L’homme menacé
p. 109-118
Texte intégral
1À eux seuls, les insectes représentent 75 % des espèces animales connues. Si beaucoup ont aujourd’hui disparu, des ordres entiers d’hexapodes ont traversé les ères géologiques sans presque rien changer à leur mode de vie. Certains diront que ces phénomènes de disparition ou de survie sont liés à la seule sélection naturelle, et donc à l’aptitude du plus fort à dominer le plus faible. Pour d’autres, il faut intégrer dans les principes de l’évolution des thèses dites « catastrophistes » susceptibles d’expliquer les extinctions de masse. Quant au moustique, qu’en est-il de son parcours ? Comment est-il possible qu’à notre époque, où les efforts de l’homme pour l’éliminer n’ont jamais été aussi importants, ce petit insecte arrive encore à tenir le haut de l’affiche ? À dire vrai, le moustique est une bien étrange créature qui profite du monde des hommes pour assurer sa survie. La planète tout entière subit un appauvrissement de sa biodiversité, tandis qu’au contraire les espèces les plus nuisibles pour l’homme prolifèrent dans les villes et les campagnes. Deux facettes d’une crise majeure et fort préoccupante, dont l’humanité est directement responsable !
L’HOMME EST-IL RESPONSABLE DE LA SIXIÈME EXTINCTION ?
Une histoire mouvementée
2L’histoire de la vie sur Terre a connu de nombreux bouleversements. Les fossiles enfouis dans les strates géologiques racontent l’histoire mouvementée des règnes du vivant. Aux périodes de grandes innovations biologiques se sont opposées les périodes d’extinctions de masse au cours desquelles une proportion significative des espèces animales et végétales a disparu de la surface du globe. Le premier scientifique à traiter sérieusement de ces extinctions fut l’anatomiste français Georges Cuvier (1769-1832), qui, à la fin du XVIIIe siècle, énonça que non seulement ces périodes de crise anéantissaient une grande partie des plantes et des animaux, mais que de plus, elles avaient été particulièrement courtes et violentes. La théorie de Cuvier, maintenant connue sous le nom de « catastrophisme », fut âprement critiquée par ses pairs. Le catastrophisme fut supplanté par la thèse de l’uniformitarisme prônée par Charles Lyell (1830), puis par celle du gradualisme développée par Charles Darwin. Avec son livre L’origine des espèces (1859), Charles Darwin amena à son tour une conception nouvelle et gradualiste de l’évolution du vivant en énonçant les principes fondateurs de la sélection naturelle. Or, plus les géologues et les paléontologues avancent dans leurs recherches, plus il leur apparaît évident que des extinctions de masse ont sévi par le passé (fig. 12). George Cuvier avait donc eu raison à son époque d’avancer que le règne vivant avait été soumis à des périodes de crises aussi brutales que dévastatrices. Charles Darwin avait vu juste lui aussi, dans la mesure où, entre deux cataclysmes, c’est bien la sélection naturelle qui façonne le monde du vivant. Afin de concilier les théories de Cuvier et de Darwin, une alternative intéressante fut proposée par Gould et Eldredge (1977), selon laquelle l'évolution avancerait selon une ligne discontinue alternant périodes de stagnation des espèces et périodes d’innovations évolutives. Le monde vivant serait ainsi le résultat d’évolutions graduelles qui s’accumulent dans le temps et ce, jusqu’à ce que surviennent des événements cataclysmiques qui viennent tout bouleverser.
Vers une sixième extinction
3La communauté scientifique s’accorde à dire que nous nous dirigeons actuellement vers une sixième et grande extinction. À la différence cette fois que c’est l’espèce humaine qui en est la cause, et non plus les humeurs de la nature. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) affirme que près de 45 000 espèces animales et végétales sont menacées d’extinction, et qu’un peu plus de 800 ont irrémédiablement et définitivement disparu (Vié et al., 2009). La plus grande menace qui pèse sur les êtres vivants résulte de la dégradation ou de la destruction pure et simple de leur habitat. Depuis le milieu du XVIIIe siècle, la population humaine n’a cessé de croître. Les grandes villes se sont multipliées sur tous les continents, flanquées d’industries lourdes et polluantes, tandis que les campagnes étaient soumises à l’agriculture intensive, source elle aussi de nombreuses pollutions. La transformation d’un habitat naturel en terres agricoles se traduit par une simplification à l’extrême des écosystèmes. Rares sont les régions qui ont su conserver une agriculture soucieuse de l’environnement. Les effluents des villes sont déversés dans les fleuves, qui eux-mêmes terminent leur course dans les mers et les océans. Les usines rejettent dans l’atmosphère des centaines de millions de tonnes de gaz carbonique, de soufre et d’autres particules toxiques. Au nom de la rentabilité et du profit, l’agriculture consomme à outrance des engrais chimiques et des pesticides qui empoisonnent les nappes phréatiques, les cours d’eau et les sols. Les forêts sont coupées afin que l’homme puisse en exploiter le bois précieux et les richesses du sol. Il n’est donc pas surprenant que les plantes et les animaux les plus vulnérables disparaissent de la surface de la Terre. Si la biodiversité de la Terre s’appauvrit un peu plus tous les jours, le moustique à l’inverse prolifère comme il ne l’a jamais fait depuis son apparition au Trias. Les moustiques pullulent, dans tous les environnements, et les maladies émergentes en essor partout sur la planète indiquent qu’apparemment ce n’est que le début d’une longue histoire.
CHRONIQUE D’UNE PULLULATION ANNONCÉE
Une crise majeure de la biodiversité
4En ce début de XXIe siècle, la biodiversité connaît une crise majeure qui, globalement, s’étage sur deux niveaux. Le premier, plus connu du grand public, est celui de l’appauvrissement de la biodiversité animale et végétale. Le deuxième niveau, moins médiatisé, est celui de la pullulation des espèces nuisibles. L’appauvrissement de la biodiversité n’est pas un phénomène contemporain, il fait partie intégrante des processus vitaux de l’évolution. Les biologistes estiment que 99 % des espèces ayant vécu à un moment donné sur notre planète sont aujourd’hui éteintes. Or, les extinctions sont généralement suivies du phénomène inverse d’apparition d’espèces nouvelles. L’impact météoritique qui a provoqué la disparition des dinosaures a permis aux mammifères de sortir de l’ombre et de prendre possession des niches écologiques laissées vacantes par les grands sauriens. Aujourd’hui la Terre connaît une crise sans précédent, consécutive cette fois aux seules activités humaines. Lorsque l’homme détourne le potentiel d’un écosystème pour l’assujettir à ses besoins propres, il perturbe les milieux connexes qui assurent l’équilibre d’un grand nombre d’autres biotopes. Par exemple, les mesures prises pour accroître la production des cultures exigeantes en eau provoquent l’assèchement des nappes phréatiques. Les fortes densités humaines combinées à la propension de l’homme à tout vouloir réorganiser selon ses besoins spécifiques risquent de compromettre l’avenir des animaux et des plantes mais aussi, à terme, de l’espèce humaine elle-même.
Pressions de sélection et adaptation du vivant
5Au début de son histoire, l’homme n’a survécu qu’en tirant profit des richesses de la nature. Avec la naissance de l’agriculture, le travail de la terre a permis aux communautés villageoises de mieux supporter les périodes de disette. Et c’est ainsi qu’au fil du temps, les villages sont devenus des villes puis des mégalopoles regroupant des dizaines de millions d’habitants. À ce monde artificiel s’accrochent des organismes dont les capacités d’adaptation font preuve d’une plasticité phénoménale. Deux sortes de créatures se partagent les milieux, les premières étant celles qui ont un cycle biologique long, et donc pourvues de capacités de reproduction limitées, et les secondes, des organismes aux cycles biologiques courts, ayant au contraire des taux de reproduction élevés. Lorsque les milieux deviennent défavorables, les animaux et les plantes au cycle long ont tendance à vite tomber en dessous d’un seuil d’équilibre. Ces espèces peuvent disparaître facilement. Dans le cas des espèces ayant des cycles courts, les femelles sont fécondes et les intervalles entre deux générations sont réduits. Ces espèces prolifiques s’adaptent à une multitude d’habitats différents, en particulier ceux dépourvus de faune associée susceptible d’en limiter les populations. Deux cas de figures se présentent à nouveau. Les rats sont exemplaires du premier cas. Les pullulations de ces rongeurs en milieu urbain ont été, et sont encore, à l’origine des épidémies de peste. Les rats mais aussi les mulots, les souris et les campagnols se reproduisent d’autant plus rapidement que dans les milieux où ils prolifèrent, il n’existe pas de véritable pression de sélection susceptible d’en entraver le nombre. Il a été ainsi observé dans ces conditions très précises de pullulation, une rapide dégénérescence des populations murines (Dorst, 1965). Le deuxième cas de figure est représenté par les insectes ravageurs des cultures et les insectes vecteurs de pathogènes. On veut les éliminer car ils menacent nos réserves alimentaires et la santé de chacun. Beaucoup d’insectes profitent de la dégradation des milieux pour s’y implanter durablement et y proliférer dans des proportions inquiétantes. C’est le cas des sauterelles et des criquets, qui profitent du surpâturage et donc de l’altération des prairies pour y pulluler. Les moustiques demeurent toutefois les champions de l’adaptation. En ville comme à la campagne, les moustiques des genres Aedes, Culex et Anopheles ont su coloniser tous les milieux pour y proliférer et y disséminer des maladies. Le moustique vit désormais si proche de l’homme qu’il est devenu un animal inféodé aux habitudes diurnes et nocturnes de celui-ci, et qu’il n’a de cesse de se nourrir, de pondre et de se nourrir de nouveau de sang pour assurer sa survie. Les hommes ont combattu cet ennemi séculaire en le noyant sous des nuages de composés toxiques. On l’a vu, l’usage des insecticides en agriculture aussi bien qu’en santé publique n’a abouti qu’à sélectionner des populations de moustiques résistants. En témoignent les épidémies de dengue et de chikungunya en expansion malgré les efforts toujours plus importants des services de lutte antivectorielle. Nous devons proscrire l’utilisation irraisonnée des engrais sur de vastes surfaces agricoles, qui, nous l’avons démontré, attire les moustiques à la recherche d’un lieu de ponte. Une bien étrange ironie du sort veut que l’homme concentre les moustiques aux endroits mêmes où sont déversées de grandes quantités d’insecticides. Les milieux agricoles se font les moteurs de sélections puissantes, dont le produit final, le moustique en l’occurrence, ressort plus fort et plus nuisible qu’il ne l’était à l’origine. Il est indubitable que l’abus des pesticides et des engrais chimiques provoque de graves déséquilibres biologiques, économiques et sanitaires. Mais il ne faut pas oublier que chaque insecte nuisible est accompagné dans son habitat naturel par un certain nombre d’arthropodes prédateurs qui en limitent efficacement les populations (encadré 12) (photo 20).
6Nous l’avons vu dans le chapitre précédent, dans un contexte de lutte intégrée l’utilisation des intrants agricoles se veut plus respectueuse de l’entomofaune prédatrice. C’est assurément l’étroite imbrication et la complémentarité des espèces animales et végétales entre elles qui assurent l’équilibre des systèmes biologiques. Même si l’action des prédateurs est minime dans la régulation naturelle des moustiques, elle est véritablement très importante et quand l’homme rompt un seul maillon de cette longue chaîne du vivant, les insectes nuisibles sont toujours de ceux qui profitent du déséquilibre.
Encadré 12
Les insectes prédateurs des larves de moustiques
Dans les milieux naturels, les insectes aquatiques zoophages partagent les mêmes espaces que les larves de moustiques. Afin de donner un ordre de grandeur des capacités prédatrices de certains de ces insectes, il est intéressant de retenir les exemples suivants :
– dans l’ordre des coléoptères, un dytique peut engloutir 434 larves de moustiques en deux jours (Chidester, 1917) ;
– une larve de libellule (odonates) dévore 29 larves de moustiques en cinq jours (Twinn, 1931) ;
– sur les 13,5 jours que dure le développement larvaire du moustique carnassier Toxorynchites brevipalpis (diptères), celui-ci consomme en moyenne 123 larves d’Aedes aegypti (Robert et al., 1983) ;
– durant les cinq stades du cycle préimaginal de l’hétéroptère aquatique Ranatra parvipes vicina, un mâle consomme 1 314 larves d’Aedes aegypti et une femelle 1 575 larves. Une fois devenues adultes, les ranatres ingèrent de 90 à 95 larves de moustiques par jour (Darriet et Hougard, 1993) ;
Les insectes prédateurs présentent la particularité, lorsque les gîtes s’assèchent, de quitter leur milieu d’origine et de coloniser les plans d’eau voisins. Cette caractéristique d’autonomisation commune à la plupart des insectes entomophages les rend, sur le long terme, moins dépendants du biotope que les autres prédateurs à caractère strictement aquatique, tels les poissons.
La menace grandissante des maladies a transmission vectorielle
7L’installation des hommes dans les milieux naturels rompt souvent, en quelques années seulement, l’équilibre que la nature a mis des milliers d’années à façonner. Les prédateurs aux cycles biologiques longs disparaissent au profit des moustiques, qui se mettent alors à pulluler dans tous les gîtes et en particulier ceux créés par l’homme. Citernes, fûts, jarres, puisards, caniveaux, boîtes de conserve, carcasses de voitures et d’appareils électroménagers, mares, rizières, retenues collinaires…autant de collections d’eau qui sont propices au développement des moustiques. Ces derniers profitent de la présence humaine ainsi que de la pollution des villes et des campagnes pour s’installer durablement et transmettre à l’homme des pathologies toujours plus virulentes. Ae. albopictus, autrefois cantonné aux seules régions tropicales, a aujourd’hui conquis l’ensemble des pays du sud de l’Europe et les États-Unis. Il existe un risque important de réémergence du paludisme dans les pays riverains de la mer Méditerranée alors que, dans ces régions, la maladie avait été éliminée au milieu du XXe siècle. Le réchauffement climatique permet aux moustiques tropicaux de s’implanter dans des régions tempérées, jusque-là considérées comme inhospitalières pour la plupart d’entre eux. La preuve en a été faite avec Ae. albopictus, qui s’est fait récemment le vecteur de la dengue et du chikungunya en Italie et dans le sud-est de la France. Les conditions climatiques, le développement des axes routiers et l’urbanisation croissante sont des facteurs favorables à l’implantation de ce moustique. De même, le vecteur de paludisme A. labranchiae, originaire du nord de l’Afrique, se trouve actuellement en Italie et en Corse, où il représente une véritable menace en termes de transmission palustre (Sainz-Elipe et al., 2010 ; Toty et al., 2010).
8La menace grandissante des maladies à transmission vectorielle mobilise de plus en plus les institutions nationales et internationales. Qualifiées aujourd’hui d’émergentes ou de ré-émergentes, la plupart de ces maladies sont liées aux changements des écosystèmes, aux variations climatiques ou à la pression de l’homme sur les milieux. Paludisme, dengue, chikungunya, fièvre jaune, fièvre de la vallée du Rift, West Nile, encéphalite japonaise…, toutes ces pathologies entraînent la mort de millions de personnes dans le monde. Partout des épidémies se déclarent là où pullulent les moustiques, et la question se pose, que nous réserve cette petite bête dans les décennies et le siècle à venir ?
LES MOUSTIQUES DEVIENDRONT-ILS LES « SAIGNEURS » DE DEMAIN ?
9Le réchauffement climatique est sans équivoque. Les climatologues notent une hausse des températures à l’échelle du globe, provoquant une fonte massive des banquises polaires et une élévation du niveau des océans. Sur terre comme sur mer, bon nombre de systèmes naturels sont perturbés par ces changements. Les concentrations en méthane (CH4) et en gaz carbonique (CO2) dans l’atmosphère ne cessent d’augmenter. La nouvelle peut inquiéter, surtout quand on sait que la libération de méthane dans l’air génère un effet de serre vingt fois supérieur à celui du gaz carbonique. Le plus inquiétant toutefois est le fait qu’au fond des océans reposent d’énormes quantités d’hydrate de méthane gelé (Suess et al., 1999). Fabriqué par des bactéries à partir de la matière organique, cet hydrate de méthane ressemble à de la glace et n’est stable qu’à basse température et à des pressions élevées. Or, cette « glace qui brûle », comme l’appelaient autrefois les marins, est un véritable « tueur en série » des temps géologiques. Lors des intenses éruptions volcaniques du permien, les dégagements brutaux de ce gaz ont provoqué la disparition de la quasi-totalité du règne vivant (Ogden and Sleep, 2012). Aujourd’hui, et c’est un comble, c’est l’homme qui reproduit le même scénario-catastrophe. Il extrait le charbon du sol depuis 250 ans, et le pétrole depuis une centaine d’années. Le réchauffement climatique résulte en grande partie de la combustion de ces deux énergies fossiles. Or, tout processus de combustion dégage du gaz carbonique et le charbon comme le pétrole en libèrent de grandes quantités. Ce que Mère Nature a patiemment accumulé dans ses sols durant des centaines de millions d’années, l’homme en a consommé une grande partie en deux siècles et demi à peine !
10Revenons à notre hydrate de méthane sous-marin. Le CO2 libéré par les énergies fossiles réchauffe l’atmosphère, qui à son tour communique sa chaleur aux océans. Il est indéniable que les océans se réchauffent, puisque les banquises fondent et que la calotte polaire s’amenuise un peu plus tous les ans. Le réchauffement des océans entraîne la gazéification de l’hydrate de méthane gelé retenu prisonnier au fond des mers. D’un effet de serre vingt fois supérieur au gaz carbonique, le méthane risque fort de rendre l’atmosphère de la Terre rapidement irrespirable. Beaucoup d’espèces mourront, faute de pouvoir supporter des températures aussi élevées. Les plantes et les animaux disparaîtront aussi en très grand nombre, mais qu’en sera-t-il des moustiques dans ce monde changeant ? Laissons maintenant notre imagination s’exprimer librement à travers un exercice de prospective !
11Les moustiques aiment la chaleur et l’humidité. Or, les paysages qui se dessineront demain sur l’ensemble des continents seront tout ce qu’il y a de plus adapté au petit insecte amateur de mares et de marigots. Le gaz carbonique est en effet le moteur qui génère de la cellulose. La cellulose est le squelette des plantes ; sans elle, les végétaux ne seraient que des amas de cellules sans consistance. De la chaleur et du CO2 à profusion, toutes les conditions sont réunies pour que la Terre revive un mini-carbonifère riche en marécages. D’après ce scénario se dessine un monde effrayant avec, d’un côté, une humanité affaiblie et, de l’autre, des moustiques qui trouveront justement dans ces erreurs humaines le ferment de leur souveraineté.
12Nombreux sont les moustiques qui entrent en diapause pour résister à la mauvaise saison. Sous les climats tempérés, les adultes de Culex p. pipiens passent l’hiver dans les caves et les égouts. A. gambiae diapause lui aussi sous la forme d’imago lorsque les mares et les marigots s’assèchent (Adamou et al., 2011). Les moustiques du genre Aedes survivent à la sécheresse sous la forme d’œufs qui résistent à la dessiccation. La nature ne laissant rien au hasard, certains arbovirus (fièvre jaune, dengue, chikungunya…) se conservent à l’intérieur de ces œufs, assurant ainsi la transmission verticale du virus de la femelle vectrice à sa descendance. Les œufs des Aedes constituent de la sorte le réservoir des virus, et ce jusqu’à ce qu’ils éclosent à la prochaine mise en eau des gîtes et qu’une dizaine de jours plus tard, les adultes émergent et disséminent à nouveau le virus. Sur une planète qui se réchauffe ainsi lentement mais sûrement, les contraintes liées au froid et à la sécheresse disparaîtront dans de nombreuses contrées. Les moustiques ne seront plus obligés de passer par le stade de la diapause et ils pourront alors pulluler et transmettre des pathogènes toute l’année. Les moustiques deviendront-ils les « saigneurs » de demain ? Tout au moins pourront-ils pulluler sans compter et disperser plus efficacement encore le malheur et la désolation. La roue du temps tourne, et avec elle les caprices de l’évolution. L’homme est devenu le moteur fou d’une sélection induite par sa seule présence sur cette Terre. C’est une première dans l’histoire de notre planète, que le grand Charles Darwin lui-même aurait eu bien du mal à imaginer à son époque.
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