Alun et couperose de la région de Viterbe
p. 119-124
Texte intégral
1L’alun et la couperose de la région de Viterbe n’ont semble-t-il fait l’objet que de très courtes publications, comme ce sera encore le cas ici, en l’absence de recherches systématiques dans les archives, sur le terrain et en laboratoire, qui seules pourraient nous apporter des arguments permettant d’etayer les schémas d’évolution que nous présentons. Ces schémas nous semblent toutefois mériter qu’on les propose à la réflexion de tous, car ils suggèrent l’existence d’exploitations dispersées d’aluns et de produits associés, comme la couperose, qui auraient persisté en Italie, et dans les Etats Pontificaux, malgré les interdictions répétées de la Chambre Apostolique à partir de la fin du XVe siècle. Ces exploitations que l’on a des raisons de supposer de petite taille, dispersées et sans doute artisanales, au point de n’avoir guère attiré l’attention des chroniqueurs, pourraient remonter à des périodes lointaines, voire à l’Antiquité. La mise en évidence de l’ancienneté éventuelle de ce type d’exploitation en Italie constitue bien évidemment l’objectif prioritaire que devraient se fixer des recherches qui ne se limiteraient plus à l’alun d’alunite1 C’est en tout cas ce qu’on va s’efforcer d’exposer ici, après avoir fait le point de nos connaissances sur les productions de la région de Viterbe.
1. Le vitriol romain
2Le vitriol ou couperose est un sulfate de fer de formule FeSO4.7 H2O qui se présente sous forme de cristaux de couleur verte2. Ses utilisations en teinturerie et en tannerie sont proches de celles des aluns, mais bien plus restreintes. Aussi est-ce un produit qui demeura toujours d’un prix très inférieur à celui des aluns, et particulièrement à celui de l’alun d’alunite dont les emplois sont beaucoup plus étendus, et les résultats de bien meilleure qualité. Il fut cependant très utilisé pour certaines teintures sombres ou noires et pour la fabrication d’encres3.
3L’histoire “officielle” du vitriol romain est curieuse, car il y est dit que gisements et carrières furent redécouverts et mis en valeur, dans la région de Ferento, en 1644 par Francesco Attavante, à qui l’exploitation fut concédée par un acte sous seing privé d’Urbain VIII (Munari 1970). Or il semble que l’extraction de ce produit n’ait jamais cessé dans la région de Viterbe. Il est cité régulièrement dans les recettes d’encres du XVe au XVIIe siècle (cf. 3). En outre, Biringuccio indique dans son ouvrage posthume publié à Venise en 1540, que le vitriol romain « se tire au conté de Baignorée » (Bagnoregio, à une vingtaine de kilomètres au nord de Viterbe) et qu’il est aussi bon que celui de Chypre (Biringuccio 1572, feuillet 48)4. Mais l’exploitation semble avoir cessé à la fin du XVIe siècle (Grilloe Cipriani, p. 35-55). Il serait particulièrement intéressant de savoir si ce fut aussi le cas des fabriques de vitriol de Selvena di Santa Fiora (ou del Monte Amiato), à environ une quinzaine de kilomètres à l’ouest/nord-ouest, d’Acquapendente (fig. 1). D’autant que Vetriolo et Selvena dépendaient alors de la Chambre Apostolique, et que celle-ci pouvait avoir intérêt, comme on le verra plus loin, à ce que ces fabrications s’arrêtent. Cela valant aussi pour les mines et carrières d’alun et /ou de vitriol de Ferento, dont l’exploitation est attestée dès le XIIIe siècle (cf. 3), et dont on a quelques raisons pour supposer qu’elles ne s’arrêtèrent que contraintes et forcées.
4Dans ces conditions la redécouverte du vitriol romain de la région de Ferento en 1644 ressemble un peu à une mise en scène, sa disparition temporaire devant sans doute quelque chose au monopole de l’alun que tentèrent d’imposer Pie II et son successeur Paul II, en faveur de la Tolfa, vers la fin du XVe siècle (Delumeau 1962, p. 23). Mais, bien que probable, cette liaison reste à démontrer. Quoi qu’il en soit, la Chambre Apostolique qui gérait les fabriques d’alun d’alunite de la Tolfa se rendait acquéreur de l’exploitation du vitriol romain en 1738 (Munari 1970). Elle construisit un nouvel établissement dont on possède les plans détaillés, relevés en 1844-1845, par l’architecte Virgilio Vespignani (Bentivoglio 1983)5. Des restes importants de cet établissement subsistent encore au lieu-dit l’Edificio (fig. 1). L’exploitation s’y poursuivit jusqu’en 1867 (Pinzi 1887, p. 551).
5Les procédés employés pour la préparation du vitriol ou couperose dans la fabrique de l’Edificio ne présentent guère d’originalité, autant qu’on puisse les reconstituer à partir de quelques brèves indications du XIXe siècle (Bentivoglio 1983). La terre vitriolique dont on précisera plus loin la genèse et les caractéristiques est extraite dans les premiers jours de mars et mêlée aux résidus d’exploitation des années précédentes. Après un temps de maturation qui n’est pas précisé, mais qui ne devait pas être très long, la terre est épuisée par des lavages successifs à l’eau froide. La lessive ainsi obtenue est décantée, puis concentrée par ébullition dans des cuves en plomb. Enfin elle est mise à refroidir et cristalliser, avant d’être raffinée par redissolution et recristallisation lente6.
6Vers le milieu du XIXe siècle, la production annuelle était de 265 000 livres, soit environ 100 tonnes, dont il ne restait après raffinage que 140 000 livres, soit un peu moins de 50 tonnes7. Si les chiffres rapportés par Bentivoglio sont exacts (et l’on a quelques raisons de le croire), ce déchet de près de 50 % au raffinage mérite d’être souligné, car il pourrait s’expliquer, en partie du moins, par une proportion importante de sulfates d’aluminium, simples ou complexes, dont on reparlera à propos des gisements de la région de Viterbe.
2. Les données géologiques
7La région de Viterbe, principalement celle qui s’étend sur une trentaine de kilomètres jusqu’à hauteur de la bordure nord du lac de Bolsena (fig. 1), est bien connue des géologues pour l’importance de ses phénomènes d’altération fumerollienne et/ou hydrothermale. Ils sont à l’origine de la transformation d’une partie de son matériel volcanique en kaolin et en alunite (Lombardi 1977 ; Lombardi and Mattias 1977 ; Lombardie Sonno 1979).
8Mais ces altérations qui se caractérisent par la prédominance des phénomènes de kaolinisation et d’alunitisation ne sont pas les seules à affecter les formations volcaniques de cette région. On y trouve en effet d’importants dépôts de marcassite, FeS2, qui sont fréquemment interstratifiés dans des tufs volcaniques plus ou moins kaolinitisés. Ces dépôts résulteraient de l’action, en milieu plutôt humide et réducteur, d’émanations d’acide sulfhydrique, H2S, très importantes dans la région (comme le sont aussi celles de gaz carbonique) sur des composés du fer, principalement des chlorures, provenant eux-aussi de processus fumerolliens. Les zones de battement ou d’émergence des nappes phréatiques semblent avoir été particulièrement propices à ce type de réaction dont les produits, plus ou moins altérés, se rencontrent souvent en couches horizontales aux flancs des profonds ravins qui entaillent la région, dont le ravin de Ferento constitue l’exemple type (Camponeschie Nolasco 1986).
9Or on sait que la marcassite s’oxyde facilement en se transformant en sulfate, la couperose ou vitriol vert, FeS0 4. 7H 2 0. Ainsi se sont formés les gisements du vitriol romain. Il suffisait ensuite de laver à froid les terres retirées des couches qui renferment les pyrites altérées, pour en extraire la couperose dont on concentrait la solution, afin de la faire cristalliser au refroidissement. Le raffinage de la couperose ainsi obtenue, par redissolution et recristallisation lente, entraînait, comme on l’a vu, une diminution de près de 50 % du produit brut.
10Il est vraisemblable que cette diminution soit due pour une large part à la présence de différents produits qui se trouvaient avec la couperose dans ses gisements : l’alunogène, Al2(SO4)3.18H2O, signalée notamment à Ferento et Magugnano, ou des aluns comme l’halotrichite, FeAl2 (SO4)4. 18H2O, dont nous avons vérifié l’existence, voire l’alun potassique K. Al(SO4)2.12H2O... (Maugini 1890 ; Millosevich 1901)8. Tous ces produits alumineux trouvent leur origine dans le fait que la transformation de la marcassite en sulfate de fer, donc en couperose ou vitriol, libère de l’acide sulfurique, H2SO4, qui se combine avec les tufs plus ou moins altérés, à l’intérieur desquels les couches de marcassite sont interstratifiées9. Ainsi ce qu’on cherchait à éliminer au raffinage c’était curieusement des produits dont le mélange avec la couperose n’aurait pu qu’étendre et améliorer ses utilisations en teinturerie et en tannerie. Mais c’était précisément ce qu’il fallait éviter afin de ne pas risquer de concurrencer, avec un alun de très bas prix, l’alun d’alunite de la Tolfa. D’ailleurs on peut se demander si, bien avant l’ouverture des mines de la Tolfa (voire après, on y reviendra), on n’aurait pas cherché, tout au contraire, à augmenter la part de ces mêmes produits, aux dépens de la couperose, ce qui justifierait qu’on ait pu parler alors de productions d’aluns, comme celle de Ferento à laquelle nous nous intéressons particulièrement.
3. L’alun de Ferento
11Ferento était une cité médiévale, rivale de Viterbe, qui se trouvait à moins d’une dizaine de kilomètres de celle-ci (fig. 1). Elle fut détruite en 1172 par les habitants de Viterbe. Ferento occupait les ruines d’une ville romaine dont il subsiste de nombreux vestiges, souvent importants et bien conservés (Maetzke et al. 2001 ; Güll et Scaia 2002).
12L’alun de Ferento nous est connu par le tarif de péage annexé aux statuts de Viterbe, qui seraient de 125110. Il y figure avec deux autres variétés d’aluns dont nous reproduisons les appellations et les péages correspondants, selon la traduction du latin à l’italien qu’en a donnée Cesare Pinzi (Pinzi 1887, p. 551).
Per ogni libra di allume di rocca | 2 soldi, soit 24 denari |
Per ogni soma di allume zuccarino | 12 denari |
Per ogni soma di allume di Fèrento | 1 denaro |
13On notera d’abord que l’alun était donc exploité à Ferento, ou continuait à l’être, après la destruction de 1172, ce que semblent confirmer les installations du XIIIe siècle découvertes lors des fouilles effectuées par Gabriella Metzke et Paolo Giill dans la cité médiévale. Les huit fosses allongées, mises au jour dans un espace artisanal, évoquent par bien des aspects les traces que pourraient laisser les bassins d’évaporation et de cristallisation en bois, semi-enterrés, que décrivent les traités du XVIe siècle, pour la production de différents sels minéraux qui, dans le cas présent, pourraient être de l’alun et du vitriol (fig. 2).
14On notera ensuite les différences d’imposition considérables qui existent entre les trois variétés d’aluns inscrites au tarif de péage de Viterbe. L’alun de Ferento est taxé à la « soma », c’est-à-dire à la charge transportée par une bête de somme, âne ou mulet le plus souvent. Ce qui peut difficilement représenter moins d’une vingtaine de kilogrammes. Dans ces conditions l’imposition de l’alun de Ferento aurait été environ mille fois plus faible que celle de l’alun de roche. Ce qui ferait penser que ce dernier pourrait n’avoir été qu’un produit à usage médical, et sûrement pas artisanal11. Contrairement à l’alun de Ferento.
15Bien qu’on sache que les taxes étaient loin de refléter la valeur estimée des produits, étant aussi l’un des éléments de la politique économique des cités, on est bien obligé d’admettre que l’alun de Ferento n’était certainement pas considéré comme un produit d’une exceptionnelle qualité. Il était d’ailleurs taxé au même niveau que les écorces de chêne et autres produits végétaux servant au tannage (Pinzi 1887, p. 551).
16Mais ici on essayera surtout de comprendre ce que pouvait être l’alun de Ferento et quels pouvaient être ses rapports avec le vitriol romain qui sera produit quelques siècles plus tard dans la même région. S’agit-il du même produit, ou d’un produit différent ? Il est sûr en tout cas que ce sont les mêmes matériaux de base qui ont été exploités dans l’un et l’autre cas. Car ceux-ci ne peuvent être que les niveaux pyriteux altérés qui sont interstratifiés dans les tufs volcaniques plus ou moins kaolinitisés de la région. On a vu qu’ils apparaissaient souvent en couches subhorizontales, aux flancs des ravins qui entaillent profondément cette région où subsistent de nombreuses traces d’exploitations-à ciel ouvert, en puits, en galeries ou sous d’autres formes – traces dont certaines remonteraient à l’Antiquité (Camponeschie Nolasco 1986, p. 283)12.
4. Les vicissitudes d’une production
17Si l’on retient l’hypothèse d’une exploitation ancienne des gisements de la région de Ferento, antérieure par exemple au XIIIe siècle, voire antique, le produit le plus facile à préparer à ces époques anciennes était sûrement celui qu’on obtenait par lavage à froid des terres alumineuses et vitrioliques extraites des niveaux pyriteux altérés, suivi de l’evaporation et de la cristallisation des lessives ainsi obtenues. Ce qui pouvait être fait dans de simples bacs en planches, exposés au soleil et à la chaleur de l’été (fig. 2). On récoltait ainsi un mélange d’alunogène, d’aluns et de vitriol qui aurait eu – comme on l’a déjà signalé à propos des pertes importantes enregistrées à la manufacture de l’Edificio, lors du raffinage du vitriol – des utilisations en teinturerie et en tannerie plus intéressantes que celles du vitriol raffiné13. Et de surcroît un produit très bon marché, compte tenu de la simplicité des opérations à mettre en œuvre.
18On comprend qu’une telle production pût être mal vue de la Chambre Apostolique, quand celle-ci eut la charge de faire appliquer le monopole de l’alun de la Tolfa. D’autant que les gisements de pyrites altérées occupent, de manière discontinue certes, des surfaces très importantes dans la région de Viterbe, allant vers le nord au-delà de Vetriolo, et vers l’est presque jusqu’au Tibre (fig. 1). Des exploitations primitives d’alun pouvaient donc s’y être multipliées. Aussi l’oubli des gisements de Ferento, précédant leur redécouverte au milieu du XVIIe siècle, ne fut peut-être qu’une manière déguisée de présenter ce qui était simplement la conséquence d’interdictions répétées14. La redécouverte des mines anciennes et leur réouverture, avec l’élaboration d’un produit nouveau, le vitriol raffiné, ne présentaient plus alors de risques pour le monopole de la Tolfa, tant étaient différentes les propriétés de ce vitriol raffiné et celles de l’alun. Il est d’ailleurs assez curieux de constater qu’à Ferento dans les Etats Pontificaux, on passa très probablement d’un produit proche de l’alun, à un produit qui en était fort éloigné, le vitriol raffiné. Alors que dans le reste de l’Europe ce fut l’évolution inverse qui se produisit15. Mais les contraintes imposées dans le Latium, et sans doute aussi dans d’autres régions d’Italie, par la défense du monopole de la Tolfa, étaient sans influence ailleurs.
19Pour conclure on croit nécessaire de rappeler que des exploitations primitives d’alun, comme celle de Ferento, ou celles que stigmatise la Chambre Apostolique (cf. note 14), peuvent, par l’extrême simplicité qu’on leur prête, avoir été fort anciennes, et peut-être même antiques. À leur propos, on se contentera de redire l’intérêt qu’on aurait à étudier les gisements de ces terres alumineuses, apparemment fort nombreux en Italie, en y incluant leur environnement géologique, historique, archéologique, etc. Car on y découvrira peut-être une économie artisanale dont on pressent l’existence, mais qui est demeurée en marge des exploitations plus importantes, et pourrait de ce fait n’avoir guère été prise en compte par les chroniqueurs et les historiens. S’étant déjà exprimé à ce sujet, il n’est sans doute pas indispensable d’y revenir ici16. Toutefois on tient à y rajouter la nécessaire exploration des minières, carrières à ciel ouvert, galeries, puits et autres structures d’extraction qui pourraient nous apporter des éléments de datation irremplaçables17.
Bibliographie
Bibliographie
Bentivoglio 1983 : BENTIVOGLIO (E.), Una fiorente in-dustria della Camera Apostolica/Il vetriolo di Viterbo, Biblioteca e Società, 1983, p. 28-31.
Biringuccio 1572 : BIRINGUCCIO (V.), La Pyrotechnie, trad. J. Vincent de, De la pirotechnia, Venise, 1540.
Camponeschie Nolasco 1986 : CAMPONESCHI (Β.) et NOLASCO (F.), Le risorse naturali della regione Lazio, Monti Vulsinie Maremma Viterbese, l, Roma, 1986, p. 282-283.
Delumeau 1962 : DELUMEAU (J.), L’alun de Rome, XVe-XIXe siècle, Paris, 1962, (École Pratique des Hautes-Études-VIe section).
Grilloe Cipriani 2000 : GRILLO (M.) et CIPRIANI (G.), Villa Vitrioli/luoghi, gente, fattie personnaggi, Montefiascone, 2000.
Gülle Scaia 2002 : GÜLL (P.) et SCAIA (F.), éd., Ferento, Civitas Splendissima, Storie, reperde immagini di un’antica città della TUSCI A. Guide de l’exposition, Viterbo, 2002.
Lombardi 1977 : LOMBARDI (G.), Alunite in Italy. Occurrence and Genesis, in : Proc. 8th. Int. Kaolin Symposium and Meeting on Alunite, Madrid-Rome, 1977, p. 1-19.
Lombardi and Mattias 1977 : LOMBARDI (G.) et MATTIAS (P.), Excursion n° 3, in Guidebook for the Excursions in Italy, in : Proc. 8th. Int. Kaolin Symposium and Meeting on Alunite, Madrid-Rome, 1977, p. 29-45.
Lombardie Sonno 1979 : LOMBARDI (G.) et SONNO (M.) Studio petrografico dell’alunite di Mezzanoe di altre
vulcaniti alterate della caldera di Latera (Vulcani Vulsini, Lazio), Periodico di Mineralogia, 1979, 48, p. 21-52.
Maetzke et al. 2001 : MAETZKE (G.), CALABRIA (M. E.), FRONTI (D.), GÜLL (P.), PANICHI (F.), PATILLI (T.), PREGAGNOLI (S.), ROMAGNOLI » (G.), SCAIA (F.), VARANO (M.), Ferento (Viterbo). Indagini archeologiche nell’area urbana (1994-2000), Archeologia Medie-vale, XXVIII, 2001, p. 295-322.
Maugini 1890 : MAUGINI (F.), Sull’allumogene del Viterbese, Bollettino del Reale Comitate Geologico Italiano, XXI, 1890, p. 36-39.
Millosevich 1901 : MILLOSEVICH (F.), Di alcuni giacimenti di alunogeno in Provincia di Roma, Bollettino della Società Geologica Italiana, XX, 1901, p. 263-270.
Morichini 1852 : MORICHINI (D.), Relazione sopra la fa-brica di vetriolo verde di Viterbo, in commercio vetriolo romano, in : Raccolta degli Scritti editie inediti del Cav. Dott. Domenico Morichini, Vol. secondo, Monte Mario, Roma, 1852, (Bibliothèque de l’ancien hôpital S. Maria della Pietà).
Munari 1970 : MUNARI (M.), Produzione di vetriolo con licenza del Papa, Tuscia, n° 10, Ottobre 1970.
Pinzi 1887 : PINZI (C.), Storia della Citta di Viterbo, Vol. 1, Roma, 1887.
Singer 1948 : SINGER (Ch.), The Earliest Chemical Industry. An Essay in the Historical Relations of Economics and Technology illustrated from the Alum Trade, London, 1949 (The Folio Society).
Notes de bas de page
1 L’alun d’alunite, KAl(SO4)2.12H2O, a donné lieu en Italie à une fabrication très développée à la Tolfa, près de Civitavecchia dans les États Pontificaux, à partir de 1462 semble-t-il, et à un commerce aussi étendu que fructueux (Delumeau 1962). D’autres fabriques d’alun d’alunite, qui n’eurent jamais l’importance de celles de la Tolfa, existèrent dans plusieurs régions d’Italie, en Campanie et dans le sud de la Toscane, notamment. La prédominance économique de l’alun d’alunite eut sans doute pour conséquence de laisser dans l’ombre de nombreux autres produits, comme ceux de la région de Viterbe, dont les utilisations étaient plus ou moins analogues, mais les qualités moindres et les prix très inférieurs. La multiplication éventuelle d’exploitations artisanales consacrées à ce type de produits de substitution fut peut-être loin d’être négligeable pour la teinturerie et la préparation des cuirs et des peaux. D’autant que ces exploitations peuvent avoir été fort anciennes, comme on l’a déjà suggéré en attendant d’être à même de le démontrer.
2 On parle alors de vitriol vert ou de couperose verte, par opposition au vitriol bleu ou couperose bleue, qui est du sulfate de cuivre. L’un et l’autre produits étaient connus dans l’Antiquité. On notera que les cristaux de couperose verte acquièrent parfois une coloration brunâtre qui est due à la transformation superficielle du sulfate ferreux, FeSO4, en sulfate ferrique, Fe2(SO4)3, et, plus souvent encore, en sulfate ferrique basique Fe2(SO4)3, nFe2O3 ?
3 Encres noires à base d’acide tannique ou gallique (voir à ce propos l’article de Danièle Ruggiero « Gli inchiostri antichi per scri-vere », dans Chimica e Biologia applicate alla conservazione degli archivi, Pubblicazioni degli Archivi di Stato, saggi 74, 2002). Ce type d’encre semble avoir été connu dès l’Antiquité si l’on en croit la recette attribuée à Philon de Byzance, qui serait du IIIe siècle avant notre ère ; elle est citée dans l’ouvrage « Les encres noires au Moyen Âge » de Monique Zerdoun Bat-Yehouda, Ed. du CNRS, 1983. Des indications sur l’existence de teintures métallogalliques dans l’Antiquité figurent aussi dans Pline, H. N. XXXIV, 123-124.
4 Sans doute s’agit-il plus précisément de la zone de Vetriolo qui se trouve à 3 ou 4 km de Bagnorégio, en direction du sud-est (fig. 1) (Grillo et Cipriani 2000, p. 35-55).
5 On se doit de signaler ici que nous n’avons pas eu le loisir de consulter à l’Archivio di Stato di Roma les documents originaux de Virgilio Vespignani, résumés par Enzo Bentivoglio.
6 Les renseignements fournis par le Docteur Morichini confirment en les précisant les indications précédentes (Morichini 1852) ; Mais, surtout, elles comportent un certain nombre de données analytiques dont on se servira plus loin.
7 Il s’agit en fait d’une assez petite production, mais dont la qualité était sans doute particulièrement appréciée (peut-être par habitude ou a priori, comme ce fut le cas pour l’alun de la Tolfa au XIXe siècle). La production française de couperose atteignait quant à elle 1414 tonnes en 1830, tandis que ses importations, qui étaient encore de 971 tonnes (métriques) en 1787, n’étaient plus que de 4 tonnes en 1830. Cf. Apperçu de l’extraction et du commerce des substances minérales en France avant la Révolution, Journal des Mines, Vendémiaire an III, 1794, p. 55-92, et Le Play et De Cheppe, Observations sur le mouvement commercial des principales substances minérales entre la France et les puissances étrangères, pendant les douze dernières années, et particulièrement pendant les années 1829, 1830 et 1831, Annales des Mines, IIIe série, t. II,1832, p. 501-548.
8 Les formations volcaniques de la région de Viterbe, et les cristallisations qui s’y rencontrent, avaient depuis longtemps attiré l’attention des savants et des érudits de la fin du XVIIIe siècle, dont l’Abbé Scipio Breislak qui administra un temps les alunières d’Agnano (Singer 1948, p. 175 ; Delumeau 1962, p. 28). Breislak laissa d’ailleurs son nom à une cavité naturelle de la région de Viterbe.
9 Les analyses effectuées par le Docteur Morichini confirment pleinement la richesse en sels d’aluminium du minerai de Ferento, et leur élimination progressive au cours des opérations de purification. C’est ainsi que dans le minerai le rapport du sulfate de fer au sulfate d’alumine serait proche de 1. 9 alors que dans le produit raffiné ce rapport serait de 7. 4 (Morichini 1852).
10 Il aurait existé une version plus ancienne de ces statuts (renseignements que nous devons au Professeur Gabriella Metzke dont la disparition prématurée nous a profondément affectés).
11 Dans beaucoup de textes médiévaux l’alun de roche est de l’alun d’alunite, peut-être oriental à cette époque. Mais ici l’expression « allume di rocca » est déjà une interprétation que fait Cesare Pinzi du texte latin qui parle seulement de « alluminis de castello ». Quant à l’allume zuccarino, « alluminis Çuccarini », il s’agit souvent d’un alun en principe moins pur que le précédent, dont les cristaux évoquent ceux du sucre. Mais ces appellations demeurent encore peu explicites pour nous.
12 Nous n’avons pas encore pu interroger les auteurs, ou retrouver leurs sources, à propos de cette indication chronologique qu’il serait important de vérifier.
13 On rappelle que c’est à sa proportion plus élevée de sels d’aluminium, aluns et alunogène, et à sa moindre proportion de couperose ou vitriol, que le produit non raffiné devrait sa supériorité, en teinturerie et en tannerie, sur le produit raffiné. Mais la qualité de cette production primitive (qui consistait simplement à laver les terres alumineuses et vitrioliques) avait déjà pu être améliorée, et de longue date, en choisissant, d’après leurs colorations, les matières premières les moins riches en vitriol, et donc en fer, ce qui revenait à privilégier celles qui étaient les plus riches en sels d’aluminium. D’autres procédés d’amélioration, plus complexes, peuvent être utilisés, mais leur emploi n’est pas attesté avant le XVIe siècle, ce qui peut ne pas être très significatif, compte tenu des lacunes de nos connaissances. Parmi ces procédés, l’un des plus répandus consiste à exposer, aussi longtemps que possible les matières premières aux intempéries. La couperose s’oxyde alors en donnant des produits qui peuvent s’éliminer au lavage, tandis que la formation des sels d’aluminium est favorisée. Un autre de ces procédés comporte un grillage modéré du minerai, qui permet d’arriver à peu près aux mêmes résultats, mais plus rapidement. On n’a aucun témoignage indiscutable de l’utilisation de l’un ou l’autre de ces deux procédés dans le Latium. Mais le premier, le plus simple à réaliser, n’est pas à exclure a priori, y compris dans l’Antiquité.
14 En témoignent encore, dans les premières décennies du XIXe siècle, les Notificazioni de la Chambre Apostolique, dont celle du Cardinal Cristaldi en date du 20 Décembre 1828 qui stipule « Si rinnova per ordine espresso di SUA SANTITA’il divieto di far uso delle Terre Alluminose di Scrofano, Filacciano, e di qualsivoglia altra provenienzia già prescritto nell’Art. ° 2. °della Notificazione del 25. Settembre 1824 ».
15 Sur ces évolutions, cf. dans le même volume la communication relative à l’alun de l’Aveyron.
16 Voir dans ce même volume, M. Picon, Des aluns naturels aux aluns artificiels et aux aluns de synthèse : matières premières, gisements et procédés, et plus particulièrement, p. 33 (4. Les produits chimiques et les mines non métalliques).
17 Non sans avoir expressément souligné les risques d’accident inhérents à ce type d’exploration, pour lequel on ne saurait prendre trop de précautions.
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