Dessins de Claude Aubriet
Drawings by Claude Aubriet with comments
p. 88-309
Texte intégral
Toutes les planches de Claude Aubriet ne sont pas légendées par l’auteur anonyme et le botaniste Antoine-Laurent de Jussieu. Ces deux auteurs ne déterminent que 44 planches. Xavier Carteret et Pierre-Arthur Moreau ont effectué un travail important pour réexaminer ces espèces selon la classification actuelle. Pour les 43 planches non déterminées à la fin du xviiie siècle et au xixe siècle, ils ont entrepris un travail de détermination pure qui sera donné dans ce catalogue.
Not all of Claude Aubriet’s plates were captioned by the anonymous author or by the botanist Antoine-Laurent de Jussieu. These two authors only named 44 plates. Xavier Carteret and Pierre-Arthur Moreau undertook the impressive task of reexamining these species according to the current existing classification. They also undertook the task of recognizing and captioning the 43 plates that were not defined at the end of the 18th and during the 19th centuries, information which we present in this catalogue.
Planche / plate 1
Trois espèces de haut en bas : Entoloma hebes (Romagn.) Trimbach ? ? ; Laccaria laccata (Scop. : Fr.) Cooke ; Russula du « groupe amoenolens ». | Three species from top to bottom : Entoloma hebes (Romagn.) Trimbach ?? ; Laccaria laccata (Scop. : Fr.) Cooke ; Russula from the “ amoenolens group” |
Dans une mise en page qu’il utilise dans la réalisation des vélins pour le roi, Aubriet entoure par un double cadre à la plume et à l’encre noire les trois espèces de champignons. | In a layout he used to execute vellums for the king, Aubriet bordered the three species of mushroom with a double line executed with pen and black ink. |
Planche / plate 2
Tricholomes du « groupe argyraceum » | Tricholomas from the “argyraceum” group |
Claude Aubriet représente la même espèce sous différents angles et selon différentes coupes. Malgré ce jeu qui lui permet de donner à voir les différentes caractéristiques du chapeau par exemple, il rajoute la petite motte de terre au pied des spécimens, mais sans figurer les pseudo-racines, omission que l’on ne saurait expliquer. La détermination « Agaricus leucocephalus Bull. » (Bulliard 1780-1795, pl. 428 et pl. 536) est erronée, puisque le champignon de Bulliard, que l’on appelle aujourd’hui Calocybe leucocephala, possède un pied long et atténué-radicant (voir en particulier la planche no 536), caractère qui n’apparaît pas sur le dessin d’Aubriet. | Claude Aubriet represents the same species with different angles and different cross-sections. In spite of this technique which, for example, enables him to show the different characteristics of the cap, he adds the small clod of earth at the foot of the specimens but without adding the pseudo-roots ; it is an omission that we can’t explain. The determination “Agaricus leucocephalus Bull.” (Bulliard 1780-1795, pl. 428 and pl. 536) is wrong since the mushroom by Bulliard, which we call today Calocybe leucocephala, features a long, radicant-attenuate to the base stipe (see in particular plate 536), and this character does not appear on Aubriet’s drawing. |
Planche / plate 3
Melanoleuca ( ?) | Melanoleuca ( ?) |
Les mélanoleucas sont des espèces proches des tricholomes. Ils sont charnus, et d’une détermination particulièrement ardue, d’autant qu’il en existe (du moins en Europe), près de quatre-vingts espèces et variétés. Ces champignons peu connus possèdent typiquement un chapeau bosselé au centre, ce qui leur confère une physionomie particulière que l’on reconnaît au premier coup d’œil. Les spécimens figurés par Aubriet ont vraiment l’habitus des mélanoleucas. Comme le nom scientifique ne l’indique pas (car il ne peut pas tout indiquer), il existe un certain nombre de Melanoleuca entièrement blanchâtres, ou d’un gris pâle. Les carpophores de cette planche ont un pied très court, ce qui est déroutant, car nous ne voyons pas de quelle espèce il peut bien s’agir. Remarquons plutôt un détail intéressant. En coupe, le pied apparaît bulbeux. Par ailleurs, sa base est prise dans un bourrelet, émettant incidemment deux petites racines (exemplaire en haut à gauche). Or, s’il s’agissait de terre, on apercevrait celle-ci dans la coupe, sur les deux côtés du bulbe. Cependant il n’en va pas ainsi, et plutôt qu’à une motte de terre, on peut penser que l’artiste a recomposé une sorte de bulbe végétal comme en portent les liliacées. | Melanoleucas are species close to the knights. They are fleshy and difficult to determine, since almost eighty species and varieties of them exist (at least in Europe). These mushrooms, which are not well known, typically feature a knobbed cap, which gives them a unique appearance that is recognized immediately. The specimens represented by Aubriet definitely show the characteristics of the melanoleucas. As the scientific name does not indicate (because it cannot indicate everything), a certain amount of Melanoleuca can be either completely whitish or a pale grey. The carpophores on this plate have a very short stipe, which is confusing, because we cannot identify what species it is meant to represent. Let us rather notice an interesting detail. In section, the base appears to be bulbous. Furthermore, its base is wrapped in a bulge from which two small roots emerge (upper left specimen). Yet, if it were soil, it would show in the section on both sides of the bulb ; it does not. Rather than a clod of earth, we can assume that the artist reconstituted some kind of a bulb as liliaceaes have. |
Planche / plate 4
Tricholome à stipe pointu subradicant | Tricholoma with tapering subradicant stipe |
Cette planche de petit format semble être, paradoxalement, la version correcte du champignon peint sur la planche 7. Paradoxalement, car cette réalisation est en noir et blanc, et pourtant elle est bien meilleure, d’un point de vue scientifique, que son pendant coloré. Observons ici quelques détails concernant la forme (la question des couleurs est abordée dans nos commentaires de la planche 7, en liaison avec les problèmes de détermination). Sur la planche 7, pour montrer le caractère échancré des lames, Aubriet a peint une sorte d’anneau sombre vers la zone d’insertion des lames sur le pied. Le résultat est peu probant : difficile de discerner, dans cet « effet », le fait que les lames forment une brève échancrure avant de joindre le pied. Même si la réalisation n’est pas parfaite, l’aspect échancré (ou « émarginé ») des lames est infiniment mieux rendu sur cette planche 4, avec d’ailleurs une certaine économie de moyens. Sur les lames toujours, mais sur leurs faces, Aubriet a marqué des stries, censées peut-être exprimer des ridules ou des veinules. Or, ces stries — qu’il s’agisse de ridules, de veinules ou de traits de déshydratation — sont toujours et nécessairement verticales, et non horizontales, comme sur la planche 7 ! Il y a en outre une erreur manifeste, corrigée sur cette planche 4. Sont figurés à droite deux exemplaires, qui ne sont qu’un spécimen appréhendé sous deux points de vue différents. Or, sur la planche colorée, Aubriet a peint la terre qui adhère au bas du pied, une fois sur la gauche de celui-ci, l’autre fois sur sa droite… | This small-size plate seems to be, paradoxically, the correct version of the mushroom painted on plate 7. Paradoxically because this version is in black and white, yet, it is of a much higher quality, scientifically speaking, than its colored version. Let us observe a few details about the shape (the question of colors is discussed in our comments on plate 7, with regards to the problems of determination). On plate 7, in order to show the notched character of the gills, Aubriet painted some kind of a dark ring near the attachment zone of the gills on the stipe. The result is not very convincing : it is difficult to notice in this “special effect” the fact that the gills form a short notch before joining the stem. Even though the execution is not perfect, the notched (or “edged”) aspect of the gills is much better illustrated on plate 4. Still on the gills, but this time on their surface, Aubriet delineated some grooves, maybe to represent fine wrinkles or small veins. Yet, these grooves – whether they represent fine wrinkles, small veins, or signs of dehydration– are always and necessarily vertical, not horizontal, as represented on plate 7 ! Furthermore, there is an obvious mistake, corrected on plate 4. Two specimens are represented on the right, but, in fact, both are the same specimen presented under two different angles. Yet, on the colored plate, Aubriet painted the soil that is attached to the base of the stipe, once on its left, once on its right… |
Planche / plate 5
Deux espèces : en haut Hypholoma fasciculare (Huds. : Fr.) Kummer ; en bas Calocybe gambosa (Fr. : Fr.) Singer | Two species : at the top Hypholoma fasciculare (Huds. : Fr.) Kummer ; at the bottom Calocybe gambosa (Fr. : Fr.)Singer |
Ici, deux espèces bien distinctes. Le champignon en touffe est peut-être le plus commun qui soit. Il est jaunâtre, à lames verdâtres. Sa toxicité est aujourd’hui admise, au point d’être mis au rang des espèces mortelles. Heureusement, son effrayante amertume le rend absolument immangeable. Il s’agit de l’« hypholome en touffes », qui persiste souvent jusqu’en hiver, sur les vieilles souches. La planche d’Aubriet est de bonne facture. Mais les exemplaires paraissent un peu desséchés (voir en particulier la marge des chapeaux, très contournée ou révolutée). Par ailleurs, les lames, qui devraient être franchement vertes, sont ici presque bistrées : le vert se devine plus qu’il ne se voit. Ce sont donc des spécimens âgés et usés qui ont été peints. Notons enfin le caractère fistuleux du pied, fort bien rendu par Aubriet. | Here, Aubriet presents two very different species. The tuft mushroom is probably the most common mushroom there is. It is yellowish with greenish gills. Its toxicity is recognized today, to such an extent that it is categorized among the lethal species. Fortunately, its awful bitterness makes it absolutely inedible. This is the sulphur tuft, or clustered woodlover, which often lasts until the winter on old stumps. Aubriet’s plate is well done. But the specimens seem to be slightly dried (see in particular the edge of the caps, very contorted or revolute). Furthermore, the gills, which should be of a sharp green, are here almost yellowish brown : we guess rather than see the color green. Thus we can assume that the specimens that were painted were old and used. Also of note is the hollow and tubular character of the stipe, very well illustrated byAubriet. |
Planche / plate 6
Tricholomes du « groupe argyraceum » | Tricholomas of the “argyraceum” group |
Très bonne planche, à comparer avec la médiocre planche 2, représentant des champignons analogues. Ici, tout est plus précis : les squamules concentriques sur le chapeau, la teinte grisâtre de celui-ci, l’aspect des lames. Les deux exemplaires de droite (un champignon entier vu de dessous, et une coupe longitudinale) font écho à ceux de la planche 2. Ils sont simplement plus travaillés, et le pied est coupé sur la belle version. Restent les fameux rhizoïdes, peints une nouvelle fois ici, sur des mottes de terre basales toujours trop grosses ou trop constantes pour être tirées de la réalité. | This is an excellent plate to compare with plate 2, which represents similar mushrooms but is of poor quality. In this plate, everything is more precise : the round scales on the cap, the grayish color, the appearance of the gills. Both specimens on the right (a whole mushroom seen from below and a lengthwise cross section) resemble those from plate 2. They are simply better illustrated, and, on the nicer version, the stem is cut off. Once again the famous rhizoids are painted here on basal clods of earth always too big or too regular to be a representation from reality. |
Planche / plate 7
Tricholome à stipe pointu subradicant (voir planche 4, la version « noir et blanc ») | Tricholoma with tapering subradicant stipe (see plate 4, the “black and white” version) |
Planche plus agréable à l’œil que la planche 4 (son pendant « noir et blanc »), mais bien moins rigoureuse, et parfois maladroite. Nous ne reviendrons pas sur ces imperfections, mais insisterons ici sur l’étrangeté du champignon figuré. Étrange, en effet, ce champignon, car il n’existe pas. Personne, du moins, ne l’a encore trouvé. Son habitus est celui de Collybia fusipes (Bull. : Fr.) Quél. (« pied en fuseau… »), et c’est d’ailleurs ainsi qu’il se trouve identifié, la planche no 106 de Bulliard (1780-1795) représentant bien, sous le nom générique d’« Agaricus », la très commune collybie. Mais les couleurs sont trop spéciales pour admettre cette détermination : du jaune-olive pour les lames, un blanc légèrement carné pour le pied… Le chapeau est blanchâtre, gris-blanc. L’était-il véritablement — ce qui, au vu de la teinte des lames, est plus que douteux, aucun champignon connu n’ayant cette combinaison de caractères. Aubriet a-t-il omis de le colorer ? L’artiste s’est-il appuyé sur la version « noir et blanc » pour composer un champignon imaginaire, dans le seul but de batailler avec les difficultés de la mise en couleur (rendre l’échancrure des lames, notamment) ? La relation entre cette planche 7 et la planche 4 reste ainsi passablement mystérieuse. | This plate is much more pleasant to the eye than plate 4 (its “black and white” version) but far less rigorous and sometimes awkward. The focus should not be on these imperfections but, rather, on the strangeness of the illustrated mushroom ; strange indeed, since this mushroom does not exist. It still remains to be discovered. It has the appearance of the Collybia fusipes (Bull. : Fr.) Quél. (“tapering stipe”) and this is how it is identified, since Bulliard’s plate 106 (1780-1795) represents, under the generic name of “Agaricus”, the very common collybia. But the colors are too special to accept this determination : olive-yellow for the gills, a slightly flesh-white for the stem… The cap is whitish, grey-white ; or was it really ? It is rather doubtful, considering the color of the lamellas, since no known mushroom has this combination of characters. Did Aubriet forget to color it ? Did the artist base his illustration on the “black and white” version to create an imaginary mushroom in order to avoid the difficulty of coloring (like the notch of the gills for example) ? The relationship between this plate 7 and plate 4 remains rather mysterious. |
Planche / plate 8
Agaricus campestris L. : Fr. | Agaricus campestris L. :Fr. |
On reconnaît ici le célèbre « rosé des prés », qui est une sorte de champignon de Paris poussant sur les pelouses. Cependant l’anneau, qui disparaît aisément il est vrai, est totalement absent. Le chapeau apparaît nettement creusé, ce qui n’est pas fréquent chez l’« agaric champêtre », et lavé de jaune au centre, ce qui est encore plus rare (il existe, certes, une variété au chapeau jaunissant). Le peintre n’avait certainement pas les spécimens sous les yeux, lorsqu’il a composé cette planche. Celle-ci est d’ailleurs accompagnée par un certain nombre d’indications de nature mnésique, la plus lisible étant : « champignon blanc », « à cher […] blanche ». Notons enfin la noirceur de l’hyménium, indiquant des champignons tout à fait mûrs, puisque, chez les Agaricus, les lames sont rosâtres dans la jeunesse, et noirâtres à la fin. | We recognize here the famous “field mushroom” (or meadow mushroom) which is a kind of cultivated mushroom that grows on lawns. However, the ring, which, it is true, can easily disappears in reality, is completely absent from the illustration. The cap appears clearly sunken, which is rare in the “field mushroom”, and yellowish in the center, which is even rarer (though one variety does exist with a yellowish cap). The artist probably did not have the specimen in front of him when he composed this plate. Furthermore, the plate gives information that the artist probably recalled from memory, the most readable one reading “white mushroom” and “white flesh”. We notice as well the black color of the hymenium, which indicates that the mushrooms were mature, since in the Agaricus, the gills are pinkish when young and blackish at maturity. |
Planche / plate 9
Au moins trois espèces représentées : en haut Lactarius lacunarum Romagn. ex Hora et de vieux hypholomes (fasciculare ?) ; en bas, peut-être un vieux Entoloma lividum (Bull. →) Quél. | At least three species are represented : at the top a Lactarius lacunarum Romagn. ex Hora and some old hypholomas (fasciculare ?) ; at the bottom, maybe an old Entoloma lividum (Bull. →) Quel. |
Ici, si l’on a feuilleté les planches précédentes, un spécimen doit immédiatement retenir l’attention. Il s’agit de celui en touffe, évoquant irrésistiblement l’Hypholoma fasciculare de la planche 5. Cependant, les formes des chapeaux ne sont pas superposables, et le « noir et blanc » ne permet pas d’affirmer qu’il s’agit de la même espèce. La plus belle réalisation, ici, est le petit champignon brunâtre, au chapeau très creux : le coup de pinceau est délicat, et Aubriet a même ajouté une pointe de blanc pour faire sentir l’aspect luisant du chapeau. Tout rappelle le lactaire des marécages (Lactarius lacunarum), que l’on trouve facilement en automne aux bords des mares ou dans les ornières, mais il pourrait au fond s’agir de spécimens extraits de la touffe dont nous parlions. L’exemplaire en coupe, à droite, manifeste l’ambiguïté, puisque si nous le rattachons, par sa teinte, aux supposés lactaires de gauche, alors ceux-ci ne sont plus des lactaires (ils n’ont jamais le pied tubuleux de cette manière). Cela étant, restent deux carpophores entiers (base des pieds flanquée du « système motte-racines ») : un petit et un gros ; puisque le petit est du même brun que le champignon figuré au-dessous et qui évoque tant Lactarius lacunarum, et que le gros, bien qu’en « noir et blanc », est isolé (ne pousse pas en touffe), il se peut qu’Aubriet ait peint ici Lactarius lacunarum, ou quelque espèce du même groupe. | On this plate, after browsing through the prior plates, a specimen immediately draws the attention : the tuft specimen reminiscent of the Hypholoma fasciculare of plate 5. However, the shapes of the cap are not similar and the “black and white” does not enable us to confirm that both are the same species. On this plate, the nicest execution is the small browning mushroom with the very sunken cap : the brush stroke is delicate and Aubriet even added a touch of white to render the shiny aspect of the cap. These characteristics are reminiscent of the Lactarius lacunarum that is easily found in autumn along ponds or in ruts, but it could also be specimens from the tuft we were talking about. The specimen in cross-section on the right is ambiguous ; if we associate it to the supposedly lactarias on the left because of its color, then the lactarias on the left are no longer lactarias (since lactarias never have a tubular stipe of such shape). In addition to these specimens are two whole carpophores (with the base represented with the “clod-root system”) : a small one and a large one ; since the small one is of the same brown color as the one represented below which is so evocative of the Lactarius lacunarum, and the large one, though in “black and white” is isolated (does not grow in tuft), maybe Aubriet painted here a Lactarius lacunarum, or another species of the same group. |
Planche / plate 10
Mycena inclinata (Fr.) Quél. | Mycena inclinata (Fr.) Quel. |
Certainement, ici, une des planches les plus réussies de la collection. L’espèce inclinata est immédiatement identifiable, à son pied jaunâtre et à la poussée en touffe compacte. On sentirait presque l’entêtante odeur de bougie qui se dégage toujours des lames… Les spécimens sont peints avec beaucoup de fraîcheur et de réalisme. La souplesse du champignon, en particulier, est admirablement rendue. Selon son procédé habituel, systématisé pour les plantes, Aubriet colore partiellement sa planche. Il ne s’agit pas du tout de paresse ou d’inachèvement : il s’agit d’une stratégie scientifique fort défendable au demeurant, que l’on trouve aussi chez Plumier. Les couleurs rentrent dans les caractères nécessaires à la détermination. Mais pourquoi, au fond, tout colorier ? Scientifiquement, on n’apprend guère plus d’une illustration de plante où toutes les feuilles sont vertes, tous les pétales jaunes, etc., que d’une illustration où une seule feuille est verte, un seul pétale jaune, etc. Ici, pour la Mycena inclinata, les exemplaires laissés en gris arborent les mêmes teintes que les trois spécimens colorés. Aubriet ne vise nullement l’esthétisme, mais la seule dimension scientifique. | This plate is certainly one of the best executions of the collection. We immediately identify the inclinata species, with its yellowish stipe and the compact tuft. One can almost smell the heady candle smell that always emanates from its gills. The specimens are painted with a lot of brightness and realism. The suppleness of the mushroom, in particular, is very well depicted. Aubriet resorts to his usual technique that he developed for plant illustration to partially color his plate. It has nothing to do with laziness or lack of completion : it is a scientific strategy, of defendable value, that we also find with Plumier. The colors become part of the determination work of the species. But why, actually, color everything ? Scientifically, we don’t learn more from the illustration of a plant where all leaves are green, all petals yellow, etc. than from an illustration where only one leave is green and one petal is yellow. For this Mycena inclinata, the specimens that are left in grey show the same shades as the three colored specimens. Aubriet does not aim at excelling aesthetically ; he only has in mind the scientific dimension. |
Planche / plate 11
Pseudoclitocybe cyathiformis (Bull. : Fr.) Singer ( ?) | Pseudoclitocybe cyathiformis (Bull. : Fr.) Singer ( ?) |
L’identification des champignons représentés ici n’est pas facile. L’« Agaricus nigripes » (« l’Agaric pied-noir ») de Bulliard (1780-1795, pl. 344 et pl. 519), nom également adopté par la 3e édition de la Flore française (Lamarck & Candolle 1815, p. 159, no 422) actuellement nommé Flammulina velutipes, est l’un des rares champignons à chapeau et pied poussant durant l’hiver. La planche d’Aubriet montre autre chose, un clitocybe au sens large, et peut-être plus précisément Pseudoclitocybe cyathiformis, dont les teintes sont toutefois beaucoup plus foncées. Pour le substrat, c’est quasiment tout un décor qu’Aubriet a cette fois figuré, comme cela se pratiquait assez couramment dans les illustrations d’histoire naturelle de l’époque. Les champignons poussent sur une sorte de poutre ou de roche très stylisée, habitat absolument impossible… quelle que soit l’espèce. | The identification of the mushrooms that are represented here is not easy. The “Agaricus nigripes” of Bulliard (1780-1795, pl. 344 and pl. 519), a name that was also used in the third edition of Flore française (Lamarck & Candolle 1815, p. 159, no 422), currently named Flammulina velutipes, is one of the rare mushrooms with cap and stipe that grow in the winter. Aubriet’s plate shows something else, a clitocybe, and maybe more specifically a Pseudoclitocybe cyathiformis, whose shades are, however, much darker. The substrate is represented here with a completely fictitious background that Aubriet created, as it was done quite often in the illustrations of natural history of that time. The mushrooms are shown here growing on some kind of a beam or rock, in a very stylized representation, which is an absolutely impossible habitat for a mushroom, no matter what the species is. |
Planche / plate 12
Deux espèces : en haut (les bruns), Mycena galericulata (Scop. : Fr.) S. F. Gray ; en bas Mycena rosea (Bull.) Gramberg | Two species : at the top (the brown ones), Mycena galericulata (Scop. : Fr.) S. F. Gray ; at the bottom Mycena rosea (Bull.) Gramberg |
Planche assez intéressante relativement à la manière dont Aubriet peint les champignons. Ici, il y a deux mycènes : l’une brune (en haut), assurément l’espèce galericulata, qui signifie à chapeau « en casque » (caractère on ne peut mieux exprimé par le plus gros spécimen), l’autre rose (en bas), la bien nommée rosea (la détermination « Agaricus roseus Bull. » est exacte). Or la première croît en touffes sur les souches de feuillus, et la seconde pousse à terre, isolée. Il y a donc extrapolation de la part d’Aubriet, qui représente les spécimens de galericulata comme ceux de rosea, parfaitement isolés, et pourvus partout du petit « système motte-racines ». Il est certain que les champignons lui ont été apportés avec peu de soin et un minimum d’informations concernant l’habitat et le mode de poussée… | This plate is rather interesting with regard to the way Aubriet painted the mushrooms. Two bonnets are represented : a brown one (at the top), which is definitely a galericulata species, with an obtuse conic and bell-shaped cap (character perfectly visible in the largest specimen) and a pink one (at the bottom), justly named rosea (the determination “Agaricus roseus Bull.” is correct). However, the first species grows in tufts on deciduous stumps and the second species grows in soil, isolated. Thus Aubriet extrapolated here, as he represented galericulata specimens as rosea specimens, perfectly isolated and equipped with the small “clod-root system”. The mushrooms that were provided to Aubriet were definitely not well taken care of and he received very little information about their habitat and growing characteristics. However, this plate is a good illustration. Aubriet showed extreme care in representing the details, including the undulating aspect of the edge of the cap (very well illustrated), the delicacy in the representation of the stem in cross-section, and the very sharp delineation of the gills. |
Planche / plate 13
Laccaria laccata (Scop. : Fr.) Cooke | Laccaria laccata (Scop. : Fr.) Cooke |
Voici un champignon déjà représenté, sur la planche 1. Mais ici les exemplaires sont plus grands. Ils sont peints avec beaucoup de finesse et d’exactitude. Le centre du chapeau montre même des méchules concentriques évoquant la variété moelleri Singer, par ailleurs plus massive. | Here is a mushroom that was already represented on plate 1. But in this plate, the specimens are larger. They are painted with delicacy and accuracy. The center of the cap even shows concentric thin fibrils reminiscent of the moelleri Singer variety, which is also heavier. |
Planche / plate 14
Marasmius querceus Britz. (=M. prasiosmus) (l’exemplaire du haut) ; Psathyrella sp. (les trois exemplaires du bas) | Marasmius querceus Britz. (=M. prasiosmus) (specimen at the top) ; Psathyrella sp. (the three specimens at the bottom) |
Le champignon figuré dans la moitié supérieure de la planche n’est pas l’« Agaricus alliaceus » de Bulliard (1780-1795, pl. 159 et pl. 524). Le Marasmius alliaceus (Jacq. : Fr.) Fr. (ou Mycetinis alliaceus (Jacq. : Fr.) Earle, ses noms actuels) possède des lames crème et un pied brun noirâtre, nettement velu dans sa partie inférieure. La notation « aylle », crayonnée par Aubriet, est commune à M. alliaceus et à plusieurs autres espèces de Marasmius, notamment M. querceus (appelé encore assez récemment M. prasiosmus), dont le chapeau est relativement pâle, et qui exhale une forte odeur d’ail ne pouvant passer inaperçue. La mention d’Aubriet explique sans doute la détermination d’Antoine-Laurent de Jussieu, qui se souvenait peut-être aussi d’un article que son oncle Antoine consacra en 1728 au M. alliaceus (Jussieu 1728b, pp. 377-383). Ici, les lames sont assez foncées (brun rosâtre), le pied est blanchâtre et lisse, et le substrat, des feuilles mortes agglomérées à la base du pied, est typique de M. querceus. Certaines psathyrelles peuvent avoir cet aspect, la psathyrelle de Candolle (Psathyrella candolleana), par exemple, lorsqu’elle est fluette comme c’est peut-être le cas des spécimens dessinés en dessous. | The mushroom that is represented in the upper half of the plate is not the “Agaricus alliaceus” of Bulliard (1780-1795, pl. 159 and pl. 524). The Marasmius alliaceus (Jacq. : Fr.) Fr. (or Mycetinis alliaceus (Jacq. : Fr.) Earle, its current names) has beige gills and a brown/blackish stipe, and is clearly hairy in its lower section. The annotation “aylle” penciled by Aubriet is also found for the M. alliaceus and several other species of Marasmius, like the M. querceus (still called not long ago M. prasiosmus), whose cap is relatively pale, and from which emanates a strong odor of garlic that cannot remain unnoticed. Aubriet’s annotation probably explains Antoine-Laurent de Jussieu’s determination, who maybe remembered as well an article that his uncle Antoine wrote in 1728 about the M. alliaceus (Jussieu 1728b, pp. 377-383). Here, the gills are rather dark (brown pinkish), the stipe is whitish and smooth, and the substrate, made of dead leaves around the base of the stipe, is typical of the M. querceus. Some psathyrellas can have this appearance, like the fringed crumble cap (or pale brittlestem) (Psathyrella candolleana) for example, when the specimens are thin, like maybe the ones delineated below. |
Planche / plate 15
Laccaria bicolor (Maire) Orton | Laccaria bicolor (Maire) Orton |
Cette planche présente plusieurs qualités et plusieurs défauts. Pour les qualités, il faut apprécier la précision du pinceau, notamment dans la représentation de l’hyménium, les lames étant traitées avec une belle application. Dans l’ensemble, la forme est habilement dessinée. Mais les couleurs sont manifestement plus approximatives. Le laccaire bicolore, espèce commune proche du laccaire laqué, possède un chapeau plus rosâtre ou orangé, et des lames plus lilacin-améthyste que bleu-violet vif. En outre, comme son nom l’indique, ce petit champignon est normalement bicolore, c’est-à-dire que la base du pied, prise dans un tomentum mycélien violacé, répond en écho à la teinte des lames. Le tomentum violacé est absent sur les spécimens peints par Aubriet, qui figure à sa place des systèmes « motte-racines » particulièrement développés. Cela dit, il arrive que, sur certaines récoltes de L. bicolor, le manchon basal violacé soit discret voire tout à fait absent. Marcel Bon a par ailleurs créé une variété pseudobicolor (de laccata), à lames lilacines mais dont le « mycélium basal n’est pas violet. Sous feuillus schisteux ou sableux » (Bon 1988, p. 146). | This plate offers several positive attributes and several flaws. In terms of positive qualities, we can admire the precision of the brush stroke, especially in the representation of the hymenium, where the gills are illustrated very gracefully. Generally speaking, the shape is skillfully delineated. But the colors are obviously approximate. The bicoloured deceiver, a common species close to the waxy laccaria, has a cap of a more pinkish or orange color and gills of a more lilac-amethyst color rather than a bright blue-purple. Furthermore, as its names suggests, this small mushroom is usually bicolor, which means that the purplish basal tomentum mycelium, located at the base of the stipe, is the same shade of the gills. The purplish tomentum is not represented in the specimens that Aubriet painted ; instead, Aubriet painted some rather developed “clod-root systems”. However, it happens that some Laccaria bicolor present the particularity of having the purplish basal tomentum either discreetly shown or completely absent. Marcel Bon even created a pseudobicolor variety (of laccata) with pale lilac gills, whose “basal mycelium is not violet ; in deciduous forests in sand and schist substrates” (Bon 1988, p. 146). |
Planche / plate 16
Collybia confluens (Pers. : Fr.) Kummer | Collybia confluens (Pers. : Fr.) Kummer |
Planche datée (1724), ce qui est plutôt rare dans l’ensemble de la collection. Les exemplaires formant une grosse touffe rendent plus délicate l’identification. Néanmoins, il s’agit très probablement de la collybie confluente (Collybia confluens) qui, comme son nom l’indique, se développe en touffes denses. L’espèce possède en outre des lames extrêmement serrées, caractère visible sur la représentation d’Aubriet. Il manque toutefois l’indication graphique, sur le pied, d’une pruine toujours présente et souvent remplacée, dans le bas, par un manchon villeux. | This plate is dated (1724) which is rather rare in the collection. The specimens are clustered which makes identification more difficult. However, it is probably a clustered toughshank (Collybia confluens), which, as its name indicates, develops in dense clusters. Furthermore, the species has extremely crowded gills, a character that is visible on Aubriet’s representation. But the illustration does not show the pruinose pubescence that is always present on the stem, and often replaced at the base by a mycelioid mantle. |
Planche / plate 17
Tricholoma equestre (L. : Fr.) Kummer | Tricholoma equestre (L. : Fr.) Kummer |
Le champignon peint ici par Aubriet est assez aisé à déterminer, grâce à la vue en coupe. Il apparaît extérieurement entièrement jaune, mais la chair est blanche. Avec cet habitus, il ne peut s’agir que du tricholome équestre. Il y a, certes, le tricholome doré (Tricholoma auratum), qui est beaucoup plus trapu et pousse sous les conifères sablonneux, principalement sur le littoral atlantique. Ici, manifestement, tous les champignons proviennent de région parisienne (bois de Boulogne et de Vincennes essentiellement). | The mushroom that Aubriet painted here is rather easy to identify, thanks to the cross section. It appears entirely yellow on the outside, but the flesh is white. With such an appearance, it can only be a yellow knight (or man on horseback), also known as yellow knight. Another knight is the tricholoma auratum, which is heavier and grows in the sandy areas of coniferous woods, mostly on the Atlantic coast. Here obviously, all the mushrooms represented come from the region of Paris (mostly from the forests of Boulogne and Vincennes). |
Planche / plate 18
Lactarius deliciosus (L. : Fr.) S. F. Gray (et Lactarius piperatus (Scop. : Fr.) Pers. ??) | Lactarius deliciosus (L. : Fr.) S. F. Gray (and Lactarius piperatus (Scop. : Fr.) Pers. ??) |
Il n’est pas certain que figurent sur cette planche deux espèces distinctes, comme le croit le déterminateur. Aubriet colore rarement tous les spécimens, pour les raisons que nous avons indiquées dans nos commentaires de la planche 10. L’« Agaricus acris » de Bulliard (1780-1795, pl. 200 et pl. 538) correspond au fameux lactaire poivré (Lactarius piperatus), connu depuis la Renaissance au moins. C’est un gros champignon blanc, qui contient un lait abondant, extrêmement âcre. De forme, il ressemble beaucoup au lactaire délicieux (L. deliciosus), qu’Aubriet représente par la couleur. Bien que le chapeau apparaisse trop brun (il devrait être orangé avec des plages verdâtres), il s’agit incontestablement de cette espèce (très commune sous les pins en région parisienne), trahit ici par la teinte carotte de ses lames. La figure montrant le chapeau vu de haut n’est pas très réussie. Les zones concentriques, en particulier, sont peintes avec trop d’« esprit géométrique ». Dans la réalité, ces zones sont diffuses, irrégulières, plus ou moins larges… Ici, il s’agit pratiquement de lignes cerclées s’écartant du centre par « progression géométrique ». Le système « motte-racines » rappelle, en outre, certaines représentations classiques du xviie siècle. Les fortes racines, en particulier, expriment à merveille l’inclusion des champignons dans la sphère des plantes. | It is not certain that this plate represents two different species as indicated. Aubriet rarely colors all specimens for the reasons explained in plate 10. Bulliard’s Agaricus acris (1780-1795, pl. 200 and pl. 538) corresponds to the famous peppery milk-cap (Lactarius piperatus), known at least since the Renaissance. It is a large white mushroom that contains abundant and extremely sour milk. Its shape looks like the saffron milk-cap (Lactarius deliciosus) that Aubriet represents by its color. Though the cap appears too brown (it should be orange with greenish areas), it is definitely this species that this illustration represents (very common under the pine trees in the region of Paris) and this is confirmed by the carrot orange color of its lamellaes. The figure that shows the cap from above is not really well done. The concentric areas, in particular, are painted with too much of a “geometric approach”. In nature, these areas are diffuse, irregular, and of a more of less large size. Here, the representation shows concentric lines that spread away from the center by “geometric progression”. Furthermore, the “clod-root” system is reminiscent of some classical representations of the 17th century. The strong roots, in particular, reflect perfectly the inclusion of mushrooms in the kingdom of plants. |
Planche / plate 19
Pleurotus ostreatus (Jacq. : Fr.) Kummer (en haut) ; Lepista nuda (Bull. : Fr.) Cooke (en bas) | Pleurotus ostreatus (Jacq. : Fr.) Kummer (top) ; Lepista nuda (Bull. : Fr.) Cooke (bottom) |
Notons d’abord, ici, une petite nouveauté ornementale : les champignons sont présentés dans un cadre rectangulaire noir, épais, sans doute assez vite tracé (voir les quelques bavures…). Pourquoi ce cadre inopiné ? Nous n’en savons rien. Peut-être Aubriet a-t-il tenu à mettre en valeur des champignons qu’il a peints avec une qualité supérieure qui frappe spécialement pour le « pied-bleu ». Ce champignon très parfumé, fréquent dans la seconde partie de l’automne et même aux portes de l’hiver, est magnifiquement représenté. Le souci du réalisme est plus accusé qu’ailleurs, Aubriet marquant les « accidents », tels les morsures de limaces ou de scarabées. Pour une fois, l’esthétisme entre en jeu, sans nuire à l’exactitude scientifique. Les lames sont traitées avec une finesse rare, Aubriet soulignant d’un pinceau extrêmement ténu la pâleur de l’arête. Les couleurs du chapeau sont également plus travaillées, l’ocracé se mêlant avec beaucoup de naturel à la teinte fondamentale violette. Et, pour couronner le tout, la terre qui salit la base des pieds est bien plus crédible, moins épaisse qu’à l’ordinaire et à peine accompagnée de filaments émergeants. L’« Agaricus nudus » de Bulliard (1780-1795, pl. 439) regroupe le « type » peint par Aubriet (fig. A), et des variétés non violetées (à moins qu’il ne s’agisse d’espèces tout à fait distinctes). | Of mention is a small new decorative detail : the mushrooms are now presented in a rectangular black, thick frame, probably hastily delineated (see the few smears). Why did Aubriet add this unexpected frame ? We don’t know. Maybe Aubriet wanted to emphasize the mushrooms that he painted with a higher quality presentation, which is particularly striking for the wood blewit. This very flavorful mushroom, commonly found in the second half of autumn and even at the beginning of winter, is magnificently represented. Aubriet’s focus on realism is stronger here than anywhere else ; he carefully emphasizes details like the bites of slugs and beetles. For once, aestheticism is taken into consideration without detracting from the scientific accuracy. Aubriet sketched the gills with a rare delicacy, delineating them with a very thin brush stroke to show the pale color of the edge. The colors of the cap are also represented with more care, the yellow-earth color blending naturally with the main purple shade. Furthermore, the earth that surrounds the base of the stipes is far more credible, less thick than usual, and barely accompanied with emerging filaments. Bulliard’s “Agaricus nudus” (1780-1795, pl. 439) includes the "type" that Aubriet painted (fig. A) and other non-purplish varieties (unless these are completely different species). |
Planche / plate 20
Russula cf. fageticola (Melzer) Lundell | Russula cf. fageticola (Melzer) Lundell |
Cette russule, assez joliment peinte, révèle incidemment un défaut dans l’art d’Aubriet. Celui-ci représente en effet des lamelles et des lamellules sur un champignon pourvu uniquement de lames (une seule longueur de feuillet). Il est probable que pour tout champignon lamellé, Aubriet figure assez mécaniquement l’hyménium, sans observer attentivement les différences qui existent dans chaque cas. Au juste, le degré d’acuité de l’observation paraît assez variable, suivant les planches et même sur une même planche. Ici, l’œil semble avoir privilégié certains caractères au détriment des autres. Ainsi, sur le gros exemplaire (représenté aussi en coupe), la base du pied est pour une fois très réaliste, débarrassée de la sempiternelle motte de terre imaginaire. Il est difficile de dire si les couleurs du chapeau sont fidèles au réel. Dans le groupe de la russule du hêtre (Russula fageticola), quelques espèces exhibent ces tonalités d’un rouge dilué et un peu mauve, le « type » (fageticola) étant d’un rouge franc, quasi-sanguin (voir ainsi la planche couleur de Pierre Moënne-Loccoz figurant Russula captiosa Reum., in Reumaux & Moënne-Loccoz 2003, p. 250). À ce propos, l’« Agaricus sanguineus » de Bulliard (1780-1795, pl. 42) n’est pas (malgré son nom prometteur) la même espèce : il s’agit de la russule sanguine (Russula sanguinaria), qui a des lames très arquéesdécurrentes, et un pied lavé de rouge. | This russula, nicely painted, incidentally reveals a flaw in Aubriet’s art. Aubriet drew lamellaes and lamellulaes on a mushroom that usually has only one length of gills. It is probable that Aubriet delineated the hymenium of all gilled mushrooms in a rather mechanic process, without paying particular attention to the differences that exist in each case. Thus the degree of accuracy seems to be rather irregular depending on the plates and even within one plate. It seems that some details were emphasized to the detriment of others that were left off. For example, for the large specimen (represented in cross-section), the base of the stipe is for once very realistic, without the imaginary clod of earth that we find on so many specimens. It is difficult to say whether the colors of the cap are faithful to nature. In the group of the beechwood sickener (Russula fageticola), a few species show shades of a diluted red and some lilaclilacpurple ; the “type” of fageticola is of a sharp red, almost blood-red (see the plate in color of a Russula captiosa by Pierre Moënne-Loccoz, in Reumaux & Moënne-Loccoz 2003, p. 250). By the way, Bulliard’s “Agaricus sanguineus” (1780-1795, pl. 42) is not (in spite of its name) of the same species : it is a bloody brittlegill (Russula sanguinaria) with adnate to slightly decurrent gills, and the stipe flushed with red. |
Planche / plate 21
Xerocomus sp. (groupe de X. subtomentosus) | Xerocomus sp. (group of the X. subtomentosus) |
Planche de plus petit format que les autres (longueur et largeur sensiblement identiques à celles de la planche 29), ayant donc eu, au départ, une destination certainement différente. Ce bolet mou, qui pullule dans toutes les forêts sous des formes assez variables donnant lieu à quelques espèces distinctes, est franchement bien exécuté. Les tubes, notamment, sont peints avec beaucoup de réalisme et de précision (observez l’ombrage, par exemple). Aubriet n’a pas oublié de marquer les piqûres de vers (presque systématiques chez les Xerocomus de ce groupe) qui attaquent la chair, du chapeau jusqu’au bas du pied. | This plate is of a smaller format than the others (the length and the width are similar to plate 29) ; we can thus infer that it was probably created for a different purpose. This porcini, or cep, which can be found in high quantity in all forests under very different varieties and a few different species, is well executed. The tubes, in particular, are painted with a lot of realism and accuracy (look at the shading for example). Aubriet did not forget to show the worm bites (almost systematic in the Xerocomus of this group) which attack the flesh of the mushroom from the cap to the base of the stipe. |
Planche / plate 21bis
Helvella crispa (Scop. : Fr.) Fr. | Helvella crispa (Scop. : Fr.) Fr. |
Superbe représentation de l’helvelle crépue, espèce commune des bois feuillus, parfois appelée « morille d’automne » en raison de la forme contournée de son chapeau. Les helvelles (Helvella) et les morilles (Morchella) appartiennent cependant à deux familles distinctes au sein des ascomycètes. Si les morilles sont délicieuses, l’helvelle crépue est parfaitement insipide. Mieux vaut la contempler comme une petite chose très curieuse, faite de sillons, de méandres, de plis et de replis, caractères qu’Aubriet a exécutés ici avec un souci du détail et de l’élégance tout à fait remarquable. | Superb representation of a white saddle (or elfin saddle, or common helvel), a common species found in deciduous forests, sometimes called elfin saddle because of the saddleshape of its cap, and “autumn morel” in France. However, the helvels (Helvella) and the morels (Morchella) belong to two different families within the ascomycetes. While morels are delicious, the white saddle is totally tasteless. It is better to admire it, as a small and very curious thing, with its grooves and twists and turns, characters that Aubriet executed here with a remarkable care for the detail and style. However, the unfortunate “clod-root system” is once again represented here but with a new twist that is reminiscent of Sterbeeck (1675) who represented specimens under various angles, showing caps only, sections of stipes, deformed specimens, etc. Here, Aubriet painted two sections of stipe, the base (numbered # 3) and the median area (numbered # 5). This process is also used in botanical illustration. In mycology, and in the “art of cutting out”, a longitudinal cross-section is sufficient. |
Planche / plate 22
Ramaria botrytis (Pers. : Fr.) Ricken ? (en haut) ; | Ramaria botrytis (Pers. : Fr.) Ricken ? (at the top) ; |
Les clavaires et les ramaires ne sont pas des champignons faciles à peindre. Il faut parvenir à rendre clairement les ramifications, les extrémités parfois complexes, « fractales », de celles-ci. Ici, Aubriet s’en tire plus qu’honorablement : ses figures sont précises, détaillées, et surtout pleines de vie. Dessiner de tels champignons ne dut pas poser trop de problèmes à l’artiste, en raison de leur analogie formelle avec certains végétaux. | Clavarias and ramarias are not easy to paint. It requires skill to clearly delineate the ramifications and the sometimes complex and “fractal” extremities of these mushrooms. Aubriet did a good job at it : his figures are precise, detailed, and very lively. He probably did not encounter too many difficulties in representing these mushrooms since their shape has much in common with some plants. |
Planche / plate 23
Calvatia sp. | Calvatia sp. |
Planche probablement inachevée, car sa moitié inférieure n’est pas utilisée. Or Aubriet, qui semble avoir assez « peur du vide », place toujours des spécimens de champignon sur toute la surface de sa feuille. | This plate was probably not completed, since its lower half has not been used ; and we know that Aubriet, who seemed to fear blank spots on a sheet, always covered the whole surface with specimens of mushrooms. |
Planche / plate 24
Tricholoma sp. (en haut et au milieu) ; Cortinarius sp. ? (en bas) | Tricholoma sp. (at the top and in the middle) ; Cortinarius sp. ? (at the bottom) |
Les champignons, sur cette planche, sont très agréablement soignés. Passons vite sur les « boules » du bas, qui semblent de tout jeunes cortinaires, impossibles à identifier. Les autres spécimens sont manifestement de superbes tricholomes. Mais, chose curieuse, malgré la précision technique avec laquelle ils sont représentés (observez la finesse des contours, réalisés à l’encre brune et à la plume, les rehauts de gouache blanche donnant une parfaite sensation de luisant, le rendu si maîtrisé des ombrages, etc.), il est impossible de reconnaître l’espèce. Le pied est lavé de jaune, la teinte du chapeau tire un peu sur l’olivâtre : on peut, sans la moindre certitude, penser au tricholome disjoint (Tricholoma sejunctum). Il est par contre certain qu’il ne s’agit pas de l’« Agaricus foetens » de Persoon (1801, vol. 2, p. 443), qui est une russule d’aspect bien différent. | The mushrooms represented on this plate are very nicely done. The “balls” represented at the bottom seem to be very young cortinarius, impossible to identify. The other specimens are, obviously, superb knights. But strangely enough, in spite of the technical precision with which these specimens were delineated (observe the delicacy of the outlines, done with brown ink and pen, the highlights in white gouache that bring a perfect shining aspect, the perfection of the shades, etc.), it is impossible to recognize the species. The stipe is yellowish, the cap olive greenish ; it might be a deceiving knight (Tricholoma sejunctum) but it is definitely not Persoon’s Agaricus foetens (1801, vol. 2, p. 443) which is a russula of a much different aspect. |
Planche / plate 25
Helvella crispa (Scop. : Fr.) Fr. (en haut) ; Morganella piriformis (Sch. : Pers.) Kreisel ? (en bas) | Helvella crispa (Scop. : Fr.) Fr. (at the top) ; Morganella piriformis (Sch. : Pers.) Kreisel ? (at the bottom) |
On retrouve la « morille d’automne » qui remplissait tout le cadre de la planche 21bis, et qui fut gravée en 1728 dans un article d’Antoine de Jussieu (Jussieu 1728a). Cette version diffère peu, mais il y a des nuances intéressantes. Le chapeau est peint avec une finesse supérieure qui donne à l’ensemble un surcroît de réalisme. Avec l’âge, l’helvelle crépue a toujours tendance à roussir, surtout au niveau des plis cérébriformes du chapeau. Aubriet rend à merveille cet effet de corruption, sur l’exemplaire de gauche et sur celui en coupe. La gouache blanche n’intervient plus sur ce dernier, ce qui est par contre assez dommage. En scrutant la planche de près, on aperçoit en outre quelques traits exécutés à la pierre noire, ayant composé l’esquisse initiale (exemplaire de gauche). Le petit morceau tronçonné permet enfin d’apprécier, comme sur la planche 21bis (mais de façon pour ainsi dire encore plus didactique) la contexture si particulière de ce champignon. | Here, we see again the "autumn morel" that filled plate 21bis, which was engraved in 1728 in an article written by Antoine de Jussieu (Jussieu 1728a). This version varies only slightly, yet it presents a few interesting nuances. The cap is painted with a higher degree of delicacy that gives the drawing a higher level of realism. The white saddle (or elfin saddle, or common helvel) always tends to become brownish when aging, especially at the level of the irregular lobes of the cap. Aubriet rendered perfectly this effect of maturation on the specimen on the left, and on the one in cross section. However, he did not use any white gouache on the latter, which is too bad. While looking more thoroughly at the plate, one can see a few strokes done with black chalk, which are from the initial draft (on the specimen on the left). The small broken piece allows us to appreciate, as in plate 21bis, the unique composition of this mushroom but, but this time, in an even more didactic way. |
Planche / plate 26
Peziza vesiculosa Bull. : Fr. (en haut) ; Calvatia cyathiformis (Bosc) Morgan (en bas) | Peziza vesiculosa Bull. : Fr. (at the top) ; Calvatia cyathiformis (Bosc) Morgan (at the bottom) |
Deux champignons sans chapeau ni pied, mais très éloignés morphologiquement, sont associés sur cette planche. | Two mushrooms, without cap or stipe but very different in shape, are presented together on this plate. |
Planche / plate 27
Mitrophora semilibera (DeCand. : Fr.) Léveillé Gouache sur papier. | Mitrophora semilibera (DeCand. : Fr.) Léveillé Gouache on paper. |
Cette planche n’est pas d’Aubriet. Le champignon, peint avec grande maladresse, peut néanmoins être facilement identifié : il s’agit du « morillon » (Mitrophora semilibera), espèce assez commune au printemps, dans les bois frais, les jardins, souvent en association avec la ficaire (Ficaria ranunculoides). Ce champignon pourrait être décrit comme une morille conique à très long pied. Sur cette planche, le chapeau présente des alvéoles trop nombreuses, trop « morchelloïdes » d’aspect. Chez le morillon, il s’agit plutôt de « côtes » très marquées, radiales et reliées transversalement par des côtes plus discrètes, le tout formant des alvéoles larges et grossières. Le pied, en revanche, est assez réaliste, avec sa dense pruine blanche qui le couvre entièrement, mais qui apparaît ici d’un brun malencontreux (il est certes très difficile de rendre le « blanc sur blanc »). La coupe, enfin, montre bien l’insertion très profonde du pied sur le chapeau, mais ne rend guère le caractère totalement creux du morillon. | This plate was not done by Aubriet. However, the awkwardly rendered mushroom can easily be identified ; it is a "semifree morel" (Mitrophora semilibera), a species rather common in the springs and in cool woods and gardens, and often found near Ficaria ranunculoides. This mushroom could be described as a conical morel (or black morel) with long stipe. On this plate, the cap shows too many cells ; it is too “morchelloides” of aspect. The semifree morel has, instead, vertical membranous ridges, well marked, radial, and linked transversally by smaller ribs, while the whole forms big and rough cells. The stipe, on the other hand, is quite realistic with a dense white powder, though it is shown here in an awkward brown color (it is of course difficult to represent white on white). Finally, the cross section shows well the deep attachment of the stipe on the cap but it does not render the character of the semifree morel as being completely hollow. P. A. Micheli represents this mushroom without a doubt and, perhaps, for the first time in history (Micheli 1729, tab. 84, fig. 1 & 3). |
Planche / plate 28
Clavulina cristata (L. : Fr.) Schroeter (en haut) ; Clavulina sp. (au milieu) ; Clavulina sp. (en bas) | Clavulina cristata (L. : Fr.) Schroeter (top) ; Clavulina sp. (in the middle) ; Clavulina sp. (bottom) |
Ici encore, Aubriet n’est manifestement pas l’auteur de cette planche médiocre. Les trois clavaires sont peintes grossièrement, et c’est à peine si l’on ose reconnaître, en haut, la très commune espèce cristata. Elle devrait présenter un plus grand nombre de divisions aux extrémités des ramifications, mais, avec cette pâleur et cet habitus, il peut difficilement s’agir d’autre chose. Ce champignon pousse au sol, parfois sur des fragments de bois pourri, dans les forêts de feuillus ou de conifères, de l’été à l’automne. Elle est comestible, contrairement à beaucoup de clavaires ou de ramaires, réputées pour leurs effets laxatifs. | Once again, Aubriet is not the author of this low quality plate. The three clavarias are roughly painted and it is difficult to recognize, at the top of the plate, the very common species cristata. It should show more divisions at the tips of the ramifications yet, with its pale color and its appearance, it can hardly be anything else. This mushroom grows on the soil, sometimes on broken pieces of rotten wood, in deciduous or evergreen forests, from the summer to the fall. It is edible, contrary to many clavarias and ramarias that are famous for their laxative effects. |
Planche / plate 29
Coprinus atramentarius (Bull. : Fr.) Fr. | Coprinus atramentarius (Bull. : Fr.)Fr. |
Il est aisé de reconnaître ici le coprin noir d’encre, qu’Aubriet avait déjà dessiné pour le Botanicon parisiense de Vaillant (les références précises, avec la phrase diagnostique, sont indiquées par Antoine-Laurent de Jussieu sur la petite étiquette). Cette planche au lavis et à l’encre est meilleure, car elle montre les champignons en touffe compacte, mode de poussée (dite « cespiteuse ») caractéristique de l’espèce. En outre, la forme ne souffre d’aucun réductionnisme géométrique, comme c’était un peu le cas, dans le Botanicon, pour ce coprin. La vue en coupe est assez semblable, quoique celle gravée dans l’ouvrage de Vaillant exprime avec bonheur le noircissement progressif des lames, dû à la sporulation. | It is easy to recognize here the common inkcap that Aubriet had already drawn for Vaillant’s Botanicon parisiense (the exact references, together with the diagnostic description, are indicated in the small vignette by Antoine-Laurent de Jussieu). This plate in wash color and ink is of better quality because it shows the mushrooms in a compact cluster, a typical character of the species that grows in tuft. Furthermore, the shape does not suffer from any geometric reduction as was the case for this coprinus in the Botanicon. The cross section is quite similar to the one in Vaillant’s book, though the one engraved in Vaillant’s book shows the progressive blackening of the gills due tosporulation. |
Planche / plate 30
Coprinus picaceus (Bull. : Fr.) S. F. Gray | Coprinus picaceus (Bull. : Fr.) S. F.Gray |
Cette illustration du coprin pie présente plusieurs anomalies ou maladresses. L’espèce est assez schématisée. Le pied, qui certes a tendance à se creuser avec l’âge, ne peut en aucun cas ressembler au véritable tuyau peint par Aubriet. Le bulbe basal est par ailleurs trop accusé, et évoque ici encore un oignon de liliacée. Le chapeau est bien noir et blanc (d’où le nom du champignon), mais les plaques vélaires blanches maculent la surface par de larges zébrures, et non sous forme de tirets concentriques régulièrement disposés. En outre, l’espèce ne pousse pas sur bois, mais directement au sol. | This illustration of a magpie inkcap shows several anomalies and awkward details ; the species is rather simplified. The stipe, though it does tend to become hollow with age, can, in no case, resemble a pipe such as Aubriet painted. Furthermore, the basal bulb is too accentuated and reminiscent of a liliaceae bulb. The cap is indeed black and white (hence the name of the mushroom) but the white patches of veil smudge the surface with wide stripes rather than round lines regularly laid out. In addition, the species does not grow on wood but directly on the ground. |
Planche / plate 31
Gymnopilus sp. ? | Gymnopilus sp. ? |
Planche assez bizarre, où le minuscule côtoie le géant. Le petit champignon de gauche, peint en jaune, est-il de la même espèce que les deux autres ? Le critère de la grandeur ne permet malheureusement pas de trancher, car il arrive quelquefois de récolter des « miniatures » d’espèces ordinairement imposantes. Dépourvus de couleurs, les gros spécimens ne sont pas identifiables. Aubriet a ici le mérite de les avoir représentés tels qu’ils étaient, avec (exemplaire du haut) le chapeau profondément lacéré, presque déchiré, la marge révolutée montrant les lames, et le pied arraché au-dessus de la base. Ce pied coupé vaut sans doute mieux que le pied terminé par le système « motte-racines », inventé par Aubriet pour l’exemplaire du bas. Celui-ci est tout de même intéressant, car il montre que les lames, lamelles et lamellules sont d’abord tracées au lavis gris, puis repassées, pour les affirmer, à la plume et encre noire. | This plate is rather strange, with both tiny and giant illustrations. Is the small mushroom on the left, painted in yellow, of the same species as the two others ? Unfortunately, the size does not help in the determination, since it happens sometimes to harvest very small specimens of usually impressive species. The two large specimens represented without color are not identifiable. At least Aubriet can be credited here for representing them the way they looked ; the specimen at the top is represented with the cap heavily lacerated, almost torn, the revolute margin showing the gills, and the stipe torn off above the base. This cut stipe is better than the stipe ending with the “clod-root system” that Aubriet created for the specimen at the bottom. However this specimen is interesting as it shows that the gills, lamellaes, and lamellulaes were first delineated in grey wash and then further outlined with pen and black ink. |
Planche / plate 32
Melanoleuca sp. | Melanoleuca sp. |
Cette planche est assez soignée, mais la composition « en carré » n’est pas très heureuse. Aubriet fait manifestement passer au second plan les impératifs esthétiques. Seuls importent les caractères scientifiques, et donc la multiplication des « points de vue » : aperçu du chapeau (en haut), des lames et du pied (en bas à droite), représentation en coupe (en bas à gauche). Malgré ces bonnes intentions, l’espèce figurée est difficilement reconnaissable. Le genre, par contre, semble aisé à identifier : l’habitus (notamment le pied très court par rapport au diamètre du chapeau) et la présence d’un petit mamelon arrondi au centre du chapeau signent le genre Melanoleuca (voir planche 3, un autre mélanoleuca blanchâtre). Sur le spécimen en bas à droite, on voit comme le pied est « resserré », plus large au sommet et à la base : ce caractère se retrouve souvent chez ces champignons proches des tricholomes (Tricholoma). Il faut en outre prêter attention aux exemplaires du haut, dont la surface du chapeau est peinte de façon schématique. Aubriet a tracé une véritable ligne géométrique brisée délimitant une zone plus foncée que l’autre. Lorsque les mélanoleucas prennent un petit coup de gel, il arrive que le chapeau devienne un peu bicolore, dans cet esprit, presque à ce point de « géométrisation ». | This plate is quite well executed but the squared composition is not very good taste. Aubriet definitely considered the aesthetic as secondary. What mattered to him was only the scientific characters, which explains the numerous angles with which he illustrates : glimpse of the cap (top), of the gills and stipe (bottom right), and cross section (bottom left). In spite of his good intentions, the species that he illustrated is difficult to recognize. The genus, however, is easy to identify : the appearance (in particular the very short stipe compared to the diameter of the cap) and the presence of a small round knob in the center of the cap confirm that it belongs to the Melanoleuca genus (see plate 3, another whitish melanoleuca). On the specimen at the bottom right, one can see how the stipe is “tightened”, wider at the top and at the base ; this character is often found in mushrooms close to the knights (Tricholoma). Furthermore, it is worth examining the specimen at the top of the plate, whose cap surface is painted in a very simplified way. Aubriet drew a real geometric broken line that separates an area darker than the other. When melanoleucas are affected by frost, it happens sometimes that the cap becomes slightly bicolor, in the same “geometric” way. |
Planche / plate 33
Tricholoma sp. ? (deux espèces) | Tricholoma sp. ? (two species) |
Cette planche est contrariante. Le trait est fin (voyez en particulier les lames), les couleurs assez travaillées, tant en nuances qu’en contrastes, et malgré tout les champignons représentés ne sont pas identifiables. Sans doute les spécimens du haut, plus petits, sont-ils autre chose que les deux gros du bas. Par l’habitus, nous pensons à des tricholomes, à moins que les petits ne soient des collybies. Il est difficile d’en dire plus. Nous pouvons simplement conclure qu’il y a de très fortes chances pour que les champignons aient été mal récoltés. Il se peut aussi que l’artiste n’ait pas fait montre d’une grande exactitude dans la mise en couleur. | This plate is upsetting. The line is thin (see the gills in particular), and the colors are rather well used, both in nuances and in contrasts ; however the mushrooms represented are not identifiable. Maybe the specimens at the top, which are smaller, are a different species from the two large ones at the bottom. Based on the appearance, they might be knights, unless the small ones are collybias. It is difficult to say more than that. We can only confirm that these mushrooms must have been picked in an incorrect way. It is also possible that the artist was not very accurate in the coloring of the species. |
Planche / plate 34
Pleurotus cornucopiae (Paulet) Rolland | Pleurotus cornucopiae (Paulet) Rolland |
Bonne illustration du pleurote corne d’abondance qui, étant donné son extrême pâleur, peut bien se passer de la couleur. Un caractère typique de l’espèce, c’est la très longue décurrence des lames qui, pour ainsi dire, n’en finissent pas de descendre le long du pied. Elles se terminent souvent presque à la base de celui-ci, en une sorte de réseau. Il n’y a pas, sur cette planche, d’éléments non réalistes. La base du pied est coupée, ce qui est scientifiquement un peu dommage, mais préférable à la reconstitution a priori. La vue en coupe permet d’apprécier la minceur de la chair de ce pleurote comestible, mais de qualité moyenne (l’odeur n’est pas toujours bien agréable). L’espèce pousse sur le bois des arbres feuillus, parfois dès le printemps. | Good illustration of a cornucopia mushroom (or branching oyster) which, based on its natural pale color, can go without being colored. A typical character of the species is the very long decurrent lamellas which go all the way down along the stipe. They often end almost at the base of the stipe in a kind of network. This plate does not show any unrealistic elements. The base of the stipe is cut, which is unfortunate in a scientific point of view, but better than an a priori reconstitution. The cross section enables us to appreciate the thin character of the flesh of this edible mushroom, though of an average quality (the smell is not always very pleasant). The species grows on the wood of deciduous trees sometimes as early as spring time. |
Planche / plate 35
Clitocybe odora (Bull. : Fr.) Kummer (en haut) ; espèce non identifiée (au milieu et en bas) | Clitocybe odora (Bull. : Fr.) Kummer (top) ; species non identified (in the middle and bottom) |
Peu de choses à dire sur cette planche, très typique du « style Aubriet ». On reconnaît en haut (grâce au bleu pâle), le clitocybe odorant, commun en automne surtout sous les feuillus. Ce champignon étonnant par sa puissante odeur d’anis pure (ou mieux d’apéritif anisé), se montre volontiers d’un bleu verdâtre plus accusé. Les deux exemplaires de droite, où apparaissent les lames, étaient sans doute un peu desséchés, car la marge des chapeaux apparaît courtement repliée et onduleuse. La petite touffe de feuilles mortes, sur l’exemplaire de gauche, remplace l’éventuel système « motte-racines ». Observons à cet égard qu’Aubriet, sur les champignons du bas, n’a pas prolongé les mottes de terre basales par des pseudo-racines végétales. | There is not much to say about this plate ; it is very typical of the “Aubriet style”. We recognize at the top (thanks to the pale blue), the aniseed funnel (or blue-green clitocybe), which is common in autumn, especially under deciduous trees. This mushroom, amazing for its strong smell of pure anis (or anis liqueur), can be of a stronger blue/greenish color. Both specimens on the right, with gills, were probably a little bit dried out, as the margin of the caps appears slightly rolled back and sinuate. The small tuft of dead leaves, on the specimen on the left, replaces the “clod-root” system that we have seen before. Let’s mention that on the mushrooms illustrated at the bottom of the plate, Aubriet did not extend the basal clods of earth with the pseudo-roots of plants. |
Planche / plate 36
Panaeolus sphinctrinus (Fr.) Quélet ? | Panaeolus sphinctrinus (Fr.) Quélet ? |
Composition plutôt réussie, assez délicate et précise, spécialement dans la représentation en coupe. Il n’est pas certain que les plus « gros » exemplaires du haut soient de la même espèce que ceux du bas. Cependant, la similitude des teintes est grande, et la marge du chapeau, dans les deux cas, apparaît découpée en triangles. Le bulbe, à la base des pieds, est par ailleurs identique. La détermination se fait en regardant les exemplaires du bas, qui appartiennent indiscutablement au genre Panaeolus, renfermant une vingtaine d’espèces (en Europe du moins) parfois hallucinogènes, pour la plupart graminicoles ou coprophiles. P. sphrinctrinus se repère essentiellement aux lambeaux blancs, dentés, qui ornent les bords du chapeau, et au changement de teinte que prend parfois celui-ci en séchant, passant du brun noirâtre olivacé au grisâtre pâle. Certains spécimens deviennent ainsi presque bicolores au cours de la déshydratation, ce que la planche d’Aubriet illustre parfaitement. L’aspect denté, ou dentelé, de la marge piléique est nettement visible sur l’exemplaire peint au milieu, en bas. Il est dommage qu’Aubriet n’ait pas coloré les lames du spécimen couché : du noirâtre aurait quasiment assuré l’identité, au moins générique, des champignons figurés. L’exemplaire en haut à gauche, s’il s’agit du panéole en question, est plus maladroit, Aubriet n’ayant pas réussi à rendre l’aspect pendant des lambeaux vélaires, qui tombent en triangles. Ici, ils se retroussent en triangles, à moins que le blanc soit celui de la chair sous-jacente au revêtement brun du chapeau, et, dans ce cas, il faudrait penser à un autre genre, le genre Inocybe par exemple. | This composition is rather well done, quite delicate and precise, especially in the cross section representation. It is not sure that the “bigger” specimens at the top are of the same species as those at the bottom. However, the similarity in shades is significant and the margin of the cap, in both cases, appears as cut in triangles. The bulb at the base of the stipes is also identical. A determination can be done by examining the specimens at the bottom of the sheet, which belong without a doubt to the genus Panaeolus, which includes about twenty species (at least in Europe) ; some are hallucinogenic, most of them are graminicole or coprophilic. The Panaeolus sphinctrinus can be mostly recognized by its overhanging gills that form pale, delicate, white teeth, and by its change of color when it dries out, going from a dark ochre greenish to a pale olive greenish. Some specimens thus become almost bicolor during the process of dehydration, which Aubriet’s plate illustrates very well. The dentate or serrated margin of the cap can be well seen on the specimen painted at the bottom center of the plate. It is a pity that Aubriet did not color the gills of the laid out specimen : some blackish color would have almost certainly confirmed the identity, at least generic, of the mushrooms. The specimen in the top left, if it is supposed to be a panaeolus, is more awkward ; Aubriet did not succeed in representing the hanging aspect of the velar strips that hang in triangles. Here they roll up in triangle, unless the white that is shown is the white of the flesh under the brown coating of the cap. In that case, we would have to consider it as being a different genus, like the Inocybe for example. |
Planche / plate 37
Laccaria sp. ? (en haut) ; Entoloma cf. sericellum (Bull. : Fr.) Kummer (au milieu) ; Clitocybe gibba | Laccaria sp. ? (top) ; Entoloma cf. sericellum (Bull. : Fr.) Kummer (middle) ; Clitocybe gibba (Pers. :Fr.) |
Une chose est sûre : cette planche comporte trois espèces différentes. Les trois exemplaires ocracés peints tout en haut sont très difficilement identifiables : ils manquent de « caractères », dans un sens scientifique mais aussi artistique. Peut-être s’agit-il de laccaires, car ce genre renferme des espèces très petites, comme le L. tortilis, qui possède toutefois un pied nettement plus court et des lames beaucoup plus décurrentes. | What is certain is that this plate represents three different species. The three ochre specimens painted at the top of the plate are easily identifiable ; they lack “characters” in the scientific and the artistic point of view. Maybe they are laccarias, since this genus includes species that are very small, like the L. tortilis, which has, however, a definitely shorter stipe, and much more decurrent gills. |
Planche / plate 38
Hypholoma lateritium (Schaeff.) Kummer | Hypholoma lateritium (Schaeff.) Kummer |
Planche de bonne facture, mais présentant quelques défauts d’observation. Par sa croissance en touffe, son chapeau un peu briqueté et ses lames d’un gris foncé, on reconnaît l’hypholome couleur de briques (Hypholoma lateritium), espèce proche de l’hypholome en touffe (Hypholoma fasciculare, voir planche 5), mais moins fréquente. La chair est moins amère, et même quelquefois presque douce. Ce champignon croît tout au long de l’année, comme l’hypholome en touffe, et l’on déconseille pareillement de le consommer. | This is a well executed plate in spite of a few errors in observation. Thanks to its presentation in a cluster, its cap slightly tawny, and its dark grey lamellaes, the specimen can be identified as the brick-red hypholoma (Hypholoma lateritium), a species closely related to the sulphur tuft (or clustered woodlover) (Hypholoma fasciculare, see plate 5) but less common. The flesh is less bitter and sometimes even almost sweet. This mushroom grows year round, like the sulphur tuft but it is advised not to eat either species. |
Planche / plate 39
Agaricus silvicola (Vitt.) Peck | Agaricus silvicola (Vitt.) Peck |
Il faut mettre cette planche en regard de la planche 63. La similitude saute aux yeux, au point que l’on peut raisonnablement penser qu’Aubriet a réalisé deux versions d’une même récolte. Dans la première (planche 63), les champignons sont encore assez frais, puisque l’anneau est bien apparent. Le chapeau est en outre plus pâle. Sur la planche qui nous occupe, l’anneau est complètement oblitéré (vague trace au tiers inférieur du pied) et le chapeau est sensiblement plus jaune, ce qui indique que le temps a passé, puisque l’agaric sylvicole (que l’on reconnaît aisément, même sans son anneau) a tendance à jaunir avec l’âge, devenant même d’un orangé « madère » à la fin. Seule contradiction dans ce portrait « diachronique » : les lames sont encore plus noires sur la planche 63 que sur celle-ci, alors que la sporulation progressive les fait noircir de plus en plus… D’autre part, sur les deux versions, le chapeau est cerclé, ou même doublement cerclé (planche 63) au centre, caractère qui ne s’explique guère scientifiquement. La base du pied, sur cette planche 39, montre enfin une petite volve apprimée en deux triangles, élément qui n’apparaît pas sur la planche 63, bien meilleure d’un point de vue scientifique. | When comparing this plate to plate 63 the similarity is obvious, to such an extent that we can reasonably assume that Aubriet executed both drawings from the same harvest. In the first one (plate 63), the mushrooms are still fresh, since the ring is still apparent. Furthermore, the cap is paler. On plate 39, the ring is completely obliterated (there is only a vague mark at the level of the bottom third of the stipe) and the cap is clearly more yellow, which indicates that the mushroom has matured, since the wood mushroom (that we recognize easily even without its ring) tends to transition from yellow to brownish orange with age. The only contradiction in this “diachronic” portrait is that the gills are even darker on plate 63 than on this one, even though the progressive sporulation usually makes them become darker and darker. Furthermore, on both versions, the cap is circled ; on plate 63, it even has a double circle, a character that cannot be explained scientifically. The base of the stipe on plate 39 shows a small volva very close to the stipe in two triangles, which does not appear on plate 63 ; plate 63 is much better than plate 39 scientifically speaking. |
Planche / plate 40
Tricholoma fulvum (Bull. : Fr.) Sacc. (en haut) et Lyophyllum gr. decastes (Fr. : Fr.) Singer (en bas) | Tricholoma fulvum (Bull. : Fr.) Sacc. (top) and Lyophyllum gr. decastes (Fr. : Fr.) Singer (bottom) |
Sur cette planche, les deux espèces sont représentées à l’identique par un spécimen dressé dont le chapeau est vu de dessus, un spécimen couché afin d’illustrer le pied et l’hyménophore lamellé, et un spécimen en coupe longitudinale orienté comme le précédent. L’identité des deux espèces est problématique ; néanmoins, l’association de ces champignons assez similaires sur une même planche laisse à penser qu’Aubriet, ou son commanditaire, les considérait comme très apparentés. Sans doute ont-ils aussi été dessinés simultanément : les deux chapeaux sont tracés de manière remarquablement semblable, avec une cocarde plus foncée et bien délimitée au centre, et des rayures radiales (figurant ce qu’un mycologue nommerait « fibrilles », fines mèches de couleur sans relief). L’ombrage est également identique : une zone blanchie au premier plan, et une bande circulaire plus sombre à quelques millimètres au bord du chapeau. Le fait qu’aucune détermination n’ait été indiquée a peut-être forcé l’illustrateur à adopter une technique « neutre » d’illustration, un modèle standard en quelque sorte, que l’on retrouvera chaque fois qu’un champignon sans caractère morphologique notable se présentera à lui. | On this plate both species are represented in a similar layout ; a standing specimen whose cap is seen from above, a laid down specimen in order to illustrate the stipe and the gilled hymenophore, and a specimen in cross-section oriented in the same direction as the one that is laid down. The identity of these species is problematic ; however, the association of these rather similar mushrooms on one plate makes us believe that Aubriet, or his sponsor, considered them to be related. They were probably executed simultaneously : both caps are traced in a very similar way, with a darker roundel, well defined in the center, and radial stripes (to illustrate what a mycologist would call “filaments”, thin colored and flat threads). The shade is also identical : a whiter zone in the foreground, and a darker circular stripe a few millimeters from the margin of the cap. Since no determination was done, maybe the artist had to adopt a “neutral” technique of illustration : a kind of standard pattern that would be used again each time the artist was presented with a mushroom that had no significant morphological character. |
Planche / plate 41
Amanita sp. (???) | Amanita sp. (???) |
Avec cette planche, on a peut-être l’éloquent témoignage que les caractères importants des espèces de champignons n’étaient pas (ou très mal) connus dans la première moitié du xviiie siècle. Aubriet a certainement peint ce champignon en pensant qu’il était dans son état normal. Or, quelque chose nous dit qu’il s’agit là d’une amanite (peut-être la « rougissante », bien figurée sur la planche 60) atypique ayant, sous l’effet de la pluie ou de quelque autre contrainte externe, perdu ses principaux attributs diagnostiques : l’anneau et les plaques vélaires du chapeau. Quant au bourrelet basal, il peut également s’être atténué, au point qu’Aubriet, passant sur de petits vestiges, se soit contenté d’ajouter l’habituel système « motte-racines », qui se réduit même, sur l’exemplaire du bas, à un jeu de filaments. Au fond, cette planche mycologique est un peu l’équivalent d’une illustration de plante aux fleurs encore fermées. À moins, naturellement, qu’un mycologue plus compétent ne reconnaisse formellement une espèce à laquelle nous n’avions pas songé, ou que nous ignorions. | This plate might be the eloquent illustration of the fact that the main characters of species of mushrooms were not (or were very badly) known in the first half of the 18th century. Aubriet probably painted this mushroom thinking that it was its normal shape. However, something tells us that it is an atypical amanita (maybe a "blusher", which is well illustrated on plate 60) that, under the effect of the rain or other external elements, lost its main defining characters : the ring and the velar patches on the cap. As for its sack-like rim, it might have subsided to such an extent that Aubriet, ignoring the small remnants, decided to add the usual “clodroot system” which, on the specimen at the bottom, ends up as a mere network of filaments. In fact, this mycological plate is somewhat the equivalent of an illustration of a plant that has not yet bloomed. This determination stands unless, of course, a more competent mycologist formally recognizes the specimen as a species that we ignored, or did not think about. |
Planche / plate 42
Bovista plumbea Pers. : Pers. ? (en haut) ; Agrocybe praecox (Pers. : Fr.) Fayod (en bas) | Bovista plumbea Pers. : Pers. ? (top) ; Agrocybe praecox (Pers. : Fr.) Fayod (bottom) |
Malgré la longue note d’Aubriet, il est difficile d’identifier la petite vesse de loup peinte en haut de cette planche. La chair, nous explique Aubriet, brunit avec le temps, et l’extérieur du champignon est bien blanc. Le brunissement interne est normal, il est causé par la maturation des spores. Ce qui est gênant sur cette illustration, c’est la figuration d’un petit pied en crochet qui évoque beaucoup la queue d’un fruit. L’ensemble fait penser à la boviste plombée (Bovista plumbea), mais ce champignon, commun sur les pelouses, est tout à fait dépourvu de pied. Faut-il de nouveau songer à une extrapolation de la part de l’artiste, en liaison avec des représentations mentales d’ordre végétal ? | In spite of the long note by Aubriet, it is difficult to identify the small puffball painted at the top of this plate. The flesh, as Aubriet explains, darkens with time while the outer surface of the mushroom is pure white. The internal darkening is normal ; it is caused by the spore maturation. What is bothering in this drawing is the illustration of a small hooked stipe reminiscent of the stalk of a fruit. The whole representation is reminiscent of a grey puffball (Bovista plumbea) but this mushroom, common on lawns, does not have a stipe. Could this be again an extrapolation on the part of the artist, linked to mental representations of plant attributes ? |
Planche / plate 43
Cortinarius cf. semisanguineus (Fr. : Fr.) Gillet (en haut et au milieu) ; espèce non identifiée (en bas) | Cortinarius cf. semisanguineus (Fr. : Fr.) Gillet (top and center) ; non-identified species (bottom) |
Sur cette planche, les trois spécimens entiers plus la coupe, en haut et au milieu de la feuille, sont bien exécutés. On appréciera, en particulier, la sûreté du trait, qui paraît suivre les formes « réelles » du champignon (marge onduleuse du chapeau par exemple). L’orangé ou le rouge vif des lames permet d’identifier, à coup sûr, un cortinaire du sousgenre Dermocybe. Le port, relativement trapu, oriente vers C. semisanguineus, espèce fréquente des conifères (rarissime sous feuillus), considérée comme assez suspecte du point de vue de la comestibilité. Cependant, le pied de ce champignon est jaune, et son chapeau d’un brun jaunâtre olivacé. Aubriet aurait-il oublié de peindre le pied ? Pourquoi la teinte qu’il utilise pour le chapeau est-elle si pâle (un beige clair) ? Ici, nous n’arrivons pas à percer sa logique. Il est possible que le peintre, vivement frappé par la couleur « feu » ou sanguine des lames, ait dès lors considéré comme tout à fait accessoires les autres teintes du champignon. À moins, tout simplement, que la planche soit inachevée. | The three whole specimens and the cross section, at the top and in the middle of the sheet, are well executed. One can appreciate, in particular, the accuracy of the pen stroke, which seems to follow the reel shapes of the mushroom (undulated margin of the cap, for example). The orange or bright red of the gills enables the identification of a webcap of the subgenus Dermocybe. Its stem, rather thick, indicates a C. semisanguineus, a frequent species around evergreens (rare under deciduous trees) and considered of suspicious edibility. However the stipe of this mushroom is yellow and its cap is a yellowish olive brown ; did Aubriet forget to paint the stipe ? Why is the shade that Aubriet used for the cap so pale (a pale beige) ? We do not understand his choices here. Maybe he was so fascinated by the bright red color of the gills that he considered the other shades of the mushroom as secondary ; unless the plate is simply incomplete. |
Planche plate 44
Lepista nuda (Bull. : Fr.) Cooke | Lepista nuda (Bull. : Fr.) Cooke |
Nous retrouvons ici le pied-bleu, si bien exécuté par Aubriet sur la planche 19. Cette seconde représentation ne fait pas « doublon », car le chapeau apparaît nettement plus pâle, ce qui arrive fréquemment chez cette espèce quand l’atmosphère est plus sèche. La chair peut également pâlir, mais pas au point de blanchir entièrement, comme c’est le cas ici. Le pied est enfin enveloppé, à sa base, d’une sorte de volve apprimée, ou d’un bourrelet curieux, élément recomposé par l’artiste. Ce pied-bleu ne vaut donc pas, du point de vue de l’exactitude scientifique, celui de la planche 19 auquel nous renvoyons pour d’autres commentaires. | We find here again the wood blewit that Aubriet executed so well on plate 19. This second representation is not a copy ; the cap appears far paler, which happens frequently in this species when the air is dry. The flesh can also become pale, but not to the point of becoming completely white, as it is the case here. The stipe is wrapped by some kind of a surrounding volva or a weird roll, an element that the artist recreated. Thus, this wood blewit is not as good as the one represented on plate 19 in terms of scientific accuracy and one should refer to that one for further comments. |
Planche / plate 45
Champignon indéterminé | Undetermined mushroom |
Voici une planche qui n’est manifestement pas de la main d’Aubriet. La réalisation est bien trop imprécise pour oser la détermination. | Here is a plate that was not done by Aubriet. The execution lacks precision and does not allow for any determination. |
Planche / plate 46
Mycena rosea (Bull.) Gramberg ? (au milieu) ; champignons indéterminés ailleurs. | Mycena rosea (Bull.) Gramberg ? (center) ; undetermined mushroom elsewhere. |
Belle planche, entièrement colorée, présentant des champignons graciles qui sont en soi très difficiles à identifier sans examen microscopique. La détermination « Agaricus roseus Bull. » (c’est-à-dire Mycena rosea, voir la planche 12), pour les exemplaires du milieu, n’est pas absurde, mais il pourrait aussi bien s’agir d’entolomes du sous-genre Leptonia, voire d’une variété lilacine de l’« inocybe à lames terreuses » (Inocybe geophylla), dont le « type » blanchâtre est peut-être peint en bas de la planche. Les lames sont toutefois de teintes fort différentes, violetées pour la supposée variété lilacine, et presque blanches pour le « type geophylla » tout aussi supposé, qui possède (ainsi que toutes ses variantes chromatiques), des lames argilacées. | This is a nice plate, entirely colored, that shows slender mushrooms that are very difficult to identify without a microscopic examination. The determination of an “Agaricus roseus Bull.” (aka Mycena rosea, see plate 12) for the specimens in the middle, makes sense, but they could also be pinkgills of the subgenus Leptonia, or a lilacina variety of the white fibrecap (Inocybe geophylla), whose whitish specimen might be painted at the bottom of the plate. The gills, however, are of very different shades : purplish for the supposedly lilacina variety, and almost white for the “geophylla type”, also supposedly, which has (as all its chromatic variants do) rust-colored gills. |
Planche / plate 47
Cuphophyllus niveus (Scop. : Fr.) Bon ? (en haut) ; | Cuphophyllus niveus (Scop. : Fr.) Bon ? (at the top) ; |
Dans la moitié supérieure de la planche, Aubriet a peint un petit champignon blanc, qui ne nous dirait rien du tout si l’artiste ne s’était pas appliqué à bien observer la forme des lames. Celles-ci sont manifestement décurrentes, ce qui se voit sur la coupe, et encore plus nettement sur l’exemplaire couché de droite. Du coup, on pense à un petit hygrophore blanc, du genre Cuphophyllus — genre caractérisé (en particulier) par la décurrence des lames —, et l’espèce niveus conviendrait assez bien. Ce petit champignon est très commun dans les prairies ou sur les pelouses. Inodore et insipide, il est cependant considéré comme un agréable comestible. Il possède un chapeau beaucoup plus plan, voire creusé en entonnoir, que celui des exemplaires figurés ici. Le doute persiste donc. | In the upper half of the plate Aubriet painted a small white mushroom that would not be recognizable if the artist had not been so careful in representing the shape of the gills. They are definitely decurrent, as shown in the cross section and, even more clearly, in the specimen laid down on the right. This characteristic is suggestive of a small white hygrophorus of the genus Cuphophyllus — a genus characterized (in particular) by the decurrence of its gills— and the species niveus would apply rather well to the illustrated species. This small mushroom is widely distributed in meadows and lawns. Though it is odorless and tasteless, it is however considered to be pleasantly edible. Its cap is much flatter, with a central funnel-shaped depression, than the ones represented here. Thus, doubt persists. |
Planche / plate 48
Psathyrella multipedata (Peck) Smith (en haut) ; | Psathyrella multipedata (Peck) Smith (at the top) ; |
Belle planche, qui représente en haut la psathyrelle cespiteuse. C’est la représentation en touffe d’exemplaires adultes (en haut à gauche) qui permet l’identification certaine. Les teintes du champignon sont précisées sur des spécimens isolés, prélevés de la touffe, puisque cette psathyrelle ne croît jamais de façon isolée. Le brun utilisé par Aubriet est à peu près juste. Il manque simplement l’expression du champignon à l’état déshydraté, avec son chapeau beaucoup plus pâle. | This is a nice plate that represents at the top a clustered brittlestem. The representation in dense clusters of the adult specimens (in the top left) enables a definite identification. The shades of the mushroom are defined on isolated specimens, separated from the tuft, since this psathyrella never grows isolated. The brown that Aubriet used is quite accurate. What is missing is the appearance of the mushroom, once dehydrated, with its much paler cap. Of more interest is the representation of the recurrent artificial “clod-root system” on the dense tuft. If one refers to plate XII (fig. 3, 4) of Vaillant’s Botanicon parisiense, one can recognize the same species (accurate determination by Antoine-Laurent de Jussieu) ; though it is represented with a “weird” basal “mass”, at least it does not have any plant filaments or pseudo-roots. Most of the time in the engravings of the Botanicon, a soil clod is either absent or more discreetly represented but filaments or roots are represented quite often. Thus it is possible that, when the Botanicon was put together, Vaillant gave stricter instructions to his illustrator and forbade him to draw the large soil clods that did not appear in his numerous observations of mushrooms. |
Planche / plate 49
Entoloma rhodopolium f. nidorosum (Fr.) Noord. ? | Entoloma rhodopolium f. nidorosum (Fr.) Noord. ? |
Planche de bonne qualité, avec toutefois quelques éléments trop « géométrisés ». Ainsi, les cercles sur le chapeau, qui veulent peut-être marquer le caractère creusé du centre, ne sont pas très heureux. On remarquera qu’Aubriet se montre presque toujours plus habile à peindre les lames des champignons, ce qui est, paradoxalement, bien plus délicat. Ici, on perçoit dans leur couleur une nuance rosâtre qui nous oriente vers les entolomes. Le chapeau apparaît hygrophane, c’est-à-dire qu’il change de teinte en séchant, passant en l’occurrence d’un brun olivâtre assez sombre à un blanchâtre vaguement carné. Il est extrêmement probable que soit figuré sur cette planche l’entolome à odeur de nitre (odeur d’eau de Javel), très commun en automne dans les forêts humides. Il est, en région parisienne, particulièrement répandu. | This plate is of good quality, even though a few elements are too geometrically represented. For example, the circles on the cap that were perhaps meant to represent the depressed character of the center are not a very good choice. Aubriet shows, almost always, more dexterity in representing the gills of the mushrooms, which is, paradoxically, a much more delicate procedure. Here, the pinkish shade that emanates from the coloring is suggestive of a pinkgill. The cap seems to be hygrophanous, which means that it changes color in the drying process, transitioning from a rather dark olive greenish brown to a vaguely whitish color. It is highly probable that this plate represents the wood pinkgill (nitrous smell), which is very common in autumn in humid forests. It is widely distributed in the Parisian region. |
Planche / plate 50
Psathyrella sp. ? | Psathyrella sp. ? |
Les champignons représentés ici sont peints avec habileté et précision. Les lames, comme à l’ordinaire, sont d’une exécution supérieure. Tout, ici, apparaît réaliste (sauf le « système motte-racines »…), et l’on est étonné de ne pas parvenir à une identification précise. La noirceur des lames conjointe à l’habitus oriente vers les psathyrelles. Mais le chapeau est couvert de squames concentriques, souvent arrondies, qui déroutent totalement. Les petits exemplaires en haut à droite évoquent la psathyrelle (ou lacrimaire) veloutée (Psathyrella lacrymabunda), qui pousse parfois en touffes. Mais son chapeau est fibrillo-soyeux ou un peu pelucheux, en aucun cas tel que le figure Aubriet. Reste l’hypothèse d’espèces plus rares, comme la psathyrelle cotonneuse (P. cotonea), au chapeau plus blanchâtre orné de squamules laineuses triangulaires et au pied jaunâtre vers la base, ou la psathyrelle du peuplier (P. populina), dont le revêtement piléique est au contraire généralement plus lisse. | The mushrooms that are represented on this plate were painted with skill and accuracy. The gills, as usual, show an outstanding execution. Everything appears realistic in this representation (except for the “clod-root system”) and, thus, it is surprising that no precise identification can be done. The darkness of the gills and its general appearance are suggestive of a psathyrella. But the cap is covered with concentric scales, often round, that are puzzling. The small specimens in the top right are perhaps a weeping widow (Psathyrella lacrymabunda), also known as weeping widow, that grows sometimes in tufts. But a Psathyrella lacrymabunda’s cap is fibrillose and somewhat fluffy, which is definitely not what Aubriet represented. It could thus be a less common species like the yellowfoot brittlestem (Psathyrella cotonea), which features a more whitish cap covered with triangular fibrillous squamules and a yellowish stipe near the base, or the P. populina, whose pileus surface is generally smoother. |
Planche / plate 51
Cortinarius gr. de cinnamomeus (L. : Fr.) Fr. ? ? (en haut) ; Entoloma rhodopolium f. nidorosum (Fr.) Noord. | Cortinarius gr. cinnamomeus (L. : Fr.) Fr. ? ? (at the top) ; Entoloma rhodopolium f. nidorosum (Fr.) Noord. ? |
Cette nouvelle planche commence à nous convaincre qu’il y a peut-être, dans la manière d’Aubriet, un certain « systématisme ». Ainsi le caractère creux du pied estil presque toujours figuré de la même façon. Il y a, en réalité, diverses modalités de ce caractère : le pied peut être partiellement creusé, généralement au niveau de son sommet, et présenter alors une « mèche pendante » (fréquente dans le genre Hebeloma) ; il peut être simplement « fistuleux », c’est-à-dire ne montrer qu’un étroit sillon ; il peut encore se creuser en « triangles », comme chez les russules, et l’on trouve tout de même une exécution correcte de cet aspect dans la planche 1 (avec la russule « du groupe amoenolens »), tandis que la russule du hêtre (planche 20) n’est pas bien traitée à cet égard. Les lames, fort bien exécutées en général, écopent font peut-être aussi les frais de procédés trop « mécaniques ». Leurs colorations pourraient aisément se répartir en quelques catégories, si bien que certaines nuances, parfois essentielles à la détermination, sont sans doute laissées de côté. Ici, sur le champignon du haut, on voit de l’orangé, ou du brun orangé, pas assez vifs pour affirmer qu’Aubriet a peint un cortinaire du sous-genre Dermocybe (cf. planche 43). Si tel est le cas, avec les tonalités brun-olivâtres du chapeau, il faut penser à une espèce proche du cortinaire à lames cannelle (C. cinnamomeus), commun tant sous les feuillus que sous les conifères. | This new plate shows us that Aubriet was rather “systematic” in his technique. For instance, the hollow character of the stipe is almost always represented the same way. In reality, this character can show different attributes : the stipe can be partially hollowed, usually at the level of the top and present a “hyphal fragment” (frequent in the genus Hebeloma) ; it can also be “fistulous” and only show a narrow groove ; it can also become hollow “in triangles” like in the russulas ; we even have an accurate execution of this character in plate 1 (in the russula “from the amoenolens group), whereas the beechwood sickener (plate 20) is not as nicely illustrated. The gills, usually well executed, might also suffer from such “mechanical” processes. Their coloring could easily be divided into several categories, yet some shades, that are sometimes essential to the determination, are probably left aside. Here, on the mushroom illustrated at the top, we can see some orange, or brown-orange, not bright enough though to assert that Aubriet painted here a webcap from the subgenus Dermocybe (see plate 43). If this is the case, the brown-olive greenish shades of the cap are suggestive of a species close to the cinnamon webcap (C. cinnamomeus), which is common under deciduous trees and conifers. |
Planche / plate 52
Champignons indéterminés | Undetermined mushrooms |
Il est très difficile, ici, de dire si les spécimens du haut, aux chapeaux sombres, sont spécifiquement différents des spécimens du bas, aux chapeaux presque blancs. Il arrive que des champignons, en séchant, s’éclaircissent considérablement, au point de passer, dans les cas extrêmes, du brun chocolat au blanchâtre ou au crème très pâle. Les exemplaires peints par Aubriet se ressemblent morphologiquement beaucoup, ils possèdent des lames lavées de rosâtre : il pourrait de nouveau s’agir de l’entolome à odeur de nitre (Entoloma rhodopolium f. nidorosum), très probablement représenté sur la planche 49. Ici, l’extrême blancheur du chapeau des spécimens du bas nous fait plus qu’hésiter. | On this plate it is very difficult to say whether the specimens represented at the top, with dark caps, are specifically different from the specimens at the bottom, with almost white caps. Sometimes, mushroom colors lighten significantly while drying ; in some extreme cases they might even transition from chocolate brown to whitish or very pale beige. The specimens represented by Aubriet look very morphologically similar ; their gills are flushed with pink : it could be again a wood pinkgill (Entoloma rhodopolium f. nidorosum), the specimen probably represented on plate 49. On this plate, the extreme whiteness of the cap on the specimens illustrated at the bottom makes us hesitate about the determination. |
Planche / plate 53
Clitocybe (Ampulloclitocybe) clavipes (Pers. : Fr.) Kumm. (en haut) ? ; Clitocybe phaeophtalma (Pers.) Kuyper (en bas) | Clitocybe (Ampulloclitocybe) clavipes (Pers. : Fr.) Kumm. (at the top) ? ; Clitocybe phaeophtalma (Pers.) Kuyper (at the bottom) |
Très bonne planche, réaliste et comportant peu de défauts. Par l’habitus et la teinte générale, on reconnaît facilement, en bas, le clitocybe à odeur de poulailler (C. phaeophtalma), au chapeau presque beige, aux lames blanchâtres très décurrentes. Le pied est généralement gracile, comme le représente Aubriet. Manquent simplement, sur cette planche, les stries aux bords du chapeau, qui disparaissent cependant à la déshydratation. Ce champignon est assez commun sous les feuillus (parfois sous conifères), et dégage une surprenante odeur de poule mouillée… | This is an excellent plate that is realistic and with very few flaws. The appearance and the general color of the illustration help us recognize easily, at the bottom, the chicken run funnel (C. phaeophtalma) with its almost beige cap and very decurrent whitish gills. The stipe is generally slender as Aubriet represented it. The only elements that are missing on this plate are striates at the edge of the cap that disappear, however, in the process of dehydration. This mushroom is rather common under deciduous trees (and sometimes under conifers) and spreads a surprising odor of wet chicken. |
Planche / plate 54
Cortinarius sp. ? | Cortinarius sp. ? |
Si l’on fait abstraction du « système motte-racines » et de la manière trop « mécanique » dont Aubriet a représenté le caractère creux du pied, cette planche est fort bien exécutée. Les ombrages, en particulier, sont travaillés avec précision (observez par exemple l’ombre projetée, sur les lames, par les bords du chapeau). La couleur brunâtre des lames est assez celle des cortinaires, et l’aspect général du champignon nous évoque quelque espèce de ce genre. Mais celui-ci comporte tellement de membres (au moins 2 000 espèces en Europe), qui se ressemblent souvent beaucoup, que même avec les champignons en mains (et l’investigation microscopique), on ne parvient pas toujours au moindre nom… Le petit spécimen accolé au grand (en haut) est curieux, car les cortinaires ayant cet aspect et ces couleurs poussent, très généralement, de façon isolée. | Other than the “clod-root system” and the excessive “mechanic” way in which Aubriet represented the hollow character of the stipe, this plate is well executed. The shades in particular are painted with precision (examine, for example, the projected shadow on the gills through the edges of the cap). The brownish color of the gills is quite similar to that of the cortinarius, and the general appearance of this mushroom is reminiscent of some species of this genus. But this genus includes so many species (at least 2.000 in Europe) that look a lot alike that, even with the mushrooms in hand (and a microscope examination), it is often difficult to make an accurate determination. The small specimen close to the big one at the top of the plate is interesting, since cortinarius that have this appearance and color usually grow isolated. |
Planche / plate 55
Cortinarius trivialis Lange | Cortinarius trivialis Lange |
Excellente illustration du cortinaire trivial (C. trivialis), commun à l’automne dans les bois de feuillus. Un de ses caractères principaux est parfaitement rendu par Aubriet : il s’agit de ces espèces de bracelets qui « couleuvrent » le pied, surtout dans sa moitié inférieure. Le caractère extrêmement visqueux, sinon gluant, de ce champignon, n’est pas assez sensible, quoiqu’Aubriet (ou un autre ?) ait ajouté sur le chapeau une traînée de gouache blanche, qui signale l’aspect luisant. L’artiste a d’ailleurs noté « reluisant » sur sa planche, et l’on peut se demander pourquoi. Si les spécimens sont peints d’une seule traite, le recours à une indication d’ordre mnésique n’a guère de sens. Ainsi il est donc possible qu’Aubriet reprenait ses planches (ou certaines d’entre elles) plusieurs jours après les avoir commencées, à moins qu’il ne confiât à quelque apprenti l’exécution de détails particuliers, comme les rehauts de blanc. | This is an excellent illustration of a girdled webcap (C. trivialis), which is common in autumn in deciduous forests. One of its main characters is perfectly represented by Aubriet : some kinds of bands that “belt” the stipe, especially on its lower half. The very slimy character of this mushroom is not represented enough, though Aubriet (or someone else ?) added a brush stroke of white gouache on the cap to illustrate its shiny aspect. The artist even noted “shiny” on his plate, and one wonders why. If the specimens were painted in one session, it does not make sense to add such annotation. Thus, maybe Aubriet resumed working on his plates (or some of them) several days after he started them, or, he entrusted some apprentice with the execution of specific details like the white highlights. |
Planche / plate 56
Marasmius oreades (Bolt. : Fr.) Fr. | Marasmius oreades (Bolt. : Fr.) Fr. |
Si l’on parvient ici à reconnaître le faux mousseron ou marasme des Oréades (les Oréades sont des nymphes chasseresses des montagnes dans la mythologie grecque), l’illustration d’Aubriet présente quelques défauts. Les lames, en particulier, sont beaucoup trop serrées. Le chapeau aurait gagné à être nuancé de brun plus foncé, car on récolte très souvent des exemplaires de ce champignon en cours de déshydratation, et qui, par « hygrophanéité », montrent des zones contrastées dans la gamme des ocres. Ou bien, un exemplaire supplémentaire, plus imbu et donc plus foncé, aurait amélioré la qualité scientifique de la planche. Il y a finalement beaucoup de procédés systématiques ici, attestant une certaine négligence dans l’observation. Une petite « pseudo-volve » triangulaire apprimée apparaît sur le spécimen du haut, et la coupe, une fois de plus, fait voir un pied caricaturalement tubuleux. | Though one manages to recognize on this plate the fairy ring mushroom or fairy-ring mushroom (in Greek mythology, Oreades are nymphs of the mountains), Aubriet’s illustration has a few flaws. The gills, in particular, are far too crowded. The cap would have been better delineated if shaded with a darker brown, since this mushroom is often harvested in its dehydration stage and, due to its hygrophanous character, shows contrasted areas in the range of ochre. The representation of an additional stockier, thus darker, specimen would have improved the scientific quality of the plate. This plate shows many systematic processes that result in some oversight in the observation. A small appressed triangular “pseudo-volva” appears on the specimen at the top and the cross-section, once again, shows a grotesque tubular stipe. |
Planche / plate 57
Calocybe gambosa (Fr. : Fr.) Singer (en haut) ; | Calocybe gambosa (Fr. : Fr.) Singer (at the top) ;Panaeolus |
Il est difficile de ne pas reconnaître, ici, le célèbre mousseron de printemps, ou « tricholome de la Saint-Georges » (Calocybe gambosa). Le port trapu est parfaitement rendu par Aubriet, qui a su également mettre en évidence le caractère charnu de ce champignon (voir la coupe). Les lames sont finement exécutées, accompagnées d’ombrages très heureux. La zone brunâtre un peu trop grossièrement délimitée, que l’on observe sur la coupe, n’a rien de fictive, puisqu’il arrive fréquemment que la chair du mousseron, avec l’âge ou par corruption, brunisse ainsi par places. Ce champignon délicieux, qui voisine volontiers avec les morilles au printemps, est connu depuis le xvie siècle (au moins). Il dégage une agréable odeur de farine fraîche. La planche 5 illustre peut-être enfin de vieux spécimens de cette espèce. | Here it is difficult not to recognize the famous "St George’s mushroom" (Calocybe gambosa). Aubriet managed to illustrate perfectly the bulky appearance of this mushroom as well as its fleshy character (see its cross-section). The gills are finely executed, with excellent shadings. The brownish area, slightly too roughly delineated, that we observe on the cross-section is not fictitious since it often happens that the flesh of this mushroom, either with age or decay, turns brown in spots. This delicious mushroom that can grow near morels in the spring has been known since, at least, the 16th century. It has a pleasant farinaceous smell. Plate 5 might illustrate old specimens of this species. |
Planche / plate 58
Armillaria mellea (Vahl. : Fr.) Kummer | Armillaria mellea (Vahl. : Fr.) Kummer |
Avec cette espèce, c’était l’occasion ou jamais, pour Aubriet, de peindre de fortes « racines ». La planche représente manifestement l’armillaire couleur de miel, champignon qui vient en touffes énormes et dont le pied est prolongé par de puissants cordons mycéliens noirs (dits « rhizomorphes »), qui détruisent les arbres (même vivants), avec une violence assez prodigieuse. Si belle qu’elle soit, l’armillaire couleur de miel est un redoutable parasite. | This species gave Aubriet the opportunity to paint strong “roots”. The plate definitely represents a honey fungus, a mushroom that grows in large clusters and whose stipe is extended with strong black mycelial cords called rhizomorphs that destroy trees (even those in good health) with an amazing violence. Though pretty, the honey fungus is a terrifying parasite. |
Planche / plate 59
Entoloma lividum (Bull. : Fr.) Quél. | Entoloma lividum (Bull. : Fr.) Quel. |
Ce champignon peint par Aubriet est une belle espèce robuste, appétissante d’aspect mais… fortement toxique. Les lames, jaunes sur le spécimen coupé (jeune) et rosées sur le spécimen couché, montrent qu’Aubriet a su observer le changement de couleur de l’hyménophore avec l’âge, ce qui permet ici de reconnaître parfaitement l’entolome livide. Le pied robuste et renflé à la base est également caractéristique. En revanche, le chapeau est beaucoup plus surprenant : sa marge exagérément ondulée et festonnée paraît avoir frappé Aubriet, ainsi que le large mamelon central, délimité schématiquement par deux traits concentriques. | This mushroom, painted by Aubriet, is a nice strong species ; it is mouth-watering to look at but deadly poisonous. The gills, yellow on the cut specimen (young) and pinkish on the laid down specimen, show that Aubriet was able to observe the change in color of the hymenophore with age, which makes it possible to perfectly recognize here the livid pinkgill. The stipe, strong and bulky at the base, is also characteristic of the species. However, the cap is much more surprising : its margin, slightly sinuate and crenate, seems to have strongly caught Aubriet’s attention as well as the large central knob, roughly delineated by two concentric lines. |
Planche / plate 60
Amanita rubescens (Pers. : Fr.) S. F. Gray | Amanita rubescens (Pers. : Fr.) S. F. Gray |
Assurément, ici, une des plus belles planches de la collection. Tout (ou presque) est travaillé assez finesse. L’anneau, par exemple, apparaît très réaliste, avec ses ondulations. Même souci de « représenter ce que l’on voit » avec le chapeau, qui est fendu, plus ou moins profondément, en deux endroits. Le bulbe du pied est bien rendu, Aubriet n’ayant pas succombé à la tentation de le transformer en pseudo-volve imitant les oignons de liliacées. Il manque toutefois à cette illustration un élément essentiel : les vestiges du voile en flocons sur le chapeau. Car il ne fait aucun doute que le champignon figuré est l’amanite rougissante, ou golmotte (Amanita rubescens), qui comporte de nombreux flocons ou macules plus ou moins larges, crèmes ou grisâtres, sur l’ensemble de la surface piléique. Deux hypothèses : ou bien ces traces vélaires ont été lavées par la pluie (voir planche 41), ou bien Aubriet ne les a pas considérées avec précision. On devine (exemplaire en haut à droite) quelques panachures, effet que le peintre jugea peut-être suffisant pour rendre l’aspect floconneux du chapeau. En outre, bien que sur certaines récoltes de cette amanite, les teintes rouges (plutôt un vieux rose en vérité) ne soient vraiment visibles qu’à l’intérieur du pied (vers la base), il est dommage qu’elles ne soient pas plus accentuées ici. Ce caractère n’a probablement pas semblé important aux yeux d’Aubriet, puisque la vue en coupe ne considère que la moitié supérieure du champignon : une coupe de la base aurait nécessairement révélée ce roserougeâtre qui permet souvent à l’amateur de distinguer à coup sûr la golmotte, et de ne pas s’empoisonner avec l’amanite panthère (Amanita pantherina). | This is, without a doubt, one of the nicest plates of the collection. Everything (or almost everything) is executed with delicacy. The ring, for example, appears very realistic with its undulations. The same care in “representing what is seen” is brought in the illustration of the cap that is split, more or less deeply, in two spots. The bulb of the stipe is well designed and Aubriet did not succumb to the temptation of transforming it into a pseudo-volva or representing it as bulbs of liliaceaes. An essential element is missing, however, to this illustration : the remnants of the universal veil in patches on the cap. There is no doubt that this illustrated mushroom is the blusher (Amanita rubescens), a mushroom whose entire cap is covered with many offwhite or grayish patches or flakes of different sizes. Two possibilities exist : either these veil remnants were washed off by the rain (see plate 41) or Aubriet did not observe them with precision. On the specimen represented in the top right a few colored spots were painted in an effect that the artist thought would be enough to represent the flaky aspect of the cap. Furthermore, even though in some of these amanitas the red shades (light pinkish-brown in reality) are only visible inside the stipe (near the base), it is unfortunate that they were not more accentuated in this illustration. Aubriet probably did not consider this character as important since the cross-section only shows the upper half of the mushroom ; a cross-section of the base would have shown this pink-reddish color that often enables the mushroom amateur to recognize without a doubt the blusher and not be poisoned by the Amanita pantherina (panther cap, or false blusher). |
Planche / plate 61
Amanita muscaria f. aureola (Kalchbr.) Vesely ? | Amanita muscaria f. aureola (Kalchbr.) Vesely ? |
Tout le monde pourra reconnaître, ici, l’illustre amanite tuemouches (Amanita muscaria), le « champignon de Blanche Neige », avec cependant un mystère : l’absence des flocons blancs sur le chapeau, qui ont tant fait pour la véritable « mythologie » de cette espèce, et incidemment pour celle du monde des champignons. Nous sommes dans le même cas qu’avec l’amanite rougissante peinte sur la planche précédente. Les « points blancs » ont dû disparaître sous l’effet de la pluie (ce qui arrive assez souvent), à moins qu’Aubriet ne les ait pas jugés dignes d’être représentés. Pourtant, ils ne manquent pas sur la planche 68. Alors ?… Alors il se peut aussi qu’il s’agisse ici d’une des nombreuses formes de l’amanite tue-mouches, la forme aureola, au chapeau presque nu, et plus orangé que rouge. Mais il faut encore remarquer autre chose. Comparons les planches 60, 61 et 68. L’exemplaire couché, qui montre les lames, n’est-il pas étrangement similaire dans les trois cas ? Sur la planche qui nous occupe, une différence apparaît dans la figuration des lames : Aubriet a peint, entre le haut du pied et l’insertion des lames, une sorte de collerette qui exprime assez bien le caractère « libre » des lames (c’est-à-dire qu’elles ne touchent pas le pied). A ce détail près, les analogies sont troublantes. Cette observation ne nous permet pas de remonter aux méthodes précises de composition de l’artiste, elle confirme simplement le côté assez « systématiste » de ses procédés. | We can recognize in this illustration the famous fly agaric (or fly amanita) (Amanita muscaria), Snow-White’s mushroom, with, however, one mystery : the absence of white flakes on the cap. This absence is strange since the tell-tale spots have contributed so much to the “mythology” of this species and, as a result, to the mythology of the world of mushrooms. We are in the same situation as for the Blusher that was painted in the preceding plate. The “white dots” must have disappeared under the effect of the rain (an effect that happens often), unless Aubriet did not consider them worth of being represented. However, they are not missing on plate 68, so, why don’t they appear here ? Maybe it is one of the numerous varieties of the fly agaric, like the forma aureola, whose cap is almost devoid of any patch, and more orange than red. But there is more to notice. If we compare plates 60, 61, and 68, aren’t the laid down specimens whose gills are apparent all similar ? In plate 61, however, there is a difference in the representation of the gills : Aubriet painted, between the top of the stipe and the attachment of the gills, a ruffle that represents quite well the “free” character of the gills (which means that they don’t touch the stipe). Except for this detail, the similarities are disconcerting. This observation does not enable us to identify the specific methods of composition of the artist but it confirms the rather “systematic” character of his processes. |
Planche / plate 62
Agaricus xanthoderma Génevrier | Agaricus xanthoderma Génevrier |
Sans doute, ici, le chef-d’œuvre du recueil (avec la morille, planche 81). Aubriet n’a jamais fait preuve d’autant d’application, et son souci du détail se ressent partout. Le chapeau est ponctué par endroits, et l’on devine la présence de vers sous la chair. Pour une fois, le pied n’est pas représenté creux comme un tuyau. Sa moelle interne, délimitée par un tracé très réaliste, plus blanche que le reste, fait sentir sa consistance de guimauve. La couleur des lames est extrêmement juste, sans parler du jaune de la chair (teinte surtout concentrée dans la base du pied) qui confirme l’intuition, donnée par la forme légèrement tronconique du chapeau, qu’il s’agit là de l’agaric jaunissant (Agaricus xanthoderma). On regrettera seulement qu’Aubriet n’ait pas ajouté à sa composition un spécimen plus âgé, plus ouvert, qui aurait fait voir l’anneau particulier du champignon, ayant, dans sa partie inférieure, l’aspect d’une roue dentée. La notation de racines n’est pas gênante ici, puisque l’agaric jaunissant est souvent prolongé, à sa base, par quelques cordons mycéliens. Le pied, enfin, est ordinairement très bulbeux, mais ce caractère affecte une certaine variabilité (ou inconstance). | This plate is, without a doubt, the masterpiece of the catalogue (along with the morel on plate 81). Aubriet has never shown so much care as in this plate and his attention to detail is seen everywhere. The cap is underlined in some places, and one can even imagine the presence of worms under the flesh. For once, the stipe is not represented hollow as a pipe. The representation of its internal flesh, whiter than the other parts of the mushroom and delineated by a very realistic stroke, appears to be the consistency of a marshmallow. The color of the gills is very accurate as well as the yellow of the flesh (color mostly concentrated in the stem base) that confirms the assumption, based on the flattened top of the cap, that this mushroom is a yellow stainer (Agaricus xanthoderma). It is regrettable that Aubriet did not add an older specimen to his illustration ; it would have shown the unique skirt-like ring of this mushroom. The roots are not problematic here since the yellow stainer is often extended by a few basal mycelial threads. Finally, the stipe is usually very bulbous but this character is variable (or inconsistent). |
Planche / plate 63
Agaricus silvicola (Vitt.) Peck | Agaricus silvicola (Vitt.) Peck |
Nous renvoyons le lecteur à nos commentaires de la planche 39. Signalons simplement que la disposition des spécimens sur la planche est différente. | Refer to our comments on plate 39. Of note is that the layout of the specimens on the plate is different. |
Planche / plate 64
Agaricus xanthoderma Génevrier ( ?) | Agaricus xanthoderma Génevrier (?) |
Planche à mettre en regard de la planche 62, puisque le champignon figuré est probablement le même. Ici, il s’agit d’une sorte de version caricaturée de l’agaric jaunissant peint sur la planche 62 : la forme, notamment, apparaît schématique, sinon « géométrique » (cercles sur le chapeau par exemple). Les deux exemplaires du bas, l’un couché, l’autre en coupe, sont toutefois bien meilleurs, et pourraient venir compléter la planche 62 avec bonheur. Reste que l’anneau — si l’espèce est bien xanthoderma — n’est pas représenté de manière satisfaisante : l’aspect « roue dentée » échappe sur le petit spécimen couché (en haut), et l’âge a déjà fait son oeuvre sur l’exemplaire adulte, l’anneau étant replié et plissé, près de « mourir » sur le pied. | This plate should be compared to plate 62 since the mushroom illustrated on this plate is probably the same one. It is a grotesque version of the yellow stainer that was painted on plate 62. The shape appears roughly outlined and almost “geometric” (circles on the cap, for example). Both specimens at the bottom, one laid down, the other one in cross section, are, however, much better done and could positively complement plate 62. Though the ring — if the species is indeed a xanthoderma— is not represented accurately : the dentate “skirt like” quality is missing on the small specimen that is laid down (at the top) and the adult specimen has already lost its unique character since the ring is incurved and wrinkled and ready to “die” on the stipe. |
Planche / plate 65
Amanita phalloides (Vaill. : Fr.) Link | Amanita phalloides (Vaill. : Fr.)Link |
Illustration « historique » du célèbre champignon mortel. L’amanite phalloïde apparaît pour la première fois, à la même époque et également sous le trait d’Aubriet, dans le Botanicon parisiense de Vaillant (tab. XIV, fig. 5). Mais il s’agit d’une gravure en noir et blanc, figurant un exemplaire particulièrement petit et très schématique. Ici, nous avons la couleur (l’olivâtre du chapeau est très juste), des spécimens jeunes et adultes, de dimensions normales. La volve est malheureusement trop « métamorphosée » en partie végétale : on croirait vraiment voir un bulbe de tulipe, avec ce sommet fendu en deux. Peu de critiques à formuler pour le reste. On regrettera néanmoins qu’Aubriet n’ait pas peint un très jeune exemplaire, encore enveloppé dans la volve. | This is the “Historical” illustration of the famous lethal mushroom. The death cap appeared then for the first time, represented as well by Aubriet in Vaillant’s Botanicon parisiense (tab. XIV, fig. 5). But Vaillant’s edition featured a black and white engraving of a particularly small and very roughly delineated specimen. Here we have the right color (the olive greenish of the cap is accurate), young and adult specimens, and normal dimensions. The volva features, unfortunately, too many plant attributes in this representation : it looks like a tulip bulb with its split top. No further critique to add. It is regrettable that Aubriet did not illustrate a very young specimen, still wrapped in the volva. The note in pencil : “Agaricus amanita phalloides Bull.” is strange since Bulliard (1780-1795, pl. 2) represented the death cap under the name of “agaricus bulbosus” and simply copied Vaillant’s description (“Fungus phalloides, annulatus, sordide virescens et patulus”). The terminology “amanita” does not appear here. |
Planche / plate 66
Agaricus (?) sp. | Agaricus ( ?)sp. |
Cette planche est très étrange. Aubriet a peint un champignon qui n’existe pas, puisqu’il s’agit, si l’on veut, d’un agaric (Agaricus) déguisé en amanite phalloïde, ou d’une amanite phalloïde déguisée en agaric… Les lames brunes signent l’agaric, mais la volve ainsi que les couleurs vert-olive du chapeau signent l’amanite. On se demande bien quelle logique a soutenu l’exécution de cette planche. Il est probable qu’Aubriet ait eu en mains un agaric (étant donnée la couleur des lames, qui sont blanches chez l’amanite phalloïde), et qu’il lui ait ajouté une volve (d’aspect encore végétal), pour une raison bien mystérieuse. Peut-être le récolteur lui a-t-il dit, par confusion avec des amanites qui se trouvaient là (à Boulogne), que le champignon portait une volve, et que celle-ci a certainement disparu lors du trajet ? | This plate is very strange. Aubriet painted a mushroom that does not exist since it is, or seems to be, an agaricus dressed up in a death cap or a death cap dressed up in an agaricus. The brown gills reflect an agaricus but the volva and the olive green color of the cap are from an amanita. One wonders about the rationale behind the execution of this plate. It is probable that Aubriet held an agaricus (based on the color of the gills that are white in the death cap) and then he added a volva (reminiscent of a plant attribute) for a mysterious reason. Perhaps the harvester told him, as he was confused by amanitas that he also found in Boulogne, that the mushroom had a volva and that the volva was lost during transportation. |
Planche / plate 67
Amanita citrina (Sch. : Fr.) S. F. Gray | Amanita citrina (Sch. : Fr.) S. F.Gray |
Aubriet n’est évidemment pas l’auteur de cette planche d’assez mauvaise facture. Antoine-Laurent de Jussieu n’est pas sûr qu’elle représente l’amanite phalloïde (sa note recopie, avec un point d’interrogation, la diagnose de Vaillant relative au champignon funeste), et il a raison de douter, puisque les spécimens peints sont des amanites citrines (Amanita citrina). L’amanite citrine a d’ailleurs longtemps été confondue avec l’amanite phalloïde, au point qu’il fallut démontrer, au xxe siècle, lors d’un banquet organisé par la Société mycologique de France, que l’amanite citrine, sans être fameuse (elle sent le radis), n’est absolument pas toxique. | It is obvious that Aubriet is not the author of this rather bad plate. Antoine-Laurent de Jussieu was unsure that it represented a death cap (his annotation restates Vaillant’s description of the mushroom but with a question mark) and he was right to doubt since the illustrated specimens are citron amanitas (Amanita citrina). The citron amanita has been mistakenly mixed up for a long time with the death cap. This confusion persisted to such an extent that it became necessary to prove, in the 20th century during a banquet organized by the Mycological Society of France, that the citron Amanita, even though not very tasty (it smells like radishes) is absolutely not toxic. |
Planche / plate 68
Amanita muscaria (L. : Fr.) Hooker | Amanita muscaria (L. : Fr.) Hooker |
Cette fois-ci (voir planche 61), Aubriet n’a pas oublié les flocons blancs qui parsèment le chapeau de l’amanite tuemouches. Ce champignon, qui fascine tant les enfants, est presque peint ici de manière enfantine. Les « points blancs » sont répartis avec une régularité mathématique (effet de « progression géométrique » du centre vers les bords), et le rouge utilisé est approximatif, beaucoup trop carminé. Il y a plus de rigueur dans la coupe et la représentation du pied et des lames (exemplaire couché). Cependant, le bulbe de l’amanite tue-mouches n’a rien de lisse : il est toujours formé de plusieurs strates de créneaux ou de squames, l’ensemble composant un bourrelet d’apparence complexe. Sur les planches 69 et 70, Aubriet a fait un effort pour représenter correctement cette partie. | This time (see plate 61) Aubriet did not forget to illustrate the white warts that cover the cap of the fly agaric (or fly amanita). This mushroom that fascinates children so much is painted here in an almost childish way. The “white dots” are spread over the cap in a mathematic regular pattern (with an effect of geometric progression from the center towards the margin) and the red used here is approximate and far too carmine. The cross section and the representation of the stipe and of the gills (laid down specimen) are more rigorously delineated. However, the bulb of the fly agaric is usually not smooth : it always features concentric zones of shagginess or scales that give the appearance of a complex collar-like roll. On plates 69 and 70 Aubriet put more effort into representing this part accurately. |
Planche / plate 69
Amanita muscaria (L. : Fr.) Hooker | Amanita muscaria (L. : Fr.) Hooker |
Ressemble assez à l’illustration précédente, mais avec un peu plus de réalisme. Ici, la teinte du chapeau est exacte, et le bas du pied comporte quelques anneaux superposés qui schématisent correctement l’aspect complexe de la volve. Par contre, l’anneau, qui se situe souvent vers le tiers supérieur du pied, a totalement disparu… | This plate is similar to plate 68, but it is more realistic. Here the color of the cap is accurate and the base of the stipe shows several overlaid concentric zones that reflect with accuracy the complex aspect of the volva. However, the ring, which is often located in the upper third of the stipe, is notre presented. |
Planche / plate 70
Amanita muscaria (cf. var. flavivolvata (Singer) D.T. Jenkins) | Amanita muscaria (cf. var. flavivolvata (Singer) D. T. Jenkins) |
Encore une amanite tue-mouches, peut-être ici une variété, en raison de la teinte jaune des flocons sur le chapeau, qui se retrouve d’assez nombreuses formes de cette amanite à voile ainsi coloré. Aubriet a peint, juste au-dessus du bulbe basal, des sortes de zigzags qui ressemblent malheureusement plus à des fibrilles (de cortinaires particulièrement) qu’à des créneaux ou à des squames. L’anneau, ici encore, est mystérieusement absent, mais la composition, artistiquement parlant, mérite des éloges, pour sa délicatesse et sa précision. | Based on the yellow color of the warts, which are found on numerous varieties of this amanita that also features a yellow-colored universal veil, we have here a variety of a fly agaric (or fly amanita). Aubriet painted, right above the basal bulb, wriggles that, unfortunately, look more like fibrils (in particular of cortinaria) than notches or scales. Here again, the ring is mysteriously lacking but the composition, artistically speaking, deserves some credit for its delicate execution and its precision. |
Planche / plate 71
Amanita pantherina (DeCand. : Fr.) Krombholz (en haut) ; Xerocomus subtomentosus (L. : Fr.) Quélet (en bas) | Amanita pantherina (DeCand. : Fr.) Krombholz (at the top) ; Xerocomus subtomentosus (L. : Fr.) Quélet (at the bottom) |
Cette planche soigneusement réalisée figure deux champignons aisément reconnaissables : l’amanite panthère (Amanita pantherina) et un bolet du genre Xerocomus (très probablement X. subtomentosus, dont les teintes rosées et le léger bleuissement de la chair sont bien rendues). | This delicately executed plate illustrates two mushrooms easy to recognize : the panther cap (or false blusher) (Amanita pantherina) and a bolete from the Xerocomus genus (probably a X. subtomentosus, whose pinkish shade and light blue flesh are well conveyed). |
Planche / plate 72
Crepidotus mollis (Sch. : Fr.) Staude | Crepidotus mollis (Sch. : Fr.) Staude |
Très belle illustration d’un champignon commun, Crepidotus mollis, correctement identifié et présenté, avec son substrat (un gros morceau de bois, peut-être une poutre) sous son aspect typique. L’auteur n’a pas su mettre en évidence la pellicule gélatineuse caractéristique qui recouvre le chapeau et qui distingue cette espèce des autres Crepidotus, mais les dimensions et les couleurs sont exactes. Néanmoins, les ombrages gris un peu trop abondants, qui donnent une qualité esthétique certaine à cette planche, nuisent à la qualité scientifique : en dehors de la partie plus jaune autour de l’insertion sur le support, la couleur réelle du chapeau (gris clair un peu translucide) est difficile à distinguer des ombrages. | A very nice illustration of a common mushroom, a Crepidotus mollis, accurately identified and illustrated with its substrate (a large piece of wood, maybe a hardwood log). The artist was not successful in representing the characteristic gelatinous cuticle that covers the cap and separates it from the other Crepidotus but the dimensions and the colors are accurate. There are, however, too many grey shades in this representation ; even though they add to the aesthetic of the plate, they are harmful to its scientific quality ; except for the yellow part around the attachment of the mushroom to the stem, the real color of the cap (pallid to cream) is difficult to separate from the shades. |
Planche / plate 73
Lactarius piperatus (Scop. : Fr.) Pers. | Lactarius piperatus (Scop. : Fr.) Pers |
Sur cette planche techniquement satisfaisante, un Lactarius est figuré par deux spécimens entiers, l’un dressé, l’autre couché, et par une coupe longitudinale, selon l’assemblage classique. | This technically satisfying plate illustrates two whole specimens of a Lactarius, one up and one laid down, and a cross section as per the regular layout we have seen in many plates so far. |
Planche / plate 74
Hygrophorus eburneus (Bull. : Fr.) Fr. | Hygrophorus eburneus (Bull. : Fr.) Fr. |
Cette esquisse figure un champignon bien reconnaissable, blanc pur, à pied atténué en pointe, à lames décurrentes espacées et chapeau convexe, fréquent dans les hêtraies : Hygrophorus eburneus. Il n’a pas été légendé. La technique est approximative : les contours et les traits figurant les lames débordent, les bordures sont crayonnées, et les ombrages gris au lavis sont assez grossiers. Il s’agit apparemment d’un essai de technique encore mal maîtrisée ou inachevée. On notera que l’assemblage des spécimens (trois en « touffe » et un en coupe longitudinale en dessous) est inhabituel et disharmonieux ; en revanche les bases de pied sont réalistes, sans trace de racine ou de motte de terre imaginaire. | This sketch illustrates an easily recognizable mushroom of a pure white with a tapered stipe, distant decurrent gills, and a convex cap. Widely distributed in beech groves, it is Hygrophorus eburneus. It was not captioned. The technique is rough : the outlines and the lines that illustrate the gills go beyond the margin, the edges are penciled, and the grey wash shades are rather roughly done. It looks like a first trial at a new technique not yet mastered or unfinished. Of note is the unusual and disharmonious layout of the specimens (three in “cluster” and one in cross-section from below). The bases of the stipe are, however, true to nature and without any trace of root or fictitious soil clods. |
Planche / plate 75
Galerina sp. | Galerina sp. |
Une représentation très approximative d’une petite espèce à lames brun-jaune, certainement un Galerina, en touffe de sept spécimens dont deux sont renversés opportunément pour figurer le dessous du chapeau. Les stries du chapeau, qui correspondent aux lames vues par transparence, sont représentées par des traits de pinceau peu distincts, surtout visibles sur le gros chapeau du milieu. Le substrat, sous forme d’un « tapis » vert ressemblant à une algue rayonnante, est purement artistique : les Galerina ayant cet aspect poussent parmi les mousses dans les pelouses. La petite taille de cette espèce (figurée grandeur nature sur une grande page vide a sans doute empêché l’illustrateur d’accentuer la précision des détails avec la technique de gouache utilisée. | Here is a very rough representation of a small species with brown-yellow gills, probably a Galerina, in a cluster of seven specimens, two of which are turned upside down to illustrate the underside of the cap. The striates on the cap that correspond to the gills seen in transparency through the cap are represented by brush strokes not very easy to locate ; they are mostly visible on the large cap in the middle. The substrate, represented by a green “carpet” that looks like shiny seaweed, is merely artistic : Galerinas grow on moss in lawns. The small size of this species, represented full-scale on a large empty sheet, probably prevented the artist from outlining the details with the gouache technique that he used. |
Planche / plate 76
Mycena sp. | Mycena sp. |
Seize champignons formant une touffe dense, à la manière de Mycena inclinata. La qualité de cette représentation est médiocre à tous points de vue : les lames sont à peine esquissées sur un spécimen à droite, le chapeau est cerclé d’un cerne noir qui n’existe chez aucun Mycena, et le substrat (sans doute du bois) est lui-même très peu figuratif. Ici, comme pour le précédent, la technique de la gouache n’est pas adaptée à l’illustration des très petites espèces choisies par l’auteur. | Here sixteen mushrooms that form a dense cluster like a Mycena inclinata are represented. The quality of this representation is mediocre in all aspects : the gills are barely sketched on the specimen on the right, the cap shows a concentric black line that does not exist in a Mycena, and the substrate (probably wood) is hard to recognize. Here, as in plate 75, the gouache technique is not suitable for the very small species that the artist chose. |
Planche / plate 77
Clitocybe, Lepista sp. (??) | Clitocybe, Lepista sp. (??) |
Cette planche figure un unique spécimen incomplet, au pied coupé en biseau, dessiné entier de profil (en haut) et en coupe longitudinale (en bas). Les traits fins qui figurent les contours et les lames du champignon sont peu précis, mais on note le caractère fortement décurrent des lames (blanches), l’excentricité du pied, et la couleur gris-beige délavé identique sur le chapeau et le pied. La coupe montre que la chair est également colorée et que le chapeau n’est pas creusé, caractère inhabituel pour les espèces à lames décurrentes. | This plate shows a unique unfinished specimen with a beveled stipe represented whole sideways (at the top) and in cross section (at the bottom). The thin lines that outline the mushroom and its gills are not sharply delineated but the strong decurrent character of the gills (white) is noticeable as well as the eccentricity of the stipe and the washed greycream color of both the cap and the stipe. The cross section shows that the flesh is also colored and that the cap is not hollowed, which is an unusual character for decurrent gilled species. |
Planche / plate 78
Macrolepiota procera (Scop. : Fr.) | Macrolepiota procera (Scop. :Fr.) |
Cette planche spectaculaire représente très explicitement Macrolepiota procera, un champignon comestible populaire aux nombreux noms vernaculaires (coulemelle, nez-dechat, Saint-Michel, etc.). Le chapeau est très fidèlement représenté, couvert d’écailles imbriquées avec une calotte centrale lisse ; les pieds sont bien représentés, chinés par des zébrures. Deux spécimens sont représentés en couleur, debout : un jeune (en haut à droite) et le spécimen central. Un spécimen couché en arrière-plan, non colorié, illustre la complexité de l’anneau typique de l’espèce ; toutefois l’illustrateur augmente artificiellement cette complexité avec deux couches de « dents de scie » au-dessus de la collerette principale, et une jupe supplémentaire en-dessous, qui n’existent pas dans la réalité. | This amazing plate clearly represents a Macrolepiota procera, a popular edible mushroom that has many vernacular names – in French – (in English, it is called a parasol mushroom). The cap is faithfully represented as covered with scales and with a smooth central bump ; the stipes are well represented, marbled with stripes. Two specimens are represented in color : a young standing specimen (in the top right) and the specimen at the center. Another specimen, laid down in the background and without color, illustrates the complexity of the typical ring of the species. However, the artist artificially emphasized this complexity with two saw-toothed rings above the main skirt-like ring and an additional skirt below, which don’t exist in reality. |
Planche / plate 79
Xerula radicata (Relhan : Fr.) Dörfelt | Xerula radicata (Relhan : Fr.) Dörfelt |
L’espèce illustrée ici par un spécimen central et par deux détails : chapeau vu de dessus et coupe du chapeau, est figurée de manière simple mais suffisamment précise pour que l’on y reconnaisse Xerula (Oudemansiella) radicata, un champignon fréquent caractérisé par son pied longuement radicant et sa couleur beige bien rendue. Les rides radiales du chapeau typiques de l’espèce sont figurées par des traits mais rendent bien l’impression d’ensemble que donne le champignon. Les lames, épaisses et espacées, n’ont pas attiré l’attention de l’illustrateur qui les dessine de manière ordinaire, fines et serrées ; en coupe elles sont parfaitement illustrées adnées et larges. Néanmoins le spécimen semble avoir été figuré tel qu’il est apparu à l’illustrateur, fidèlement car aucun caractère imaginaire n’a été ajouté ! | The species illustrated on this plate with one central specimen and two illustrations of details – cap from above and in cross section– is presented in a simple, yet detailed, way. These illustrations enable its identification as a Xerula (Oudemansiella) radicata, a common mushroom characterized by its long, radicant stipe and its cream color, which are well conveyed in this representation. The radial wrinkles of the cap, typical of this species, are delineated here with lines ; however, they convey the general idea of what this mushroom looks like. The gills, thick and distant, did not impress the artist, since they are delineated in an ordinary way, thin and crowded ; in the cross section, they are perfectly represented as adnate and wide. Nevertheless, the specimen seems to have been delineated faithfully to the model since no fictitious character was added to the representation ! |
Planche / plate 80
Marasmius rotula (Scop. : Fr.) Fr. | Marasmius rotula (Scop. : Fr.) Fr. |
Le petit champignon illustré en grand nombre sur ce dessin pose quelque problème d’identification. Son chapeau très cannelé en « petite roue » avec un centre déprimé bien délimité (peut-être exagérément sur le gros spécimen central), et les lames, très visibles sur le spécimen penché à droite, sont bien espacées, sans lamellules ni fourches, et séparées du pied par un petit bourrelet (pseudocollarium) sont typiques de Marasmius rotula, une espèce très commune, mais qui possède un pied noir sur toute sa longueur ou presque. Aubriet précisant qu’il s’agit d’un champignon entièrement blanc, et s’attachant même à dessiner à la base du pied un petit disque aplati, on ne peut reconaître qu’une espèce moins commune et plus discrète, Mycena stylobates, qui se reconnaît assez bien dans les spécimens en gros plan. | The small mushroom illustrated here in large numbers presents a problem of identification. Its cap, pleated like a “small wheel” with a very well delimited sunken center (maybe too much on the large specimen in the center), and the gills, very visible on the specimen bent on the right, shown distant, without any lamellulaes or forks and attached to the stem by a tiny “collar” are typical of a Marasmius rotula. Marasmius rotula is a very common species that also features a stipe of black color either on its whole length or almost all of it. Since Aubriet specified that it is an almost entirely white mushroom and even drew at the base of the stipe a small flat disk, one recognizes, especially in the close-up specimens, a less common and more discreet species : a Mycena stylobates. |
Planche / plate 81
Morchella vulgaris (Pers. : Fr.) Boud. | Morchella vulgaris (Pers. : Fr.) Boud. |
Cette planche représente deux spécimens d’un champignon comestible bien connu, la morille commune (Morchella vulgaris), illustrant deux aspects du champignon. Le premier (en haut), représenté en couleur, penché en noir et blanc, et en coupe longitudinale en-dessous, est difforme, sans doute mal développé, sous un aspect cérébriforme peu typique (voir nos commentaires ci-dessous) ; toutefois les lobes et circonvolutions sont particulièrement bien rendues. Le spécimen inférieur, jeune et parfaitement conformé, est bien dessiné avec ses alvéoles irrégulières à côtes blanches, et la coupe illustre parfaitement les alvéoles et la cavité centrale. Les bases de pied sont chaussées d’une motte de terre d’où émergent les radicelles imaginaires, mais l’ensemble n’est pas incohérent. Seul le spécimen penché en haut à droite se voit chaussé de bourrelets imitant une volve, qui ne se retrouvent pas sur les deux autres vues du même champignon. | This plate represents two specimens of the famous morel (Morchella vulgaris) and illustrates two aspects of this mushroom. The first one (at the top), represented in color, bent in black and white, and as a longitudinal cross section from below, is deformed, probably improperly developed, and has a non-typical cerebriform aspect (see our comments below). However, the lobes and circumvolutions are particularly well represented. The lower specimen, young and perfectly shaped, is well delineated with its irregular pits and white ridges and the cross section perfectly illustrates the pits and the central cavity. The stipe bases are wrapped with a soil clod from which fictitious fibrous roots emerge, but the whole representation is not completely incoherent. Only the bent specimen on the top right is featured with wrapping rolls reminiscent of a volva, which we don’t find on the other two figures of the same mushroom. |
Planche / plate 82
Bulgaria inquinans (Pers. : Fr.) Fr. | Bulgaria inquinans (Pers. : Fr.) Fr. |
Il s’agit ici d’une planche remarquablement réussie, malgré l’aspect peu engageant du champignon. L’espèce, actuellement nommée Bulgaria inquinans, est parfaitement observée, des plus jeunes spécimens en groupes dressés à surface extérieure brun-ocre rugueuse, aux vieux pulvinulés à surface fertile noir brillant. Le champignon pousse typiquement sur les branches et troncs de chêne fraîchement coupés ; le support, ici une branche à écorce presque lisse évoquant du hêtre, a sans doute été reconstitué par l’illustrateur. | This plate is strikingly well done in spite of the not very engaging appearance of the mushroom. The species, currently named Bulgaria inquinans, was perfectly observed, both the younger specimens represented in clusters with their scaly brown-ochre outer surface and the old, black, and shiny pulvinular specimens. The mushroom typically grows on branches and freshly cut oak logs ; the support, here, is a branch whose smooth bark is reminiscent of a beech tree and was probably recreated by the artist. |
Planche / plate 83
Otidea alutacea (Pers. : Fr.) Mass. ( ?) | Otidea alutacea (Pers. : Fr.) Mass. ( ?) |
Le champignon peint ici par Aubriet est franchement curieux. Le chapeau semble creusé en une coupe un peu allongée, parcourue de veines grossières, les bords étant onduleux à lobés. Le pied est tout à fait irréel, avec sa spectaculaire garniture de fins filaments que seuls les végétaux peuvent posséder. On observe de surcroît, entre le chapeau et le pied, une espèce de bourrelet annuliforme grisâtre, absent sur la vue de coupe. La teinte générale se situe dans les gris-brun, l’alutacé pâle, avec une très légère touche de rose. De quoi s’agit-il ? La forme étirée de la « chose » oriente vers le genre Otidea, et la couleur cuir pâle, vers l’espèce alutacea. Les Otidées sont des champignons appartenant au phylum des ascomycètes, qui comprennent la morille ou l’helvelle crépue, magnifiquement peints par Aubriet dans ce recueil (pl. 21bis, 25, 81). L’espèce la plus commune (et la plus connue) de ce genre, est l’« oreille de lièvre » (Otidea onotica), dont le chapeau, entièrement fendu d’un côté et très allongé, évoque effectivement beaucoup, à l’âge adulte, une oreille de lièvre. L’analogie tombe un peu à plat avec l’Otidea alutacea, dont la silhouette est nettement plus ramassée. L’espèce pousse à terre, sous les feuillus, et n’est pas très fréquente. Comme l’oreille de lièvre, elle est parfaitement insipide et ne présente pas le moins intérêt sur le plan culinaire. | This mushroom, painted by Aubriet, is definitely strange. The cap seems depressed in a slightly elongated cuplike shape, covered with rough veins, and with wavy to lobed edges. The stipe is surreal with its spectacular trimming of fine filaments that only plants can have. Of further note is, between the cap and the stipe, a grey ring-shaped roll, which is absent on the cross section. The general shade is between grey-brown and pale alutaceous with a very light touch of pink. What is it ? The elongated shape of the “thing” leads us towards the Otidea genus and the alutaceous color towards the alutacea species. The Otideas belong to the ascomycota phylum which includes the morel or white saddle (or elfin saddle, or common helvel), magnificently painted by Aubriet in this catalogue (plates 21bis, 25 and 81). The most common species (and the most famous) of this genus is the rabbitear (Otidea onotica) whose cupshape body, entirely split down one side and very elongated, is indeed reminiscent, when mature, to a rabbit ear. There is no such analogy for the Otidea alutacea whose shape is far stockier. The species grows on the ground, under deciduous trees, and is not widely distributed. Like the rabbit-ear, it is tasteless and not of culinary interest. |
Planche / plate 84
Daedalea quercina (L. : Fr.) Fr. | Daedalea quercina (L. : Fr.) Fr. |
Cette belle planche illustre trois spécimens : les deux de gauche sont illustrés en vue de dessus, celui de droite est figuré de dessous tout en laissant adroitement voir une coupe verticale. | This beautiful plate illustrates three specimens : the two on the left are illustrated from above, the one on the right from below, while still skillfully showing a lengthwise vertical cross section. |
Planche / plate 85
Gloeophyllum trabeum (Pers.) Murrill | Gloephyllum trabeum (Pers.) Murrill |
Cette planche, beaucoup moins réussie que la précédente, représente une poutre attaquée par trois spécimens de « polypores », vue sous deux angles : par-dessus montrant la surface supérieure stérile zonée, et pardessous montrant, sur les deux spécimens de gauche, un hyménophore schématisé, apparemment rayonnant mais à lames anastomosées, telles qu’on le rencontre dans le genre Gloeophyllum. Les espèces de ce genre attaquent préférentiellement les bois d’œuvre, le support est donc ici réaliste et probablement dessiné d’après nature. Le spécimen de droite, en vue de dessous, reste néanmoins excessivement schématique et ne semble illustrer que la forme lobée des chapeaux ; on ne peut que supposer qu’il s’agit bien de la même espèce que les autres. | This plate, definitely not as nicely done as the former one, represents a log attacked by three specimens of “polypores” seen under two angles : from above, showing the sterile upper surface, and from below, showing, on the two specimens on the left, a schematized radiating hymenophore with fusing gills as found in the Gloeophyllum genus. Species belonging to this genus grow on timber so the support on this illustration is realistic and probably drawn from nature. The specimen on the right, seen from below, remains, however, excessively schematic and only illustrates the lobed shape of the caps ; one can only assume that it is the same species as the others. |
Planche / plate 86
Ganoderma lucidum (Link. : Fr.) Karsten | Ganoderma lucidum (Link. : Fr.) Karsten |
Il s’agit d’une belle blanche, très réussie et parfaitement explicite, d’un polypore associé au chêne et au châtaignier : Ganoderma lucidum, caractérisé par sa croûte rouge luisante, ses pores blancs et surtout son pied latéral dressé. Ce dessin est fidèle dans ses moindres détails, y compris – et c’est une exception dans l’œuvre d’Aubriet – par les bases de pied coupées mais ni boursouflées ni ornées de radicelles. | This is a very nice plate, well executed and perfectly explicit, of a polypore that is typically found on oak and chestnut trees : Ganoderma lucidum. It is characterized by its shiny red crust, its white pores, and especially its standing lateral stalk. This drawing is faithful to reality in all its details, including – and this is an exception in Aubriet’s work– in the representation of the bases of cut stipes, which are neither inflated nor ornamented with fibrous roots. |
Planche / plate 87
Hydnum repandum L. : Fr. | Hydnum repandum L. :Fr. |
Cette planche très explicite illustre un champignon célèbre, le « pied-de-mouton », connu depuis l’antiquité, mais qui n’acquiert sa définition définitive que tardivement, avec J. B. Bulliard (1780-1795, pl. 172) et C. H. Persoon (1801, vol. 2, p. 499). Tous les détails de la planche sont exacts ; on retrouve néanmoins un effet d’ombrage assez curieux au centre du chapeau, déjà observé sous la forme d’un disque beaucoup plus délimité sur diverses planches de champignon à chapeau lisse et déprimé. On notera, comme à l’habitude, la base chaussée d’une motte de terre trop consistante et de radicelles végétaux. | This very explicit plate illustrates a famous mushroom, the "wood hedgehog" (or “hedgehog mushroom”), known since Antiquity, but that received its definitive definition only later from J. B. Bulliard (1780-1795, pl. 172) and C. H. Persoon (1801, vol. 2, p. 499). All the details on the plate are accurate ; however, we find again a rather strange shade effect in the center of the cap that we already observed as a much more delineated disk on different plates of mushrooms with depressed and smooth cap. Of note, as usual, is the base wrapped in a too heavy earth clod and fibrous roots. |
Planche / plate 88
Hydnum repandum L. : Fr. | Hydnum repandum L. :Fr. |
Cette planche est une reprise à l’identique de la précédente, à la plume et à l’encre ; trois spécimens (deux entiers et une coupe) sont coloriés en crème-jaune conforme à la couleur habituelle de l’espèce, sauf les aiguillons sous le chapeau dont la teinte semble un peu exagérée. | This plate is a reproduction of plate 87 in pen and ink ; three specimens (two whole and one cross section) are colored in pale orange-tan color, which is the usual color of the species, except for the spines under the cap whose shade seems to be slightly exaggerated. |
Planche / plate 89
Hericium (Creolophus) cirrhatum (Pers. : Fr.) Nikol. | Hericium (Creolophus) cirrhatum (Pers. : Fr.) Nikol. |
La planche est curieuse à plusieurs égards. Le champignon figuré par Aubriet a subi une véritable extraction : l’espèce possède en effet un pied latéral, qui la fixe au support, mais cet appendice charnu (d’ailleurs relativement court) est ancré à l’intérieur du tronc, si bien que seule la masse d’aiguillons est ordinairement visible. L’exemplaire peint est par ailleurs fort avancé en âge, car les aiguillons sont nettement roussâtres, signe typique de corruption pour ce type de champignon. Enfin, l’arbre figuré serait un hêtre, au vu de l’aspect plutôt lisse du tronc. Mais Aubriet a curieusement peint, à côté de celui-ci, trois feuilles… de chênes. | The plate is strange for various reasons. The mushroom that Aubriet represented went through an extraction process : the species has a lateral stipe that connects it to its support, but this fleshy appendage (also rather short) is connected to the inside of the trunk in such a way that, usually, only the spiny surface is visible. The painted specimen is also quite mature since the spines are reddish brown, a typical sign of decay in this kind of mushroom. Finally, the tree represented seems to be a beech tree, based on the rather smooth aspect of the trunk ; but Aubriet curiously painted three oak leaves next to it. These observations make it easy to conclude that Aubriet did not execute his plate from nature. The mushroom that the harvester literally tore from the tree was probably brought to him as is. The artist obviously did not receive any information on the location of the basidiome on the trunk and only very vague information on the kind of tree where the mushroom was harvested. Imagination thus played its role in the execution of this plate, which is unfortunate because the technical execution is well done. |
Planche / plate 90
Fistulina hepatica (Schaeff. : Fr.) With | Fistulina hepatica (Schaeff. : Fr.) With |
Cette très belle planche illustre, sans l’ombre d’un doute, un spécimen de la célèbre « langue-de-bœuf » (Fistulina hepatica), espèce en forme de polypore présentant une chair curieusement veinée comme un muscle, une surface supérieure papillée, et des tubes (non soudés entre eux) à la face inférieure ; ce champignon pousse en parasite à la base des chênes et des châtaigniers. Tous ces caractères se retrouvent dans cette planche, qui présente un même spécimen en vue de dessus, de dessous et en coupe longitudinale, avec une finesse d’illustration comparable aux meilleures planches de la fin du xixesiècle. | This very beautiful plate illustrates, without a doubt, a specimen of the famous "beefsteak fungus" or “ox tongue” (Fistulina hepatica). The species is in the shape of a polypore with a flesh curiously streaked with veins like a muscle, an upper velvety surface, and tubes distinctly separated on the pore surface ; this mushroom is a parasite that grows at the base of oak and chestnut trees. All these characters can be found on this plate, which illustrates the same specimen from above, beneath, and as a cross section with a refinement that is reminiscent of the best plates of the end of the 19th century. |
Planche / plate 91
Polyporus squamosus (Huds. : Fr.) Fr. | Polyporus squamosus (Huds. : Fr.) Fr. |
Ce dessin se présente comme une esquisse un peu hâtive, mais malgré cela Aubriet représente très explicitement un champignon assez commun et spectaculaire, le polypore écailleux (Polyporus squamosus), dont tous les caractères visibles sont représentés. Il est évident que l’illustrateur avait en main le modèle en parfait état ; on observe ainsi le pied court avec quelques ceintures d’écailles à la base, les tubes décurrents et remarquablement alvéolés, de plus en plus étroits vers la marge, la marge courtement enroulée, et bien sûr le chapeau couvert d’écailles imbriquées apprimées bien visibles sur le gros spécimen en haut à gauche. | This drawing looks like a rather rough sketch ; however, Aubriet did illustrate very explicitly a rather common and spectacular mushroom, the dryad’s saddle (or pheasant back) (Polyporus squamosus), whose visible characters are represented. It is obvious that the artist had, in hand, a specimen in perfect state ; one can observe the short stem with a few scaly rings at the base, the decurrent and remarkably alveolate tubes that become narrower towards the margin, the shortly incurved margin, and, of course, the cap covered with appressed and radially arranged scales, which are clearly visible on the large specimen at the top left. |
Planche / plate 92
Auricularia mesenterica (Dicks. : Fr.) Pers. | Auricularia mesenterica (Dicks. : Fr.) Pers. |
Il s’agit ici d’une planche de belle facture, très soignée et parfaitement observée. Elle illustre au trait une grosse masse de chapeaux superposés, vus de dessous, ainsi qu’un chapeau isolé dessiné de dessous (à gauche) et de dessus (à droite) et soigneusement colorié. La surface du chapeau est zonée et multicolore, veloutée (ce que l’auteur figure par des petits traits radiaux) ; la surface fertile est typiquement marquée de plis grossiers, larges, anastomosés, qui permettent de reconnaître aussitôt Auriculariamesenterica, un champignon gélatineux présentant une étrange convergence de forme avec certains polypores (en particulier Trametes versicolor = Boletus versicolor L.). On notera, ici encore, que la base (sur le spécimen de gauche) n’a pas été vraiment comprise par l’illustrateur, qui la noie dans une masse incertaine (elle est en réalité peu distincte, mais souvent en plaque étalée sur le substrat) ; mais la forme confuse du champignon lui permet d’éviter de la représenter en détail. Par ailleurs on retrouve la même anomalie que dans les planches 89 et 90 : le champignon principal est représenté renversé, ce qui laisse penser qu’Aubriet, ici encore, ne connaissait pas le sens de croissance du champignon et n’a pas su le reconstituer. La planche reste néanmoins une excellente représentation de ce champignon. | This is a plate of high quality, carefully executed and perfectly observed. It outlines a large mass of overlaid caps, seen from below, as well as a carefully colored isolated cap seen from below on the left and from above on the right. The surface of the cap is zoned, multi-colored, and velvety (which the author represents will small radial lines) ; the fertile surface is marked with rough, large, anastomotic wrinkles that allow the identification of an Auricularia mesenterica, a gelatinous mushroom that features a strange similarity in shape with other polypores (in particular Trametes versicolor = Boletus versicolor L.). Also of note is that the base (on the specimen on the left) was not really understood by the artist who buried it in an uncertain mass (it is, in reality, not distinct, but rather spread as a flat plate on the substrate) ; the fuzzy shape of the mushroom allows the artist to avoid representing it in detail. Furthermore, the same anomaly as in plates 89 and 90 is found here : the main mushroom is represented upside down, which suggests that Aubriet, here again, did not know in what orientation the mushroom grew and was not able to illustrate it. The plate, however, remains an excellent representation of this mushroom. |
Planche / plate 93
Xerocomus cf. rubellus Quélet | Xerocomus cf. rubellus Quélet |
Aubriet n’est vraisemblablement pas l’auteur de cette planche. Le style apparaît bien différent, plus grossier, plus maladroit. L’espèce figurée est un bolet, et les teintes rougeâtres nous conduisent au groupe du Xerocomus rubellus, bolet assez fréquent dans les forêts de feuillus, peu avenant avec sa chair molle, souvent véreuse. Notons la curieuse représentation d’un tout petit exemplaire formant « excroissance » à la base du pied. Le phénomène de « gémellité » se produit parfois chez les bolets, mais en général les deux spécimens sont à peu près de la même taille et possèdent une base de pied commune. | Aubriet is probably not the author of this plate. The style is different, rougher, and more awkward. The illustrated species is a bolete and the reddish shades are suggestive of a Xerocomus rubellus, a rather common bolete in the deciduous forests that is not very attractive with its spongy and often worm-eaten flesh. Of note is the strange representation of a very small specimen growing out from the base of the stem. The twinning process often occurs in boletus but usually both specimens are approximately of the same size and feature a common stipe base. |
Planche / plate 94
Bolet indéterminé | Undetermined bolete |
Pas plus que pour la planche précédente, la peinture de ce bolet ne peut être attribuée à Aubriet. La facture est beaucoup plus « lourde », la gouache, très peu diluée, étant appliquée à gros traits, sans réel souci du détail. L’espèce est difficile à reconnaître. Peut-être s’agit-il du bolet moucheté (Suillus variegatus), assez commun dans les pinèdes, dont la couleur générale est toutefois plus claire, jaune ocracé, et dont le chapeau présente toujours de fines squames, absentes ici. | Like plate 93, this bolete illustration cannot be credited to Aubriet. The execution is much “heavier”, and the gouache, barely thinned down, was applied with thick brush strokes without any real consideration for details. The species is difficult to recognize. It might be a velvet bolete (Suillus variegatus), rather common in pinewoods, whose color is, however, a lighter ochraceous yellow, and whose cap always features fine scales, which are not represented here. |
Planche / plate 95
Boletus radicans Pers. : Fr. | Boletus radicans Pers. : Fr. |
Cette planche est intéressante, car elle figure un bolet qui n’est pas très commun, et le figure fort bien. Certes, les exemplaires sont un peu jeunes, et le chapeau d’un gris trop sombre. Mais le « bolet radicant » (Boletus radicans) se reconnaît facilement, au jaune vif des tubes et du pied, ainsi qu’à la forme de celui-ci à sa base, qui est comme étirée (inde nomen). Aubriet a parfaitement su rendre ce caractère, ainsi que le port général du champignon, très trapu. On regrettera néanmoins que l’artiste n’ait pas marqué le fin réticule qui orne la partie médiane du pied (on observe seulement quelques ponctuations), et n’ait pas mis en évidence le bleuissement de la chair, qui se produit rapidement au contact de l’air (phénomène d’oxydation). | This plate is interesting because it illustrates a bolete that is not very common and the representation is very well done. The specimens are a little young and the grey of the cap is too dark but the rooting bolete (Boletus radicans) is easily recognizable thanks to the bright yellow of its tubes and stipe and the stretched shape of the stipe at the base (inde nomen). Aubriet managed to perfectly convey this character as well as the general stout appearance of the mushroom. It is unfortunate that the artist did not outline the thin reticulation on the median part of the stipe (only a few punctuations can be observed) and that he did not highlight the bluish coloration of the flesh, which occurs rapidly upon air contact (oxidation process). As Aubriet mentioned, the smell of this bolete is not attractive. But the flavor is more important in terms of taxonomy : it is bitter, and it is unfortunate that the author did not pay more attention to it. The rooting bolete grows under deciduous trees, preferably in chalky soils, and it is not edible. |
Planche / plate 96
Lepista nuda (Bull. : Fr.) Cooke (en haut) ; Tremella mesenterica Retz. : Fr. (en bas) | Lepista nuda (Bull. : Fr.) Cooke (top) ; Tremella mesenterica Retz. : Fr. (bottom) |
La représentation du pied-bleu, ici, ne vaut pas celle de la planche 19. Plusieurs défauts sont aisément repérables. Le chapeau est trop « géométrisé », avec les deux cercles concentriques en son centre. La base du pied apparaît en outre, sur l’exemplaire en haut à droite, presque enveloppée dans une sorte de volve. Il ne s’agit que de terre, mais l’effet produit est plutôt gênant. Les teintes du chapeau peuvent dérouter, mais le lépiste nu, en se déshydratant, perd sa belle couleur bleue, et devient volontiers d’un brun rosé pâle. Les lames sont bien rendues, et dans leur forme, et dans leur couleur, mais Aubriet a peint, vers l’insertion au pied, une espèce de cercle étrange, censé peut-être marquer l’échancrure, procédé que l’on retrouve sur d’autres planches du recueil. | This representation of a wood blewit is not as good as the one on plate 19. Several flaws are easily recognizable. The cap is too “geometric” with two concentric circles in its center. On the specimen at the top right, the base of the stipe appears almost wrapped in a volva. It is just soil but the representation is rather troublesome. The shades of the cap can be confusing ; however, the blewit, in its dehydrating process, loses its beautiful blue color and becomes pale brown pinkish. The gills are well executed, both in their shape and color, but Aubriet painted, near their attachment to the stipe, a strange circle, maybe to represent the notch, a process that is also found on other plates in this catalogue. |
Planche / plate 97
Pleurotus sp. | Pleurotus sp. |
Le beau recueil des planches mycologiques en couleurs par Aubriet se clôt malheureusement sur une « croûte ». Et dans les deux sens du terme. Du point de vue technique, le traitement est médiocre : les formes sont rigides, maladroites, et les couleurs grossièrement appliquées. Du point de vue scientifique, le résultat est embarrassant, puisque si l’on croît reconnaître d’abord le très commun polypore du bouleau (Piptoporus betulinus), la présence indiscutable de lames nous déroute complètement. Qui plus est, le champignon (comme c’est également le cas sur les planches 89, 90 et 92) est représenté à l’envers, puisque les lames que l’on aperçoit garnissent la surface supérieure du chapeau, ce qui est tout simplement impossible. Pour apprécier l’espèce, il faut donc renverser l’image. Cela n’aide pas beaucoup la détermination, quoique l’on puisse alors penser à un pleurote (Pleurotus ostreatus ou P. pulmonarius). | The beautiful catalogue of colored mycological plates by Aubriet ends, unfortunately, with a real “dub”. Technically speaking, the execution is bad : the shapes are stiff, awkward and the colors roughly applied ; scientifically speaking, the result is embarrassing : though it seems at first that this mushroom is a very common birch polypore (Piptoporus betulinus), the undeniable presence of gills is puzzling. Furthermore, the mushroom (as on plates 89, 90, and 92) is represented upside down since the gills cover the upper surface of the cap, which is simply impossible. To assess the species, the image needs to be flipped over. However, it does not help much either in determining the species, though it can be suggestive of an oyster mushroom (Pleurotus ostreatus or P. pulmonarius). |
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À l’aube de la micropaléontologie
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2006
Les dessins de Champignons de Claude Aubriet
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