savantes. En liant, subtilement, les espaces (matériels) aux pratiques qui en épuisent l’efficace, le concept foucaldien rend aux activités savantes leurs spécificités. Si on admet, après Pierre Bourdieu70, qu’il existe une recherche d’autonomie dans les opérations modernes de connaissance et que cette autonomie passe par un réordonnancement des valeurs et des pratiques sociales dans le lieu même où les scientifiques opèrent, alors les espaces autres deviennent une conceptualisation féconde : ils permettent de signaler les points de renversement, les distorsions et les arrangements quotidiens qui trament la vie savante.
14Si le « geographic turn » a remodelé les problématiques des STS, notamment en offrant une attention plus soutenue aux agencements spatiaux et matériels des lieux de sciences, les emprunts faits à la philosophie foucaldienne, pour suggestifs qu’ils puissent être, ont été diversement productifs. Il est incontestable que la mobilisation d’un auteur comme Foucault, très présent dans les bibliographies et les syllabus STS anglo-saxons, tient d’abord à un effet de mode : lorsque cet agglomérat de disciplines centrées sur les sciences s’est cherché des appuis épistémologiques, la figure de Foucault s’est imposée. Ses « obsessions spatiales » ont fait le reste lorsque le temps des problématiques spatiales est venu. Pour autant, c’est bien souvent un usage décoratif, mutilé, partiel, incomplet et même parfois forcé qui caractérise une bonne part des emprunts faits par les tenants des STS au corpus foucaldien. Le fait que Foucault n’ait pas systématisé une géographie des savoirs dans son œuvre peut expliquer, au moins en partie, cette tendance forte à la ductilité que semblent se permettre les auteurs des emprunts. D’autant que le concept le plus abouti de Foucault, en termes de spatialisation des connaissances, l’hétérotopie, a fait l’objet d’études de cas plus substantielles et convaincantes. L’idée que les espaces savants puissent être dans un rapport étroit d’inversion des valeurs et pratiques sociales avec l’extérieur permet de poser à nouveaux frais la question de l’autonomie des manières de connaître comme horizon heuristique. À n’en pas douter, les « espaces de dispersion », les « panoptiques » et les « hétérotopies » continueront d’alimenter des STS (trop) souvent enclines à emprunter des concepts foucaldiens sans véritablement opérer un travail réflexif sur leurs usages. L’exemple des hétérotopies montre, qu’au contraire, un usage rigoureux et empiriquement informé d’une notion foucaldienne suggestive ouvre la voie à des analyses véritablement novatrices sur les manières de connaître et les façons de faire de la science.
Notes de bas de page
1 Pour une introduction, voir David Hess, Science Studies. An Advanced Introduction, New York, New York University Press, 1997.
2 Parmi une production abondante, on se référera notamment à Simon Naylor, « Introduction: Historical Geographies of Science Places, Contexts, Cartographies », British Journal of the History of Science, 38/1, 2005, p. 1-12 ; Adi Ophir, Steven Shapin, « The Place of Knowledge. A Methodological Survey », Science in Context, 4/1, 1991, p. 3-21 ; David N. Livingstone, « The Spaces of Knowledge: Contributions towards a Historical Geography of Science », Environment and Planning D: Society and Space, 13, 1995, p. 5-34 ; David N. Livingstone, Putting Science in its Place. Geographies of Scientific Knowledge, Chicago, The University of Chicago Press, 2003 ; Diarmid A. Finnegan, « The Spatial Turn: Geographical Approaches in the History of Science », Journal of the History of Biology, 41, 2008, p. 369-388 ; Christian Jacob, Lieux de savoir, 1, Espaces et communautés, Paris, Albin Michel, 2007 ; Id., Lieux de savoir, 2, Les mains de l’intellect, Paris, Albin Michel, 2011 ; Christian Amalvi (dir.), Les lieux de l’histoire, Paris, Armand Colin, 2005 ; Santa Arias, « Rethinking Space: An Outsider’s View of the Spatial Turn », GeoJournal, 75, 2010, p. 29-41 ; Crosbie Smith, Jon Agar (dir.), Making Space for Science. Territorial Themes in the Shaping of Knowledge, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 1998 ; Angelo Torre, « Un “tournant spatial” en histoire ? », Annales. Histoire, sciences sociales, 63e année, 5, 2008, p. 1127-1144 ; Peter Galison, Emily Thompson (dir.), The Architecture of Science, Cambridge, MIT Press, 1999.
3 Michel Foucault, « Questions à Michel Foucault sur la géographie » [1976], dans Id., Dits et écrits, 2, 1976-1988, Paris, Gallimard, 2001, p. 35.
4 Id., Histoire de la folie à l’âge classique, Paris, Gallimard, 1972.
5 Id., Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975.
6 Id., « Espace, savoir et pouvoir » [1982], dans Dits et écrits, 2, op. cit., p. 1089-1104.
7 Id., Le corps utopique. Les hétérotopies, Paris, Lignes, 2009.
8 David N. Livingstone, « The Spaces of Knowledge », art. cité, p. 5.
9 Edward W. Soja, Postmodern Geographies. The Reassertion of Space in Critical Social Theory, Londres, Verso, 1989, p. 21.
10 Christopher Philo, « Foucault’s Geography », Environment and Planning D: Society and Space, 10, 1992, p. 137-161.
11 Stuart Elden, Jeremy W. Crampton, « Space, Knowledge and Power: Foucault and Geography », dans Id. (dir.), Space, Knowledge and Power. Foucault and Geography, Aldershot, Ashgate, 2007, p. 1-16. Les thèses géographiques de Michel Foucault sont aussi très utilisées par les architectes, voir, par exemple, Gordana Fontana-Giusti, Foucault for Architects, Londres, Routledge, 2013.
12 Au point que Gilles Deleuze verra dans Surveiller et punir l’œuvre d’un « nouveau cartographe », Gilles Deleuze, Foucault, Paris, Éditions de Minuit, 2004, p. 31-51.
13 Jeremy W. Crampton, « Maps, Race and Foucault: Eugenics and Territorialization Following World War I », dans Stuart Elden, Jeremy W. Crampton (dir.), Space, Knowledge and Power. Foucault and Geography, op. cit., p. 223.
14 Ibid., p. 224.
15 Ibid., p. 225.
16 Jeremy W. Crampton, « Maps, Race and Foucault: Eugenics and Territorialization Following World War I », art. cité, p. 231.
17 Ibid., p. 232-233 ; Michel Foucault, « Il faut défendre la société ». Cours au Collège de France, Paris, Gallimard/Seuil, 1997.
18 Jeremy W. Crampton, « Maps, Race and Foucault », art. cité, p. 238.
19 Ibid., p. 240.
20 Christopher Philo, « “Enough to drive one Mad”: The Organization of Space in the 19th-Century Lunatic Asylums », dans Jennifer R. Wolch, Michael Dear (dir.), The Power of Geography. How Territory Shapes Social Life, Boston, Unwin Hyman, 1989, p. 259.
21 Ibid., p. 264.
22 Michael Dear, « Social and Spatial Reproduction of the Mentally Ill », dans Michael Dear, Allen J. Scott (dir.), Urbanization and Urban Planning in Capitalist Society, New York, Methuen, 1981, p. 481-497.
23 Christopher Philo, « “Enough to drive one Mad” », art. cité, p. 282.
24 Ibid., p. 283.
25 Ibid., p. 284.
26 Sophie Forgan, « The Architecture of Science and the Idea of a University », Studies in History and Philosophy of Science, 20/4, 1989, p. 405-434.
27 Id., « The Architecture of Display: Museums, Universities and Objects in Nineteenth-Century Britain », History of Science, XXXII, 1994, p. 139-162.
28 Id., « Context, Image and Function: A Preliminary Enquiry into the Architecture of Scientific Societies », The British Journal for the History of Science, 19/1, 1986, p. 89-113.
29 Id., « Building the Museum: Knowledge, Conflict, and the Power of Place », Isis, 96/4, 2005, p. 572-585.
30 Crosbie Smith, Jon Agar (dir.), Making Space for Science. Territorial Themes in the Shaping of Knowledge, Londres, Macmillan, 1998.
31 Sophie Forgan, « “But indifferently lodged”: Perception and Place in Building for Science in Victorian London », dans ibid., p. 196.
32 Ibid., p. 197.
33 Ibid., p. 198.
34 Ibid., p. 214.
35 Jan Golinski, Making Natural Knowledge. Constructivism and the History of Science, Chicago, The University of Chicago Press, 2005.
36 Sophie Forgan, « The Architecture of Science and the Idea of a University », art. cité.
37 Jan Golinski, Making Natural Knowledge, op. cit., p. 87.
38 Ibid., p. 87-88.
39 François Cusset, French Theory. Foucault, Derrida, Deleuze & Cie et les mutations de la vie intellectuelle aux États-Unis, Paris, La Découverte, 2005.
40 Christopher Philo, « Foucault’s Geography », art. cité, p. 150.
41 Michel Foucault, Histoire de la sexualité, 1, La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976.
42 Michael Lynch, « Laboratory Space and the Technological Complex: An Investigation of Topical Contextures », Science in Context, 4/1, 1991, p. 53.
43 Ibid.
44 Ibid., p. 54.
45 Michel Foucault, Surveiller et punir. Naissance de la prison, op. cit., p. 173.
46 Lynch semble même douter qu’il existe une théorie générale du savoir/pouvoir chez Foucault : Michael Lynch, « Laboratory Space and the Technological Complex », art. cité, p. 55.
47 Ibid.
48 Ibid., p. 57-61.
49 Ibid., p. 62.
50 Ibid., p. 70.
51 Ibid., p. 72.
52 Bruno Latour, « Les “vues” de l’esprit. Une introduction à l’anthropologie des sciences et des techniques », Culture technique, 14, 1984, p. 15.
53 Bruno Latour, Steeve Woolgar, Laboratory Life. The Social Construction of Scientific Facts, Beverly Hills, Sage Publications, 1979, p. 265.
54 Joseph Rouse, Knowledge and Power. Toward a Political Philosophy of Science, Ithaca, Cornell University Press, 1987, p. 223.
55 Ibid., p. 225.
56 Yves Gingras, « Un air de radicalisme ? Sur quelques tendances récentes en sociologie des sciences et des technologies », Actes de la recherche en sciences sociales, 108, 1995, p. 3-18.
57 Pour une histoire complète de l’émergence du concept d’hétérotopie chez Foucault, voir Daniel Defert, « “Hétérotopie” : tribulations d’un concept entre Venise, Berlin et Los Angeles », dans Michel Foucault, Le corps utopique. Les hétérotopies, op. cit., p. 37-61.
58 Michel Foucault, Les mots et les choses. Une archéologie des sciences humaines, Paris, Gallimard, 1966, p. 9-10.
59 Id., « Des espaces autres » [1984], dans Id., Dits et écrits, 2, op. cit., p. 1574-1575.
60 Adi Ophir, Steven Shapin, « The Place of Knowledge. A Methodological Survey », art. cité, p. 13.
61 Robert J. Topinka, « Foucault, Borges, Heterotopia: Producing Knowledge in Other Spaces », Foucault Studies, 9, 2010, p. 55.
62 Ibid., p. 56.
63 Robert J. Topinka, « Foucault, Borges, Heterotopia: Producing Knowledge in Other Spaces », art. cité, p. 60.
64 Adi Ophir, « A Place of Knowledge Re-created: The Library of Michel de Montaigne », Science in Context, 4/1, 1991, p. 165.
65 Ibid., p. 167.
66 Ibid., p. 170-171.
67 Ibid., p. 173.
68 Ibid., p. 195.
69 Simon Schaffer, « Foucault and Heterotopia », communication à la conférence « Foucault in Cambridge », King’s College, Cambridge, 2005 (je remercie Simon Schaffer de m’avoir transmis le texte de sa communication).
70 Pierre Bourdieu, « La spécificité du champ scientifique et les conditions sociales du progrès de la raison », Sociologie et sociétés, 7/1, 1975, p. 91-118.
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