19. Les contributions zoologiques de René Antoine Ferchault de Réaumur
p. 478-489
Texte intégral
1Messieurs,
2René-Antoine Ferchaud de Réaumur était né à La Rochelle en 1683. Après avoir étudié en droit, il vint à Paris, en 1703. Le président Henault1, qui était son parent, le présenta dans le monde, et en 1708, quoique fort jeune encore, il fut reçu membre de l’Académie des Sciences. Il fut admis dans cette société savante en qualité de mathématicien et de mécanicien ; mais il travailla pour presque toutes les autres sections.
3Le duc d’Orléans2, alors régent, et qui était connaisseur en sciences, lui accorda une pension de douze mille livres, en récompense de ses travaux sur l’acier, le ferblanc et autres produits utiles qui n’existaient pas avant lui. Réaumur n’accepta cette pension qu’à la condition qu’elle serait reversible à l’Académie après sa mort. En 1735, il devient intendant de l’ordre de Saint-Louis3, et mourut en 1757, d’une chute qu’il avait faite dans son jardin.
4Il avait légué à l’Académie tous les papiers renfermés dans cent trente-huit grands portefeuilles qui devaient lui servir à compléter ses ouvrages. Il avait formé un cabinet d’histoire naturelle, qui était le seul que l’on eût alors pour la zoologie, et qui fut la base du muséum actuel du Jardin des Plantes, du moins pour les oiseaux. Des hommes de mérite avaient concouru à la formation de ce cabinet ; c’étaient notamment Hérissant4, célèbre par ses recherches anatomiques, et Brisson5, à qui l’on doit une ornithologie, et qui avait la garde de la collection de Réaumur.
5L’ouvrage de ce dernier, qui doit nous occuper, est intitulé : Mémoires pour servir à l’Histoire des Insectes6. Il se compose de six volumes in-4°, dont le premier parut en 1734, et le sixième, qui n’était pas le dernier dans le plan de l’auteur, mais qui est le dernier qu’il ait pu publier lui-même, en 1742. Comme on le voit, à peu près tous les deux ans, Réaumur publiait un volume.
6Son travail est un recueil d’observations faites avec la plus grande persévérance, et en même temps avec la plus grande sagacité ; car les moyens par lesquels il est arrivé à connaître les habitudes, les instincts, la manière d’être et de vivre de chaque insecte dans ses trois états7, sont aussi remarquables que la singularité des résultats qu’il a obtenus. On peut affirmer que son ouvrage est un des plus beaux de l’histoire naturelle.
7Le premier volume traite des chenilles et des papillons. Il renferme une description exacte de leurs parties intérieures et extérieures, ainsi que de celles de leur chrysalide. Ensuite sont indiquées les plantes sur lesquelles vit chaque espèce, et les précautions qu’elle prend pour conserver sa chrysalide pendant son état d’immobilité. On voit que certaines chenilles s’enveloppent d’un cocon pareil à celui du ver à soie, et le percent lorsqu’elles sont devenues papillons. D’autres, comme celle du chêne, par exemple, appelée grand paon, filent un cocon d’une soie élastique et en forme de bouteille, à l’extrémité duquel se trouvent des soies convergentes disposées de manière que le papillon puisse sortir, mais qu’aucun animal étranger ne puisse entrer dans le cocon. En un mot chaque chenille a une manière particulière de faire son nid. Il en est de même de leurs mœurs. Certaines chenilles vivent isolées ; d’autres vivent en société ; d’autres, enfin, telles que les processionnaires, marchent dans un ordre déterminé, d’où l’on a tiré leur nom8.
8Le deuxième volume de Réaumur renferme la continuation de recherches analogues à celles contenues dans le premier volume, et, de plus, une histoire curieuse des insectes ennemis des chenilles. On y voit que la femelle de certaines mouches, appelées ichneumons9, est armée d’un aiguillon qui lui sert à piquer une chenille pour y faire sa ponte. Ses œufs éclosent dans les trous qu’elle a faits à la chenille avec une précaution tellement merveilleuse que celle-ci conserve juste assez de parties pour vivre jusqu’au moment où les vers éclosent, et se nourrissent de sa chair. À leur tour, ces vers se métamorphosent en mouches qui vont aussi déposer leurs œufs dans le corps d’une chenille de même espèce que celle qu’ils ont dévorée aussitôt après leur naissance.
9Il existe d’autres mouches qui blessent les chenilles d’une manière différente ; elles les enferment ensuite dans de petits nids qu’elles ont fabriqués avec de la terre, et dans lesquels elles ont déposé leurs œufs. Lorsque ceux-ci éclosent, les vers dévorent les chenilles, dont le nombre varie suivant les espèces de mouches.
10Il y a beaucoup d’autres observations analogues dans le volume dont nous parlons ; et il n’est, du reste, pas moins remarquable que le premier volume.
11Le troisième contient l’histoire d’insectes plus petits et dont les industries sont plus particulières. La première espèce mentionnée est celle des vers qui pénètrent dans les feuilles sans altérer leur surface, qui s’établissent entre leurs lames et en dévorent le parenchyme. On les a nommés, pour cette raison, mineurs de feuilles10.
12Viennent ensuite les teignes, qui se font un étui aux dépens des matières animales, telles que les draps et les pelleteries. Enveloppées dans une espèce de cylindre en laine, elles en sortent la tête seulement pour dévorer l’étoffe. D’autres teignes vivent dans la cire ; elles creusent l’intérieur des rayons de miel sans attaquer cette dernière substance, et ne se nourrissent que de la cire. Les fausses teignes11, ou mouches aquatiques à quatre ailes, nommées friganes, ne se font pas une enveloppe avec des fragments de drap ; elles rassemblent de petites parcelles de bois, d’herbes ou de cailloux, suivant les espèces, et les collent ensemble, au moyen d’un suc agglutinatif qu’elles secrètent par la bouche. Elles se forment ainsi une petite maison en forme de cornet, qu’elles traînent avec elles tant qu’elles sont à l’état de larve. Ce cornet est fermé avec un peu de soie aux deux extrémités, et la larve y reste jusqu’à ce qu’elle ait pris la forme de papillon. À ces insectes succèdent les pucerons. Réaumur fait connaître leur manière de vivre sur les feuilles et leurs ennemis, car chaque espèce d’insecte, bien que destinée à détruire d’autres êtres vivants, a aussi dans la nature son propre destructeur, ce qui maintient une sorte d’équilibre. Les ennemis des pucerons sont des larves de mouches qui ne pénètrent pas dans l’intérieur de leur corps, mais qui se placent au milieu d’un grand nombre d’entre eux, les saisissent avec leur trompe et les dévorent sans qu’aucun fasse de résistance. La larve d’une mouche à quatre ailes, qu’on nomme hémérobe12 dans le système actuel, est l’un de ces ennemis des pucerons ; elle en dévore plusieurs centaines par jour et a été nommée le lion des pucerons.
13Enfin, Réaumur, dans le volume que nous analysons, traite des mouches à quatre ailes qui pondent dans l’épaisseur d’une feuille ou d’un petit rameau de végétal. À l’instant où ces insectes percent le trou qui doit recevoir leurs œufs, ces corps, et peut-être aussi une liqueur étrangère versée avec eux, produisent sur le végétal une irritation telle qu’il y naît un corps nouveau. Les noix de galle du chêne13, qui ont l’aspect de fruits de différentes couleurs, sont des tumeurs accidentelles produites de cette manière et qui sont destinées à contenir et à nourrir de petits vers qui se développent dans leur intérieur. Toutes les fois que l’on ouvre une de ces galles fraîches, on y trouve de petits vers éclos. Quand ils se sont transformés en mouches, ils percent leur enveloppe, c’est-à-dire la galle, et vont produire à leur tour d’autres tumeurs destinées au même usage. Après la sortie des insectes on remarque sur les galles un petit trou qui est celui par lequel ils ont quitté le lieu de leur naissance.
14Beaucoup d’autres végétaux que le chêne présentent des galles de formes diverses. Celles du rosier14, qu’on nomme mousses de rosier, sont composées de filaments jaunes et rouges, et c’est au milieu de ces filaments que se trouvent les vers.
15Le quatrième volume contient l’histoire d’espèces d’insectes plus ou moins singulières ; les femelles de ces insectes n’ont pas d’ailes et vivent sur les plantes, comme les pucerons ; mais elles y restent constamment et immobiles, tirant leur nourriture de ces plantes à l’aide de suçoirs. Après que les mâles, qui sont plus petits que leurs femelles, les ont fécondées, celles-ci deviennent extrêmement grosses et font leurs œufs sous elles. Elles se dessèchent ensuite et servent ainsi de couverture à leurs petits. Ceux-ci sortent de dessous le cadavre de leur mère et se répandent sur le même végétal qu’elle pour reproduire des phénomènes semblables à ceux que je viens de décrire. Ces animaux, que Réaumur nomme gallinsectes, présentent des espèces très utiles ; par exemple, la cochenille15 et la graine d’écarlate de Pologne16.
16Dans le quatrième volume est aussi renfermée l’histoire des mouches à deux ailes, c’est-à-dire de toutes les mouches ordinaires qui vivent sur les viandes, dans les matières corrompues, dans les excréments, dans les eaux putrides. Leur métamorphose, la forme des larves de quelques-unes d’entre elles et le genre de vie qu’elles mènent sont très remarquables. Leur histoire est continuée dans le cinquième volume, où se trouve celle des mouches à scie17. Ces dernières mouches à quatre ailes ont été ainsi nommées parce qu’elles ont un aiguillon en forme de scie, au moyen duquel elles entament l’écorce des végétaux pour y déposer leurs œufs. Il sort de ces œufs des larves ou vers qu’on nomme fausses chenilles, parce qu’ils leur ressemblent et qu’ils ne donnent point naissance à des papillons, mais à des mouches à quatre ailes.
17Dans le cinquième volume est aussi renfermée l’histoire des cigales18, qui appartiennent aux pays chauds et qui sont célèbres par le bruit qu’elles font entendre pendant les nuits d’été. Réaumur donne la description de leur larve, qui habite l’intérieur de la terre, celle de leur chrysalide, qui est mobile, et enfin celle de l’insecte parfait. La larve vit cachée entre les racines d’un arbre ; et l’insecte parfait s’élève sur le même arbre et s’y nourrit en le suçant. Réaumur fait connaître l’anatomie des instruments avec lesquels la cigale produit son chant. Ces instruments sont une espèce de petit tambour élastique et un petit cylindre à stries élevées et rudes qui sont placés dans l’abdomen de l’animal. La cigale frotte son cylindre comme un archer sur son tambour, et il en résulte le son qu’on lui connaît19. Tous les insectes sont ainsi dépourvus d’une voix pareille à celle des trois premières classes d’animaux : les mammifères, les oiseaux et les reptiles. Ces trois classes, ayant des poumons et une trachée-artère, font entendre une voix analogue à la nôtre. Quelques poissons seulement font entendre un bruit dont l’origine et la nature ne sont pas bien connues, car il ne dépend pas des poumons ni de la trachée-artère, ni du larynx, puisque ces organes n’existent pas chez les poissons. Les autres classes d’animaux sont muettes. Les insectes autres que les cigales, qui font entendre un bruit, le produisent au moyen d’un appareil semblable à celui de ces derniers animaux, c’est-à-dire avec des espèces d’archer, et jamais avec un instrument à air. Ainsi, les sauterelles, qui font entendre un bruit en sautant, et même dans l’état de repos, produisent ce bruit en frottant leurs deux grandes cuisses contre leurs ailes, qui ont des filets à nervures élastiques ; leur appareil est un petit instrument à cordes. Le son que produisent les cerambix20 est de même nature que celui des sauterelles. Quant au bourdonnement que les insectes font entendre en volant, il est produit par la percussion de leurs ailes sur l’air.
18Dans le même volume que nous analysons, Réaumur donne l’histoire des abeilles, qui ont été l’objet de l’admiration de tous les âges. Ce n’est pas pourtant que leur instinct soit supérieur à celui des autres insectes, mais c’est qu’il est plus facile à remarquer, ces animaux vivant en grande société. Et d’ailleurs, l’abeille est un animal domestique, que nous élevons dans le but d’en tirer des produits utiles ; on a eu par conséquent beaucoup d’occasions de l’observer. Aristote21 a donné sur cet insecte plusieurs détails intéressants ; mais les modernes l’ont dépassé de beaucoup, lui et ses successeurs chez les anciens. Des auteurs récents, dont j’aurai à examiner les ouvrages dans la seconde moitié du dix-huitième siècle et au commencement du dix-neuvième, ont aussi ajouté aux observations de Réaumur. Néanmoins, son histoire des abeilles est extrêmement intéressante.
19Pour voir travailler les mouches à miel, Réaumur avait imaginé de construire des niches en lames de verre ; car une cloche de verre ne suffit pas, les abeilles revêtant l’intérieur de cette cloche d’un enduit opaque, d’une espèce de résine qui empêche de rien voir. Les lames de verre disposées par Réaumur, ne laissaient entre elles que l’épaisseur d’un gâteau, c’est-à-dire de deux rangs de cellules adossées les unes aux autres. On pouvait ainsi voir complétement tout ce qui se passait à l’intérieur de la ruche, Réaumur ayant, bien entendu, pris la précaution de couvrir cette ruche d’une enveloppe obscure qui dispensait les abeilles d’appliquer un enduit sur le verre. Il examina ainsi la pratique des abeilles, depuis le moment où elles apportent la cire jusqu’à celui où les œufs sont déposés dans les cellules. Il les vit former leurs tuyaux hexagones, terminés par des pyramides à trois pans, forme qui épargne le plus la matière et conserve le plus d’espace. Il observa que l’abeille, appelée roi par les anciens, n’était pas un mâle, mais la seule femelle qui existât dans chaque ruche ; que par conséquent c’était le nom de reine qui lui convenait. Il remarqua que cette reine produisait des milliers d’œufs et en déposait un dans chaque cellule, fait qui avait déjà été reconnu par Swammerdam22 et autres auteurs.
20La reine n’est qu’une abeille ouvrière qui a reçu une nourriture spéciale. Toutes les abeilles neutres sont aussi des femelles, mais des femelles infécondes. Lorsqu’on en fait la dissection, on distingue seulement un germe d’ovaire dans leur intérieur. Pour que les abeilles ordinaires devinssent reines ou femelles fécondes, il leur suffirait de recevoir une nourriture plus abondante et d’une nature particulière.
21Les œufs qui doivent produire les mâles sont déposés dans des cellules plus grandes que celles des abeilles neutres. Un petit nombre d’œufs, d’où naturellement il ne serait sorti que des abeilles ordinaires, sont aussi placés dans des cellules faites exprès en dehors des rayons, et d’une capacité beaucoup plus grande que les autres. Ces cellules ont la forme d’une bouteille renversée et sont remplies d’un miel différent de celui dont se nourrissent les abeilles ordinaires. Chacun des œufs qui y ont été déposés produit une reine qui emmène avec elle les mâles et les ouvrières jeunes pour former ailleurs un nouvel essaim. Les reines, aussitôt après leur naissance, deviennent ennemies les unes des autres ; aussi, la première chose que fasse une reine qui vient de sortir de sa cellule, c’est d’aller percer et ravager les cellules qui sont destinées à donner d’autres reines, comme si la fureur l’animait contre des êtres qui ne sont pas même éclos. Mais il en échappe toujours quelques unes, et ce sont celles-là qui produisent les chefs des nouveaux essaims. Lorsque deux reines se rencontrent dans la même ruche, elles se combattent jusqu’à ce que l’une d’elles succombe. La reine est l’attrait directeur d’un essaim. Celui-ci suit partout la personne qui la porte, et si on la faisait périr, l’essaim se disperserait, cesserait tout travail et périrait faute de nourriture pendant l’hiver, à moins qu’il ne se réunît à une autre société d’abeilles pourvue d’une reine. L’industrie de ces insectes tient par conséquent à l’existence de la reine qui doit produire d’autres mouches.
22Réaumur, dans le sixième volume qu’il a publié lui-même, fait l’histoire des abeilles maçonnes23, des percebois24, des guêpes, des frêlons, des bourdons.
23L’abeille maçonne construit avec des grains de sable, de petites cavités en forme de dés à coudre qu’elle remplit de miel, et où elle dépose ses œufs. Elle en fait ainsi trois ou quatre et elle s’en va. Les œufs éclosent ; les vers se nourrissent du miel qui a été déposé dans leurs cellules, et après leur transformation en abeilles maçonnes, ils font, bien qu’ils n’aient pas pu voir construire leur petite maison, des cellules toutes pareilles à celles où ils sont nés pour y déposer leurs propres œufs.
24L’abeille percebois dépose ses œufs dans des cellules qu’elle creuse sous l’écorce des arbres. Chacune de ces cellules, qui contient un œuf, est percée parallèlement à l’écorce, de manière que chaque ver, lorsqu’il a passé sa vie de larve et de chrysalide, n’ait que peu de bois à percer pour sortir. C’est souvent dans du bois mort, dans des pieux, que l’abeille percebois creuse ses cellules, toujours parallèlement à la surface du bois.
25D’autres mouches font des trous dans l’intérieur de la terre. D’autres encore font des nids avec de la mousse pour y déposer leurs œufs.
26Dans la préface du volume que j’analyse, Réaumur mentionne la découverte merveilleuse que Trembley venait de faire du polype et de son mode de reproduction25. Trembley n’avait pas encore publié son livre, mais il avait communiqué sa découverte à Réaumur avant tout autre.
27Le septième volume de cet illustre savant n’était pas composé lorsqu’il mourut26. Une partie des mémoires qui y seraient entrés est dans la bibliothèque de M. Huzard27 et dans les archives de l’Institut28 ; mais ils ne sont pas en état d’être publiés. Il y est traité des sauterelles. Deux autres volumes doivent encore exister, on n’en connaît pas bien le sort.
28L’ouvrage de Réaumur avait attiré à un degré extraordinaire l’attention du public : il n’intéressait pas en effet que les naturalistes, il touchait aussi à la philosophie, et fixa l’attention de tous les hommes qui s’occupaient de l’intelligence et de ses lois. Lorsque l’ouvrage de Buffon29 parut, on y remarqua une sorte de tendance à déprécier l’instinct des insectes que Réaumur avait fait connaître. Les journalistes de Trévoux30 attaquèrent surtout notre grand entomologiste avec la plus insigne mauvaise foi ; mais ses réponses furent toujours remplies de justesse et de dignité. Nous verrons que Buffon, dans son Traité des Animaux31, représente les industries des insectes comme le résultat d’une action mécanique, d’une impulsion mutuelle. Ses idées à cet égard sont obscures. Il cherche à prouver que la forme hexagonale des cellules des abeilles est produite par la compression réciproque de ces cellules ; qu’elles sont d’abord rondes, et qu’elles n’affectent la forme de prismes hexagones qu’en cherchant à s’étendre : il les compare à des pois qui, gonflés par de l’eau chaude, agissent les uns sur les autres mécaniquement, de manière à prendre des figures polyèdres. Cette explication n’est pas admissible, les abeilles commençant par faire des rhombes sur lesquels elles élèvent des lames successivement. Elles ne sont pas placées dans l’intérieur des cellules qu’elles construisent ; elles sont en dehors de ces cellules. Une abeille seule ne construit pas une cellule ; chacune d’elles travaille à plusieurs cellules.
29L’instinct des abeilles en particulier, et celui des autres insectes en général, ont été le sujet de réflexions remarquables. Je saisirai l’occasion présente pour exposer celles qui me sont propres sur ce sujet.
30Par le mot instinct, on entend des choses assez diverses. Communément on suppose que l’instinct des animaux est une faculté plus ou moins analogue au raisonnement, une espèce d’intelligence d’un ordre inférieur. Il est certain que les animaux qui se rapprochent de nous par la forme, et même quelques-uns de ceux qui en sont éloignés, possèdent des facultés qui ressemblent jusqu’à un certain point à nos propres facultés. Elles se perfectionnent par l’expérience, absolument comme les nôtres, quoiqu’elles n’aillent jamais aussi loin. On sait que l’on dresse un cheval à obéir et à faire des choses tellement difficiles, qu’elles pourraient lui faire supposer une intelligence supérieure à celle qu’il a réellement. On sait aussi, comment en châtiant un chien, on le détourne de ses penchants les plus naturels, comment on finit par le dresser à chasser pour son maître le gibier qu’il chasserait naturellement pour le dévorer. Les oiseaux, qui doivent beaucoup à la nature, apprennent aussi de l’homme : on leur fait accomplir certaines actions plus ou moins difficiles qui sont évidemment, non le résultat d’une impulsion aveugle, mais celui d’une connaissance acquise par l’expérience, et dont ils tirent d’une manière confuse certaines conclusions qui les dirigent. Ces faits se remarquent chez des animaux inférieurs aux oiseaux, car les insectes sont aussi susceptibles d’êtres apprivoisés. Tout le monde sait l’histoire de Pélisson, qui, étant renfermé à la Bastille, avait habitué une araignée à venir quand il l’appelait32. Les animaux, même ceux qui semblent le plus éloignés de nous par la forme et l’emploi ordinaire de leurs facultés, sont donc susceptibles de tirer quelques conclusions de l’observation des faits. À cet égard on pourrait les comparer à l’enfant qui ne peut pas encore exprimer d’idées générales par des signes. Celui-ci est réduit à une conception confuse des rapports des choses, et aussi longtemps que cet état se prolonge, la différence entre lui et les animaux n’est pas grande.
31Mais ce n’est pas ce degré d’intelligence qu’on doit nommer instinct. Par ce mot on doit entendre, selon le sens véritable du terme, le principe des actions qui sont déterminées dans l’animal, indépendamment de toute connaissance acquise, indépendamment de toute expérience, indépendamment enfin de toute sensation qui lui rende ces actions agréables ou utiles immédiatement, et qui cependant sont calculées, soit pour la conservation de l’individu, soit pour celle de l’espèce. Il est évident, par exemple, que les abeilles maçonnes n’ont pas appris par expérience à construire leurs cellules. Quand on prend des individus isolés, qui n’ont jamais eu de rapports avec d’autres êtres de leur espèce, ils font le même travail, les mêmes opérations que leurs semblables, sans qu’il soit possible de supposer qu’ils aient jamais rien appris d’eux. Il est clair qu’il y a dans ces actions quelque chose de particulier et de différent de ce qui constitue l’intelligence ordinaire ; d’autant plus que la plupart de ces actions sont tellement compliquées, présentent quelquefois tant d’art, que l’homme lui-même aurait de la peine à les imiter. Les cellules des abeilles sont des travaux de cette nature ; leur forme hexagonale est celle qui ménage le plus la matière et l’espace. Cette vérité a été connue lorsque les géomètres sont arrivés au perfectionnement du calcul infinitésimal.
32Ici je ne parle que des abeilles maçonnes, parce que la nature de leur impulsion est plus claire, est plus évidente que celle des autres abeilles ; mais je pourrais citer des milliers d’exemples établissant qu’un insecte fait exactement ce qu’ont fait ses parents, quoiqu’il lui ait été impossible d’avoir la moindre communication avec eux, et même d’apercevoir les matériaux dont il doit se servir plus tard.
33J’ai déjà parlé de mouches qui tuent des chenilles pour les mettre dans le nid de leurs petits, auxquels elles doivent servir de nourriture. Les crabes, petits insectes noirs et jaunes qui, pendant leur vie d’insecte, se nourrissent du suc des fleurs et se trouvent sur les ombellifères33, présentent la même particularité. Lorsqu’ils se sont accouplés, et que le moment de pondre est arrivé, la femelle cherche le long d’une berge quelque endroit où la terre soit meuble ou fraîche et susceptible d’être creusée ; elle y fait un trou d’une profondeur déterminée, communiquant au dehors par une ouverture qui finit par être verticale, et rassemble ou colle la terre au bord du trou creusé. Elle va ensuite chercher une petite chenille verte qui vit sur le chou et sur d’autres crucifères34 ; cependant elle n’avait pas vu, elle ne connaissait pas cette chenille, puisqu’elle vivait sur des fleurs ; c’est-à-dire dans une région différente de celle de la chenille. Elle perce cet animal de son dard, de manière à le blesser, à lui ôter de sa force, et non pas de manière à le tuer ; puis elle le roule et l’enfonce dans le trou, au fond duquel elle a pondu son œuf. Cet insecte va ainsi chercher jusqu’à douze chenilles ; c’est le nombre déterminé pour son espèce. D’autres guêpes en prennent davantage. Le nombre de chenilles qui doivent servir de nourriture aux larves est toujours proportionné à la grosseur des insectes. Lorsque la femelle a pondu ses œufs et placé les chenilles qu’elle a percées de son dard, elle recouvre le trou qui les contient. L’œuf éclot, il paraît un ver qui dévore la première chenille qu’il trouve au-dessus de lui ; il en fait autant de la deuxième, de la troisième, etc., jusqu’à la dernière, qui est près de l’embouchure du trou. L’animal est alors près de sa métamorphose ; il se file un cocon et se transforme en une chrysalide qui est immobile dans cette espèce. Enfin il sort de son trou à l’état d’insecte.
34Tous les individus de cette espèce ont été renfermés et nourris ainsi dans un trou entièrement obscur, où ils n’avaient pas de connaissance de la nature extérieure, et où ils ne pouvaient avoir de communication qu’avec leurs petites chenilles. Cependant ils reproduisent avec une parfaite exactitude les mêmes actes que leurs parents, sans avoir rien appris d’eux. J’en pourrais dire autant de cent autres espèces d’insectes.
35L’abeille percebois, l’abeille maçonne, tous les insectes qui pondent leurs œufs sur des plantes choisissent aussi, sans se tromper, celles qui conviennent à leurs larves, et cependant il arrive souvent que la substance qui sert à nourrir une larve, est différente de celle qui nourrit l’insecte parfait. Les insectes ne sont donc pas déterminés par leurs goûts dans le choix des plantes sur lesquelles ils déposent leurs œufs. Les papillons, par exemple, se nourrissent seulement du suc des fleurs, tandis que leurs chenilles vivent de feuilles. Ils ont d’ailleurs une trompe pour aspirer le suc des fleurs ; les chenilles ont au contraire de fortes mâchoires, avec lesquelles elles déchirent les feuilles et les dévorent. Il n’y a, en un mot, aucune analogie entre la nourriture de l’insecte et celle de ses petits à l’état de larve ; cependant, lorsque le moment de pondre arrive, la femelle, qui se nourrissait d’une certaine substance, va déposer ses œufs souvent sur un cadavre, sur une matière putride fort différente, mais toujours convenable à la larve qui doit naître de son œuf.
36Dans toutes ces actions, dont plusieurs sont très compliquées, comme par exemple celle des abeilles perce-bois, il est évident qu’il y a un principe impulsif entièrement différent de celui qui agit en nous, de ce qui est la cause de notre raisonnement, de notre expérience. Il est encore à remarquer que ces actions ne sont pas destinées au plaisir de l’insecte, ni même à sa conservation immédiate, mais à celle de sa postérité et quelquefois même seulement à celle de sa société, comme on le voit dans les abeilles neutres et ouvrières, qui construisent des cellules et vont chercher du miel sans avoir de postérité, et sans pouvoir en avoir jamais, puisqu’elles sont infécondes.
37Il y a là, je le répète, une impulsion d’une nature supérieure qui agit continuellement sur l’animal indépendamment du plaisir et de la peine, et c’est cette impulsion que je nomme instinct. Réaumur en a tracé une histoire remarquable ; nous en reparlerons quand nous serons arrivés aux ouvrages de Leroy35, de Rémarus36 et autres qui ont traité de l’instinct. Ce principe n’existe pas dans toutes les espèces, et les animaux qui ont le plus d’intelligence ont souvent le moins d’instinct37.
38Dans le prochain entretien nous continuerons l’histoire des ouvrages relatifs aux insectes.
Notes de bas de page
1 [Charles-Jean-François Hénault (né le 8 février 1685, Paris ; mort le 24 novembre 1770, Paris), homme de lettres et historien français, resté surtout célèbre pour son histoire de France en deux volumes, des temps anciens à la mort de Louis XIV (Nouvel abrégé chronologique de l’histoire de France contenant les événements de notre histoire depuis Clovis jusqu’à la mort de Louis XIV, les guerres, les batailles, les sièges, les traités de paix, nos lois principales, les Édits importants et quelques Conciles etc., Paris : Prault Père, 1744, viii + 417 p., in-8°), malgré un contenu sans nouveauté ni originalité ; une édition en deux volumes parut en 1749.]
2 [Sur Philippe II, duc d’Orléans, voir Leçon 1, note 36, ci-dessus.]
3 [L’ordre royal et militaire de Saint Louis est un ordre militaire de chevalerie, fondé le 5 avril 1693 par Louis XIV et nommé après Saint Louis (Sur Louis IX ; voir Volume 1, Leçon 22, note 32). Il récompensait des officiers pour leur service exceptionnel et se signalait pour avoir été la première décoration offerte également aux militaires qui n’étaient pas de la noblesse. Ce titre honorifique est le prédécesseur de l’actuelle Légion d’honneur, également accessible pour sa part aux civils.]
4 [François-David Hérissant (né le 29 septembre 1714, Rouen ; mort le 21 août 1773, Paris), anatomiste et naturaliste français, membre de l’Académie des sciences, il s’intéressait aux vocalises animales, particulièrement à celles des oiseaux et des mammifères. Il présenta une communication à ce sujet en 1753 intitulée : « Recherches sur les organes de la voix des quadrupèdes, et de celle des oiseaux », Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, 1753, pp. 279-295.]
5 [Sur Mathurin Jacques Brisson, voir Leçon 18, note 28, ci-dessus.]
6 [Mémoires pour servir à l’histoire des insectes, Paris : De l’Imprimerie Royale, 1734-1742, 6 vol. : vol. 1, Sur les chenilles et les papillons, 1734, 654 p., 50 pl. ; vol. 2, Suite de l’histoire des chenilles et des papillons et l’histoire des insectes ennemis des chenilles, 1736, 514 p., 38 pl. ; vol. 3, Histoire des vers mineurs des feuilles, des teignes, des fausses teignes, des pucerons, des ennemis des pucerons, des faux pucerons et l’histoire des galles des plantes et de leurs insectes, 1737, 532 p., 478 pl. ; vol. 4, Histoire des gallinsectes, des progallinsectes et des mouches à deux ailes, 1738, 636 p., 44 pl. ; vol. 5, Suite de l’histoire des mouches à deux ailes et histoire de plusieurs mouches à quatre ailes, savoir des mouches à scies, des cigales et des abeilles, 1740, 728 p., 44 pl. ; vol. 6, Suite de l’histoire des mouches à quatre ailes avec un supplément des mouches à deux ailes, 1742, 608 p., 48 pl.]
7 [Les trois étapes de la métamorphose d’un insecte : œuf, larve et adulte.]
8 [Les chenilles processionnaires, chenilles qui se déplacent en formant de longues files indiennes et qui figurent parmi les espèces d’insectes les plus dévastatrices pour les forêts, capables de défolier des arbres sur de vastes surfaces durant les croissances épisodiques de population. Les plus sociables parmi elles, les fratries, restent groupées depuis le stade larvaire, les chrysalides sont souvent côte à côte, formant des masses compactes de larves en développement et de jeunes adultes, pouvant compter 300 individus par nids, enfermés dans des toiles de soies qu’ils fabriquent eux-mêmes, raison pour laquelle ces chenilles sont parfois appelées chenilles à tentes.]
9 [Ichneumons, membres de la famille Ichneumonidae des guêpes parasitoïdes de l’ordre des hyménoptères. Parasitoïdes importants d’autres invertébrés, ils sont les hôtes de larves et de nymphes de scarabées, de papillons et papillons de nuit, d’abeilles et autres guêpes.]
10 et se nourrissent des feuilles des plantes. La vaste majorité [Les mineurs de feuilles, insectes, dont les larves vivent dans des insectes mineurs de feuilles sont des papillons de nuit, des mouches à scie (sorte de guêpe), des mouches, même si certains scarabées montrent aussi ce comportement.]
11 [Les trichoptères, petits insectes ressemblant aux scarabées, apparentés aux scarabées et aux papillons, caractérisés par deux paires d’ailes tomenteuses, recouvertes d’une membranes d’écailles. Ils possèdent des larves aquatiques, qui chez de nombreuses espèces, utilisent de la soie pour fabriquer des enveloppes protectrices de gravier, sable, brindilles ou autres débris, et que l’on retrouve dans des habitats très divers tels que ruisseaux, rivières, lacs, étangs, ruissellements printaniers et étendues d’eau temporaires.]
12 [Hémérobiidés, insecte de la famille des Hemerobiidae appartenant à l’ordre des Névroptères, caractérisés par leurs ailes diaphanes et dont les larves se nourrissent d’insectes nuisibles comme les pucerons.]
13 [Galles des plantes, excroissances anormales des tissus des plantes, similaires aux tumeurs bénignes ou aux verrues des animaux. Causée par divers parasites, comme des champignons, des bactéries, en passant par des insectes ou des mites, les galles sont souvent des structures fortement organisées et de ce fait, la cause des galles peut être souvent être déterminée sans que son réel agent ne soit identifié. Cela est particulièrement le cas avec quelques galles de plantes liées aux insectes et mites.]
14 [La galle rose bédégar, galle de mousse ou Barbe de St Pierre se développe comme une distorsion chimiquement induite à partir d’un axillaire de feuille non ouverte ou d’un bourgeon, la plupart du temps sur l’églantier des champs (Rosa arvensis) ou le rosier des chiens (Rosa canina). Elle est causée par la « guêpe à galles », ou cynips du rosier, (Diplolepis rosae) de l’ordre des hyménoptères, au développement parthénogénétique et dont les femelles pondent jusqu’à 60 œufs par bourgeon.]
15 [Sur la cochenille, voir Volume 2, Leçon 4, note 63.]
16 [Kermès, teinture rouge extraite des corps desséchés d’insectes femelles à écailles du genre Kermes, essentiellement le Kermes vermilio. Originaire de Méditerranée où l’on retrouve les insectes vivant de la sève des chênes Kermès (ou des garrigues), cette teinture rouge fut utilisée dès l’antiquité par les Romains et les Grecs. La couleur produite, très résistante et d’un rouge riche, fut très en vogue pendant le Moyen Âge pour teindre la soie ou la laine. Elle n’est plus utilisée aujourd’hui.]
17 [Les mouches à scie ou guêpes des bois, insectes appartenant au sous-ordre Symphyta et à l’ordre des Hyménoptères. Elles se distinguent de presque tous les autres hyménoptères par une solide connexion entre leur abdomen et leur thorax, et par leur larve très ressemblante avec la chenille des papillons. Leur nom commun s’explique par la forme de scie de l’ovipositeur que la femelle utilise pour insérer ses œufs dans les plantes dont les larves se nourriront. Une population importante de certaines espèces de mouches à scie peut entraîner de substantiels dommages économiques pour les forêts et les cultures.]
18 [Cigales, 1 300 espèces existantes d’insectes de la superfamille des Cicadoidea, et de l’ordre des hémiptères, largement distribuées dans le monde, présentes sous les climats tempérés à tropicaux, et bien connues pour leurs sons exceptionnellement fort, produit non par stridulation, mais par une vibration rapide des timbales. Elles vivent habituellement dans les arbres, se nourrissent de sève et déposent leurs œufs dans les fentes d’écorce. La plupart des cigales sont des espèces cryptiques, qui chantent la nuit pour éviter les prédateurs. Les cigales périodiques passent la presque totalité de leur vie sous terre à l’état de nymphes, émergent seulement après 13 ou 17 ans, sans doute dans le but de minimiser les pertes en rassasiant leurs prédateurs.]
19 Le mâle seul a cet organe musical. [M. de St.-Agy]
20 [Cerambyx, genre de scarabées de la famille des Cerambycidae (connus collectivement comme scarabées longicornes ou scarabées capricornes) comptant environ 30 espèces, caractérisés par de longues et robustes antennes incurvées, chacun des segments ayant une extrémité évasée, évoquant les cornes du bouquetin des Alpes (Capra ibex).]
21 [Sur Aristote, voir Volume 1, Leçons 7 et 8.]
22 [Sur Jan Swammerdam, voir Volume 2, Leçon 16, note 50.]
23 [Abeilles maçonnes, nom commun pour une espèce d’abeille du genre Osmia, de la famille des Megachilidae, nommées en raison de leurs habitudes de construire des compartiments en boue dans leurs nids, installés dans des tiges creuses ou des trous creusés dans le bois par des insectes perceurs.]
24 [Abeilles charpentières, noms communs pour 500 espèces de grosses abeilles du genre Xylocopa, de la sous-famille des Xylocopinae, qui tirent leur nom du comportement commun à presque toutes les espèces consistant à construire leurs nids dans des cavités de bois morts, de bois de charpente ou de bambous.]
25 [Sur Abraham Trembley, voir Volume 2, Leçon 15, note 61.] [Le septième volume des Mémoires pour servir à l’histoire des insectes de Réaumur fut publié à titre posthume en deux parties (« L’histoire des fourmis » et « L’histoire des scarabées »), édités par Paul Le Chevalier : Histoire des fourmis [intr. de Bouvier E. L. ; annotée par Pérez Charles], Paris : 1928, 116 p., [3] feuil. de pl. (Encyclopédie Entomologique. Série A. Travaux généraux ; 11.) ; Histoire des scarabées [intr. de Caullery Maurice ; mise en ordre et notes par Lesne Pierre & Picard F.], Paris : 1955, 340 p., 21 feuil. de pl. (Encyclopédie Entomologique. Série A. Travaux généraux ; 32).]
26 [Sur Abraham Trembley, voir Volume 2, Leçon 15, note 61.] [Le septième volume des Mémoires pour servir à l’histoire des insectes de Réaumur fut publié à titre posthume en deux parties (« L’histoire des fourmis » et « L’histoire des scarabées »), édités par Paul Le Chevalier : Histoire des fourmis [intr. de Bouvier E. L. ; annotée par Pérez Charles], Paris : 1928, 116 p., [3] feuil. de pl. (Encyclopédie Entomologique. Série A. Travaux généraux ; 11.) ; Histoire des scarabées [intr. de Caullery Maurice ; mise en ordre et notes par Lesne Pierre & Picard F.], Paris : 1955, 340 p., 21 feuil. de pl. (Encyclopédie Entomologique. Série A. Travaux généraux ; 32).]
27 [Sur Jean-Baptiste Huzard, voir Leçon 15, note 104, ci-dessus.]
28 [Institut de France, voir Leçon 8, note 78, ci-dessus.]
29 [Sur Georges-Louis Leclerc, Comte de Buffon, voir Volume 1, Leçon 7, note 39 ; et Volume 2, Leçon 4, note 31.]
30 [Référence au Journal de Trévoux, officiellement intitulé Mémoires pour l’Histoire des Sciences & des Beaux-Arts, plus connu sous le nom de Mémoires de Trévoux. Il s’agissait d’une publication académique mensuelle influente qui parut en France entre janvier 1701 et décembre 1782. Le journal publiait des comptes rendus critiques de livres et de débats sur une variété de sujets, essentiellement non littéraires. Bien qu’ils minimisaient leurs rattachements à l’ordre, la plupart des auteurs étaient membres de la Société de Jésus (Jésuites). Lorsque les questions religieuses, morales ou politiques étaient abordées, les tentatives pour rester neutres s’évanouissaient.]
31 [Sur l’Histoire Naturelle, générale et particulière, avec la description du Cabinet du Roi de Buffon, voir Volume 1, Leçon 7, note 39.]
32 [Un homme nommé Paul Pellisson, secrétaire (de Nicolas Fouquet) à la cour de Louis XIV, fut envoyé à la prison de la Bastille pour une peine de cinq ans. Durant son incarcération, Pellisson, qui avait beaucoup de temps libre et ne pouvait pas rester sans rien faire, s’occupa à lire et écrire ; et fréquemment, pour se distraire, il jouait de la flute. À ces moments là, il put observer qu’une grosse araignée qui avait tissé sa toile dans un coin de la pièce sortait de son trou, comme pour écouter la musique. Pour l’encourager, Pellisson continua à jouer, tant et si bien que l’insecte devenu si familier, n’hésitait plus à l’approcher pour manger dans sa main quelques mouches. L’histoire parvint aux oreilles de ses geôliers, qui se crurent obligés d’aller la raconter au gouverneur de la Bastille, un homme sans pitié. Déterminé à priver le prisonnier de son seul compagnon-insecte, le gouverneur alla le voir dans sa cellule et lui dit : « Ainsi, Monsieur Pellisson, j’ai entendu dire que vous vous étiez trouvé un compagnon ». « C’est vrai », lui répondit-il, « et bien que nous ne puissions converser, nous nous comprenons très bien ». « Je ne peux croire ce que je viens d’entendre, déclara alors le gouverneur, mais je suis prêt à me laisser convaincre ». Pellisson, ne se doutant pas des intentions réelles du gouverneur, appela aussitôt l’araignée, qui arriva pour se faire nourrir dans la main du prisonnier qui pouvait même la caresser. Le gouverneur, saisissant l’occasion, la jeta par terre pour l’écraser sous son pied. Puis il quitta la pièce sans dire un mot.]
33 [Les ombellifères, membres de la famille des Umbelliferae (ou Apiacées), communément connus comme les carottes ou plantes de la famille des persils, sont des plantes aromatiques aux tiges creuses, comprenant un grand nombre de variétés connues comme l’angélique, l’anis, le carvis, la carotte, le céleri, la coriandre, le cumin, l’aneth, le fenouil, la cigüe, la dentelle de la Reine Anne (ou carotte sauvage), le panais et le panicaut maritime.]
34 [Plantes crucifères, largement représentées par les légumes cultivés de la famille des Brassicaceae (ou Cruciferae), comprenant de nombreux genres et espèces, elles sont cultivées pour la production alimentaire, à l’exemple des choux-fleur, choux, cresson, choux chinois, brocolis, choux de Bruxelles, et autres légumes verts similaires.]
35 [Charles-Georges Leroy ou Le Roy (né le 22 janvier 1723, Paris ; mort le 11 novembre 1789, Paris), naturaliste, philosophe et homme de lettre français, il est l’auteur du premier livre sur le comportement animal : Lettres philosophiques sur l’intelligence et la perfectibilté des animaux, avec quelques lettres sur l’homme, Nuremberg : [s. n.], 1768.]
36 [Hermann Samuel Reimarus (né le 22 décembre 1694, Hambourg ; mort le 1er mars 1768, Hambourg), philosophe allemand et écrivain des Lumières connu pour son déisme, doctrine selon laquelle la raison humaine peut accéder à la connaissance divine et à la morale par une connaissance de la nature et de la réalité intérieure de chacun, ce qui revient à ne plus avoir besoin des religions basées sur la révélation.]
37 M. [Marie Jean Pierre] Flourens [physiologiste français, fondateur de la science expérimentale du cerveau et pionnier de l’anesthésie — en étudiant des ablations sur des animaux, il fut le premier à prouver que l’esprit était situé dans le cerveau et non le cœur — né le 13 avril 1794, Maureihan, France ; mort le 6 décembre 1867, Montgeron, France], secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences, professe, dans le cours de physiologie comparée qu’il fait chaque année au Jardin du Roi : 1° que l’instinct des animaux réside, de même que leur intelligence, dans les hémisphères cérébraux ; 2° que l’intelligence est d’autant plus puissante que les hémisphères cérébraux sont plus développés, mais que l’instinct subit une loi inverse, c’est-à-dire qu’il diminue lorsque le cerveau proprement dit augmente, ou bien qu’il est plus développé lorsque les hémisphères cérébraux le sont moins. Il résulterait de ces faits, s’ils sont bien établis, qu’il y aurait une sorte d’antipathie entre l’instinct et l’intelligence. Au reste, l’honorable professeur avoue, avec la candeur d’un vrai savant, qu’il ne peut pas expliquer comment il arrive que, l’intelligence augmentant en raison directe du développement des hémisphères cérébraux, l’instinct, qui a son siège dans ces mêmes parties de l’encéphale, et qui produit des effets analogues à ceux de l’intelligence, n’augmente pas dans la même proportion. Peut-être M. Flourens parviendra-t-il à pénétrer ce mystère ? Peut-être arrivera-t-il à distinguer la partie des hémisphères cérébraux qui est destinée à l’intelligence, de celle qui sert de siège à l’instinct ? Il est permis de l’espérer du physiologiste qui a découvert : 1° que le cervelet est l’organe régulateur des mouvements de locomotion, et non point le siège de l’amour physique, comme [Franz Josef] Gall [voir Volume 2, Leçon 2, note 46] l’a prétendu à tort, puisque l’animal auquel on a enlevé le cervelet n’en manifeste pas moins, lorsqu’il est guéri, l’amour physique ; 2° que les diverses facultés de l’homme ont pour siège les hémisphères cérébraux, et non pas toutes les parties de l’encéphale, comme Gall l’a encore prétendu à tort, puisque l’ablation des hémisphères cérébraux fait seule disparaître le jugement, la mémoire et la volonté. Si j’ai cité ces deux découvertes de M. Flourens de préférence à toutes les autres, c’est qu’elles m’ont paru les plus importantes, parce qu’elles renversent la plus grande partie du trop fameux système de Gall, qui tend à dénier l’indépendance de la volonté humaine, et par conséquent à soustraire l’homme à la responsabilité de ses actions. [M. de St.-Agy]
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