Les confiscations
L’organisation des saisies
p. 66-85
Texte intégral
1Les travaux sur l’aspect organisationnel des confiscations sont relativement abondants. Cela tient d’abord à l’attention portée aux saisies d’œuvres d’art auxquelles sont souvent mêlés les spécimens naturalistes. Cela tient aussi à l’ancienneté de cette historiographie attachée à décrire par le menu détail la formation des commissions et le parcours des commissaires. Pour autant, le traitement historiographique des confiscations diffère d’un espace à l’autre. Si les cas de la Hollande, de l’Allemagne et bien sûr de l’Italie ont été abondamment étudiés, les confiscations d’objets d’art et de sciences dans l’intérieur de la République n’ont fait l’objet d’aucune étude d’ensemble. Cela s’explique par la part modeste, du moins en termes de valeur, de ces confiscations dans l’ensemble plus large des « biens nationaux » mais aussi par la complexité de ces saisies qui mettent en jeu plusieurs échelons administratifs — des municipalités au gouvernement en passant par les départements et les districts — mais également plusieurs commissions révolutionnaires dépendantes du Comité d’Instruction publique. Il faut dès lors s’interroger sur les continuités et les ruptures dans l’organisation des saisies comme dans la composition des commissions entre 1792 et 1797. Pour ce faire, les confiscations révolutionnaires sont étudiées dans leurs trois phases successives, en France (1792-1795), puis en Europe septentrionale (1794-1795 et 1796-1797) et, enfin, en Italie (1796-1797).
EN FRANCE
2Les confiscations françaises d’histoire naturelle sont un épisode singulièrement compliqué. S’il est possible de reconstituer le déroulement des saisies opérées à Paris à partir de 1793, celles organisées en province sont difficiles à appréhender du fait de la dispersion des sources dans les archives départementales. Entre 1789 à 1795, les biens des clercs puis des émigrés sont saisis et généralement vendus à prix modiques pour approvisionner les caisses de l’État65. Ces cessions constituent un mouvement de transfert de propriété inédit par son ampleur puisqu’il équivaudrait à la mise sur le marché d’environ un dixième de la valeur totale des patrimoines français. Les ventes de bien nationaux touchent d’abord les propriétés foncières et immobilières de très loin les plus importantes par leur valeur marchande, tandis que l’adjudication du « mobilier national » a d’abord une portée symbolique puisqu’elle vise les signes les plus évidents du luxe des anciens privilégiés. Ce mobilier se compose d’objets liturgiques précieux et de cloches, mais également de livres et de peintures anciennes. Les objets sont tantôt envoyés à la fonte, tantôt vendus à l’encan et parfois conservés pour alimenter les premières bibliothèques et les premiers musées départementaux et municipaux. À partir de 1790, on observe les premières tentatives de protection des objets d’arts et de sciences des destructions opérées par le « vandalisme » tandis qu’apparaissent tout un ensemble de tensions entre la nécessité de sauvegarder ces objets et les besoins financiers de l’État comme entre les instructions centrales et les réactions locales.
Les commissions chargées des confiscations de monuments en France (1790-1800).
Commission des monuments (Comité des Quatre-Nations) |
Commission temporaire des arts |
Conseil de conservation |
|
Création |
08 novembre 1790 |
1er septembre 1793 |
27 décembre 1795 |
Suppression |
18 décembre 1793 |
octobre 1795 |
septembre/octobre 1800 |
Mission |
inventaire, transport |
inventaire, transport |
conservation |
Membres |
6 |
36/75 |
9 |
3La Commission des monuments est créée en novembre 1790 sous le nom de Comité des Quatre-Nations66. Réunissant les six savants adjoints aux « Comités réunis » — le Comité d’aliénation des biens nationaux et le Comité des biens ecclésiastiques —, elle est chargée d’une double mission : faire l’inventaire des objets de science et d’art des maisons religieuses, des résidences de la famille royale et des émigrés et opérer le transport des objets saisis dans des dépôts. Le 15 décembre 1790, le Comité d’aliénation des domaines nationaux produit une instruction prévoyant la conservation des manuscrits, monuments anciens, tableaux, pierres précieuses, cartes géographiques et instruments d’astronomie. Cependant, ces deux organes s’occupent prioritairement de l’inventaire, de la saisie et du transport des livres et des œuvres d’art, délaissant largement les « objets de sciences », instruments de physique comme spécimens d’histoire naturelle. Durant cette première période, qui court de 1789 à 1791, il y a très peu de confiscations naturalistes comme le remarque Germain Poirier67. Cette quasi absence est difficile à interpréter, bien que l’étude du cas parisien semble indiquer que, pour l’essentiel, les confiscations naturalistes se sont opérées plus tardivement, après 1792 et surtout à partir de 179468.
4Après la suppression des académies le 8 août 1793, le gouvernement révolutionnaire commence à s’intéresser à la sauvegarde des objets scientifiques69. La Commune de Paris, arguant de la dangerosité des spectacles animaliers, saisit les bêtes exhibées par les montreurs sur les boulevards et sur les places publiques, les transfère au Muséum et indemnise leur propriétaire70. Le 1er septembre, peu de temps après la nomination de membres de l’Assemblée pour inventorier les biens des académies et des sociétés supprimées, le ministre de l’Intérieur forme la Commission des arts composée à l’origine de 36 commissaires. Un conflit d’attribution naît alors entre la nouvelle Commission des arts et l’ancienne Commission des monuments. Celui-ci s’achève par la suppression de la seconde le 18 décembre 1793, la première, renommée à l’occasion « Commission temporaire des arts », récupérant les attributions de son ancienne rivale. Adjointe au Comité d’Instruction publique, la Commission temporaire des arts obtient de son autorité de tutelle une délégation de pouvoirs lui permettant d’obtenir des autorités administratives constituées toutes les facilités nécessaires à l’ouverture des dépôts, à la réalisation des inventaires et au transport des objets saisis. La physionomie quasi définitive de la Commission est donnée par le décret du 6 février 1794 qui fixe à douze le nombre de ses sections et désigne ses membres. À la fin du mois d’octobre 1795, l’existence de la Commission temporaire des arts s’achève officiellement, mais demeure dans un état de survivance jusqu’à son remplacement par le Conseil de conservation des objets de sciences et des arts à la fin du mois de décembre. Dans ses grandes lignes, l’organisation du Conseil de conservation est semblable à celle de la Commission temporaire des arts malgré le nombre réduit de ses membres. La nouvelle dénomination de cette commission laisse également entendre que le moment, « temporaire », des saisies révolutionnaires se termine et qu’un autre moment s’ouvre, celui de la conservation des biens saisis. Trois commissions se succèdent donc en l’espace de quelques années pour opérer la saisie et la conservation des biens des « ennemis de l’intérieur ». Parmi celles-ci, seule la Commission temporaire des arts joue un rôle important dans les confiscations de collections naturalistes, à la très notable exception de la collection Condé saisie dès l’été 1793, ce qui marque le début véritable des saisies parisiennes.
5La première des douze sections de la Commission temporaire des arts s’occupe des objets d’histoire naturelle. Cette section, dénommée « A » dans les inventaires de saisies, est elle-même divisée en trois branches qui correspondent aux trois règnes de la nature : la minéralogie (« A1 »), la zoologie (« A2 ») et la botanique (« A3 »). Au 6 février 1794, la section Histoire naturelle comprend huit membres : Gillet-Laumont71, Besson72, Lelièvre73 et Nitot74 pour la partie minéralogique ; Lamarck75 et Richard76 pour la zoologie ; Thouin et Desfontaines pour la botanique. Rapidement, la section s’accroît par la venue de trois naturalistes : L’Héritier pour la botanique, Mailly77 pour la minéralogie et enfin, un peu plus tard, Cuvier78. Au total, la section se compose donc de 11 membres. Trois traits principaux les caractérisent. Ils relèvent pour l’essentiel de deux institutions centrales, le Muséum national d’Histoire naturelle et l’Agence des mines, et publient régulièrement des mémoires dans le Journal des Mines ou bien pour la Société d’histoire naturelle de Paris. Plusieurs d’entre eux sont également propriétaires d’une collection particulière ou bien directeurs d’une collection institutionnelle : Gillet-Laumont, Besson et Mailly possèdent de belles collections minéralogiques et Thouin gère l’essentiel des collections végétales du Jardin des plantes. De manière plus discrète, on rencontre aussi des artisans et des marchands qui connaissent le prix des choses : Nitot, joaillier, estime la valeur des objets précieux de la reine tandis que le marchand Gaillard, qui n’est pas membre de la Commission, est appelé pour participer à l’inventaire estimatif du cabinet Condé79. Les commissaires ont donc une triple fonction d’expertise. Certains, en tant que membres des institutions savantes nationales, sont les plus indiqués pour dénommer les objets naturels et donc rédiger des inventaires où la précision de la nomenclature est essentielle. D’autres, qui sont parfois les mêmes, en tant que propriétaires ou directeurs de collections, disposent du savoir-faire nécessaire à l’administration d’une collection d’objets. Enfin, quand il est question de proposer une estimation marchande, notamment à la demande de créanciers, on fait aussi appel à des marchands.
6Les confiscations des collections des maisons religieuses, des académies et des émigrés se prolongent en province. Elles semblent débuter véritablement à l’été 1794, au moment fort des confiscations parisiennes. Pour faciliter l’organisation des dépôts créés sur le modèle parisien, la Commission temporaire des arts envoie aux administrations départementales une Instruction. Cette dernière, rédigée par Vicq d’Azyr et originellement destinée au département de la Seine, accorde une place essentielle aux sciences, et plus particulièrement à l’histoire naturelle80. On y lit la peur de « l’esprit de rapine », une dénomination rigoureuse des objets devant éviter le vol par la substitution d’un objet de vil prix à un autre de valeur. On y lit encore la peur du vandalisme dans un rappel du décret du 3 brumaire an II qui invite à protéger les monuments des arts et des sciences des mains barbares de « l’ignorant » qui ne voit dans les monuments que des « emblèmes de superstition, de despotisme ou de féodalité ». Surtout, d’après ce même décret, il convient « que les monuments publics, transportables et qui portent quelques-uns des signes proscrits, qu’on pourrait enlever sans leur faire un dommage réel, soient déposés dans le musée le plus voisin, pour y servir à l’instruction nationale ». La Commission temporaire des arts, sauf exception, n’envoie pas ses membres en province malgré la proposition de Dufourny, en date du 25 novembre 1794, de mettre sur pied une « agence ambulante » pour surveiller les opérations de saisie. Néanmoins, en juillet 1794, Tisset fils, boulonnais résidant à Paris et muni d’un laissez-passer officiel, est envoyé dans le département du Nord pour y opérer l’inventaire et la saisie des collections, notamment du jardin botanique de Dumont de Courset à Boulogne-sur-Mer. C’est le seul cas connu d’une confiscation naturaliste opérée par un envoyé parisien, encore Tisset fils ne rendil pas compte à la Commission temporaire des arts mais à la Commission exécutive de l’Instruction81. Pour le reste, l’organisation concrète des saisies révolutionnaires est laissée aux administrations locales, celles des départements et des districts. Il est néanmoins demandé aux commissaires parisiens d’entretenir avec les départements une correspondance suivie de ce « qui peut être contenu dans les divers départements »82. Les inventaires et les notes relatives aux saisies départementales sont alors centralisés dans les archives de la commission qui réalise à cette occasion un Bordereau des inventaires et catalogues d’objets de sciences et d’arts envoyés par les départements et les districts83. Ainsi, si la commission ne dispose pas des pouvoirs et des moyens nécessaires pour surveiller localement les opérations de saisie, elle entend néanmoins exercer son contrôle en amont, par l’envoi de ses instructions aux départements, et en aval, par la réception et l’archivage des inventaires. Une part importante des saisies d’objets d’arts et de sciences échappe pourtant à ce contrôle central. On sait, par d’autres sources, que toutes les confiscations départementales n’ont pas été recensées dans ces inventaires envoyés à Paris et que certaines collections ont été vendues aux enchères84.
Les confiscations en France (1791-1794)
Recensement incomplet d’après le Bordereau des inventaires Infographie Pierre-Yves Lacour.
EN EUROPE SEPTENTRIONALE
7Les confiscations françaises vont se prolonger au-delà des frontières de 1789 dans les territoires conquis par les armées de la Révolution. Dès le 8 mai 1794, des « agences d’évacuation » ou « d’extraction » sont créées à la suite des troupes pour recueillir et envoyer dans l’intérieur de la République les objets d’arts et de sciences confisqués dans les pays annexés du Nord de l’Europe. La nomination des commissaires est un processus complexe caractérisé par les luttes d’influence entre trois organismes, le Comité de Salut public, le Comité d’Instruction publique et la Commission temporaire des arts. Selon Bénédicte Savoy, « la première campagne de saisies artistiques et scientifiques mise en œuvre dans les régions conquises est […] confiée à trois équipes distinctes, issues d’organismes différents, voire rivaux, qui poursuivent des objectifs semblables. Les tensions et conflits de compétence liés à cette polycratie mal maîtrisée sont manifestes dès les premières semaines, mais ils sont désamorcés au début du mois d’octobre 1794 : le Comité d’Instruction publique prend en effet l’initiative, depuis Paris, de renforcer les pouvoirs de Thouin, Dewailly, Faujas et Leblond […]. Tous les autres commissaires sont désormais leurs subalternes »85. Thouin dirige de fait les opérations. Il est accompagné de Barthélemy Faujas de Saint-Fond, de Michel Leblond et de Charles Dewailly. Thouin, Dewailly et Leblond, membres de la Commission pour la recherche des objets de sciences et arts dans les pays annexés sont également membres de la Commission temporaire des arts. Forts de ce précédent, ils apparaissent ainsi comme des spécialistes de l’identification, de l’évaluation et de l’emballage des collections saisies. Faujas et Dewailly sont également des voyageurs, le premier connaissant bien les pays du Nord de l’Europe pour les avoir visités à la veille de la Révolution86. Pour Bénédicte Savoy, cette commission est la marque de « l’alliance des arts et des sciences » mais aussi « le lieu où se rejoignent le xviiie siècle des voyageurs européens et l’ère des centralisations, l’esprit encyclopédique et l’esprit gestionnaire, l’héritage des académies et le grand projet de l’instruction publique »87. On ne leur prescrit « aucune marche particulière » à suivre88. Ni les administrations centrales ni même le Muséum ne leur prodiguent des instructions en amont pas plus qu’on ne contrôle leur travail au retour. La grande latitude d’action des commissaires efface alors l’ordinaire coupure entre science de cabinet et pratique de terrain. Il n’y a plus ici de partage entre les mains des collecteurs et la science des savants, les commissaires occupant simultanément les deux fonctions.
8L’espace parcouru par les commissaires est délimité au Sud par l’ancienne frontière avec la France et à l’est par la frontière pensée comme « naturelle » du Rhin prolongé par un de ses bras, l’Ijssel, à partir d’Arnheim jusqu’à l’Ijsselmeer89. C’est l’espace conquis par les armées révolutionnaires, espace sous souveraineté française, mais pas encore départementalisé. Les commissaires œuvrent dans les fourgons de l’armée, intervenant peu après la troupe : Jourdan et Pichegru entrent à Bruxelles le 8 juillet 1794 et les commissaires, nommés en septembre, y sont dès le mois d’octobre ; Kléber est devant Mayence le 4 novembre 1794 et les commissaires sont à Coblence le 4 janvier 1795 ; Pichegru occupe Amsterdam le 20 janvier 1795 et les commissaires sont en Hollande dès la mi-février. Il est possible de retracer la chronologie précise de l’itinéraire des commissaires en Europe du Nord d’après leurs rapports et le récit publié par le baron Trouvé90. Partis de Paris en septembre 1794, ils passent d’abord en Belgique où on les retrouve à Bruxelles dès le mois de septembre, puis à Liège au début du mois d’octobre. Passant la Meuse, ils sont en Allemagne à la fin du même mois d’abord à Aix-la-Chapelle puis à Cologne de la mi-novembre à la mi-décembre, à Bonn en décembre et à Coblence en janvier 1795. Repassant la Meuse en sens contraire, ils passent à Maastricht et prennent rapidement la direction de la Hollande où on les retrouve à La Haye dès le mois de février. Fin janvier ou début février, les « objets précieux » de la Hollande, à commencer par la collection stathoudérienne, sont mis sous la surveillance des Représentants du peuple près les Armées du Nord, à la demande du Comité d’Instruction publique91, tandis que les « agences d’extraction » sont supprimées le 20 février par un arrêté du Comité de Salut public92. Leblond et Dewailly retournent alors en France, tandis que Faujas et Thouin opèrent la saisie du cabinet du Stathouder à La Haye et de la ménagerie de Loo, en Gueldre, du mois d’avril au mois de juin 1795. Ils poursuivent ensuite par un bref voyage en Hollande avant d’entamer le chemin du retour vers Paris en repassant par Bruxelles.
9Lors de la mission septentrionale, les collections des aristocrates, des émigrés et du clergé sont visées par les commissaires. Avant leur arrivée, on assiste d’ailleurs à quelques tentatives de sauvetage des collections d’histoire naturelle transportées précipitamment en lieu sûr. Ainsi, dans l’espace rhénan, « le peu d’objets concernant les sciences et les arts que les électeurs et les riches propriétaires n’avaient pu enlever a été dans le tems [sic] recueilli par les commissaires »93. Certaines collections particulières sont dirigées vers des caches urbaines ou à l’étranger comme celle qu’un émigré anonyme de Liège fait passer à Londres94. Les collections aristocratiques passent, elles, d’un château à l’autre, du fait de la dispersion des possessions de ces grands propriétaires fonciers. Comme l’électeur de Cologne « avait prédit d’avance les succès des armées de la République et avait dit : il faut me préparer à aller vivre en philosophe dans un coin de Westphalie [sur la rive droite du Rhin] où j’ai quelques possessions, il faisait partir depuis longtemps les objets qui l’intéressaient : sa bibliothèque considérable et bien choisie, tous les minéraux, fossiles, pétrifications et coquilles dont les suites nombreuses étaient sistématiquement [sic] arrangées à en juger par les étiquettes latines, allemandes et françaises qui sont encore sur les tablettes qui ont été trouvées vides »95. En Hollande, « parmi les choses laissées par le Stathouder, un cabinet d’histoire naturelle nous intéressait beaucoup. Nous nous rendîmes sur le champ à Lahaye [sic] pour l’examiner quoi qu’on en eut enlevé beaucoup d’objets d’une valeur numérique assez considérable »96. Mais les sauvetages des grandes collections aristocratiques ne sont que partiels. À Bonn, l’électeur de Cologne « fait passer le Rhin à sa bibliothèque et à une partie de son cabinet d’histoire naturelle », emmenant minéraux, fossiles et coquilles, mais délaissant son encombrante collection d’oiseaux et de quadrupèdes97. Dans le cabinet de La Haye, « les minéraux […] sont en général du plus beau choix. Le Stathouder n’a eu le temps d’enlever que les pierres précieuses et quelques riches échantillons de mine d’or ; mais ce qui reste est admirable »98. Les aristocrates sauvent de préférence les objets de grande valeur marchande, qui peuvent être vendus, hors des réseaux de la curiosité européenne, dans les circuits commerciaux de la bijouterie ou de la production monétaire. A contrario, les commissaires s’intéressent principalement à des objets dont la valeur est davantage scientifique que marchande, les pierres précieuses ou les mines d’or étant revendues au profit du Trésor.
La première mission de confiscation en Europe septentrionale (1794-1795) Infographie Pierre-Yves Lacour.
Entrée des Français
dans la Hollande le 21 janvier 1795… Gravure de Jean Duplessi-Bertaux publiée en 1802 (estampe : eau-forte, burin ; 24 x 29 cm) Cliché Bibliothèque nationale de France.
10Dès septembre 1794, le dépôt de Cambrai rassemble dans une église « tout ce qui s’est trouvé de tableaux, de livres, de meubles précieux et d’objets d’histoire naturelle chés [sic] les émigrés, les condamnés et dans les maisons religieuses » des territoires annexés d’Europe septentrionale99. Commençons par les émigrés. Les commissaires saisissent le cabinet de pétrifications de l’émigré Burtin100 et visitent à Coblence « une fort belle collection d’histoire naturelle. Cette collection appartient à deux propriétaires dont l’un réside dans la ville et l’autre est absent soupçonné d’émigration »101. Ils confisquent également les plantes du jardin de D’Aremberg102 dans la région de Bruxelles, de Walckiers de Tronchiennes et de D’Afembourg près de Louvain et de Reft [ou Neft] à Hamal près de Tongres103. Poursuivons par les souverains étrangers. Les commissaires saisissent le cabinet impérial d’histoire naturelle de Bruxelles104, celui du comte Wolff-Metternich à Liblar105, celui de l’électeur de Cologne à Bonn et surtout celui du Stathouder à La Haye ainsi que sa ménagerie à Loo106. Ils entrent également en possession des végétaux du jardin botanique de Laeken107, propriété du gouverneur des Pays-Bas, des plantes du jardin du prince-évêque de Liège à Seraing108, de celles du jardin du baron Geyer von Schweppenburg près de Cologne et du jardin de l’électeur de Cologne à Brühl109. Terminons par les clercs. Les commissaires saisissent les fossiles du chanoine Godin à Maastricht110 et s’emparent du cabinet du collège jésuite à Cologne111. À Coblence, Leblond précise d’ailleurs qu’il lui suffit « d’apercevoir des clochers : ils [lui] servent de guides », les institutions religieuses renfermant quantité d’objets de sciences et d’arts112. Des clercs, des souverains et des émigrés, les « ennemis idéologiques » sont les mêmes au-dedans et au-dehors de la République, à l’exception notable de l’ancien collège jésuite de Cologne propriété de la municipalité depuis la suppression de la Compagnie de Jésus113.
11En Allemagne, la mission des quatre commissaires ne marque pas la fin des opérations de confiscation des objets d’arts et de sciences. Cette mission achevée au milieu de l’année 1795 précède celle d’Anton Keil de septembre 1796 à l’été 1797. Ce dernier, Allemand rallié à la Révolution et professeur de droit, suscite des réactions de rejet de la part de la population, des communautés religieuses et des administrations locales. Les plaintes se multiplient à propos de sa « conduite indécente »114. Lors de cette mission, suivant les progrès des armées de Jourdan et Moreau, Keil refait le chemin de ses prédécesseurs dans l’espace entre Rhin et Meuse. Il passe à Aix-La-Chapelle et dans les villes rhénanes de Coblence, Bonn et surtout Cologne, mais aussi à Trêves que ses prédécesseurs n’avaient pas visitée115. Au cours de sa mission, Keil s’est surtout intéressé au patrimoine bibliographique du monde rhénan. Bénédicte Savoy a justement qualifié sa mission de « post-opératoire » et de « liquidatrice »116. Elle est liquidatrice sous trois aspects. D’une part, Keil recherche les objets confisqués et les plantes réquisitionnées lors de la précédente mission mais laissés dans des dépôts ou dans des jardins. Il met ainsi la main, au château électoral de Bonn, sur des objets d’histoire naturelle saisis par l’Armée de Moselle sur le territoire de Trêves trois années auparavant117 ou sur des plantes laissées dans les jardins de Bonn et de Brühl118. D’autre part, Keil poursuit les confiscations en visitant de nouvelles villes, notamment Sinzig entre Andernach et Bonn, d’où il rapporte une « momie parfaitement conservée »119, tandis que les employés de l’agent Sylvie s’emparent du cabinet de l’abbaye Saint-Maximin de Trêves120. Enfin, cette mission est liquidatrice en ce qu’elle vise souvent moins l’envoi vers Paris des objets confisqués que leur revente dans des conditions rendues difficiles par la guerre et alors que le produit de ces cessions pour le Trésor national est à peine supérieur au coût de l’organisation des enchères121.
La mission de Keil
Europe septentrionale (1796-1797)
Infographie Pierre-Yves Lacour.
EN ITALIE
12En 1796, c’est au tour des monuments de sciences et des arts d’Italie du Nord d’être confisqués par les armées françaises. Le 11 mai, le Directoire, en parfaite communion d’esprit avec Bonaparte, décide de nommer quatre commissaires, « artistes ou savants », chargés de recueillir en Italie « tous les renseignements possibles sur l’agriculture et les sciences et faire passer en France tous les monuments transportables des sciences et des arts qu’ils croiront dignes d’entrer dans nos musées et bibliothèques »122. En à peine quelques jours et après plusieurs refus, ce sont finalement six savants et artistes qui sont nommés pour prendre la route de l’Italie. Thouin dirige à nouveau les opérations sans disposer d’attributions particulières pour autant. Il est cette fois accompagné de Gaspard Monge, physicien et mathématicien tôt partisan de la Révolution, de Claude-Louis Berthollet, chimiste et membre de l’Institut, de Jacques-Julien Houston de Labillardière, botaniste auparavant attaché à l’expédition partie à la recherche de La Pérouse, de Jean Guillaume Moitte, sculpteur, et de Jean-Simon Berthélemy, peintre, ces deux derniers ayant déjà fait le voyage d’Italie dans les années 1770. Bonaparte, pressé de hâter les confiscations des œuvres d’art italiennes s’adjoint également les services de Pierre-Jacques Tinet, déjà attaché à la commission envoyée dans les pays du Nord comme subalterne123. D’autres artistes sont réunis à la commission au début de l’année 1797, mais ils n’y jouent qu’un rôle secondaire renforçant néanmoins le rôle des artistes au détriment des savants124. Cette fois encore, la commission est dotée de larges pouvoirs et d’une large autonomie dans le choix des objets à confisquer. La structure formelle de cette commission est donc presque identique à celle envoyée dans les pays du Nord deux années plus tôt.
13Partis de Paris à la fin mai 1796, ils œuvrent d’abord dans la Plaine du Pô avant d’arriver à Rome dès le mois de juillet pour retourner ensuite à Modène et revenir à Rome du mois de mars au mois de juillet 1797125. En août 1797, on les retrouve à Venise puis, leur mission achevée, ils retournent à Paris. Les commissaires parcourent ainsi en tous sens la moitié Nord de l’Italie, dans un vaste quadrilatère entre Turin à Venise au Nord, Rome et Lorette au Sud. Là encore, c’est l’espace conquis par les armées et, là encore, les commissaires interviennent peu après la troupe : Bonaparte entre à Milan le 15 mai et Tinet y saisit les premières œuvres dès le 19 ; le 23 juin Bonaparte signe l’armistice avec le pape et les commissaires entrent dans Rome le 29 juillet 1796 ; le 3 février 1797, Mantoue capitule et, le 24, Thouin entre dans la ville. Chose plus nouvelle, le général Bonaparte se montre personnellement soucieux du déroulement des opérations de saisie. À de nombreuses reprises, il mentionne dans sa correspondance l’importance des saisies d’œuvres d’art, écrivant par exemple dans une lettre au Directoire de juin 1796 : « Monge, Berthollet et Thouin (naturaliste) sont à Pavie, où ils s’occupent à enrichir notre Jardin des plantes et notre Cabinet d’histoire naturelle. J’imagine qu’ils n’oublieront pas une collection de serpents, qui m’a paru bien mériter la peine de faire le voyage. Je pense qu’ils seront après-demain à Bologne, où ils auront aussi une abondante récolte à faire »126. Le mode opératoire des confiscations est le même que celui employé quelques années auparavant en Europe septentrionale mais les commissaires dépendent désormais moins de l’administration parisienne que du général en campagne. Celui qui se présente comme un ami des arts et des sciences signe les traités qui portent mention du nombre des œuvres à saisir et surveille la prompte exécution des opérations de confiscation.
La mission de confiscation en Italie (1796-1797) Infographie Pierre-Yves Lacour.
14En Italie, les confiscations de spécimens naturels sont plus rares que les saisies d’œuvres d’art et de livres, ne concernant que les villes de Lorette, Pavie, Bologne, Modène et Vérone. En 1798, la Décade philosophique rapporte les propos de Thouin lors de la grande fête du 9 thermidor an VI au Champ de Mars : « Les commissaires des sciences et des arts […] n’ont porté leurs recherches, et n’ont prélevé les monumens utiles au complément des collections nationales, que dans les propriétés des Gouvernemens vaincus, et dans celles des communautés religieuses, qui n’en tiraient aucun usage utile aux progrès des connoissances humaines. Les collections consacrées à l’instruction publique et celles des particuliers ont été respectées »127. Pourtant, lors de la mission italienne, ce sont les lois les plus ordinaires de la guerre qui s’imposent. Les objets de sciences et des arts sont une forme de contribution de guerre dont la seule véritable particularité est de ne pas être versée en numéraire comme à l’ordinaire128. Dans les États pontificaux, les commissaires confisquent pour le Muséum d’Histoire naturelle des objets précieux à Notre-Dame de Lorette129. Par deux fois, les confiscations visent les villes insurgées contre l’occupant français. Pavie, entrée en révolte le 25 mai 1796, est soumise, réprimée, et le patrimoine urbain est confisqué. Les musées, cabinets et bibliothèques sont épargnés, de même que son Université que Bonaparte souhaite voir fonctionner à nouveau rapidement130. Pourtant, les commissaires arrivent dans la ville à la mi-juin pour confisquer quelques livres, l’herbier de Haller et les doubles de la collection de Spallanzani131. À Vérone, révoltée en avril 1797 lors des « Pâques véronaises », les commissaires confisquent les pétrifications de Giovanni Battista Gazola et de la maison Canossa en application de l’arrêté de Bonaparte stipulant que « tous les tableaux, collections de plantes, coquillages etc. qui appartiennent soit à la ville soit à des particuliers, seront confisqués au profit de la République »132. Les confiscations apparaissent alors comme une des modalités de la répression des insurrections urbaines. Par deux fois encore, les collections naturalistes des villes défaites sont saisies. Bonaparte entre dans Bologne le 8 juin et, rapidement, les commissaires dépouillent les collections de son Institut133 alors que seule une contribution en numéraire était prévue. Quelques mois plus tard, Bonaparte, rompant l’armistice avec le duc de Modène, envoie la Commission au château Bel’Aria le 25 octobre pour y choisir des œuvres d’art et des spécimens naturels134. Alors que les confiscations d’œuvres d’art sont habituellement opérées en application de clauses des armistices et des traités signés entre l’armée d’Italie et les armées défaites, les saisies naturalistes ne respectent pas ces formes légales, pas plus qu’elles ne visent les « ennemis idéologiques » de la Révolution mais bien les villes défaites ou matées par les armées de Bonaparte. Le moment ouvert par les saisies françaises, prolongé par les confiscations septentrionales, semble alors se refermer.
Pétrification de Gazola Spécimen de la collection de poissons fossiles du Monte Bolca Cliché Bernard Faye, MNHN.
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15Les missions françaises, septentrionales et italiennes s’inscrivent dans une forte continuité : continuité des structures, des hommes et des pratiques. Entre 1792 et 1797, les commissions chargées des opérations de saisie se rodent peu à peu, comme par expérience. Alors que les saisies françaises sont encore chaotiques du fait de la multiplicité des acteurs en jeu, des chevauchements de compétences et des rivalités entre les commissions et malgré la mise en place de la Commission temporaire des arts, les confiscations septentrionales — en dépit de quelques flottements initiaux — puis italiennes, ne dépendent plus que d’une structure unique décalquée sur la Commission temporaire. De 1792 à 1797, les hommes aussi sont souvent les mêmes. Plusieurs membres des commissions étrangères appartiennent également à la Commission temporaire des arts ou se retrouvent d’une mission à l’autre, Thouin jouant un rôle central, se chargeant de la saisie des jardins botaniques dans les environs de Paris, puis dirigeant de fait les opérations en Europe septentrionale, puis en Italie. Néanmoins, au-delà des évidentes similitudes entre ces différentes missions, des différences essentielles apparaissent rapidement qui tiennent au rôle nouveau du chef militaire. En 1796 et 1797, Bonaparte, à la tête de l’armée d’Italie, impose que les commissaires se réfèrent directement à lui et non plus aux organes gouvernementaux parisiens et, surtout, que les confiscations n’obéissent plus à des motifs d’ordre idéologique, mais aux lois les plus ordinaires de la guerre. Les cibles des saisies naturalistes ne sont plus les clercs, les souverains et les émigrés, mais les villes soumises. Ainsi, paradoxalement, la différence essentielle entre ces trois missions est moins à rechercher en 1794 dans l’extension hors des frontières des opérations de saisie qu’à l’irruption de la figure de Bonaparte au cours de la campagne italienne deux années plus tard.
Notes de bas de page
65 Bodinier (Bernard) & Teyssier (Éric), ‘L’Évènement le plus important de la Révolution’ : La vente des biens nationaux (1789-1867) en France et dans les territoires annexés, Paris : Société des études robespierristes ; Éditions du CTHS, 2000, 503 p. ; en particulier, pp. 405-422 (Mémoires et documents d’histoire de la Révolution française).
66 Riberette (Pierre), « De la Commission des monuments au Conseil de conservation », art. cit., p. 29.
67 Poirier (Germain), Rapport sur la remise à la commission temporaire des arts, des cartes du dépouillement des ouvrages imprimés ou manuscrits, Paris : Imprimerie nationale, An II [1794], p. 73. Il ne mentionne que le cabinet de Calmet, à l’abbaye de Senones et Saint-Guilhem-du-Désert dans l’Hérault.
68 Sur les confiscations précoces de plantes opérées par Thouin dans les jardins de la périphérie parisienne, voir : Hamy (Ernest-Théodore), « Les Derniers jours du jardin du roi… », art. cit., pp. 51-52.
69 Pour ce qui suit : Tuetey (Louis), Procès-verbaux de la Commission temporaire des arts, op. cit., vol. 1, pp. v-lxiv.
70 AN, F/17/3980 : Lettre des professeurs du Muséum à Guyton Morveau, président du Comité d’Instruction publique. Paris, le 16 brumaire an II ; AN, F/17/1222 : Rapport sur le « remboursement des animaux qui ont été transportés après leur saisie par ordre de la municipalité ». Paris, le 14 fructidor an II. Les montreurs d’animaux sont : Louzardi [ou Louzardy], Marquiny [ou Marchini], Guény [ou Henry], Daller, Cassat et Cochon.
71 Gillet-Laumont, François-Pierre-Nicolas (1747-1835) : ancien militaire, il se consacre à la minéralogie à partir de 1784 et devient inspecteur des Mines. Directeur de l’Agence puis du Conseil des mines, collaborateur au Journal des Mines, il est aussi rédacteur de mémoires pour la Société d’histoire naturelle de Paris. Il possède une belle collection minéralogique particulière.
72 Besson, Alexandre-Charles (1725-1809) : inspecteur des mines, il est l’auteur de plusieurs mémoires publiés dans le Journal des mines et d’un Manuel pour les savants et les curieux qui voyagent en Suisse en 1786. Il dispose d’un cabinet minéralogique dans la rue du Coq Saint-Honoré que Thiéry décrit dans son Voyageur à Paris en 1790.
73 Lelièvre, Claude-Hugues (1752-1794) : ingénieur des mines en 1784, il est employé sous la Révolution à la fabrication des poudres et du salpêtre. Directeur de l’Agence puis du Conseil des mines, il est élu membre de la classe des sciences physiques de l’Institut en décembre 1795. Il rédige des mémoires pour la Société d’histoire naturelle de Paris et pour le Journal des Mines.
74 Nitot, Marie-Étienne (1750-1809) : joaillier, place de Thionville. Il prend part à l’inventaire des « effets curieux déposés dans la maison des citoyens Daguerre et Ligneux marchands bijoutiers rue Saint Honoré, no 85 par les ordres de la ci-devant Reine le 10 octobre 1789 ». Il est le seul membre de la sous-section Minéralogie à ne pas faire partie du corps des Mines.
75 Lamarck, Jean-Baptiste de (1744-1829) : militaire puis médecin, il entre à l’Académie française en 1779 puis est nommé auprès de Daubenton comme garde du Cabinet du roi et du Jardin des plantes. En novembre 1795, il est nommé membre de la classe des sciences physiques de l’Institut. Il a réalisé durant sa vie plusieurs petites collections de coquilles.
76 Richard, Louis-Claude-Marie (1754-1821) : botaniste, professeur d’histoire naturelle médicale à la faculté de médecine de Paris en 1795, il est nommé membre de la classe des sciences physiques et mathématiques de l’Institut. Il est l’auteur d’un Dictionnaire de botanique en 1798 et rédige des mémoires pour la Société d’histoire naturelle de Paris.
77 Mailly, Charles-Jacques de : peintre en émail, il expose aussi des dessins au salon de 1793. Surtout, il constitue par ses voyages une riche collection de minéraux de Sibérie qu’il propose à plusieurs reprises de revendre au Muséum d’Histoire naturelle en l’an II et en l’an III.
78 Cuvier, Georges (1773-1838) : précepteur des fils du comte d’Héricy, passionné par l’histoire naturelle, il fait la rencontre de l’abbé Tessier qui l’introduit auprès de Geoffroy Saint-Hilaire. Dès ce moment, sa carrière est fulgurante. Il est nommé aide-naturaliste au Muséum en 1794 et gagne Paris au printemps 1795. Il obtient alors un poste de professeur d’histoire naturelle à l’École centrale du Panthéon puis devient suppléant de Mertrud à la chaire d’anatomie des animaux au Muséum. En 1796, Il est élu membre de l’Institut. Succédant à Daubenton au Collège de France en 1800, il succède à Mertrud en 1802. Sa carrière se partage alors entre travail scientifique et postes administratifs.
79 Sur la place des marchands de tableaux dans les saisies artistiques, voir : Poulot (Dominique), « Surveiller et s’instruire »…, op. cit., p. 334.
80 [Vicq d’Azyr (Félix)], Instruction sur la manière d’inventorier et de conserver dans toute l’étendue de la République, tous les objets qui peuvent servir aux arts, aux sciences et à l’enseignement. Proposé par la Commission temporaire des arts et adopté par le Comité d’Instruction publique de la Convention nationale, Paris : Imprimerie nationale, An II, 90 p.
81 AN, F/17/1229 : Instructions de la Commission exécutive pour l’Instruction publique pour Tisset fils. Paris, messidor [An II] ; Laissez-passer de la Commission exécutive pour l’Instruction publique pour Tisset fils. Paris, messidor [An II].
82 Tuetey (Louis), Procès-verbaux de la Commission temporaire des arts, op. cit., vol. 1, pp. 2-3 : « Séance du 8 septembre 1793 ».
83 AN, F/17/1270-A et F/17/1270-B : ces deux cartons contiennent les inventaires envoyés par les départements et les districts ainsi que le bordereau des inventaires. Certains départements mentionnent des collections d’histoire naturelle : Allier, Ardèche, Dordogne, Drôme, Eure, Île-et-Vilaine, Loiret, Mont-Terrible, Nord, Pas-de-Calais, Hautes-Pyrénées, Pyrénées orientales, Rhône et Loire, Haute-Saône, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise. Le recensement ministériel est lacunaire.
84 Par exemple, en AN, F/17/1225 : Lettre de Hermann à la Commission d’Instruction publique. Strasbourg, le 5 frimaire an III. À la demande du district de Strasbourg et afin de former le premier fonds du « cabinet public », Hermann réalise l’inventaire des spécimens confisqués dans les cabinets du cardinal de Rohan, dans celui de l’abbaye de Marmoutiers, dans ceux des émigrés Charpentier et Levrault et dans celui de l’héritière Roudouin. De même en AD 68, L 922 : Pétition de Frédéric-Louis Hammer aux administrateurs du district de Colmar. Colmar, le 12 nivôse an III. Hammer a acheté aux enchères des minéraux saisis au château de Ribeauvillé appartenant au cidevant prince des Deux-Ponts mais ces échantillons ont ensuite été réclamés et obtenus par le district. De même in Thomas (Bernard), « Discours et attitudes sur le patrimoine à Avignon : trois mémoires sur les monuments des sciences et des arts. 1794-1797 », in Actes des 115e et 116e congrès nationaux des sociétés savantes, Paris : Éditions du CTHS, 1992, p. 236. Le cabinet d’histoire naturelle d’Avignon reçoit les spécimens du médecin émigré Calvet.
85 Savoy (Bénédicte), Patrimoine annexé…, op. cit., vol. 1, p. 20.
86 Ibid., vol. 1, p. 24.
87 Ibid., vol. 1, p. 25.
88 AN, F/17/1223 et 1224 : Extrait du registre des délibérations de l’assemblée des professeurs du Muséum d’Histoire naturelle. Paris, le 4 thermidor an II.
89 D’après : AN, F/17/1276 et 1277 ; Trouvé (Claude-Joseph), Voyage dans la Belgique…, op. cit., vol. 1.
90 Trouvé (Claude-Joseph), Voyage dans la Belgique…, op. cit., vol. 1, passim. D’après son récit, on obtient le parcours suivant : Paris, Senlis, Cambrai, Valenciennes, Mons, Bruxelles, Laeken, Malînes, Bruxelles, Louvain, Tirlemont, Liège, Maison de Céré, Tongres, Liège, Verviers, Theu, Franchimont, Spa, Verviers, Aix-la-Chapelle, Juliers, Bergheim, Cologne, Brülh, Bonn, Coblence, Andernach, Maastricht, Bois-le-Duc, Utrecht, Amsterdam, Harlem, La Haye, Delft, Rotterdam, La Haye, Leyde, Harlem, Amsterdam, Meuden, Naerden, Sousdeck, Amesfort, Loo, Zutphen, Duren, Velp, Arnheim, Wageningen, Vicq, Utrecht, La Haye, Vorden, Alphen, Leyde, La Haye, Amsterdam, Buyskloot, Purmrende, Mornichendam, Bruck, Amsterdam, Gorum, Ostrede, Breda, Anvers, Bruxelles, Asse, Alost, Gand, Saint-Éloi, Courtrai, Lille, Arras, Péronne, Paris.
91 AN, F/17/1276 : Extrait du registre des délibérations de la Commission temporaire des arts. [Paris], le 10 pluviôse an III.
92 AN, F/17/1276 : Extrait du registre des arrêtés du Comité de Salut public. [Paris], le 2 ventôse an III.
93 AN, F/17/1093 : Lettre du préfet du département Rhin-et-Moselle au ministre de l’intérieur. Coblence, le 23 messidor an IX ; Dorsch (Anton-Joseph), Statistique du département de la Roër, Cologne : Imprimerie Oedenkoven & Thiriart, An XII (1804), p. 51 et p. 512.
94 AN, F/17/1276 : Rapport de Leblond, Faujas et Thouin au Comité de Salut public. Sans lieu ni date.
95 AN, F/17/1245 : Lettre des commissaires au Comité de Salut public. Bonn, le 10 nivôse an III.
96 AN, F/17/1277 : Lettre de Thouin. La Haye, le 20 floréal an III. En trois exemplaires : l’un à la Commission temporaire des arts ; l’autre au Comité de Salut public ; le dernier au Comité d’Instruction publique.
97 AN, F/17/1276 : Lettre de Leblond. Coblence, le 12 nivôse an III.
98 AN, AJ/15/836 : Lettre de [Thouin] à un « collègue et ami ». La Haye, le 24 ventôse an III.
99 AN, F/17/1276 : Rapport de Faujas, Dewailly, Thouin, Leblond. Bruxelles, le 4e complémentaire an II.
100 AN, F/17/1276 : Ibid. ; Lettre des commissaires. Bruxelles, le 6 vendémiaire an III. En deux exemplaires : un au Comité de Salut public, l’autre au Comité d’Instruction publique. François-Xavier Burtin (1743-1818) : Médecin réputé à Bruxelles, il entre rapidement dans l’entourage du gouverneur des Pays-Bas avant de réaliser des recherches sur les mines sur l’ordre de l’Empereur Joseph II qui le nomme membre du conseil du gouvernement des Pays-Bas. Fidèle à la maison d’Autriche lors de la révolution belge, il suit l’Empereur en exil avant de revenir à Bruxelles, consacrant désormais sa vie aux sciences et à la peinture. Membre de plusieurs académies dont l’Académie impériale de Bruxelles, il écrit plusieurs ouvrages notamment sur les fossiles.
101 AN, F/17/1277 : Lettre de Thouin. La Haye, le 26 pluviôse an III. En deux exemplaires : l’un au Comité de Salut public ; l’autre à la Commission temporaire des arts.
102 AN, F/17/1276 : « Liste des végétaux étrangers qui sont partis de l’envoi de Bruxelles le 3 vendémiaire et qui ne se trouvent pas indiqués sur l’État adressé au Comité le 4e complémentaire an II ». Bruxelles, le 6 vendémiaire an III. Issu d’une famille noble allemande, Louis-Angilbert d’Aremberg est dépouillé de ses propriétés par le traité de Lunéville qui réunit à la France ses possessions de la rive gauche du Rhin et reçoit, comme dédommagement, des terres en Westphalie.
103 Sur Walckiers de Tronchiennes, D’Afembourg et Reft [ou Neft] : AN, F/17/1276 : « Liste des arbres, arbustes et plantes composant l’envoi expédié de Liège le 24 vendémiaire l’an 3e de la République française ». Liège, le 23 vendémiaire an III.
104 AN, F/17/1276 : Lettre des commissaires. Bruxelles, le 6 vendémiaire an III. En deux exemplaires : l’un au Comité de Salut public, l’autre au Comité d’Instruction publique.
105 AN, F/17/1245 : Lettre des commissaires au Comité de Salut public. Bonn, le 10 nivôse an III.
106 AN, F/17/1277 : dossier Stathouder.
107 AN, F/17/1276 : Rapport de Faujas, Dewailly, Thouin, Leblond. Bruxelles, le 4e complémentaire an II.
108 AN, F/17/1276 : « Liste des arbres, arbustes et plantes composant l’envoi expédié de Liège le 24 vendémiaire l’an 3e de la République française ». Liège, le 23 vendémiaire an III.
109 AN, F/17/1277 : « Liste des végétaux mis en réquisition par les commissaires des sciences et des arts pour être envoyés à Paris au printemps prochain ». Bonn, le 24 frimaire an III.
110 AN, F/17/1276 : Rapport des commissaires. Sans lieu ni date.
111 AN, F/17/1276 : Rapport de l’administration de Cologne. Cologne, le 17 brumaire an V.
112 AN, F/17/1276 : Lettre de Leblond. Coblence, le 12 nivôse an III.
113 Voir Savoy (Bénédicte), Patrimoine annexé…, op. cit., vol. 1, pp. 40-41. Bénédicte Savoy voit dans cette confiscation une contradiction entre le discours de légitimation des saisies et les réalités de la pratique des confiscations, le cabinet n’appartenant ni à un émigré ni à un souverain étranger ni à des clercs. Pour autant, les enseignants demeurant des clercs, la municipalisation du collège a pu être perçue comme essentiellement administrative.
114 Ibid., vol. 1, pp. 49-54.
115 D’après : AN, F/17/1276.
116 Savoy (Bénédicte), Patrimoine annexé…, op. cit., vol. 1, p. 50.
117 AN, F/17/1276 : « Rapport fait au ministre de l’Intérieur par le citoyen Keil sur les opérations relatives à sa mission ». Sans lieu, le 9 brumaire [an V].
118 AN, F/17/1276 : Lettre de Keil au Bureau consultatif. Cologne, le 14 brumaire an V.
119 AN, F/17/1276 : Lettre de Keil au ministre de l’Intérieur. Griessen, le 14 floréal an V.
120 AN, F/17/1276 : Lettre de Keil au chef du Bureau consultatif pour l’encouragement des Lettres. Trêves, le 27 vendémiaire an V.
121 AN, F/17/1276 : « Rapport fait au ministre de l’Intérieur par la citoyen Keil sur les opérations relatives à sa mission ». Sans lieu, le 9 brumaire [an V].
122 Arrêté du Directoire exécutif, le 22 floréal an IV présenté dans Blumer (Marie-Louise), « La Commission pour la recherche des objets de sciences et arts en Italie (1796-1797) », art. cit., p. 70.
123 Tinet, Pierre-Jacques (1753-1803) : peintre, il est chargé en 1794 de l’enlèvement des œuvres d’art en Belgique puis en Italie entre 1796 et 1797.
124 Blumer (Marie-Louise), « La Commission pour la recherche des objets de sciences et arts en Italie (1796-1797) », art. cit., pp. 124-127. Il s’agit des peintres Jean-Baptiste Wicar, Charles-Joseph Gerli et Antoine-Jean Gros, du musicien Rodolphe Kreutzer et du sculpteur Joseph Charles Marin.
125 D’après : AN, F/17/1275-A et 12775-B ; Trouvé (Claude-Joseph), Voyage dans la Belgique…, op. cit., vol. 2.
126 Bonaparte (Napoléon), Correspondance de Napoléon Ier publiée par ordre de l’Empereur Napoléon III, Paris : Imprimerie impériale, 1858, vol. 1, no 663 : Lettre au Directoire exécutif. Bologne, le 3 messidor an IV.
127 Décade philosophique, vol. 18 (juin à août 1798), pp. 301-305 : « Description de l’entrée triomphale des dépouilles de l’Italie » ; ici, p. 303. Il continue : « Cependant ces dernières ont fourni tout ce qui pouvait intéresser la République, soit que les dépositaires lui en firent l’hommage sincère et libre, ou soit que les propriétaires consentissent à les lui céder à prix d’argent ».
128 Blumer (Marie-Louise), « La Commission pour la recherche des objets de sciences et arts en Italie (1796-1797) », art. cit., p. 66.
129 AN, AJ/15/836 : Liste des objets enlevés à Lorette. Lorette, le 24 frimaire an V ; Lettre du ministre des Relations extérieures au Muséum d’Histoire naturelle. Paris, le 11 ventôse an V.
130 Berzolari (Alberto Gigli), Alessandro Volta e la cultura scientifica e tecnologica tra ‘700 e ‘800, Milan : Cisalpino ; Istituto Editoriale Universitario, 1993, p. 154 (Fonti e studi per la storia dell’Università di Pavia).
131 AN, F/17/1279 : Rapport de Monge, Thouin, Berthollet, Tinet et Berthélemy. Pavie, le 3 messidor an IV.
132 AN, F/17/1275-A : Procès-verbal de Blesimare, Berthollet et Lombard. Vérone, le 28 floréal an V ; Procès-verbal de Blesimare, Berthollet et Lombard. Vérone, le 16 prairial an V ; Correspondance de Napoléon Ier, op. cit., vol. 3, no 1768 : Arrêté. Milan, le 17 floréal an V. Voir Gaudant (Jean), « Brève histoire de la collection Gazola de poissons fossiles éocènes du Monte Bolca (Italie) conservée au Muséum national d’Histoire naturelle, Paris », Geodiversitas, vol. 33, no 4, 2011, pp. 638-644.
133 AN, F/17/1279 : « État des objets d’histoire naturelle tirés des collections de l’Institut de Bologne ». Sans lieu ni date.
134 AN, F/17/1275-A : « État des objets saisis au Cabinet d’Histoire naturelle et le Cabinet d’antiquités du ci-devant duc de Modène pour être envoyés au Muséum des plantes ». Modène, le 28 vendémiaire an V.
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