Les procédés d’identification du substitut animal avec l’homme dans les textes rituels hittites
p. 71-82
Texte intégral
1Parmi les quelque 30 000 fragments de tablettes cunéiformes hittites (Anatolie de la seconde moitié du iie millénaire av. J.-C.), les textes de rituels et de fêtes cultuelles constituent un ensemble important. En contexte rituel et cérémoniel, les substituts animaux sont aussi fréquents que variés. Les espèces animales représentées sont1 : le chien, le porc, l’ovin, le caprin, le bovin, le cheval, l’âne, le poisson, plusieurs espèces de rongeurs, la grenouille, la salamandre (?), le serpent et plusieurs espèces d’oiseaux dont des oiseaux de proie tels que l’aigle et le faucon, etc. La très grande variété des contextes dans lesquels ces substituts animaux interviennent apparaîtra clairement au lecteur à travers l’analyse qui sera faite ici des techniques rituelles d’identification de ces substituts avec le ou les patients humains. Cette identification est la clef de la réussite du rite de substitution dans son ensemble. Il me paraît donc particulièrement utile de chercher à recenser et à analyser en contexte les formes qu’elle-même revêt.
2Afin de réaliser cette étude2, il m’a fallu compiler le plus grand nombre possible de témoignages écrits hittites de rites de substitution animale, ce que j’ai fait en suivant deux pistes distinctes :
l’analyse de textes rituels et cultuels dont une édition complète a déjà été publiée, ce qui permet d’avoir une vision d’ensemble du rituel ou de la cérémonie religieuse ;
l’étude des contextes dans lesquels les termes désignant un substitut (tarpalli-, tarpašša- et PUHU3) interviennent.
3Notons que j’exclus de cette contribution les textes hittites dans lesquels un substitut humain est employé, de même que ceux faisant allusion à des substituts inanimés.
Identification par le choix de l’animal même
4Certains textes rituels hittites témoignent du fait que l’identification du substitut avec le patient passe souvent par le choix du sexe de cet animal. Ainsi, les experts rituels choisissent souvent un substitut animal mâle quand le patient est homme, alors qu’une femelle est préférée si on traite une femme. Le passage d’un texte rituel hittite indique, par exemple : « Si (c’est) un homme, on fait d’un taureau son substitut. [On] l’abat dans sa maison même. Cependant, si (c’est) une femme, on fait d’une vache (son) substitu[t] et [on] l’abat4. »
5Le même cas de figure se retrouve dans le texte du rituel dit « du cours d’eau » de Tunnawi(ya) pour purifier une personne rencontrant des problèmes de fécondité : « Si (c’est) un homme, on prend un bouc noir, mais si (c’est) une femme, on prend une brebis noire. Un porcelet noir, un chiot noir. Si (c’est) un homme, (c’est) un porcelet mâle, mais si (c’est) une femme, il (est) femelle5. »
6Dans ce second extrait, on voit que les différents substituts rituels sont choisis en fonction du sexe du ou de la patient(e). En revanche, le choix de deux animaux jeunes, à savoir un porcelet et un chiot, n’est pas, ici, à mettre en relation avec l’âge du commanditaire du rituel qui est déjà en âge de procréer. D’autres rituels emploient, au contraire, un jeune substitut animal pour figurer un jeune patient : lors du rituel de Pāpanikri, un agneau-substitut symbolise manifestement l’enfant à naître6.
7Un troisième extrait montre qu’aussi bien le sexe que l’âge du substitut animal peuvent être choisis en fonction de ceux du commanditaire du rituel :
[S]i le dieu Lune donne un signe et qu’il frappe une personne en donnant (ce) signe, je fais comme suit. [En] outre, (je fais) ceci : je creuse le sol et, dans la cavité, je prends les excréments (provenant) du [derri]ère d’un porc (engraissé à l’)orge. (Ensuite), j’abats le porcelet dans (la cavité). § Si (c’est) une fille, je prends un porcelet femelle. (Cependant), si (c’est) un garçon, je prends un porcelet mâle7.
Identification par le port par l’animal d’un élément en contact avec le patient
8Il arrive que le substitut animal soit habillé des vêtements du patient pour une meilleure identification avec lui. En effet, les habits d’une personne symbolisent mieux que toute autre chose l’identité de celle-ci. Il a déjà été fait allusion au rituel de naissance de Pāpanikri, durant lequel un agneau-substitut est affublé des vêtements du nouveau-né à venir8. Voici un second exemple de ce phénomène dans un texte de prière pour la guérison de Gaššuliyawiya. Cette dernière, qui est probablement l’épouse du Grand Roi Muršili II, est tombée malade à la suite d’un rêve-message délivrant un ordre divin qu’elle a négligé9. Afin d’apaiser la divinité qu’elle a courroucée, à savoir la déesse Lelwani, maîtresse du monde souterrain, elle doit, entre autres choses, lui offrir une vache et une brebis en guise de substituts :
« Maintenant, Gaššul(iy)awiya, [ta servante], vient de te [donner], à toi, déesse, ses substituts, (à savoir) [une vache grasse] et une [b]rebis grasse vêtues d’habits luxueux10. »
9Outre l’identification de genre que l’on remarquera entre les deux animaux femelles et l’orante, il faut relever l’habillage de ces deux animaux avec des « habits luxueux », expression traditionnellement employée pour désigner des habits royaux ou princiers. En d’autres termes, il est clair, à mes yeux, que ces deux animaux qui sont appelés « substituts » de Gaššuliyawiya sont vêtus des habits de cette dernière pour une identification encore plus claire avec elle. Par ailleurs, notons le don que Gaššuliyawiya fait de ses substituts à la déesse courroucée, ce qui indique que, dans ce contexte, ces substituts ne seront pas simplement abattus, mais bien offerts en cadeau à la divinité. Le fait que chaque animal femelle est qualifié de « gras » indique sans doute qu’il faut sélectionner des bêtes en bonne condition physique pour contenter la déesse. La suite du texte semble en outre indiquer que ces deux animaux femelles sont destinés à être consommés par la déesse. Notons que ce rituel inclut également un substitut humain de Gaššuliyawiya, à savoir une femme habillée et parée probablement avec des effets de la patiente11.
10Dans d’autres contextes, le substitut animal ne porte pas les vêtements du patient, mais seulement un objet qui a été mis en contact avec son corps. Nous verrons un exemple ci-dessous dans le texte du rituel de Maštigga, mais nous pouvons aussi citer un passage du texte du rituel d’Ambazzi :
Elle (= l’experte rituelle) entremêle (de l’)étain et l(es) corde(s) d’un arc et elle les enroule autour de la main (et) du [pi]ed droits des commanditaires (du rituel). §
[E]nsuite, elle les leur retire et les enroule autour d’une souris (en disant) : « Je vous ai retiré le mal et je l’ai enroulé autour de la souris. Que cett[e sou]ris l’emporte dans les hautes montagnes, les va[llées] profondes et les longs chemins ! » § On relâche la
[so]uris (en disant) : « Zarniza (ou) Tarpatašši, prends [cell]e-ci pour toi et nous t’en [do]nnerons une [au]tre à manger !12 »
11Le texte ne justifie pas le choix de l’élément enroulé autour des membres des patients, ni celui du substitut animal, ces deux choix étant inhabituels dans le corpus rituel hittite. Les cordes d’arc pourraient être mises en relation avec la symbolique masculine de l’arc et des flèches13, mais le contexte rituel n’est pas clairement défini par le texte. Quoi qu’il en soit, on remarque la mise en contact physique des cordes d’arc enrichies d’étain avec le corps des patients puis avec celui de leur substitut. Cette opération semble suffire à identifier la souris comme le substitut de ces personnes, l’incantation se focalisant plutôt sur l’identification entre les cordes d’arc et le mal des patients.
L’implication du corps du patient dans le procédé d’identification
12Le texte du rituel de Maštigga pour soigner deux membres d’une même famille qui se sont maudits l’un l’autre14 illustre l’importance de l’implication du corps du patient dans le processus d’identification avec son substitut. Un passage de ce texte indique :
On amène un mouton. La Vieille Femme le brandit au-dessus des deux commanditaires du rituel et dit : « Voici votre substitut. Qu’il soit le substitut de votre personne, quant aux malédictions (qui sont) dans (vos) bouche(s) (et vos) langue(s) ! » Ils crachent dans sa bouche et elle dit : § « Vous avez craché les mauvaises malédictions ». On creuse la terre et on abat le mouton dans (le trou). Ensuite, on le place dedans. On place avec lui un gros pain sucré et elle fait une libation de vin. On recouvre (le tout)15.
13L’expression « brandir au-dessus de » (šer ēp-) pourrait avoir un sens symbolique ou relever d’une traduction fautive d’une expression non hittite (louvite ou hourrite)16, car il est difficile d’imaginer la Vieille Femme, c’est-à-dire l’experte rituelle, en train de brandir réellement un mouton au-dessus de la tête des patients adultes. Quoi qu’il en soit, le mouton semble être mis en correspondance visuelle avec le corps des patients pendant que la Vieille Femme désigne explicitement cet animal comme le substitut de ces personnes. Ici, il faut préciser que le terme hittite tuegga- utilisé dans l’expression « substitut de votre personne » (-šmaš tueggaš tarpalliš) signifie à la fois « corps » et « personne ».
14L’identification entre le mouton et les deux patients est réalisée à la fois par le geste de mise en correspondance visuelle entre l’animal et ces personnes et par la première phrase de l’incantation de la Vieille Femme, « Voici votre substitut », au caractère performatif indéniable. Toutefois, l’identification ne peut être effective que si elle est validée par les témoins divins de ce rituel, ce qui est implicitement indiqué par le mode optatif de la phrase suivante de l’incantation : « Qu’il soit le substitut de votre personne ! » La Vieille Femme exprime le souhait de voir se réaliser l’identification qu’elle a initiée. La dernière phrase de l’incantation introduit l’acte rituel suivant : la Vieille Femme souhaite le transfert des miasmes qui sont dans la bouche de chacun des deux patients. Ici, il faut se souvenir de la nature de ces miasmes : il s’agit des malédictions que les deux patients ont proférées l’un contre l’autre et qui ont visiblement souillé leurs propres bouches et langues.
15Après cette identification entre la bouche et la langue du mouton et celles des patients, ceux-ci crachent dans la bouche de l’animal. La Vieille Femme se contente alors de décrire le transfert qui vient d’avoir lieu : « Vous avez craché les mauvaises malédictions », comme si elle voulait convaincre à la fois les patients et les témoins divins de la réussite de cette opération. Le transfert est alors terminé, les patients se sont symboliquement défaits de leurs malédictions. Il ne reste plus qu’à abattre le mouton-substitut et à l’enterrer. L’abattage du substitut animal sert vraisemblablement à rendre le transfert permanent, tandis que son inhumation est un moyen commode de rediriger l’impureté absorbée par le substitut vers la « Terre Sombre », le monde souterrain d’où proviennent probablement les miasmes. Il faut remarquer que le mouton-substitut est accompagné, lors de son inhumation, d’un gros pain sucré et de vin, ce qui montre que cet ensemble tient lieu d’offrande alimentaire à une divinité dont l’identité n’est pas donnée. Le trou est par la suite comblé, comme si l’on voulait s’assurer du caractère irréversible de l’opération rituelle.
16Ce même rituel de Maštigga redouble ce transfert rituel par un deuxième rite de substitution :
On amène le mouton noir (mentionné au début du texte). La Vieille Femme le brandit au-dessus d’eux et dit : « Pour vos têtes (et) votre personne tout entière, le substitut (est) un mouton noir. Les malédictions aussi (sont) derrière (sa) bouche (et sa) langue ! » § Elle le fait tourner au-dessus d’eux. Les deux commanditaires du rituel crachent dans sa bouche, puis on abat le mouton. Ensuite, on le démembre. On confectionne un foyer et on le brûle entièrement. On verse sur lui du miel et de l’huile d’olive vierge. Elle ro[m]pt un gros pain sucré et elle le jette dans le foyer. Elle fait aussi une libation de vin17.
17Le texte n’explique pas le choix d’un mouton noir pour cette séquence rituelle qui ressemble beaucoup à la précédente. V. Haas18 pense que ce choix est à mettre en relation avec l’identité des destinataires divins. Pour lui, les animaux blancs seraient destinés aux divinités célestes ou terrestres, alors que les animaux noirs seraient réservés aux dieux souterrains. Toutefois, ce passage du rituel de Maštigga, tout comme le précédent que nous avons examiné auparavant, ne précisent pas l’identité des divinités destinataires de ces offrandes particulières. De plus, le fait que l’animal soit déposé dans une cavité pratiquée dans le sol n’assure pas la nature chthonienne du destinataire divin19.
18Après avoir mis en correspondance visuelle le mouton noir avec les patients, la Vieille Femme prononce une incantation similaire à celle qu’elle avait proférée en association avec le premier mouton-substitut. Tout comme ce dernier, le mouton noir est explicitement identifié comme le substitut des patients. Ici aussi, les patients crachent dans la bouche du mouton-substitut qui est, cette fois-ci, démembré et incinéré. Notons que le foyer de cette incinération se transforme lui-même en offrande de fumigation à travers l’ajout, sur le corps brûlé du mouton noir, de miel, d’huile d’olive et de pain sucré.
19Le rituel de Maštigga se poursuit par un troisième rite de substitution :
La Vieille Femme prend le porcelet (mentionné au début du texte) et le brandit au-dessus d’eux. Elle dit : « Voici, il (est) engraissé avec de l’herbe (et) du grain. Ce (porcelet) ne reverra plus le ciel, il ne reverra plus les (autres) porcelets ! Que, de même, les mauvaises malédictions ne revoient plus ces commanditaires du rituel ! » § On fait tourner le porcelet au-dessus d’eux. Ensuite, on le tue. On creuse la terre, puis on place le porcelet dans (le trou). On place avec lui un gros pain sucré et elle fait aussi une libation de vin. On recouvre (le tout) de terre20.
20Le porcelet est identifié en tant que substitut des patients de plusieurs façons : une mise en correspondance visuelle (le fait de le placer, symboliquement ou non, au-dessus de la tête des patients) et surtout une formule de magie analogique. Dans cette formule, le porcelet qui ne reverra plus ses frères porcelets sert d’élément de comparaison avec les commanditaires du rituel qui ne doivent plus revoir les malédictions qu’ils ont proférées. Tout comme le premier mouton-substitut, le porcelet est inhumé après avoir été abattu, mais les patients ne crachent pas dans sa bouche au préalable.
21Un peu plus tard dans ce même rituel de Maštigga, un quatrième substitut animal est employé, à savoir une salamandre (?)21 :
La Vieille Femme prend la salamandre (mentionnée au début du texte) et elle enroule la laine bleue (et) la laine rouge autour d’elle. Elle la fait tourner au-dessus des deux commanditaires du rituel et dit : § « Que (son) pied rapide emporte la langue mauvaise ! Qu’elle la porte sur le dos ! (Que ses) dent(s) emportent cela, (c’est-à-dire) la mauvaise bouche (et) la langue mauvaise !22 »
22Je soupçonne la laine bleue et rouge mentionnée dans ce passage d’être la même que celle déjà mentionnée auparavant dans le passage ci-dessous :
« Elle confectionne un fil de laine bleue (et) de laine rouge (tressée) pour leurs personnes et elle le place (sur) eux23. »
23Nous retrouvons cette même laine bleue et rouge peu après dans le texte :
« Le fil de laine bleue (et) de laine rouge qui se trouvait sur le corps (de chacun) des deux commanditaires du rituel, (…), § (tout cela), la Vieille Femme le leur retire. Elle leur retire le fil24. »
24Si mon interprétation est correcte, cela signifierait que la tresse de laine bleue et rouge qui avait été mise en contact avec le corps des patients puis a été retirée est celle qui est enroulée autour du corps de la salamandre (?), ce qui aurait le mérite de rendre explicite l’identification de la salamandre (?) en tant que substitut rituel des patients. L’incantation qui accompagne la séquence relative à la salamandre (?) identifie en outre la laine bleue et rouge à la « mauvaise bouche » et à la « langue mauvaise », c’est-à-dire aux malédictions proférées par les patients eux-mêmes. L’utilisation de laine colorée comme élément absorbant de l’impureté est bien connue dans les textes rituels hittites25. Ici, on voit que cette laine sert également à transférer les miasmes du corps des patients à celui de leur substitut. C’est par ce biais que l’identification entre les commanditaires du rituel et la salamandre (?) est opérée.
25Le rituel de Maštigga emploie par la suite un mouton servant de « bouc émissaire », c’est-à-dire que ce substitut ne sera pas mis à mort :
On amène un mouton. Elle le désigne comme bouc émissaire. La Vieille Femme prend un gros pain sucré d’une mesure tarna- et une cruche de vin. Elle présente le mouton au dieu Soleil. La Vieille Femme dit : « Dieu Soleil, voici votre (= aux commanditaires du rituel) bouc émissaire avec (sa) bouche et (sa) langue ». Elle dédie le mouton (au dieu). Elle rompt aussi un gros pain et fait une libation de vin, mais on ne tue pas le mouton. La Vieille Femme le prend pour elle26.
26L’identification de ce mouton avec les patients s’opère exclusivement par le biais de la parole rituelle : la Vieille Femme l’identifie explicitement comme nakkušši- (bouc émissaire) des commanditaires du rituel, ce qui ne l’empêche pas de l’offrir en même temps au dieu Soleil27.
27Ainsi, le texte du rituel de Maštigga contre des querelles domestiques témoigne à lui tout seul de plusieurs techniques d’identification entre un ou plusieurs patients et leur substitut :
1) la mise en correspondance visuelle en brandissant ou tournant (symboliquement ou non) un animal vivant au-dessus de la tête des commanditaires du rituel ;
2) l’identification explicite par le biais de la parole rituelle ;
3) le transfert des miasmes des patients en les faisant cracher dans la bouche de l’animal ;
4) l’emploi d’une formule de magie analogique ;
5) le transfert des miasmes des patients en enroulant autour du corps de l’animal de la laine de couleur qui était au préalable en contact avec le corps de ces patients.
28Nous venons de le voir, la proximité physique suffit à établir une identification entre une personne et son substitut animal. Parfois, cette proximité va jusqu’au contact direct : le patient place sa main sur l’animal. Cette pratique ne relève qu’indirectement du procédé d’identification. En effet, elle est avant tout un élément de communication non verbale qui, lorsqu’il est réalisé par le patient, signifie : « je suis l’auteur de cette offrande ». Or, en revendiquant le don d’un animal vivant en contexte de rituel de purification, le patient désigne en même temps de manière implicite cet animal comme son substitut. C’est, notamment, le cas dans le contexte des rites de boucs émissaires, comme le montre un passage du rituel d’Ašhella contre une épidémie dans l’armée :
Ensuite, les seigneurs de l’armée placent leur main sur les béliers et, en même temps, ils disent : « Quelle que soit la divinité qui a provoqué cette épidémie, maintenant (ces) béliers sont là (pour elle). Ils (sont) très gras par (leur) foie, (leur) cœur et (leurs) membre(s). Que la chair de l’Homme redevienne répugnante pour elle ! Sois apaisée grâce à ces béliers !28 »
29L’incantation qui accompagne le placement des mains des patients se focalise sur le rôle d’offrande alimentaire des béliers qui seront, par la suite, relâchés en guise de boucs émissaires dans un pays ennemi. Toutefois, l’incantation opère elle aussi une identification implicite entre les seigneurs de l’armée et les béliers-substituts, puisqu’elle incite la divinité à l’origine de l’épidémie à manger la chaire de ces animaux à la place de celle des hommes.
30L’identification par le biais du crachat que nous avons remarquée dans le texte du rituel de Maštigga se retrouve également dans un texte de rituel de substitution pour le roi Tudhaliya :
Quels que soient ceux qui ont ensorcelé le commanditaire du rituel, on grave une langue sur toutes les perles en argent et on les fait porter (au cou) des ânes. Le commanditaire du rituel leur crache dessus, puis on pousse les ânes vivants dans un trou dans le sol. § Ensuite, on fait porter toutes les langues ensorcelées au cou d’un taureau et d’un bélier. Le commanditaire du rituel tient le taureau et le bélier (par le cou), puis on pousse ceux-là (dans un trou) dans le [s]ol [av]ec une statuette en or, (à savoir celle de) la déesse Soleil de la terre, du ragout, de l’huile, du miel, du [la]it, du vin, de l’argent, de l’or, du lapis-lazuli, du cuivre, de l’étain (et) du fer. § En même temps, le scribe dit : « [Comm]e (un poil du) [s]ourcil, un cil ou (un poil de) la barbe a été [fixé] sur une figurine de jeune homme (représentant) Tudhaliya, de sorte qu’elle (= la figurine) a été ensorcelée et t’a été remise [à toi], déesse Soleil de la [ter]re, [voic]i les substituts de la personne du commanditaire du rituel ! Il a donné (les choses) qui (ont été) déterminées (comme devant être données) [pour] la [p]ersonne du commanditaire du rituel, et aussi un [trib]ut par le biais de tout l’argent, l’or, le lapis-lazuli, la cornaline, l’étain, le fer, le cuivre, l’huile fine, l’huile végétale, le beurre clarifié (et) le miel. Toi, déesse Soleil de la terre et (vous), dieux d’en-bas, appropriez-vous ces substituts et (ce) tribut, mais laissez-moi (récupérer) l’héroïsme du jeune Tudhaliya, l’os, le [halh]alzana-, (le poil de) sourcil, le cil, [(le poil de) barbe] et c[onfiez]-le [à la bienveillance] du dieu Soleil [du ciel] (et) des dieux d’en-haut !29 »
31En crachant sur les ânes, le patient les identifie comme ses substituts tout en leur transférant ses miasmes. Quant au taureau et au bélier, ils sont identifiés comme substituts du roi au moment où celui-ci les touche. Ces deux groupes de substituts animaux sont par la suite désignés comme « substituts de la personne » du patient30.
Le pouvoir performatif de l’identification orale
32Il est possible que la parole rituelle suffise à identifier un patient à son substitut animal, comme cela semble être le cas dans l’extrait suivant :
Il/elle sacrifie […] (et) un [mou]ton mâle à la maîtresse du monde souterrain et il (= le roi) prononce le plaidoyer suivant : « (Me) voici, maîtresse du monde souterrain, ma Dame ! Si le présage que le dieu Lune a montré révèle quelque chose de mauvais pour moi, de sorte que les [di]eux d’en-hau[t] m’ont placé dans ta main, [maintenant] prends ces substituts que j’ai placés dans ta main et laisse-moi (partir) ! Que je voie le dieu Soleil du ciel de (mes) yeux ! »31.
33Étant donné que ce qui précède ce passage n’appartient pas à cette séquence rituelle32, l’identification ne s’effectue ici que par la désignation par le patient royal de ses substituts. Notons le recours à la même imagerie que précédemment : le patient a été placé à la merci de la déesse du monde souterrain, c’est-à-dire la maîtresse des morts, par les dieux « d’en-haut ». L’incantation cherche à envoyer les substituts animaux du roi à sa place.
34À côté de l’identification simple telle que celle que nous venons de voir, les formules de magie analogique servent souvent à exprimer une identification entre deux éléments du rituel et donc, parfois, entre le patient humain et son substitut animal. Nous avons déjà vu un exemple de ce type dans le texte du rituel de Maštigga, mais nous pouvons aussi citer un extrait du texte du rituel du cours d’eau de Tunnawi(ya) dans lequel l’incantation suivante s’adresse à un portail végétal tenant lieu d’aire de purification33 :
Le [mout]on te traverse, de sorte que tu tires son puttar ; le bœuf (te) traverse, de sorte que tu tires son šukšuka-. § Retire, de même, de ce patient la mauvaise impureté, l’ensorcellement, l’aštayaratar, la colère des dieux, le parjure, la langue de la multitude (ou) l’année courte34 !
35Enfin, l’identification entre le patient et le substitut animal peut être énoncée membre par membre dans le cadre de ce que l’on appelle traditionnellement une conjuration des neuf ou douze parties du corps. Un autre texte rituel de Tunnawiya fournit un exemple de ce type de conjuration :
J’ai arrangé ses douze membres. Maintenant, les membres du bélier sont en train de revendiquer la maladie des [membr]es de ce morte[l]. § Que la tête (du bélier) [e]mporte [la maladie de (sa) tête], que (sa) gorge idem la maladie de (sa) gorge, que [(son) oreille] idem [de (son) oreille], que [(son) épaule] idem à (son) épaule, [que (son) bra]s idem de (son) bras, que (son) doigt idem à (son) doigt, que (son) ongle [id]em [à (son) ongle], que (son) flanc idem à (son) flanc, § que [(ses) membres] idem de [(ses) membres], que (son) hupparti- [idem à (son) hupparti-], que (son) [har]ganawant- idem de (son) harganawant-, que [(son) pied idem de (son) pied], (ses) orteils (sont) arrangés pour ses orteils, [(ses) ongles (des pieds)] idem [pour (ses) ongles (des pieds)], (son) tendon idem de (son) tendon, [(son) os] idem de [(son) os], (son) sang [idem de (son) sang], des [douze] membres35.
36Ainsi, les techniques d’identification entre un patient et son substitut animal sont de nature très variée dans les textes rituels hittites. Du choix même de l’animal jusqu’à la parole performative en passant par la mise en correspondance visuelle ou physique, les habitants du pays de Hatti n’ont pas manqué d’idées pour obtenir l’identification souhaitée. Les textes présentés ici ne constituent qu’un échantillon représentatif de ces procédés, mais ils témoignent déjà d’un principe essentiel aux rituels de l’Anatolie hittite : chaque opération est combinée à une ou plusieurs autres dont l’objectif est le même. Nous avons ainsi pu remarquer que l’identification entre le patient et le substitut animal est très souvent mise en scène par plus d’une opération rituelle au sein d’une même cérémonie : on met à la fois en correspondance visuelle l’animal et le commanditaire du rituel tout en désignant explicitement le premier comme substitut du second, par exemple.
Bibliographie
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10.4000/books.ifeagd.3388 :Mouton, Alice, « Le sol en tant que lieu rituel d’après les textes hittites », dans Natalia Bolatti Guzzo et Piotr Taracha (éd.), ‘And I Knew Twelve Languages’. A Tribute to Massimo Poetto on the Occasion of His 70th Birthday, Varsovie, Agade Bis, 2019, p. 386-409.
Mouton, Alice, « Representing the Senses in Hittite Religious Texts: The Case of Sight », dans Ainsley Hawthorn et Anne-Caroline Rendu-Loisel (éd.), Distant Impressions. The Senses in the Ancient Near East, University Park, Eisenbrauns, 2019, p. 169.
Rieken, Elisabeth et al., « CTH 380.1 – Gebet für die Genesung von Gaššuliyawia », hethiter.net/:CTH 380.1 (INTR 2016-01-18), 2016.
Taracha, Piotr, Ersetzen und Entsühnen. Das mittelhethitische Ersatzritual für den Grosskönig Tuthalija (CTH *448.4) und verwandte Texte, Leyde/Boston/Kologne, Brill, 2000.
10.1163/9789004497405 :Notes de bas de page
1 Volkert Haas, Materia magica et Medica Hethitica, Berlin/New York, de Gruyter, 2003, p. 400-533. Pour un exemple différent d’utilisation rituelle d’animaux, voir Manfred Hutter, « Tiere als Materia magica im Ritual der Zuwi (CTH 412) », dans Yoël L. Arbeitman (éd.), The Asia Minor Connexion: Studies on the Pre-Greek Languages in Memory of Charles Carter, Leuven/Paris, Peeters, coll. « Orbis Supplementa », 2000, p. 95-106.
2 Je suis l’auteur de toutes les transcriptions et traductions qui suivent, ce qui explique que celles-ci puissent parfois diverger de celles publiées par ailleurs. En outre, tous les passages cités ont été collationnés par mes soins à partir des photographies mises en ligne sur le site de Konkordanz der hethitischen Keilschrifttafeln [http://www.hethport.uni-wuerzburg.de/hetkonk/hetkonk_abfrageF.php?ori] ou, le cas échéant, à partir des tablettes originales. Cet article a été soumis à publication en 2017.
3 Alice Mouton, « tarpalli-, tarpašša- et PUHU dans les rituels de substitution hittites », Nouvelles Assyriologiques Brèves et Utilitaires, vol. 54, no 2, 2004, p. 54-55.
4 KBo 29.129 Ro? 5’-9’ : nu mān LÚ-aš nu=(š)ši GU4.MAH tarpallin iyanzi n=a[n] INA É=ŠU=pat? anda hattān[zi] mān=aš MUNUS-za=ma GU4ÁB tarpall[in i]yanzi n=an hattan[zi].
5 KUB 7.53+ i 11-13 : mān LÚ-aš nu UDU.ŠIR GE6 danzi mān MUNUS-za=ma nu UDU.SÍG+MUNUS GE6 danzi 1 ŠAH.TUR GE6 1 UR.TUR GE6 nu mān LÚ-aš nu ŠAH.TUR NÍTA mān MUNUS-za=ma n=at MUNUS-TIM. Albrecht Goetze, The Hittite Ritual of Tunnawi, New Haven, Amerian Oriental Society, 1938, p. 4-5.
6 Alice Mouton, Les rituels de naissance kizzuwatniens : un exemple de rite de passage en Anatolie hittite, Paris, de Boccard, 2008, p. 53-55 : l’agneau est habillé avec les vêtements destinés au nouveau-né.
7 KUB 17.28 i 1-8 : [mā]n D30-aš šakiyazzi nu=kan šakiašni [šer?] UN-an GUL-ahzi nu kiššan iyami [na]mma kī daganzipan paddahhi [nu] hattešni anda ŠAH-aš karaš [arr]aš šakkar dahhi [nu GAM-a]nda ŠAH.TUR haddahhari § mān DUMU.MUNUS nu ŠAH.TUR MUNUS dahhi mān DUMU.NITA nu ŠAH.TUR NÍTA dahhi. Volkert Haas, Materia magica et Medica Hethitica : ein Beitrag zur Heilkunde im Alten Orient, Berlin/New York, W. de Gruyter, 2003, p. 422.
8 Voir ci-dessus, note 6.
9 Alice Mouton, Rêves hittites : contribution à une histoire et une anthropologie du rêve en Anatolie ancienne, Leyde/Boston, Brill, 2007, p. 123.
10 KBo 4.6 Ro 27’-30’ et duplicat : kinun=a kāša tuk ANA DINGIR-LIM fGaššulawiaš [tuēl GÉME-TUM] ANA GIG šer apēl tarpalliuš [GU4ÁB NIGA U(DU.SÍG+MUNUS N)]IGA=ya IŠTU TÚG.NÍG.LÁMMEŠ waššanduš [pešta]. Elisabeth Rieken et al., « CTH 380.1 – Gebet für die Genesung von Gaššuliyawia », hethiter.net/:CTH 380.1 (INTR 2016-01-18), 2016, § 3.
11 Ibid., 2’ et 6’’.
12 KUB 9.25+ i 34-43 et duplicat : [n]u=(š)ša[(n NAGGA tepu)] SÍGištaggai anda hūlāliēzzi [n]=at=š[(an ANA) LÚ.MEŠ]EN-TIM kunni ANA QĀTI=ŠU [GÌ]R=ŠU nāi § [n]amma=at=ša[(maš=at=kan arha d)]āi n=at=kan [A]NA PÉŠ.TUR nā[(i arha=wa=šmaš=
ka)]n dahhun idālu nu=war=a[(t=kan ANA PÉŠ.TUR n)]ehhun [nu]=war=at kā[š PÉŠ.(TUR-aš pargauwaš H)]UR.SAGHÁ-aš [(hal)]lūwaš hār[iyaš dālu(gauwaš KASKAL)]HÁ-aš pēdāu § [nu PÉ]Š. TUR arha t[(arnanzi DZarn)izaš D]Tarpattaššiš [kū]n=za zi[(k dā adanna=ma)=(t)ta dama]īn [pī]ueni. Cette séquence apparaît plusieurs fois à l’identique dans ce texte. Birgit Christiansen, Die Ritualtradition der Ambazzi: Eine philologische Bearbeitung und entstehungsgeschichtliche Analyse der Ritualtexte CTH 391, CTH 429 und CTH 463, Wiesbaden, Harrassowitz, 2006, p. 38-41.
13 Harry A. Hoffner, « Symbols for Masculinity and Femininity. Their Use in Ancient Near Eastern Sympathetic Magic Rituals », Journal of Biblical Literature, vol. 85, 1966, p. 326-334.
14 Alice Mouton, Rituels, mythes et prières hittites, Paris, Le Cerf, 2016, p. 374-419.
15 KBo 39.8 ii 26-34 : nu UDU ūnnanzi n=an=kan MUNUSŠU.GI ANA 2 BĒL SÍSKUR šer ēpzi nu kiššan tezzi kāša=wa=šmaš tarpalliš nu=wa=šmaš tueggaš tarpalliš ēštu KAxU-i EME-i hūrtāuš nu=(š)ši=kan iššī anda allapahhanzi nu kiššan memai § idālauēš=wa=kan hūrtāuš parā allapahten nu tēkan paddanzi nu=kan UDU kattanda hattanzi namma=an=kan kattanda tianzi nu=(š)ši NINDA.GUR4.RA KU7 awan katta tianzi GEŠTIN=ya šipanti nu šer anda appanzi. Ibid., p. 390-393, § 20-21. Un chiot est utilisé de manière analogue par la suite : ibid., p. 400-401, § 30.
16 Jared L. Miller, Studies in the Origins, Development and Interpretation of the Kizzuwatna Rituals, Wiesbaden, Harrassowitz, 2004, p. 110-112.
17 KBo 39.8 ii 35-43 : nu UDU GE6 ūnnanzi n=an=šamaš=kan MUNUSŠU.GI šer ēpzi nu kiššan memai SAGHÁ=a=šmaš tueggaš hūmandāš tarpalliš UDU GE6 KAxU-i EME-i hūrtauš=(š)a EGIR-an § n=an=šamaš=kan šer arha wahnuzi nu=(š)ši=kan 2 BĒL SÍSKUR iššī anda allapanhhanzi nu UDU hattanzi namma=an arha happešnānzi nu GUNNI iyanzi n=an arha warnuwanzi LÀL=ya=(š)ši=kan Ì SERDU pittalwan šer lāhuwanzi NINDA.GUR4.R[A] KU7 paršiya n=an=kan haššī peššiyazzi GEŠTIN=ya šipanti. Alice Mouton, Rituels, mythes et prières hittites, op. cit., p. 392-395, § 22-23.
18 Volkert Haas, Materia magica et Medica Hethitica, op. cit., p. 400.
19 Alice Mouton, « Le sol en tant que lieu rituel d’après les textes hittites », dans Natalia Bolatti Guzzo et Piotr Taracha (éd.), ‘And I Knew Twelve Languages’. A Tribute to Massimo Poetto on the Occasion of His 70th Birthday, Varsovie, Agade Bis, 2019, p. 386-409.
20 KBo 39.8 ii 44-54 et duplicats : n[(u)] MUNUSŠU.GI ŠAH.TUR [(d)]āi n=an=šamaš=kan šer ēpzi n[(u)] kiššan mem[(ai kāša=w)]ar=aš Ú-it halkit warkanza nu=wa=z [(kāš EGI)]R nepiš UL aušzi āppa=ma=wa=z=kan [(ŠAH.TURHÁ)] UL aušzi nu kūš=a BĒL SÍSKUR idā[(lauēš)] hurtauš QĀTAMMA lē uw[(an)]zi § nu=šmaš=kan ŠAH.[(TUR šer ar)]ha wa<h>nuwanzi namma=an=kan ku[(nanzi n)]u tēkan paddanzi n=ašta ŠAH.TUR [(kattand)]a tianzi nu=(š)ši NINDA.GUR4.RA KU7 awan kat[(ta ti)]anzi GEŠTIN=ya šipanti nu tēkan šer anda appanzi. Alice Mouton, Rituels, mythes et prières hittites, op. cit., p. 394-397, § 24-25.
21 Pour le hittite harziyalla- « salamandre(?) », voir Jared L. Miller, « Hittites Notes », Journal of Cuneiform Studies, vol. 54, 2002, p. 87-89.
22 KBo 39.8 iii 8-13 et duplicats : nu MUNUSŠU.GI harziyallan dāi nu=(š)ši=kan SÍG ZA.GÌN SÍG SA5 anda hūlāliyazzi n=an=kan ANA 2 BĒL SÍSKUR šer arha wahnuzi nu kiššan memai § [(karapdu=wa pidd)]alliš GÌR-aš idālun EME-an [(nu=war=an iškiša)]z karapdu ZU9=ya=war=at [(karapdu idālu)] KAxU-iš idālu<n> EME-an. Alice Mouton, Rituels, mythes et prières hittites, op. cit., p. 398-399, § 28-29.
23 KBo 39.8 i 31-32 et duplicats : tueggaš=aš[maš=ka]n SÍG ZA.GÌN SÍG SA5 šūi anda iyazzi n=a[(t=ša)]maš=kan dāi. Ibid., p. 380-381, § 10.
24 KBo 39.8 ii 5-6 ; ii 9-10 et duplicats : nu=kan ANA 2 BĒL SÍSKUR kuit SÍG [(ZA.GÌ)]N SÍG SA5 šūil tueggaš kitta (…) § n=at=šamaš=kan MUNUSŠU.GI arha dāi nu=šmaš=kan [(š)]ūil arha tuhšari. Ibid., p. 386-389, § 15-16.
25 Volkert Haas, Materia magica et Medica Hethitica, op. cit., p. 638-662.
26 KBo 39.8 iii 38-43 et duplicats : nu UDU ūnnanzi [(n=an=za n)]akkuššin halziššai nu=za MUNUSŠU.GI NINDA.GUR4.R[(A)] KU7 tar[n]aš DUGKUKU GEŠTIN=ya dāi nu UDU DUTU-i hikzi [(nu MUNU)]SŠU.GI kišša[(n memai)] DUTU-i kāša=wa=[(š)]maš nakkuššiš [(KAxU-it EME-it=(t)a)] nu=kan UDU šipan[(t)]i NINDA.GUR4.RA=ya [(paršiya GEŠTIN=ya šipanti)] UDU=ma=kan UL [(k)]unanzi n=an=za MUNUSŠU.G[(I=pat dāi)]. Alice Mouton, Rituels, mythes et prières hittites, op. cit., p. 406-407, § 36. Au sujet de la dernière phrase de cet extrait, voir Alice Mouton, « Rituels de “boucs émissaires” en Anatolie hittite », dans Piotr Taracha (éd.), Proceedings of the Eighth International Congress of Hittitology, Warsaw 5-9 Sept. 2011, Varsovie, Agade, 2014, p. 564-565.
27 Voir ibid.
28 KUB 9.32+ Ro 18-23 et duplicats : namma=kan ANA UDU.ŠIR-ašHÁ ENMEŠ KARAŠ QATI=ŠUNU tiyanzi nu=kan anda kiššan memanzi kuiš=wa DINGIRLIM kī ÚŠ-an iyat kinun=a=wa kāša UDU.ŠIR-ašHÁ arantari nu=war=at IŠTU UZUNÍG.GIG UZUŠÀ U IŠTU UZUÚR mekki warganteš nu=wa=(š)ši=kan ŠA AMILUTTI UZU puggaru namma nu=wa=(š)šan katta kēdaš UDU.ŠIR-ašHÁ waršiyahhut. Ibid., p. 574.
29 KUB 24.12+ ii 24-34 : nu=kan EN SISKUR kuiēš alwanzahhešker nu=kan hūmandāš EME-an ANA KÙ.BABBAR [k]uwannanaš andan gulšanzi n=aš=kan ANA ANŠEHÁ anda neyanzi nu=šma<š>=kan EN SISKUR šarā allapahhi n=aš=kan TI-anduš daga<n>zipi GAM-anda peššiyanzi § EGIR=ŠU=kan EMEHÁ alwanzahhanteš hūmanteš ANA GU4.MAH UDU.ŠIR GÚ=ŠU anda neyanzi nu=za=kan EN SISKUR GU4.MAH [UDU.Š]IR GAM-an ēpzi nu=kan apūš=(š)a [IŠT]U ALAM KÙ.GI KI-aš DUTU-uš TU7HÁ Ì LÀL [G]A? GEŠTIN KÙ.BABBAR KÙ.GI NA4ZA.GÌN URUDU NAGGA AN.BAR [da]ganzipi GAM-anda peššiyanzi § [nu=kan L]ÚDUB.SAR anda kiššan memāi [GIM?-a]n=wa=kan ANA ITuthaliya ALAM LÚGURUŠ [ī]nniri laplapi zamangur […] ēšta nu=war=at alwanzahhan [nu tuk K]I-aš DUTU-i EGIR-pa maniyahhan ēšta [kāš]a= wa=za EN SISKUR ŠA NÍ.TE tarpalliuš [ANA S]AG.DU EN SISKUR=kan kuiēš SIxSÁ-anteš [arkam]man=(n)a IŠTU KÙ.BABBAR KÙ.GI! NA4ZA.GÌN NA4GUG NAGGA AN.BAR URUDU Ì.DÙG.GA Ì.GIŠ Ì.NUN LÀL hūmandaza pešta nu=kan zik KI-aš DUTU-uš GAM-raš=(š)a DINGIRMEŠ kēdāš tarpalliuš arkammi=ya : mamannaten ŠA ITudhaliya=ma=mu ŠA LÚGURUŠ haštariyatar haštāi [: halh]anzanan īnnarien laplappan [zamangur] šarā tarniešten nu=war=an ANA DUTU [AN] UGU-ziuš DINGIRM[EŠ SIG5-anni E]GIR-pa m[aniyahten]. Piotr Taracha, Ersetzen und Entsühnen. Das mittelhethitische Ersatzritual für den Grosskönig Tuthalija (CTH *448.4) und verwandte Texte, Leiden/Boston/Köln, Brill, 2000, p. 88-89.
30 EN SISKUR ŠA NÍ.TE tarpalliuš. Il faut noter le choix du terme NÍ.TE (pour le hittite tuegga-) qui se traduit aussi bien par « corps » que par « personne » : voir Alice Mouton, « L’individu et son corps en Anatolie hittite : un nouveau projet », dans Alice Mouton (éd.), L’hittitologie aujourd’hui : Études sur l’Anatolie hittite et néo-hittite à l’occasion du centenaire de la naissance d’Emmanuel Laroche, Istanbul, Institut français d’études anatoliennes, 2017, p. 106.
31 KUB 24.5+ Vo 2-8 et duplicats : nu=kan ANA DEREŠ.KI.GAL [… UD(U.NÍTA BAL-an)]ti nu=za arkuwar kišša[(n DÙ-zi) kāša=wa D]EREŠ.KI.GAL GAŠAN=YA kī=wa kuit D30-aš G[(ISKIM-ahta) nu=w]a mān ammel HUL-lu išihta nu=wa=ta=(k)kan UG[U-azzeš DIN]GIRMEŠ ammuk ŠU-i tīēr ammuk=ma=wa=ta=(k)[kan …] :tarpalliuš kuiēš ŠU-i tehhun nu=wa=za apūš dā ammuk=ma=wa arha tarni nu=wa DUTU AN-E IGIHÁ-it ušgallu. Alice Mouton, « Representing the Senses in Hittite Religious Texts : The Case of Sight », dans Ainsley Hawthorn et Anne-Caroline Rendu-Loisel (éd.), Distant Impressions. The Senses in the Ancient Near East, University Park, Eisenbrauns, 2019, p. 169.
32 Voir José Virgilio García Trabazo, « CTH 419, ritual de sustitución real. Edición crítica y traducción », Historiae, vol. 7, 2010, p. 40-43.
33 Au sujet de ces franchissements rituels, voir Alice Mouton, « Liminarité, impureté et franchissements rituels en Anatolie hittite », dans Alice Mouton et Julie Patrier (éd.), Life, Death, and Coming of Age in Antiquity: Individual Rites of Passage in the Ancient Near East and Adjacent Regions, Leyde, Nederlands Instituut voor het Nabije Oosten, 2014, p. 441-452.
34 KUB 7.53+ iii 36-44 et duplicats : [UD]U?-uš=ta=(k)kan kattan arha paizzi nu=(š)<ši>=kan SÍGputtar huit<ti>yaši GU4=k[an] kattan arha paizzi {nu} nu=(š)ši=kan šukšuqan huittiyaš[i] § kēdani=ya=kan ANA EN SISKUR idalu papratar alwazatar āštayaratar DINGIRMEŠ-aš karpin NĪŠ DINGIR-LIM pangauwaš EME-an maninkūwandan MU-an arha QĀTAMMA huittiya. Volkert Haas, Materia magica et Medica Hethitica, op. cit., p. 697.
35 KUB 9.34 ii 35-47 et duplicats : 12 UZUÚRHÁ=ši=(š)ša[n (handānun kinun=a kā)š(a)] ŠA UDU.ŠIR happ[(išnant)]eš kēl DUMU.LÚ.U19.L[U-aš UZUÚRM]EŠ-aš inan uewakanzi § S[AG.DU-aš=kan SAG.DU-aš GIG-an k]arapdu tar<(ša)>naš tar<ša>naš=(š)a GIG-an KI.MIN [UZUGEŠTU-aš=ma=kan UZUGEŠTU-aš (KI.MIN) UZUZAG.LU] UZUZAG.LU-ni KI.MIN [išhunauwan(za išhunawa)š] KI.MIN UZUkalulupaš UZUkalulupi KI.MIN [(UMBIN-anza) ANA UMBIN KI].MIN UZUTI-anza UZUTI-i KI.MIN § [UZUÚRHÁ=ma=kan UZUÚRHÁ-n]aš KI.MIN huppartiš [hupparti KI.MIN har]ganauwanza harganauwaš KI.MIN [GÌR-iš GÌR-aš KI.MIN] kalulupeš ŠU<.(SI)>HÁ-aš handan [UMBIN-aš ANA UMBINHÁ] KI.MIN UZUSA-aš UZUSA-aš=(š)šan KI.MIN [haštianza haštiy]aš KI.MIN išhanaza [išhanaš KI.MIN 12] UZUÚRHÁ-az. Manfred Hutter, Behexung, Entsühnung und Heilung : das Ritual der Tunnawija für ein Königspaar aus mittelhethitischer Zeit (KBo 21.1 - KUB 9.34 - KBo 21.6), Fribourg/Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1988, p. 32-35 ; Volkert Haas, Materia magica et Medica Hethitica, op. cit., p. 73 ; Detlev Groddek, Hethitische Texte in Transkription – KUB 59, Dresde, Verlag der TU Dresden, 2004, p. 81.
Auteur
Directrice de recherche au CNRS en hittitologie. Elle enseigne le hittite et le louvite à la Sorbonne et à l’Institut catholique de Paris. Ses recherches portent sur l’histoire et l’anthropologie des religions de l’Anatolie hittite. Elle a ainsi exploré les récits et mentions de rêves, les pratiques sacrificielles, la divination et bien d’autres aspects de la vie religieuse des Hittites.
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