Chapitre I. La naissance de la presse
p. 15-22
Note de l’éditeur
Nous n'indiquons que le nom de l'auteur (en lettres capitales et en italiques) pour les ouvrages figurant dans la bibliographie.
Texte intégral
1Il est toujours difficile d'établir une priorité dans l'origine d'une activité inévitablement rudimentaire à ses débuts. L'antériorité de l'établissement de journaux dans des zones sous l'influence anglaise ne laisse aucun doute, on peut considérer que le premier journal en Afrique Sub-saharienne est le Cap Town Gazette établi en 1800 et destiné aux Européens du Cap, suivi de la Sierra Leone Gazette, fondée en 1801 par des membres de la Compagnie de Sierra Leone qui géra l'établissement avant qu'il ne devienne colonie britannique en 1808 ; ce journal prit ensuite le nom de The Royal Gazette and Sierra Leone Advertiser. Il était publié à Freetown où s'étaient installés, depuis 1792, des esclaves libérés d'Amérique du Nord. Ces Afro-Américains, déjà instruits, apportèrent eux et leurs descendants, une impulsion à toute la côte occidentale de Lagos à Monrovia1.
2Trois types de presse apparurent en Afrique avant même que ne se développe l'expansion coloniale européenne.
1. La presse pour les Européens
3Elle se développa surtout dans les régions où s'établirent des Anglais et des Hollandais, d'abord au Sud de l'Afrique. En 1823 Thomas Pringle et le Révérend Abraham Faure demandèrent au gouverneur britannique de publier un mensuel. Celui-ci refusa mais Pringle et l'imprimeur George Greig, anglais lui aussi, publièrent en janvier 1824 The South African Commercial Advertiser autorisé par le secrétaire d'Etat aux colonies comme publication non politique.
4Mais la critique des conditions d'établissement des Anglais à l'Est du Cap entraîna la suppression du journal ; Pringle et Greig et James Faibairn s'étaient heurtés au gouverneur Lord Charles Somerset accusé de corruption. Fort de l'appui de la London Missionary Society à Londres, Greig fit reparaître l'Advertiser en 1825, à nouveau suspendu en 1827 par le gouverneur. Ainsi la presse en Afrique du Sud commençait une histoire agitée. Avec l'appui du gouvernement de Londres en 1828 une loi sur la Presse du Cap introduit le principe de la liberté de la presse. L'Advertiser, à nouveau publié, réclamait des institutions représentatives, tandis que depuis 1824, De Zuid Afrikaansche Tijdschrift publié en hollandais par le Révérend Faure s'élevait contre les défenseurs boers de l'esclavage alors que De Zuid Afrikaan, organe en hollandais lancé en 1830, défendait l'esclavage. D'autres journaux furent publiés à Pietermaritzburg (De Natalier) en 1844, ou au Transvaal, De Staats courant en 1857, puis en 1873, De Volkstern. Le premier journal en afrikaans fut Di Patriot en 1875. Des journaux apparurent dans d'autres villes, The Friend of the Sovereignty à Grahamstown en 1850 avant de se transférer en 1852 à Bloemfontein. The Diamond Fields Advertiser à Kimberley. Natal Mercury and Commercial Shipping, de la famille Robinson, fut le premier quotidien de Durban en 1854. Toutefois Le Cap restait le principal centre de la presse avec l'établissement en 1857 de The Cape Argus dont un des principaux actionnaires était Solomon un membre du parlement du Cap, et en 1876 Cape Time.
5L'Afrique occidentale connut aussi très tôt la presse ; en 1822 The Royal Gold Coast Gazette and Commercial Intelligencer débute à Accra, d'abord manuscrit, elle fut vite reconnue par les autorités comme un organe semi-officiel. Des journaux plus tard critiquèrent l'administration coloniale, The Gold Coast Times de J. H. Brewen 1874, The Western Echo à Cape Coast, The African Interpreter and Advocate de Sierra Leone en 1867 publia des extraits de la presse de Londres et du journal du Cap.
6La colonisation française engendra bien plus lentement la naissance de journaux (si l'on excepte ceux nés au XVIIIe siècle à l'Ile de France devenue après 1815 l'Ile Maurice). Bien que la présence française à Saint-Louis au Sénégal fut antérieure à 1 789, ce n'est qu'en 1856, avec l'installation d'une imprimerie que naquit le Bulletin administratif du Sénégal, édité à Paris depuis 1844. Ainsi l'apparition tardive de l'imprimerie —qui resta une activité très surveillée, la dépendance étroite des autorités coloniales président à l'apparition de la presse ; la création en cette même année 1856 du Moniteur du Sénégal, journal officiel de la colonie confirme d'autant plus ces caractères qu'en France même la législation impériale contrôlait très strictement la presse. La presse dans la zone francophone fut toujours étroitement dépendante de la conjoncture politique en France, liée aux élections, les Sénégalais de quatre communes du Sénégal, avec le droit de vote qui leur fut reconnu au début de la 3ème République, lancèrent aussi leurs premiers journaux à cette occasion2.
7A Madagascar, c'est sous l'influence anglaise du docteur Davidson avec l'appui de missions protestantes que fut publié en malgache Nygazety Malagazy ; ce mensuel officiel lancé en 1875, abordait le problème de l'esclavage et critiquait les abus de certains dignitaires de la cour, ce qui le fit suspendre en juin 1876. Il avait eu recours à la publicité et aux annonces ; il donnait des informations religieuses et générales, des connaissances médicales, des « kabary » (messages officiels) et était vendu dans plusieurs villes. En 1881, une loi prescrit l'interdiction de toute critique du gouvernement dans la presse en malgache. Mais la presse en langue étrangère était plus libre. Anglais et Français s'affrontèrent ; Madagascar Times et Madagascar News paraissaient à Tananarive ; et à Tamatave, en 1881, La Cloche, L'opinion publique. Au total, avant la colonisation, il y eut 23 publications en français, 7 en anglais, 4 en malgache.
8A Tamatave où l'imprimerie était le plus développé, les colons français éditèrent La Cloche avec Laisne de La Couronne en conflit avec le résident de France. Il fut remplacé par The Bee (L'abeille) avec un gérant britannique. Ces journaux critiquaient à la fois la Reine Ranavalona III, son gouvernement, le résident français. La presse coloniale française réclamait l'envoi d'un corps expéditionnaire. Le gouvernement malgache avait créé en 1883 un nouveau Ny gazety Malagasy, utilisé pour orienter l'opinion, informant pendant la guerre en 1885 sur les difficultés du gouvernement de Jules Ferry en France.
9La presse jouait un rôle dans l'antagonisme entre Anglais et Français. Les journaux anglais défendaient la politique de Rainiluiarivony en 1883-1885 contre l'influence française ; pour limiter leur influence le résident général français appuya Ny Malagasy lancé en 1888 à Tananarive. Cet hebdomadaire en juin 1894 critiqua très violemment la reine et son gouvernement3.
10Dans les plus anciennes colonies, celles du Portugal, l'imprimerie ne fut introduite qu'en 1854 ; en mai 1854 commença à paraître le Boletin do governo de Provincia de Moçambique, journal officiel publié à Moçambique qui allait durer jusqu'en 1975. Le premier journal privé fut O Progresso en 1868 qui fut censuré après le premier numéro et il fallut attendre 1870 pour voir un nouveau journal A Impresa qui dura 3 ans, suivi en 1876 par O Africa Oriental qui se maintint jusqu'en 1887.
11Quelimane connut en juillet 1877 son premier journal O Africano qui parut jusqu'en 1881. Alfredo de Aguiar y lança plusieurs journaux à la recherche du sensationnel ; Imparcial en 1885, Correro da Zambezia, Gazeta do Sul.
12En Angola, un premier habdomadaire, A Civilisaçao d'Africa Portuguesa fut lancé en 1866 à Loanda par des Portugais opposants, suivi en 1873 par O Cruzeiro do Sul, ayant aussi des collaborateurs africains. Par ailleurs, le point de vue des colons s'exprimait dans des journaux comme la Gazetta de Loanda4.
2. La presse des missionnaires
13Elle fut d'abord l'œuvre de missionnaires protestants (anglais surtout) ; la lecture de la Bible leur apparaissait comme l'acte religieux essentiel qui incitait à l'apprentissage de la lecture.
14Les missionnaires, protestants ou plus tard catholiques furent parmi les premiers à proposer des périodiques aux Africains et c'est eux qui lancèrent les premiers journaux en langues africaines. Le plus ancien périodique chrétien en langue africaine en Afrique du Sud fut sans doute Umshumayeli Wendaba, trimestriel de juillet 1837 à avril 1841 (en tout 5 numéros), publication en Xhosa des missionnaires méthodistes à Grahamstown (région du Cap). La London Missionary Society en 1844-1845 publie en Xhosa Ikwesi (un titre repris par un missionnaire américain en 1861), puis en 1862 un mensuel, Indaba (Les Nouvelles) qui dura trois ans à Lovedale au Transkei ; ensuite Kafir Express avec une version en langue africaine, Isigidimi Sama Xosa en 1870, devenu un journal indépendant en 1876-1888, mensuel et même bi-mensuel en 18831884, Elijah Makiwane, un des premiers pasteurs africains d'Afrique du Sud en fut le rédacteur à ses débuts. La plus ancienne mission chrétienne de l'Afrique du Sud, celle des Frères Moraves, établie en 1737, publia à partir de 1868 en hollandais puis en afrikaans De Bode van genadendal, en sous-titre « mensuel de la famille chrétienne »5.
15Le missionnaire anglican Henry Townsend publia en 1859 à Abéokuta (dans l'actuel Nigéria occidental) en yoruba, Iwe Irohin, dans une perspective anti-esclavagiste ; en mars 1860 un supplément fut publié en langue anglaise, ce journal dura jusqu'au soulèvement des Egba en octobre 1867 détruisant les presses de la Mission et expulsant les Européens. En décembre 1862, le gouverneur s'était plaint du journal au Colonial Office l'accusant de soutenir l'hostilité des Egba à l'encontre du gouvernement de Lagos. L'Église d'Ecosse lança en 1885 à Calabar Unwana Efik6.
16La Wesleyan Missionary Society publia en 1843 la Sierra Leone Watchman qui s'interrompit en 1846 à cause du gouverneur de la Colonie qui s'était plaint du journal à Londres ; la même mission, associée à la Church Missionary Society lança en 1857 The African and Sierra Leone Weekly Advertiser avec Mores Henry Davies.
17A Monrovia où les missionnaires protestants avaient aidé le Liberia Herald, le Révérend John Seys de l'Eglise méthodiste de New York lança en 1836 Africa's Luminary, un bimensuel qui parut jusqu'en 1846.
18En 1873 The Liberia Advocate avait pour devise « Le Libéria chrétien, la porte ouverte de l'Afrique païenne » et se donnait pour objectif l'éducation et la conversion des Libériens et des Musulmans, s'adressant aussi à l'arrière-pays.
19Des missionnaires suédois fondèrent en 1891 à Matadi Minsamu Miaayenge. En Gold Coast, les Wesleyens lancèrent un peu avant 1860 Christian Messenger et Examiner sur leur propre imprimerie. La presse missionnaire participa, plus tard, au débat politique avec The gold Coast Methodist du Révérend S.R.B. Solomon.
20A Madagascar les missions protestantes anglaises furent les premières à diffuser des journaux peu d'années après la mort de Ranavalona I. La London Missionary Society faisait paraître en janvier 1866 Teny Soa, revue religieuse bimestrielle puis mensuelle à partir de 1869. Les missions protestantes qui avaient développé des écoles depuis un demi-siècle (en 1882 elles avaient 818 écoles recevant plus de 100 000 élèves) lancèrent en 1877 Mpanolo-Tsaina (le conseiller), une revue trimestrielle, interrompue en 1880 et reprise en 1888, puis des publications pour la jeunesse, Ny Sakaizan ny Ankizy Madinika (L'Ami des petits enfants) en 1878.
21En 1874 les Jésuites créent, à leur tour, un mensuel Ny Resaka avec le premier prêtre catholique malgache ; puis en 1875, Mpiaro de la mission anglicane, en 1882, Ny Mpamangy, un mensuel de la mission norvégienne firent leur apparition7.
22C'est aux missions chrétiennes allemandes que revint la création des premiers journaux au Togo, au Cameroun, au Tanganyika avant la Première Guerre mondiale.
23L'administration coloniale française freina l'action des missionnaires en matière de presse. S'il est difficile d'apprécier l'influence de cette presse, très limitée, elle servit d'initiatrice aux premiers Africains publiant des journaux.
3. La presse des Africains
24Elle est née et s'est développée d'abord en Afrique occidentale sous influence anglaise ; les immigrants britanniques, moins nombreux que dans l'Afrique Orientale (où le climat leur était plus favorable) ou dans le Sud, étaient moins portés à lancer des journaux et la présence d'Afro-Américains (le Libéria se constitua en État libre en 1847) donnait une impulsion à une presse africaine. En 1826, Charles L. Force, un noir américain arriva à Monrovia avec une petite presse d'imprimerie donnée par une société de Boston, il lança The Liberia Herald, un mensuel de quatre pages, mais il mourut six mois plus tard et son journal s'arrêta de paraître. Il fut reprit en 1830 par un autre noir américain, John B. Russwurm, ancien rédacteur du premier hebdomadaire noir aux Etats-Unis, Freedom's Journal ; il fut alors publié pendant plus de trente ans (jusqu'en 1862), imprégné du zèle évangélique et menant campagne contre le commerce des esclaves ; ses rédacteurs venaient tous d'Amérique. Ce journal fut subventionné par la Société de Colonisation du Massachussets puis en 1847 par le Gouvernement du Libéria ; il dura jusqu'en 1862. Son dernier rédacteur en chef fut l'écrivain Edward W. Blyden, né aux Indes Occidentales qui fut plus tard secrétaire d'Etat à l'Intérieur en 1878. Il y eut de nombreux journaux éphémères à cause des difficultés financières. En 1854 apparut Libéria Sentinel dirigé par un Africain, Edward James Roye qui devint le président de la Chambre des Représentants. Les journaux du Liberia, déjà indépendant, se considéraient responsables de l'ensemble du continent. L'Observer du 8 juillet 1880 avait conscience du désir des nations européennes de se partager l'Afrique.
25Un autre noir américain, William Drape, venu des Indes Occidentales, lança en Sierra Léone en mai 1855 New Era, un hebdomadaire qui provoqua l'hostilité du gouverneur, le lieutenant colonel Stephen Hill alors que son prédécesseur avait au contraire utilisé ce journal pour publier les avis officiels moyennant 30 livres par an. Hill annula cet arrangement. Dans un conflit le journal fut défendu en Angleterre par les libéraux et le Daily News.
26Drape mourut en 1859 mais il avait été imité par Moses Henry Davies qui s'était initié en Angleterre à l'imprimerie et avait travaillé pour un journal des Missionnaires ; il lança en 1861 The Free Press and Sierra Leone Weekly Advertiser qu'il laissa en 1865 pour The Day Spring and Sierra Leone Reporter.
27La Sierra Leone est à l'avant-garde de la presse africaine dans les années soixante ; avec The Sierra Leone Weekly Times en 1862 du Noir américain A. C. Harleston, et les journaux du juriste William Roiny en conflit avec le gouverneur de Sierra Leone (The Sierra Leone Observer and Commercial advocate en 1864, The West African Liberation en 1869).
28Au cours des années 1870, The Negro de Blyden et West African Reporter (1876) de William Grant, qui voulait unir les Africains de l'Afrique Occidentale anglaise furent les plus importants.
29Charles Bannerman fut le premier Africain à éditer un journal en Gold Coast, Accra Herald en 1858, d'abord écrit à la main et recopié pendant des heures, il devint ensuite The West African Herald ; dès 1859 il avait 300 abonnés principalement des noirs instruits ; en 1868 il fut transféré de Cape Coast à Freetown mais revint peu après en Gold Coast. En mars 1874 le Gold Coast Times était lancé par un Africain, James Brew. The Western Echo s'attira l'hostilité du gouverneur dans les années quatre-vingt8.
30A Lagos en juin 1863 commença à paraître un bimensuel, The Anglo-African édité par un immigrant des Indes Occidentales (fils d'une Jamaïcaine et d'un Ecossais) Robert Campbell jusqu'à la fin de 1865. Le Gouverneur H. S. Freeman s'en était inquiété, écrivant du Secrétaire d'Etat le 28 janvier, que la liberté de la presse était « un dangereux instrument aux mains de nègres semi-civilisés » et réclamait l'imposition de taxes. Mais sa demande fut rejetée à Londres. C'était un journal bien écrit, avec des extraits de journaux londoniens. Campbell fut le gérant du Lagos Observer, un bimensuel créé en février 1882 par J. Bagan Benjamin. Au début des années quatre-vingt, il y avait quatre journaux à Lagos9.
31Appuyés par une petite minorité d'Européens. Ces journaux cherchaient à instruire et à distraire, prenant modèle sur des journaux londoniens ; ils exprimaient aussi des critiques contre l'action de l'administration coloniale.
32C'était une presse d'autant plus politique qu'aucune participation des indigènes n'était prévue dans l'administration des colonies de la Couronne. Elle jouait le rôle d'une opposition et les administrateurs britanniques, attachés à la liberté d'expression étaient sensibles à ses critiques.
33Bien qu'en petit nombre, les mestiços (métis) et les assimilados (Africains instruits) de colonies portugaises utilisèrent des périodiques après 1870. Ainsi José de Fontes Pereira, un Angolais, qui publie en avril 1882 dans O futuro d'Angola, une critique de la politique du Portugal envers son pays : « Il n'en a eu que l'esclavage le plus ténébreux, le mépris et l'ignorance la plus complète »10.
34Les Africains éduqués étaient les seuls concernés ; mais au-delà d'un encouragement à la lecture, ces journaux des Africains, à défaut d'une participation africaine dans l'administration des colonies, exprimaient les doléances et les aspirations des autochtones.
35Le développement des écoles primaires et secondaires à Lagos dans les années soixante-dix, la création de plusieurs imprimeries (en 1875, la Caxton Privating Press de Richard Beale Blaize) allaient donner une impulsion à la presse au moment où l'expansion des Européens en Afrique fait apparaître, aux yeux des Africains éduqués, une contradiction entre les principes chrétiens et démocratiques et la supériorité affichée par les Européens.
36La naissance de la presse en Afrique sub-saharienne n'est pas seulement un transfert de technologie —l'imprimerie— ; c'est aussi un élément fondamental d'acculturation, à la fois la pénétration de l'écrit et aussi une modification profonde du comportement avec l'introduction de la notion moderne d'information. Non qu'il n'existât pas un système d'information dans les sociétés africaines, fondé sur l'oralité et le codage sonore, mais l'information était à la fois hiérarchique, rituelle pour ne pas dire sacrée, limitant son intérêt à la communauté. L'Islam avait déjà introduit dans une partie de l'Afrique une notion différente de l'information. C'est aussi de l'extérieur que vint la diffusion écrite de l'information.
37La prépondérance encore manifeste de la presse écrite dans les zones anglophones a des racines anciennes ; elle remonte au retour de noirs américains dans ce qui allait devenir le Libéria. Le rapatriement en Sierra Léone en 1787 de noirs émancipés en Angleterre donna aussi une priorité à Freetown devenu en 1808 une colonie de la Couronne, base de la lutte contre les négriers.
38L'avance anglaise s'explique de plus par l'intensité du mouvement anti-esclavagiste en Angleterre avec Lord Bathurst et Wilberforce, et par l'introduction de formes nouvelles de l'économie pour remplacer l'économie de l'esclavage aboli en 1833 dans les colonies anglaises.
39Propagande anti-esclavagiste et propagande religieuse sont souvent à l'origine des premiers journaux qu'ont connu les Africains.
40Mais la presse en Afrique fut aussi et plus encore à ses débuts, à l'usage des Européens dans les points où ils étaient les plus nombreux, avec la création de feuilles inspirées des journaux de leur métropole ; là aussi le plus grand développement de la presse anglaise, dans la première moitié du XIXe siècle, joua son rôle, de même que tout le réseau des associations reliant les colons, marchands ou missionnaires anglais à l'Angleterre, moins dépendants des autorités coloniales en Afrique que dans les zones sous contrôle de la France plus assimilatrice et moins portée à laisser se diffuser une expression autonome. Ces débuts de la presse en Afrique donnent leur empreinte aux journaux, leurs différences aussi quand se développe l'expansion coloniale à partir des années quatre-vingt du XIXe siècle.
Notes de bas de page
1 Nous nous sommes inspirés principalement de Ainslie R. et de Barton pour les journaux africains de langue anglaise cités dans les deux premiers chapitres.
2 DIA.
3 RAKATONIRINA et RANDRIAMBOAVINJY.
4 ROCHA et DAVIDSON ; cf. aussi Jornalismo de Angola, Luanda, 1964.
5 AINSLIE et SWITZER.
6 BARTON et OMU.
7 RAKATONIRINA.
8 AINSLIE, JONES-QUARTEY et BEHN.
9 OMU.
10 DAVIDSON.
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