Le Muséum national d’Histoire naturelle et l’amélioration des plantes au xixème siècle
p. 375-402
Note de l’éditeur
Gayon, J., 1997. Le Muséum national d’Histoire naturelle et l’amélioration des plantes au XIXème siècle, in : C. Blanckaert et al. (eds), Le Muséum au premier siècle de son histoire : 375-402. Muséum national d’Histoire naturelle, Archives. Paris ISBN 2-85653-516-X.
Texte intégral
1Quel rôle le Muséum national d’Histoire naturelle a-t-il joué dans l’amélioration des espèces végétales ? Il est à peine besoin de rappeler que, dès la création de l’institution, le législateur a mentionné cet objectif comme l’une de ses missions prioritaires. Le décret de la Convention du 10 juin 1793 définissant l’organisation du Muséum ne se contente pas de prescrire un “enseignement public de l’histoire naturelle” susceptible, entre autres choses, de contribuer à “l’avancement de l’agriculture”1. Il indique aussi le moyen de cette application : le Muséum doit collecter les plantes nouvellement domestiquées ou découvertes et réussir leur culture, en ayant égard à leur utilité pour l’agriculture, le commerce et les arts2. L’objectif d’amélioration est par ailleurs très bien défini dans le “Projet de règlement” rédigé par Fourcroy, Thouin et Jussieu, et adopté par le Ministère de l’Instruction publique. Ce règlement stipule qu’en ce qui concerne les “plantes utiles à la nourriture de l’homme et des animaux domestiques”, les variétés retenues seront cultivées “par petites masses et non par touffes isolées, afin qu’elle puissent donner des expériences comparatives sur leurs produits, et qu’elles fournissent des graines dans une proportion assez considérable pour être répandues dans les différents départements de la République”3. En pratique, cet objectif fut accompli par la création d’une chaire et d’un service de “Culture”4. D’abord confiée à André Thouin, ancien “Jardinier en chef” du roi, cette chaire fut maintenue sans interruption ni modification d’intitulé pendant un siècle et demi ; en 1929, on lui adjoignit une chaire d’agronomie coloniale5. L’importance de la chaire de culture est par ailleurs illustrée par la part des dépenses qu’elle représentait : dans les années 1830-1850, ces dépenses ont représenté en moyenne 8 à 10 % du budget du Muséum. Toutefois ce chiffre est à prendre avec précaution, car il récapitule en fait l’ensemble des dépenses du “Jardin”6.
2Quoi qu’il en soit, l’examen des activités du Muséum sous l’angle de l’amélioration des plantes permet de documenter deux aspects délicats dans l’histoire de cet établissement de “haut enseignement scientifique”, pour reprendre une expression canonique du siècle dernier : d’une part, le rapport entre le Muséum et l’agriculture - car l’institution scientifique française majeure du XIXème siècle avait à la fois une mission de recherche théorique fondamentale et une mission de recherche “appliquée”7 – ; d’autre part, les recherches qui y ont été menées dans le domaine essentiel de l’hérédité. Nous verrons à cet égard comment l’alternative entre histoire naturelle et science expérimentale a constitué l’une des difficultés majeures rencontrées par le Muséum au siècle dernier.
3Le lien entre ces questions peut être formulé de manière plus crue. De nombreux historiens s’accordent aujourd’hui pour dire qu’autour de 1900, la génétique s’est surtout développée dans des pays et dans des lieux institutionnels capables d’associer des compétences naturalistes et une méthodologie expérimentale de laboratoire dans le but d’améliorer des espèces domestiquées8. Le Muséum de Paris, avec sa chaire de culture et avec son caractère d’institution de recherche hésitant entre naturalisme et science expérimentale au XIXème siècle, semblerait correspondre à cette image. Or les faits l’infirment : de toutes les institutions françaises, au demeurant bien peu présentes dans l’aventure de la naissance de la génétique, le Muséum a sans doute été la plus absente.
4Nous décrirons le rôle du Muséum dans les recherches françaises sur l’amélioration des plantes sous deux angles. Nous situerons d’abord le grand établissement national dans l’histoire générale de l’enseignement et de la recherche agronomiques ; nous examinerons ensuite de quelle manière les naturalistes attachés à la chaire de culture ont contribué à l’amélioration des plantes de la Révolution à la 2ème Guerre mondiale.
Le Muséum dans la politique d’enseignement et de recherche agronomique au XIXème siècle
5Comme l’a bien montré Thérèse Charmasson dans un livre récent9, si l’idée d’un enseignement agricole était un but affiché de la Révolution, les seules réalisations qu’on puisse lui imputer de ce point de vue furent la création de la chaire de culture du Muséum et la réorganisation des écoles vétérinaires. Cependant, la fonction assignée au professeur de culture par le décret de 1793 n’était pas simplement l’enseignement ; il lui revenait aussi de rechercher les espèces et les variétés végétales les plus utiles pour l'alimentation, la médecine ou toute autre application pratique. Les fonctions de la chaire de culture ne se limitaient pas à des tâches d’enseignement et de recherche ; elle devait aussi contribuer au développement de l’agriculture nationale.
6Jusqu’en 1848, la chaire de culture du Muséum est demeurée en France la seule institution étatique d’enseignement agricole supérieur. À cette date, l’Assemblée adopta un projet de décret impliquant la mise en place d’un système d’enseignement agricole à trois niveaux : des “fermes-écoles” destinées à la formation de travailleurs agricoles, des écoles régionales pour la formation des chefs d’exploitation et, au niveau supérieur, l’Institut National d’Agronomie (INA), ayant vocation d’instruire des ingénieurs ruraux et des professeurs pour les écoles régionales. L’Institut National d’Agronomie devait être aussi un établissement de recherche, ayant pour mission “l’introduction et l’amélioration de nouvelles espèces animales ou végétales étrangères à notre sol ou à notre climat”10. Cette mission recoupait évidemment celle de la chaire de culture du Muséum. Toutefois la nouvelle institution, comme toutes les écoles d’agriculture, était désormais placée sous le contrôle du “Ministère des travaux publics, de l’agriculture et du commerce”, le Muséum demeurant sous l’autorité du “Ministère de l’Instruction publique”. L’intention affichée du ministre Tourret, auteur du projet de décret, était de dynamiser les recherches sur la modification et l’acclimatation des espèces dans le sens d’applications pratiques bien définies. L'école disposait du potager du roi à Versailles, des pépinières de Trianon et était relativement proche des cultures des Établissements Vilmorin à Verrières-le-Buisson11.
7La première rentrée de l’Institut National d’Agronomie eut lieu en 1850, consacrant l’effacement de la mission proprement agronomique du Muséum. Toutefois LINA fut supprimé dès 1852, en raison de son coût excessif, mais aussi parce que le Second Empire préférait placer l’enseignement agricole et horticole sous l’autorité du Ministère de l’Instruction publique. C’est ainsi qu’émergea au milieu des années 1860 l’idée de restaurer un enseignement supérieur d’agriculture dans le cadre du Muséum. À la demande de Victor Duruy, ministre de l’Instruction publique, Edmond Frémy, professeur de chimie au Muséum, soumit au Ministère en 1867 un “projet d’utilisation du Muséum au point de vue de l’enseignement agricole”. Il s’agissait de constituer une école de formation théorique d’ingénieurs qui fût “en quelque sorte l’École polytechnique de l’agriculture”12. Victor Duruy, ministre de l’Instruction publique se prononça en faveur de ce projet en 1868, se montrant particulièrement attentif à ce que les enseignements fussent assurés dans le cadre des chaires existantes du Muséum. De fait, les titulaires des chaires de botanique, culture, zoologie, physiologie comparée, anatomie comparée, physique et chimie, proposèrent des programmes publiés au Journal officiel en mars 186913. Une première promotion de vingt-quatre élèves agronomes fut recrutée parmi des élèves-instituteurs des écoles normales, pour des cours qui commencèrent le 15 avril de la même année. Pour d’obscures raisons, tenant au non paiement des allocations d’études par le Ministère, les cours ne reprirent pas en septembre 1869. Après la guerre de 1870, le cursus fut abandonné et en 1876 le Ministère de l’agriculture et du commerce, puissamment encouragé par des associations professionnelles, rétablit l’Institut National d’Agronomie.
8Ces éléments contextuels permettent de mieux apprécier la signification de la chaire de culture du Muséum. Jusqu’en 1848, cette chaire, avec ses moyens propres, est demeurée l’unique lieu d’enseignement et de recherche agronomique théorique. La période allant de 1848 à 1870 est marquée par une hésitation des pouvoirs publics, tantôt enclins à la création d’un institut professionnel autonome hors du Ministère de l’Instruction publique, tantôt portés à étendre la mission de formation du Muséum. L'on peut remarquer en outre que cette période, comme l’a justement noté Camille Limoges14, est aussi celle où le Muséum s’est efforcé d’affirmer sa vocation de recherche expérimentale par la création de chaires lui permettant de soutenir la concurrence croissante de la Faculté des sciences de Paris (par exemple la chaire de “chimie appliquée aux corps organiques” fut transformée pour Chevreul en 185015, celle de “physique végétale” fut créée pour Georges Vitte en 1857, et celle de “physiologie générale et comparée” fut transformée en 1868 pour Claude Bernard16)
9Cette double hésitation, entre science théorique et science appliquée d'une part, entre histoire naturelle et science expérimentale d’autre part, s’est exprimée dans de multiples rapports et textes parfois pamphlétaires, parus dans les années 1850-1880. En 1858, Auguste Dupoty, en tant qu’“ancien rédacteur en chef du Journal du peuple”, réclame que le Muséum, à l’instar du Collège de France, ne s’occupe que de “science pure” et que l’on supprime la chaire de culture, qu’il juge “trop pratique” et “de pure application agricole et horticole”17. Ce texte faisait écho à un rapport confidentiel remis la même année à Napoléon III, où l’on s’émouvait de l’excessive indépendance du Muséum et de son inefficacité pédagogique18. En 1863, Eugène Chevreul, directeur du Muséum, défend l’institution en déclarant que le Jardin des plantes avait rendu d’importants services à l’agriculture en entretenant et diffusant une collection “unique en Europe” de végétaux utiles19. Le même Chevreul rédige en 1869 un long plaidoyer en faveur de l’institution d’un enseignement agricole théorique et pratique au Muséum, venant en l’occurrence soutenir la décision de Victor Duruy d’instituer un enseignement agricole théorique dans le grand établissement20. Mais la même année, Marcou, dans son monumental bilan en cinq volumes intitulé La Science en France, propose une réforme radicale du Muséum : scandalisé par l’absence d’élèves aux cours, mais aussi par les détournements de fonds et les cumuls (par exemple celui de Lacaze-Duthiers, doyen de la Faculté des sciences de Paris et sous-directeur du Muséum), il demande de “supprimer tous les professeurs”, d’éliminer toute recherche expérimentale et de ne conserver que les collections, à l’instar du Kew garden de Londres21. Inversement, quelques années plus tard, Marcelin Berthelot, ministre de l'Instruction publique, propose d’aligner le Muséum sur la Sorbonne, en lui assignant pour mission prioritaire de préparer des étudiants à licence et à l’agrégation de sciences naturelles. À quoi Henri de Lacaze-Duthiers répond, en 1881, que la fonction du Muséum n’est pas de transmettre à grande échelle la science faite (mission de l’Université), ni de contribuer à l’approfondissement de la science expérimentale (vocation du Collège de France), encore moins de servir l’agriculture (dérive “utilitariste”), mais d’être un établissement de “science pure” consacré à l’inventaire exhaustif (“l’histoire”) des formes végétales et animales. “La tendance des administrations à faire servir le Muséum ou le Jardin des plantes du roi au progrès de l'agriculture et du commerce est [...] bien évidente”, écrit Lacaze-Duthiers dans un grand journal de vulgarisation scientifique. Cependant - ajoute-t-il-, “par la force des choses, le Muséum est devenu le type d’un établissement à collections, [...] sans limites autres que celle des locaux. [...] Que doit être le Muséum ? Nous n’hésitons pas à le dire : c’est un établissement où la science pure doit être enseignée et cultivée. Tout essai d’application uniquement pratique ou bien y échouera, ou bien, aboutissant à un amoindrissement des études scientifiques, sera un malheur pour la science. [...] La pratique agricole ou tout autre n’a pas réussi au Muséum, parce qu’elle n’y avait pas sa place”22.
10Ces polémiques sur la finalité du Muséum illustrent bien la place incertaine du Muséum dans l’appareil institutionnel de la science française au milieu du siècle dernier. Quoi qu’il en soit, l’enseignement agronomique supérieur s’est définitivement affranchi de la tutelle du Ministère de l’Instruction publique et donc du Muséum, avec la IIIème République. Toutefois, la chaire de culture est demeurée et son rôle s’est même amplifié à partir des années 1880. Aussi bien convient-il, avant d’en venir aux contributions spécifiques des savants qui ont travaillé dans le cadre de cette chaire, de comprendre la remarquable continuité de cette chaire pendant un siècle et demi.
11Cette cohérence est en fait largement indépendante du genre de travail de recherche scientifique mené par les titulaires successifs de la chaire. Il s’agit d’un ensemble de “services” rendus par le Muséum à toutes sortes d’instances, publiques et privées, concernées par la culture des plantes dans la République. Pour apprécier ces services, il convient de revenir sur le décret fondateur du Muséum de 1793. Ce décret comprenait quatre titres, portant respectivement sur “l’organisation générale du Muséum”, les “cours” qui y étaient donnés, la “Bibliothèque” et les “correspondances du Muséum”. Or ce dernier titre est en grande partie consacré à une mission spécifique assignée au “professeur de culture”. L’article 3 en est ainsi libellé : “Art. 3. — Le professeur de culture sera chargé de faire parvenir dans les jardins de botanique, situés dans les divers départements de la France, les graines des plantes et des arbres rares, recueillies dans le jardin du Muséum : ces envois pourront être étendus jusqu’aux nations étrangères, pour en obtenir des échanges propres à augmenter les vraies richesses nationales”23.
12Peu après, le projet de règlement du Muséum rédigé par Fourcroy, Thouin et Jussieu précisait les buts et l’organisation de l’ensemble des composantes du Jardin de botanique, directement placé sous la responsabilité du professeur de culture. Les buts étaient au nombre de trois : d’abord le rassemblement du plus grand nombre d’espèces de végétaux destinés à l’instruction publique (cet objectif était manifestement lié aux enseignements proprement théoriques de botanique) ; en second lieu “la multiplication et la naturalisation des plantes étrangères qui offrent quelques objets d’utilité et d’agrément” ; enfin, “la distribution des semences dans toutes les parties du monde et particulièrement de la France”24.
13En accord avec ces buts, le règlement stipulait l’organisation précise des diverses “écoles botaniques” capables de les réaliser. Le terme d’“école de botanique” ou “école” tout court est traditionnellement employé en horticulture pour désigner une plantation particulière dans laquelle on entretient un certain type de plantes (par exemple “école des poiriers”, “école des pommiers”, etc.). Le terme est générique et peut s’appliquer à diverses échelles d’organisation d’un jardin botanique. Le règlement de 1793 stipulait que l’une des “écoles” devait consister dans la plantation de “petites masses” plutôt que de “petites touffes isolées”, de manière à rendre possible des “expériences comparatives”, et à “[fournir] des graines dans une proportion assez considérable pour être répandues dans les différents départements de la République”25. Il s’agissait en fait d’un service de sélection de plantes domestiques. Si l’on tient compte du fait qu’il fallait aussi collecter des plantes étrangères, les cultiver de manière à les acclimater ou au moins conserver, stocker les graines de plusieurs milliers d’espèces ou variétés et envoyer chaque année un nombre considérable d’échantillons dans toutes sortes de stations botaniques des départements métropolitains ou coloniaux, ainsi que dans des institutions étrangères, l’on comprend qu’il s’agissait d’une structure lourde, requérant beaucoup de personnels, de place et de crédits.
14En 1863, dans son mémoire de défense du Muséum adressé au ministre de l’Instruction publique, Chevreul a donné des chiffres qui illustrent bien l’ampleur de la mission remplie. Il mentionne par exemple que de 1800 à 1862, le nombre de plantes différentes cultivées est passé de sept mille quatre cent soixante-dix à quinze mille quatre cent cinquante-trois. En ce qui concerne les variétés de certaines plantes, il rappelle que de cent soixante-dix-huit variétés de Poiriers entretenues en 1800, on était passé à mille cent treize soixante ans plus tard. Il indique aussi qu’à cette époque, le service de diffusion de graines disposait des stocks de six mille sortes de graines et expédiait annuellement quatre-vingt-dix mille sachets de semences en France et dans le monde26. Aussi Chevreul s’estimait-il fondé à disculper le Muséum des attaques menées contre son budget dispendieux : “ce n’est donc pas seulement par le côté scientifique et brillant que le Muséum indemnise l’État de ses avances, c’est tout autant par des services plus modestes, mais dont l’utilité pratique n’est pas moins incontestable. [...] Je n’hésite pas à le dire : le Muséum tel qu’il est, tel qu’il est administré, rend les plus éminents services à la science, à l’agriculture et aux arts, aux établissements publics et aux simples particuliers”27. Ce tableau ne serait pas complet si l’on ne mentionnait enfin que le Jardin avait aussi pour fonction de former des “jardiniers-naturalistes”, souvent appelés aussi “botanistes-cultivateurs”, qui étaient ensuite placés dans des stations provinciales ou coloniales dont ils devenaient les directeurs.
15Tel était le profil socio-professionnel de la “chaire de culture”. Cette organisation n’a pas été au demeurant spécifique de la France. Toutes les grandes nations européennes se sont pourvues de jardins assurant des missions comparables, et parfois dotés de moyens plus importants (par exemple le Kew garden de Londres). Ce qui a distingué le Jardin du Muséum, c’est son statut d’institution d’enseignement scientifique : le gestionnaire des Jardins était un professeur de rang analogue à celui des autres naturalistes du Muséum. Il y avait là une connexion intéressante entre l’univers de la science théorique et celui de l’agronomie, voulue par les révolutionnaires, qui avaient transformé la fonction de “jardinier du roi” en celle de “professeur de culture”. Au cours de la IIIème République et après la création de l’Institut National d’Agronomie, cette connexion ne s’est pas effacée. Elle s’est au contraire accentuée, mais d’une manière singulière : à mesure que s’est développée la colonisation, la mission d’acclimatation des plantes s’est renforcée ; le Muséum est devenu l’agent majeur d’une politique agricole coloniale consistant à transporter des plantes de la métropole vers les colonies, et surtout de colonie à colonie. Il s’agit là d’un volet politico-économique extrêmement important dans l’histoire du Muséum, qui a souvent été souligné par ses historiographes28. Mais il s’agit aussi d’un développement scientifique assez désastreux, sur lequel nous allons bientôt revenir, en nous penchant sur les contributions proprement scientifiques de la chaire de culture au XIXème siècle.
La “chaire de culture” et l’amélioration des plantes
16Comment les savants qui ont occupé la chaire de culture, ou travaillé dans son orbite, ont-ils contribué à l’entreprise technico-scientifique de l’amélioration des plantes.
17Ce tableau donne la liste des titulaires successifs de la chaire de culture de 1793 à 1933. L'on y a porté aussi la date de création de la chaire d’agronomie coloniale, étroitement liée à l’orientation prise par la chaire de culture dans les dernières décennies du XIXème siècle. Nous ne détaillerons pas ici les travaux scientifiques de ces savants en matière d’amélioration des plantes29. Nous nous contenterons de décrire trois moments qui nous paraissent particulièrement significatifs dans les contributions du Muséum à l’aventure de l’amélioration des plantes.

Tableau – Liste des titulaires de la chaire de culture de sa création en 1793 à 1932. On a aussi porté la date de création de la chaire d’agronomie coloniale, expansion de la précédente.
André Thouin : l’amélioration des plantes par le semis
18De tous les titulaires de la chaire de culture, André Thouin (1747-1824) est le seul qui ait vraiment été professeur d’agriculture. Jardinier en chef sous l’Ancien Régime, physiocrate notoire, artisan principal avec Louis Daubenton du sauvetage du Jardin du roi et de sa transformation en Muséum, Thouin fut un théoricien polyvalent de la culture des plantes30. Un aspect de son œuvre a spécialement marqué l’agronomie française de la première moitié du XIXème siècle. Quoique Thouin ait été l’un des meilleurs spécialistes des greffes de son époque31, il n’a cessé de répéter, dans son cours d’agriculture32, que le seul moyen efficace pour obtenir de nouvelles variétés et pour perfectionner les plantes résidait, non dans les soins et modifications apportées aux plantes formées (les greffes étant précisément un moyen majeur d’obtenir de telles modifications), mais dans le triage des semis.
19Une citation suffira pour illustrer ce point. Il s’agit de la déclaration solennelle figurant en tête de l’article “semis”, paru en 1805 dans le Cours complet d’agriculture... de l’abbé Rozier : “les semis sont la voie de multiplications la plus naturelle, l’unique pour les plantes annuelles, celle qui procure une multiplication plus abondante, qui fournit des sujets plus vigoureux, de la plus belle venue et de la plus longue durée ; elle donne des variétés dont quelques-unes ont des qualités perfectionnées et des propriétés plus évidentes que celles des espèces auxquelles elles doivent leur existence ; elle procure enfin des races qui s’acclimatent plus aisément au sol sous lequel elles sont nées, que les pieds en nature transportés de leur pays natal. Sous tous les rapports, cette voie de multiplication doit être préférée pour la propagation des espèces, et pour l’obtention de nouvelles variétés”33.

FIG. 1 - Thouin (André) 1747 - 1824. Litho de Boilly.
20Cette déclaration, reprise en de nombreuses circonstances, a profondément marqué plusieurs générations d’horticulteurs. L’idée d’une amélioration des plantes par isolement de “races constantes” obtenues à partir des graines d’un seul individu n’est cependant pas une innovation de Thouin. Elle avait été en particulier établie avec une grande rigueur par Antoine Nicolas Duchesne dans son Histoire naturelle des fraisiers (1766)34. Dans un appendice de cet ouvrage, Duchesne avait montré comment il avait pu, à partir des graines d’un unique fraisier individuel, obtenir “un fraisier à feuilles simples, qui se reproduit constamment par ses graines” et concluait sa monographie sur ces remarquables déclarations : “je ne crois pas pouvoir mieux faire que de dire [comme Marchant] que les Espèces paraissent fixes et immuables, mais que les accidents qui font varier certains individus, procurent à d’autres des changements assez considérables pour qu’ils se perpétuent dans leur postérité, qui forme ainsi une race”35. De manière générale, l'Histoire naturelle des fraisiers, que Duchesne présente avec raison comme un “Essai sur l’histoire naturelle des plantes”36, est un plaidoyer en faveur d’une représentation intégralement “généalogique” des races d’une même espèce37.
21On doit à Thouin la radicalisation de la devise pratique selon laquelle les semis constituent la manière la plus efficace d’améliorer les plantes et en particulier de les acclimater. La doctrine professée par Thouin était imprégnée de ce que l’on a plus tard appelé “l’hérédité des modifications acquises”38 (puis “hérédité des caractères acquis”), car elle impliquait que les semis eussent la capacité d’acquérir et de transmettre de nouvelles propriétés lorsqu’on les transportait d’un climat dans un autre. Oscar Leclerc-Thouin, neveu et assistant d’André Thouin, a très clairement exprimé cette doctrine, qu’il nommait “la grande loi pratique du renouvellement des semences” : “[...] de nouvelles études, tout en démontrant de mieux en mieux l’impossibilité d’acclimater un végétal ou de l’habituer individuellement à supporter des froids de plus en plus intenses depuis le jour de son introduction jusqu’à celui de sa mort, démontreront aussi non seulement, au profit de la pratique, qu’il n’est pas impossible, par la voie du semis, d’obtenir accidentellement des variétés plus rustiques que l’espèce, mais, au profit de la physiologie, que les circonstances extérieures qui ont modifié, dans les limites du possible, l’existence d’un arbre aussi bien que d’une plante, peuvent réagir sur les caractères originels de ses descendants. [...] Les semis seuls ont le pouvoir de donner naissance à de nouvelles espèces culturales [...] ; si l’on admet que la rusticité soit un caractère qu’ils puissent transmettre, ce sera un motif de plus pour les recommander à l’attention publique et aux soins des expérimentateurs jaloux d’enrichir à la fois le domaine de l’agriculture et de l’horticulture”39.
22Oscar Leclerc-Thouin était au demeurant tout à fait conscient des implications lamarckiennes de cette doctrine. Dans le même texte, il précise les trois implications de la loi du “renouvellement des semences”, à savoir “1o) que les caractères, de quelque nature qu’ils soient, qui constituent les races cultivées, préexistent dans le germe ; 2o) que ces caractères, contractés en ligne ascendante, tendent à se transmettre en ligne descendante ; 3o) qu’ils sont le résultat d’habitudes prises sous l’influence de causes agissant progressivement par leur continuité”40.
23C’est très probablement par le biais de ce genre de doctrine, largement diffusée par ailleurs par Isidore Geoffroy Saint-Hilaire dans le domaine de l’acclimatation de espèces animales41, que les horticulteurs français en sont venus les premiers à faire de la notion d’“hérédité naturelle” une notion-clef dans la théorie de l’amélioration des plantes dans la première moitié du XIXème siècle. Il y a continuité entre la doctrine et les pratiques d’acclimatation diffusées si vigoureusement par André Thouin et les grands travaux des hybrideurs et sélectionneurs français du milieu du XIXème siècle, en particulier de Sageret, de Lecoq, puis de Pierre-Philippe et Louis de Vilmorin.
24Il est à peine besoin de noter en outre que le rapport établi par Thouin entre la multiplication par semis d’une part, l’acclimatation, l’amélioration et le transport des plantes d’autre part, s’accorde parfaitement avec la mission qu’il avait conçue pour la chaire de culture du Muséum et l’organisation pratique du travail qu’il avait imposée. La doctrine de l’amélioration des plantes par le semis a en réalité organisationnellement justifié la chaire de culture pour cent cinquante ans.
Decaisne, Naudin, Louis de Vilmorin : l’occasion manquée
25Après André Thouin, la chaire de culture revint à Louis Auguste Guillaume Bosc (1759-1828), puis à Charles François Brisseau de Mirbel (1776-1854). Lors de son bref passage à la chaire de culture (1825-1828), le premier s’occupa surtout de viticulture et d’acclimatation d’arbres importés d’Amérique du Nord. Le second occupa la chaire de 1828 à 1849 et fut fondamentalement un pionnier de l’anatomie microscopique des organes végétaux (ce que l’on appellerait aujourd’hui la cytologie végétale) ; homme de science fondamentale, il ne s’intéressa guère à l’horticulture, sinon comme gestionnaire disposé à mettre les moyens du Muséum au service de l’ornementation de tel ou tel jardin royal. Du point de vue qui nous intéresse — l’amélioration des plantes —, la seconde période cruciale pour la chaire de culture se situe en réalité dans les années 1850 à 1870. Un climat de recherche s’est alors constitué, exceptionnellement favorable à des avancées majeures sur les problèmes de la variation et de l’hérédité. Trois noms méritent ici d’être évoqués.

FIG. 2 - Decaisne (Joseph) 1807 - 1882. Reproduction d'un portrait in Journal of the Royal society of new South Wales, vol. 44, 1910, pl. 11.
26Le premier est celui de Joseph Decaisne (1807-1882)42. D’origine belge, celui-ci est entré à dix-sept ans au Muséum, en 1824 — l’année même du décès d’André Thouin.
27Ouvrier-jardinier, puis chargé de la graineterie, il devint aide-naturaliste (c’est-à-dire, en pratique, sous-directeur) de “botanique à la campagne”43 et prit la chaire de culture en 1850, pour la garder jusqu’à sa mort en 1882. Joseph Decaisne ne fut sans doute pas ce que l’on a coutume d’appeler un “grand savant” qui aurait laissé des “découvertes” propres à immortaliser son nom. Tout comme André Thouin, c’était un “botaniste-jardinier”, mais à la différence de celui-ci, il est venu à une époque où il était devenu moins évident que la recherche et l’enseignement agronomique dût se développer au Muséum. La longue carrière de Decaisne au Muséum correspond à cette période, capitale dans l’histoire de la biologie du XIXème siècle, où les théoriciens de la transformation des espèces (en particulier Isidore Geoffroy Saint-Hilaire et Charles Darwin) ont emprunté aux horticulteurs et sélectionneurs de bétail les données et concepts relatifs à la variation et à l’hérédité dont ils avaient besoin. Au même titre que Charles Naudin (dont il fut le supérieur hiérarchique au Muséum), Louis de Vilmorin (qu’il admirait et fréquentait) et Alexis Jordan (avec qui il a beaucoup polémiqué), Decaisne est représentatif de cette phase transitoire mal connue durant laquelle les concepts d’espèce, de variation, d’hérédité et de sélection se sont cherchés dans un contexte associant étroitement l’histoire naturelle à l’entreprise d’amélioration des espèces domestiquées. L’historiographie reçue a eu trop tendance à centrer cette histoire sur l’Europe du Nord de la fin du XIXème siècle, en insistant sur le lien étroit que les Scandinaves et les Anglais ont su nouer entre biologie expérimentale, histoire naturelle et amélioration des espèces domestiquées dans le but de dénouer l’énigme de l’hérédité.
28L’œuvre de Decaisne se partage entre des mémoires d’anatomie végétale sur des plantes de grande importance économique (mémoire sur la matière colorante de la garance, mémoire sur la localisation du sucre dans la betterave)44 et un ensemble (plus important en quantité) de publications horticoles, étroitement liées à son investissement, en tant que professeur de culture, dans les sociétés et revues horticoles majeures de l’époque45. Cet investissement mérite d’être remarqué. Les titulaires ultérieurs de la chaire de culture, s’ils ont entretenu des relations régulières avec les institutions agronomiques et horticoles, ont été moins concernés par elles dans l’organisation de leur œuvre scientifique propre et se sont comportés comme des “botanistes” plutôt que comme des “botanistes-jardiniers”. Ceci tient à la séparation franche de la recherche et de l’enseignement agronomiques après la guerre de 1870 (cf. supra).
29L’œuvre scientifique majeure de Decaisne a porté sur la variabilité du poirier (Pyrus communis). En un sens, elle illustre bien les conditions dans lesquelles travaillait le professeur de culture. Ne disposant pas de laboratoire propre, son champ d’expérience était constitué par les “écoles” (les plantations) dont il avait la charge au Jardin, l’école des arbres fruitiers étant l’une des plus importantes. Decaisne a donc développé son travail expérimental sur le poirier dans le cadre de l’élaboration d’un grand catalogue des arbres fruitiers du Muséum46. L'étude scientifique proprement dite47, réalisée de 1852 à 1863, visait à déterminer si les nombreuses variétés du poirier cultivé méritaient ou non d’être interprétées comme des “espèces”, terme que Decaisne comprenait au sens de lignées dans lesquelles les caractères se transmettent de manière stable par voie de génération. En examinant le cas du poirier, Decaisne entendait jeter une lumière expérimentale sur la question de la définition de l’espèce, fondamentale pour la théorie de l’histoire naturelle.
30Decaisne voulait trancher entre deux hypothèses : la vieille hypothèse de Linné, consistant à admettre la “variabilité de l’espèce” et celle, plus en vogue dans les années 1850, du botaniste lyonnais Alexis Jordan, qui interprétait les variétés comme étant en réalité de petites espèces invariables48. L'école des poiriers du Muséum constituait un champ d’analyse intéressant : à sa mort en 1824, Thouin avait laissé une école comptant deux cent soixante-cinq variétés recensées ; cinquante ans plus tard, il y en avait mille quatre cents. Y avait-il donc autant de “menues espèces” de poiriers, ou une seule et unique grande espèce “variable” ? La méthode de Decaisne fut de recueillir les fruits de quatre individus appartenant à des variétés très différentes, d’en planter les graines et d’observer soigneusement les caractères végétatifs et fruitiers des poiriers ainsi obtenus. Ce faisant, Decaisne ne faisait que suivre l’adage de Thouin (d’abord le semis), mais en l’appliquant à un arbre domestique pour lequel la pratique immémoriale de la greffe dissimulait la transmission des caractères par génération sexuée. Le résultat de l’expérience fut tout à fait surprenant : pour chacune des variétés-mères, Decaisne obtenait une descendance hautement polymorphe, les formes-filles étant presque toujours très différentes de la forme-mère et évoquant toutes sortes d’autres variétés connues. Le naturaliste concluait : “chacune de nos variétés de poires constitue une individualité que la nature ne reproduit plus, et que nous ne pouvons conserver qu’au moyen de la greffe. [... ] Tous [les] caractères sont purement individuels, [...] ils ne se transmettent jamais fidèlement par génération”49. Il ajoutait qu’il n’existait qu’une seule espèce naturelle de poirier, d’où provient l’ensemble des variétés connues, toutes fécondes entre elles et divisibles à l'infini50.
31La monographie de Decaisne eut un grand retentissement. Darwin, qui en conteste les conclusions dans La Variation des animaux et des plantes sous l’action de la domestication (1868), ne manque pas cependant de rendre hommage à “l’un des botanistes les plus renommés d’Europe”51. Il nous paraît donc utile de préciser ce à quoi le titulaire de la chaire de culture s’opposait précisément dans sa conception de la variabilité des espèces végétales. Decaisne, nous l’avons déjà noté, s’opposait d’abord à Jordan, qui soutenait une théorie de l’immutabilité des nombreuses “menues espèces” dans lesquelles il convenait selon lui de résoudre les espèces ordinairement reconnues par les naturalistes. Decaisne estimait en second lieu que ses résultats disqualifiaient l’explication lamarckienne de la variabilité comme résultant de l’influence des milieux. Il pensait aussi que les phénomènes qu’il avait observés contredisaient deux idées chères à Darwin : d’une part l’idée que les variations liées à la reproduction sont des différences individuelles infinitésimales, d’autre part l’idée selon laquelle les variétés peuvent se reproduire et se conserver identiques à elles-mêmes par génération (autrement dit être “héréditaires”). C’est sur ce point précis et à propos du poirier, que les deux auteurs ont polémiqué52. Decaisne affirmait enfin que ses expériences ne pouvaient être suffisamment expliquées par des effets possibles de métissage (ou hybridation). C’était là une affirmation imprudente, car il ne s’était pas préoccupé de savoir quels étaient les parents des formes-mères dont il était parti. Decaisne s’opposait à la tradition linnéenne des “hybrideurs”, dont Charles Naudin, ami et assistant de Decaisne, était sans doute le plus illustre représentant en Europe autour de 1860.
32Ce sont ainsi toutes les théories contemporaines de la nature et de l’origine de la variabilité que Decaisne voit avec scepticisme. Contre ces théories, il soutient que la variabilité est inhérente aux espèces naturelles : elle surgit aujourd’hui comme elle surgissait jadis de “l’Espèce naturelle ou première”, attestant de la “plasticité primordiale” de celle-ci53. Retour à Linné ? Positivisme têtu ? L’on ne saurait dire. Decaisne récuse tout à la fois le fixisme de Jordan et les explications de la variabilité par l’hybridation ou l’effet du milieu, en même temps qu’il met en doute le grand principe d’hérédité des différences individuelles mis en avant par Darwin. Il est au demeurant bien difficile de saisir l’attitude de Decaisne face au problème de la transformation des espèces : s’il admet que les espèces ont une aptitude permanente à se subdiviser en races et variétés, il récuse en même temps l’idée de changement d’une espèce en une autre et semble croire, avec Louis de Vilmorin et Naudin que les formes alors cultivées “se rattachent [...] à plusieurs types qui étaient déjà distincts, quoique voisins, à l’époque où les hommes entreprirent de les assujettir à la culture”54.
33Les idées de Decaisne sur la variabilité de l’espèce sont donc équivoques. Elles prennent rétrospectivement un intérêt historique, en raison - croyons-nous - du rapport tout à la fois institutionnel et intellectuel qu’avait le professeur du Muséum avec deux autres naturalistes majeurs de son temps, Louis de Vilmorin et Charles Naudin, qui se trouvaient aussi être, par position professionnelle, des horticulteurs. Nous ne détaillerons pas ici les carrières scientifiques et institutionnelles de ces deux personnages exceptionnels et renvoyons à la littérature existant à leur sujet55. Nous nous contenterons de suggérer la constellation intellectuelle et institutionnelle particulière que Decaisne, Vilmorin et Naudin formaient au milieu du siècle dernier.
34Louis de Vilmorin (1816-1860) est le plus illustre des membres de la famille Vilmorin. Patron de la Compagnie de graines qui porte son nom (la plus importante au monde jusqu’à la guerre de 1914-1918), c’était aussi un savant de premier ordre, à qui l’on doit, sous le nom de “sélection généalogique”, une anticipation relativement claire de ce que les généticiens ont nommé plus tard les “lignées pures”. La doctrine soutenue par Louis de Vilmorin était que la sélection artificielle, pour être efficace, devait porter, non seulement sur des individus, mais sur des individus retenus pour leur aptitude à être de “bons étalons”, c’est-à-dire à garder d’une génération sur l’autre les caractères pour lesquels on les avait choisis. Connue aussi sous le nom de “sélection du porte-graine”, ou “sélection de lignées individuelles”, cette doctrine constituait un approfondissement rigoureux de la devise d’André Thouin selon laquelle la meilleure méthode d’amélioration des plantes consiste à agir sur les semis. Elle allait aussi de pair avec une réflexion d’une rigueur expérimentale sans équivalent à l’époque sur “l’hérédité” et des doutes sérieux émis à l’encontre de l’interprétation lamarckienne de celle-ci. Le lien entre les deux thématiques apparaît d’ailleurs clairement dans le titre sous lequel Louis de Vilmorin a rassemblé ses écrits théoriques principaux peu avant sa mort : Notices sur l’amélioration des plantes parle semis et considérations sur l’hérédité dans les végétaux56. Or Decaisne connaissait bien Louis de Vilmorin57 ainsi que ses travaux — ce qui n’avait rien d’étonnant dans la position institutionnelle qui était la sienne —, et il les estimait. Il y a donc quelque chose d’assez étonnant à le voir explorer dans sa monographie sur la variabilité du poirier une voie de recherche qui, non seulement contrecarrait la tradition instaurée par Thouin au Muséum, mais surtout les résultats scientifiques et techniques spectaculaires auxquels avait mené l’approfondissement de cette tradition méthodologique dans la compagnie grainetière des Vilmorin. On est stupéfait en particulier de voir Decaisne spéculer sur l’origine de la variabilité des poiriers en n’observant le devenir que d’une seule génération de graines, sans même se demander si les plantes-mères, en réalité des pieds greffés de manière répétée depuis de longues générations, ne seraient pas des hybrides. Marcelin Berthelot, qui pourtant n’était pas un naturaliste, s’en étonne à mots couverts dans la notice nécrologique qu’il a rédigée sur Decaisne pour l’Académie des sciences58.
35Le rapport de Decaisne avec Charles Naudin (1815-1899) suscite un étonnement comparable. Naudin était un proche de Decaisne, qui le fit recruter à l’herbier du Muséum et se l’attacha ensuite comme “aide-naturaliste” en 1854 à la chaire de culture. C’est lui aussi qui l’aida à se faire élire à l’Académie des sciences en 1863. C’est enfin lui qui l’a encouragé à développer les travaux fondamentaux sur l’hybridation végétale qui lui ont valu un grand prix de physiologie à l’Académie des sciences en 186159. Or dans ce mémoire, comme d’ailleurs dans d’autres études similaires sur les courges parues au cours des années 185060, Naudin avait établi deux conclusions remarquables : d’une part il avait montré que le nombre élevé des variétés de courge (mille deux cents) résultait de combinaisons raciales hybrides à l’intérieur d’un très petit nombre d’espèces interstériles (Naudin résolvait les mille deux cents variétés de courge en trois authentiques espèces) ; d’autre part, les variétés hybrides ainsi obtenues étaient stables dans les plantations locales, pour autant qu’on ne les féconde qu’avec leur propre pollen et sur un temps suffisamment long. Ce travail fournissait une solution expérimentale plausible - au minimum un modèle - pour le genre de problème que Decaisne rencontrait dans son travail sur les poiriers, et qu’il lui était impossible de résoudre, du fait de la longueur du cycle reproductif de cet arbre fruitier61. On s’étonne donc que Decaisne ne se soit appuyé sur les travaux de Naudin ni dans sa monographie de 1863, ni dans la récapitulation qu’il en a donnée en 1871. Bien au contraire, dans cette dernière, il soutient que les races ne se “changent” pas les unes les autres (doctrine caractéristique des hybrideurs) et que la variabilité doit plutôt être attribuée à une “plasticité primordiale” de l’espèce. Qu’il s’agisse de Vilmorin ou de Naudin, la limitation méthodologique du travail de Decaisne surprend : de même qu’il récuse l’idée d’une transmission héréditaire des différences sans s’interroger sur l’origine des parents, de même il écarte l’explication de l'hérédité par l’hybridation en ne considérant qu’une seule génération de transmission. Ni Vilmorin ni Naudin ne sont cités dans aucun des deux cas. Les deux auteurs sont ignorés. Pourtant Decaisne les estimait personnellement : il fit entrer Naudin à l’Académie des sciences en 1863, l’année même du mémoire sur les poiriers et écrivit une notice nécrologique sur Louis de Vilmorin en 1862. Et surtout, leurs travaux expérimentaux offraient ce que l’on pouvait espérer de mieux à l’époque sur le genre de difficulté qu’il rencontrait.
36Il serait toutefois historiquement insatisfaisant de ne retenir de cet épisode que la relative médiocrité théorique de Joseph Decaisne (certains toutefois ne s’en sont pas privés, de son vivant même62). Nous préférons noter qu’aux alentours des années 1860, donc avant le mémoire de Mendel, il existait, dans un milieu circonscrit par la chaire de culture du Muséum et la plus florissante des compagnies de graines en France et dans le monde, un contexte de recherche scientifico-technique exceptionnellement favorable à l’étude expérimentale de l’amélioration des plantes, avec ce qu’elle impliquait de recherches sur l’origine de la variabilité, sur les faits d’hérédité, sur ceux d’hybridation et sur la sélection artificielle. D’un point de vue strictement expérimental, les travaux de Naudin et de Vilmorin n’ont absolument rien à envier à ceux de leurs homologues dans des pays voisins, bien au contraire. S’il faut retenir quelque chose des rapports qui se sont noués entre Decaisne, Naudin et Vilmorin, ce n’est pas la figure théorique pâle du premier (Decaisne n’est assurément pas Darwin), mais l’atmosphère exceptionnelle de coopération entre science expérimentale, naturalisme et recherche agronomique que le système de production scientifique français rendait possible au milieu du siècle dernier.
37Il faut reconnaître cependant que le système français de recherche a dramatiquement manqué une telle occasion. Trois ensembles de raisons peuvent en rendre compte. Il y a d’abord eu des contingences individuelles : Louis de Vilmorin est mort prématurément en 1860 et si ses successeurs à la tête de la Compagnie ont été de remarquables hommes d’affaires, ils n’ont pas été des savants de premier ordre et ont été moins enclins à une collaboration étroite entre leur recherche appliquée en matière d’amélioration des plantes et la recherche biologique fondamentale. Par ailleurs la maladie de Naudin a beaucoup pesé sur le destin de la chaire de culture : atteint de bonne heure de névralgie faciale et de surdité, il ne pouvait devenir professeur et ne pouvait donc faire école. Il se retira en 1867 comme conservateur dans le Sud de la France dans un jardin d’acclimatation local et y demeura relativement isolé jusqu’à la fin de sa vie.
38Une seconde raison de l’échec scientifique relatif de la chaire de culture est sa séparation définitive, après 1870, d’avec le haut enseignement agronomique. Or c’est dans les institutions privées ou publiques qui ont su articuler la recherche agronomique appliquée avec la méthodologie expérimentale que s’est préparée, à la fin du XIXème siècle, dans plusieurs autres pays, la révolution génétique. La faiblesse de la formation théorique des ingénieurs agronomes et la mauvaise qualité des recherches théoriques dans les instituts agronomiques ont souvent été contées63. Elles tiennent en grande partie à l’isolement réciproque dans lequel les instituts agronomiques français et les institutions de recherche scientifique fondamentale ont été placés.
39En troisième lieu, la chaire de culture du Muséum s’est, après le Second Empire, engagée de plus en plus résolument dans l’acclimatation de plantes destinées aux nouvelles colonies. Nous terminerons notre enquête en examinant cet aspect des choses.
Développement du programme d’acclimatation
40De 1880 à la 2ème Guerre mondiale, le Muséum a fait de l’acclimatation des plantes à destination des colonies une voie majeure de justification de son existence auprès des pouvoirs publics, en même temps qu’une manière de distinguer son activité scientifique de la science de plus en plus expérimentale pratiquée dans les laboratoires des Facultés et du Collège de France. La création en 1929 d’une chaire supplémentaire des “productions coloniales d’origine végétale” (transformée en 1933 en “chaire d’agronomie coloniale”) souligne l'importance que le Muséum accordait à ce genre de recherche. Cette dérive à la fois naturaliste et coloniale du grand Établissement a été analysée avec soin par Camille Limoges64. Plus récemment, Christophe Bonneuil, dans un remarquable travail de recherches, a situé l’affaire dans le contexte plus général65 de la politique française de recherche agronomique coloniale. Nous renvoyons à ces travaux pour la description du côté institutionnel de l’histoire ; nous nous limiterons ici à deux observations sur les aspects proprement théoriques et techniques de l’engagement de la chaire de culture dans l’agronomie coloniale.
41D’un point de vue théorique, l’investissement majeur du Muséum s’est traduit par une adhésion très large à une interprétation lamarckienne de la variation, au moment précis où la génétique a fait irruption. Le concept classique de l’acclimatation végétale impliquait en effet l’idée d’une plasticité des propriétés héréditaires des semences sous l’effet de nouvelles conditions climatiques. Comme nous l’avons déjà noté, il s’agissait d’un aspect essentiel de la doctrine d’André Thouin relative à l’amélioration des plantes par le semis. À la fin du XIXème siècle, ce schéma lamarckien recevait d’ailleurs souvent une interprétation pastorienne, le succès de l’acclimatation étant attribué à l’interaction (positive ou négative) des plantes avec tel ou tel micro-organisme présent dans le sol. Dans les dernières années de sa vie, Charles Naudin, alors retiré au Jardin d’acclimatation de la villa Thuret à Antibes, a clairement formulé le lien entre cette idée et la conception lamarckienne de l’hérédité. Constatant l’échec de l’acclimatation de certaines plantes en présence de certains “ferments”, il forme l’hypothèse d’un “microbe stérilisant”, susceptible d’acquérir la valeur d’une particule héréditaire dans la plante contaminée : “[l’on pourrait] concevoir l’existence d’un microbe sui generis, héréditaire transmis d’une génération à l’autre, et qui, caché dans les profondeurs de l’organisme, travaille invisiblement, à en fixer le terme du développement dans l’espace et de la durée dans le temps”66. Maxime Cornu, titulaire de la chaire de culture de 1884 à 1901 et ardemment engagé à ce titre dans la mise en valeur du nouvel Empire colonial que la République constituait alors, défendait des idées comparables, de même que son collègue Van Tieghem, titulaire de la chaire d’anatomie comparée des végétaux de 1879 à 1914. Le gendre de celui-ci, Julien Costantin, fut sans doute le plus respecté des lamarckiens au début du siècle et a aussi fait la plus grande partie de sa carrière sur cette thématique. Il prit la chaire de culture en 190167. La même année, Edmond Perrier, autre lamarckien illustre, prenait la direction du Muséum et c’est lui qui a le plus vigoureusement développé la mission d’acclimatation des plantes dans les colonies.
42D’un point de vue technique, la stratégie de transplantation d’amélioration par acclimatation s’est révélée sinon désastreuse, du moins passablement décevante. Reposant sur l’espoir, théoriquement désuet à la fin du XIXème siècle, que les graines étaient susceptibles de s’améliorer spontanément dans de nouvelles conditions de milieu, elle s’est traduite par l’expédition volontariste de centaines d’espèces dans les colonies. Laissons parler ici A. Guillaumin : dans son cours inaugural à la chaire de culture en 1933. Guillaumin, commentant les activités de Maxime Cornu, protagoniste de l’agronomie coloniale, s’exprime en ces termes : “nommé professeur de culture, il consacra une activité débordante mais un peu maladive à la mise en valeur de l’empire colonial [...]. Non seulement il envoyait aux colonies des graines et des plants de végétaux utiles, pour la multiplication desquels il avait fait construire des serres spéciales, mais il s’attachait à former des chefs d’exploitation et des jardins coloniaux et inaugura en 1866 un cours d’agronomie coloniale. [...] Pendant le professorat de Cornu (1884-1901), ce furent huit mille six cent quarante-quatre plantes appartenant à deux cents espèces qui partirent en serres portatives pour le Sénégal, le Soudan, la Guinée, la Côte d’ivoire, le Gabon, le Congo, Madagascar, les Comores, la Réunion, l’Indochine, la Nouvelle-Calédonie, sans parler d’une moyenne annuelle de quatre cent vingt-sept sachets de graines. [... ] Cependant, la question de l’introduction des plantes utiles aux colonies ne se présente plus maintenant sous le même jour qu’il y a cinquante ans ou même trente ans. Dans des colonies nouvelles, manquant de tout, il était naturel d’essayer toutes les plantes utiles capables de nourrir la population ou de créer des sources de richesse, maintenant qu’on a discerné les seules espèces nettement appropriées au climat, au sol, à la main d’œuvre, aux moyens de transport de telle ou telle colonie et susceptibles d’y être cultivées avantageusement, il faut sélectionner les sortes les plus productrices [...]. Ce travail, ce n’est plus celui du Muséum, mais des jardins d’essais coloniaux”68.

FIG. 3 - Serre de voyage ou portative d'André Thouin. Maquette d’une serre en bois, cuivre, verre et grillage, signée “I. Ledoux. Maître ébéniste”, 1781.
43Dans les années 1930, il était devenu clair qu’il ne suffisait pas de transporter des graines d’un continent à l’autre via le Muséum et que tout programme d’acclimatation devait s’appuyer sur une étude soigneuse de la génétique des plantes et du sol et tenir compte des traditions de travail indigènes, ce qui impliquait d’établir de véritables stations locales de recherche. C’est ainsi que les ingénieurs agronomes de l’Institut National d’Agronomie ont peu à peu pris le pas sur le personnel de la chaire de culture du Muséum, tandis que les pouvoirs publics créaient dans les années 1930 et 1940 toutes sortes d’offices spécialisés dans l’introduction de telle ou telle plante dans les colonies (comme par exemple l’“Institut de recherche sur le coton”, créé en 1946), en ayant soin de les affranchir de la tutelle du Ministère de l’Instruction publique69.
44Il faudrait étendre à d'autres activités de recherche de la chaire de culture au début de ce siècle le constat d’échec que nous venons de relever à propos de l’acclimatation des plantes dans les colonies. C’est ce que n’hésitait pas à faire Désiré Bois en 1921, dans la conclusion assez étonnante de l’article qu’il consacrait à l’histoire de la chaire de culture, au moment précis où il en prenait la charge. Faisant l’éloge des efforts courageux des ingénieurs agronomes pour promouvoir la génétique et d’autres méthodes expérimentales modernes dans leurs institutions propres, Bois termine ainsi son analyse de la chaire de culture : “c’est une profonde erreur, encore trop répandue, qui consiste à croire que l'οn peut faire de l’agriculture progressive sans de sérieuses études scientifiques préalables. C’est à cette fâcheuse conception des choses qu’est due notre infériorité vis-à-vis d’autres nations, où les agriculteurs sont mieux préparés à résoudre les nombreux et souvent difficiles problèmes dont dépendent la vie et la prospérité du pays. En France, la science intéresse surtout par ses côtés merveilleux, curieux, et par les idées nouvelles qu’elle fait naître. Il est grand temps de nous orienter vers les applications pratiques et fécondes, et surtout, de voir l’agriculture [...] attirer à elle des hommes d’initiative et instruits, qui trouveraient à y exercer leur intelligence et leur activité. [...] Le Service de la culture est l’un de ceux du Muséum qui ont été les plus éprouvés par la guerre. [...] Puissent les Pouvoirs publics et l’initiative privée en comprendre l’urgence et nous aider dans cette lourde tâche”70.
45À lire ces lignes, l’on comprend bien que le nouveau titulaire de la chaire de culture cherche des fonds. Mais l’on relève aussi l’affirmation que les ingénieurs agronomes n’ont pas en France une formation scientifique décente. S’agit-il de regretter qu’ils ne soient pas, ou ne soient plus, formés au Muséum ? C’est possible. Cependant le contexte montre aussi que pour Désiré Bois, passablement désabusé, mais très attentif aux renouvellements considérables qui se préparent alors dans les instituts agronomiques, le Muséum n’avait manifestement plus la capacité scientifique de faire face au défi.
■
46L’histoire de la chaire de culture peut être résumée en quelques formules. Absolument centrale du point de vue de la mission nationale initialement confiée au Muséum, cette chaire et le service associé sont en définitive demeurés assez marginaux du point de vue des réalisations scientifiques de l’établissement et n’ont par ailleurs jamais contribué significativement à la formation des ingénieurs agronomes. L’échec relatif de cette chaire dans sa mission de recherche appliquée tient sans doute à ce qu’elle n’a pas su prendre en compte les besoins théoriques réels de l’agriculture tels qu’ils se sont révélés au cours du XIXème siècle. Les structures et le hommes étaient cependant là, qui auraient pu, vers le milieu du XIXème siècle, assumer la mission fondamentale et délicate d’organiser le rapport triangulaire entre démarche expérimentale, naturalisme et ingénierie, rapport devenu nécessaire à la mise en place d’une agronomie scientifique digne de ce nom. Toutefois les choses ont tourné autrement. Le Service de culture a en fait persisté dans la forme où il avait été créé, c’est-à-dire comme un conservatoire de graines et de plants, laissant peu à peu l’expérimentation aux Facultés des sciences71 et l’ingénierie aux Instituts agronomiques. S’il n’y avait eu sous la IIIème République l’épisode colonial, au moment même où, dans son entier, le Muséum se repliait sur l’histoire naturelle, il est probable que la chaire de culture se serait effacée beaucoup plus tôt, tant il est clair qu’aux alentours de 1900, l’entreprise scientifique et technique de l’amélioration des plantes se jouait en d’autres lieux.
Notes de bas de page
1 Décret de la Convention nationale portant organisation du Muséum d’Histoire naturelle, 10 juin 1793 : “Titre I : Organisation générale de l’établissement. Art. I. – L'établissement sera nommé à l’avenir Muséum d’Histoire naturelle. Art. II. – Le but principal de cet établissement sera l’enseignement public de l’histoire naturelle, prise dans toute son étendue, et appliquée particulièrement à l’avancement de l’agriculture, du commerce et des arts”. Ce décret est reproduit dans Hamy (Ernest Théodore), Les Derniers jours au Jardin du roi et la fondation du Muséum d’Histoire naturelle, Paris : Impr. nationale, 1893, 162 p.
2 Ibid. : “Titre IV : Des correspondances de l’établissement. Art. I. – Le Muséum d’Histoire naturelle correspondra avec tous les établissements analogues, placés dans les différents départements de la République. Art. II. – Cette correspondance aura pour objet les plantes nouvellement cultivées ou découvertes, la réussite de leur culture, les minéraux et les animaux qui seront découverts, et généralement tout ce qui peut intéresser les progrès de l’histoire naturelle, directement appliquée à l’agriculture, au commerce et aux arts”.
3 Ibid. : “Projet de règlement pour le Muséum national d’Histoire naturelle”, chap. 3, art. XIII.
4 Le décret du 10 juin 1793 énumère douze cours dans le but d’“enseigner complètement l’histoire naturelle”. Le sixième est intitulé : “Cours d’agriculture et de culture des jardins, des arbres fruitiers et des bois” (ibid.). Le “projet de règlement” de Fourcroy, Thouin et Jussieu définit le but de ce cours : “le cours de culture aura pour objet la pratique de tout ce qui tient à l’art de cultiver les plantes, au perfectionnement du jardinage et à la naturalisation des végétaux étrangers ; le professeur démontrera les plantes propres à la nourriture de l’homme et des animaux domestiques. Il séparera ce cours en différentes époques, comme sont naturellement séparés les travaux de la culture.”
5 La chaire fut en réalité d’abord dénommée “chaire des productions coloniales d’origine végétale” ; ce n’est qu’en 1933 qu’elle fut réintitulée chaire d’“agronomie coloniale”. Pour une liste exhaustive des chaires et de leurs titulaires successifs, on consultera l’article et le tableau récapitulatif de Lemoine (P.), “Le Muséum national d’Histoire naturelle”, in Archives du Muséum national d’Histoire naturelle : volume du tricentenaire, 6ème série, t. XII, Paris : Masson, pp. 1-79.
6 Mémoire des professeurs-administrateurs du Muséum d’Histoire naturelle, en réponse au Rapport fait en 1858 par une commission chargée d’étudier l’organisation de cet Établissement, Paris : Mallet-Bachelier, 1847, appendice no 5, pp. 115-118. Le rapport fut rédigé par Chevreul.
7 Cf. supra, note 1.
8 Sur ce sujet, voir le remarquable travail de Kimmelman (Barbara), A progressive era discipline : genetics at american agricultural colleges and experiment stations, 1900-1920, [sous la dir. de Robert E. Kohler], University of Pennsylvania, 1987, 456 p. Le cas de la Suède est soigneusement analysé dans Roll-Hansen (Nils), “Svalöf and the origins of classical genetics”, in Olsson (G.) (sous la dir.), Svalöf 1886-1986, Stockholm : Lts förlag, 1986, pp. 35-42. En français, on consultera avec intérêt dans l’ouvrage de Fischer (Jean-Louis), Schneider (William H.), (sous la dir.), Histoire de la génétique : pratiques, techniques et théories, Paris : A.R.P.E.M., 1990, les articles de : Kimmelman (Barbara), “Agronomie et théorie de Mendel : la dynamique institutionnelle et la génétique aux États-Unis, 19001915,” – pp. 17-41 ; Fischer (Jean-Louis), “Contribution à l’histoire de la génétique en France (1900-1915) : le monde des praticiens et l’Abbé G. Vieules (1866-1944)”, pp. 43-64 ; Olby (Robert C), “Rôle de l’agriculture et de l’horticulture britanniques dans le fondement de la génétique expérimentale”, pp. 65-81 ; Allen (Garland E.), “Chevaux de course et chevaux de trait : métaphores et analogies agricoles dans l’eugénisme américain”, pp. 83-98 ; Roll-Hansen (Nils), “Le Croisement des lignes pures : de Johannsen à Nilson-Ehle”, pp. 99-125. Sur le cas français, voir Gayon (Jean), Zallen (Doris T.), “Le Rôle des Vilmorin dans les recherches sur l’hybridation en France aux XIXème et XXème siècles”, in Fischer (Jean-Louis) (sous la dir.), Pratiques et théories de l’hybridation : Colloque international en hommage à Louis Lecoq : 117ème Congrès des Sociétés savantes, Clermont-Ferrand, octobre 1992, Paris : C.T.H.S., à paraître.
9 Charmasson (Thérèse), Lelorrain (Anne-Marie), Ripa (Yannick), L’Enseignement agricole et vétérinaire de la Révolution à la Libération : textes officiels avec introduction, notes et annexes, Paris : I.N.R.P. ; Publications de la Sorbonne, 1992, 745 p. Voir tout particulièrement l’introduction de Thérèse Charmasson, pp. I-CXLV
10 Ibid. : “Projet de décret sur l’organisation de l’enseignement agricole...”, séance du 17 juillet 1848.
11 Ibid. sur l’ensemble de cette histoire.
12 Ibid., p. LXXIX : Frémy (Edmond), “Projet d’utilisation du Muséum au point de vue de l’enseignement agricole”, 6 avril 1867.
13 Ibid., p. LXXX.
14 Limoges (Camille), “The Development of the Muséum d’Histoire naturelle of Paris, c. 1800-1914” in Fox (Robert), Weisz (George), (sous la dir.), The Organization of science and technology in France (1808-1914), Cambridge : Cambridge University Press, 1980, pp. 211-240.
15 Anciennement : chaire des “arts chimiques”.
16 La chaire de Flourens était une chaire de “physiologie comparée”. À l’arrivée de Claude Bernard, elle devient chaire de “physiologie générale et comparée”.
17 Dupoty (Michel Auguste), De la réorganisation du Muséum d’Histoire naturelle, Paris : G. Havard, 1858, 16 p.
18 Rapport confidentiel du 11 août 1858, signé par le général Allard. Ce rapport ne fut rendu public qu’en 1863. Ce rapport est de tonalité comparable à un autre rédigé en 1851 par Hyacinthe Corne (membre de l’Assemblée nationale) à l’intention du ministre de l’Instruction publique. Hyacinthe Corne notait : “la puissance publique est absente de cet établissement, excepté pour en solder les dépenses”, Rapport au nom de la Commission spéciale instituée par M. le ministre de l’Instruction publique pour étudier les questions qui se rattachent à l’administration et à l’enseignement du Muséum d’Histoire naturelle, Paris, avril 1851, document manuscrit déposé à la Bibliothèque centrale du Muséum.
19 Chevreul (Eugène), Mémoire des professeurs-administrateurs..., op. cit.
20 Chevreul (Eugène), Considérations sur l’enseignement agricole en général et sur l’enseignement agronomique au Muséum d’Histoire naturelle en particulier, Paris : Impr. impériale, 1869, 31 p. Chevreul s’attache à montrer que “le culte de la science pure” ne sera pas affecté par la formation d’élèves-agronomes : “si l’enseignement agronomique devait abaisser le niveau de la science abstraite au Muséum, devenu un sanctuaire des sciences naturelles par la succession d’efforts incessants de la part des savants les plus dignes depuis 1633 qui y ont été attachés à des titres divers, ce serait désespérer de la science française [...] !” (p. 24).
21 Marcou (Jules), De la science en France. Fasc. 3 : Le Muséum d’Histoire naturelle, Paris : C. Reinwald, 1869, p. 283.
22 Lacaze-Duthiers (Henri de), “Enseignement des sciences : la licence et l’agrégation”, Revue scientifique de la France et de l’étranger, 3ème série, 3ème année, no 4, 22 juillet 1881, pp. 97-110.
23 Décret de la Convention nationale portant organisation du Muséum d’Histoire naturelle, 10 juin 1793. Reproduit dans Hamy (Ernest Théodore), Les Derniers jours au Jardin du roi..., op. cit.
24 Ibid. : “Projet de règlement pour le Muséum national d’Histoire naturelle”, chap. 3, art. X.
25 Ibid., art. XIII.
26 Chevreul (Eugène), Mémoire des professeurs-administrateurs., op. cit., IIème section : “Réponses aux passages principaux du rapport qui concernent les services spéciaux du Muséum”, pp. 80-89 et Appendice no 5, pp. 115-118.
27 Ibid., p. 116.
28 Chevalier (Auguste), “Le Tricentenaire de la fondation du Jardin des plantes et le rôle du Muséum en agronomie coloniale”, Revue de botanique appliquée et d’agriculture tropicale, 1935 ; Limoges (Camille), “The Development of the Muséum d’Histoire naturelle of Paris...”, art. cit. ; Bonneuil (Christophe), Des savants pour l’empire : la structuration des recherches scientifiques coloniales au temps de la mise en valeur des colonies françaises, 1917-1945, Paris : éd. de l’ORSTOM, 1991, 121 p. (Collection Études et thèses).
29 Sur l’histoire de la chaire d'agriculture, l’on peut consulter les articles et ouvrages commémoratifs suivants : Cap (Paul-Antoine), Le Muséum d’Histoire naturelle, Paris : L. Curmer, 1854, vol. I ; Centenaire de la fondation du Muséum d’Histoire naturelle, 10 juin 1793 – 10 juin 1893 : volume commémoratif, Paris : Impr. nationale, 1893, VI-571 p. ; Bois (Désiré), “La Chaire de culture du Muséum national d’Histoire naturelle (cours inaugural)”, Revue d’histoire naturelle appliquée, no 2, 1921 ; Chouard (Pierre), La Chaire de culture du Muséum national d’Histoire naturelle : ses ressources, son avenir, Paris : E. Hollbecque et Cie, 1932, 8 p. ; Guillaumin (A.), “La Chaire de culture du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris (cours inaugural)”, Revue scientifique, 24 juin 1933, 8 p. ; Lemoine (Paul), “Le Muséum national d’Histoire naturelle, Archives du Muséum national d’Histoire naturelle : volume du tricentenaire, 6ème série, t. XII, 1935, § VI, pp. 32-34 ; Vayssières (Paul), “La Recherche agronomique au Muséum d’Histoire naturelle de 1848 à 1914”, Journal d'agriculture tropicale et de botanique appliquée, vol. VII, no 12, décembre 1960, pp. 603-614.
30 Sur la biographie d’André Thouin, la source principale d’information se trouve dans le volume XII (1825) des Mémoires du Muséum d’Histoire naturelle ; y sont rassemblés en particulier l’éloge de Cuvier et la notice nécrologique d’Isidore Geoffroy Saint-Hilaire.
31 Thouin (André), Monographie des greffes, ou Description technique des diverses sortes de greffes employées pour la multiplication des végétaux, Paris : Impr. de Mme Huzard, 1821, 100 p. [Rééd. : Paris : Roret, 1851, X-170 p.].
32 Ce cours a été publié par Oscar Leclerc-Thouin, neveu d’André Thouin, sous le titre : Cours de culture et de naturalisation des végétaux, Paris, 1827, 3 vol. [Rééd. : Paris : Impr. de Mme Huzard, 1877, 3 vol.].
33 Cours complet d’agriculture théorique, pratique, économique, et de médecine rurale et vétérinaire, [rédigé par MM. Rozier, Chaptal, Parmentier, Delalauze...], Paris : Marchant, 1805, t. XII, p. 441, colonne 1.
34 Duchesne (Antoine Nicolas), Histoire naturelle des fraisiers contenant les vues d’économie réunies à la botanique, et suivie de remarques particulières sur plusieurs points qui ont rapport à l’histoire naturelle en générale, Paris : Didot le jeune, 1766, 324-118 p.
35 Ibid. : 11ème remarque particulière, intitulée “Sur la naissance du fraisier de Versailles”, p. 62. Les remarques font l’objet d’une pagination séparée.
36 Ibid. : “Avertissement”, p. VI.
37 Ibid., pp. 219-220 : “j’ai déjà dit, à l’occasion du Fraisier-ananas, qu’il était très difficile de ranger en ligne droite les diverses Races d’une même Espèce, de manière qu’on pût passer de l’une à l’autre, par gradations de nuance. [...] L’ordre généalogique est donc le seul que la nature indique, le seul qui satisfasse pleinement l’esprit ; tout autre est arbitraire et vide d’idées”. On peut remarquer au passage que Duchesne est aussi celui qui, trois décennies plus tard, devait pour la première fois proposer le terme d’atavisme, jalon important dans la constitution du concept d’hérédité naturelle. Sur l’invention du terme, voir Sageret (Augustin), “Considérations sur la production des hybrides, des variantes et des variétés en général, et sur celle de la famille des Cucurbitacées en particulier”, Annales des sciences naturelles, no 8, 1826.
38 Flourens (Pierre), Résumé analytique des observations de Frédéric Cuvier sur l’instinct et l’intelligence des animaux, Paris : C. Pitois, 1841, p. 112.
39 Leclerc-Thouin (Oscar), “Considérations sur l’étude des races végétales dans leurs rapports avec la naturalisation des plantes et des arbres”, Annales de la société royale d’horticulture de Paris, no 30, 1842, pp. 11-12.
40 Ibid., pp. 5-6.
41 Sur ce point, voir l’excellente analyse de Goulven (Laurent), Paléontologie et évolution en France de 1800 à 1860 : une histoire des idées de Cuvier et Lamarck à Darwin, Paris : Éd. du C.T.H.S., 1987, chap. X.
42 Sur la vie et les œuvres de Decaisne, voir Bornet (Édouard), “Notice biographique sur M. Joseph Decaisne", in Vesque (J.), Catalogue de la bibliothèque de M. Decaisne, membre de l’Institut, Professeur au Muséum, Paris : Vve Adolphe Labitte, 1883, pp. I-XXI ; Berthelot (Marcelin), “Notice historique sur Joseph Decaisne, lue devant l’Académie des sciences, le 18 décembre 1883”, Paris : Firmin-Didot, 1883, 33 p.
43 Chaire occupée par Adrien de Jussieu de 1826 à 1853. Cette chaire fut transformée en chaire de “paléontologie” pour Alcide d’Orbigny en 1853.
44 Respectivement 1837 et 1839. Ces productions datent de la période pendant laquelle Decaisne était attaché à la chaire de “botanique à la campagne”.
45 Decaisne a dirigé la Revue horticole, et participait activement au Bon jardinier, au Journal d’agriculture pratique, au Journal de la Société d’agriculture de France et à Flore des serres et jardins de l’Europe.
46 Decaisne (Joseph), Le Jardin fruitier du Muséum, ou Iconographie de toutes les espèces et variétés d’arbres fruitiers cultivés dans cet établissement avec leur description, leur histoire, leur synonymie, Paris : Firmin Didot frères, 1858-1875, 9 vol. Les six premiers volumes sont consacrés au poirier. Les trois autres au pêcher (vol. VII-VIII), au prunier et à l’abricotier (vol. VIII), et au fraisier (vol. IX).
47 Decaisne (Joseph), “De la variabilité de l’Espèce de Poirier : résultats d’expériences faites au Muséum d’Histoire naturelle, de 1852 à 1863 inclusivement”, Comptes rendus de l’Académie des sciences, t. LVII, 1863, pp. 6 sq. Voir aussi le résumé et bilan placé dans l’introduction aux six volumes sur “Le Poirier” publiés en 1871-1872, in Decaisne (Joseph), Le Jardin fruitier du Muséum..., op. cit.
48 Jordan (Alexis), De l’origine des diverses variétés ou espèces d’arbres fruitiers et autres végétaux généralement cultivées pour les besoins de l’homme : mémoire lu en séance publique de l’Académie des sciences, belles lettres et arts de Lyon le 14 décembre 1852, Paris : Baillière, 1853, 97 p.
49 Decaisne (Joseph), Le Jardin fruitier du Muséum..., op. cit., vol. I : Le Poirier, “Introduction”, pp. 11-12.
50 Ibid., p. 18.
51 In Darwin (Charles), The Variation of animals and plants under domestication, London : J. Murray, 1868, chap. X. ; The Works of Charles Darwin, New York : A.M.S. Press, 1972, vol. VII, p. 372.
52 “Nos expériences contredisent donc les faits cités par M. Darwin, qui admet que certaines variétés de Poiriers se reproduisent identiques à elles-mêmes par semis” : Decaisne (Joseph), Le Jardin fruitier du Muséum..., op. cit., p. 11. Darwin s’était appuyé dès 1856 sur Jordan (incorrectement orthographié au demeurant comme Jourdan) pour soutenir “le fruit issu de graines de poires ou de pommes, quoiqu’il diffère grandement en taille, succulence, et goût du fruit des parents, lui ressemble néanmoins pour ce qui est des caractères morphologique les plus importants et du point de vue de la graine” : Darwin (Charles), “Seedling fruit trees”, Gardeners’ chronicle and agricultural gazette, no 52, 29 décembre 1855, p. 854.
53 Ibid., p. 19.
54 Ibid. Voir aussi Decaisne (Joseph), “Éloge historique de Louis Vilmorin”, Journal de la Société centrale d’agriculture de France, no 22, 1862, pp. 134-150.
55 Sur Louis de Vilmorin, nous renvoyons à notre étude Gayon (Jean), Zallen (Doris T.), “Le Rôle des Vilmorin dans les recherches sur l’hybridation. art. cit., ainsi qu’aux notices nécrologiques de Brongniart dans le Bulletin de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, 1860, pp. 206-210, Decaisne (Joseph), “Éloge historique de Louis Vilmorin”, art. cit. et Duchartre dans le Journal de la Société impériale et centrale d’horticulture, no 6, juillet 1860. Sur Naudin, voir Berthelot (Marcelin), Notice historique sur la vie et les travaux de M. Naudin lue devant l’Académie des sciences le 17 décembre 1900, Paris : Firmin Didot, 1900 et Blaringhem (L.), “La Notion d’espèce et la disjonction des hybrides d’après Charles Naudin (1852-1875)”, Progressas rei botanicae, no 4, 1913, pp. 27-108.
56 Vilmorin (Louis de), Notices sur l’amélioration des plantes par le semis et considérations sur l’hérédité dans les végétaux, Paris : Vilmorin-Andrieux, 1859.
57 En témoigne par exemple la notice nécrologique qu’il a rédigée en 1862 : Decaisne (Joseph), “Éloge historique de Louis Vilmorin”, art. cit.
58 Berthelot (Marcelin), Notice historique sur Joseph Decaisne, Paris : Firmin Didot, 1893, p. 24.
59 Pour le mémoire intitulé “Nouvelles recherches sur l’hybridité dans les végétaux : Mémoire présenté à l’Académie des sciences en décembre 1861 et couronné dans la séance du 29 décembre 1862", paru dans les Nouvelles archives du Muséum d’Histoire naturelle, no 1, 1865, pp. 25-176.
60 En particulier : “Nouvelles recherches sur les caractères spécifiques et les variétés des espèces dans le genre Cucurbita”, Annales de sciences naturelles, 1856.
61 À la décharge de Decaisne, l’on doit noter cependant que s’il a présenté ses conclusions devant l’Académie des sciences dès 1863, c’est parce que les plantations de poiriers avaient été supprimées sur cette année-là sur ordre du Ministère de tutelle. Il y a eu là sans doute une occasion d’une tragédie personnelle qui situe, si elle ne les excuse pas, les approximations méthodiques du travail de Decaisne.
62 Voir par exemple le pamphlet paru dans Baillon (Henri), Errorum Decaisneanorum graviorum vel minus cognitorum Centuria pruma-septima, Paris : Impr. Martinet, 1879-1881, 112 p.
63 Voir le témoignage récent sur ce point de Valdeyron (Georges), “Amélioration des plantes et génétique”, in Debru (Claude), Gayon (Jean), Picard (Jean-François), (sous la dir.), Les Sciences biologiques et médicales en France 1920-1950 : actes du Colloque de Dijon, 25-27 juin 1992, Paris : C.N.R.S., 1994, pp. 243-250 (Cahiers pour l’histoire de la recherche).
64 Limoges (Camille), “The Development of the Muséum d’Histoire naturelle of Paris...”, art. cit.
65 Publié sous le titre : Bonneuil (Christophe), Des savants pour l’empire..., op. cit.
66 Naudin (Charles), “Les Microbes et leur rôle dans l’acclimatation des plantes", Revue des sciences naturelles et appliquées, publiée par la Société nationale d’acclimatation de France, no 3, 5 février 1892. Il est intéressant de noter que Naudin, après s’être retiré de Paris pour prendre les fonctions de directeur du jardin de la Villa Thuret à Antibes, a consacré l’essentiel de son énergie après cette date à l’acclimatation. En témoigne un Manuel d’acclimatation paru en 1887 : Naudin (Charles), Müller (Baron Ferd. von), Manuel de l’acclimateur, ou Choix des plantes : recommandées pour l’agriculture, l’industrie et la médecine et adaptées aux divers climats de l’Europe et des pays tropicaux, Paris : Société d’acclimatation ; Antibes : J. Marchant, 1887, 566 p. Ce livre était en fait une adaptation d’un livre paru en anglais sous la signature du baron von Muller.
67 En 1920, Costantin quittera la chaire de culture pour prendre la succession de son beau-père à la chaire d'“anatomie comparée des végétaux actuels et fossiles”.
68 Guillaumin (A.), “La Chaire de culture du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris”, art. cit.
69 Nous renvoyons une nouvelle fois sur ces points à Bonneuil (Christophe), Des savants pour l’empire..., op. cit. Voir aussi Bonneuil (Christophe), “From botanical gardens to agricultural research stations : science and french imperial economic aims at the beginning of the XXth Century”, communication présentée au congrès “4S/EASST”, Gothenburg, Suède, 12-15 août 1992.
70 Bois (Désiré), “La Chaire de culture du Muséum national d’Histoire naturelle” (cours inaugural), Revue d’histoire naturelle appliquée, no 2, 1921, pp. 25-26.
71 À la fin du XIXème siècle, des chaires relativement nombreuses de chimie agricole, zoologie agricole, botanique agricole et des instituts agronomiques spécialisés ont été créés dans le contexte spécifique des Facultés des sciences de province. Voir Charmasson (Thérèse), Lelorrain (Anne-Marie), Ripa (Yannick), L’Enseignement agricole et vétérinaire..., op. cit., p. LXXXIX.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Michel-Eugène Chevreul
Un savant, des couleurs !
Georges Roque, Bernard Bodo et Françoise Viénot (dir.)
1997
Le Muséum au premier siècle de son histoire
Claude Blanckaert, Claudine Cohen, Pietro Corsi et al. (dir.)
1997
Le Jardin d’utopie
L’Histoire naturelle en France de l’Ancien Régime à la Révolution
Emma C. Spary Claude Dabbak (trad.)
2005
Dans l’épaisseur du temps
Archéologues et géologues inventent la préhistoire
Arnaud Hurel et Noël Coye (dir.)
2011