Des mots aux espaces : Aménagements et fonctionnement des lieux de métier
p. 41-40
Texte intégral
« […] On vint en procession acheter chez eux, uniquement pour voir la boutique. Le revêtement était tout en marbre blanc ; au plafond, une immense glace carrée s’encadrait dans un large lambris doré et très orné, laissant pendre, au milieu, un lustre à quatre branches […]. À droite, le comptoir, très grand, fut surtout trouvé d’un beau travail ; des losanges de marbre rose y dessinaient des médaillons symétriques. À terre, il y avait, comme dallage, des carreaux blancs et roses, alternés, avec une grecque rouge sombre pour bordure. Le quartier fut fier de sa charcuterie […] ».
E. Zola, Le ventre de Paris, 10e éd., Paris, G. Charpentier, 1878, p. 62-63.
1Une première distinction – toute théorique – peut être effectuée entre les boutiques et les ateliers, fondée sur un critère économique. Dans les premières, l’activité de vente est supposée dominer, tandis que seule la production se déroulerait dans les seconds. Pourtant, une telle distinction apparaît trop simpliste : certains ateliers ne peuvent-ils procéder à la vente des produits qu’ils fabriquent sans aucun intermédiaire ? Des boutiques aussi banales que les commerces alimentaires ne présentent-elles pas des activités de transformation d’une matière première en produit immédiatement consommable, ce qui permet de les considérer comme des lieux d’artisanat culinaire – donc des ateliers ? Quelle que soit la nuance que l’on cherche à donner à ces termes recouvrant les lieux d’exercice d’un métier, l’utilisation d’un critère économique – la situation du lieu dans la chaîne allant de la production à la vente au consommateur – implique de pouvoir connaître les activités qui s’y déroulaient ; il faut donc étudier l’ensemble des données recueillies dans les locaux supposés avoir accueilli des commerces ou des ateliers.
2Pour orienter cette recherche, il faudrait réussir à circonscrire le ou les espaces dévolus à la pratique d’un métier dans les maisons, en commençant par l’analyse des textes littéraires et juridiques. Quelle que soit l’activité commerciale ou artisanale exercée au sein de l’espace urbain, elle doit pouvoir être facilement identifiable par de potentiels clients. Il ne faudrait pas tirer de ce postulat l’idée que les boutiques ou les ateliers puissent être de manière très générale insérés dans une typologie unique. La variété des métiers1, des aménagements directement associés à ces métiers ou des localisations au sein des bâtiments interdit toute vue synthétique. Seuls certains aspects architecturaux sont suffisamment récurrents pour permettre une caractérisation large. Dans un premier chapitre, nous verrons ainsi quels sont les éléments pouvant permettre l’interprétation a minima d’un local comme espace commercial ou artisanal. Dans de nombreux cas, cette hypothèse ne saurait être affinée. En effet, le faible intérêt à l’égard des boutiques a eu pour conséquence de fréquemment interdire la caractérisation de ce qui était vendu ou produit dans ces locaux. Toutefois, l’implantation de certains métiers est identifiable à partir des aménagements nécessaires à leur bon déroulement. Ensuite, dans des chapitres distincts, je traiterai d’activités essentielles – commerces alimentaires, boulangeries et métiers liés au textile. Le choix de ces productions tient essentiellement à des facteurs de conservation. En effet, ces espaces de transformation des matières issues de l’agriculture disposent en général d’aménagements maçonnés facilitant leur reconnaissance sans être complètement tributaire des données recueillies durant les fouilles.
Notes de bas de page
1 M. Della Corte (1965 : 484-486) propose une liste de « métiers » provenant de ses lectures des graffites pompéiens. Toutefois, outre les répétitions de certaines appellations variant selon leur orthographe, une partie des titres répertoriés ne correspondent pas à des activités professionnelles – e.g. forenses, seribibi, poppaenses. Pour la ville de Rome, S. Treggiari (1980 : 61-64), dans un inventaire qu’elle considère comme incomplet, mentionne 162 noms de métiers, dont certains peuvent relever de grandes catégories indistinctes, comme les tabernarii ou les officinatores.
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