Un dernier dessin. Planche 258
p. 175-176
Texte intégral
Addition du 18 Août 1786
1En rédigeant les Mémoires que M. le Chevalier de la Marck m’avoit demandés sur les Courges, je n’ai pas fait mention d’une variété très extraordinaire qui n’a été envoyée d’Allemagne à Paris que depuis peu d’années. L’état de la plante que j’ai en ce moment sous les yeux, & la nature du fruit que j’ai peint à l’aquarelle l’hiver dernier, pour le joindre à la collection citée ci-dessus page 7, me font croire que cette variété appartient à la race des Barbarines page 25 : elle tient cependant beaucoup aussi de celle des Pastissons barbarins page 39. En effet, la plante a les branches courantes & le feuillage des Barbarines ; & un Amateur m’a assuré en avoir vu naître des individus produisant des fruits de forme assez simple, très-peu bosselés, & assez semblables à une partie des productions du no 47. Tous ces fruits, au reste, sont regardés comme dégénérés. Pour mériter l’attention, il faut qu’ils soient contractés comme des Pastissons, & certainement ils le sont d’une manière encore plus surprenante. La partie inférieure fort large est légèrement sillonnée ; mais ces côtes s’arrêtent vers le milieu ; &, au-dessus de la contraction formée en cet endroit, on ne voit plus que quatre cornes correspondantes aux quatre loges du fruit ; les mouchetures sont également interrompues, de manière que ne se répondant point, il semble que la moitié supérieure soit un fruit différent & beaucoup moins gros, qu’on auroit pris plaisir à faire entrer dans le gros : enfin, comme si tout concouroit à cette illusion, les deux moitiés sont séparées par un cordon de petites verrues grises qui se touchent sans intervalles, & qui, audedans de la coque, répondent à une augmentation d’épaisseur fort remarquable. Cette coque est d’ailleurs solide comme celles de toutes les Barbarines, & la pulpe du fruit est également assez sèche & fort colorée : la peau de ceux que j’ai vus étoit d’un vert foncé avec des mouchetures d’un vert pâle, & d’un jaune rougissant au temps de la maturité extrême.
2Après avoir présenté cette description faite sur le fruit mûr, je me hâte de joindre ici ce que l’observation du fruit naissant vient de m’apprendre sur la cause d’une si étrange conformation.
3Dans toutes les Cucurbitacées, même ayant l’épanouissement de la fleur, la partie du calice adhérente aux ovaires a [qui ont] déjà la forme qu’elle doit [ils doivent] conserver en grossissant ; & dans celle-ci, cette forme est turbinée, mais le calice ne se resserre pas autant que dans les autres races.
4Or, c’est précisément à l’endroit où le calice se détache du fruit pour prendre la forme de cloche commune à toutes ces fleurs, que se trouve l’étranglement qui dans la suite termine ce qu’on pourroit appeler le fruit inférieur. Et véritablement dans la partie supérieure, ou plutôt interne, l’écorce n’est plus celle du calice, mais d’une sorte de disque qui entoure immédiatement le pistil. Aussi est-il essentiellement en rapport de structure avec les quatre ovaires [carpelles de l’ovaire] & leurs stigmates, d’où résultent les quatre proéminences du fruit, & le systême particulier des bandes & mouchetures de cette partie.
5Ce singulier fruit pourroit bien être l’Arbouste d’Astracan cité p. 32.
6[NdE : Arbouste est un emprunt au russe arbuz, qui désigne la pastèque et dérive du farsi kharbuza, qui désigne le melon]
PLANCHE 258
7Ni numérotée ni désignée par une lettre. Non datée. Sans libellé. Noir et blanc. Une très grande fleur femelle avant l’anthèse (parthénocarpique ?) montrant un long et verruqueux ovaire avec une attache large et ouverte du calice et de la corolle, bien différente de l’attache habituelle étroite et serrée. Montre aussi des parties coupées dans la zone stylaire, révélant que celle-ci est particulièrement large et grande. Ce dessin me semble lié à la dernière partie de l’Essai intitulée « Addition du 18 août 1786 », reproduite plus haut, et être une ultime tentative (« … je me hâte de joindre ici ce que l’observation du fruit naissant… ») de présenter la courge-turban. Toutefois, la courge-turban est une forme de C. maxima. Dans cette section, Duchesne atteste qu’on lui a donné des fruits mûrs de cette courge-turban environ dix ans après avoir achevé son travail sur Cucurbita et juste avant de rédiger l’Essai. Ce dessin particulier représente cependant une fleur pistillée de C. pepo. Du texte cidessus on peut déduire que Duchesne reçut une plante ou une portion de plante d’un jardinier amateur qui avait cultivé ce qu’il croyait être une courge-turban ou du moins qu’il déclara comme telle à Duchesne. Étant donné que Duchesne était nettement capable de reconnaître ses trois espèces de Cucurbita sur la base des trichomes foliaires, il semble raisonnable d’admettre qu’il aurait immédiatement et correctement identifié l’espèce de la plante qu’on lui apportait. Ayant seulement vu les fruits mûrs de la courge-turban et n’ayant pas cultivé de forme de C. maxima ayant une peau lignifiée et verruqueuse, et apparemment ayant reçu le feuillage d’une courge verruqueuse, Duchesne a cru que la courge-turban était encore une autre forme de C. pepo. La fleur illustrée, bien qu’étant de C. pepo, a le calice placé comme il le décrit dans cette section pour la courgeturban.
8Duchesne perpétua cette identification erronée de courge-turban dans sa contribution à l’Encyclopédie Méthodique, Agriculture (Duchesne 1793). Dans cet article il élève même la courge-turban au rang de race ; Le Turbane fut désigné comme une race distincte de C. pepo en plus des cinq autres qu’il avait listées et décrites dans son Essai.
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