Fabriquer l’antique
Les contrefaçons de peinture murale antique au XVIIIe siècle
Extrait
La contrefaçon des peintures antiques appelait évidemment une étude technique : elle est faite, magistralement, par l’auteur, que sa formation de restauratrice rendait mieux que quiconque susceptible de la mener à bien. Mais le livre entraîne le lecteur bien au-delà d’une simple question d’érudition : c’est bien évidemment la personnalité de Guerra et ses méthodes qui sont scrutées de près ; mais c’est surtout une bonne partie de la société romaine qui défile ainsi sur la scène, du peintre...
Éditeur : Publications du Centre Jean Bérard
Lieu d’édition : Naples
Publication sur OpenEdition Books : 13 février 2020
ISBN numérique : 978-2-38050-011-0
DOI : 10.4000/books.pcjb.6240
Collection : Mémoires et documents sur Rome et l’Italie méridionale | 7
Année d’édition : 2012
ISBN (Édition imprimée) : 978-2-918887-15-7
Nombre de pages : 347
François Baratte
Préface. Autour d’une antiquité rêvéePremière partie. Découvrir les antiquités, fabriquer l'antique
Deuxième partie. La fabrication du faux. L'exemple des peintures de Guerra
Hélène Eristov
Postface. Un théâtre de dupesAnnexes
La contrefaçon des peintures antiques appelait évidemment une étude technique : elle est faite, magistralement, par l’auteur, que sa formation de restauratrice rendait mieux que quiconque susceptible de la mener à bien. Mais le livre entraîne le lecteur bien au-delà d’une simple question d’érudition : c’est bien évidemment la personnalité de Guerra et ses méthodes qui sont scrutées de près ; mais c’est surtout une bonne partie de la société romaine qui défile ainsi sur la scène, du peintre sans grand talent aux plus grands érudits, en passant par les pontifes de la Curie, et c’est aussi le milieu napolitain, celui qui touche au Musée de Portici tout au moins, que l’on entrevoit à l’arrière-plan de ces querelles autour des peintures. Oui, il s’agissait bien de fabriquer l’antique, c’est-à-dire de donner à croire aux amateurs qu’ils allaient acquérir une de ces peintures tant vantées, mystérieusement récupérée malgré les interdictions, et donc d’autant plus précieuse. Mais cette « fabrication » ne se fait pas sans règles : elle doit avoir une forme de vraisemblance, évidemment d’autant plus facile à acquérir que l’on sait finalement bien peu de choses de ces peintures – les vraies – que l’on commence à recueillir en Campanie. C’est donc en quelque sorte une vraisemblance rêvée plus qu’une ressemblance avec une réalité que l’on connaît encore trop mal. La passion de la collection étouffait trop facilement l’esprit critique, mais les érudits eux-mêmes étaient prêts à accepter des œuvres que l’on avait fabriquées à l’image de ce qu’ils attendaient.
On a quelque peine à imaginer aujourd’hui la place que ces peintures ont tenue dans la vie de la société romaine du xviiie siècle. Il fallait la triple qualification de Delphine Burlot comme restauratrice, antiquisante et spécialiste des milieux romains autour de 1750 pour les replacer aussi minutieusement dans le contexte complexe qui était le leur, fait de sens des affaires, de passion, d’érudition et de politique.
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