Préface
p. 5-8
Texte intégral
1Les fêtes du Centenaire en 1989 furent, pour le Stade Bordelais, un des temps forts d'une vie de légende au cours de laquelle son engagement, avec celui de quelques autres grands clubs français, permit au sport de s'enraciner si durablement dans notre pays.
2Nos autorités de tutelle ne s'y étalent pas trompées : Roger Bambuck, Ministre de la Jeunesse et des Sports - Nelson Paillou, Président du Comité National Olympique - Philippe Madrelle, Président du Conseil Général - Jacques Valade, Président du Conseil Régional - Pierre Chassigneux, Préfet d’Aquitaine... - Albert Ferrasse, Président de la Fédération Française de Rugby et tant d'autres personnalités du monde politique, économique, culturel et sportif étaient venus, dans ce grand rendez-vous de la considération et de l'amitié, se joindre à Jacques Chaban-Delmas, Maire de Bordeaux et Président d'Honneur de notre club.
3En ces instants d'une qualité rare — un centenaire n'est pas un événement banal pour une association, ni pour le sport en général — bien des propos furent tenus et bien des souvenirs longuement évoqués. Ils permirent de mesurer, une fois encore, la permanence et la chaleur des liens tissés à l'intérieur de nos sections... mais ils confirmèrent, parallèlement, la crainte de voir l'oubli s'étendre, peu à peu, sur des pans entiers du passé... dans la mesure où les acteurs des décennies lointaines ne sont plus là pour témoigner eux-mêmes.
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4A partir de ces constatations, dont le caractère d'irréversibilité ne pourra que s'accentuer, il fallait bien que fût écrite un jour — et plus tôt que plus tard — l’histoire exemplaire du Stade Bordelais...
5Il fallait que soit retracé tout ce qui se rapporte à sa fondation, le 18 Juillet 1889, au soutien du baron Pierre de Coubertin, à celui particulièrement amical du Stade Français et à l'action conduite par ceux qui, malgré la cruauté de quatre années de guerre, donnèrent au S.B.U.C. l’image emblématique qui reste la sienne aujourd'hui. Il fallait que tout cela soit clairement établi avant que le temps ne pèse, définitivement, sur les mémoires et sur les documents... C'est chose faite aujourd'hui.
6Jean-Paul Callède, un chercheur passionné du C.N.R.S., s'est donné résolument à cette tâche dans le cadre des programmes prioritaires de la Maison des Sciences de l'Homme d'Aquitaine.
7Il en résulte un remarquable ouvrage, d'une grande rigueur, s'appuyant sur des faits, des sources incontestables, et sur quelques pièces uniques conservées aux Archives Départementales. Sa lecture, aisée, est facilitée, de surcroît, par la clarté de l'écriture et du plan.
8Cette étude — dont on peut dire qu’elle fait véritablement novation en ce domaine — recouvre, comme indiqué, les cinquante premières années de la vie du Stade Bordelais. Ce fut la longue période pendant laquelle le club — qui tenait sur le plan national un rôle reconnu de "locomotive" — fut, à la fois, un précurseur et un exemple... dans des orientations portant déjà sur le nombre, la démocratisation, et sur le haut niveau.
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9Jean Paul Callède, dans son introduction, situe sa recherche universitaire sur un axe d'études historiques et sociologiques avec, conjointement dans le propos, le souci d'une exactitude et d'une objectivité absolues. La réflexion globale en ressort enrichie et le lecteur peut entrer, de plain-pied, dans la vie prenante et mouvementée d'un grand club... Ainsi, tout au long des feuillets, qui lui réservent bien des découvertes, il peut suivre le cheminement complexe d'une institution — "véritable carrefour social" — dont les fondements sont l'amateurisme et le bénévolat au service des jeunes et des moins jeunes de notre grande ville et de sa région.
10C'est une lecture passionnante parce qu elle retrace l'histoire, non romancée, d'une vie collective... celle d'une grande aventure humaine, avec ses lumières et ses ombres, dans laquelle de nombreux acteurs — dirigeants ou pratiquants, même extérieurs à notre club — pourront se retrouver.
11Quand on voit la place que tient aujourd'hui le sport dans notre proche environnement, on en vient même à regretter que, parfois, l'auteur ne soit pas allé un peu plus loin dans ses développements... Il nous en dit cependant assez — par de grandes illustrations, des anecdotes, des rappels et des formalisations plus théoriques — pour nous permettre d'évaluer la densité, la permanence et la qualité des actions qui furent conduites par nos prédécesseurs ! Le lecteur pourra en juger par lui-même.
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12Dans ces orientations — qui furent celles d'une totale réussite — la vie du Stade Bordelais fut étroitement liée à Sainte-Germaine, ce grand stade édifié au siècle dernier, témoin de tant de combats pacifiques, mais dont le monument aux morts rappelle les pertes douloureuses auxquelles le club fut confronté... liant son histoire à celle de notre pays.
13Sainte-Germaine... le plus ancien parmi les plus grands qui ont pour noms : Colombes, Parc des Princes, Ponts-Jumeaux... et qui, détruit par les troupes d'occupation, fut reconstruit, il y a peu, retrouvant ainsi sa vocation des premières décennies. La pérennité du club en est renforcée et tout peut, à nouveau, s'articuler autour de ce creuset chargé d'histoire et de symboles. Il sera, de plus en plus, un lien incomparable entre un passé glorieux et un avenir qui ne saurait le démentir.
14Tout ceci pourrait donner lieu à d'autres commentaires mais le travail rigoureux de Jean Paul Callède se suffit à lui-même. Il est là, avec son authenticité... et, il démontre, de manière exhaustive, que cette culture nouvelle, qui allait peu à peu s'implanter dans le monde — et avec quel bonheur — naquit, pour une part, au Stade Bordelais.
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15Voilà qui exige, de nous, une indispensable humilité au moment où le club vient de s’engager dans une immense étape... celle qui s'est ouverte sur le deuxième siècle de sa vie associative, sportive et formatrice. Il faudra, en effet, beaucoup de foi, d'ardeur et de ténacité pour seulement approcher, ce qui fut fait auparavant. Il est vrai qu'il n'est plus possible, à notre époque, qu’un club Omnisports domine dans d'aussi nombreuses disciplines comme a pu le faire, en d'autres temps, le Stade Bordelais.
16La spécialisation des clubs, leur nombre, les moyens nécessaires et les difficultés qui en découlent, rendent cette tâche impossible. Nous avons dû, d’ailleurs, concentrer nos efforts sur un nombre plus réduit de sections. Un seul club, le Racing Club de France, a réussi, depuis cent ans, à se maintenir aux premiers rangs en bien des domaines... réussite incomparable qui, vraisemblablement, ne sera jamais égalée.
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17Les temps ont donc changé ; les possibilités de conduire, dans le même club, une action "élitiste" portant sur un grand nombre de sections ne sont plus les mêmes qu'autrefois. Aujourd'hui, d'autres priorités qui sont autant d'interrogations — viennent nous interpeller, avec une intensité qui ne cesse de croître.
18Elles nous questionnent sur la globalité de la mission du club dans la société, sur la programmation de ses objectifs, et sur la manière d'être des adultes, face à des inquiétudes qui nous concernent tous.
19En effet, devant l'effritement des équilibres sociaux, la montée des dérives et celle des graves dangers qui menacent les jeunes... ne faut-il pas ouvrir des voies nouvelles et multiplier les initiatives dans les secteurs où nous pouvons être utiles à la collectivité ? Le sport n’est-il pas, désormais, dans l'obligation d'élargir et d'étendre ses compétences ?
20La réponse est sans ambiguïté : le Stade Bordelais sait qu'en évoquant ces grands problèmes, il n'apprend rien à personne... mais il dit, par contre, qu'il est possible — en s'appuyant résolument sur le sport et sur son environnement — de développer tout à côté de l’école, du lycée et de l'Université, des actions de prévention, d'éducation complémentaire et d'insertion professionnelle reposant sur du réel et sur du concret.
21Cette mission s'impose, car ce qui n'était précédemment — sur le plan de la formation morale — qu'une conséquence naturelle, mais limitée, de la pratique d'un sport devient, maintenant, une nécessité impérative et continue... Nous le constatons chaque jour "sur le terrain ".
22Les objectifs du Stade Bordelais, pour les prochaines décennies, procèdent largement de ce constat. Ils sont clairs : montrer et démontrer que le sport peut représenter, pour la jeunesse, un élément essentiel de son comportement et de son équilibre. Ce que l’on apprend sur un stade ou sur une piste — confiance en soi, combativité, loyauté, respect des règles, solidarité — on l'exprime souvent tout au long de son existence.
23Dans ce sens, le club s’affirme comme une cellule irremplaçable. En mettant en lumière les valeurs particulières du sport et leur immense intérêt... en offrant aux jeunes ses structures et ses éducateurs il peut, dans un nouveau concept, devenir — sur le plan social — une composante incontournable de la vie de la cité et de son enrichissement.
24Il ne fait aucun doute, qu'à ce titre, toutes les grandes métropoles seront de plus en plus concernées.
25Ainsi, comme à l'origine, au siècle dernier, le Stade Bordelais prouverait une fois encore qu'avec un peu d'imagination, de volonté, de persévérance et de confiance en l'avenir, il est possible d'écrire un nouveau texte et de faire avancer les choses dans le bon sens. Quel plus beau renouvellement de l'action novatrice de notre association qu'un effort aussi fermement orienté vers la jeunesse et vers ses lendemains !
Auteur
Président Général du S.B.U.C.
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