Chapitre I. La « perte de la Chine »
p. 113-125
Texte intégral
1Malgré plusieurs décennies d’incompréhensions et parfois de sentiments de trahison, les Américains sont horrifiés de constater leur « perte de la Chine » en voyant cette dernière tomber dans le camp soviétique1. Cette soi-disant perte – une idée pour le moins saugrenue mais révélatrice de l’attitude très paternaliste des États-Unis à l’égard de la Chine – est très durement imputée au président Harry Truman, mais aussi et surtout aux China Hands qu’on désigne comme les principaux responsables2. Un an plus tard, la « peur des rouges » (Red Scare) attisée par le sénateur McCarthy fera tomber l’Amérique dans la paranoïa généralisée. Selon Harold Isaacs, la « perte de la Chine », très douloureusement éprouvée aux États-Unis, était aussi une « perte » parmi tant d’autres, un échec qui avait aussi à voir avec la perception que l’Amérique avait d’elle-même3.
2Toutefois, entre la proclamation de la RPC le 1er octobre 1949 et le discours retentissant du sénateur Joseph McCarthy à Wheeling en Virginie-Occidentale le 9 février 1950, les États-Unis – tout au moins l’administration – s’en tiennent à accepter à contrecœur la victoire des communistes chinois et à observer avec un certain attentisme le développement de la situation dans la région. En effet, il reste à savoir quel sera le sort de Chiang Kai-shek et du Guomindang réfugiés sur l’île de Taiwan – question à laquelle est suspendue celle de la reconnaissance de la République populaire de Chine par Washington, car, comme l’a parfaitement résumé le journaliste et essayiste Walter Lippmann en 1949 : « Chiang’s destiny became our destiny in China and so, when he went down, he took us down with him4 ». Washington ne peut effectivement rien officialiser tant que le généralissime, dont le gouvernement prétend représenter la Chine, n’a pas été vaincu et que l’île n’a pas été réintégrée au continent. Mais la chute de Chiang semble alors n’être qu’une question de semaines, de mois tout au plus5.
La question de la reconnaissance de la RPC
3Pendant la dernière phase de la guerre civile chinoise, l’administration Truman a donc pris acte de l’échec annoncé des nationalistes et accepté avec résignation une victoire des communistes, anticipant même les critiques de la « perte de la Chine » en publiant le China White Paper6, et elle envisage déjà la possibilité d’une stratégie de « fragmentation » du bloc communiste (splitting strategy) en encourageant le titisme en Chine – autrement dit, la non-allégeance à Moscou. C’est d’ailleurs la stratégie à laquelle songe l’administration depuis 1948 et celle que le NSC préconise à nouveau en décembre 1949, considérant qu’il ne serait pas souhaitable que les États-Unis se montrent encore plus hostiles vis-à-vis de la « Chine rouge » qu’envers l’Union soviétique, comme l’annonce sans ambages le secrétaire d’État Dean Acheson devant la Commission des relations extérieures du Sénat en 1950 : « What we are concerned with in China is that whoever runs China, even if the devil himself runs China, that he is an independent devil. That is infinitely better than if he is a stooge of Moscow or China comes under Russia7. » La stratégie de « fragmentation » est alors une réponse aux contraintes stratégiques (la priorité à l’Europe) et budgétaires auxquelles est soumise l’administration. En d’autres termes, il s’agit de poursuivre l’endiguement à bas coût8.
4Début 1950, Truman tâche d’adopter une ligne politique « neutre » vis-à-vis de la situation chinoise : il annonce, le 5 janvier, que l’aide économique au Guomindang continuera, mais que l’assistance militaire cessera9. On pourrait parler alors de Realpolitik, d’autant que les priorités de l’administration se portent sur l’Europe et le Japon. Mais les événements, tant sur le plan intérieur que sur le plan extérieur, s’enchaîneront de telle sorte que cette « neutralité » ne pourra durer que quelques mois.
5La Chine a obtenu un siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies lors de la réunion de Dumbarton Oaks, en août-septembre 1944, mais c’est Chiang Kai-shek qui continue de la représenter malgré sa fuite à Taiwan, puisque Washington refuse de reconnaître la légitimité de la RPC tant que se maintient le régime du Guomindang. Pourtant, dès le 6 janvier 1950, la Grande-Bretagne, en dépit des pressions de Washington, reconnaît le nouveau régime en place à Pékin10. Son exemple est suivi par un certain nombre de pays européens (Danemark, Finlande, Pays-Bas, Suède et Suisse), mais la France s’y refuse, car Pékin reconnaît de son côté la République démocratique du Vietnam en janvier 1950, tandis que les troupes françaises sont toujours engagées dans la guerre d’Indochine. C’est d’ailleurs la victoire communiste en Chine et la crainte de « l’effet domino », à savoir que d’autres pays suivent l’exemple chinois et tombent dans le camp communiste, que Washington prête soudain plus d’attention à la situation en Indochine (Vietnam, Cambodge, Laos) et décide d’aider financièrement la France à maintenir ses colonies. Les raisons pour lesquelles les États-Unis refusent l’indépendance de l’Indochine, puis du Vietnam, sont multiples : tout d’abord Washington souhaite que la France soit un allié dans la guerre froide ; ensuite le Sud-Est asiatique est une région importante pour sa production de matières premières comme le caoutchouc, mais aussi comme marché potentiel pour les exportations ; enfin, la région est stratégiquement cruciale pour la défense des Philippines et du Japon. Progressivement, donc, les États-Unis vont se trouver de plus en plus impliqués dans la région jusqu’à s’enliser dans la guerre du Vietnam.
6Le 12 janvier 1950, Dean Acheson répond aux détracteurs de Truman qui, suite à son discours du 5 janvier, l’accusent d’abandonner Taiwan et de ne pas avoir mis tout en œuvre pour sauver la Chine. Acheson évoque la Corée et analyse ce qu’il nomme le « périmètre de défense » des États-Unis en Asie – périmètre à l’intérieur duquel la péninsule coréenne ne semble pas figurer. Certains ont considéré que cette omission de Dean Acheson donna le feu vert aux Nord-Coréens pour attaquer la Corée du Sud. Dean Rusk, en revanche, indique dans ses mémoires qu’Acheson n’avait pas l’intention d’abandonner la Corée, mais que son discours fut en grande partie improvisé et, par conséquent, mal interprété par les pays communistes11.
7Si l’administration Truman bénéficie d’un large consensus sur l’inutilité d’aider un régime voué à disparaître et attend donc la chute prochaine du Guomindang, un certain nombre de facteurs changent toutefois rapidement la donne en ces premiers mois de 1950, à commencer par la signature du pacte sino-soviétique au mois de février. La guerre froide impose en effet au reste du monde de choisir son camp entre les blocs soviétique et américain ; or, pour Pékin, le rapprochement avec Moscou est la seule option possible, non seulement en raison du refus de Washington de reconnaître le nouveau régime en place, mais aussi parce que la RPC perçoit elle-même les États-Unis comme l’hégémon12. Malgré la signature du pacte, les relations sino-soviétiques n’en sont pas moins crispées – une crispation renforcée par les personnalités de Mao et de Staline – car il faut rappeler que Moscou avait toujours soutenu Chiang Kai-shek et poussé les communistes chinois à s’allier au Guomindang pendant l’entre-deux-guerres, avec les conséquences désastreuses que l’on sait pour le PCC13. Cette apparente cristallisation du bloc communiste n’est pas de bon augure, mais Washington n’abandonne pas l’idée que les relations avec Pékin devraient s’apaiser dès que le régime de Chiang Kai-shek tombera. La reconnaissance de la RPC, en somme, devait sous peu s’imposer d’elle-même14.
8Cette reconnaissance diplomatique de la légitimité du régime communiste à Pékin aurait été particulièrement périlleuse pour l’administration tant que le bastion de Chiang Kai-shek n’était pas vaincu. Autant dire qu’elle devient pour ainsi dire impossible avec le développement du maccarthysme dès les premiers mois de 1950. En effet, les détracteurs de Truman cherchent à lui faire portée la responsabilité de la « perte de la Chine » qui, symboliquement, devient alors un argument de politique intérieure.
9Au moment même où le maccarthysme se développe aux États-Unis, le Conseil de sécurité nationale adopte une stratégie plus offensive. Dès janvier 1950, Truman ordonne de lancer les recherches pour développer la bombe à hydrogène afin que les États-Unis ne se laissent pas dépasser par l’Union soviétique dans la course à la suprématie nucléaire. En avril, dans un rapport top secret appelé NSC-68, le Conseil de sécurité nationale conclut que le gouvernement devrait accroître le budget militaire et préparer l’opinion publique à une phase plus offensive de la guerre froide15. En ce sens, le rapport NSC-68 marque le début « officieux » de la seconde phase de la politique d’endiguement, tandis que le déclenchement de la guerre de Corée l’« officialise ». Les conclusions du rapport NSC-68 mène en réalité à l’implication croissante de l’Amérique dans la guerre de Corée qui débute en juin 1950 : non seulement les États-Unis vont résister aux « tendances expansionnistes » soviétiques, mais ils vont également combattre pour conserver certaines régions dans le « monde libre » (free world). Ainsi, la guerre de Corée va radicalement changer la nature de la guerre froide.
10L’administration Truman a en partie préparé le terrain aux excès du maccarthysme en alimentant elle aussi la suspicion et la paranoïa dans le pays. En effet, afin de convaincre l’opinion publique et le Congrès d’augmenter le budget de la défense, la rhétorique de l’exécutif a condamné toujours plus violemment le danger communiste auprès du public, même si les analyses du Pentagone et du département d’État se sont révélées, dans l’ombre, nettement plus nuancées. De même, afin d’éviter toute manifestation de faiblesse, Washington a adopté un ton particulièrement tranché envers le bloc non plus seulement « soviétique », mais « communiste » en général, incluant de ce fait la RPC.
Le maccarthysme et les China Hands
11La thèse de la « perte de la Chine » n’est évidemment pas sans lien avec la soi-disant « relation spéciale » que les Américains auraient entretenue avec la Chine depuis les notes sur la Porte ouverte de John Hay. En la voyant tomber dans le giron communiste, l’Amérique aurait donc « perdu » la Chine, cette supposée « amie » de longue date dans l’imaginaire américain. Le mythe a perduré, mais cette fois-ci en s’inversant, l’amie devenant ennemie. Il est d’ailleurs frappant de constater que non seulement la vision américaine de la Chine devient négative du jour au lendemain, mais aussi que le Japon et la Chine échangent une fois de plus leurs places pour incarner le « péril jaune » dans l’imaginaire américain16. Les États-Unis ont été pris au piège de leurs illusions, mais le leurre pernicieux de la « relation speciale » demeure si fort que les dirigeants américains continueront néanmoins de s’y référer, même après la rupture diplomatique17. Dean Rusk, par exemple, reconnaît certes que les Américains faisaient montre d’une certaine condescendance envers la Chine, mais il rappelle aussi toute leur bienveillance et conclut : « As a result, our reaction to the fall of China in 1949 was that of a jilted lover18 ».
12Il faut rappeler une fois de plus que le mythe a par ailleurs été entretenu par la vision romantique de la Chine dont les alliés de Chiang Kai-shek font une active propagande tout au long de la guerre. Cette image trompeuse, dont a été nourrie la grande majorité des Américains, explique aussi pourquoi l’Amérique a facilement cru à la « perte de la Chine ». Henry Luce est d’ailleurs personnellement embarrassé par la tournure des événements : alors que son empire médiatique a « vendu la Chine » aux Américains (en présentant l’Empire du Milieu comme un pays ami et Chiang Kai-shek comme le seul héros défendant vaillamment la nation, la chrétienté et l’idéal démocratique, et en mettant l’accent sur les soi-disant similitudes entre l’Amérique et la Chine), il ne peut renier ni l’ami Chiang, ni sa propre vision de la Chine au risque de se discréditer lui-même. Car si les deux pays sont censés être tellement similaires, l’Amérique ne court-elle pas autant de risques de subir le même sort que celui de la Chine, à savoir de tomber sous le joug communiste19 ?
13La Chine en tant que telle devient un sujet de controverse qui s’inscrit directement dans la politique intérieure des États-Unis. Ross Y. Koen écrira ainsi en 1960 : « United States policy toward China is more deeply involved in domestic politics than any other aspect of American foreign affairs20 ». En effet, au vu des réactions très émotionnelles provoquées par la prétendue « perte de la Chine » et par la « peur des rouges », les leaders politiques américains agiront beaucoup en fonction d’une peur anticipatrice de la colère de l’opinion publique21, répondant ainsi plus à des impératifs de politique intérieure qu’à l’intérêt national, notamment à cause du maccarthysme qui devient l’expression la plus caricaturale de l’utilisation de la Chine dans la politique intérieure des États-Unis.
14Jouant sur la peur et la paranoïa, McCarthy se lance dans une croisade anticommuniste, ou plus précisément antigouvernementale, alors même que le pays n’était probablement aucunement menacé par des infiltrations22. Ce sont les sinologues et les experts sur la Chine – les China Hands – qui sont accusés d’avoir « perdu la Chine23 ». Les premières cibles du sénateur sont d’abord le diplomate John S. Service qu’il accuse d’espionnage, rouvrant ainsi l’affaire de l’Amerasia de 1945-1946, puis le sinologue et universitaire Owen Lattimore, largement inconnu du grand public, que McCarthy présente pourtant en ces termes devant le Sénat le 30 mars 1950 : « I believe you can ask almost any school child who the architect of our far-eastern policy is, and he will say, “Owen Lattimore”24. » Une anecdote aussi amusante que tristement révélatrice rend compte de l’absurdité de ces accusations et de ces procès :
At one Senate hearing in 1950, McCarthy questioned [John] Service about what he saw as the curious fact that three China specialists (Service, Davies, and Vincent) all shared a first name. Was it « mere chance » McCarthy asked skeptically that « three Johns lost China »? Service retorted that actually « four Johns lost China ». Who was the fourth, McCarthy demanded. « John K[ai-]Shek », Service answered, to the delight of the audience. The diplomat won the verbal exchange, but soon lost his job25.
15Il faut rappeler qu’en 1950, parallèlement à la « question chinoise », les époux Rosenberg sont arrêtés pour espionnage pour le compte de l’URSS, tandis que deux autres suspects – Alger Hiss et Klaus Fuchs – sont déclarés coupables, facilitant les accusations sans preuve de McCarthy et alimentant la peur de la « cinquième colonne ». C’est d’ailleurs en raison de son rôle dans l’affaire Alger Hiss que Richard M. Nixon se fait connaître dans tout le pays comme un farouche anticommuniste, et il fera partie de tous ceux qui accuseront l’administration Truman de la « perte de la Chine26 ».
16Bien que la justice finisse par abandonner les poursuites contre lui, John S. Service est malgré tout révoqué du département d’État en 1951, puis blanchi par la Cour suprême et réintégré en 1957, mais ses chances de promotion resteront nulles. De même, les autres China Hands, notamment John Paton Davies ou John Carter Vincent, sont également victimes du maccarthysme et verront leurs carrières brisées27. Il va sans dire que cette purge prive le département d’État, et ce pour longtemps, d’experts et de sinologues, alors même que Washington s’interroge sur le nouveau régime en place en Chine continentale et doit réviser complètement sa « politique chinoise ».
17Le maccarthysme laissera des marques profondes dans les relations que les États-Unis entretiendront avec la Chine, puisque non seulement leur vision du pays en sera durablement altérée, mais l’autocensure généralisée empêchera la formulation d’une politique chinoise sinon cohérente, du moins réaliste, pendant plus de deux décennies. Car, outre la purge au sein du département d’État, toute personne s’intéressant à la Chine sera de facto suspecte, jusqu’aux sinologues et universitaires de renom dont le métier est justement d’étudier la Chine. En effet, en 1952, la Sous-commission sur la Sécurité Intérieure du Sénat conclura que les spécialistes de la Chine ont été les responsables du fourvoiement de la politique chinoise du pays et de la « perte de la Chine », affirmant sans ambages que « sans les machinations d’un petit groupe qui contrôlait l’IPR [Institute of Pacific Relations28], la Chine serait libre29. » Parallèlement, la paranoïa autour du soi-disant Red China Lobby (c’est-à-dire ceux qui soutiendraient les communistes chinois)30, inventé en grande partie par le China Lobby lui-même, est montée en épingle et continuera d’être alimentée soit par le Guomindang installé à Taiwan pour défendre ses intérêts, soit par les politiques américains pour leurs préoccupations électoralistes. De façon récurrente, les sinologues et autres experts sur la Chine seront donc accusés de travailler pour les communistes chinois.
18D’abord le refus de reconnaître la RPC, puis les accusations de « perte de la Chine », et enfin l’idée que le pays est gangrené par les « rouges » ont généré un traumatisme tel que les experts se sont autocensurés dans une large mesure. La période maccarthyste ne fait finalement que confirmer une tendance récurrente, à savoir la distorsion de la vision américaine de la Chine qui, fatalement, influe sur le cours des relations sino-américaines : la grille d’analyse, brouillée auparavant par le mythe paternaliste de la « relation spéciale », sera dorénavant déformée par celui de la « perte de la Chine ». Pour John S. Service, c’est bien ce mythe qui est responsable de l’entrée en guerre des États-Unis d’abord en Corée, puis au Vietnam, et qui a fait naître la « question de Taiwan »31.
La guerre de Corée et la « question de Taiwan »
19Si dès 1946, Winston Churchill constatait qu’un « rideau de fer » (Iron Curtain) divisait l’Europe en deux blocs ennemis, un « rideau de bambou » (Bamboo Curtain) tombe également sur le continent asiatique qui devient un autre champ de bataille dans la course à la suprématie. Car avec la chute des puissances coloniales s’amorce un mouvement de décolonisation qui, conjointement à la montée des nationalismes, se calque en partie sur la division des blocs soviétique et américain. La Corée en est la première démonstration lorsque, après la séparation du pays en deux États en 1948, la guerre civile éclate avec l’offensive du Nord communiste contre le Sud pro-américain.
20Alors que l’Europe a été jusque-là le principal « théâtre d’opérations », l’Asie devient un « second front » quand le 25 juin 1950 les troupes nord-coréennes franchissent le 38e parallèle qui délimite la frontière entre les deux États. Avec le déclenchement de la guerre de Corée, la guerre froide devient une « guerre chaude » sur la scène asiatique. Par ailleurs, les questions liées à la politique chinoise de Washington – notamment la reconnaissance de la RPC et le soutien à Chiang Kai-shek à Taiwan – prennent une tout autre tournure et sont une fois de plus dictées par les événements.
21Deux jours seulement après l’offensive nord-coréenne, Truman prononce un discours emblématique de sa doctrine selon laquelle le « monde libre » doit endiguer l’expansion du communisme, tout en suivant ce que préconise le rapport NSC-6832. Par ce discours, il officialise par la même occasion ce qui deviendra la « question de Taiwan » en interposant les États-Unis dans la guerre civile chinoise, considérée par Pékin comme inachevée tant que la province renégate n’est pas revenue dans son giron : la 7e flotte est envoyée dans le détroit pour s’opposer tant à l’attaque de la RPC contre Taiwan qu’à celle de Taiwan contre la Chine continentale. Ainsi, on ne peut que souscrire à l’analyse de Nancy Bernkopf Tucker selon laquelle « l’ambiguïté stratégique » autour de la question de Taiwan ne date pas de l’ouverture de Nixon en 1972 mais bien de 1950, lorsque Washington, par cette « neutralisation de Taiwan », adopte implicitement la politique d’« une Chine, une Formose », autrement dit la reconnaissance officieuse de deux entités politiques de part et d’autre du détroit33.
22Si l’opinion publique américaine était jusqu’alors majoritairement opposée à une aide militaire à Chiang Kai-shek, elle y est soudain de plus en plus favorable après le début des hostilités en Corée et la manifestation de l’agression communiste34. Chiang y voit l’occasion de reprendre la Chine continentale en entraînant les forces américaines dans le combat. C’est pourquoi, le 19 juillet, Truman proclame au Congrès l’opposition de la Maison-Blanche à ce que la 7e Flotte soit utilisée à ces fins, mais il consolide les dispositifs du containment en renforçant l’aide militaire aux Philippines et en prêtant main-forte à la France dans la guerre d’Indochine35.
23Malgré sa réticence à charger MacArthur – qu’il apprécie très peu – du commandement militaire en Corée, Truman veut probablement éviter des critiques acerbes de la part de ses ennemis politiques qui l’accusent d’avoir « perdu » la Chine et ne manquent pas de tirer à boulets rouges sur l’administration à la moindre occasion. MacArthur, toutefois, agira souvent à sa guise, parfois sans même prendre la peine d’avertir la Maison-Blanche de ses décisions, à l’instar de son arrivée à Taiwan le 31 juillet pour une visite de deux jours au cours de laquelle il annonce à Chiang Kai-shek qu’il a le soutien plein et entier des États-Unis et, semble-t-il, qu’il peut même envisager une attaque contre la Chine continentale. Truman est ainsi contraint de répondre le 4 août à ce qu’il perçoit comme une provocation en réaffirmant publiquement la neutralisation du détroit. MacArthur persiste et signe en faisant parvenir à la presse le 26 août une déclaration prônant une politique d’agression (donc contre la neutralisation du détroit) afin de défendre Taiwan – déclaration que la Maison-Blanche doit de nouveau démentir36.
24Les États-Unis s’engagent donc dans une stratégie d’endiguement du bloc communiste selon les préconisations du rapport secret NSC-68, mais ils ne soupçonnent pas une possible entrée en guerre de la Chine qui a été ravagée par l’invasion du Japon et par plusieurs années de guerre civile, d’autant qu’ils n’ont pas encore abandonné une possible stratégie de « fragmentation » entre l’URSS et la RPC. Du point de vue de cette dernière, la présence militaire américaine dans le détroit de Formose démontre à l’évidence les objectifs bellicistes et l’intrusion de Washington dans les affaires chinoises, ce qui provoque en grande partie la décision d’entrer dans le conflit coréen. Les dirigeants communistes sont néanmoins divisés sur la question, car la puissance économique et militaire des États-Unis rend une victoire du camp communiste fortement sujette à caution. Mao y est toutefois favorable pour la propre sécurité du pays37. En effet, après avoir observé le déploiement des forces américaines dans le détroit de Taiwan, Pékin étudie avec inquiétude l’objectif de réunification coréenne qui semble confirmer la stratégie d’encerclement de la Chine continentale, voire d’attaque directe à venir. La disparition de la Corée du Nord est une perspective inenvisageable pour Pékin qui décide alors de renforcer les effectifs des « volontaires » massés à la frontière sur le fleuve Yalu.
25Effectivement, la défaite des forces nord-coréennes à Inchon en septembre 1950 a donné à MacArthur et à l’administration l’illusion que la victoire sur l’ensemble de la péninsule en vue d’une réunification de la Corée est à leur portée. D’où la décision de lancer l’offensive au nord du 38e parallèle, d’autant que ni MacArthur ni le Pentagone ne croient à une contre-offensive de la part de Pékin ou de Moscou, malgré les mises en garde de George Kennan ou de la CIA, et en dépit même des avertissements de Pékin. Début octobre, les forces des Nations unies sont proches du fleuve Yalu qui marque la frontière avec la République populaire de Chine. Mal préparés, mal équipés, à peine sortis de la guerre sur leur propre territoire, les Chinois créent la surprise en envoyant donc des « volontaires » franchir le fleuve Yalu le 25 octobre. La surprise est d’autant plus grande que le général MacArthur avait affirmé que jamais la RPC n’oserait participer à un conflit contre les Américains38.
26MacArthur ayant ordonné de poursuivre l’offensive vers la frontière avec la promesse qu’ils seraient tous « rentrés à la maison avant Noël » (Home-by-Christmas offensive), les troupes de « volontaires » chinois franchissent de nouveau le Yalu le 25 novembre pour affluer en Corée du Nord. Cette énorme contre-offensive chinoise change complètement le cours de la guerre, et la vision de cette « mer humaine » (human sea) ressuscite chez les Américains celle des hordes du « péril jaune39 ». Faisant de nouveau appel au mythe de la « relation spéciale » tout en suggérant la non-adhésion du peuple chinois au régime communiste en place, Truman déclare le 30 novembre : « Because of the historic friendship between the people of the United States and China, it is particularly shocking to us to think that Chinese are being forced into battle against our troops in the United Nations command40. » À la stupeur mondiale, les troupes dirigées par MacArthur doivent reculer et sont repoussées jusqu’à la hauteur du 38 e parallèle où les combats se maintiendront de longs mois durant. Au vu de la débâcle les premiers jours, Washington reconsidère rapidement ses priorités et remplace l’objectif de réunification de la péninsule par la recherche d’un armistice en accord avec la politique d’endiguement. Quant à l’hypothèse de reconnaître la RPC, elle est alors définitivement enterrée41.
27À partir de l’engagement de la République populaire de Chine dans la guerre de Corée, Washington cherche plus que jamais à isoler celle-ci sur la scène internationale, notamment en faisant pression aux Nations unies pour imposer un embargo sur les ventes stratégiques et refuser la reconnaissance de la RPC comme le gouvernement légitime de la Chine, mais aussi en signant en 1951 une série de traités de défense mutuelle d’abord avec les Philippines, puis avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande (ANZUS), et enfin avec le Japon. Ces traités sont eux aussi l’illustration de la politique d’endiguement.
28Pour Pékin, la reconnaissance internationale était un objectif fondamental puisque cela lui aurait permis de traiter avec les autres nations sur un pied d’égalité. La Chine finit par interdire totalement les contacts avec l’étranger en 1953, entre autres en réaction à l’embargo commercial décidé par les États-Unis, et cet isolement radical contribuera à renvoyer l’image d’une Chine toujours plus énigmatique aux yeux de l’Occident42.
29Au cours de la guerre, MacArthur anticipe souvent les décisions de l’administration, voire la met simplement devant le fait accompli. Le général finit par défier ouvertement la Maison-Blanche en menaçant d’entrer en guerre contre la Chine et d’utiliser des bombes atomiques, alors même que Washington recherche avant tout un armistice. Truman, en tant que commandant en chef des forces armées, relève le général de ses fonctions en Corée le 11 avril 1951, ce qui ne manque de provoquer de violentes critiques, en particulier de la part des Républicains et du China Lobby. La controverse est telle que le Congrès décide d’entendre les principaux intéressés pour faire la lumière sur cette affaire43. En effet, avec le maccarthysme et la guerre de Corée, le China Lobby, qui devient particulièrement actif tout au long des années 1950 et 1960, réussit à peser lourdement sur la politique chinoise du pays.
30L’administration se montre également de plus en plus agressive dans sa rhétorique contre Pékin qu’elle présente systématiquement comme une marionnette de Moscou. Par exemple, le 18 mai 1951, un discours de Dean Rusk au China Institute provoque de fortes réactions par son caractère belliqueux : « [Red China] may be a colonial Russian government, a Slavic Manchukuo on a larger scale. It is not the government of China. It will not pass the first test. It is not Chinese44. » Dans ses mémoires, Rusk affirme qu’il visait simplement à ridiculiser l’habitude de Pékin de présenter l’Amérique comme l’ennemi numéro un et de lancer des slogans antiaméricains. Il est vrai que, côté rhétorique, la RPC n’est pas en reste dans sa campagne antiaméricaine. La presse, en revanche, croit déceler dans les propos de Rusk une politique désormais plus agressive vis-à-vis de la Chine.
31La situation sur la scène internationale en général et asiatique en particulier est devenue épineuse pour Pékin. Tout d’abord, le traité de paix signé à la conférence de San Francisco, le 8 septembre 1951, oblige le Japon à conclure la paix avec les Alliés, parmi lesquels la Chine, sans toutefois préciser « quelle Chine » ; or Tokyo, désormais sous la coupe de Washington, choisit la République de Chine à Taiwan l’année suivante. Ensuite, le traité de sécurité nippo-américain, signé à la même date, implique une présence accrue de l’armée américaine dans la région. La RPC est encore plus isolée et son espoir de récupérer Taiwan sans intervention étrangère s’évanouit rapidement, d’autant que la volonté de Washington de protéger l’île scelle l’avenir tumultueux des relations sino-américaines45.
32En Corée, les combats continuent, mais c’est l’impasse pour les deux camps.
Notes de bas de page
1 La « perte de la Chine » est un thème qui a très largement nourri le débat parmi les spécialistes, et ce jusqu’à nos jours. Voir par exemple les articles publiés en 1997 après un colloque sur le thème « Rethinking the Lost Chance in China », Diplomatic History, hiver, vol. 1, no 21, p. 71-115.
2 Voir notamment Kahn, The China Hands.
3 Isaacs, Scratches on Our Minds, p. 191.
4 « Le destin de Chiang devint notre destin en Chine, si bien que lorsqu’il tomba, il nous emporta dans sa chute. » Cité dans Valeo, The China White Paper, p. 56.
5 Kusnitz, Public Opinion and Foreign Policy, p. 28-31.
6 Gaddis, Strategies of Containment, p. 68-70 ; Thomas Etzold, 1978, « The Far East in American Strategy, 1948-1951 », in Etzold (éd.), Aspects of Sino-American Relations since 1784, p. 103 ; Nancy B. Tucker, 2005, « Strategic Ambiguity or Strategic Clarity? », in Tucker (éd.), Dangerous Strait, p. 188-189.
7 « Ce qui nous intéresse en Chine, c’est que celui qui dirige la Chine, fût-il le diable en personne, soit un diable indépendant. C’est infiniment mieux que d’avoir un laquais de Moscou ou une Chine sous la coupe des Russes. » Cité dans Gaddis, Strategies of Containment, p. 102.
8 Kusnitz, Public Opinion and Foreign Policy, p. 26, 43.
9 Harry S. Truman, 1950, « The President’s News Conference », 5 janvier, Public Papers of President Harry S. Truman, 1945-1953.
10 Sur les différences dans les politiques chinoises de Londres et Washington, voir Kaufman, Confronting Communism.
11 Selon Rusk, ce n’est peut-être pas tant le discours d’Acheson que le retrait des troupes américaines de la péninsule qui a été perçu comme un désintérêt des États-Unis pour cette région, As I Saw It, p. 164-165.
12 La Chine a perçu les États-Unis comme l’hégémon pendant les années 1950-60, avant que l’URSS ne prenne leur place dans la vision mondiale de la Chine suite au schisme sino-soviétique à la fin des années 1960. Voir Foot, The Practice of Power, p. 9. Selon l’universitaire chinois Hu Lingque, les chances de réconciliation entre les deux pays étaient quasiment nulles en 1949-1950 dans la mesure où la confrontation avec les États-Unis faisait partie de l’« agenda révolutionnaire » du PCC lorsqu’il prit le pouvoir. Hu Lingque, 2000, « Historical Perspectives : A Chinese Perspective on Sino-American Relations in 1949-1950 », in Davis (éd.), Chinese Perspectives on Sino-American Relations, p. 35-46.
13 Domenach, Richer, La Chine, tome 1, p. 25-57.
14 Kusnitz, Public Opinion and Foreign Policy, p. 33-35.
15 Gaddis, Strategies of Containment, p. 89-126.
16 Jespersen, American Images of China, p. 174-175.
17 Varg, The Making of a Myth, p. 173 ; Hunt, The Making of a Special Relationship, p. 299-300.
18 « En conséquence, notre réaction à la perte de la Chine en 1949 fut celle d’un amant rejeté. » Rusk, As I Saw It, p. 157-158. Voir aussi Truman, Memoirs, tome 2, p. 80.
19 Jespersen, American Images of China, p. 124, 169.
20 « La politique chinoise des États-Unis est plus profondément ancrée dans la politique intérieure que tout autre aspect de la politique étrangère américaine. » Koen, The China Lobby in American Politics, p. xix.
21 C’est notamment la thèse de Leonard Kusnitz, Public Opinion and Foreign Policy, p. 8.
22 Viltard, La Chine américaine, p. 26-27.
23 David Caute, 1978, The Great Fear : The Anti-Communist Purge under Truman and Eisenhower, London, Secker and Warburg, p. 303-324 ; Viltard, La Chine américaine ; Koen, The China Lobby in American Politics.
24 « Je crois que vous pouvez demander à n’importe quel écolier qui est l’architecte de notre politique en Extrême-Orient, il vous répondra : Owen Lattimore. » U.S. Government Printing Office, 1950, Congressional Record, 81st Cong., 2d Sess., vol. 96, Part 3, p. 4393. Voir aussi Newman, Owen Lattimore and the « Loss » of China.
25 « Lors d’une audience au Sénat en 1950, McCarthy questionna [John] Service sur le fait curieux, selon lui, que trois spécialistes de la Chine (Service, Davies, et Vincent) portent tous le même prénom. S’agissait-il d’un “pur hasard”, demanda McCarthy avec scepticisme que “trois John aient perdu la Chine” ? Service répliqua qu’en réalité “quatre John ont perdu la Chine”. Qui était le quatrième ? demanda McCarthy. “John K [ai-] Shek”, répondit Service, pour le plus grand plaisir du public. Le diplomate remporta l’échange verbal, mais perdit bientôt son emploi. » Schaller, The United States and China, p. 124-125.
26 Nixon, RN, p. 110.
27 John Paton Davies fera l’objet de longues enquêtes et sera finalement accusé en 1954 de « manque de jugement, de prudence et de sérieux » (lack of judgment, discretion, and reliability), ce qui aura pour conséquence qu’il soit radié de ses fonctions au département d’État. Ce n’est qu’en 1968 que le département d’État le blanchira de toutes ces accusations. Voir Davies, China Hand : An Autobiography. Sur John Carter Vincent, voir May, China Scapegoat : The Diplomatic Ordeal of John Carter Vincent.
28 Créé en 1925, l’Institute of Pacific Relations était une organisation internationale non-gouvernementale regroupant des « conseils » nationaux (councils) de spécialistes sur la région Asie-Pacifique. Son objectif était d’étudier les peuples asiatiques en vue d’améliorer les relations mutuelles de part et d’autre du Pacifique. Ciblé à partir de 1951 par le China Lobby et les maccarthystes comme un repaire de communistes, l’institut voit sa réputation durablement entachée et, au vu des difficultés à réunir des fonds, finira par être dissous en 1960. Sur l’IPR, voir notamment Koen, The China Lobby in American Politics, p. 132-159.
29 Cité par Viltard, La Chine américaine, p. 49.
30 En 1963 paraît une réponse, ou plus exactement une « substitution », à l’ouvrage de Koen sur le China Lobby, car celui-ci est censuré et retiré des bibliothèques pour y être littéralement remplacé par The Red China Lobby. Voir l’introduction de Richard C. Kagan, in Koen, The China Lobby in American Politics, p. ix ; Forrest Davis, Robert A. Hunter, 1963, The Red China Lobby, New York, Fleet Publishing Corporation.
31 Service, The Amerasia Papers, p. 191-192.
32 Truman, 1950, « Statement by the President on the Situation in Korea », 27 juin, Public Papers of President Harry S. Truman, 1945-1953.
33 Tucker, 2005, « Strategic Ambiguity or Strategic Clarity? » in Tucker (éd.), Dangerous Strait, p. 188-190.
34 Kusnitz, Public Opinion and Foreign Policy, p. 44-45.
35 Truman, 1950, « Special Message to the Congress Reporting on the Situation in Korea », 19 juillet, Public Papers of President Harry S. Truman, 1945-1953.
36 Schaller, Douglas MacArthur, p. 190-196 ; Truman, Memoirs, tome 2, p. 397-408.
37 Sur le point de vue chinois, voir notamment Whiting, China Crosses the Yalu.
38 Rusk, As I Saw It, p. 167-169 ; Schaller, Douglas MacArthur, p. 200-203, 206-212 ; Truman, Memoirs, tome 2, p. 416-418 ; Sinha, Sino-American Relations, p. 51, 56-57 ; Gaddis, Strategies of Containment, p. 115-117.
39 Isaacs, Scratches on Our Minds, p. 225-227, 232-236.
40 « En raison de l’amitié historique entre le peuple américain et la Chine, nous sommes tout à fait consternés à l’idée que les Chinois soient contraints d’entrer dans le combat contre nos troupes sous commandement des Nations unies. » Truman, 1950, « The President’s News Conference », 30 novembre, Public Papers of President Harry S. Truman, 1945-1953.
41 Schaller, Douglas MacArthur, p. 186, 213-216 ; Rusk, As I Saw It, p. 284.
42 Foot, The Practice of Power, p. 13-14, 52-81.
43 Truman, Memoirs, tome 2, p. 499-514 ; Schaller, Douglas MacArthur, p. 230-253.
44 « [La Chine rouge] est peut-être un gouvernement russe colonial, un Mandchoukouo slave à plus grande échelle. Ce n’est pas le gouvernement de la Chine. Il échouera à la première épreuve. Il n’est pas chinois. » Rusk, As I Saw It, p. 172-174. Voir aussi Hunt, The Making of a Special Relationship, p. 309.
45 James Mann, 2001, « Congress and Taiwan : Understanding the Bond », in Myers, Oksenberg, Shambaugh (éds), Making China Policy, p. 201-219.
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