Présentation du thème par Yves Chateaureynaud
p. 135-136
Texte intégral
Animateur : Yves CHATEAUREYNAUD
Maître de Conférences en STAPS à l'Université de Pau et des Pays de l'Adour
Ancien Secrétaire Général du Bordeaux Etudiants Club
1Présentation du thème
2Avant de donner la parole aux deux intervenants, je vais rapidement tracer quelques idées.
3Il m'a semblé que l'action qui vise à redéfinir des objectifs communs implique que les objectifs des promoteurs du sport — à l'époque où le sport s'est créé — devaient être convergents. En tout cas, c'est un sous-entendu qui s'impose à l'évidence. L'histoire nous montre que cette unanimité passée n'est pas forcément aussi évidente, et que des luttes d'influence recouvraient, au-delà des querelles de pouvoir, liées à celles des hommes, des divergences quant aux finalités assignées aux pratiques.
4Il n'empêche que ce sport moderne s'est construit, tout au moins dans l'esprit de son promoteur le plus célèbre : Pierre de Coubertin, sur des perspectives éducatives. Cet aspect essentiel de son œuvre — le "premier de Coubertin" — a été quelque peu occulté par la promotion et la rénovation des Jeux olympiques — le "second de Coubertin" — que la postérité a retenu au détriment de l'ensemble de l'œuvre de P. de Coubertin. Plus globalement on ne dira jamais assez qu'il était un pédagogue et un éducateur, et que le sport dans cette optique n'était qu'un moyen, non forcément une finalité.
5On peut se demander ce qu'il reste de cet aspect des choses aujourd'hui. Se poser la question, me semble-t-il, est déjà fournir une partie de la réponse. Les mutations du sport actuel, les dérives en tous genres, liées à la spectacularisation, la professionnalisation et les intérêts économiques montrent, s'il en était besoin, que les fondements éducatifs sur lesquels le sport s'est construit sont aujourd'hui bien oubliés, dans la plupart des cas.
6Par ailleurs, il faut aussi noter que l'évolution de nos sociétés actuelles a privilégié la montée de l'individualisme sous toutes ses formes, que le sport lui-même n'a pas échappé à cette tendance et les clubs, institutions communautaires, tout au moins dans le principe, sont aujourd'hui quelque peu désemparés devant cette évolution. Il semble donc, tout au moins à mon sens, qu'il y ait une rupture entre l'idée initiale, et ce qui se passe aujourd'hui.
7De plus, me paraît-il, il y a encore une rupture entre le sport de masse et le sport d'élite, le sport de compétition exclusif n'étant d'ailleurs plus qu'une voie parmi d’autres. D'ailleurs, il ne s'adresse pas à tous. La meilleure preuve, s'il en était besoin, c'est qu'il a fallu inventer un concept nouveau, celui de sport pour tous. Cela prouve bien que le sport "tout court" n'était pas forcément un sport pour tous.
8Il semble donc que nous soyons à la croisée des chemins. Le mouvement sportif devant cette balkanisation doit resserrer les rangs et se forger, voire se reforger, une unité lui permettant de retrouver une mission initiale par trop oubliée : l'aspect éducatif. Il doit répondre aussi aux aspirations d'une large partie du corps social, je pense au sport loisir, au sport détente, que nous n'avons su, faute de moyens souvent, prendre en compte, ce qui a laissé une place d'évidence à la marchandisation des pratiques.
9Le modèle coubertinien doit encore nous inspirer, non pas en tant que retour possible à un clivage amateur / professionnel, aujourd'hui obsolète, mais en tant que modèle culturel fondé sur l'éducation par le sport.
10C'est vraisemblablement à partir d'une alternance entre une approche "ludique" et une approche "laborieuse" que les jeunes générations auront l'opportunité de redécouvrir au sein de nos institutions sportives quelques valeurs du passé. Il s'agit donc, selon moi, de magnifier la fonction d'éducation et de socialisation par le sport aussi bien dans ses aspects de compétition, quel que soit le niveau, que dans ses aspects de loisir.
11Ce qui implique bien entendu pour le mouvement sportif une remise en cause des modes de fonctionnement actuels et pour l'État une redéfinition de la mission de service public. Il apparaît enfin que les partenaires privilégiés du mouvement sportif, à savoir les collectivités territoriales, s'associent, elles aussi, à ce mouvement pour prendre en compte d'une façon plus sensible, mieux marquée, cet aspect éducatif du sport dont on nous encense toujours avec de beaux discours, mais où les soutiens n'arrivent jamais en termes financiers, lesquels étant la plupart du temps réservés quasi exclusivement à la pratique du haut niveau.
Auteur
Maître de Conférences en STAPS à l'Université de Pau et des Pays de l'Adour
Ancien Secrétaire Général du Bordeaux Etudiants Club
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les sports en eaux vives
Enjeux pour le xxie siècle et les territoires
Jean-Paul Callède (dir.)
2016
Les nouvelles cathédrales du sport
Monuments du futur, emblèmes des villes et des nations ou fardeaux ?
Jean-Paul Callède (dir.)
2017
Les logiques spatiales de l’innovation sportive
Conditions d’émergence et configurations multiples
Jean-Paul Callède et André Menaut (dir.)
2007
Le sport saisi dans son évolution récente
Fidélité ou infidélité à ses fondements
Jean-Paul Callède (dir.)
2012
Du sport sans artifice au sport bionique
Amélioration ou condamnation ?
Jean-Paul Callède (dir.)
2015
Le Sport, l’Université, la Société
En finir avec les espérances déçues ?
Jean-Paul Callède (dir.)
2008