De « l’artisanat » aux métiers. Quelques réflexions sur les savoir-faire du monde romain à partir de l’exemple pompéien
p. 7-26
Remerciements
Ce chapitre, constamment remis sur le métier pendant les deux années écoulées, a été présenté à trois reprises : à Aix-en-Provence en mai 2009, dans le cadre de la table ronde internationale « À l’ombre du volcan. Artisanat et vie quotidienne à Pompéi (et dans quelques autres lieux) », organisée par le Centre Camille-Jullian ; à Rome, en octobre 2009, lors de la réunion de travail qui fonde ce volume ; enfin, à Bordeaux en avril 2010, au cours d’un séminaire de l’Institut Ausonius.
À chaque présentation, les participants m’ont fait l’honneur de me faire part de leurs réflexions sur ce thème, au cours de discussions souvent passionnées. Que tous trouvent ici l’expression de mes plus vifs remerciements. En particulier, les pages qui suivent doivent beaucoup aux remarques de M. Pernot, J.-P. Brun, A. Duvauchelle, A.-F. Garçon, Ph. Prévot, N. Tran et A. Wilson. Cependant, il va de soi que leur contenu reste sous ma seule responsabilité.
Texte intégral
1Il pourrait sembler aussi imprudent que paradoxal de chercher à abandonner un paradigme au moment même où il connaît un vif intérêt, mesurable à l’aune des publications le prenant pour sujet. Cependant, le poids historiographique attaché à l’artisanat rend indispensable l’adoption d’un point de vue critique à son égard.
Questions théoriques
Définition(s) de l’artisanat
2Je commencerai par souligner qu’il s’agit d’un concept qui semble être très francophone, pour ne pas dire français. Les études anglo-saxonnes paraissent, au moins depuis R.J. Forbes, s’être principalement concentrées sur le concept global de Technology pour l’ensemble du monde classique, en se polarisant sur l’idée de progrès technique, afin notamment de le corréler au développement économique1. Les germanophones ont suivi une approche assez similaire, centrée sur la Technologie, tout en développant précocement le concept complémentaire de métier (Handwerk)2. Dans le domaine francophone, il y a eu, depuis une vingtaine d’années, un resserrement constant vers l’étude des seuls objets manufacturés, entendus implicitement comme ceux que l’on peut et que l’on sait retrouver en fouille3, en dépit d’honorables précédents4. De ce fait, l’artisanat se limiterait en pratique aux seules productions céramique, métallique (fer et alliages cuivreux pour l’essentiel, plus rarement les autres métaux) et osseuse, le textile restant généralement étudié par ses moyens de production (fusaïoles et pesons). Cette limitation n’est pourtant que très rarement explicitée : alors que depuis une dizaine d’années les rencontres sur l’artisanat se sont multipliées, seules deux définitions ont été proposées pour ce concept. La première est due à A. Ferdière5 :
Je limite le terme d’artisanat à la production d’objets manufacturés, à l’exclusion donc des métiers alimentaires (boulangers, bouchers,…) ainsi que des métiers de la construction proprement dite ; l’acquisition ou la production de matériaux de construction (pierre, chaux, terres cuites architecturales,…) peuvent toutefois être prises en compte ici6.
3Bien que cette distinction soit considérée par son auteur comme « opérationnelle » et « non dogmatique »7, elle semble recueillir l’approbation générale dans les rencontres les plus récentes8. Une seconde, n’ayant guère bénéficié de la large diffusion qu’elle méritait, a été exposée par S. Santoro dans le cadre du projet européen CRAFTS :
L’artigianato è il processo di lavoro attraverso cui persone dotate di uno specifico saper fare e direttamente operanti sulle materie prime o su prodotti semifiniti le trasformano in oggetti manufatturati secondo schemi e progetti predefiniti e condivisi dalla comunità, destinati ad una diffusione verso l’esterno dell’ambito di produzione9.
4Cette définition est suffisamment bien ciselée pour prétendre à une valeur fonctionnelle toutes périodes confondues. Cependant, dans son application immédiate, les produits alimentaires en sont exclus en raison de leurs liens avec l’activité agricole, alors qu’ils pourraient parfaitement s’y intégrer de l’avis même de son auteur10.
5Quelle que soit la valeur de détail que l’on donne au terme d’artisanat, cette notion reste fortement entachée d’une distorsion modernisante. Consciemment ou non, ce terme est associé – par opposition – au changement de système technique apparu au XIXe s. lors de la Révolution industrielle, avec la généralisation de la mécanisation du travail par l’exploitation de nouvelles sources énergétiques (vapeur et électricité)11. Le terme d’artisanat apparaît trop marqué par l’idée d’un déterminisme évolutif trompeur qui voudrait faire de cette manière de produire une simple étape dans la marche à l’industrialisation. Le recours à ce point de vue a, dans les études passées, conduit à organiser une compétition à peine tacite pour déterminer quelle aire de civilisation a pu, et sous quelle forme, préfigurer la Révolution Industrielle12.
6Ces différentes remarques font qu’il y a lieu de se demander si le concept d’artisanat a sa raison d’être dans le monde romain ; il me semble même opportun de l’abandonner. La principale raison de cet abandon est l’inévitable flou inhérent à sa définition : si un concept efficace est un concept clair, l’artisanat est une idée linguistiquement commode mais inefficace, vu que la définition de ses limites échappera toujours au consensus, en raison même de ses fondements contemporains. De plus, son utilisation ne porte qu’à des exclusions arbitraires rarement justifiées de sources ou de fragments de sources. Alors que celles-ci sont extrêmement réduites pour l’Antiquité, il est méthodologiquement discutable de prétendre comprendre un phénomène après avoir effectué des retranchements successifs dans ses éléments constitutifs. Du simple point de vue de la validité de l’échantillon pris en compte, le risque d’erreur paraît énorme.
Postulats fondant une étude technique
7En s’éloignant de l’artisanat, il semble possible d’entreprendre une recherche ayant vocation, à partir d’une étude technique, à résoudre des questions d’ordre économique et social13. Avec une telle direction, il est indispensable de prendre en compte l’intégralité des sources disponibles (archéologiques, épigraphiques, iconographiques, juridiques et littéraires) quelle que soit leur diversité et l’éventuelle difficulté de leur mise en relation, voir leur antagonisme dans certains cas.
8Par étude technique, j’entends étude d’une chaîne opératoire dont les principaux composants sont : matériaux, outils, gestes, savoirs, énergies et acteurs14. Ces éléments peuvent être regroupés deux à deux : les deux premiers sont associables par leur matérialité, les deux suivants par leur caractère cognitif, les deux derniers étant plus transversaux et polymorphes. Il convient toutefois de garder constamment à l’esprit que le résultat de la chaîne opératoire est celui de l’interaction de ces six éléments entre eux. Les possibilités d’approche varient fortement en fonction de chaque composant, mais aussi de ce qui est soumis à l’étude. Pour prendre un exemple, observer un objet fini permet de discerner le ou les matériaux employé(s) ; appréhender le savoir déployé lors de la manipulation d’un ou de plusieurs outil(s) ayant permis la conception de l’objet fini n’aboutit qu’après un long travail d’abord de restitution des gestes, puis d’interprétation plus large.
9En raison de leur rareté, notamment, les différentes sources dont nous disposons n’offrent pas le même point d’observation et n’apportent donc pas les mêmes données, tout en restant souvent complémentaires15. Pour l’étude technique, les sources épigraphiques sont délicates à mettre en œuvre ; elles peuvent cependant suppléer les textes – quelle que soit leur nature – en éclairant certains concepts sous un autre angle. Cependant leur usage majeur resterait dans la résolution des questions économiques et sociales. Il serait vain de chercher à détailler l’apport des sources textuelles, leur spectre s’étendant des traités de littérature technique16 à des détails en incise de récits dont le but est éloigné d’une explication technicienne17. Avec des contributions allant de la description de certains gestes aux concepts régissant – dans l’ensemble de la société – le rapport au travail et à la production, il serait réducteur de ne pas exploiter le corpus textuel. Quant au corpus iconographique, malgré la prudence interprétative avec laquelle il doit être souvent manié, une fois décryptés les codes régissant les représentations d’activités, il permet, parmi de nombreuses autres formes d’interprétation, de compléter certaines chaînes opératoires. Enfin, les éléments mis au jour par l’archéologie – déchets, ratés de fabrication, instrumentation construite, outils mobiliers, objets complets et intacts, etc. – permettent de saisir de manière parcellaire les différents moments du processus de production après une nécessaire interprétation18.
10Théoriquement, la multiplication des fouilles devrait permettre, selon un processus vertueux s’il est rétroactif, d’alimenter de façon exponentielle la connaissance sur ces résultats de chaînons opératoires. Il convient cependant de mettre en place un postulat opérationnel : considérer que, pour une aire de civilisation donnée – ici le monde romain –, il existe une koinè technique. Je la définirai comme suit :
Ensemble des procédés techniques employés à une époque donnée dans une aire spécifique (ici l’ensemble du bassin méditerranéen, étendu aux espaces de la domination romaine).
11Ce postulat est inconsciemment reconnu par quiconque travaille sur l’artisanat dans l’Antiquité. C’est lui qui permet de recourir à des comparaisons d’exemples situés à deux extrémités chronologiques ou géographiques du monde romain. Il recoupe partiellement l’idée de culture technique19, entendue comme les choix ‘culturels’ opérés dans la mise en œuvre d’un procédé technique.
12On pourrait s’interroger sur l’intérêt de mettre en place un tel postulat, alors même que d’autres concepts existent déjà et n’ont pas encore été complètement exploités, comme le « système technique » de B. Gille20 ou le « complexe techno-économique » d’A.-F. Garçon qui dérive de la première notion en l’affinant21. Le « système technique » correspond à une vision de la macro-structure technique qui prendrait en compte tous les éléments et leurs relations ; le « complexe techno-économique » est à la fois plus large – notamment par la prise en compte des données économiques et sociales –, et plus précis en se plaçant ouvertement à une échelle infra-mondiale. Le postulat de koinè technique est une adaptation de ces deux notions aux conditions extrêmes imposées par l’Antiquité ‘classique’, qui souffre d’un trop-plein de sources par rapport aux périodes antérieures – ce qui a eu des conséquences sur le niveau de détail déployé dans les études techniques, champ relativement récent pour cette période – et de sources textuelles trop peu détaillées pour arriver aux résultats des périodes successives.
13La koinè est loin de l’idée de système, faute d’avoir des éléments à connecter les uns aux autres, sauf à de rares exceptions. C’est un concept de transition, destiné à être interrogé, voire remis en question, quand les connaissances seront suffisamment développées pour permettre de démontrer qu’elle n’existe pas, ou bien seulement à un degré de fait primaire.
La production : questions techniques
14Deux séries de questions sont à poser dans cette recherche. La première est directement liée à l’étude technique, bien que ses implications dépassent le cadre de la seule histoire des techniques ; la seconde est une extension vers les domaines de l’histoire économique et sociale, destinée à mieux cerner la place des produits et des producteurs dans l’ensemble de la société romaine. Dans la chaîne opératoire, chacun des éléments doit être interrogé, les réponses apportées pouvant avoir des conséquences sur les autres éléments ou sur des problématiques plus amples.
15Définir les virtualités – prioritairement physicochimiques – des matériaux employés permet de resserrer le champ des questions techniques et de leurs applications possibles22. La question de l’approvisionnement, pour simple qu’elle apparaisse, peut ouvrir un abîme de problèmes connexes que j’évoquerai sans exhaustivité : d’où vient – géographiquement – le matériau ? Est-il brut ou bien a-t-il été soumis à une transformation primaire ? Quelle(s) technique(s) déployer pour son acquisition ? Par quel(s) réseau(x) d’agents et de moyens est-il parvenu sur le lieu de transformation ? Parmi ces interrogations touchant à la logistique, il en est une qui n’est que trop rarement abordée, sauf pour les produits alimentaires : la disponibilité. Selon quelle temporalité le matériau peut-il être employé ? Quels sont les temps nécessaires à son obtention avant son utilisation23 ? Des saisons existent-elles ? Que devient une activité fondée sur un matériau disponible seulement une partie de l’année sans moyen de stockage ? Quelles sont les techniques déployées pour ce stockage et dans quel(s) espace(s) ?
16L’action technique dans la chaîne opératoire se fait au moyen d’outils dont l’éventuelle immatérialité n’interdit pas l’étude24. Cependant, la majeure partie des outils étudiés sont tangibles, par leur conservation, leur représentation ou leur description, quant il ne s’agit pas plus prosaïquement des traces qu’ils ont laissées. Il convient de s’interroger sur leur spécificité fonctionnelle et sur leur valeur intrinsèque dans la chaîne opératoire : quel(s) usage(s) – possibles et effectifs dans un contexte donné – pour un unique outil ? À quel(s) moment(s) sert-il et de quelle façon ? Rétroactivement, un unique outil bien identifié permet-il de caractériser une chaîne opératoire spécifique ? Si non, combien seront nécessaires ? Existe-t-il un outil crucial sans lequel, dans un système technique donné, une opération est impossible ? Il faudrait également déterminer l’origine des outils employés : sont-ils réalisés par celui qui les emploie ou bien l’intervention d’un ‘spécialiste’ est-elle requise ? Comment sont conçues les ‘machines’ complexes dont l’utilisateur final n’est pas nécessairement le réalisateur ? Plus simplement, de quelle chaîne opératoire l’outil employé dans une chaîne opératoire donnée est-il issu ? Les questions concernant l’outil peuvent être sans fin, et encore n’aborderai-je pas les problèmes touchant au rapport que son utilisateur développe avec lui25, ni à son symbolisme.
17Les gestes, outre la nécessité de comprendre toutes les traces disponibles pour les restituer, amènent à une série de questions sur leur(s) auteur(s) : qui les exécute ? Sont-ils reproductibles ou suffisamment caractéristiques pour permettre une identification de leur (s) auteur(s) ? Combien de temps durent ces gestes – tant pour la durée unitaire que pour les éventuelles répétitions et la pénibilité de la tâche qui leur est liée ? Ces interrogations amènent à s’interroger sur la composition des équipes de travail26 et par là sur le partage des savoir-faire, considérations autant techniques que sociales.
18Quant aux compétences, elles soulèvent deux types de problèmes. Le premier tient à leur mode d’acquisition : comment et sur quelle durée se déroulent la formation et l’apprentissage ? Quels sont les vecteurs de la transmission du savoir outre l’arrivée d’arpètes dans les équipes déjà fonctionnelles27 ? Quelle part ont tenu les praticiens itinérants dans la diffusion des techniques ? Le second tient à leur contenu : quel est le degré de spécialisation, que signifie être spécialiste ou spécialisé, subtile nuance non dénuée d’intérêt ? Il faut alors comprendre sur quoi porte la spécialité de l’exécutant : sur une matière à la manière des études archéologiques ? Sur un produit fini impliquant des techniques diverses mais complémentaires ? Sur le maniement d’un outil ou d’un type d’outil28 ?
19Le statut particulier des deux derniers composants de la chaîne opératoire entraîne des questions qui ouvrent plus directement la voie aux réflexions sur l’économie et la société. À de rares exceptions près29, la prise en compte des énergies déployées reste faible pour la période antique en raison de leur caractère majoritairement musculaire30 – animal ou humain. De ce fait, une partie des questions soulevées se superposent à d’autres éléments, notamment dès lors que la force musculaire est procurée par un esclave, acteur et outil à part entière de la chaîne opératoire. D’autres questions ne peuvent être appréhendées que dans le temps long car elles sont liées au passage, parfois incomplet, d’une force musculaire humaine à animale. Il faut également prendre en compte les énergies minoritaires mais indispensables dans certains processus, comme la chaleur ou l’énergie chimique de certaines réactions31. S’interroger sur leur formation, leur emploi – maîtrisé ou non – permet non seulement d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion, mais également de mieux cerner l’interaction entre les différents éléments constituant le geste technique.
20Enfin, la prise en considération des acteurs est également indispensable pour compléter ce tour d’horizon de la chaîne opératoire. Au premier rang des acteurs se placent le praticien et ses éventuels aides, pour des questions touchant à l’exécution des tâches, déjà abordées plus haut. Il conviendrait d’étendre ce cadre minimal d’une part au propriétaire des moyens de production, mais aussi au destinataire de celle-ci32. Pour rester dans l’espace de travail, une première approche consiste à identifier les acteurs, leur nombre, la variété de leurs situations et de leurs relations, afin de mettre en évidence des éventuelles hiérarchies sociales et professionnelles.
D’autres questions par-delà la technique
21Il serait cependant aussi réducteur qu’aliénant de limiter les questions auxquelles soumettre les procédés techniques aux seules problématiques technicistes, même si certaines d’entre elles ont des répercussions hors de leur champ initial. Évoquons maintenant quelques pistes de recherche connexes. En termes d’histoire économique, une part importante des études concernant l’artisanat ces trente dernières années a cherché à qualifier la production, sa quantité et son devenir, pour répondre aux théories développées par M.I. Finley à partir du modèle wébérien de la cité de consommation33. Ce problème de qualification reste à poser dans l’analyse élémentaire de chaque site d’exercice, sans se voiler la face cependant devant son extraordinaire difficulté, même avec l’exploitation des données archéologiques. La définition des biens produits – sans se limiter aux seules réponses apportées par les matières transformées, trop vagues – est délicate même dans les contextes les mieux conservés ou étudiés34. L’estimation quantitative de la production peut parfois être réalisée : soit à partir du rapport – en volume, en masse – entre ce qui est rejeté (déchets de fabrication, ratés, etc.) et ce qui est produit35 ; soit par comparaison entre des espaces de production inscrits dans le même système technique, mais il s’agit alors d’une mesure relative liée à la surface employée pour une activité, ou au dénombrement des aménagements cruciaux pour la transformation que d’une réelle estimation de production36. Enfin, l’utilisation finale d’un bien reste pratiquement impossible à suivre, aux rares exceptions près des productions bénéficiant d’une haute traçabilité comme les terres cuites. Il faut cependant continuer à chercher des estimations de production, même si elles doivent rester de pures hypothèses. Un autre versant des problématiques économiques, fortement teintées de questions sociales, pourrait être exploré. Il s’agirait de comprendre, dans son application aux espaces de production, la part et les formes de l’investissement urbain : à qui appartiennent les moyens matériels de production et quel est le rapport du praticien avec ceux-ci ? Il ne s’agirait pas tant de chercher des évidences de propriété – presque impossibles à démontrer, sauf avec quelques rares mentions textuelles – que d’essayer de comprendre les conditions d’exercice du praticien. Les sources épigraphiques, iconographiques et textuelles sont celles qui permettront certainement d’apporter les réponses les plus nombreuses – comme pour toutes les questions plus strictement sociales intéressées aux relations et aux rôles respectifs des différents acteurs de ces procédés. Néanmoins, les données archéologiques peuvent également être invoquées, à condition de sortir de l’espace d’exécution et de comprendre son environnement immédiat à plusieurs échelles, de l’insertion dans la maison à l’appréhension de la topographie urbaine.
Vers le métier urbain
22Après cette introduction théorique, il me faut encore poser deux spécifications pour adapter à la période romaine l’étude technique dont les contours viennent d’être définis. Il convient ainsi de souligner l’importance primordiale du concept d’ars, particulièrement si le but, à terme, reste de comprendre la place des artisans dans la société, en dépit de l’inextricable multiplication des statuts et des situations. Son étude sémantique permet de le définir comme l’habileté technique, le savoir-faire et son exercice ; ars peut, en ce sens être rapprochée de τέχνη37. En abandonnant le concept d’artisanat, et en s’appuyant sur celui – antique – d’ars, dans son acception de savoir-faire38, il semble opératoire de recourir au vocable assez neutre de métier, que je définirai ainsi :
Activité fondée sur la mise en œuvre d’un savoir technique, nécessitant l’emploi d’outils (cognitifs ou matériels) et qui tend au dégagement d’une plus-value39.
23Pour une première exploration de cette définition, je me suis volontairement limité au seul domaine urbain. Cette commodité se justifie par deux perspectives. D’un côté, il est encore plus difficile de quantifier et de qualifier, en termes de destination, la production d’un domaine rural que celle d’un atelier urbain. Comment savoir si les nombreux espaces de production découverts à la campagne ou le long des routes servent à une autoconsommation40 ? D’un autre côté, l’appellation ‘rurale’ que l’on pourrait facilement accoler à certaines activités est-elle toujours légitime ? L’exemple des deux pressoirs à vin connus dans l’enceinte urbaine de Pompéi est perturbant de ce point de vue. L’un d’eux (II 5) est le point d’aboutissement d’une vigne également intra muros, fragment de ruralité en ville41. Comment qualifier la production issue du commerce alimentaire V 4, 6-8 qui dispose d’un pressoir et d’un chai en plus de ses équipements associés à la restauration42 ?
24Après un rapide examen des fondements de la koinè technique à travers les aménagements caractéristiques des fouleries, je vais évoquer dans les pages qui suivent des exemples qui visent à observer quelques métiers en définissant les savoir-faire de leurs praticiens, cherchant par là à répondre à une partie des questions soulevées jusqu’ici. La ‘spécialisation’ des activités sera abordée à travers l’analyse des déchets de production de la métallurgie du plomb puis des vestiges découverts dans la Casa del Fabbro (I 10, 7). Dans les deux cas, il s’agira de comprendre le rapport entre les matières travaillées et la façon dont on peut définir l’activité se déroulant dans un atelier. Ensuite, la question du devenir de la production, et par là l’un des points fondamentaux de la définition du métier – sa vocation à dégager une plus-value, ce qui fait sortir la fabrication du cadre de l’autoconsommation –, sera évoquée en se penchant sur les attestations du tissage à Pompéi et Herculanum.
Réflexions sur la koinè technique
25L’exemple des fouleries permet d’illustrer le principe de la koinè technique et de percevoir ses ressorts chronologiques et géographiques. Dans sa définition minimale, un atelier de foulons pompéien est constitué de deux ou plusieurs stalles. Ces aménagements sont constitués par deux murets séparés d’une soixantaine de centimètres, recouverts de béton hydraulique et toujours appuyés contre une paroi pour constituer un rectangle fermé sur trois côtés43. Un bourrelet en béton hydraulique peut être disposé en avant de celui-ci. À l’intérieur de l’espace délimité, une dépression est généralement observée. Selon les descriptions de fouilles, des récipients métalliques ou des bassines concaves en calcaire blanc ont été parfois découverts44. Toutefois, dans la majorité des exemples observés, seule l’empreinte de ce réceptacle est conservée, empêchant ainsi de déterminer son matériau de fabrication ou sa forme. Bien qu’actuellement très dégradée, la Casa della fullonica (IV, 5-7) d’Herculanum dispose d’un aménagement double en tout point similaire à ceux de Pompéi (fig. 1). Trois murets constituent les côtés de deux stalles. Le muret occidental est encore conservé en élévation. Les deux autres comportent chacun un long vase emmuré : seule l’empreinte du premier est perceptible, tandis que le fond du second est encore en place, dans lequel une substance blanchâtre a été observée, probablement de l’argile de foulon.
26Le fait que l’on trouve les mêmes formes d’aménagement à Herculanum qu’à Pompéi, dans un voisinage géographique et chronologique, ne valide en rien l’idée d’une koinè technique. En revanche, la mise au jour dans le quartier du théâtre de Délos de trois installations reprenant rigoureusement les mêmes principes d’organisation donne un peu plus de corps à ce postulat opérationnel (fig. 2)45. Dans deux des trois ateliers, les stalles sont séparées par des murets et les récipients dans lesquels s’exerçait le foulage sont en terre cuite ou en marbre. L’atelier 1 de la rue supérieure du théâtre dispose également d’une amphore, plantée dans le sol à proximité du seuil et éventuellement destinée à recueillir de l’urine. Si l’on suit les datations proposées par J. Chamonard, l’installation de ces ateliers dans le quartier du théâtre pourrait constituer l’une des dernières phases et s’approcher du début du Ier s. avant notre ère46.
27Un troisième exemple permet d’élargir le spectre géographique et chronologique de cette koinè technique perceptible dans le traitement des tissus : à Arlon (Belgique), dans une agglomération secondaire, un atelier de foulons a été mis au jour en 2004. L’identification des espaces voués au textile, qui semblent inclure également des activités de teinturerie, se fonde tant sur les vestiges des aménagements que sur les analyses physico-chimiques des substances découvertes. Selon les fouilleurs, l’atelier perdure entre la seconde moitié du IIe s. ap. J.-C. et les environs de 275, année après laquelle il est abandonné47. La principale différence avec les exemples de Délos, d’Herculanum et de Pompéi est qu’au lieu d’être maçonnées, les probables stalles sont en bois. Pour le reste, les procédés mis en œuvre semblent, en première analyse, strictement identiques.
28Si le principe de la koinè technique paraît ici opérationnel, il faut conserverune approche critique et tenter d’atteindre, pour reprendre la terminologie d’A. Leroi-Gouhran, un degré de fait plus élevé, ne serait-ce qu’en tentant de répondre à plusieurs questions48.
29Les hommes exerçant dans ces différents ateliers faisaient-ils les mêmes gestes pour atteindre le même résultat ? L’introduction de la foulerie à Délos est-elle seulement un ‘transfert technique’ à mettre sur le compte de la fin de l’indépendance de l’île, quand, de retour dans l’orbe athénienne, elle se transforme en place commerciale cosmopolite ? Faut-il accorder plus d’importance aux variations des techniques de construction employées pour les aménagements, en cessant de réduire les questions auxquelles elles sont soumises au seul accès aux matières premières ? Globalement, quelles connaissances manquent pour opérer une distinction efficiente entre ces ateliers de foulerie, si tant est qu’elle ait existé ?
La spécialisation des activités
30Sur la façade orientale des thermes du forum de Pompéi, l’espace VII 5, 28 a été identifié comme un atelier de plombier, d’abord en se fondant sur une hypothèse d’aménagement – l’interprétation du ‘comptoir’ maçonné utilisant un bloc de calcaire blanc en remploi comme un établi – puis en procédant à un nettoyage et à une fouille partielle. Sur les trois états observés, probablement tous associés à des officines successives de métallurgie de transformation, le second est le plus intéressant, en raison de l’aménagement mis au jour dans l’angle nord oriental du local : un espace large de 1,20 m et long de 1,60 m, partiellement perturbé par l’installation d’un câble électrique dans les années 1950. La limite occidentale de cette installation est matérialisée par les vestiges d’un système ayant permis le maintien de planches posées de champ ; elles étaient calées par un ‘radier’ réalisé avec des fragments de mortier et maintenues par des fiches en fer (fig. 3). La surface du sédiment disposé au-delà de la limite se présentait comme un niveau relativement uni de cendres mêlées de charbon. Lors de la fouille, un peu plus de 9 kg de fragments d’objets, majoritairement métalliques, ont été récoltés par tamisage49. Une première interprétation peut être proposée pour cet ensemble comportant non seulement des gouttes de coulées, des fragments de tôles découpées – à la cisaille, à l’emporte-pièce ou au burin –, mais également quelques éléments en alliage cuivreux et en fer. Il s’agit d’un crassier, portion de l’atelier destinée à recevoir les rebuts volontairement écartés par les métallurgistes lors de leur activité.
31Une première analyse – pour rapide et strictement massique qu’elle soit – de ces déchets permet d’avoir un aperçu des matières travaillées dans cet atelier50. Sur les 9,1 kg de matériaux ramassés à la fouille, un tiers (3,3 kg) a été prélevé pour tri et étude. Le poids des éléments rejetés se répartit comme suit : 77 % d’alliage à base de plomb ; 13 % de fer ; 5 % d’alliages cuivreux ; 3 % de fragments de charbon et 2 % d’éléments divers (os, céramique et verre pour l’essentiel)51. Cette distribution des matières donne une clé pour comprendre les activités se déroulant dans cette officine et permet d’affirmer sans grand risque d’erreur qu’il s’agissait d’un atelier spécialisé dans le travail du plomb52. Cependant, cette forte spécialisation ne constitue pas une limite au savoir-faire du métallurgiste ayant œuvré dans ce local. Si aucun des éléments ferreux observés ne paraît trahir un travail sur place, il n’en va pas de même pour les alliages cuivreux. Les différents fragments découverts sont essentiellement constitués par des chutes de tôles et des rivets, indiquant probablement les restes d’une activité de réparation ou d’entretien d’objets en alliage cuivreux avec des coulées en plomb (fig. 4). Cependant, plusieurs gouttes de coulée et une coulure ont été individualisées. Rapportées à la masse des objets en même alliage, elles apparaissent relativement peu importantes ; rapportées à la masse des déchets de travail d’alliage à base de plomb elles sont négligeables53. Cependant, elles indiquent une maîtrise des procédés de transformation métallique qui dépasse de loin celle que l’on pourrait attendre de la part d’un spécialiste du plomb. En effet, si le plomb ‘pur’ fond à 327°C, sa température d’usage en coulée a été estimée expérimentalement à 600°C54. Pour les bronzes courants, la température de fusion est de l’ordre de 1100°C ; cette différence de 500° C signifie que l’on sort d’une métallurgie effectuée sur l’équivalent d’un foyer domestique pour entrer – même brièvement – dans une métallurgie à haute température55. Les conséquences, sur le seul équipement et sur la capacité du métallurgiste à maîtriser un foyer, sont particulièrement importantes.
32Si, pour l’occupant de cet atelier pompéien, la spécialisation dans le travail du plomb est évidente à l’aune des déchets qu’il a produit, il en ressort également qu’il dispose d’une maîtrise plus générale d’autres métaux lui permettant de fondre de petites pièces, éventuellement utiles dans des procédés de réparation. Bien que dénotant d’une hyperspécialisation, son savoir-faire n’est pas strictement borné.
Savoir-faire technique et application à différentes matières
33La Casa del Fabbro (I 10, 7) est un exemple assez exceptionnel de ce que peut apporter une étude ayant des fondements techniques à la détermination du savoir-faire d’un praticien et aux questions concernant l’insertion d’espaces de travail dans une maison (fig. 5)56.
34Dans le tablinum 7, quelque 22 rondelles en os ont été découvertes en deux temps57. Elles étaient associées avec deux éléments distaux de charnière également en os58. Toutes ces rondelles proviennent de diaphyses d’os long – métapodes ou fémurs, probablement de bovins. Elles présentent les mêmes signes de travail : après avoir été débitées, elles ont été tournées puis les marques liées à l’usage du tour pourraient avoir été partiellement effacées. Bien qu’aucune d’entre elles n’ait été percée ou ne présente des traces préparatoires au perçage59, leur égalité de diamètre avec les deux extrémités d’une charnière achevée découverte en même temps oblige à les considérer comme des charnons inachevés60. Les autres objets découverts dans cette partie de la pièce correspondent à de la vaisselle de bronze ainsi qu’une balance et ses poids61.
35Dans la pièce 8, d’autres éléments osseux ont été découverts, groupés dans l’angle nord-est (fig. 6)62. Il s’agit pour l’essentiel d’un important ensemble de baguettes, tablettes et de plaquettes incisées sur leur surface ; elles peuvent être regroupées en fonction de critères formels et techniques63. Certaines d’entre elles présentent des traces de corrosion d’éléments cuivreux autour des perforations ; elles ne paraissent pas correspondre à des symptômes d’usage : elles ne sont visibles que sur la surface et pas dans la partie cylindrique du trou ; elles ne peuvent donc pas caractériser la fixation sur un élément mobilier avec des clous en bronze64. Un des groupes offre des caractéristiques liées au débitage suffisamment proches pour permettre de les apparier techniquement (fig. 7). Sur vingt-deux baguettes issues de diaphyses, dix-sept présentent une rainure longitudinale sur le côté. La face arrière de tous ces objets est brute de découpe : des traces renvoyant à l’utilisation d’un ciseau – raclage puis arrachement – sont visibles sur chaque exemplaire. La découpe de leurs extrémités est généralement en biseau. À l’exception de ce dernier trait, des caractères identiques se retrouvent sur deux baguettes ayant un ilet de losanges incisé sur le périoste. Il est possible d’inférer, par ces similitudes techniques, que les 22 baguettes étaient destinées à être achevées par l’incision du même motif. Les autres plaques, baguettes et éléments décoratifs renvoient tous, quand ils sont achevés, vers la décoration d’un ou de plusieurs meuble(s).
36Dans la pièce 10, les pièces inventoriées – au moment de la fouille ou plus tard – permettent de compléter ce tableau. Dans cet espace, qui correspond au portique donnant sur le jardin, les conditions de découverte rendent l’interprétation un peu plus complexe : l’effondrement de la citerne a conduit au mélange des objets disposés pour partie dans un conteneur périssable et à leur mise au jour en plusieurs moments65. C’est le seul endroit de la maison ayant livré des ébauches ou des déchets de taille de l’os – à l’exception notable des épiphyses, en dépit du nombre important de diaphyses observées dans la pièce 8 : possibles fragments d’ulna, plaques débitées, déchets de débitage de baguettes (fig. 8)66. De plus, inventoriés sous deux numéros différents, une charnière complète a été découverte. Elle est composée de deux extrémités et de 31 rondelles dont 15 sont percées et 16 non67. En plus de ces résultats du travail de l’os, de très nombreux outils ont été découverts, probablement contenus dans une caisse (fig. 9)68. L’absence de traitement préventif contre la corrosion, les problèmes d’inventaire – liés à la volonté d’exposer une partie de ces outils dans la maison jusqu’en 1980 – et la disparition de certaines pièces empêchent une reconnaissance détaillée de chacun d’entre elles. En revanche, une tendance émerge, soit par l’étude des photos et dessins réalisés au moment de la fouille, soit par l’observation de certains objets encore conservés : à l’exception des quelques outils agricoles ou orientés vers le jardinage et de plusieurs forces de taille assez réduite, l’ensemble renvoie vers le travail du bois – scies, herminettes, hachettes, coins, ciseaux, compas, lime, marteaux, gouges, etc. La panoplie est aussi variée que complète et comporte, selon les journaux de fouille, au moins 40 pièces, les fragments n’étant ni inventoriés, ni dénombrés. Un seul outil est assez fortement dissonant dans cet ensemble : l’unique fer à braser du plomb réalisé dans un alliage cuivreux et doté de sa tige de préhension encore recouverte d’un fragment de tissu protecteur (fig. 10)69. Ont également été découverts à proximité de ce même affaissement de la citerne les restes d’un petit chariot70.
37Plusieurs interprétations ont été proposées pour cet ensemble. O. Elia y voyait « un completo corredo di ferri da falegname ed in parte anche da fabbro »71. P. Allison dresse un premier bilan, valable pour les outils découverts sous le portique. Selon elle, les objets provenant de cet endroit correspondraient à un assemblage renvoyant aux activités suivantes : travail du bois, métallurgie, travail de l’os, activités médicales et de couture et probablement agriculture et maçonnerie. Un regroupement aussi hétéroclite ne saurait renvoyer aux activités pratiquées par une ou plusieurs personnes résidant dans le même lieu. La seule explication tenable serait de considérer que ces objets ont été rassemblés pour la valeur marchande du métal, après avoir été pillés ailleurs72. Cette interprétation est élargie à l’ensemble de la maison, grâce aux plaques d’os incisées déjà mentionnées et à leurs traces de corrosion, mais aussi grâce à la découverte de plusieurs sets d’instruments dits « chirurgicaux » ou médicaux, en particulier à l’étage. Cette domus serait donc tombée dans une nouvelle forme d’occupation, liée aux conséquences du séisme de 62 ou postérieure à celles-ci, celle de « bric-à-brac shop »73.
38Cette interprétation pose le problème de la valeur à accorder à des objets isolés dans un ensemble cohérent : essentiellement les aiguilles, le scalpel ‘médical’ mais surtout le fer à braser. Considérer que la découverte d’un seul scalpel renvoie à un médecin est étonnant, quand bien même on lui ajoute ceux trouvés à l’étage – qui prennent beaucoup plus l’apparence, avec leurs tablettes à fard, d’objets de soins personnels. Le fer à braser pose un véritable problème. S’il participe pleinement du travail du métal et que les limes peuvent à la limite intégrer cette chaîne opératoire, aucun autre élément ne permet de valider cette interprétation. Manquent les réserves de métal, l’espace de fusion et de coulée, les déchets de production, l’établi, les bassins de trempe pour le fer, etc. La seule utilité d’un fer isolé est de permettre de réaliser des brasures au plomb sur des pièces en alliage cuivreux, soit de la ‘para-métallurgie’ limitée à l’assemblage de petites pièces métalliques.
39Si l’on se fonde, sans a priori théorique, sur l’étude des objets mis au jour à l’arrière de la Casa del Fabbro, il est possible de déterminer une partie des activités s’y déroulant. C’est par la combinaison – rare – de deux types de vestiges que l’on peut arriver à une solution satisfaisante, en confrontant des déchets de travail de tout type – de la chute de découpe à l’objet fini en passant par les ébauches et par les stigmates observés – aux outils ayant pu permettre leur transformation. C’est en cherchant les gestes et le savoir-faire à travers les vestiges matériels que l’on peut déterminer l’activité des praticiens présents dans cette maison.
40Les principaux outils utilisés pour le travail de l’os (scie, ciseau, tour, lime, gouges) paraissent ici correspondre avec ceux découverts sous le portique et identifiés, sur des critères formels et par comparaison avec les périodes successives, comme pouvant être employés dans le travail du bois74. Cependant, certains d’entre eux paraissent devoir être cantonnés à cette dernière matière, en particulier les herminettes, les marteaux, les compas (?)75. La relative dispersion entre trois pièces de groupes homogènes d’objets autorise à répartir les différentes activités liées à l’os. Les rares esquilles provenant de la pièce 10, j’y restituerai les opérations de débitage. L’absence des épiphyses pourrait signifier une préparation (nettoyage, sciage des extrémités articulaires) hors de cette maison. La charnière complète mais non percée, retrouvée en hauteur, éventuellement disposée sur une table n’ayant pas laissé de trace, permet de proposer la pièce 7 pour le déroulement de deux étapes : le tournage, observé sur toutes les pièces retrouvées dans le tablinum, et le perçage – qui reste à effectuer sur la moitié d’entre elles. Dans la pièce 8, seuls des éléments de tabletterie ont été découverts, dont certains partiellement achevés, dans la probable attente du creusement de stries formant un filet de losanges.
41En ce qui concerne le bois, un seul indice autre que les outils permet de comprendre la nature de la production dans cette maison. Il s’agit de la charnière découverte dans la pièce 10. On peut la considérer complète en restituant une perforation sur l’une des rondelles détruite : on obtient alors 15 charnons percés, 16 non, ce qui permet une reconstruction parfaite avec alternance dans la hauteur délimitée par les charnons d’extrémité. La longueur totale de cette charnière est de 51 cm, soit la même que celle des éléments découverts dans la pièce 7 une fois mis bout à bout (fig. 11). Plutôt que de supposer une normalisation des hauteurs de porte de meubles, je considérerai plutôt que ces deux charnières étaient destinées à un unique meuble, pour la création – interrompue – d’une porte à battants articulés. Le diamètre légèrement inférieur de la charnière issue de la pièce 10 la désignerait pour assurer l’articulation entre les deux battants, tandis que celle inachevée découverte en 7 servirait à l’assemblage de la porte sur le corps du meuble76. La pièce 10 aurait alors été l’espace d’assemblage des meubles conçus dans cette maison.
42Pour conclure sur cet exemple, plusieurs points doivent être soulignés. Si les déchets de production montrent le travail de l’os, la nature des objets produits et l’outillage conservé indiquent une activité de portée plus large, où l’os intervient : la fabrication de meubles. J’insisterai sur la maîtrise des outils qui permettent de travailler des matières très proches du point de vue de leur structure laissant de ce fait le praticien passer de l’une à l’autre et compléter la part majeure de son travail sur le bois avec des éléments en os. Dans ce cas, aucune spécialisation vers un « artisanat de l’os » n’apparaît ; à défaut d’indiquer une activité en marge, la fabrication des charnières et le travail de tabletterie apparaissent comme des compléments – indispensables – au travail du bois. Le second point à souligner est l’absence de tout critère extérieur – architectural pour l’essentiel – de production : sans les ébauches ou les outils, rien ne permettrait de définir la Casa del Fabbro comme le siège d’un ‘ébéniste’. L’absence de séparation stricte entre les activités domestiques et les celles de production ne me semble pas soulever de problème en soi. Il ne s’agit guère que d’un problème d’échelle : plus l’espace disponible est important, plus la division des fonctions est possible ; dans de nombreuses boutiques, le tenancier réside sur son lieu d’exercice sans que cela ne pose problème77.
Questions quant au devenir d’une production : l’exemple du textile
43L’une des principales questions à soulever dans l’analyse des métiers est le devenir de la production : particulièrement en milieu urbain pour la période impériale, la détermination d’une forme de spécialisation me semble devoir être associée au dépassement de la seule autoconsommation78. Cependant, un tel présupposé peut se heurter à d’importantes difficultés d’interprétation. L’exemple de deux métiers à tisser, l’un provenant d’Herculanum, l’autre de Pompéi, peut servir de modèle en ce sens.
44À Herculanum, un métier à tisser a été découvert en janvier 1933 dans la maison à laquelle il a donné son nom, la Casa del telaio (IV, 3). Un dessin réalisé au moment de la découverte permet de restituer un métier vertical, à deux traverses horizontales, n’employant pas de pesons et qui permet de tisser de bas en haut. Sur la représentation en perspective réalisée par F. Ferrajoli, on reconnaît en premier lieu les montants verticaux qui délimitent le métier (fig. 12). La barre de section circulaire qui présente des stries pourrait s’avérer être l’ensouple : le fil de chaîne est disposé en une longue spirale tubulaire entre l’ensouple et la seconde traverse, ce qui permet de gagner un temps appréciable lors du montage du métier. Enfin, la seconde pièce de section circulaire sur laquelle sont fixés des fragments d’étoffe correspond à la lice inférieure. Ce métier a été découvert dans la partie orientale du portique de la Casa del Telaio (fig. 13)79 qui ne dispose alors plus d’espace commercial en façade.
45À Pompéi, dans la boutique I 6, 10, une série de 80 pesons en plomb a été mise au jour en deux temps, alignés contre le mur occidental selon la description rapportée par A. Maiuri (fig. 14)80. Les conditions de la découverte de ces pesons obligent à les considérer comme ayant été utilisés pour un métier vertical à une seule traverse, appuyé obliquement contre un mur81. Les déformations observées sur certains exemplaires permettent de confirmer cette interprétation. Deux des pesons découverts en I 6, 10 présentent un poids identique (ca. 380 g) (fig. 15)82. Sur le premier, on note encore les marques associées à la coulée dans un moule bivalve (retassure et lignes d’assemblage du moule) ; le second en est presque complètement dépourvu. En revanche, la déformation plastique qu’il a subie est très importante : il s’est allongé et a diminué d’épaisseur. Une telle transformation ne saurait être liée à un travail initial : certains exemplaires, peu déformés, montrent cependant un écrasement de l’inscription coulée. Il faut donc considérer que la déformation a été occasionnée par un battage répété des pesons les uns contre les autres. Une ultime confirmation est donnée par l’un des pesons découverts avec 53 autres dans l’atrium de la maison I 10, 883 : après avoir été aplati dans des conditions ‘normales’ d’utilisation, un second trou de suspension, orthogonal au premier, permet de continuer d’utiliser le peson, en lui faisant exécuter une rotation de 90° dans le plan horizontal (fig. 16). Lors de cette utilisation, la percussion répétée des autres pesons l’a de nouveau déformé. Cette analyse technique détaillée des pesons en plomb permet de restituer leur fonction originelle – contrepoids pour un métier à tisser vertical – et leur disposition, disposés côte-à-côte, relativement serrés, leur largeur se faisant face une à une. La seule inconnue qui subsiste – et qui ne peut pas être résolue en raison du manque de détails dans les journaux de fouille – est la disposition des 80 pesons : en combien de rangées étaient-ils répartis ?
46Avec l’identification de ces deux métiers à tisser d’usage contemporain, il est possible de s’interroger sur le devenir de la production. Le fait que ces deux instruments soient différents n’interfère en rien dans ce débat. Tout au plus cela permet-il de souligner que dès le Ier s. ap. J.-C., une partie des instruments liés au tissage nous échappe complètement dans la majeure partie des sites, faute d’avoir pu être conservés : le métier vertical à deux traverses est intégralement en bois ; l’usage de pesons réalisés dans un métal facilement recyclable interdit de les percevoir dans de nombreuses situations. Dans les deux exemples évoqués, seuls les contextes de découverte permettraient éventuellement de distinguer la production. À Herculanum, l’installation du métier dans le portique d’une maison dépourvue d’espace de vente paraît y reléguer le tissage au rang d’activité domestique. Inversement, la disposition du métier dans ce qu’il faut considérer comme une boutique pourrait constituer un indice d’activité commerciale et de fabrication destinée à la vente. Bien que pragmatique, ce dernier argument reste faible ; il convient donc de rester prudent et malheureusement de renoncer à déterminer le destin d’une production à partir des seuls outils utilisés, au moins pour le textile, si ce n’est pour de nombreuses autres activités.
Conclusions et perspectives
47Sans même revenir sur la koinè technique – qui ouvre, même de façon transitoire, la possibilité d’une compréhension élargie de certains éléments du système économique antique –, les différents exemples développés précédemment ont montré une partie de l’intérêt d’abandonner l’artisanat au profit des métiers. Fondés sur des vestiges matériels, ils ont permis d’entrapercevoir une réalité beaucoup plus complexe que ce qu’un examen traditionnel aurait permis, notamment en termes de savoir-faire.
48On pourrait reprocher à l’assemblage d’outils, de déchets de production et de produits inachevés de la Casa del Fabbro d’être exceptionnel. La remarque serait juste, à condition d’en limiter son application à la seule conservation originelle des artefacts : celui qui travaillait l’os, ne façonnait-il le bois que de manière exceptionnelle hors de Pompéi ? La proximité structurelle de ces deux matières, leur association dans la confection des meubles tendrait à faire de ce métier, ainsi défini par ses pratiques, une activité somme toute banale ; ce caractère courant n’enlève rien aux savoirs techniques propres mis en œuvre dans cet espace.
49Quant à l’association de gouttes de coulée d’alliage cuivreux avec divers types de déchets en plomb, elle permet d’étendre la maîtrise technique d’un ‘plombier’ de Pompéi aux gestes du bronzier. À défaut, dans ce cas, d’être le même métier, les savoirs impliqués dans les tâches majoritaires – spécialisées ? – de ces deux activités se recoupent ici. Bien qu’il soit délicat de mesurer une production à la seule aune de ses déchets, l’atelier situé en VII 5, 28 pourrait avoir accueilli un plombier employant le bronze à l’occasion. Cet exemple permettra-t-il de donner une valence élargie aux plumbarii mentionnés dans les textes et les inscriptions ?
50Enfin, la localisation de deux métiers à tisser dans deux locaux ayant des fonctions théoriquement antagonistes – le cadre domestique de la Casa del telaio d’Herculanum et la boutique rappelle que le savoir technique ne saurait être limité aux seuls gens de métier – entendus comme ceux qui visent au dégagement d’une plus-value. Peut-être serait-il nécessaire d’approfondir la question de la production domestique et de sa distinction avec la production commerciale, voire de définir les limites entre savoir professionnel et savoir technique.
51Les questionnements méthodologiques et les exemples exposés ne sauraient évidemment résoudre l’intégralité des problèmes posés par une recherche visant à comprendre l’économie et la société à travers le filtre de l’histoire et de l’archéologie des techniques. Le champ à explorer reste très étendu ; pour éviter d’en occulter une partie, parlons de métiers…
Notes de bas de page
1 Les activités insérées dans la Technology dépassent de loin ce qui est généralement intégré, dans le monde francophone, dans les études sur l’artisanat, mais aussi la définition classique de la technologie comme ensemble des moyens d’actions de l’homme sur la matière. On y trouve ainsi, pour mentionner certains chapitres du manuel édité par J.P. Oleson (2008) : l’agriculture, les moyens de transport ou, ce qui constitue une innovation, les techniques de calcul. Bien que la Technology soit considérée à juste titre comme un fondement de l’activité économique (Schneider 2007, p. 147), les études généralistes qui lui sont consacrées ne font pas toujours ressortir l’une des questions fondamentales associées aux recherches sur la production : le passage d’une pratique domestique à une fonction commerciale. Une telle définition de la technologie comme discipline étudiant l’ensemble des activités humaines rejoint celle développée par M. Mauss, rappelée par A.-G. Haudricourt (1987 [1971], p. 307).
2 Dans son ouvrage fondateur pour les études technologiques, H. Blümner (1875-1886) passe en revue les principales techniques du monde gréco-romain. Auparavant, O. Jahn (1861) a été l’un des premiers à s’intéresser au métier, perçu à travers les représentations iconographiques.
3 Dans le domaine anglo-saxon, les recherches sur les crafts, ont elles aussi souffert d’une spécialisation croissante conduisant à un fort cloisonnement. Je ne reviendrai pas sur la synthèse d’A. Burford (1972) – qui, notons-le au passage, donne une définition très restreinte des craftsmen, vu comme ceux dont le travail contribue à la fabrication d’objets en matériaux durables (ead., p. 13-16, part. 13) –, qui développe des problématiques essentiellement sociales. À moins de vingt ans d’intervalle, les types de productions présentés dans la synthèse de D. Strong et D. Brown (1976) et ceux évoqués dans la recension bibliographique de J. D. Evans (1998) restent presque identiques – à la disparition près de la construction dans cette dernière : seuls les artefacts perçus en fouille sont pris en compte.
4 Dans son Histoire de la Gaule, Camille Jullian (1920, p. 250-259) intègre l’alimentation à son chapitre consacré à la fabrication. Certes, il y traite de productions rurales (huile, vin), mais pas seulement, abordant également la boulangerie et la boucherie. Dans son analyse des structures de l’artisanat dans la Grande-Grèce romaine, J.-P. Morel (1976, p. 310-311) dresse une typologie des « industries alimentaires » fondée sur leurs capacités de production. La classification des autres activités est dressée en fonction des réalisations dans le ‘secteur alimentaire’.
5 Il faut ici reconnaître le mérite d’A. Ferdière d’avoir explicité ses positions. Dans l’écrasante majorité des colloques récents portant sur l’artisanat, cette explication n’est jamais donnée. Pour le monde grec, les conclusions au colloque de Lille (décembre 1997) sont remarquables de prudence et d’ouverture, quoi que centrées sur la seule production matérielle (Blondé – Muller 1998, p. 832-837).
6 Ferdière 2005, p. 7. Cette définition reste un digeste d’une version plus longue et donnant quelques explications supplémentaires aux exclusions présentées : « En outre, pour des raisons pratiques – liées à l’acquisition des données archéologiques – j’exclurai l’essentiel des activités de construction, pourtant habituellement incluses dans l’artisanat (maçonnerie, charpenterie,…), ainsi que, pour d’autres raisons – cette assimilation à l’artisanat étant là un concept contemporain –, les activités alimentaires (boucherie, charcuterie, boulangerie,…) : je me cantonnerai donc à la production d’objets mobiliers manufacturés » (Ferdière 2001, p. 3).
7 Ferdière 1999, p. 10 et Ferdière, comm. pers.
8 Ce n’est pas le lieu pour expliquer les raisons aussi empiriques que récentes de cette limitation au champ de l’artisanat. À titre d’hypothèse, il y a lieu de se demander si cette limitation, très archéologique (au sens des objets et structures mis au jour par l’archéologie), n’est pas liée à la réponse apportée dans les années 1980 contre les théories développées par M.I. Finley (1973 [1975] ; 1977, p. 326).
9 Santoro 2004, p. 24.
10 Santoro 2004, p. 26, 35. Cette exclusion présente des aspects paradoxaux : comment exclure l’huile mais intégrer les parfums, réalisés à base d’huile ?
11 Même d’un point de vue lexicographique, le mot « artisanat » n’apparaît qu’à la fin du XIXe s., comme dérivé d’artisan, terme attesté depuis le XVIe s. : il suffira de se reporter à la définition qu’en donne, en 1877, É. Littré (s.v. Artisan : « Celui qui exerce un art mécanique, un métier »). En dépit de l’absence d’entrée consacrée au mot « artisanat », le phénomène industriel est déjà présent : « L’artisan est un ouvrier ; mais l’ouvrier n’est pas un artisan. On dit les ouvriers d’une fabrique, et non les artisans ».
12 Il serait inutile de tenter de résumer ici une position ancrée de longue date dans l’historiographie, d’autant moins que ses conséquences dépassent largement le cadre de la seule histoire des techniques. Pour simplifier, les remarques générales sur l’Antiquité ont longtemps tendu à montrer l’absence de progrès technique en dépit de réelles possibilités, ce qui amenait à souligner l’absence regrettable de révolution industrielle (pour approfondir, se reporter à Greene 1990 et à Schneider 2007, part. 144-145). A. Leroi-Gouhran (1971, p. 40-42), en dépit d’une précaution visant à réfuter tout classement théorique d’évolution technique, décrit cinq « états techniques », allant de pré-artisanal à industriel.
13 Dans sa définition du troisième volet de ses réflexions sur l’histoire des techniques, L. Fèbvre (1935, p. 533) estimait déjà que « la technique subit l’influence de ce qu’on peut nommer l’histoire générale – et, en même temps, agit sur cette histoire ».
14 M. Pernot (2006, p. 10) donne les quatre premiers éléments comme principaux.
15 Pour des vues similaires quant à l’apport des sources épigraphiques et juridiques dans l’étude des activités de production, voir également Santoro 2004, p. 25.
16 Pour une entrée en matière aussi générale qu’érudite sur les littératures techniques, il convient de se reporter à l’introduction de Cl. Nicolet (1996) aux entretiens de la fondation Hardt consacrés à cette forme d’écrit.
17 Ainsi, Sénèque (Nat., 1, 3, 2), au cours de son étude des phénomènes lumineux, en vient à mentionner les arcs-en-ciel formés par les foulons qui crachent de l’eau sur du linge étendu. Cette incise n’a pas pour vocation première de décrire la chaîne opératoire de la foulerie. Bien que d’interprétation obscure, ce passage reste cependant un des rares où le geste du foulon est décrit.
18 Une synthèse sur les différentes possibilités et sur les limitations de l’étude des productions à base d’argile cuite, à travers le prisme des vestiges archéologiques, a été récemment proposée par M.-F. Meylan-Krause (2008) lors du congrès CRAFTS 2007.
19 Sans s’appesantir sur les aspects confus car trop généraux de la culture technique, il convient de rappeler que sa principale définition a été donnée dans le but de promouvoir la connaissance des techniques dans la société contemporaine (Noblet 1981). Il serait donc nécessaire de procéder à un long travail de d’exploration de ce champ avant qu’il ne puisse être adapté aux sociétés anciennes.
20 Le « système technique » est défini comme « l’ensemble [en équilibre] de[s] cohérences [techniques] aux différents niveaux de toutes les structures de tous les ensembles de toutes les filières » (Gille 1978, p. 19) ; voir aussi Gille 1979.
21 A.-F. Garçon (1997, p. 24-25) définit le « complexe technique » ou « complexe techno-économique » comme « ces entreprises ou groupes d’entreprises, qui au sein d’une filière donnée possèdent un substrat technique, un mode de fonctionnement économique, des réseaux d’échanges, une organisation juridique et sociale qui les rapprochent entre elles et les distinguent des autres complexes. La notion n’est ni franchement régionale, ni franchement sectorielle mais inclut ces deux niveaux d’étude ».
22 À titre d’exemple, les alliages cuivreux nécessitent un recuit, après une ou plusieurs passes de martelage si l’on ne veut pas amener ses qualités mécaniques vers la dureté – et le risque de casse. En revanche, les propriétés physico-chimiques des alliages à base de plomb font que la recristallisation du métal se déroule à froid, sans impératif de recuit après le martelage. Cf. également le chapitre rédigé par M. Pernot (infra, p. 101-118).
23 Sur ce point, voir les remarques d’H. Dessales à propos du temps de vieillissement des briques (infra, p. 60).
24 Voir les travaux de G. Minaud (2006) sur le comput digital, ou encore les tracés du tympan et des chapiteaux du Panthéon relevés et analysés par L. Haselberger (1994).
25 Il pourrait ainsi être intéressant de comparer la perception et l’utilisation de la ‘modernité’ technique dans les représentations iconographiques, en traitant notamment les exemples de la fresque issue de la foulerie de L. Veranius Hypsaeus, la frise des Amours de l’oecus q de la Casa dei Vettii mais également les figurations du mausolée de M. Vergilius Eurysaces à Rome.
26 Le terme d’équipe semble préférable à celui d’atelier pour éviter la confusion avec l’espace dans lequel se déroule l’activité.
27 Sur les questions de formation, l’exemple de l’Égypte est traité par Chr. Freu ci-après (infra p. 27-36).
28 Cette seconde série de questions est abordée ci-dessous, à travers l’étude des exemples pompéiens de la métallurgie du plomb (infra p. 16-17) et du Fabbro de la maison I 10, 7 (infra p. 17-23). Voir également, pour des réflexions parallèles, les chapitres rédigés par M. Pernot et D. Esposito.
29 D’une manière générale, la récente synthèse d’Ö. Wikander (2008) est symptomatique des recherches dans ce domaine : dans la lignée des travaux effectués depuis plus de vingt ans, à la suite de l’ouvrage pionnier du même Ö. Wikander (1984), l’attention est focalisée – à juste titre d’un point de vue macro-économique – par l’apparition et le développement de l’énergie hydraulique dans le monde romain.
30 B. Lawton (2004, p. 151-221) a proposé une synthèse sur la ‘technologie du muscle’. Elle reste cependant d’un abord parfois difficile sans une solide formation d’ingénieur.
31 Le terme de minoritaire ne s’entend pas nécessairement en termes de bilan énergétique absolu, mais bien en tant qu’évidence, la force musculaire venant plus facilement à l’esprit que les autres formes d’énergie.
32 Pour les remarques sur la place du commanditaire dans les réalisations des hommes de métier, voir les chapitres rédigés par H. Dessales et D. Esposito dans ce volume, ainsi que la postface.
33 La bibliographie sur cette question est trop importante pour être mentionnée ici. Je renverrai au bilan dressé par J. Andreau (1995) sur ce point.
34 Les résultats obtenus sur le site de Châbles (CH) pourraient, de ce point de vue, sembler décourageants : en dépit du ramassage et de l’étude exemplaire de 700 kg de déchets liés au travail du fer, source impressionnante sur les techniques déployées dans la métallurgie secondaire perçues à travers les rejets d’atelier, le type de production peine à être cerné. Tout au plus les auteurs envisagent-ils la fabrication d’outils – probablement partiellement destinés à la carrière voisine – et de pièces destinées à la construction (Anderson et al. 2003, p. 77-174, part. 144-145).
35 Bien que prudente, l’étude de la forge de Châbles propose une voie remarquable pour une estimation de la quantité de métal travaillé à partir de la quantification des déchets : les 708 kg de scories correspondraient au travail de 1 à 5 tonnes de fer, échelonné sur 10 à 20 ans (Anderson et al. 2003, p. 166-169).
36 La foulerie de la Casa della fullonica (IV, 5-7) à Herculanum s’étend sur 46 m ² (en incluant la boutique IV, 7) et comporte 2 stalles de fouleries (cf. infra). L’établissement suburbain de Casal Bertone à Rome a été reconnu sur environ 1000 m² et dispose de plus de 90 stalles de foulerie (Musco et al. 2008, p. 35-37). Selon que l’on prenne la surface ou le nombre de stalles en considération, le rapport entre l’établissement campanien et celui du suburbium de Rome est de 1 à 22 ou de 1 à 45. Dans ce cas, le nombre de stalles paraît donner une meilleure image des capacités de production, d’autant plus que ces espaces de travail peuvent être fortement concentrés.
37 Gavoille 2003, part. p. 55.
38 Dans des inscriptions particulièrement concentrées sur l’axe rhodano-rhénan, l’emploi d’ars est étendu au résultat du savoirfaire. Ceci permet de mieux cerner, hors d’Italie, la perception des Anciens envers cette connaissance et son application. Dix-huit inscriptions mentionnant des negotiatores dans des artes variées ont été relevées, provenant des provinces suivantes : Gaules lyonnaise (6) et belgique (5), Rhétie (2), Germanies inférieure (1) et supérieure (4). Les biens commercés résultant d’une ars sont extrêmement divers : viande (ars macelleria, CIL XIII, 2018) ; bière (ars cervesaria ; AE 1998, 954) ; savon (ars saponaria ; CIL XIII, 2023) ; barges (ars ratiara, CIL XIII, 2035) ; serrures (ars clostraria, AE 1976, 484) ; produits de teinture (ars purpuria, CIL III, 5824 ; ars offectura, AE 1941, 168) ; tissu (ars prossaria ; CIL XIII, 2023) ; céramique (ars cretaria ; CIL III, 5833 ; CIL XIII, 1906 ; CIL XIII, 2033 ; CIL XIII, 4336 ; CIL XIII, 6366). D’autres inscriptions, plus nombreuses, renvoient à l’ars au génitif suivi d’un qualificatif, sans mention explicite de négoce. Il serait nécessaire d’évaluer s’il s’agit alors de production ou de commerce (sur ce dernier point, voir Laubry 2009, p. 594-595 et Langner 2001, p. 348-349). Le principal écueil à éviter dans une possible recension des emplois d’ars et de ses dérivés (artifex et artificium en particulier) reste la lecture trop immédiate et, par là, la surévaluation de la spécialisation de l’activité. Peut-être conviendrait-il, plutôt que de souligner la parcellisation des tâches visible à travers les noms d’occupation, de considérer que la production mise en avant dans l’inscription est une spécialité, une activité dans laquelle le professionnel sait ou suppose exceller, sans qu’elle soit la seule pratiquée.
39 Cette définition est, à dessein, suffisamment large pour englober tous les métiers, du manieur d’argent au potier en passant par les barbiers et les architectes.
40 D’une manière générale, je renverrai aux actes du colloque « Artisanat et productions artisanales en milieu rural dans les provinces du nord-ouest de l’Empire romain » (Polfer 1999) qui abordent cette question. L’exemple de Châbles (supra n. 34), montre bien l’existence de réels espaces de production en milieu rural, hors de tout cadre d’autoconsommation.
41 Sur la vigne découverte en II 5, cf. Jashemski 1973, p. 40-41. La reconstitution du pressoir associé à cette vigne, proposée par J. J. Rossiter et E. Haldenby (1989), a été critiquée par J.-P. Brun (2004, p. 22-23).
42 La réponse à cette question faisait partie des objectifs du nettoyage réalisé en 2007 par l’équipe du Centre Jean-Bérard (Brun 2008). Il faut désormais attendre le résultat des fouilles réalisées par l’Università Ca’ Foscari de Venise depuis juin 2008.
43 Trois des stalles de la foulerie VI 14, 21-22, situées dans la première pièce donnant sur la rue, sont actuellement fermées sur leurs quatre côtés, suite à une restauration abusive, comme le nettoyage de surface effectué en 2007 par M. Flohr (2008, p. 8-10) en a apporté la vérification.
44 La mention des bassines métalliques lors de la fouille de la fullonica de L. Veranius Hypsaeus (VI 8, 2.20-21) est extrêmement rapide (MB 4, 1827, p. XLVIII-L, 14). Il en devient impossible de déterminer s’il s’agit juste d’une inférence par rapport à la fresque représentant les activités de foulerie (MANN, inv. no 9774) ou si de tels récipients ont effectivement été mis au jour. Dans cet atelier, une septième stalle, remise au jour par M. Flohr (2008, fig. 6 p. 4), est en calcaire blanc.
45 Trois probables fouleries pouvent être reconnues par leurs aménagements à Délos : rue supérieure du théâtre, 1 ; rue du théâtre, 4 ; rue 1, 1. Voir Chamonard 1924, p. 212.
46 Chamonard 1924, p. 72.
47 Sur Arlon, voir Henrotay 2006 (a et b) et Defgnée et al. 2008.
48 Le premier énoncé du « degré de fait » a été publié dans l’Homme et la matière (Leroi-Gouhran 1971, p. 29-35). Depuis, le contenu de ce concept a été réévalué par les ethnologues (voir les actes du colloque « Sens et tendance en technologie comparée », tenu à Paris en novembre 1992, publiés dans Techniques & cultures, 21, 1994).
49 Le rapport préliminaire concernant cette opération a été publié (Monteix – Rosso 2008, p. 245-247) avec une erreur concernant la quantité de métal découverte dans le crassier : ce sont quelque 9,2 kg de métal qui ont été ramassés et non 20. L’étude de ce matériel est en cours, réalisée par A. Duvauchelle.
50 Une partie du tri a été faite lors de la fouille, notamment l’extraction des objets les plus grands. Les pourcentages présentés ici pour les éléments autres que les alliages à base de plomb ne correspondent pas à la valeur propre de l’échantillon, mais constituent un maximum ; seul le tri de l’intégralité des déchets permettra d’avoir des statistiques plus fiables quant à la répartition des différentes matières rejetées dans ce crassier.
51 Les masses volumiques moyennes du plomb et du bronze étant voisines, pour ces deux alliages les poids mesurés donnent également une estimation du volume recueilli. En revanche, il n’en va pas de même pour le fer, fortement corrodé.
52 Il serait cependant intéressant, éventuellement par des comparaisons ethnographiques, de se demander si le rapport quantité de matière travaillée / quantité de matière volontairement rejetée est le même pour tous les métaux. Il est probable que le coût de la matière première et la génération d’impureté – et donc le taux de perte de métal lors de son travail – varient fortement d’un métal à l’autre et conditionnent de ce fait les pratiques de recyclage. Si le poids de métal rejeté est un indice de la spécialisation, il ne constitue pas le reflet exact de la production.
53 Le poids des gouttes et de la coulure (48,4 g) correspond à 27 % de la masse des objets en alliage cuivreux recueillis et à 0,6 % de la masse de plomb ramassée.
54 Lors de ses expériences de coulée de tuyaux, A. Cochet (2000, p. 140) a poussé la température de fusion du métal dans le creuset jusqu’à 600°C, après deux expériences entre 415 et 480°C. Théoriquement, il avait au préalable estimé la température de fusion entre 400 et 500 C (Cochet 2000, p. 15), pour éviter les problèmes liés au refroidissement du métal lors de la coulée. Il conviendrait cependant de s’interroger sur les modes de détermination de la température durant l’antiquité. Une première réponse est apportée dans ce volume par M. Pernot (n. 54 p. 114).
55 Pernot 2004, p. 172-173.
56 Bien qu’il aurait certainement été enrichissant de reprendre l’étude de l’intégralité du matériel mis au jour dans cette maison, je me contenterai ici des seuls éléments directement associés aux procédés de fabrication. Pour une description somme toute précise des différents objets découverts dans la Casa del Fabbro, je renverrai au catalogue de P. Allison (2006). Il convient cependant de garder une certaine prudence face aux interprétations proposées pour certains objets, unitairement ou en groupe.
57 Quatorze rondelles en os ont été découvertes le 3 janvier 1933, à 60 cm du montant oriental et à 50 cm du sol (Inv. no P5381B = Allison 2006, cat. no 1172). Les huit autres (Inv. no P5474 = Allison 2006, cat. no 1182), indiquées erronément dans les Giornali degli Scavi di Pompei (GSP) comme en bronze, ont été découvertes dans la même pièce : « Completato lo sgombro del piccolo strato di cenere del pavimento del tablino […] alla base della parete orientale, a pochi centimetri dal vano verso l’atrio » (GSP 1933 : 13 gennaio ; contra Allison 2006, p. 174, « no precise location »). La différence d’altitude de découverte de ces deux ensembles, en dépit de caractères (diamètre, état, travail effectué) identiques, laisse supposer qu’ils étaient stockés en hauteur – table ou étagère – et seraient tombés durant l’éruption, une partie d’entre eux touchant le sol. Sur le vocabulaire utilisé pour la description du travail de l’os, voir Feugère – Forest – Prévot 2008.
58 Inv. no P5381A (=Allison 2006, cat. no 1171). Ces deux éléments de charnière ont été découverts en même temps que les rondelles (P5381 B) décrites à la note précédente.
59 Prévot 2005, p. 19.
60 Sur les 22 charnons, un seul présente un diamètre légèrement inférieur aux autres, soit 30 mm au lieu des 33 mm mesurés sur les 21 autres éléments.
61 Objets découverts le 3 janvier 1933 : deux balances (Inv. no P5379-5380 = Allison 2006, cat. no 1173-1174) et deux poids en plomb (Inv. no P5382 = Allison 2006, cat. no 1175-1176). Objets découverts le 13 janvier 1933 : une patère et deux bassins en bronze (Inv. no P5470-5472 = Allison 2006, cat. no 1177-1179), un contrepoids de balance en bronze (Inv. no P5473 = Allison 2006, cat. no 1180).
62 GSP 1933 : « 13 gennaio. […] A scavo ultimato della casa si registrano i seguenti trovamenti che hanno avuto luogo in varie riprese nell’angolo nord-est dell’ambiente rosso ad occidente del tablino […] ».
63 Tous ces éléments sont regroupés sous le même numéro d’inventaire (P5486), subdivisé avec des lettres identifiant des éléments ou des groupes particuliers (cf. Allison 2006, cat. no 1185-1211) : Plaques gravées, percées ou non, destinées au placage : (a-b) 2 plaques percées représentant un visage sculpté en bas relief ; (c) plaque percée, découpée en forme de pelte ; (d-e) 2 plaques non percées, gravées pour représenter 4 brins de corde noués ; (g-t) 12 plaques percées de forme hexagonale, ayant à leur surface des motifs d’écailles (h, j, m, n, p, q) ou de triangles opposés (g, l, o, r-t) à leur surface.
Plaques ou baguettes fines (1-1,5 mm d’épaisseur), de largeur variable, débitées par sciage, présentant parfois des rainures décoratives en surface : u).
Baguettes débitées au burin dans des diaphyses, chanfreinées à leur extrémité : w) 22 baguettes ; f, z) 2 baguettes, identiques aux précédentes, mais plus courtes dont le périoste est gravé de sillons formant des losanges.
Coins : x) quatre coins dont une seule face a été aplanie.
Éléments divers : k) plaquette formant une pointe de lance ; y) baguette dentelée et fragment de plaque circulaire.
64 P. Allison (2006, cat. no 1185, 1191, 1201, 1202 et p. 176) estime au contraire que ces traces de corrosion sont un indice d’usage. O. Elia ne mentionne aucune de ces traces (NSA 1934, p. 303).
65 GSP 1933 : « 13 gennaio. […] Nell’ambulacro, alla base di un pilastro di blocchi sarnensi […], si sono rinvenuti i seguenti oggetti che erano contenuti in una piccola cassa […] » ; GSP 1933 : « 17 febbraio. […] La squadra dei restauratori nell’eseguire […] il cavamento per la sottofondazione del pilastro sprofondato tra il tablino e l’oecus dipinto a fondo nero, ha rinvenuto una considerevole quantità di oggetti facenti parte della stessa cassa di cui il primo trovamento è stato registrato il 13 gennaio u.s. ».
66 Inv. no P5466 (a-b), 5467.
67 Inv. no P5464, un élément distal de charnière, deux charnons (un seul percé), découverts le 13 janvier 1933. Inv. no P5542a, un second élément distal ; inv. no P5542b, 31 charnons, dont certains sont fragmentaires (14 sont percés), découverts le 18 février 1933. En restituant une seule rondelle percée, ce que les fragments autorisent, on obtient la juste alternance permettant le bon fonctionnement d’une charnière.
68 Contra P. Allison (2006, p. 343 et cat. no 1259), qui considère que cette caisse était un meuble, les fragments de charnière attestant de la taille de sa porte.
69 Selon P. Allison (2006, cat. no 1305 ; cf. p. 28 et p. 344), ce ‘fer’ à braser serait un coin permettant de découper à chaud des pièces de métal. Cette interprétation ne saurait être suivie : la forme de l’objet et la présence d’une fine pellicule de plomb sur sa petite face antérieure l’interdisent.
70 NSA 1934, p. 304 et pl. xi.
71 NSA 1934, n. 2 p. 305.
72 Allison 2006, p. 341-342.
73 Allison 2006, p. 348-349.
74 I. Bertrand (2008b, p. 6) rappelle que certains chercheurs ont, à titre d’hypothèse, avancé la possible identité entre les outils utilisés pour le travail du bois et ceux employés dans la tabletterie.
75 Rien n’interdit complètement l’usage du compas – comme outil permettant de reproduire des distances – dans le travail des matières osseuses.
76 Le diamètre de la charnière trouvée dans le tablinum est de 33 mm ; la charnière du portique 10 a un diamètre de 25 mm. Une telle situation se retrouve sur le laraire découvert en V, 17 à Herculanum (Mols 1999a, cat. no 28) : la charnière extérieure a un diamètre de 25 mm, tandis que celle de l’articulation des battants a un diamètre de 19 mm.
77 En l’absence de toute donnée chronologique permettant de cerner l’apparition de cette activité productive dans la Casa del Fabbro, je ne m’hasarderais pas à qualifier les raisons ou les conséquences sociales de cette introduction.
78 Si, pour la période romaine impériale, la disparition d’une production urbaine d’autoconsommation est généralement considérée comme acquise, ce n’est pas le cas pour les périodes à peine antérieures. Voir, pour le monde grec, les remarques de Fr. Blondé et d’A. Muller (1998, p. 836) et, pour le domaine ibérique, celles d’A. Gorgues (2010, p. 41-43, 88-148, 276-280, 363-369).
79 La maison a été fouillée entre le 2 février 1931 et le 21 janvier 1933. Dans le compte rendu journalier qui est donné de l’avancement des travaux, ce métier à tisser n’est jamais évoqué. Ce n’est qu’une fois la fouille achevée qu’il est mentionné dans les Giornali degli Scavi di Ercolano (GSE 1933 : « Casa No 3 e 4. Sul IV cardine, lato est [description insérée à la fin du mois de janvier]. […] Interessante però è il peristilio lato est l’unico trovato discretamente conservato per la sua chiusura di legno che si sviluppa nell’intercolumnio sopra ad un alto podio e un telaio ? di legno carbonizzato posto sotto il peristilio al medesimo lato »). La date probablement la plus proche de la découverte correspond à celle du dessin de F. Ferrajoli, réalisé le 18 janvier 1933.
80 La première découverte de huit pesons est survenue en 1912 (NSA 1912, p. 217), la seconde, de 72 pièces, a été effectuée lors du dégagement complet de la boutique en septembre 1927 (cf. NSA 1929, p. 402).
81 Il convient de souligner que le poids absolu de ces pesons n’est pas un argument pertinent pour rejeter cette interprétation : l’important est que les fils soient tous soumis à une tension équivalente si ce n’est égale ; en accrochant plus de fils aux pesons en plomb, on peut arriver à un poids par fil comparable à celui obtenu par l’emploi de pesons céramiques.
82 Les deux pesons sont inventoriés P4097, sans désignation de chaque pièce par une lettre ou un chiffre pour les distinguer. Ils ont été découverts le 15 septembre 1927.
83 Les pesons provenant de la maison I 10, 8 ont été inventoriés sous le numéro P5165. Les GSP (1932 : 28 novembre) et les livres d’inventaire indiquent qu’ils étaient 53 ; 57 sont actuellement inventoriés sous ce numéro. Cf. également Allison 2006 : cat. no 1599.
Auteur
Université de Rouen (GRHIS, EA 3831 ; associé au Centre Camille-Jullian, UMR 6573).
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