Conclusion
La surprise de Ferdinand : la formation d’une culture cartographique ?
p. 317-332
Texte intégral
1Revenons ici sur La découverte de l’Amérique pour l’instruction des jeunes enfants de Joachim Heinrich Campe publié en 17821, texte rapidement traduit tant en français qu’en anglais (1784). On s’en souvient, la mise en scène de Campe place le jeune Ferdinand dans une situation d’incompréhension devant le fait que les explorateurs portugais des xve et xvie siècles n’avaient pas de carte. Le père, dans une pédagogie bonhomme, de répondre : « Ma foi, Ferdinand, tu as raison : il est bien singulier, qu’autre fois on fût obligé de se rompre la tête pendant un siècle entier, pour une chose que nous autres voyons au premier coup d’œil ! » Une double rupture semble donc s’être opérée dans l’ordre des figurations de l’espace. D’une part la découverte du monde par les voyages a permis de produire une carte de plus en plus complète, si ce n’est exact, des régions non européennes. D’autre part, l’objet cartographique a suffisamment été diffusé pour qu’un enfant de la bourgeoisie allemande considère la carte comme une évidence. L’histoire des voyages de découverte est pour l’essentiel connue aujourd’hui, même si elle mérite d’être revisitée pour dépasser le tableau des faits et s’intéresser, par exemple, à la nature du regard des découvreurs2. On l’a évoqué, l’histoire de la diffusion de la carte reste quant à elle moins bien connue, celle de la cartographie s’intéressant bien plus aux innovations cartographiques qu’à la diffusion de ses usages. Or cette surprise de Ferdinand, même si elle relève d’une construction argumentative de Campe sur l’invention cartographique, n’est pas pour autant à ignorer. Reinhart Koselleck a montré avec une élégante efficacité que les surprises des acteurs du temps sont les moments de la prise de conscience d’un changement radical dans la perception du monde3. Dans son cas, la démonstration portait sur le rapport à l’histoire ; ici la rupture est autre, tout en relevant fondamentalement d’une même transformation du rapport au monde.
2Mais parler de rupture ici est rendu difficile tant la série des cas étudiés est apparue selon des rythmes propres, pas toujours conciliables entre eux. Sans tenter de recomposer cette rupture qui relève d’éléments récurrents dans les différents cas travaillés ici, il est possible d’en tirer quelques réflexions qui incitent à lire les évolutions dans une logique de régime4, le mot étant entendu dans le sens que lui donnaient Gérard Lenclud et François Hartog au début des années 1990 :
Régime peut s’entendre en plusieurs sens ou sur plusieurs registres ; au sens de constitution (politeia), au sens de genre de vie et de diète (diaita), au sens mécanique (le régime plus ou moins élevé d’un moteur). Toutes ces acceptions métaphoriques indiquent qu’un régime est formé d’éléments susceptibles de se mêler […], mais aussi d’entrer en tensions, oppositions, contradictions. De ces ingrédients ou constituants on peut, pour un groupe donné, entreprendre l’inventaire […]. De là, sur la base délibérée d’un certain nombre d’éléments, est rendue possible une comparaison entre deux ou plusieurs régimes, ainsi qu’une meilleure appréhension des changements de régime, des passages, des chevauchements, des temps d’arrêt aussi, de ces moments d’entre-deux où l’un finit et un autre commence […]. Ensemble composite et instable, un régime est formé d’éléments qui eux-mêmes, ne sont pas complètement isolables des configurations dans lesquelles ils s’inscrivent en même temps qu’ils les construisent5.
3En effet, le premier élement à devoir être souligné est celui de la discontinuité de la croissance. C’est le cas, parmi d’autres, des livres à carte de la Bibliothèque nationale de France. Après une hausse qui semble commencer dans les années 1620, la production croît fortement pour passer de 1 à 4 ‰ du total des livres dans les années 1710. Puis, après une diminution continue jusque dans les années 1730 (2,5 ‰), on assiste à une lente reprise (3,5 ‰), suivie d’une baisse pendant la Révolution (2 ‰) puis d’une forte hausse au début du xixe siècle (6 ‰ vers 1835). Les rythmes de publication des articles du Mercure de France connaissent eux aussi d’abord une croissance, suivie d’une baisse et d’une belle reprise. Mais à peine cette similarité notée, c’est un deuxième aspect qui s’impose et qui incite à noter les décalages entre ces processus. Le creux pour les livres à carte dure de 1710 à 1730, alors qu’il est plus précoce pour le Mercure de France (1700-1720), et légèrement plus tardif et plus resserré pour ce qui concerne les cartes dans les livres de géographie (1725-1735). Dès lors, s’il est possible de concevoir une évolution générale, celle-ci relève bien plus de compositions qui associent des rythmes divergents, voire – un temps – opposés.
4Or, à ce premier niveau de complexité s’en ajoute un deuxième qui n’est pas en phase avec le premier, même s’il s’y trouve mêlé. Il s’agit de la mise en place d’une cartographie de type zénithale et géométrique, aux figurés qui tendent à s’abstraire du paysage. Ce qui s’observe, c’est une longue intrication entre différents types de cartes. Les réflexions sur le plagiat lors du débat entre Bellin et d’Anville montrent que longtemps la carte géométrique ne s’autonomise pas. La tension entre les cartographies de l’exactitude et la cartographie commerciale trouve ici toute son extension, mais aucunement sa solution. Le Rouge continue à produire bien plus que les cartographes de l’exactitude. C’est pourtant au même moment que la « Société de la Carte de France » se met en place, posant la carte de Cassini au cœur de la cartographie commerciale. Cette situation offre un écho à celle de la relation entre table et géographie. En effet, au xvie siècle le mot « table » peut encore vouloir dire carte. Au xviie, il renvoie à une figuration de données disposées en lignes et en colonnes qui permet une visualisation de l’information géographique. Concurrente de la carte au xviie siècle, la table semble moins utilisée au xviiie, mais ne disparaît pas pour autant. Elle est d’ailleurs encore aujourd’hui d’usage courant, sous la forme du tableau statistique. Le cas de Lespinasse, au tout début du xixe siècle, est probablement plus déterminant ici, puisqu’il donne parfaitement à voir l’hésitation de long terme quant à la bonne figuration pour les militaires. Il montre également qu’un coup de force peut mettre un terme à l’indécision. On notera cependant que si rupture il y a, celle-ci n’a lieu qu’à l’extrême fin du xviiie siècle.
5La carte géométrique semble donc être plus une carte du xixe que du xviiie siècle, soit le moment où le « cartographe » apparaît. Ce n’est en effet que dans les années 1825-1835 que les auteurs d’une carte géométrique et exacte – qu’elle qu’en soit l’échelle – deviennent très progressiveent des cartographes, voire des chartographes comme dans le Dictionnaire classique d’Antoine de Rivarol en 18286. Ce nouveau nom pour les auteurs est suivi, au milieu des années 1830, par l’apparition d’un terme pour l’ensemble des opérations visant à produire les cartes. Ainsi, les mots « chartographie7 », et « cartographie8 » se diffusent-ils très lentement. Quant au mot « cartographe », on le trouve peut-être plus souvent dans le champ qui continue à associer carte et géographie, comme chez Adriano Balbi en 18339 ou chez le vicomte de Santarem en 184910. Il n’empêche, le mot tarde à s’imposer puisque ce n’est qu’en 1932 que l’Académie française, en détaillant les suffixes possibles du mot « carte » évoque le cartographe.
6Un troisième niveau de complexité se surajoute à cet ensemble et lie d’autant mieux l’histoire des usages de la carte aux questions traitées par Kosellesck. Il s’agit des rapports au temps que celle-ci révèle et porte. Pour partie, cette question excède le corpus étudié, sans pour autant entrer en contradiction avec ce qui a été plus particulièrement travaillé ici. La complexité naît, peut-être, avec la redécouverte de Ptolémée dont les usages varient dès le xvie siècle entre histoire de l’Antiquité et rapport au monde contemporain11. La tension perdure dans ces cartes de la Gaule qui font du roi de France un autre César avec pour projet de recomposer le territoire dans ses plus vastes limites12. Pour ce qui nous occupe, l’essentiel réside dans ces « géographies comparées » qui associent deux états géographiques et permettent de proposer un parallélisme des situations13. Celles-ci amplifient d’autant les multiples traductions de la Guerre des Gaules, qui participent de la fabrication de l’État et de ses frontières14. À quel moment la carte se met-elle à appuyer le projet de construction étatique ? Peut-être lorsque la continuité entre la Gaule et la France apparaît dans le titre, soit par exemple dans une carte de Nicolas Sanson de 1651 : La France et les environs jusques, a l’estendüe de l’ancienne Gaule divisée en ses primatiats, provinces ecclesiastiques, et dioeceses des archeveschés, et eveschés. On peut cependant imaginer des associations plus anciennes tant la lecture des cartes historiques s’appuie sur notre connaissance de celles du contemporain.
7Cette relation au temps orienté vers un usage futur apparaît, même si c’est moins évident, dans les discussions relatives à l’indication des distances sur la carte. Ce que propose Meynier, avec son odomètre en 1724, c’est de rendre possible avant le départ une connaissance du moment de l’arrivée. Après 1740- 1760, les plans terriers, même s’ils sont d’abord là pour enregistrer le passé, le font surtout dans le cadre d’une organisation de la collecte fiscale future, ainsi que pour projeter des améliorations à apporter au domaine, à l’exemple de l’improvement qui s’est développé un peu plus tôt en Angleterre. Chez les ingénieurs, on a observé qu’une même figuration est porteuse d’usages différents, et parfois complémentaires. À la carte lieu d’enregistrement s’oppose, en effet, le plan lieu du projet. Mais ce dernier étant accompli, le document devient une carte qu’il est possible de mettre à jour et qui permettra les plans suivants. Ce système se trouve institutionnalisé et formalisé au xviiie siècle avec la mise en place des écoles d’ingénieurs. Ce qui se constitue donc avec la carte, au-delà de sa fragilité toujours rappelée, c’est une figuration graphique qui, s’appuyant sur le passé, permet de penser un futur qui se déploie dans l’espace.
8C’est en cela que les modifications dans l’ordre du temps mis en évidence par Koselleck ne doivent pas être pris comme ne relevant que du registre temporel. Au changement du rapport au temps répond un changement du rapport à l’espace. L’un et l’autre sont ici à penser ensemble, ou du moins sont à appréhender dans l’historicité de leur articulation sur laquelle il convient de revenir rapidement.
1. Petit détour par la Poste : du cheminement à la vitesse…
9Le cas de la « Poste aux Chevaux » – le système de transport rapide du xviiie siècle – permet de montrer que l’on passe, dans le domaine postal, d’une mesure de cheminement à une mesure de vitesse. On notera d’ailleurs que cette institution produit une très grande quantité de cartes – à raison d’une par Livre de Poste depuis 1715 (production annuelle), et d’une grande carte imprimée par année. Cette production coûteuse laisse entendre que ceux qui gèrent la Poste le font, au moins en partie, par la carte. Celle-ci est d’ailleurs utilisée par l’institution siamoise qu’est la « Poste aux Lettres », qui utilise parfois celle aux chevaux pour le transport des courriers. Or le tarif de la première subit de nombreuses réformes tout au long des xviiie et xixe siècle (1703, 1759, 1791, 1798, 1827 et 1848), et ces réformes – en dehors de la première et de la dernière (1703) – sont construites sur la carte15. On retrouve ici, alors que l’on se situe au plus près du pouvoir royal, un usage cartographique qui se développe avec le xviiie siècle.
10Un simple passage en revue des dictionnaires permettra ici d’évoquer les premiers temps de ce changement. La Poste, dans ce cas, est en même temps le nom de l’institution et celui de la mesure qu’elle emploie pour construire ses tarifs. Qu’est-ce qu’une poste selon le Dictionnaire universel de Furetière en 169016 ? La définition, après en avoir décrit de nombreux types – lieu choisi pour observer, emplois, etc., mais aussi dans le sens de relais de poste, ainsi que de courrier –, finit par arriver à la partie qui nous intéresse : « Se dit aussi de l’espace qui est entre les deux maisons de poste. Chaque poste est d’une lieue & demie, ou de deux lieues. » On dit : « On donne tant par poste pour chaque cheval. Le courrier a fait quatre postes sur un cheval ; il a couru six postes cette nuit. » Soixante-dix ans plus tard, dans le Dictionnaire de l’Académie française, la poste est dite faire « environ deux lieues17 ». S’ajoute à la définition, encore une fois, l’idée qu’un cheval puisse courir plusieurs postes. Cent ans plus tard, soit en 1863, dans le dictionnaire Littré, on trouvera encore cette définition : « mesure de chemin ordinairement de deux lieues18 ». Il existe une constante approximation de la mesure postale. Elle fait environ deux lieues, mais peut-être un peu plus et probablement un peu moins.
11Qu’est-ce alors qu’une lieue ? Selon Furetière, elle est une « mesure des longueurs des terres, des chemins. Elles sont différentes selon les nations. En général on les estime à une heure de chemin ». La définition se termine par un retour sur la poste : « Une poste doit estre ordinairement de deux petites lieues, ou d’une bonne & grande lieue & demie. » Ce qui importe d’abord ici est la relation intime entre longueurs de terrain et temps. On est clairement là du côté des distances. En effet, à lire Furetière, la distance est un « esloignement d’une chose à l’égard d’une autre, soit pour le temps, soit pour le lieu ou la qualité ». Dans le même ordre d’idée, le mot « loin » est décrit comme étant un « adverbe de lieu et de temps qui sert à marquer la distance ». Quant au mot « longueur », il « se dit du temps aussi bien que du lieu ». À une époque où la séparation entre le temps et l’espace, lorsqu’il y a déplacement, est indistincte, la lieue – longueur de terre d’une heure de chemin – serait donc une mesure de cheminement. Ce qui importe ensuite dans cette définition est la liaison entre la lieue et la poste. Si le ratio entre les deux systèmes de mesure demeure flottant, leur équivalence de nature apparaît évidente. Dès lors, la poste est elle aussi une mesure de cheminement, entre espace et temps. Soixante-dix ans plus tard, le Dictionnaire de l’Académie décrit la lieue sans la rattacher au temps. C’est « un espace d’une certaine étendue, qui sert à mesurer la distance d’un lieu à un autre & qui contient plus ou moins de toises, selon les différents usages des provinces & des pays. Les lieues communes sont de deux mille deux cents quatre-vingt-deux toises, à vingt-cinq lieues par degré ».
12Notons ici les différences majeures. Tout d’abord, le rapport à la mesure s’est affiné. L’on ne se situe plus ici du côté des approximations, mais de celui des subdivisions d’unités : une lieue c’est 2282 toises et, en même temps, 1/25 de degré. Cette définition est à placer en miroir du débat sur la figuration de la distance sur la carte. Rappelons-le ici, la Poste avait participé aux réflexions sur cette question et des solutions avaient été proposées par Jaillot dès 1690 (doc. 9.04). De ce point de vue, la définition qui pose comme une équivalence les 2282 toises et le 1/25 de degré est la réitération d’une discussion passée. La diffusion des nouvelles mesures issues de la fabrication d’une nouvelle figuration du monde continue donc à avoir des conséquences, au-delà de la carte puisqu’elle fait évoluer les mesures, ces modes d’appréhension du monde20. Ajoutons que si les Livres de Poste sont un lieu de la diffusion de la carte, puisqu’à partir de 1713 ces ouvrages en proposent de manière optionnelle (doc. 1.17), ils maintiennent longtemps une distance entre figuration cartographique et description des itinéraires. Ainsi la carte fournie dans ces livres à partir de 1714 ne peut-elle pas servir à construire son voyage. Ses dimensions (environ 10 × 10) et son niveau de détail rendent la chose impossible. Elle montre la France, mais malgré une référence aux travaux de l’Académie pour construire sa légitimité technique, elle ne permet pas de lire des distances entre les relais (doc. 9.01). Il faudra attendre les années 1770 pour qu’une carte détaillée apparaisse.
13Reste ici la question de la vitesse, ou, plus précisément, celle de la relation entre le changement de lieux et le temps de ce changement. Qu’en est-il de l’idée de vitesse en ce qu’elle correspond à la construction mathématique d’un rapport entre distance et temps ? En premier lieu, et cela mérite d’être noté, le mot « vitesse » est absent du Dictionnaire universel de Furetière de 1690 alors qu’il est présent dans celui de l’Académie de 1762, sous la forme d’un rapport entre distance et temps. Si le mot existe avant Furetière puisqu’on le trouve dès le xiie siècle, ce qu’il faut retenir ici est que son sens de rapport mathématique entre une distance et un temps n’apparaît que dans le deuxième tiers du xviiie siècle chez les spécialistes du mouvement21, et plus précisément chez ceux qui s’intéressent aux astres. Il ne se diffuserait qu’ensuite, quittant l’infiniment grand pour le terrain de la pratique sur lequel les instruments de précision se mettent en place.
14La lieue appartient donc à un système complet de description qui va de la toise – et donc en partie de la mesure de l’homme – au globe. Ensuite, mais c’est en un sens une autre façon de le dire, elle a intégré un système abstrait de description du monde. L’articulation de la mesure de distance à celle du degré s’appuie sur les travaux de l’Académie des sciences qui participent de ses activités cartographiques. En produisant une nouvelle forme de distance, ces travaux, qui ont pour origine la carte de France par triangulation, mènent aux premières contradictions entre figuration de l’espace et figuration du territoire. On l’a vu, la tension entre distance à vol d’oiseau et distance sur le terrain est l’un des freins à la diffusion que les producteurs de cartes ont rencontrés. Il faudra attendre le milieu du xixe siècle pour qu’une institution comme la Poste aux Lettres intègre ce nouveau discours dans ses productions. Ce n’est en effet que dans l’Annuaire des Postes pour 184322 (doc. 9.03) qu’une mise en rapport claire entre distance et temps se met en place par un tableau. À cette date, le mot « vitesse » n’est pas encore utilité dans l’institution. Il faudra encore attendre près de quarante ans (1880) pour que des cartes par anamorphose aboutissent à une figuration de la vitesse23.
15Ce moment est donc celui où une articulation nouvelle entre une forme d’espace et une forme de temps se met en place. La carte n’est pas à l’origine de cette mutation, l’accélération des moyens de transport l’explique probablement plus. Mais sa modélisation – entendons sa construction par la pensée – passe, en revanche, par la figuration cartographique qui est l’un des lieux de son enregistrement autant que de sa compréhension. Le parallèle entre d’une part ce changement du rapport au territoire par la fabrication puis la diffusion d’un objet comme la carte, et d’autre part le changement du rapport au temps qui amène une profonde mutation dans la nature du récit que l’on en fait – un changement d’historicité pour reprendre les propos de Koselleck – apparaît flagrant. Pour autant le modèle est-il réutilisable pour penser un changement du rapport au territoire, ce que nous appellerons ici un changement de géographicité ? Pour tenter ce rapprochement, il convient tout d’abord de revenir sur les propositions de Koselleck, en les étendant à ceux qui ont travaillé ses idées par la suite, pour ne s’approcher qu’ensuite de la géographicité qui a également connu des usages variés.
2. Historicité et géographicité
16Nous l’avons vu, Koselleck a évoqué la surprise, au tournant des xviiie et xixe siècles, de Schlegel devant « la bataille d’Alexandre », tableau peint par Altdorfer en 1529, et dans lequel les armées sont anachroniquement vêtues d’armures du xvie siècle. Le rapport au temps prérévolutionnaire s’appuyait sur une pensée de l’histoire cyclique. Il s’oppose à un second rapport temporel qui exige l’exactitude et qui repose sur l’idée d’un progrès historique. La démonstration peut se résumer à travers les changements de sens du mot « révolution ». Avant la fin du xviiie siècle, c’est d’abord l’idée d’effectuer un cycle de rotation. Au xixe siècle, la révolution est devenue une rupture dans l’ordre du temps. Si cette rupture avait été restreinte, elle ne se serait certainement pas appliquée à un aussi large spectre de vocabulaire, qui va de l’anachronisme jusqu’à la révolution. C’est probablement de là que l’idée est venue à Lenclud et Hartog de vouloir étendre l’idée d’historicité par l’adjonction du mot « régime ». Sauf erreur, et transformation forte dans la traduction, Koselleck préférait la métaphore géologique de la strate : il parlait ainsi dans le chapitre sur « la sémantique des concepts de mouvement dans la modernité » de « strates d’expérience acquise et d’expérience à faire25 ». La superposition des strates sert là à figurer le temps, qu’une coupe géologique permet d’interroger. C’était donc par toute l’épaisseur des actions humaines et des rapports au temps que l’historien allemand semblait vouloir construire sa réflexion.
17L’une des difficultés au passage de l’historicité à la géographicité réside dans le fait que la pensée de Koselleck se situe à l’intérieur de ce que par commodité nous appellerons un paradigme braudelien de l’espace. Lequel ne se limite pas aux seules conceptions de Fernand Braudel, mais celui-ci, avec la géohistoire, est la figure de proue des réflexions sur l’espace chez les historiens de l’époque où Koselleck écrit26. En effet, l’espace est chez ce dernier une métastructure. Autrement dit, si Koselleck pose qu’événement et structure sont deux catégories de pensée différentes, il précise que ce sont les évolutions des secondes qui mènent aux premiers, cela sans que l’on soit pour autant capable de les prédire. Il y a dès lors des structures évolutives. En revanche, l’espace est un structure a priori non évolutive, ou pour le moins plus stable. Ainsi, il est considéré que « la connotation spatiale, tendant au statique, impliquée par schicht (ung) dans le mot Geschichte, est donc métaphoriquement rappelé par le double emploi en allemand de l’expression Strukturgeschichte ». Dès lors, les aspects géographiques sont des données que seule la technique fait évoluer : à propos des structures, Koselleck écrit qu’elles se composent en différentes constellations auxquelles « s’ajoutent des données géographiques et spatiales en relation avec leur disponibilité technique, d’où résultent des possibilités durables d’intervention politique ou d’action économique ou sociale27 ». Par « disponibilité technique » c’est en apparence plus aux machines qu’aux formes de figuration que Koselleck pense ici. Malgré des métaphores spatiales récurrentes, au moins dans la traduction française, l’espace est peu pensé dans l’ouvrage – comme dans une bonne partie de l’historiographie allemande de l’après-Seconde Guerre mondiale.
18C’est dans ce contexte qu’il est possible de s’interroger sur l’idée de « rapport à » qui participe de l’historicité, mais dans le cadre de la géographie, et cela tout en conservant un intérêt fort tant pour le moment que Koselleck a interrogé que pour ceux qu’Hartog a mis en série28. Mais travailler la géographicité nécessite également de tenir compte des usages du concept chez quelques géographes29. Il semble que dans la langue française l’une des premières occurrences de la « géographicité » date des années 1920. C’est Paul Michotte, un géographe belge, qui l’utilise dans un texte sur les nouvelles orientations de sa discipline30. Ce qui intéresse Michotte dans ce texte, c’est de tenter de définir ce qui relève proprement de la géographie. C’est-à-dire ce qui peut être conçu comme l’objet de la discipline : « Ce que la géographie puisse légitimement revendiquer pour elle-même sans être accusée de rapine31. » À ce titre, la géographicité c’est le fait qu’un objet doive être prioritairement étudié par la géographie. Derrière cette définition, ce qui se joue c’est l’affirmation d’une discipline jeune. En effet, le processus de disciplinarisation de la géographie par intégration à l’université en tant que champ autonome est récent (fin du xixe siècle) et reste à l’époque discuté. La question est vive alors et le restera longtemps. La proximité entre histoire et géographie qui existait au xviiie siècle pour la France s’est en partie maintenue. Dès lors, définir des objets à proprement parler géographiques c’est affirmer la pertinence d’une institutionnalisation, voire, au-delà de la discipline, l’en éloigner de l’historicité : les objets ne dépendant pas du moment de l’institutionnalisation, ils raccrochent la discipline à une quasi-éternité, ce qui la consolide d’autant. Cette forme de définition de la géographicité permet de pointer la tension entre un savoir et une discipline, tout comme dans les analyses de Koselleck l’historicité, ou du moins son changement lié à la Révolution, participait de la constitution d’un savoir historique rénové.
19Une seconde approche de la géographicité renvoie, non à la définition disciplinaire, mais bien plutôt à la question de la relation existentielle de l’homme à son espace. Cette réflexion est cependant relativement récente. Les recherches d’antériorité, aptes à consolider ce courant disciplinaire, s’arrêtent aux travaux d’Éric Dardel qui, en 1952, avait publié un petit ouvrage, alors passé inaperçu : L’homme et la terre. Le livre est difficile par bien des aspects, depuis sa liberté de ton et sa littérarité jusqu’à sa construction en dialogue avec la phénoménologie de Martin Heidegger. L’ouvrage construit un « être au monde » qui passe par une situation et par une spatialisation. Il ne s’agit cependant pas ici d’une spatialisation de nature géométrique ou mathématique : Dardel écrit sur ce point que « la géographie autorise une phénoménologie de l’espace infini, inhumain du géomètre ou de l’astronome. Il nous installe dans un espace à notre dimension, dans un espace qui donne et répond, espace général et vivant, ouvert devant nous32 ». L’être au monde de Dardel refuse donc en partie les médiations techniques, ce qui peut se résumer dans l’idée d’une « expérience vive du monde33 » qui définirait alors l’objet de la géographie.
20Deux modèles donc, dont l’un fait de la géographicité le caractère propre des objets de la géographie au moment d’une inquiétude disciplinaire, et dont l’autre vise à une renégociation intégrale de la nature de la discipline géographique au profit d’interrogations sur l’être au monde. C’est sur cette deuxième proposition que je souhaite ici m’arrêter pour m’intéresser à deux projets divergents qui me semblent être issus des réflexions de Dardel.
3. Régimes de géographicité
21Le premier projet est celui présenté récemment par Jean-Marc Besse dans l’ouvrage Historicités publié par Christian Delacroix, François Dosse et Patrick Garcia à la suite de travaux d’Hartog. Besse y propose une réflexion sur la géographicité adossée au livre de Dardel34. Le texte discute de ce « à quoi pourrait correspondre, au sein de la géographie, la notion de “régime de géographicité” ». Pour Besse, la pertinence de la question réside dans l’existence de multiples formes de relations entre l’homme et son espace, ce que les travaux d’histoire et d’anthropologoie culturelle démontrent. Partant, il compose un possible programme de recherche qui passerait par la découverte d’universaux (l’ici/là-bas, le sentiment d’inclusion, la dimension, etc.) et des pratiques différentielles qu’ils sous-entendent.
22Un second projet, plus ancien, est dû à Claude Raffestin, professeur de géographie à Genève, proche des groupes de réflexion français sur la discipline depuis le fin des années 1970. C’est l’idée du rapport à la terre, par opposition à une étude de l’espace, qui est au cœur des recherches de Raffestin. Là encore le poids des écrits de Dardel est patent. Mais Raffestin introduit un double décalage. D’abord en posant la question par rapport à la discipline, et ensuite en posant son acceptation de la géométrie en géographie, car il ne s’agit pas de refuser telle ou telle pratique, mais de rechercher un « paradigme qui prenne à bras le corps la connivence de l’homme et de la terre35 ».
23Deux projets donc qui abordent la question, soit du côté des formes générales de la relation à l’espace, soit de celui de l’inquiétude disciplinaire. Essayons sur les acquis de l’enquête menée dans ce livre de proposer une troisième possibilité. Partons de la question du régime – évoquée plus haut – en l’opposant pour commencer à la métaphore de la strate. Les limites de cette dernière résident dans la conception temporelle qu’elle suppose. Chaque strate y est autonome et correspond à une épaisseur de matériaux homogènes dans leur nature et dans leur agrégation. Le passage d’une strate à une autre s’effectue par un changement de matériaux, voire par une modification dans l’agrégation de ceux composant la nouvelle couche. Il n’y a pas de communication entre les strates et les seuls éléments temporels relèvent de la succession : ce qui est en bas est plus ancien. Ce n’est que si l’on s’intéresse à la coupe géologique, encore appelée coupe stratigraphique, qu’il est possible d’isoler des processus temporels plus complexes, qui vont permettre de tenter un bilan de l’histoire du paysage, produit tant par la succession des strates que par les érosions différentielles, voire les bouleversements ayant lieu à d’autres échelles. Jamais dans Le futur passé, Koselleck ne renvoie à cette forme de métaphore. À cela, au moins une explication simple : l’objectif de son livre n’est pas de dresser un bilan au présent, mais de montrer le basculement d’un état d’équilibre vers un autre. Inversement, la métaphore du régime, qui selon Hartog et Lenclud relève du mélange, de la mixité, mais ne renvoie fortement au temps que dans le cadre des catégories de l’histoire, semble ici particulièrement pertinente.
24Quant à la géographicité, il est nécessaire de construire une réflexion l’articulant, selon d’autres modalités, avec l’historicité et qui permette, non seulement de tenir compte du changement du rapport à l’espace, mais encore d’interroger la relation aux savoirs sur l’espace. Par géographicité, nous entendrons donc, en prenant appui pour partie sur les travaux de Dardel et de Besse, ainsi que sur les réflexions de Koselleck sur l’historicité, une relation, le « rapport à », que l’on retrouve chez ces auteurs. Chez Koselleck, c’est la médiation du rapport à un savoir qui est reprise, en posant, comme lui et comme Raffestin, l’importance des savoirs et des disciplines dans l’histoire de notre « rapport à ». Cela amène d’une part à changer de vocabulaire et à préférer au « rapport au » temps ou à l’espace, l’idée d’expérience du temps ou de l’espace36. Expérience qui signifie non seulement la pratique du « rapport à », avec la question de la nouveauté de ce rapport dans le cadre d’une « première expérience », mais aussi l’accumulation de savoirs liés à une succession de ces pratiques, et donc l’apprentissage. Cela permet en même temps d’insister sur l’idée de culture de l’espace tout en refusant celle d’un savoir naturel du rapport à celui-ci au profit d’usages de savoirs fabriqués au croisement d’expériences aux morphologies diverses. Cela conduit en outre à revenir sur la fabrication des disciplines par la diffusion de nouvelles formes de savoirs qui se sédimentent en s’institutionnalisant.
25Dans ce cadre, il est clair que les années 1720-1740 sont celles d’une rupture. Une première phase de croissance de la diffusion de la carte est suivie d’un recul puis d’une autre phase de croissance, rendue possible par des innovations techniques qui vont de la gravure en taille douce aux procédures mises en place par les relieurs pour intégrer les cartes dans les livres. La première phase, au xviie siècle, est celle d’un objet cartographique relativement rare en situation de concurrence forte. Sans les hiérarchiser, il est possible de fournir une liste de ces concurrents, de la table au blason, du registre au dictionnaire, voire du globe à la figuration paysagère. Cette phase s’épuise avec la constitution d’un nouveau rapport au monde qui relève en même temps de la carte et des mesures, voire de la distinction en voie de durcissement entre sciences et arts. Des formes d’intelligibilité du réel qui passaient par la description et l’idéal du vrai doivent maintenant coexister avec des modélisations mathématiques et un idéal d’exactitude dont les ingénieurs du Génie seront par exemple les porteurs. La deuxième phase, après les années 1740, est celle d’une carte plus commune dont la légitimité s’appuie sur une alliance avec des professions en cours de fabrication, ou de reconstruction. Celle du géographe d’abord, mais également celles des feudistes et des ingénieurs. Néanmoins le xviiie siècle n’est pas pour autant un moment simple pour la carte. En effet, l’affirmation tardive de la cartographie géométrico-astronomique sous-entend la survivance de modèles de figuration, érudit d’un côté, à vue d’un autre, qui montrent tout l’intérêt du concept de régime pour comprendre les changements de géographicité.
26On aurait certainement pu étendre le raisonnement à d’autres activités. La mutation des représentations de la relation entre le roi de France et la carte aurait ici permis la composition d’un riche dossier iconographique. Le monde de la mer37 aurait de même offert un terrain intéressant, autant que celui de la géologie38; voire des formes de statistique, comme la démographie des années 178039, ou les recherches sur l’impôt de Lavoisier40. Un travail sur la carte lors du découpage départemental conçu par la Révolution française, et cela à divers niveaux, aurait permis de composer une réflexion à différentes échelles. Multiplier les dossiers n’aurait cependant pas fait fortement évoluer la question. Pour l’essentiel, le rapport au monde dont il s’agit nous est connu. C’est plus le changement de régime qui méritait ici d’être interrogé au regard de la question posée à l’orée de ce texte. En quoi une mutation du rapport à la carte peut-elle avoir des conséquences quant à notre compréhension du monde ? En quoi un indice comme la diffusion des navigateurs par GPS dans les automobiles peut-il être compris comme l’un des éléments d’un changement dans le régime de notre géographicité ? À ces questions, ce livre n’apporte pas de réponse directe, il offre plus modestement une proposition de réélaboration des questionnements.
27Était-il enfin possible d’imaginer au cœur de la géographicité un concept subissant des modifications similaires à celles que la révolution ou l’anachronisme ont connues ? Il faut au préalable se méfier des parallèles un peu trop rapides entre espace et temps. Ce n’est pas parce que notre expérience de l’un se compose d’une façon, que celle de l’autre doit suivre la même forme. On peut cependant évoquer la question de l’accélération et de sa description comme une rétraction du monde. Les réflexions sur ce point attendront principalement l’arrivée du chemin de fer qui, par sa vitesse, change le rapport au déplacement. L’intéressant est ici la construction du discours qui se pose régulièrement sur la carte pour la voir se réduire comme peau de chagrin. De ce point de vue la carte est une aide précieuse pour penser l’accélération.
Notes de bas de page
1 Joachim Heinrich Campe, Kolumbus, oder, Die Entdekkung von Westindien : ein angenehmes und nüzliches Lesebuch für Kinder und junge Leute, Tübingen, Bey Wilh. Heinr. Schramm und Joh. Friedr. Balz, 1782.
2 Hélène Blais, Voyages au Grand océan. Géographie du Pacifique et colonisation 1815-1845, Paris, Éditions du CTHS, 2005.
3 Reinhart Koselleck, Le futur passé, contribution à la sémantique des temps historiques, Paris, Éditions de l’EHESS, 1990 (1re éd. en allemand, sous le titre Vergangene Zukunft : zur Semantik geschichtlicher Zeiten, 1979).
4 Jean Boutier, « Réduire les villes en cartes. L’invention d’un regard non figuratif dans l’Europe moderne », dans Myriame Morel-Deledalle (dir.), La ville figurée. Plans et vues de Marseille, Gênes et Barcelone, Marseille, Éditions Parenthèses/Musées de Marseille, p. 23-31.
5 François Hartog et Gérard Lenclud, « Régimes d’historicités », dans Alexandru Dutu et Norbert Dodille (dir.), L’état des lieux en sciences sociales, Paris, L’Harmattan/Institut français de Bucarest, 1993, p. 18-38.
6 Antoine de Rivarol, Dictionnaire classique de la langue française, Paris, Bruno Labbe, 1828.
7 François Raymond, Dictionnaire général de la langue française, Paris, Aimé André, 1832.
8 Supplément au Dictionnaire de l’Académie française, Paris, Gustave Barba, 1838.
9 Adriano Balbi, Abrégé de géographie rédigé sur un nouveau plan, Paris, Renouard 1833, p. xix.
10 Manuel Francisco de Barros e Sousa de Santarem, Essai sur l’histoire de la cosmographie et de la cartographie pendant le Moyen-âge et sur les progrès de la géographie après les grandes découvertes du xve siècle, pour servir d’introduction et d´explication à l’Atlas composé de Mappemondes et de portulans, et d’autres monuments géographiques, depuis le vie siècle de notre ère jusqu’au xviiie, Paris, Imprimerie Maulde et Renou, 1849.
11 Je remercie Catherine Hofmann pour la discussion que nous avons eue sur cette question et qui m’a ouvert les yeux sur ces usages. Sur ce point, on lira : Patrick Gautier-Dalché, La géographie de Ptolémée en Occident (ive-xvie siècle), Turnhout, Brepols, 2009.
12 Daniel Nordman, Frontières de France. De l´espace au territoire, xvie-xixe siècle, Paris, Gallimard, 1998, p. 45-53.
13 Catherine Hofmann, « La genèse de l’atlas historique en France (1630-1800) : pouvoirs et limites de la carte comme “œil de l’histoire” », Bibliothèque de l’École des chartes, 158/1, 2000, p. 97-128.
14 Daniel Nordman, Frontières de France…, op. cit., p. 45-53.
15 Sur ces questions on verra : Nicolas Verdier, « Dal territorio alla carta : posta a cavallo e acculturazione dei rapporti col spazio tra la fine del settecento e l’inizio dell’ottocento », Quaderni Storici, 131, août 2009, p. 579-606 ; Anne Bretagnolle et Nicolas Verdier, « La mesure postale, reflet des évolutions dans le rapport au temps et à la distance au siècle des lumières », Cahiers de métrologie, 22-23, 2005, p. 63-74.
16 Antoine Furetière, Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots français tant vieux que modernes, & les termes de toutes les sciences et des arts, Rotterdam, Der Ausgaben den Haag, 1690.
17 Académie française, Dictionnaire de l’Académie française, Paris, chez la veuve Brunet, 1762.
18 Émile Littré, Dictionnaire de la langue française, Paris, Hachette, 1863.
19 Bernard Jean Hyacinthe Jaillot, Carte générale des Postes de France, dans le Livre de Poste de 1714.
20 Witold Kula, Les mesures et les hommes, Paris, Éditions de le MSH, 1984.
21 Article « Vite » dans Alain Rey (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1992.
22 C. Viard, Annuaire des postes pour 1843, ou manuel du service de la Poste aux lettres à l’usage du commerce et des voyageurs…, Paris, Hôtel des Postes, janvier 1843, p. 162.
23 Gilles Palsky, Des chiffres et des cartes, la cartographie quantitative au xixe siècle, Paris, Éditions du CTHS, 1996.
24 Alexis-Hubert Jaillot, Carte Particulière des Postes de France, Paris, Jaillot, 1690.
25 Reinhart Koselleck, Le futur passé…, op. cit., p. 263. Une discussion avec Jochen Hook, traducteur de l’ouvrage laisse entendre que c’est bien le sens de la métaphore utilisée par Koselleck.
26 Nicolas Verdier, « Les relations entre histoire et géographie en France : tensions, controverses et accal mies », Storica, 40, 2009, p. 64-114.
27 « Représentation, événement et structure », 3e chapitre de la deuxième partie de Reinhart Koselleck, Le futur passé…, op. cit., p. 133-144 (1re édition en allemand, sous le titre « Darstelung, Ereignis und Struktur » 1973).
28 François Hartog, Régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, 2003.
29 Marie-Claire Robic, « Géographicité », Hypergéo, 3 mai 2004, en ligne ; Jean-Marc Besse, « Remarques sur la géographicité. Généalogie du mot, enjeux, épistémologiques et historiographiques », dans Christian Delacroix, François Dosse et Patrick Garcia (dir.), Historicités, Paris, La Découverte, 2009, p. 285-300.
30 Paul Michotte, « L’orientation nouvelle en géographie », Bulletin de la Société royale de géographie, 1922, p. 1-39.
31 Ibid., p. 13.
32 Éric Dardel, L’homme et la terre, Paris, Éditions du CTHS, 1990, p. 35.
33 Jean-Marc Besse, « Géographie et existence d’après l’œuvre de Dardel », dans Éric Dardel, ibid., p. 165.
34 Jean-Marc Besse, « Remarques sur la géographicité… », art. cité.
35 Claude Raffestin, « Théorie du réel et géographicité », EspaceTemps, 40-41, 1989, p. 26-31.
36 Sur ce point, Bernard Lepetit, Les formes de l’expérience, une autre histoire sociale, Paris, Albin Michel, 1995.
37 On trouve quelques éléments sur l’apprentissage de la carte, ou du moins d’une forme cartographique, dans Renaud Morieux, Une mer pour deux royaumes. La Manche frontière franco-anglaise, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008.
38 Sur la géologie, on verra les travaux d’Isabelle Laboulais dont : « Le voyage, la synthèse et la carte : quelques remarques sur les jeux de production et de légitimation de la connaissance au travers des correspondances de Pasumot et Desmarest (1762-1770), d’Omalius d’Halloy et Coquebert de Montbret (1810- 1812) », Les fruits de la récolte. Études offertes à Jean-Michel Boehler, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2007, p. 457-477 ; « Entre minéralogie et statistique territoriale : les enquêtes du Journal des mines entre l’an III et l’an VII », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 55/4, 2008, p. 57-81 ; « Inventorier et cartographier les ressources minérales en France des années 1740 aux années 1830 », dans Jean-Marc Besse, Hélène Blais, Isabelle Surun (dir.), Naissances de la géographie moderne (1760-1860) : lieux, pratiques et formation des savoirs de l´espace, Lyon, ENS Éditions, 2010, p. 101-123.
39 On verra, par exemple les travaux d’Éric Brian sur la démographie dans La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, 1994. Id. : « Nouvel essai pour connaître la population du royaume. Histoire des sciences, calcul des probabilités et population de la France vers 1780 », Annales de démographie historique, 2, 2001, p. 173-222.
40 Antoine-Laurent de Lavoisier, De la richesse territoriale du royaume de France, textes et documents présentés par Jean-Claude Perrot, Paris, Éditions du CTHS, 1988.
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