Publications autonomes et culture autonome en RDA dans les années quatre-vingt
p. 399-411
Texte intégral
1En janvier 1990, la Grande Halle de la Villette présentait une exposition intitulée « l’Autre Allemagne hors les murs ». Quelque 200 artistes invités y représentaient une « autre Allemagne dans l’Autre Allemagne », une frange de la société de RDA marginalisée avant la chute du mur et propulsée sur le devant de la scène après la révolution démocratique d’octobre-novembre 1989.
2À partir du début de l’année 1990, on a assisté pendant les derniers mois de la RDA à une floraison de petites maisons d’éditions nouvelles et de revues indépendantes. Peu d’entre elles ont franchi le cap du passage au marché et de la transformation radicale de la vie publique. Mais l’essor rapide des projets éditoriaux indépendants pendant cette période témoigne de l’existence, avant 1990, d’une activité éditoriale parallèle et souterraine, qui est apparue au grand jour lorsque les conditions l’ont permis.
Samisdat politique et samisdat littéraire
3Pendant les années quatre-vingt se sont développées en RDA des publications périodiques autonomes qui, dans les conditions très restrictives imposées par le pouvoir, ont créé un réseau de communication indépendant de l’espace public officiel. Avec des moyens rudimentaires, et sans ignorer la surveillance constante dont ils faisaient l’objet, les auteurs de ces publications ont ouvert la voie à un échange d’idées affranchi des codes et des tabous du discours public, et ont fait circuler des textes échappant à la censure sous ses deux formes corrélatives, celle des maisons d’édition et celle de l’autocensure.
4Une partie de ce samisdat est liée à l’existence de groupes contestataires ou oppositionnels qui se structurent progressivement pendant cette période en se plaçant souvent sous la protection de l’Église protestante1. Amorcée par le mouvement pour la paix du début des années quatre-vingt, la création de bulletins autonomes prend son essor avec le mouvement écologiste après 1983. Le séminaire de Wittenberg, qui joue un rôle important dan
5s la réflexion écologiste, édite les Briefe zur Orientierung im Konflikt Mensch-Natur (20 numéros entre 1980 et 1989),et différents bulletins régionaux voient le jour jusqu’à la création en 1988 de Arche Nova, destiné à fédérer les activités écologistes. Dans les trois dernières années de la RDA, des groupes axés sur des thèmes directement politiques (Démocratie, Droits de l’Homme) font circuler des publications qui entrent en conflit ouvert avec l’État : les Umweltblätter, qui débordent rapidement du cadre annoncé par le titre, Grenzfall (14 Numéros entre 1986 et 1989), organe du groupe « Initiative für Frieden und Menschenrechte » fondé par Gerd Poppe et Wolfgang Templin, ainsi que Kontext et Ostkreuz, qui s’efforcent de jetter des ponts vers les milieux de la culture et vers l’Europe de l’Est2.
6Nombre de ces périodiques, à l’exception notable de Grenzfall, affichent la mention purement fictive « Nur für den innerkirchlichen Gebrauch » ou « Nur für innerkirchlichen Dienstgebrauch » qui leur permet, en vertu de la tolérance en vigueur pour la documentation propre à l’Église, d’être dispensés de l’autorisation préalable de reproduction prévue par la loi3. C’est sous le couvert de ce statut particulier qu’est diffusée, par exemple, l’enquête volumineuse de Michael Beleites sur les conséquences de l’extraction de l’uranium au sud de la RDA (Pechblende). Les 1.000 exemplaires distribués en 1988 sont jugés explosifs par la Stasi, qui s’alarme de voir briser ce tabou.
7Une autre catégorie de publications non-autorisées est constituée de re-vues à caractère littéraire. Elles fournissent un support matériel à une génération d’écrivains qui est exclue des organes de publication officiels ou qui refuse de s’y intégrer. Elles répondent au besoin de créer et d’entretenir un « autre espace public » ou un « contre-espace public » (eine andere Öffentlichkeit/Gegenöffentlichkeit) pour accueillir et diffuser, même à une échelle très réduite, des textes non soumis à la censure et souvent inassimilables pour l’appareil culturel. Une trentaine de ces revues ont existé entre 1982 et 1989. La première revue du genre, Und, fondée à Dresde en 1982, fournit le modèle sur lequel fonctionneront toutes les autres : chaque auteur dactylographie son propre texte en autant d’exemplaires qu’en comptera le tirage, et reçoit en échange un exemplaire personnel. Und sera interdite en 19844, le flambeau sera repris sur place par U.S.W (Undsoweiter), puis U.S.F.(Undsofort). Les titres sont évocateurs et font souvent eux-mêmes figure de programme. À Berlin, c’est Entwerter/oder qui inaugure la série en 1982, bientôt suivie par Mikado (1983), Schaden ((1984), Ariadnefabrik (1986). Avec près de 90 auteurs, plus de 30 peintres et plus de dix photographes, Schaden était, au milieu des années quatre-vingt, un catalogue représentatif de l’art non officiel de RDA, jouissant d’une autorité appréciable »5. Le centre de cette constellation de revues est à Berlin, et se renforcera encore avec l’apparition de nouveaux titres : Ariadnefabrik (1986), Bizarre Städte (1987), Liane et Verwendung (1988). Mais les villes importantes de province ont aussi leurs titres, Leipzig étant le deuxième pôle par ordre d’importance avec cinq titres : Anschlag (1984), Zweite Person, Glasnot, Messitsch (1987), Sno’Boy (1989).
8Les bulletins des groupes politiques proches de l’Église protestante disposent en général d’un outillage minimum qui leur permet de produire des textes ronéotypés. Ce procédé permet d’atteindre parfois des tirages de 1.000 exemplaires et plus, mais le niveau se situe le plus souvent autour de quelques centaines d’exemplaires. C’est le cas du mensuel Grenzfall, jugé suffisamment dangereux pour que la Stasi tente une intervention en force destinée à interdire sa fabrication et à saisir le « corps du délit », la vieille machine à reprographie6. La fabrication des revues alternatives littéraires est souvent encore plus artisanale. La plupart des numéros sont composés d’un mélange de textes dactylographiés, de gravures, d’aquarelles originales, de collages et de photos en noir en blanc qui confère à chaque numéro le caractère d’un exemplaire unique. Les textes reproduits séparément, sans aucune unité graphique et sur des papiers différents, sont assemblés dans des reliures elles-mêmes très travaillées. L’utilisation de textes composés sur ordinateur dans les derniers numéros qui précèdent l’automne 1989 ne modifie pas le principe. Certains ne manquent pas de voir dans ce mode de fonctionnement un archaïsme, un retour au travail des moines copistes, en plein siècle de la reproductibilité infinie des œuvres d’art et des textes7. Il est plus juste d’y voir une volonté d’expression autonome qui, pour contourner le monopole de la parole écrite que s’est attribué le pouvoir, recourt aux seuls moyens disponibles, aussi sommaires soient-ils, pour affirmer son existence et faire entendre sa voix. C’est aussi le résultat d’une solidarité de fait entre poètes, prosateurs, photographes et peintres victimes les uns et les autres de l’ostracisme de l’appareil culturel, et qui donnent une réponse « actionniste » au défi des autorités et à la résignation ambiante.
9La technique employée conditionne largement le nombre des exemplaires. La plupart commencent avec un tirage très modeste (Schaden : 21 ex., Liane : 25 ex, Anschlag : 25 ex.) et se stabilisent autour de 50 exemplaires (Schaden : 40-50 ex, Liane et Anschlag : 50 ex, Ariadnefabrik : 60 ex) ; d’autres ne dépassent jamais les 30 exemplaires (Glasnot, Und, U.S.W.)8. À l’exception de Verwendung (250 ex), toutes respectent un chiffre maximum de 100 exemplaires, même lorsque leur technique un peu plus élaborée leur permettrait de le dépasser (Mikado, Zweite Person)9. Ce chiffre est généralement admis comme étant le seuil de tolérance au-delà duquel toute reproduction de document écrit doit être soumise à autorisation. C’est aussi le seuil en-deçà duquel la reproduction d’œuvres graphiques est dispensée d’autorisation10. Le mélange intime d’œuvres graphiques et de textes dans la plupart des revues peut servir d’alibi, le texte étant alors considéré pour les besoins de la cause comme le commentaire de l’image11. Cette limite joue un certain rôle dans les rapports des indicateurs de la Stasi. L’un d’eux écrit au sujet de Zweite Person: :
« Selon les dires du suspect, il était prévu de fabriquer 99 exemplaires, mais ce chiffre a été légèrement dépassé. Lui-même affirme en avoir encore 40 exemplaires déposés chez lui dans le sommier de son lit »12.
10Mais lorsque survient un épisode de confrontation plus directe, ce chiffre symbolique n’a plus cours, et seule compte alors pour la Stasi l’absence d’autorisation légale13.
11Les trois co-éditeurs de la revue Mikado (1983-1987) écrivent dans la première anthologie consacrée en République fédérale à une revue de ce type :
« Le chiffre de cent exemplaires par numéro peut sembler ridicule dans un contexte où on croule sous le papier glacé, mais dans un pays où il n’y a pas de photocopieurs pour les particuliers, c’est le maximum de ce que l’on peut fabriquer de manière légale ou clandestine. Pour nous, le jeu en valait la chandelle, car on pouvait espérer que chaque exemplaire circulerait au lieu d’être lu seulement par l’acheteur, et nous considérions que ce qui compte pour l’action de la littérature, c’est moins le nombre des lecteurs que leur qualité »14.
12Les exemplaires se passent effectivement de la main à la main, mais n’atteignent pas le grand public.
13Des tentatives sont faites pour élargir l’audience. En 1986, les collections de 9 revues de ce type sont exposées pendant un mois dans la Samariterkirche de Berlin, où le public peut les consulter et les lire sur place15. Cette exposition intitulée « Wort + Werk » est accompagnée de lectures publiques, de forums de discussions avec les auteurs, et de concerts. Beaucoup d’auteurs représentés en attendent un tournant, le passage du petit cercle des initiés à un public plus large. Mais il y a beaucoup de chemin à faire, et le résultat n’est pas à la hauteur des espérances. La Stasi craignait beaucoup que cette initiative fasse connaître au grand public et aux médias de l’Ouest les « soi-disant revues littéraires et artistiques ». Mais le bilan la rassure :
« Il y avait entre 20 et 120 personnes présentes à chaque manifestation, essentiellement un public d’habitués et d’amis. Seule une très faible partie des visiteurs n’appartenait pas à cette ‘scène’ »16.
14Malgré tout, des précautions sont prises : un enseignant de l’Université Humboldt de Berlin est licencié pour avoir participé à l’exposition, et une circulaire interne de la Stasi met en garde contre la possibilité d’une récidive des organisateurs17.
15Une deuxième exposition de ce type est en préparation à la galerie Eigen + Art de Leipzig avant les événements de l’automne 1989. Intitulée Zellinnendruck, elle aura lieu finalement en mars 1990, et se situe dans le droit fil de la collaboration de cette galerie alternative (cf. infra) avec les revues alternatives locales, dont elle présente des exemplaires dans ses locaux à partir de 198618.
L’« autre culture » et la « Szene »
16L’affaire Biermann entraîne des conséquences disciplinaires qui creusent un fossé durable entre le pouvoir et les créateurs artistiques, avec pour conséquence l’exode provisoire ou définitif d’une partie de l’élite artistique du pays. Une partie de la jeune génération des écrivains se trouve contrainte de chercher de nouveaux espaces de publication, pour répondre aux pratiques restrictives des instances officielles et à l’immobilisme de la censure. Dans les deux dernières années, le pouvoir lâchera du lest et publiera au compte-gouttes quelques recueils de poètes jusque là maudits19. Mais en 1986, l’un d’eux peut encore affirmer :
« Je suis préparé à l’idée de devoir constater à cinquante ans qu’aucun livre de moi n’est encore paru »20 La littérature alternative et son cortège de publications autonomes sont, en ce sens, la « négation de la négation de la littérature »21.
17Cette réaction d’autodéfense passe nécessairement par des formes d’auto-organisation que le pouvoir s’obstine à considérer comme en elles-mêmes hostiles au socialisme parce qu’elles ignorent les circuits officiels. La démarche se caractérise en outre par une volonté de résister à la contamination de la langue par le discours du pouvoir, et de trouver un langage libéré des implications politiques de la langue de tous les jours. D’où l’attrait de la poésie formelle et expérimentale, et le risque d’un certain hermétisme. C’est donc une littérature qui refuse le primat du politique et qui, de ce point de vue aussi, est en rupture avec la tradition de la littérature de RDA, sans se concevoir pour autant comme « dissidente ».
18La rupture avec le discours dominant s’accompagne d’une rupture avec le mode de vie dominant. La recherche d’un langage nouveau va de pair avec l’affirmation d’un style de vie différent de celui, jugé insipide, qu’offraient les voies toutes tracées de la normalité en RDA. Le constat de départ est proche de celui de Volker Braun : la RDA est « le pays le plus ennuyeux du monde »22. Le symbole de cette double aspiration est le quartier du Prenzlauer Berg à Berlin, où la recherche de la différence rassemble dans un même secteur géographique les écrivains, peintres et musiciens en rupture de société, auxquels viendront s’adjoindre des punks : tout un monde d’éléments plus ou moins « asociaux » au regard d’une législation sur l’asocialité par ailleurs dépassée et plus ou moins mise en sommeil23. Des quartiers du même genre, qui évoquent mutatis mutandis le quartier de Kreuzberg à Berlin-Ouest, existent aussi à Dresde, à Leipzig et dans d’autres villes de moindre importance. Îlots de différence dans une société très homogène, ils sont le refuge d’un milieu vivant plus ou moins en vase clos, avec le risque de devenir une sorte de « réserve de la contre-culture » du pays,24 ce que l’on appelle alors la « Szene » :
« La Szene, ce paysage artistique particulier (...), la ‘scène’ au sens d’un milieu social en marge de la culture officielle et qui exhibe sa différence culturelle »25.
19Les termes employés pour désigner ces milieux culturels ont varié avant et après 1989 : « Alternative Kultur », « zweite Kultur », « andere kultur », « Gegenkultur », « Subkultur », « unabhängige Kultur », « nichtkonforme Kultur ». La notion de « culture alternative » a été utilisée à la fois par le milieu lui-même et par la Stasi, qui y voyait à juste titre la tentative de créer une « alternative à la politique culturelle socialiste »26 Le terme désigne toutes les activités culturelles qui se situent hors des institutions de la culture et qui revendiquent un espace indépendant et une action autonome.
20L’ouverture des archives de la Stasi a révélé que des représentants éminents de cette ‘scène’, dont certains animaient des revues alternatives (Sascha Anderson et Rainer Schedlinski à Berlin) avaient été indicateurs de la Stasi. Le débat médiatique qui a suivi ces révélations a jeté le discrédit sur l’ensemble du milieu, parfois considéré désormais dans son ensemble comme une création de la Stasi. Les excès de cette polémique ont été dénoncés par des personnalités par ailleurs très hostiles au mythe du Prenzlauer Berg, comme le poète Jan Faktor :
« Cela n’a pas grand sens de se lamenter après coup parce que quelques collaborateurs de la Stasi ont joué un rôle aussi actif dans la culture alternative ou dans les groupes d’opposition.(...) Ce qui compte pour l’avenir, et ce qui restera de la ‘Scène’ du Prenzlauer Berg, c’est une grande quantité de poèmes de ces années-là, de photos, d’images, de concerts qui n’ont rien à voir avec les actions et les projets d’Anderson(...).Ce qui restera, ce sont de nombreuses revues éditées par des auteurs (ou des groupes) qui n’ont absolument rien à se reprocher (Mikado, Entwerter-Oder, Liane, ostkreuz, Kontext, Anschlag etc. »27
21Du côté du pouvoir, la tolérance à l’altérité est très réduite. Interrogé sur la citation de Rosa Luxemburg brandie par des opposants en janvier 1988 (« Freiheit ist immer die Freiheit des Andersdenkenden »), Erich Honecker déclare en 1988 dans Neues Deutschland, le quotidien du SED :
« Nous avons connu les SA et les SS (...).Tout cela, ce sont des gens qui pensent différemment (« Andersdenkende »). Vous me permettrez donc de faire une distinction entre les gens qui pensent normalement et ceux qui pensent différemment (« Zwischen Normaldenkenden und Andersdenkenden ») »28.
22Le quotidien de la FDJ, Junge Welt, publie en 1987 un texte très offensif :
« Quoi que fasse l’ennemi - qu’il envoie contre nous de jeunes écrivains animés d’un zèle missionnaire, qui ont le don de vendre un talent qu’ils n’ont pas, ou qu’il se poste devant la porte des églises en prenant la pose du « veilleur », ou encore qu’il envoie des voyous armés de vocabulaire fasciste et de gourdins - cet ennemi n’a aucune chance chez nous. »
23Et d’ajouter :
« C’est justement parce qu’ils sont peu nombreux qu’il ne peut y avoir ni indulgence ni circonspection »29.
24La Stasi emboîte le pas, et ne trouve pas de meilleure étiquette que « demonstrativ-kulturlos » pour qualifier le public de la galerie alternative EIGEN+ART à Leipzig, c’est-à-dire tout le milieu alternatif de la ville30.
25L’appellation de « scène alternative » donne l’illusion d’une homogénéité qui n’a jamais existé. Derrière le projet commun, qui est de faire pièce à l’institution culturelle et de récuser la prétention de l’État à tout régenter, des conflits d’orientation et de pouvoir traversent périodiquement cet espace. En 1987, une polémique se développe dans Ariadnefabrik autour d’un texte de Jan Faktor, lui-même impliqué dans les revues alternatives, et qui reproche à la ‘scène’ berlinoise de « baigner dans son propre jus », de perdre le sens du réel à force de tourner le dos à la réalité, et de se couper du public31. Il faut noter que cette critique de l’art pour l’art et du parti pris d’apolitisme, si elle s’applique au cas berlinois, elle n’est pas pertinente dans d’autres villes, comme par exemple Leipzig, où les publications littéraires clandestines mêlent intimement littérature et politique et font même une place croissante aux contenus politiques. En 1988, les divergences fondamentales resurgissent à propos de la nouvelle revue Bizarre Städte, qui réunit des auteurs établis (dont Volker Braun) et des auteurs moins connus, voire marginaux. La question centrale est celle du rapport à l’institution : faut-il repousser toute idée de collaboration avec les institutions culturelles, et ériger la marginalité en vertu ? Ou faut-il s’adresser au public le plus large, œuvrer à la rénovation de l’espace public, et accepter l’idée de s’intégrer dans un espace public libéralisé ? Un mur d’incompréhension sépare les protagonistes, et l’un d’eux conclut :
« On ne peut plus ignorer la fracture qui traverse le milieu des revues littéraires de Berlin. Le fossé est évident si l’on compare les intentions affichées par les différentes éditions »32.
Le texte et l’image
26Les textes rassemblés dans ces publications sont de nature diverse et de qualité littéraire inégale. Wolfgang Hilbig refuse de participer à Anschlag parce qu’il trouve le premier numéro trop épigonal. Il changera d’avis par la suite et déclare après la fin de la RDA :
« Il y a longtemps que j’ai révisé ce jugement. J’ai compris depuis qu’il y avait une qualité littéraire inhérente à ce mode de résistance »33.
27Quel que soit le jugement porté sur la valeur littéraire des textes, leur diversité et leur spontanéité confèrent à ces recueils une valeur de témoignage sur la façon dont a été vécue la longue agonie de la RDA.
28Nombre de textes donnent à lire de façon directe le sentiment existentiel d’une génération qui se sent, à des titres divers, étrangère dans son propre pays : le poids de l’immobilisme ambiant et la fermeture du pays, tant vis-à-vis de l’Est que de l’Ouest, provoquent un sentiment d’étouffement ; la confiscation de l’espace public par le discours du pouvoir engendre une impression d’impuissance ; la dégradation tangible de l’environnement naturel et urbain provoque une inquiétude que rien ne vient démentir.
29Le cadre de vie déprimant se présente souvent à la fois comme une métaphore du sentiment existentiel et comme un élément matériel qui contribue à le façonner. Il sert alors d’argument aux collaborateurs de ces revues qui, ayant déposé une demande d’émigration à l’Ouest, éprouvent le besoin de se justifier vis-à-vis de leurs lecteurs et d’expliquer leur décision difficile. Dans les deux exemples qui suivent, la décision d’émigrer est présentée comme un refus de capituler devant le poids écrasant d’un environnement à la fois symbolique et douloureusement réel :
« En regardant par la fenêtre, je voyais 7 poubelles pleines de cendre et 9 à moitié pleines, un tas de charbon dans le passage de l’arrière-cour, 13 antennes, 7 cheminées, 35 fenêtres, des gouttières percées, des murs décrépis, des toits qui fuient, des vitres sales, des tuiles luisantes jaunes et rougeâtres... et le ciel bleu (...) Honnêtement, je suis bien décidé à ne pas laisser cet endroit agir durablement sur moi »34.
« On peut donner beaucoup d’explications (à la demande d’émigration. J.P.) ... Mais on peut aussi regarder en face les arbres, les maisons et les gens. Y voit-on autre chose que de la régression ? »35.
30L’alternative au départ, ce peut être l’aventure d’une revue alternative à laquelle on se raccroche pour survivre – alternative provisoire, puisque les rédactions de ces revues sont décimées par l’émigration. Dans un texte qui s’ouvre sur le spectacle affligeant de l’Elbe à Dresde (« Der Elbe bei Dresden sieht man den Atlantik nicht an »), Barbara Köhler exprime cette forme de résistance au fatalisme. Les feuilles de papier sur lesquelles on écrit, faites avec le bois des forêts mortes, sont autant de radeaux de sauvetage, des bateaux en papier (Papierboote) sur lesquels on peut tenter de subsister :
« Papier voller Irrfahrten und Abenteuer, wenn das Land uns verlassen hat und die Hoffnung uns fahren läßt : Papier auf dem wir zu uns kommen, auf dem wir untergehen, unsere Barke unser gebrechlicher Grund.
Sachsen am Meer, -AHOI! »36.
31Dans un premier temps, ces épanchements n’inquiètent guère la Stasi, qui n’y voit que des états d’âmes. Pour elle, même si les auteurs publiés dans les revues auto-éditées peuvent être dangereux à titre individuel, l’ensemble de ces revues « ne contient pas d’attaques ouvertes contre la RDA, mais presque tous les textes expriment des points de vue étrangers au socialisme, pessimistes ou existentialistes », ou des points de vue « dépressifs et fatalistes »37. Ce jugement formulé en 1986 est nuancé au cours des années suivantes lorsque les thèmes politiques prennent de plus en plus d’ampleur dans certaines revues. Dès le début, cependant, certains textes sont repérés comme subversifs, comme par exemple le poème suivant :
« [...]
Unser Friede ist bewaffneter als jeder Krieg...........LEISTUNG
Selbstschußzäune gelten als Volkseigentum.......ERRUNGENSCHAFT
Eichhörnchen sind selten geworden .........................RUHE
Ein Krieg der Sterne hat sicher auch seine Vorzüge.....VERNUNFT
Der Schauspieler spielt sich selbst...................SENSATION
Am nächsten Morgen soll das Abendprogramm wiederholt werden
.....HOFFNUNG »38
32La subversion de la phraséologie officielle frise le sacrilège lorsque c’est l’hymne national de la RDA, écrit par Johannes R. Becher, qui est parodié :
« Auferstanden und ruiniert [...]
Neuer Vergangenheit zugewandt »39.
33Anschlag consacre en 1987 un numéro spécial volumineux à la galerie alternative EIGEN+ART qui exerce ses activités depuis 1985 dans une arrière-cour du quartier de Leipzig fréquenté par la Szene. Lieu d’innovation et d’expérimentation artistique, cette galerie est aussi un lieu de rencontre : une « niche communicative » (Kommunikationsnische), et le lieu d’une rencontre permanente entre le texte et l’image. Elle accueille des lectures publiques, des réunions du comité de rédaction de Anschlag, sert d’intermédiaire à la Deutsche Bücherei – bibliothèque nationale de RDA – pour l’achat de revues alternatives, permet la lecture sur place d’un certain nombre d’exemplaires de ces revues, et présente des installations qui allient souvent le texte et l’image.
34Une de ces installations représentatives du rejet des normes sociales s’intitule « Bewußtsein oder für alle ist gesorgt ». On y voit une énorme saucisse difforme qui aboutit à deux gros rouleaux entre lesquels elle passe pour y être aplatie. Le texte d’accompagnement explicite la référence au peuple satisfait qui se laisse presser dans le moule sans mot dire, et à qui le gavage matériel et idéologique tient lieu de « conscience socialiste » (Bewußtsein)40. Pendant les semaines décisives de septembre-octobre 1989, la galerie abrite la calligraphie géante d’un texte de Johannes Jansen, collaborateur de la revue Schaden, où s’exprime un violent dégoût devant la situation bloquée que connaît la RDA41.
35Le rejet des normes artistiques est manifesté par des contre-expositions qui répliquent à des expositions officielles. En 1988, l’école des Arts Graphiques de Leipzig accueille une exposition sur Beuys qui est une première mais qui se limite aux œuvres des débuts, donc à « Beuys avant Beuys ». Cette amputation est ressentie par certains comme une provocation. EIGEN+ART organise dans ses locaux une manifestation concurrente appelée « Nach Beuys », où alternent performances et installations qui se réclament du Beuys de la maturité. Une démarche semblable se met en place en 1989 pour répliquer à l’exposition officielle de l’art de RDA qui doit se tenir à Vienne, mais l’écroulement de la RDA rendra ce projet caduc.
36La Stasi surveille de très près cette activité multiforme qui attente selon elle à la dignité de l’État. Elle craint la contagion de cet « art décadent et antisocialiste »42, et redoute que les contacts du responsable de la galerie avec des diplomates occidentaux, en particulier avec les Attachés Culturels Ouest-Allemand et Français, ne servent à l’infiltration de l’idéologie adverse43. En 1986, la Stasi établit un plan d’action pour faire interdire la galerie, mais ce plan est rejeté par la direction locale du SED qui veut éviter de faire des vagues. Une tolérance de fait s’installe, qui permettra à la galerie de poursuivre ses activités jusqu’à l’ouverture du mur, et bien au-delà44.
Conclusion
37Malgré leur tirage restreint et leur diffusion nécessairement limitée, ces revues autonomes ont eu en RDA une importance certaine. Par le simple fait d’exister, elles ont montré les limites de la prétention du SED à exercer son monopole dans tous les domaines, à diriger tous les processus culturels et à intégrer toutes les formes d’expression. La fabrication de ces revues dans des conditions matérielles et politiques difficiles a été vécue comme un acte concret de résistance aux restrictions de la liberté d’expression. Le contexte de semi-clandestinité a poussé à la création de réseaux, favorisée par la petite taille du pays. L’espace public parallèle ainsi créé, malgré ses dimensions modestes, a évité l’asphyxie complète de la littérature non conforme aux canons de la RDA. Il a permis de faire circuler des textes et des idées qui ont contribué à la fermentation souterraine préalable aux événements d’octobre 1989. Il a fait connaître à l’Ouest l’existence d’une autre RDA, moins visible de l’extérieur que les puissants mouvements d’opposition et de réforme des pays socialistes voisins, mais parfois idéalisée par le reflet qui en était donné.
Notes de bas de page
1 Cf. Jacques Poumet : « Nouvelles formes d’opposition en RDA dans les années quatre-vingt », in : Allemagne d’Aujourd’hui N°146/1998.
2 Cf. Hubertus Knabe, « Nachrichten aus einer anderen DDR ; inoffizielle Publizistik in Ostdeutschland in den achtziger Jahren », in : Aus Politik und Zeitgeschichte, Beilage zur Wochenzeitung Das Parlament. N°36/98, pp.31-32.
3 « Anordnung über das Genehmigungsverfahren für die Herstellung von Druck- und Vervielfältigungserzeugnissen vom 20.Juli 1959 », et « Anordnung Nr 2 über das Genehmigungsverfahren .... vom 25.März 1975 ».
4 Une des deux seules interdictions connues, avec celle de Galeere à Halle en 1986.
5 Peter Böthig : « Und, Undsoweiter,Undsofort ... » in : Zellinnendruck, Catalogue d’exposition de la galerie EIGEN + ART, Leipzig 1990, p. 12.
6 Cf. Jacques Poumet : « Nouvelles formes d’opposition », op. cit.
7 Michael Thulin : « Das Unikat-Syndrom », in : Klaus Michael, Thomas Wohlfahrt (Hrsg) :Vogel oder Käfig sein. Druckhaus Galrev 1992, p. 296-297.
8 Cf. J. Poumet : « Paysage avant la bataille. Les revues alternatives de Leipzig à la veille d’octobre 1989 », in : Allemagne d’Aujourd’hui N°115/1991, p. 93 et : Forschungsstelle Osteuropa (Hrsg) :Eigenart und Eigensinn. Alternative Kulturszenen in der DDR (1980-1990). Edition Temmen, Bremen 1993, pp. 123-145.
9 Zweite Person était reproduit par sérigraphie, Mikado utilisait un procédé de stencils à alcool.
10 Hubertus Knabe : « Nachrichten ... », op.cit. p. 26.
11 Karim Saab : « Der Anschlag », in : Uta Grundmann, Klaus Michael, Suzanne Seufert (Hrsg) : Die Einübung der Außenspur. Die andere Kultur in Leipzig 1971-1990. Thom Verlag, Leipzig 1996.
12 Bericht des IM « Fred » vom 4.7.87, OV « Anthologie II », BStU, ASt Lpz, AOP 2254/88 V, Bd.5, bl.139. Cf. aussi « Monatsbericht Juli 1987 », ibidem, bl. 144.
13 « Gesprächskonzeption für die zu führenden Gespräche mit nachfolgend benannten Beteiligten an der geplanten Ausstellung vom 1.6. bis 30.6.1986 in der Samariterkirche Berlin-Friedrichshain ». OV « Anthologie II », op. cit., Bd 4, Bl 200-202.
14 Uwe Kolbe, Lothar Trolle, Bernd Wagner (Hrsg) : Mikado, oder der Kaiser ist Nackt. Luchterhand, Darmstadt 1988.
15 Il s’agit des revues suivantes : Und et Undsoweiter (de Dresde), A3 de Karl-Marx-Stadt, Galeere de Halle, Anschlag de Leipzig, et les quatre revues berlinoises Schaden, Mikado, Entwerter-oder, et Ariadnefabrik.
16 Information über die in der Zeit vom 1.6. bis 30.6.1986 in der Samariterkirche Berlin-Friedrichshain durchgeführte Ausstellung « Wort und Werk-Grafik und Lyrik junger DDR-Künstler ». BStU, ZA, HA XX, ZMA 1619, Bl.182.
17 Cf. Jacques Poumet : « Die Leipziger Untergrundzeitschriften aus der Sicht der Staatssicherheit », in : Deutschland Archiv 1/1996, p. 84. L’enseignant mis à pied est le germaniste Peter Böthig.
18 Uta Grundmann, Klaus Michael, Suzanna Seufert (Hrsg), op.cit. p. 111.
19 La collection « Außer der Reihe », placée sous la responsabilité de Gerhard Wolf, publie en 1988 et 1989 des recueils de Bert Papenfuss-Gorek, Rainer Schedlinski, Stefan Döring, Jan Faktor.
20 Jan Faktor : « Notizen zum Treffen im Aufbau-Verlag », in : Schaden 13/1986. Reproduit dans : Klaus Michael, Thomas Wohlfahrt (Hrsg) : Vogel oder Käfig sein. Druckhaus Galrev, Berlin 1992.
21 Peter Böthig : « Sprechen wir von uns- eine Negation der Negation der Literatur », in : Anschlag IX, (1987).
22 « Die Kipper », in : Volker Braun :Stücke, Suhrkamp Taschenbuch, Frankfurt 1975, p. 22.
23 Cf. Uta Grundmann, Klaus Michael,.., op.cit. p. 75, note 3.
24 B. Liebig : « L’esprit Prenzlauer Berg », in : L’autre Allemagne hors les murs. Catologue de l’exposition à la Grande Halle de la Villette, Paris 1990, p. 44.
25 Christoph Tannert : « L’écho d’une ‘avant-garde’ et les éclats de la ‘Szene’ », in : L’autre Allemagne hors les murs. Catalogue de l’exposition à la Grande Halle de la Villette, Paris 1990, p. 6. Cf. Paul Kaiser, Claudia Petzold : Boheme und Diktatur in der DDR. Gruppen, Konflikte, Quartiere 1970-1989. Fannei & Walz, Berlin 1997.
26 Eröffnungsbericht zum Anlegen eines OV-Deckname « Galerie ». BStU, ASt Lpz, XIII 1383/85, Bd. 1, Bl. 004.
27 Jan Faktor : « Intellektuelle Opposition und alternative Kultur in der DDR », in : Aus Politik und Zeitgeschichte. Beilage zur Wochenzeitung Das Parlament. N°10/1994 pp. 36-37.
28 Neues Deutschland, 15.Juli 1988. Cité par : Uta Grundmann, Klaus Michael, Susanna Seufert (Hrsg), op.cit., p. 162.
29 Hans-Dieter Schütt : « Warum freue ich mich über den Protest gegen ein Gerichtsurteil ?, in : Junge Welt 12./13/ Dezember 1987.
30 Eröffnungsbericht zum Anlegen eines OV-Deckname « Galerie ». a.a.O, Bl. OO4.
31 Jan Faktor/Annette Simon : « Das, wozu die Berliner Szene geworden ist », in : Ariadnefabrik 4/1987. Reproduit dans : Klaus Michael/Thomas Wohlfahrt : Vogel..., op.cit. p. 399-400.
32 Michael Thulin : « Das bizarre Patchwork der Aufklärer », in : Liane 3 (1988). Reproduit dans : Zellinnendruck, op. cit., p. 37. Cf. aussi : Olaf Nicolai : « Randbemerkungen zur Publikation der Bizarren Städte », ibid. p. 34 (« Der Verlust von gesellschatlichem Interese an Kunst führt zu elitären Zirkeln, die in der Folge selbst ein mangelndes Interesse an bestimmten gesellschaftlichen Prozessen sich zueignen »). Cf.également : Asteris Kutulas : « Erwiderung », in : Bizarre Städte 4, (1989), reproduit dans Zellinnendruck, p. 40.
33 « Die DDR-Literatur hatte völlig resigniert ». Entretien avec Wolfgang Hilbig, in : Märkische Allgemeine, 1.10.1993, p. 7.
34 Christoph Radtke : « Der Blick aus dem Fenster », in : Glasnot II, Leipzig 1987.
35 Torsten Ziesche : »Entwicklung -aus einem Brief », in: Glasnot V (1988).
36 Barbara Köhler : « Papierboot », in : Anschlag 7 (1987).
37 « Über geplante öffentlichkeitswirksame Aktivitäten negativ-feindlicher Nachwuchskünstler im Monat Juni 1986 in der Samariterkirche Berlin-Friedrichshain », 16.Mai 1986, OV « Anthologie II », BStU, ASt Lpz, AOP 2254/88 V/4, p. 196. Abschlußbericht zum OV « Samisdat », OV « Anthologie II », ibidem, p. 278
38 Skizze 35/1984, in : Anschlag 2 (1984).
39 Stefan Döring : « Neue Zehnzeiler und ein romantisches Gedicht », in : Und 12/1983.
40 Jörg Herold : « Bewußtsein oder für alle ist gesorgt », 27.11.-20.12.1997.
41 Johannes Jansen : « Prost neuland ! », 29.9.-22.10.1989 : « ... wollt ihr totale Verreckung verreck ich mit euch denn schön ists nur einmal prost neuland".
42 Eröffnungsbericht zum Anlegen eines OV -Deckname « Galerie », a.a.O.p. 5.
43 « Der L. unterhält selbst Kontakte zu bevorrechteten Personen der BRD und Frankreichs. Der Kulturattaché der SV der BRD, xxx, und der der Botschaft Frankreichs, Leprete (sic), weilten bereits mehrfach in der Galerie Eigen+Art. Ihnen wurde umfangreiches Material über die Galerietätigkeit zur Verfügung gestellt » [...] « Wesentlich ist vor allem die Erarbeitung offizieller Beweise für die feindliche Einflußnahme durch bevorrechtete Personen in der Galerie Eigen + Art ». In : Informationsbericht zur Galerie Eigen + Art, Abt.XX/7, Leipzig, 3.Februar 1988. BStU, ASt Dresden, AOP 3130/88 Dresden, vol III, p. 77-79.
44 Uta Grundmann, Klaus Michael, Susanna Seufert : Die Einübung ..., op. cit., p. 11.
Auteur
Université de Lyon II
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