Dessins séries 94-96. Planches 229-232
p. 160-161
Texte intégral
3. La MELONNÉE, Cucurbita Pepo moschata
La Citrouille melonnée, la Citrouille musquée
1La forme ovoïde des graines de la Melonnée, la grandeur de ses fleurs, leur évasement en entonnoir, leur couleur jaune, la disposition des branches, la figure anguleuse des feuilles, les rapprochent des Pépons, tandis que la mollesse de ces même feuilles, leur duvet doux & serré, la pâleur des fleurs en dehors, leur étranglement dans le bas du calice, l’alongement des pointes vertes extérieures du calice, & le goût musqué de la pulpe du fruit, lui donnent assez d’analogie avec l’espèce des Calebasses. Cette pulpe est aussi plus sèche que celle des Giraumons, & à fibres plus fines ; mais elle est en même temps plus ferme que celle des Trompettes, & tient en cela de celle des Pastissons. Cette espèce, ambiguë par sa nature, paroît encore très peu déterminée dans les Ouvrages des Botanistes. applati, sphérique, ovoïde, cylindrique, en massue & en pilon, plus ou moins gros, & à côtes plus ou moins ressenties, soit par rapport à la couleur, d’un vert plus ou moins foncé à l’extérieur, & en dedans depuis le jaune soufre le plus pâle jusqu’au rouge orangé. Le nom de Citrouille melonée que lui donnent nos Créoles dans les Antilles, annonce assez le cas qu’ils en font.
2Au reste, on observe dans la Melonée diverses races, qui se subdivisent ainsi que celles des Pépons, en un assez bon nombre de variétés, soit par rapport à la forme du fruit, Provinces froides, les Melonnées ne réussissent qu’avec le secours des couches chaudes, & demandent autant de soins que les Pastèques. On en cultive en Italie & en Provence, sous le nom de Citrouille musquée.
Cucurbita moschata Duchesne (1786b, Tableau p. 7)
3Le binôme Cucurbita moschata fut publié pour la première fois dans l’Essai sur l’Histoire Naturelle des Courges, dans le tableau de la page 7. Il ne figure pas dans le texte de l’Encyclopédie Méthodique, Botanique à partir duquel fut composé l’Essai car l’éditeur, Lamarck, refusa de le reconnaître comme espèce distincte de C. pepo. Le nom Cucurbita moschata fut de nouveau publié plusieurs années plus tard dans la contribution de Duchesne à l’Encyclopédie Méthodique, Agriculture éditée par Tessier & Thouin (Duchesne 1793). Les caractéristiques qui séparent C. moschata de C. pepo sont données dans l’Essai et, de manière plus étendue et détaillée, dans le projet de manuscrit (Duchesne 1786a, p. 26) préparé pour l’Encyclopédie de Lamarck : « Ces mêmes poils doux, courts et serrés se retrouvent sur toute la plante et en forment le caractère le plus reconnoissable. La forme des feuilles est celle des feuilles de Pépons non découpées mais simplement anguleuses : elles ne sons pas des plus grandes. Les fleurs jaunes et à peu près de même structure et de même grandeur que celles de plusieurs Pépons se distinguent seulement par les pointes du calice beaucoup plus allongées… ».
4La désignation latine choisie par Duchesne, moschata, venait du nom commun français de la Citrouille musquée cultivée dans les campagnes et dont la chair était tenue pour très aromatique au goût. Duchesne ne connaissait aucune mention de cette espèce dans la littérature botanique. Une illustration de 1562 trouvée dans le fonds Gesner (Zoller et al. 1979) pourrait être une C. moschata du type Cheese des États-Unis et le no 94 de Duchesne paraît très similaire. Ray (1686) a décrit un Pepo lagenarius folio molli comme étant une courge à cou ayant des feuilles molles et de très grandes fleurs jaunes, ce qui semblerait être une forme de C. moschata mais la première illustration de ce qui est clairement C. moschata paraît être une courge du type Cheese représentée dans le travail de Rheede tot Draakenstein (1688). Bien que des graines ou des fruits de C. moschata puissent avoir été importés en Europe pratiquement en même temps que ceux de C. pepo et C. maxima, C. moschata est une espèce adaptée à des climats chauds ; comme l’a souligné Duchesne, dans les régions plus froides elle ne pouvait être cultivée avec succès que dans des installations protégées ou semi-protégées. En voici d’ailleurs plus sur ce que disait Duchesne (1786a, p. 26) sur C. moschata : « Quant aux Melonées plus difficiles à élever aux environs de Paris je n’en connois que trois Races distinctes par leurs fruits qui dans l’une sous orbiculaires platies et à côtes et à chair, jaune, dans l’autre presque spheriques à chair très rouge musquée même en ce pays, dans la troisième allongés renflés par les deux bouts et fort souvent courbes et à chair beaucoup plus pâle. Le peau des unes et des autres assez fine et tendre comme celle des Potirons, est d’un vert plus ou moins foncé quelquefois mouchetée de taches blanchâtres mais toujours couvertes dans la jeunesse d’un duves qui ne tombe que fort tard ». Les trois formes décrites sont respectivement les nos 94, 96 et 95. A propos des deux premiers, Duchesne (1786a, p. 26) écrit : « C’est de provence que j’ai reçu les graines des deux races à fruits ronds », et à propos du dernier : « et M. Monti professeur de Bologne m’a fait retrouver l’autre qui j’avois déjà vu ici il y a quatorze à 15 ans élevées de graines tirées de Naples ».
5Beaucoup de C. moschata sont aussi sensibles à la longueur du jour et de ce fait ne fleurissent pas dans les conditions de jours longs et nuits courtes aux latitudes élevées. Elles auraient donc été beaucoup plus difficiles à produire en Europe que les C. moschata insensibles à la photopériode, et que les deux autres espèces importantes de citrouilles et de courges. La sensibilité à la photopériode fut également notée par Duchesne : « J’ai reçu de Londres des graines Melonées sous le nom de Punkin mais les plantes que j’en ici élevé en 1773 aussi bien tractées que les autres et poussant vigoureusement n’ont pas même produit de fleurs ».
6Comme on le voit dans le texte ci-dessus de l’Essai, Duchesne réalisa que C. moschata était une espèce hautement variable mais qu’il ne pouvait en faire pousser avec succès dans sa région qu’un nombre limité de cultivars ; il écrit aussi dans son projet de manuscrit (Duchesne 1786a, p. 35) : « Il en existe plusieurs autres variétés qu’il faudroit observer dans Iles d’Amerique, en Espagne, en Italie ou dans nos provinces méridionales ». De fait, de récentes découvertes ont amené les experts contemporains de cucurbitacées à la conclusion que C. moschata est presque aussi fortement variable que C. pepo, la plus grande variation s’observant près de son centre d’origine présumé en zone tropicale, dans le nord de l’Amérique du Sud (Wessel-Beaver 2000, Andres 2004).
PLANCHE 229
7No 94. Datée 14 décembre 1770. 16,8 x 23,1 cm. Il s’agit d’une citrouille globuleuse-aplatie, avec des lobes longitudinaux séparés par des sillons peu profonds. À part sa couleur vert-orange clair, ce fruit est identique à ceux d’une ‘Cheese’, un cultivar de Cucurbita moschata du sud-est des États-Unis à peau orange pâle (d’une couleur fauve). Des graines de ce cultivar ont été obtenues dans une campagne française. Dans le Document 6, le no 94 est donné : 1012 de 139, indiquant que ce cultivar, cultivé pour la première fois en 1769, avait produit correctement, étant apparemment le seul C. moschata cultivé dans le voisinage.
PLANCHE 230
8No 95. Datée 26 novembre. 33,4 x 14,2 et 27,0 x 13,2 cm. Deux fruits entiers de C. moschata, allongés, très légèrement sillonnés, et une petite tranche d’un troisième. La peau est vert-noir et la chair brun-jaune clair. Le fruit est similaire en taille, forme, extérieur et intérieur à celui de certaines plantes cultivées aux Caraïbes et en Amérique centrale. Obtenu de M. Monti, professeur à Bologne (Duchesne 1786a) et, d’après le Document 5, venait de Martinique.
PLANCHE 231
9No 96*. Non datée. 27,4 x 28,3 cm. Il s’agit d’une citrouille presque sphérique, peu profondément sillonnée, vert moyen-foncé, découpée pour montrer la chair lisse, épaisse, orange intense et probablement de haute qualité, et de nombreuses graines, plutôt grosses et de couleur claire. Le dessin de la peau est typique de C. moschata. Sous le fruit il est écrit Cucurbita moschata. L’inscription Prévost pinxit dans le coin en bas à gauche indique que cette planche n’a pas été faite par Duchesne lui-même mais plutôt par l’artiste Prévost. Les Documents 5 et 6 qui accompagnent les planches donnent un no 96 et un no 96*. Le Document 6 indique le no 96 comme ayant été dessiné le 9 février 1773 par Duchesne lui-même, avec le commentaire « trois loges, gelés et moisis, graines vides ». Manifestement Duchesne a considéré que le dessin exécuté par l’artiste professionnel était bien supérieur au sien qui concernait un fruit gelé, moisi, déformé ou immature et qu’il a donc mis au rebut. Les graines de ce cultivar furent obtenues dans une campagne française.
PLANCHE 232
10Sans no Non datée. Deux fruits en noir et blanc, légèrement ellipsoïdes avec des sillons peu profondes. Dans le coin inférieur gauche figure en couleurs une petite tranche de chair jaune-orange moyen-intense et un petit morceau de peau vert foncé, tacheté et marbré de jaune moyen, provenant indubitablement de C. moschata, peut-être du no 96 ou d’un de ses descendants.
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