Les « erreurs » et les inventions : traces du travail de l’enfant
p. 85-99
Texte intégral
Extraits 4-1
Anaé 2;11 | |
Extraits issus du journal parental | |
Anaé | Elles sontaient coquines, moi et Eva |
Anaé | C’est ma niversaire, c’est pas l’anniversaire d’Arthur |
1Le chemin de l’enfant vers la langue adulte se construit étape par étape, chacune constituant un système transitoire, se redessinant au fur et à mesure de son évolution. Pour apprendre à parler, l’enfant s’appuie sur le langage entendu ou reçu de son entourage – que l’on appelle « input* ». Ce bain langagier auquel est exposé l’enfant (comportant du langage qui lui est directement adressé ou pas) est constitué de suites sonores se succédant les unes aux autres, sans interruption systématique entre les différentes constructions, et il va progressivement repérer où il convient de les isoler pour leur donner du sens. Dans un premier temps, il va identifier des ensembles de mots et les reproduire en « bloc », puis, en fonction de la quantité et de la qualité de l’input reçu, il va manipuler ces bouts de langage, les tester, en les utilisant en contexte dans ses interactions avec son entourage. Ces essais se manifestent par des formes déviantes ou des créations, non conformes au système adulte, portant sur le découpage, le contenu ou l’usage de la forme. Ces constructions provisoires, transitoires, nous apportent des informations essentielles sur ce qui nous serait difficilement accessible si elles n’existaient pas, à savoir la façon dont l’enfant traite et analyse l’input et s’approprie le langage, sans se contenter de reproduire à l’identique des éléments déjà entendus.
2L’enfant va devoir apprendre à assembler tous les éléments qui constituent le langage : les formes, dans toute leur complexité (les sons, les marqueurs grammaticaux, les constructions) et leurs fonctions ou significations, et apprendre à s’en servir pour transmettre ses intentions de communication.
3L’enfant va donc apparier des formes et des fonctions, et parfois modifier les unes et/ou les autres, produisant ainsi des « erreurs », des approximations, inévitables dans tout processus d’apprentissage, jusqu’à l’appropriation du langage des adultes dans toute sa complexité – non seulement la langue en tant que système régi par des règles de fonctionnement, mais également tous les usages que l’on peut en faire. Et c’est justement parce que la langue constitue un système, régi par des régularités dont l’organisation est complexe et comporte de nombreux cas particuliers, que cette appropriation va être possible mais progressive, grâce au soutien actif des adultes experts en langue qui entourent l’enfant (cf. chapitre 1).
S’approprier des scénarios et en comprendre les parties ou « Anaé apprend les formules de politesse »
4Apprendre à parler, c’est apprendre à utiliser les unités du langage en contexte. Apprendre à dire « merci », par exemple, c’est comprendre les règles d’un scénario ou d’un script* dans lequel on exprime sa gratitude à un interlocuteur pour ce qu’il nous a donné (objet, compliment). Chez Anaé, ce script se met en place en plusieurs étapes, dans un mouvement, très courant dans le processus d’acquisition du langage : l’enfant prend d’abord en compte la globalité d’une situation ou d’un objet avant de pouvoir extraire et caractériser ses parties.
5Dès 1;05, Anaé dit « mami » (pour « merci ») lorsqu’elle prend ou donne un objet. Les règles de politesse sont importantes pour la mère d’Anaé, qui les rappelle et les exige systématiquement, dès son plus jeune âge, comme par exemple ici à 1;06 :
Extrait 4-2 : on dit merci
Anaé 1;06,08 à 1 min 24 s | |
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-2-anae-on-dit-merci-1-06-08.mp4 | |
1. MÈRE | tu dis merci ? |
2. ANAÉ | non. |
3. MÈRE | ben dis donc ! |
4. MÈRE | on dit merci ! |
6Le plus souvent, à cet âge, Anaé répète « merci » ou « merci maman » après sa mère, lorsque celle-ci lui donne un objet ou accède à l’une de ses requêtes.
7Dans l’exemple suivant, à 1;07, la mère et l’enfant disent « merci » en même temps après qu’Anaé a ramassé un papier par terre, à la demande de sa mère :
Extrait 4-3
Anaé 1;07,03 à 0 min 51 s | ||
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-3-anae-merci-en-donnant-1-07-03.mp4 | ||
Anaé balaye la table d’une main, pour jeter les papiers par terre. | ||
1. MÈRE | ah ben non pas par terre ! | |
2. ANAÉ | non ! | |
act | Anaé montre sa main ouverte à Mère. | |
3. MÈRE | tu le ramasses ? | |
4. MÈRE | s’il te plaît ! | |
5. ANAÉ | ah yy. | |
6. MÈRE | tu peux ramasser le bout s’il te plaît ? | |
act | Mère montre le sol de l’index. | |
7. ANAÉ | hum. | |
act | Anaé ramasse le papier par terre. | |
8. ANAÉ | merci ! | |
act | Anaé donne le papier à Mère. | |
9. MÈRE | merci ! | |
10. MÈRE | hop ! | |
act | Mère met les papiers dans un ramequin posé sur la table. | |
11. MÈRE | on les met là. |
8À ce stade, Anaé dit « merci » lorsqu’elle prend quelque chose des mains de l’autre, lorsqu’on lui donne un objet ou lorsqu’elle le donne elle-même. Il semble donc qu’elle ait associé cette forme non pas à la réception de l’objet mais à l’ensemble du scénario de transfert d’objet.
9Dans la même séance, elle dit « merci » après sollicitation de sa mère, ou de manière spontanée lorsqu’elle lui donne un coussin, mais également lorsqu’elle attrape elle-même une assiette sur le plan de travail de la cuisine, ou encore en prenant une figurine des mains de sa mère qui la lui montrait sans intention de la lui donner. « Merci » semble donc constituer pour elle l’accompagnement verbal de l’action de prendre ou de recevoir.
10On retrouve un phénomène similaire, chez de nombreux enfants au moment de leurs premiers mots, avec les impératifs tiens et donne, utilisés indifféremment dans les situations de dons d’objets.
11À 1;09, en donnant son verre à son grand frère, Anaé dit « merci ». Cette inadéquation entre la forme et la fonction habituelle en langue adulte peut s’expliquer au moins en partie par le comportement de la mère d’Anaé qui, en essayant d’inculquer à sa fille les règles de politesse, produit elle-même « merci » lorsqu’elle lui tend un objet, afin qu’elle le répète. Anaé a donc associé ce terme à l’action de donner et/ou de recevoir.
12À 2 ans, elle est capable de produire « merci » sur simple sollicitation, ce qui démontre qu’elle s’est appropriée, au moins en partie, les règles ou codes propres au scénario :
Extrait 4-4
Anaé 2;00,00 à 44 min 30 s | |
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-4-anae-merci-a-cadeau-2-00-00.mp4 | |
Aliyah donne un cadeau à Anaé qui prend le paquet qui lui est tendu. | |
1; MÈRE | qu’est-ce qu’on dit ? |
2. ANAÉ | merci ! |
3. MÈRE | merci qui ? |
4. ANAÉ | merci à cadeau ! |
13La réaction d’Anaé semble indiquer que son « merci » n’est pas une formule qu’elle utilise pour exprimer sa gratitude après le don du cadeau, mais un automatisme construit par la répétition d’un script dans lequel le don est immédiatement suivi par la suite sonore « merci ». C’est une sorte de geste sonore inscrit dans un scénario bien appris mais dont la fonction sémantique et pragmatique n’est pas pleinement en place. En réponse à la question pertinente de la mère – puisque dire merci s’adresse normalement à quelqu’un –, nous voyons qu’Anaé n’a pas saisi le lien entre le remerciement et la personne qui donne le cadeau. Sa réponse n’est pas ajustée à la question et elle indique qu’elle fait simplement un lien entre la formule et le cadeau.
14À 2;03, « merci » est bien en place et produit à chaque occasion, de manière appropriée :
Extrait 4-5
Anaé 2;03,30 à 26 min 50 s | ||
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-5-anae-merci-cheval-2-03-30.mp4 | ||
1. FRÈRE | tiens. | |
act | Frère tend un autre cheval à Anaé. | |
2. MÈRE | oh il est joli celui-là ! | |
3. ANAÉ | merci ! |
Extrait 4-6
Anaé 2;03,30 à 50 min 10 s | ||
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-6-anae-merci-gateau-2-03-30.mp4 | ||
1. MÈRE | tiens ! | |
act | Mère tend le gâteau à Anaé. | |
2. MÈRE | tu le manges ton gâteau ? | |
3. ANAÉ | merci. |
Extrait 4-7
Anaé 2;05,30 à 1 min 3 s | ||
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-7-anae-merci-compote-2-05-30.mp4 | ||
Anaé essaye d’ouvrir une compote. | ||
1. MÈRE | c’est toi qui l’ouvres toute seule ? | |
2. ANAÉ | non j’arrive pas, y a y a, un petit bouchon. | |
pho | [nɔ̃ z aʁiv pa ja ja ɛ̃ pəti bɔ̃ʃɔ̃] | |
act | Anaé donne la compote à Mère. | |
3. MÈRE | y a un petit bouchon ! | |
4. MÈRE | et voilà ! | |
act | Mère ouvre la compote. | |
5. MÈRE | hé [/] hé [/] hé [/] hé qu’est-ce qu’on dit ? | |
6. ANAÉ | (mer)ci maman. |
15À 2;05, Anaé semble avoir compris que la formule « merci » est destinée à une personne qui est à l’origine du transfert d’objet. À force d’être sollicitée par sa mère, elle a intégré une fonction plus restreinte de merci.
16Dans son appropriation de la formule « merci », Anaé passe d’abord par une étape où elle lui attribue la fonction d’exprimer un transfert d’objet, qui est donc plus globale et moins liée aux règles de politesse que sa fonction en langue adulte. Elle est ensuite capable, à force d’y être exposée en contexte, de l’utiliser à bon escient, en l’associant à une partie du scénario et non à sa totalité. On peut parler dans l’extrait 4-3 de « surextension » de la valeur d’une forme à un ensemble plus vaste que celui qu’il désigne dans la langue adulte. Il s’agit d’un phénomène similaire à la surextension lexicale (voir chapitre 2) quand l’enfant utilise un terme pour désigner une catégorie (par exemple, chien pour tous les animaux à quatre pattes), avant de pouvoir différencier les éléments de la catégorie en leur attribuant des noms distincts, signifiant ainsi qu’il a perçu ce qui les caractérise.
Segmenter la chaîne parlée : du bloc figé à l’analyse ou de « tatête » à « tonpelier »
17Lorsqu’Anaé produit « tatête » en attrapant la tête d’une grenouille, ou « tonbébé » pour désigner sa poupée, elle associe une suite de sons, qu’elle a extraite de l’input comme un « bloc », à un référent, sans avoir analysé qu’il s’agissait de deux unités distinctes en langue et donc sans les segmenter.
18« C’est ma niversaire, c’est pas l’anniversaire d’Arthur » (à 2;11) relève également d’une erreur de segmentation d’une construction entendue et extraite de l’input. Lorsqu’un nom commence par une consonne, il est relativement facile d’identifier l’article défini et le nom comme deux unités distinctes, comme dans « la poupée », notamment si le nom est précédé d’autres déterminants dans le langage entendu par l’enfant (« une poupée », « ta poupée », etc.). Il va donc en déduire une construction [la + nom], qu’il va ensuite appliquer dans d’autres contextes. Or, lorsque le nom commence par une voyelle, l’article défini s’élide (« le anniversaire » devient « l’anniversaire »). L’enfant va alors appliquer la construction « habituelle » [la + nom] et segmenter le bloc « l’anniversaire » de manière erronée, en [la + niversaire], considérant ainsi le nom comme de genre féminin, d’où la construction « ma niversaire ». Ces erreurs de segmentation sont fréquentes, l’input reçu par l’enfant étant exclusivement oral, et expliquent un grand nombre d’erreurs, comme « le noiseau » par exemple. En effet, dans la suite sonore « un oiseau », la liaison entre la consonne finale de l’article indéfini et la voyelle initiale du nom induit l’enfant en erreur et l’amène à segmenter « un » d’une part, et « noiseau » d’autre part. À force d’entendre ces noms dans d’autres contextes, précédés d’autres déterminants, l’enfant pourra progressivement intégrer les formes correctes.
19De la même manière qu’un linguiste qui veut élaborer le dictionnaire d’une langue qu’il entend pour la première fois est amené à formuler des hypothèses sur la relation entre des formes et des fonctions, l’enfant peut se tromper lorsqu’il doit segmenter la chaîne parlée et associer des éléments à des significations particulières en contexte. En effet, comme nous le rappelle le philosophe Quine (1960), lorsqu’un indigène produit le terme « gavagai » quand le linguiste montre un lapin du doigt, il est impossible de déterminer avec certitude si cette suite de sons signifie « lapin », « blanc », « courir » ou encore « repas de ce soir ».
20Ainsi, Arthur, le grand frère d’Anaé, associait la suite sonore « un seul » à la couleur noire aux alentours de 2 ans. En essayant de comprendre cet écart par rapport à la norme, sa mère s’est souvenue lui avoir tendu un paquet de bonbons de toutes les couleurs dans lequel il a pioché un bonbon noir au moment où elle lui disait « tu en prends un seul ». Connaissant alors les adjectifs de couleur, à l’exception de l’adjectif noir, il a donc associé la suite « un seul » à la couleur dont il ne connaissait pas encore le nom. Il s’agit de ce que Markman (1989) nomme « contrainte de l’exclusivité mutuelle » : lorsque l’enfant entend un nouveau mot, il va l’associer spontanément à l’objet dont il ne connaît pas le nom. Arthur disait donc par exemple « ton pull il est un seul ». À force d’entendre les adultes associer le terme noir à la couleur qu’il avait nommée par erreur « un seul », et grâce aux rectifications apportées systématiquement par ces derniers, Arthur a réussi à apprendre le nom de la dernière couleur qui manquait à sa palette personnelle. De la même manière, nous ajustons constamment les associations que nous faisons au quotidien entre formes et sens en fonction de nos expériences, des différents contextes dans lesquels nous rencontrons les activités et les objets que nous dénommons, et de la richesse de notre vocabulaire.
21L’acquisition du langage est donc un processus jalonné de tentatives qui seront constamment validées ou modifiées soit indirectement par les expériences successives associant une situation et un usage linguistique, soit directement par l’étayage* (rectifications, reformulations, étoffements) apporté par l’adulte.
22Dans ce chemin vers la langue adulte, au fur et à mesure de son développement, l’enfant affine ses analyses, mais la langue est semée d’embûches et notamment d’homonymes qui vont lui compliquer la tâche. Ainsi, à 3;08, Anaé va « sur-analyser » une séquence en la segmentant par erreur :
Extrait 4-8 (journal parental)1
Anaé 3;08 | |
MÈRE | c’est le papi de Montpellier |
ANAÉ | le papi de ton pelier |
AEL | non le papi de Montpellier |
ANAÉ | maman, Ael il dit que c’est le papi de son pelier, mais c’est le papi de ton pelier. |
23Dans la suite sonore « Montpellier », Anaé a confondu la première syllabe du nom propre avec son homophone, l’adjectif possessif mon, et accorde ce qu’elle prend donc pour un adjectif en fonction du possesseur (mon pour la personne qui parle, ton pour l’interlocuteur, son pour un tiers). Elle associe donc une forme à une fonction qui certes existe, mais n’est pas appropriée dans le contexte. Cela montre qu’elle sait parfaitement décliner les adjectifs en fonction des possesseurs. L’appariement qu’effectue l’enfant est fondé sur une segmentation erronée due à la fréquence d’emploi des adjectifs possessifs devant des noms dans le langage qui l’entoure. Le fait de ne pas connaître le sens d’un mot comme « pelier » n’empêche pas Anaé de faire cette analyse « incorrecte ». Cette situation est récurrente chez les enfants qui doivent constamment associer une forme sonore et/ou gestuelle (un signifiant) à un sens (un signifié).
24Les marqueurs de possession que sont les adjectifs possessifs (mon, ton, son…), bien que simples en « surface », sont extrêmement complexes d’un point de vue sémantique : leur forme dépend à la fois du possesseur (pour la marque de personne) et du possédé (pour les marques de genre et de nombre). On peut donc les considérer comme des amalgames de plusieurs fonctions, que l’enfant va devoir analyser pour en faire un usage correct. Avant de maîtriser ces formes complexes, il sera capable d’exprimer cette fonction à partir de la construction [le N de N], plus simple, dans des constructions non standard comme « le doudou de moi » (cf. Leroy-Collombel & Morgenstern, 2012). On retrouve le même phénomène de « déconstruction » des amalgames avec « à le » pour au et « de le » pour du. En effet, la langue française n’admet pas la construction [préposition + article défini masculin], alors qu’elle l’admet avec un article féminin (à la cantine mais au restaurant, le chien de la fille mais le chien du garçon), et impose l’amalgame des deux marqueurs sous la forme au ou du. Dans un premier temps, les enfants vont soit rendre la structure [préposition + article] apparente, comme dans « on mange à le restaurant », soit utiliser la forme amalgamée sans l’analyser, comme dans « on va voir les figues au le jardin ».
25Ce phénomène vaut pour les mots pour lesquels il faut associer une forme (un signifiant) et un sens (un signifié), et qu’il faut apprendre à combiner avec les autres unités qui leur sont associées dans la langue, mais également pour des « morceaux » de discours plus larges, des constructions ou des expressions plus ou moins figées, sur lesquels l’enfant va effectuer un travail d’analyse.
26Ainsi, à 2;07, Madeleine va être confrontée à l’expression figée jeter un coup d’œil, dont la signification en contexte n’est absolument pas évidente pour elle et sur laquelle elle va effectuer un gros travail pour essayer de lui attribuer du sens :
Extrait 4-9
Madeleine 2;07,07 (ligne 2109) | ||
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-9-madeleine-acheter-un-coup-d-oeil-2-07-07.mp4 | ||
1. MADELEINE | mais veux que Lucas vienne | |
2. MÈRE | ah tu veux prendre Lucas en photo aussi ? | |
3. MADELEINE | oui | |
4. Observateur | faut l’appeler. | |
5. MÈRE | mais il est …allé j(e)ter un coup d’œil puis i(l) va r(e)descendre. | |
6. MADELEINE | j(e) préfère qu’i(l) vienne. | |
7. MADELEINE | j(e) vais aller le…aller voir. | |
8. MADELEINE | j(e) vais aller ach(e)ter un bout d’œil. | |
9. MÈRE | acheter un coup d’œil. [Elle rit.] | |
[très bas à Martine] | ||
10. MADELEINE | faut que ze prenne mon appareil photo si j(e) veux aller ach(e)ter un coup d’œil. | |
11. MÈRE | c’est JETER un coup d’œil. | |
12. MADELEINE | moi j(e) vais aller jeter un coup d’œil. | |
act | Madeleine prend son appareil et monte à l’étage. | |
13. MÈRE | entendu. | |
14. MADELEINE | parce que moi, parce que moi z’ai des yeux. | |
act | Elle montre ses deux yeux l’un après l’autre avec son index droit. | |
15. MÈRE | bah oui. | |
16. MADELEINE | c’est pour ça que z’ vais aller chercher euh +… | |
17. MADELEINE | c’est pour ça que j(e) vais…que j(e) vais aller chercher un coup d’œil. | |
act | Madeleine commence à monter les escaliers. | |
18. MADELEINE | moi vais aller jeter un coup d’œil. | |
19. Observateur | très bien. | |
20. MADELEINE | parce que moi z’ai mon appareil photo et va aller jeter un, un coup d’œil. |
27La mère de Madeleine introduit dans son énoncé une expression figée que sa fille ne semble pas connaître et qu’elle ne sait donc pas manipuler. Elle ne connaît ni l’expression coup d’œil, ni l’ensemble « jeter un coup d’œil. Or sa mère a prononcé le « je » de « jeter » comme si c’était un « ch » (« chter » L. 5), comme on peut le faire très souvent à l’oral. Madeleine a alors tout naturellement associé ce « chter » au verbe « acheter » (L. 8), même si elle ne l’emploie pas avec le sens de « faire un achat » et que le lien entre acheter et l’expression coup d’œil ne doit pas non plus être évident pour elle. Le fait que Madeleine n’ait pas du tout compris l’expression est marqué par ses erreurs au niveau phonologique* : elle ne prononce « correctement » ni « jeter » ni « coup » (« bout »). Sa mère s’en aperçoit et en rit avec l’observatrice (L. 9). Elle rectifie très ouvertement le deuxième emploi de sa fille (L. 11) en insistant : « c’est JETER un coup d’œil ». Sa fille reprend la forme de manière correcte, mais on peut voir dans la suite de la séquence qu’elle hésite, qu’elle travaille et manipule le sens de chaque mot (L. 14, 16 et 17). Afin de construire son sens global, l’enfant aura besoin de l’entendre plusieurs fois dans des contextes variés au cours du temps. Dans cet extrait, dans son travail de manipulation, elle cherche déjà à comprendre, à justifier cet emploi (« parce que moi j’ai des yeux » en montrant un œil, L. 14). Madeleine s’y reprend à trois fois pour parvenir à produire la construction correcte. Elle a bien compris que sa première élaboration n’était pas conforme au modèle proposé par sa mère. En fin de séquence, elle a donc réussi à produire la forme mais sans encore lui associer la bonne fonction, même si une partie du travail d’élaboration du sens a été effectuée.
28Cet exemple peut être rapproché du travail d’élaboration de la forme et du sens que l’on trouve également chez Anaé autour de 2 ans. Quelques énoncés ont pu faire sourire sa mère et nous montrent que l’enfant essaie constamment de décoder les expressions figées employées spontanément par les adultes qui l’entourent. Elle effectue un véritable travail de mise en lien entre forme et fonction qui se marque justement par des « loupés » soit au niveau de la forme, soit au niveau de la fonction. On peut justement remarquer la construction progressive grâce aux écarts produits. Elle dit par exemple à 2;01 « j’a bois la café » en sortant de la piscine alors qu’elle veut dire « j’ai bu la tasse », expression qu’elle ne maîtrise pas encore mais qu’elle cherche à reproduire après l’avoir entendue plusieurs fois dans le même contexte. Il faut souligner qu’à cette époque, Anaé emploie régulièrement le terme « café » pour désigner les tasses de thé et de café que boivent très fréquemment sa mère et sa grand-mère devant elle. Elle substitue donc spontanément « café » à tasse, comme à son habitude, même dans un contexte très différent dans lequel il n’y a aucun objet pouvant servir de récipient.
De l’analyse à la construction de la règle : « ma robe elle est jolisse »
29Au moment de leur entrée dans le langage, les enfants reproduisent en « bloc » les unités repérées dans l’input. Ainsi, en ce qui concerne les marques grammaticales de genre, on peut observer plusieurs étapes dans leur traitement par Anaé.
30Dans un premier temps, le genre, concept relativement abstrait et dont le marquage en français est principalement arbitraire, ne semble pas analysé par Anaé, qui en applique les marques de manière aléatoire :
à 1;11 : il est coquine Omer (nom du chien mâle de la maison)
à 2;00 : la luge il est là
ou encore à 2;02 : elle est mignon ce chien
31Ces erreurs d’accord semblent pouvoir s’expliquer par l’association que fait l’enfant entre des éléments reproduits en « blocs » mais non encore analysés dans toutes leurs fonctions, notamment les plus complexes, comme celle du genre. L’enfant a bien repéré la structure globale de l’énoncé (par exemple, la construction [pronom + verbe + adjectif + groupe nominal] comme dans « il est coquine Omer ») mais la remplit d’éléments juxtaposés, sans appliquer les règles d’accord ou de manière assez aléatoire.
32Dans un second temps, un nouveau type d’erreurs apparaît, révélant un changement dans le traitement des unités de la langue par l’enfant.
33Ainsi, à 2;09, Anaé produit l’énoncé « ma robe elle est jolisse » ou, à 3;03, « ma chaussette elle est pas à l’enverte ». Dans ces deux exemples, Anaé surgénéralise la marque du genre féminin et l’applique de manière trop large, par analogie, à des adjectifs ou même un adverbe par nature invariable (à l’envers). Ce type d’erreurs nous montre que l’enfant a bien identifié les marques de genre et qu’il leur assigne un « sens », une valeur ou fonction dans le système, ce qui ne semblait pas être le cas précédemment.
34Le même constat peut être établi pour l’acquisition de la morphologie verbale, avec des surgénéralisations des marques de temps aux alentours de 3 ans, comme par exemple « ils sontaient » pour « ils étaient » ou « j’ai prendu » pour « j’ai pris ». À partir de formes entendues dans l’input, l’enfant établit une proto-règle, ici [verbe au présent + -ai-] pour former le passé, sur le modèle de mange / mangeais, ou V + -u sur le modèle de je cours / j’ai couru, qu’il va appliquer dans de nouveaux contextes, alors qu’il était capable auparavant de produire les formes standard, comme dans l’exemple suivant :
Extrait 4-10
Anaé 2;03,30 à 3 min 21 s | ||
Extrait http://ct3.ortolang.fr/devlang/4-10-anae-a-pris-f-train-2-03-30.mp4 | ||
1. MÈRE | on avait pris le train. | |
2. ANAÉ | Anaé e@fs a pris o@fs train. | |
pho | [anae e a pi o tɛ̃] | |
3. MÈRE | Anaé elle a pris le train et on est allés où ? |
35Les unités de sens de la langue, appelées morphèmes*, peuvent fonctionner de manière indépendante (par exemple, le mot poule ne peut être décomposé en unités de sens plus petites et constitue donc à lui seul un morphème) ou être reliées à d’autres unités : c’est le cas des marques grammaticales de nombre et de genre, qui sont liées aux noms et aux adjectifs, ou encore des marques de personne et de temps, liées aux verbes. Les enfants vont donc devoir repérer ces petites unités, déterminer leur forme et leur fonction, et les appliquer dans des situations nouvelles.
36La langue est un système dans lequel les différentes unités varient les unes en fonction des autres, respectant un certain nombre de règles.
37En effet, les enfants déduisent de l’input des régularités, par exemple :
Hier, j’ai mangé
Hier, je suis monté
38Ils considèrent que [auxiliaire + verbe + -é] est la construction nécessaire pour exprimer une action passée. Cette construction est alors testée dans de nouveaux contextes, avec de nouveaux verbes :
Ex : hier, j’a couré et j’a rigolé (Anaé, 2;05)
39Or, cette règle n’est valable que pour les verbes du 1er groupe. Par conséquent, Anaé va devoir déconstruire sa construction, grâce à l’input et aux corrections de l’entourage.
40Ces mêmes processus se retrouvent par exemple dans l’acquisition de la morphologie du pluriel. Anaé a très longtemps pensé que le pluriel de un « cheval » était des « chevals » et que un « chevaux » référait spécifiquement à un cheval noir. En effet, en français, la marque régulière de pluriel ne s’entend pas à l’oral. Seuls les noms finissant par -al et -ail changent de forme au pluriel. Aussi face à la forme « chevaux » qui pour elle ne peut pas être un pluriel, Anaé a attribué une fonction créative en la liant à une couleur particulière de cheval. Comme pour Arthur avec le bonbon noir, il est possible qu’Anaé ait opéré le lien inadéquat entre une forme (chevaux) et une fonction (noir) quand des chevaux noirs ont été désignés devant elle. C’est l’entrée progressive dans l’écrit et tout le travail scolaire sur la grammaire qui permettront à Anaé, en début d’école primaire, de comprendre et de produire correctement la règle al/aux.
Assemblages et sens ou « Anaé peut le droit de manger un bonbon ? »
41Avant de maîtriser la syntaxe, l’enfant est capable de véhiculer du sens avec ses propres constructions : ce sont des assemblages particuliers qu’il a créés tout seul à partir de segments de langage entendu. L’enfant semble associer une fonction à des segments de construction mémorisés en situation au lieu d’utiliser la structure complète.
42À 2 ans, Anaé associe la fonction de « requête » à la forme « peux » au lieu d’utiliser l’ensemble de la construction [Est-ce que je peux + verbe + objet ?] (cf. chapitre 9, « effet accordéon »). Elle produit ainsi les énoncés suivants :
« Peux à boire moi ? » au lieu de « est-ce que je peux avoir à boire moi ?»
« Peux un autre feuille ? » au lieu de « est-ce que je peux avoir une autre feuille ? » (avec une erreur de genre sur le déterminant de « feuille »).
« E peux un cisson ? » au lieu de « est-ce que je peux avoir du saucisson ? » (Anaé, 2;00)
43À 2;03, Anaé utilise la construction [peut le droit de + verbe] au lieu de [a le droit + verbe], comme dans « Anaé peut le droit de manger un bonbon ? », pour demander l’autorisation de se servir dans le paquet de bonbons. On assiste ici à la collision de deux constructions entendues dont le sens est proche [pouvoir + verbe] et [avoir le droit de + verbe], et dont l’assemblage est par conséquent redondant.
44D’autres productions sont tout aussi intéressantes, comme à 2;09 :
« Si y’a des bonbons dans mon sac ? » (pour « est-ce qu’il y a des bonbons dans mon sac ? »)
« Si c’est un tocollant ? » (pour « est-ce que c’est un autocollant ? »)
45Dans ces deux exemples, Anaé a remplacé le marqueur est-ce que de l’interrogation directe (« est-ce que tu viens ? ») par le marqueur si de l’interrogation indirecte (« je demande si tu viens »). La fonction du marqueur est correcte, mais ne s’insère pas dans la bonne construction.
46Il arrive également à l’enfant de ne pas restreindre à une catégorie particulière la construction adaptée et de l’appliquer à d’autres catégories. Ainsi à 2;06, elle produit la construction « qu’est-ce que c’est ? » normalement réservée aux objets et l’applique à une personne, sa mère, et dit « qu’est-ce que c’est ma maman ? » au lieu de « comment elle s’appelle ma maman ? ». Cette utilisation montre qu’il faut tenir compte de la syntaxe, du sens et du contexte à la fois pour maîtriser les constructions de sa langue. De même elle peut se « tromper » dans l’utilisation des prépositions en les associant à une fonction non standard.
2;01 :
« Je bois le biberon avec la chaise de papa. »
« C’est Anaé avec les genoux à papi » (sur une photo).
47Dans ces deux exemples, il semblerait qu’Anaé surgénéralise l’usage de la préposition avec, et l’utilise à la place de sur. Dans ce cas, la fonction syntaxique de mise en relation de deux éléments de la préposition et sa position dans la phrase sont en place, mais pas encore le sens. En effet, les prépositions comme sur ou sous impliquent une représentation spatiale plus complexe. Par exemple, la localisation spatiale peut être marquée de façon inexacte, avec des ellipses au niveau de la précision.
48Ainsi, à 2;02, Anaé produit l’énoncé : « Omer, il a fait caca sur ma chambre ». Ici, la fonction syntaxique et le sens de la préposition sont corrects, puisqu’il s’agit d’une localisation spatiale (le chien a fait caca sur le sol de la chambre). Or, cette construction n’est pas standard et la forme attendue serait « dans ma chambre ». En effet, la préposition sur implique une relation de contact entre deux objets, alors que dans suppose l’inclusion d’un objet dans un espace, ici celui de la chambre. Par conséquent, dans une construction, il est nécessaire de tenir compte à la fois de la structure syntaxique globale, mais également du sens de chacun de ses éléments constitutifs, qui conditionnera le choix de tel ou tel marqueur.
49On retrouve le même phénomène avec d’autres constructions, par exemple à 2;03 : « Arthur est gentil pour donner le nounours à Anaé ». Ici encore, Anaé a construit un énoncé complexe, avec une première proposition (Arthur est gentil), dont la cause est explicitée par une deuxième proposition (il a donné le nounours à Anaé), et elle matérialise la relation entre les deux par l’emploi de la préposition pour, dont l’une des valeurs est effectivement de marquer la causalité. L’assemblage fonctionne, dans la mesure où il permet de véhiculer une signification, mais sa forme n’est pas standard dans la langue.
50Ces exemples d’assemblages « créatifs » sont révélateurs de la complexité du système de la langue et des stratégies utilisées par les enfants pour le (re)construire à partir du langage entendu. En effet, l’enfant repère des unités plus ou moins larges et leur assigne un sens, puis les juxtapose dans des constructions plus complexes. Or ces constructions sont dépendantes du sens de chacune des unités qui les constituent, et c’est en grande partie le sens qui va conditionner les assemblages possibles. Dans son appropriation du système, l’enfant effectue des va-et-vient entre formes et fonctions, et se révèle capable très tôt de manipuler et d’analyser des unités et des constructions, même si les spécificités propres à chacune mettront un peu plus de temps à se mettre en place et seront notamment liées à leur fréquence dans l’input et à leur complexité sémantique.
Pour conclure
1. Pourquoi les enfants font-ils des erreurs dans leurs productions ?
51Les enfants font des erreurs car ils essaient des constructions à partir du langage entendu et assemblent parfois des éléments au mauvais moment et au mauvais endroit.
52Ils sont exposés à un input continu, linéaire, qu’ils doivent apprendre à segmenter en fonction du sens. Ils vont alors être confrontés à de nombreuses difficultés, notamment celle de l’homonymie, fréquente en français. Il faut également tenir compte du fait que cet input est uniquement oral et gestuel dans un premier temps et qu’un certain nombre d’éléments ne prendront sens qu’une fois confrontés aux formes écrites, comme par exemple la relation entre cheval et son pluriel chevaux, ou la relation morphologique entre rond et son dérivé rondeur, qui n’est pas évidente à l’oral (on n’entend pas le son /d/ dans le mot rond) mais qui est visible à l’écrit, ce qui peut être illustré par l’interprétation « moderne » d’un vers d’Apollinaire par Anaé, « la vie s’écoule » devenant « c’est cool la vie ».
53Ainsi, il est possible (à tout âge) de produire des formes sans les avoir complètement analysées et comprises, comme lorsque nous reproduisons les paroles d’une chanson (en français ou dans une autre langue) phonétiquement.
2. Que nous apprennent les « erreurs » des enfants sur leur processus d’appropriation du langage?
54Les enfants ne font pas qu’imiter les adultes mais créent des formes et du sens à partir de leur expérience langagière. Les écarts, les déviances sont des traces du travail fourni par les enfants dans leur processus d’acquisition de la langue. Ils ne font souvent que régulariser un système qui n’est plus régulier à cause des évolutions historiques dans les pratiques langagières (en ce qui concerne la morphologie verbale, par exemple). On assiste donc à des surgénéralisations, des régularisations, ou des déductions qui se trouvent ne pas fonctionner mais qui ont leur propre logique.
55Les enfants n’apprennent pas que par mémorisation et imitation du langage entendu. Ils segmentent, ils réfléchissent, ils font des essais jusqu’à ce que, en dialogue, leurs productions ne s’écartent plus des formes adultes.
56Les capacités d’appropriation de la langue dans toute sa complexité dépendent en grande partie de la quantité et de la qualité de l’input qui leur est transmis par leur entourage, et de l’étayage qu’ils reçoivent au quotidien, leur permettant ainsi de mesurer les écarts entre leurs productions et la « norme ».
Bibliographie
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Leroy-Collombel M. (2010). Éveil de la conscience grammaticale chez un enfant français entre 18 mois et 3 ans, in Neveu F., Muni Toke V., Durand J., Klingler T., Mondada L., Prévost S. (éds). Congrès Mondial de Linguistique Français – CMLF 2010, 1539-1555. Publication en ligne : http://0-dx-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1051/cmlf/2010111
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10.1017/S0959269511000585 :Markman, E. M. (1989). Categorization and naming in children: Problems of Induction, Cambridge, MA, MIT Press.
10.7551/mitpress/1750.001.0001 :Quine, W.V.O. (1960). Word and object, MIT Press, Cambridge, MA.
10.7551/mitpress/9636.001.0001 :Notes de bas de page
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