Chapitre 14
L’économie solidaire revisitée à la lumière du genre. Changement social ou subordination féminine ?
p. 425-448
Texte intégral
1L’économie solidaire peut être définie comme l’ensemble des activités de production, d’échange, d’épargne et de consommation contribuant à la démocratisation de l’économie à partir d’engagements citoyens et misant sur l’intérêt collectif et la solidarité plutôt que sur la recherche du profit1. Divers écrits et travaux académiques ont été consacrés à l’économie solidaire au cours de la dernière décennie, notamment par des auteurs francophones et latino-américains. Plutôt que de bâtir une théorie abstraite, leur point commun consiste à s’appuyer sur les pratiques et luttes locales (le bubbling up évoqué par Christine Verschuur dans son chapitre), à reconnaître ce qui existe déjà, sous nos yeux, mais qui est négligé et occulté par les grilles de lecture dominantes (Hart et al., 2011 : 8).
2Reprenant la perspective polanyienne et s’inspirant d’expériences françaises, des auteurs français comme Bernard Eme et Jean-Louis Laville (1994) voient dans l’économie solidaire une économie plurielle, fondée sur l’hybridation des ressources (marchandes, non marchandes et non monétaires), la construction conjointe de l’offre et de la demande à partir « d’espaces publics de proximité » et au final un « réencastrement » de l’économique dans le social et le politique. Dans la même perspective, Jean-Michel Servet (2007) considère que l’une des originalités majeures de l’économie solidaire réside dans la prédominance du principe de réciprocité sur les principes du marché et de la redistribution. L’impulsion réciprocitaire qui fonde la solidarité, dit-il, s’articule à un engagement public et critique sur les normes dominantes de l’économie de marché.
3Privilégiant une lecture marxiste et s’appuyant sur les réalités latino-américaines, l’auteur brésilien Gaiger suggère que l’économie solidaire préserve ou revitalise les relations sociales non capitalistes, atténuant de ce fait l’assujettissement des individus à l’économie dominante et offrant aux travailleurs des opportunités concrètes de réappropriation des moyens de production, d’autonomie au travail et par le travail. L’économie solidaire est alors interprétée comme l’expérimentation de nouveaux rapports sociaux de production antagoniques au capitalisme (Gaiger, 2007).
4Curieusement, la dimension genrée de ces initiatives est très souvent ignorée, alors qu’elle est pourtant essentielle. Le cadre d’analyse polanyien, aussi fructueux soit-il, s’intéresse peu à la question des dominations et oppressions hors marché (Fraser, 2013) et les auteurs s’inspirant de Polanyi pour analyser l’économie solidaire souffrent du même biais. Ils délaissent le rôle de l’administration domestique (évoqué mais très peu développé par Polanyi) au profit de la réciprocité (Hillenkamp, 2013b). Or l’administration domestique – c’est-à-dire les ressources gratuites prélevées par l’entourage – joue un rôle déterminant dans les initiatives d’économie solidaire et ne relève pas de la réciprocité, mais plutôt du transfert unilatéral (Lemaître et Degrave, n. d). Et ce transfert unilatéral se fait généralement aux dépens des femmes, y compris au sein de l’économie solidaire. La lutte contre les oppressions est beaucoup plus centrale dans la lecture marxiste de l’économie solidaire, mais en privilégiant le conflit capital/travail au détriment d’autres formes d’oppression.
5Ce chapitre propose de revisiter l’économie solidaire à la lumière d’une lecture en termes de rapports sociaux de sexe. En nous appuyant sur des exemples empiriques de plusieurs régions du monde, nous suggérons que ces initiatives sont à double tranchant. Dès que l’on adopte des catégories d’analyse adaptées aux pratiques et aux subjectivités locales, on observe que ces initiatives ont effectivement un potentiel de refonte de l’économie, des frontières et des articulations entre « production » et « reproduction », de réinvention de la richesse, mais aussi du politique réclamé de longue date par les agendas féministes. Mais leur mise en pratique comporte de nombreux risques. Le risque le plus dangereux, c’est que les échanges non marchands et non monétaires, qui constituent la trame de l’économie solidaire, soient assurés, une fois encore, par la gente féminine.
Le rôle des femmes dans l’économie solidaire
6Vouloir faire de l’économie non pas un outil de profit, mais un instrument au service de la liberté et de la dignité humaine n’est pas nouveau. L’économie solidaire, qui a vu le jour il y a une trentaine d’années, renoue avec le mouvement de l’économie sociale, initié au cours du xixe siècle en Amérique du Nord et en Europe. En Amérique latine, l’économie solidaire prolonge des luttes paysannes, urbaines, syndicales articulées aux dynamiques locales d’économie populaire.
7Les femmes n’ont jamais été absentes de ces modes d’organisation. En France, par exemple, on a trop souvent tendance à négliger ou même à oublier le rôle décisif des groupes de femmes dans le mouvement associatif français du xixe et de la première moitié du xxe siècle. Qu’elles soient d’inspiration laïque ou chrétienne, ces pratiques associatives animées par des femmes visent souvent à « éduquer » le peuple, mais surtout à répondre de manière très pragmatique aux besoins premiers des plus démunis : tuberculose, logements ouvriers insalubres, analphabétisation, manque d’éducation (hygiénique, culturelle, sociale, etc.) et, en outre, certaines d’entre elles sont porteuses d’un véritable projet collectif de société. Dans l’action, expérimentations et requêtes féminines « inventent » les métiers du travail social (éducateur et assistante sociale), elles sont à l’origine des premières écoles professionnelles et des centres sociaux, elles inspirent de nombreuses réformes sociales françaises (notamment dans le domaine des allocations familiales, des congés de maternité, des congés payés, du travail des enfants) dont certaines ont été adoptées sous la pression des revendications des associations (Archambault, 1996).
8Entre la moitié et la fin du xixe siècle au Brésil, en Colombie et d’autres pays d’Amérique latine, des esclaves en fuite ou libérés créent des communautés autonomes et certaines sont initiées par des femmes. Qualifiées de « terres de femmes », certaines sont encore en résistance aujourd’hui, comme Campinho da Independencia à Rio de Janeiro (Gusmão, 1994). Des travaux d’historien-nes et de féministes, au Nord comme au Sud, ont redonné leur place aux mobilisations de femmes. Ordinairement « oubliées » par l’histoire classique, elles ont pourtant joué un rôle souvent essentiel de réforme économique, sociale et politique (Verschuur et Destremau, 2012 ; Coquery-Vidrovitch, 1994 ; Duby et Perrot, 1991 ; Naples et Desai, 2002 ; Verschuur, 2009).
9Depuis quelques décennies, on assiste à l’éclosion d’une nouvelle vague d’économie sociale et solidaire. Elle émerge surtout à partir des années 1970 sous la poussée de nouvelles demandes sociales et de nouveaux mouvements sociaux. Alors que la mobilisation sociale est de plus en plus diffuse – l’appartenance professionnelle et la nation comme espace de référence ont tendance à s’effriter – certains groupes jouent un rôle particulièrement actif : organisations populaires et communautaires, groupes écologiques, groupes de jeunes, mais aussi groupes de femmes.
10Face à la délicate conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, face à des responsabilités matérielles croissantes (du fait de l’augmentation du « coût » des enfants, d’un célibat en progression et de la persistance du chômage masculin), face aux difficultés d’accès à la propriété et au crédit, face enfin à une insécurité alimentaire grandissante, les femmes sont souvent les premières à se mobiliser et à s’auto-organiser. Les femmes créent des services collectifs de restauration : c’est le cas, par exemple, des comedores populares (cantines populaires) en Amérique latine et des restaurants collectifs mis en place en France dans les « quartiers » (Hersent et Soumbou, 2011). Elles se regroupent pour épargner et accéder au crédit. Elles animent des mutuelles de santé. Elles se rassemblent pour produire, transformer ou vendre sous la forme de coopératives (Charlier, 2006, 2011 ; Damamme, 2011 ; Hillenkamp, 2013a ; Saussey, 2011). Elles animent des clubs de troc (Saiag, 2011). Dans la plupart des métropoles, elles s’impliquent collectivement dans les questions d’assainissement et de récupération des déchets (Hainard et Verschuur, 2005 ; Verschuur, 2007). Les femmes se mobilisent aussi pour défendre l’accès à des emplois décents et à la protection sociale en créant des formes originales de syndicalisme (Kabeer, 2010, 2011).
11Pourquoi les femmes sont-elles souvent les premières à s’engager ? Elles ne sont pas naturellement animées par des motivations plus altruistes. Bien souvent, elles n’ont guère le choix. La pluralité des motifs d’action est un des enseignements majeurs de l’économie féministe : les personnes, quels que soient leur sexe, leur appartenance sociale, sont traversées par des motivations multiples, combinant recherche de l’intérêt personnel, altruisme et souci de l’autre, engagement ou encore respect des normes (Ferber et Nelson, 1993). Un autre enseignement de l’économie féministe toutefois est de mettre en évidence la construction sociale des motivations et des formes d’action. Comme le suggère Bina Agarwal dans ce volume, difficultés d’accès aux ressources, poids des obligations domestiques et modes spécifiques de socialisation liés à des normes de genre sont autant de facteurs susceptibles de contribuer à des modes d’actions collectives féminines spécifiques.
12Ces initiatives cherchent d’abord à répondre à de nouveaux besoins et à résoudre des problèmes auxquels ni le marché ni l’action publique ne peuvent – ou ne peuvent plus – répondre de manière satisfaisante. Elles offrent un moyen de soulager le quotidien des femmes qui les animent, poussées avant tout par le besoin et la nécessité. L’allègement de leurs obligations par leur mise en commun et l’amélioration du quotidien sont un premier résultat en soi. Mais elles ont également un rôle sociétal dont il faut absolument tenir compte afin de saisir les enjeux dont elles sont porteuses et de mieux penser l’avenir des femmes.
13Historiquement, les sociétés de secours mutuel ont été une préfiguration des systèmes de prévoyance collective et d’assurance sociale qui ont marqué l’avènement des États providence. Les coopératives de consommation, en même temps que le syndicalisme naissant, ont été un instrument important de l’émancipation ouvrière. En milieu rural, les coopératives de production, d’achat, de commercialisation ou encore de crédit ont largement favorisé le développement des classes paysannes. Les expériences associatives féminines (maisons sociales, centres sociaux) sont à l’origine de la professionnalisation et de la reconnaissance de certains métiers féminins. La question des rapports sociaux de sexe n’a toutefois jamais été une priorité. Elle n’a même jamais été posée, reflet d’une époque où les revendications féministes étaient ignorées. Face aux inégalités de genre contemporaines, l’économie solidaire offre trois leviers de changement social.
Réarticuler mais aussi repenser les sphères « productive » et « reproductive »
14Les inégalités d’accès et de contrôle des sphères dites « productives » et « reproductives » sont au cœur des inégalités de genre. Fruit d’une longue construction historique et finalement très arbitraire, la sphère « productive » désigne l’ensemble des activités comptabilisées, enregistrées et susceptibles d’être échangées sur un « marché ». La marginalisation des femmes s’est nourrie de leur exclusion ou de leur difficulté d’accès à ces formes de richesse, qu’il s’agisse de l’emploi, de la propriété ou de la finance. On sait par ailleurs que les femmes, même lorsqu’elles exercent une activité rémunérée, assument l’essentiel des activités dites « de reproduction ». Depuis deux décennies, la question de la reproduction sociale soulève des défis inédits et fait émerger de nouvelles formes de migration et de division internationale du travail (voir les chapitres de Jules Falquet et Christine Verschuur dans cet ouvrage).
15Nul ne songe aujourd’hui à nier cette double inégalité (accès restreint des femmes à la sphère productive et au contraire féminisation très forte de la sphère reproductive) et sa résistance à l’épreuve du temps. Les actions à mener, en revanche, suscitent des avis contrastés. Deux positions normatives s’opposent.
16La première, qui peut être qualifiée de « moderniste », consiste peu ou prou à faire confiance aux mécanismes de marché et à la « libération par le travail ». Il suffirait d’incorporer les femmes au « marché » pour supprimer le joug qui les opprime et pour considérer que les femmes « sont des hommes comme les autres » (Rousseau, 2008).
17La seconde, beaucoup plus radicale, plaide pour une nouvelle conception de la richesse (Méda, 2001 ; Nelson, 1993). Il s’agit non seulement de reconnaître le rôle économique des activités dites « de reproduction » (sans lesquelles celles de production ne pourraient avoir lieu), mais de faire valoir leur rôle fondamental en matière de cohésion sociale et d’épanouissement individuel et collectif. C’est ce que revendique le local feminism (Basu, 1995 ; Degavre, 2011) : ce courant de pensée, développé par des chercheures du Sud, pense le « reproductif » comme ressource du développement, à la fois comme source d’émancipation possible pour les femmes et comme contribution au développement socio-économique des territoires. C’est cette approche que revendiquent nombre d’initiatives d’économie solidaire féminines, qui prennent des formes diverses selon les contextes et les périodes de l’histoire. Les revendications des mouvements féministes de l’économie sociale et solidaire québécoise et des cantines populaires péruviennes et argentines, par exemple, agissent pour la socialisation des activités de reproduction sociale, tout en revendiquant la revalorisation du travail invisible des femmes. Au Pérou, les cantines populaires mutualisent la préparation des repas, contribuant ainsi à la sécurité alimentaire des familles, tout en soulageant une partie du temps de travail domestique des femmes (Angulo, 2011). En Argentine et au Brésil, même si c’est à une échelle moindre, des initiatives similaires existent (Nobre et Freitas, 2011). Au Québec, une multitude d’initiatives locales visent à améliorer le quotidien des femmes et de leurs familles : garderies communautaires, appuis aux victimes d’agression sexuelle, aide au logement, insertion professionnelle, etc. (Côté, 2011). Ces initiatives ont également pour point commun de lutter pour la rémunération et le soutien public de ces activités, arguant de leur rentabilité « sociale », de leur contribution fondamentale à l’intérêt général et de la nécessité d’adopter une nouvelle conception de la richesse.
18En combinant activisme, coopératives et prestations de services aux femmes et aux familles, les formes inédites de lutte syndicale qui émergent dans plusieurs régions du monde visent à permettre aux femmes de mieux concilier leurs rôles de travailleuses et de mères et d’améliorer leur accès aux droits (Kabeer, 2011). Sans aller jusqu’à en faire un objet de revendication politique, d’autres initiatives expérimentent des formes innovantes d’organisation permettant aux femmes de mieux concilier leurs différentes activités. Ceci passe par la redéfinition des frontières entre la sphère domestique privée et la sphère publique, entre monétaire et non monétaire, « tradition » et « modernité ». En France par exemple, les restaurants de quartier sont des espaces « intermédiaires », situés sur les lieux de vie des femmes et misant sur l’organisation collective des tâches (Hersent et Soumbou, 2011). En Bolivie, les coopératives de commerce équitable permettent aux femmes de se positionner sur les marchés nationaux et internationaux, tout en leur offrant des espaces de rencontres et de discussions (Charlier, 2011). Les coopératives de couture, de recyclage ou encore de logement, recensées dans plusieurs pays latino-américains vont dans le même sens (Nobre et Freitas, 2011).
La dimension territoriale : pragmatisme et contextualisation
19Les initiatives ancrées dans le local sont souvent accusées d’inefficacité par les mouvements qualifiés de féministes : insuffisamment radicales et sans réel pouvoir transformateur, elles ne feraient que maintenir le statu quo. Lorsqu’elle analyse la nature et la diversité des mouvements dits « féministes », Maxine Molyneux (1998 : 70) pose la question suivante : « […] d’où vient l’autorité pour définir les objectifs, priorités et initiatives des femmes ? ». Cette question reste une source de débats passionnés et souvent houleux, à l’origine de nombreuses tensions entre féministes du Sud et féministes du Nord. Deux sujets ont tendance à dominer les débats : comment définir un mouvement « féministe » et comment définir les intérêts « stratégiques » des femmes ? Plusieurs féministes du Nord inclinent à penser la lutte comme un processus nécessairement organisé, formalisé et autonome à l’égard d’autres mouvements, cette autonomie étant un gage d’authenticité et de légitimité quant aux intérêts dits « de genre ».
20Prenant le contre-pied de ce type d’approche, de nombreuses féministes du Sud plaident pour une définition à la fois respectueuse des diversités locales et bien plus large des engagements et de la mobilisation des femmes : des actions ouvertement contestataires ou préférant des formes de subversion plus discrètes, indépendantes ou reliées à des partis ou à des luttes politiques ; des engagements temporaires ou inscrits dans la longue durée, s’appuyant sur une assise sociale étroite ou sur de larges coalitions ; des mobilisations limitées à l’espace local ou bien parties prenantes de mouvements nationaux ou transnationaux (Basu, 1995).
21C’est à la lumière de ces débats que l’on peut apprécier le sens et la portée des initiatives d’économie solidaire. Certaines se qualifient de « féministes », d’autres non, la priorité étant accordée davantage à des enjeux spécifiquement locaux et ayant du sens dans la vie ordinaire des personnes. La définition et la forme des actions à mener varient au cas par cas, en fonction des priorités. Les politiques de genre des organisations internationales pêchent par leur universalisme et leur incapacité à saisir les spécificités locales. Chaque territoire, chaque espace vécu modèle les normes sociales comme les rapports de pouvoir. L’ancrage sur le terrain, c’est-à-dire une proximité spatiale, sociale et culturelle, peut permettre d’identifier les besoins, les carences et les facteurs de blocage puis d’inventer avec pragmatisme des réponses, des formes d’organisation et de revendication, ainsi que des modalités d’action « contextualisées », adaptées et réalistes.
22La définition et la forme des actions à mener varient en fonction des priorités, des identités et des enjeux locaux. Or la remise en question de la domination masculine n’est pas toujours un moteur de l’action. L’appartenance de sexe se combine, voire se dilue, dans une multiplicité d’autres appartenances, héritées ou choisies.
23En Amérique latine, les revendications féministes dans les mouvements d’economía solidaria s’inscrivent dans des enjeux beaucoup plus larges, en particulier ceux liés à la question de l’intégration régionale, le lobbying contre la zone de libre-échange des Amériques (Zlea, ou Alca : Área de libre comercio de las Américas) et la dénonciation de l’impérialisme américain (Nobre et Freitas, 2011). En Bolivie, les coopératives de productrices font partie d’un mouvement plus large de revendication de l’identité indigène et de lutte contre l’ultralibéralisme des organisations internationales, en particulier de l’Organisation mondiale du commerce (Charlier, 2011 ; Hillenkamp, 2013a). En France, les initiatives de femmes des banlieues ne se battent pas contre la domination masculine. Elles revendiquent le droit de produire et d’entreprendre autrement et elles méritent d’être resituées par rapport à la triple discrimination dont elles font l’objet : elles sont à la fois femmes, immigrées et pauvres et elles initient des projets « là où elles « vivent », au sens plein du terme » (Hersent et Soumbou, 2011).
24Dans la même veine, les luttes urbaines visent d’abord et avant tout à améliorer le quotidien des habitants et à faire valoir l’accès réel aux droits de base, qui sont simultanément ignorés et bafoués. Christine Verschuur parle de « réinvention culturelle du politique » : les initiatives qu’elle décrit ne visent à renverser ni l’ordre patriarcal, ni le système « capitaliste », mais se présentent comme « des lieux où les sujets (femmes et hommes) construisent de l’intérieur, sur ce territoire-là, des solutions et l’ébauche de nouveaux rapports entre hommes et femmes, sans plus attendre » (Verschuur, 2011 : 204). Au Pérou, les cantines populaires autogérées luttent contre l’invisibilité du travail féminin, mais aussi contre l’insécurité alimentaire que vit le pays depuis plusieurs décennies (Angulo, 2011). Les femmes impliquées dans les nouvelles formes de luttes syndicales sont « plus intéressées à trouver des solutions aux problèmes qu’à manifester » (Kabeer, 2011).
25Ici encore, l’approche en termes de local feminism offre une grille de lecture. En plaidant pour l’ancrage territorial, le local feminism ne vise pas à opposer « territoire » et « mondialisation » ou encore « local » et « global », mais le cadre qu’il offre permet « d’éviter de faire disparaître, dans l’analyse du développement, les conditions très locales de la reproduction d’un territoire de vie et le rôle économique, social et politique qu’y jouent les femmes » (Degavre, 2011).
La dimension politique : de la négociation à l’action radicale
26La spécificité des initiatives décrites ici réside aussi dans leur dimension sociopolitique. Au-delà de leur rôle en matière de production, transformation, commercialisation ou financement, ces initiatives se caractérisent par une volonté, même si elle n’aboutit pas nécessairement, de faire évoluer les modes de régulation. L’action politique prend des formes diverses en fonction des contextes et des enjeux.
27Certaines initiatives privilégient la négociation et le dialogue. Dans certains secteurs comme celui de l’emploi, l’opposition frontale est une prise de risque que les femmes ne peuvent pas toujours se permettre. Naila Kabeer, lorsqu’elle analyse les nouvelles formes d’action syndicale, insiste fortement sur ce point (Kabeer, 2011). Elle décrit l’intimidation des femmes par rapport au « style agressif traditionnel des syndicats à dominance masculine », leur « fatigue » par rapport aux formes habituelles de confrontation et aux licenciements qui en découlent. Les mobilisations qu’elle décrit se distinguent des activités syndicales classiques de deux manières. Elles privilégient la voie législative et la négociation de mesures de protection sociale avec les États plutôt que l’amélioration des conditions de travail à négocier directement avec les employeurs. Elles fondent la mobilisation syndicale sur des activités concrètes visant à soulager le quotidien des femmes (santé, garde d’enfants, sécurité, éducation populaire, etc.), avec par conséquent des formes d’organisation basées davantage sur les liens de voisinage que sur des liens professionnels2.
28D’autres initiatives, en revanche, adoptent une position de revendication frontale, notamment dans le domaine de la sécurité alimentaire. Et c’est précisément l’articulation entre révolte et expérimentation qui fait leur spécificité : la dénonciation de mécanismes d’oppression et d’exploitation s’accompagne d’actions concrètes qui offrent des avantages matériels aux participant-es, tout en leur permettant de construire les répertoires d’action et les solidarités qui sont nécessaires à ces moments de révolte.
29Les émeutes alimentaires sont une réponse raisonnable à des privations excessives imposées à des populations en situation de forte précarité. Il est intéressant d’analyser ces modes de contestations dans une perspective historique. E. P. Thompson analyse les émeutes alimentaires de la fin du xviiie siècle comme des actions initiées par des femmes (Thompson, 1991). Tilly et Scott présentent les émeutes alimentaires du début du xxe siècle en France comme une radicalisation des femmes dans leur rôle de responsable de la consommation et l’alimentation familiale (Tilly et Scott, 1987 : 207). Loin de se cantonner à des réactions primaires de ventres vides, l’histoire montre que les émeutes de la faim ont également une signification politique : dénoncer la rupture du contrat social avec les commerçants et les grands propriétaires, lutter contre la loi du marché, et revendiquer d’autres formes d’échange et le retour de la solidarité – ce que l’historien Thompson qualifie « d’économie morale ». Raj Patel et Philipp McMichael interprètent la participation des femmes aux émeutes des années 1917-1920 aux États Unis comme une stratégie de lutte pour le droit au vote (Patel et McMichael, 2010 : 14).
30C’est aussi en ces termes que peuvent se comprendre les révoltes contemporaines. En 2008, le monde a été secoué par de violentes protestations contre la hausse des prix des aliments, causée à la fois par la disparition de politiques étatiques de sécurité alimentaire, la destruction de la production vivrière au profit de cultures d’exportation, et notamment de biocarburants et enfin la spéculation financière sur les matières premières. Frances Moore, cité par Mindi Schneider, a comptabilisé des émeutes entre janvier et avril 2008 dans 18 pays d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et Caraïbes et du Moyen-Orient. La plupart des mobilisations ont été durement réprimées avec des arrestations, mais aussi plusieurs assassinats par des forces policières (Schneider, 2008).
31Mindi Schneider identifie la présence organisée des femmes dans trois pays. En Côte d’Ivoire, la majorité des manifestantes du 31 mars sont des femmes qui chantent « Nous avons faim ! ». Au Zimbabwe, la manifestation est organisée par Woza, Women of Zimbabwe Arise. Au Pérou, ce sont les femmes des comedores populares (cantines populaires) qui sont les premières à se mobiliser devant le Palais de Congrès le 30 avril, et elles seront ensuite suivies par des mouvements syndicalistes et des paysans. Les femmes étaient également fortement mobilisées au Cameroun et au Burkina Faso. Ailleurs, les femmes ont probablement joué un rôle central, mais dont la presse n’a pas rendu compte (Direnberger, 2008 ; Schneider, 2008). L’exemple des émeutes alimentaires de 2008 démontrent qu’en partant d’une pensée très raisonnable – avoir de quoi manger – les femmes peuvent radicaliser la confrontation dans des contextes précis, même si leur rôle tend à être sous-estimé, du fait de la prégnance des représentations sociales les cantonnant à la sphère privée. L’engagement des femmes dans les révoltes amène aussi à repenser l’opposition public/privé, ainsi que l’opposition entre besoins pratiques/stratégiques, puisqu’elles montrent à quel point leurs responsabilités domestiques les amènent à s’engager dans le combat politique (Lobo, 1991).
32La spécificité de ces formes de revendication est leur inscription dans la durée et l’articulation avec des formes d’auto-organisation : hommes et femmes doivent inventer ou réinventer et s’approprier des modes populaires de gestion des besoins de base comme l’alimentation. Le mouvement des Indignés, en Europe comme aux États-Unis, s’inspire en partie de celui des Piqueteros en Argentine, au sein desquels les femmes ont occupé une place centrale. Si ce mouvement n’est plus un acteur clef des luttes sociales actuelles, ses méthodes annoncent un tournant dans le rapport au politique et à la notion même de mouvement social. Les piqueteros combinent l’occupation d’espaces publics de longue durée, et notamment le blocage des routes, et la réponse aux besoins quotidiens des gens à travers des cantines populaires, des boulangeries, des jardins, des écoles maternelles, des groupes de prévention de la violence domestique, etc. (Nobre et Freitas, 2011 : 242). Dans cette économie politique de la résistance, l’expérience préalable des femmes dans des collectifs est indispensable à leur participation active dans les moments plus durs de confrontation. Isabel Rauber considère que les capacités des femmes, construites par leur socialisation de genre et souvent déqualifiées, sont resignifiées dans le mouvement comme une articulation entre le quotidien et le stratégique (Rauber, 2002). Si le mouvement est aujourd’hui fragmenté est démobilisé, il continue néanmoins d’améliorer le quotidien des femmes (Verschuur, 2011) et pour des milliers d’entre elles, cette expérience a marqué leur entrée dans la vie publique et politique (D’Atri et Escati, 2008 : 11).
33La continuité dans les quartiers du mouvement identifié par un espace précis – la coupure des routes – est aussi reprise par les Indignados en Espagne. D’abord situés dans une place centrale – la Plaza del Sol à Madrid, la Plaza de Catalunya à Barcelone –, ils se sont répandus par des assemblées dans les quartiers et par des actions visant à répondre aux besoins urgents et quotidiens des populations locales et précaires, surtout des jeunes, et par un désir de changer le système et de « localiser » la décision économique. Au-delà de l’élaboration d’un manuel de « désobéissance économique », émergent de multiples initiatives locales : en avril 2012, on comptait 200 banques du temps et 5 se créent chaque mois (Ainger, 2012). On assiste également à l’émergence de clubs de troc, de banques alimentaires et de coopératives. Ici encore les femmes jouent un rôle déterminant et se sont même saisies de cette période de révolte pour revendiquer une perspective féministe avec un manifeste intitulé « La révolution sera féministe ou ne sera pas ». Elles mettent en avant le concept de cuidadanía qui regroupe le droit de toutes et tous d’être soigné, la reconnaissance et le partage du travail du soin et la citoyenneté (Junco et Péres Orozco, 2006), et dont les banques du temps sont un exemple de mise en pratique.
Risques et fragilités
34Ces initiatives de femmes ont un potentiel réformateur, de par leurs capacités à questionner les frontières, à repenser le rapport à l’économie et au politique, la conception même de la richesse et, notamment, tout ce qui relève de la « reproduction ». Ce potentiel réformateur reste néanmoins entravé par de multiples contraintes, tout en comportant des risques.
35Fruits d’alliances inédites, ces initiatives connaissent nécessairement des trajectoires chaotiques, faites d’essais-erreurs, de compromis et parfois même de retours en arrière. Une prise de risque excessive peut susciter des oppositions qui inhibent ensuite toute forme d’action. Ailleurs, au contraire, trop de prudence et d’hésitations finissent par avoir raison de la dynamique collective, qui s’essouffle faute de résultats tangibles. Les initiatives, dont le poids politique est aujourd’hui reconnu, mettent dix ans, vingt ans et parfois plus pour se faire entendre à l’échelle nationale et internationale. Concilier action sociale, économique et politique repose sur un dosage subtil et suppose une recherche permanente d’équilibre.
36Le renforcement des inégalités entre femmes est un risque permanent. Les inégalités entre hommes et femmes, on le sait, sont imbriquées dans des inégalités de classe, de caste, de localisation, etc. Et certaines initiatives les renforcent plus qu’elles ne les abolissent. L’implication des femmes est très disparate, pour des raisons de temps, de ressources, tant sociales, cognitives que financières. L’action collective ne se décrète pas, elle repose sur un compromis habile entre intérêts individuels et collectifs – altruisme et compassion, lorsqu’ils existent, sont subtilement articulés avec la satisfaction d’intérêts personnels bien compris. Ces femmes « courtières » jouent un rôle souvent déterminant de mobilisation et de leadership, tout en s’appropriant une large partie des bénéfices, matériels ou intangibles (Guérin, 2011 ; Saussey, 2013). En même temps, ces femmes leaders sont susceptibles de jouer le rôle de « modèles », de participer à l’évolution des systèmes de représentation et de faire remonter des revendications spécifiques sur la scène politique (Charlier, 2011 ; Angulo, 2011).
37Les femmes se heurtent à des difficultés multiples dans leur tentative de réappropriation des moyens de production. L’expérience montre à quel point il est difficile de sortir les femmes de secteurs d’activités peu capitalistiques et à très faible rentabilité. Celles qui parviennent à un certain succès économique courent le risque permanent d’une récupération par des entités de plus grande taille, souvent dirigées par des hommes (Saussey, 2011 ; Verschuur, 2011 ; Nobre et Freitas, 2011). Si elles sont nombreuses à souhaiter être évaluées autrement qu’à l’aune de critères purement économiques, ces derniers continuent de monopoliser le champ de l’évaluation. En l’état actuel des choses, les initiatives sont donc tiraillées entre la volonté de renouveler les pratiques économiques et d’accéder à une certaine forme de pouvoir économique, que ce soit en termes de capacité de production et/ou d’accès direct aux marchés, nationaux et internationaux. Or ceci suppose des performances minimales en matière de rentabilité qui ne sont pas toujours compatibles avec le maintien de modèles alternatifs de production misant sur le lien social, la solidarité et le « bien-vivre » (Charlier, 2006, 2011 ; Nobre et Freitas, 2011).
38De nombreux acteurs du système capitaliste ont parfaitement compris la force de ces formes d’action collective et s’en nourrissent. Banques, institutions financières, multinationales construisent de nouveaux marchés en s’appuyant sur des réseaux sociaux locaux qui leur permettent de réaliser des économies d’échelle et de déléguer la gestion des risques. Sous couvert d’empowerment des femmes, celles-ci sont souvent une cible privilégiée. Certaines formes de microfinance et de commerce équitable, adossées à des entreprises globalisées (banques, fonds d’investissement privés, multinationales de l’agro-business), ont ainsi pour principal effet de déposséder les femmes de leurs ressources sociales (Guérin, 2011 ; Saussey et Elias, 2013).
39Lorsque les initiatives mobilisent des femmes en masse, alors la récupération est davantage de nature politique. Réseaux ou organisations de nature diverse (politique, religieux, communautaire, etc.) se saisissent de ces groupements afin de faire des femmes des sympathisantes, des votantes, des partisanes ou des fidèles (Guérin et al., 2011). Enfin, ces initiatives se heurtent toutes et sans exception, plus ou moins rapidement, plus ou moins violemment, à un contexte économique, social et politique qui leur est très défavorable, y compris de la part de mouvements et réseaux qui cherchent eux aussi à promouvoir des modèles alternatifs, y compris de la part de certains mouvements féministes – qui voient dans le salariat la seule voie d’émancipation – et y compris de la part des mouvements de l’économie solidaire, qui reproduisent en leur sein les hiérarchies de genre (Côté, 2011 ; Hersent et Soumbou, 2011).
40Ces difficultés multiples non seulement fragilisent ces initiatives, mais participent à la perpétuation de la subordination féminine. Le risque est en effet grand, et déjà à l’œuvre dans certains pays et secteurs, que les femmes de l’économie solidaire prennent en charge collectivement les questions de care et de reproduction sans aucune compensation en provenance de l’État ou du marché (Guérin, 2003), avec ainsi la mise en place d’une « économie de femmes » (Maus, 2010) et d’une « société civile de femmes » (Jarry-Omarova, 2010). Ce type de scénario permet certes de soulager le quotidien des femmes et facilite leur accès à l’emploi, comme par exemple les cantines populaires péruviennes (Angulo, 2011). Mais il ne règle en rien le déséquilibre production/reproduction et le fait que ce soient uniquement les femmes qui en aient la charge. Ce scénario est même un recul lorsque les initiatives se substituent, contre leur gré, à des politiques publiques de socialisation du care, comme par exemple au Québec (Mendell et Tremblay, 1998 ; Côté, 2011).
Conclusion
41L’analyse rigoureuse et critique montre à quel point les effets produits par ces initiatives d’économie solidaire sont ambigus et équivoques, du fait notamment de difficultés de fonctionnement multiples liées à un environnement nuisible et malveillant. La manière dont elles véhiculent ou reproduisent, bien souvent à leur insu, les logiques néolibérales et/ou patriarcales mérite évidemment d’être étudiée. Les effets produits peuvent sembler bien maigres par rapport à l’immensité du chemin à parcourir. Mais c’est aussi leur invisibilité, du fait de catégories d’analyse inadaptées (Guétat-Bernard, 2011), qui provoque déceptions et frustrations.
42Une lecture en termes de rapports sociaux de sexe offre un regard nouveau sur l’économie solidaire. S’intéresser de près aux pratiques, aux contraintes et subjectivités locales, tout en abandonnant les dichotomies habituelles (public/privé, marchand/non marchand, monétaire/non monétaire, altruisme/égoïsme) met en évidence les potentialités, ainsi que les risques dont elles sont porteuses. Ces initiatives facilitent l’appropriation des moyens de production des femmes et leur articulation avec la sphère dite « reproductive », grâce à la socialisation, mais aussi la revalorisation des activités de soin à autrui. Ancrées dans les territoires et les espaces vécus, ces initiatives contextualisent les formes d’action en fonction des besoins, des enjeux et des identités locales. Elles expérimentent aussi des formes inédites d’articulation et d’interaction entre action et protestation et donnent un sens nouveau à l’engagement politique.
43En fonction des contextes et des périodes de leur histoire, les initiatives d’économie solidaire oscillent entre deux pôles (Guérin et al., 2011). Le premier est celui de la « résistance », au sens d’une contestation discrète d’un ordre dominant qui permet l’accommodation, mais se révèle dépourvue de capacité de transformation et peut même contribuer à la dépossession. Le second est celui de la « transformation sociale », dans la mesure où ces initiatives préfigurent d’autres manières de travailler, de produire, de consommer et de vivre ensemble et bousculent les rapports sociaux, dont ceux de sexe.
44Dans un essai intitulé La véritable richesse (The true wealth), Juliet Schor plaide pour une « économie de la plénitude », seul moyen selon elle d’éviter le krach écologique, mais aussi de favoriser l’épanouissement personnel et la cohésion sociale. Cette économie de la plénitude est fondée sur le partage (du travail, des ressources, du savoir), la réappropriation des moyens de production, mais aussi du temps et des ressources à l’échelle locale par les citoyens. Le rééquilibrage marché/hors marché et ce qu’elle nomme les « économies de la réciprocité » (à partir d’exemples très proches des pratiques d’économie solidaire décrites ici) sont la pierre angulaire de cette économie plus humaine. Julie Matthaei, qui a largement contribué à théoriser l’économie solidaire aux États-Unis, considère que ce type d’économie, en accordant la priorité à l’humain, à la solidarité et au provisioning, est finalement une forme de concrétisation de l’agenda de l’économie féministe (Matthaei, 2009). L’enjeu essentiel, toutefois, c’est que ce provisioning soit pensé et pratiqué autrement que comme une compétence naturelle des femmes. Rares sont les militants ou théoriciens de l’économie solidaire qui s’expriment en ces termes, mais le fait que les femmes soient bien souvent les premières actrices de ces initiatives pose question.
45Ces initiatives n’ont de sens que si elles sont articulées à un combat de fond : repenser la richesse, non seulement en tenant compte de l’utilité sociale des initiatives, mais en valorisant tout ce qui relève de la reproduction, comme le revendiquent depuis déjà longtemps les mouvements féministes. Il faut donc agir autrement, mais aussi penser autrement (Ferber et Nelson, 1993). Les enjeux d’une redéfinition de la richesse sont doubles. Le premier porte sur les rapports de genre : il s’agit de revaloriser la contribution des femmes à l’intérêt général et de lutter contre l’une des formes centrales d’injustice, celle de l’inégale répartition des activités de soin. Le second enjeu concerne la capacité de nos sociétés à avancer vers une économie durable, une économie qui reconnaît et développe les activités et les services qui « prennent soin », tant des personnes (santé, éducation, culture, bien-être) que de la nature (Gadrey, 2010 ; Schor, 2010).
46Des analyses alternatives et innovantes de la richesse et de la productivité existent déjà. Elles réfléchissent à d’autres étalons de mesure et proposent de tenir compte de l’ensemble des « coûts cachés », tant positifs (activités de socialisation, de soins à autrui, de construction et de maintien de réseaux sociaux, de partage de l’information, etc.) que négatifs (empreinte écologique, stress, violence, pollution et nuisances diverses, inefficiences marchandes résultant de situations de monopoles, d’alliances politiques, etc.).
47On ne peut que plaider en faveur de débats publics sur ces questions de mesure de la richesse, de la systématisation de leur application empirique et enfin de leur adaptation à une diversité d’environnements socioculturels et politiques. C’est le seul moyen de valoriser la multifonctionnalité des activités humaines et donc de lutter contre leur infériorité supposée en démontrant leur contribution majeure au bien-être individuel et collectif. C’est également le seul moyen de rendre compte du rôle capital des initiatives décrites ici et de les sortir du déni. C’est enfin le seul moyen de sensibiliser progressivement les décideurs et l’opinion publique – hommes et femmes – aux impasses d’une conception matérialiste et individualiste de la richesse et à l’impérieuse nécessité de se centrer sur des objectifs de bien-être, de bien-vivre et de soin, qu’il s’agisse de soin à l’égard d’autrui ou de la nature.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
Agarwal B., 2002 – « Le débat sur le genre et l’environnement ». In Haase-Dubosc D. et al., (éd.) : Enjeux contemporains du féminisme indien, Paris, MSH Éditions : 155-180.
Ainger K., 2012 – The indignados make change contagious http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2012/may/08/indignados-make-change-contagious?INTCMP=SRCH
Angulo N., 2011 – « Cantines populaires : sécurité alimentaire et exercice de la citoyenneté au Pérou ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 221-237.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Archambault É., 1996 – Le secteur sans but lucratif. Associations et fondations en France. Paris, Economica.
Bagayoko-Penone N., Hours B. (dir.), 2005 – États, ONG et production de normes sécuritaires dans les pays du Sud. Paris, L’Harmattan, coll. Questions contemporaines, 313 p.
Basu A., (ed.), 1995 – The Challenge of Local Feminism. Women’s Movements in Global Perspective. Boulder (Colorado), Westview Press, 493 p.
Basu A., (ed.), 2001 [1995] – The Challenge of Local Feminisms. Women’s Movements in Global Perspective. New Delhi, Kali for Women, 510 p.
10.4324/9780429492921 :Benería L., 2010 – « Travail rémunéré, non rémunéré et mondialisation de la reproduction ». In Falquet J. et al. (éd.) : Le sexe de la mondialisation. Genre, classe, race et nouvelle division du travail, Paris, Presses de Science Po : 71-78.
10.3917/scpo.falqu.2010.01.071 :Charlier S., 2006 – L’économie solidaire au féminin : quel apport spécifique pour l’empoderamiento des femmes ? Une étude de cas dans les Andes boliviennes. Thèse de doctorat, Louvain la-Neuve, Presses universitaires de Louvain.
Charlier S., 2011 –« Empoderamiento des femmes par l’économie populaire et solidaire : participation et visibilité des femmes en Bolivie ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 155-184.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Coquery-Vidrovitch Ch., 1994 – Les Africaines. Histoire des femmes d’Afrique noire du xixe au xxe siècle. Paris, Éditions Desjonquères, 395 p.
Côté D., 2011 – « Difficiles convergences : mouvements de femmes et économie sociale, l’expérience Québécoise ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 289-313.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :D’Atri A., Escati C., 2008 – « Le mouvement piquetero/a en Argentine ». In Srilatha Batliwala : Changer le monde : les mouvements féministes, concepts et pratiques, Awid.
Damamme A., 2011 – « La difficile reconnaissance du travail féminin au Maroc ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 87-106.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Degavre F., 2011 – « La pensée “femmes et développement” ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 63-86.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Direnberger L., 2008 – Les femmes dans les émeutes de la faim. Cetri, Belgique, octobre. http://www.cetri.be/spip.php?page=imprimer&id_article=866
Duby G., Perrot M. (dir.), (1991) – Histoire des femmes en Occident. Tome IV : Le xixe siècle. Paris, Plon, 627 p.
Eme B., Laville J.-L. (dir.), 1994 – Cohésion sociale et emploi. Paris, Desclée de Brouwer, coll. Sociologie économique, 285 p.
Eme B., Laville J.-L., 2007 – « Économie solidaire ». In Laville J.-L., Cattani A. D. (éd.) : Dictionnaire de l’autre économie, Paris, Desclée de Brouwer : 253-261.
Falquet J., 2008 – De gré ou de force. Les femmes dans la mondialisation, Paris, Éditions La Dispute, coll. Le genre du monde, 214 p.
Feministas Indignadas en la Plaza Catalunya : Manifesto http://www.caladona.org/termomix/archives/4392
Ferber M., Nelson J. (eds), 1993 – Beyond Economic Man : Feminist Theory and Economics. Chicago, University of Chicago Press, 178 p.
10.7208/chicago/9780226242088.001.0001 :Ferguson J., 1994 – The Anti-politics Machine : Development, De-politicisation and Bureaucratic Power in Lesotho. Minneapolis, University of Minnesota Press.
Folbre N., 2001 – The Invisible Heart, Economics and Family Values. New-York, The New Press.
Fraser N., 2013 – « Marchandisation, protection sociale, émancipation : vers une conception néo-polanyienne de la crise capitaliste ». In Hillenkamp I., Laville J.-L. (éd.) : Socioéconomie et démocratie. L’actualité de Karl Polanyi, Paris, Eres : 39-64.
10.3917/eres.lavil.2013.01.0037 :Gadrey J., 2010 – Une économie post-croissance riche en emplois. Alternatives Économiques, 288 : 66-69.
10.3917/ae.288.0066 :Gaiger L. I., 2007 – Nouvelles formes de production non capitalistes au Brésil. Revue Tiers Monde, 190, « Économie solidaire : des initiatives locales à l’action publique » : 309-204.
Guérin I., 2003 – Femmes et économie solidaire. Paris, La Découverte, 234 p.
Guérin I., 2011 – Les effets insoupçonnés de la microfinance. Travail, genre et sociétés, 25 : 61-79.
Guérin I., Hersent M., Fraisse L., 2011 – Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale. Toulouse, Erès/IRD, 384 p.
Guétat-Bernard H., 2011 – Développement rural et rapports de genre. Mobilité et argent au Cameroun. Rennes, Presses universitaires de Rennes.
Gusmão Neusa M. M., 1994 – Terra de mulheres. Identidade e gênero em um bairro rural negro in USP. Revista de História, 129-131, São Paulo.
Hainard F., Verschuur Chr., 2005 – Mouvements de quartier et environnements urbains. La prise de pouvoir des femmes dans les pays du Sud et de l’Est. Paris, Karthala/Enda Diapol, 374 p.
Hart K., Laville J.-L., Cattani A. D., 2011 – The human economy. London, Polity Press [1st edition 2010].
Hersent M., Soumbou P., 2011 – « Initiatives de femmes en migration dans l’économie solidaire ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 207-220.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Hillenkamp I., 2013a – L’économie solidaire en Bolivie : entre marché et démocratie. Paris, Karthala et Genève, Graduate Institute Publications, 360 p.
Hillenkamp I., 2013b – « Le principe de householding aujourd’hui. Discussion théorique et approche empirique par l’économie populaire ». In Hillenkamp I., Laville J.-L. (éd.) : Socio-économie et démocratie. L’actualité de Karl Polanyi, Paris, Eres : 215-240.
Hillenkamp I., Laville J.-L. (éd.), 2013 – Socio-économie et démocratie. L’actualité de Karl Polanyi. Paris, Eres.
Jarry-Omarova A., 2010 – Genre du pouvoir et démocratie libérale en Mongolie. Analyse de l’échec du mouvement associatif des femmes, entre espace politique, nomadisme et ONG internationales. Thèse de doctorat en sociologie, École des hautes études en sciences sociales (EHESS), 574 p.
Junco C., Pérez Orozco y Sira del Río A., 2006 – Hacia un derecho universal de cuidadanía (sí, de cUIdadanía). Libre Pensamiento, 51.
Kabeer N., 2010 – Gender and Social Protection Strategies in the Informal Economy. New York et New Delhi, Routledge, xi-385 p.
Kabeer N., 2011 – « Emploi informel, initiatives syndicales et genre ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 255-289.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Laville J.-L. (dir.), 1994 – L’économie solidaire : une perspective internationale. Paris, Desclée de Brouwer, 334 p.
Lemaitre A., Degrave F., non publié, non daté – Approches substantives de l’économie : des outils pour l’étude des organisations d’économie sociale.
Lobo E., 1991 – « Mulheres, feminismo e novas práticas sociais ». In Lobo E. : A Classe operária tem dois sexos. Trabalho, dominação e resistência, São Paulo, Ed. Brasiliense.
Matthaei J., 2009 – « Beyond economic man : Economic Crisis, Feminist Economics, and the Solidarity Economy ». Contribution à la conférence 2009 de International Association for Feminist Economics, Boston, 26-28 juin.
Maus Z., 2010 – « Quelle place pour les savoirs minoritaires dans l’économie sociale : quelques pistes pour une lecture féministe ». Contribution aux Xes Rencontres internationales du Réseau inter-universitaire de l’économie sociale et solidaire, université du Luxembourg, Luxembourg, 2-4 juin.
Méda D., 2001 – Le temps des femmes. Pour un nouveau partage des rôles. Paris, Flammarion, 199 p.
Mendell M., Tremblay D.-G., 1998 – « L’économie sociale, la démocratie économique et l’emploi des femmes : enjeux et défis ». Atelier de recherche sur l’économie sociale et la lutte contre l’appauvrissement des femmes, document de travail, Montréal : 39-45.
Molyneux M., 1998 – « Analysing Women’s Movements ». In Jackson C., Pearson R. (eds) : Feminist Visions of Development Gender Analysis and Policy, Londres et New-York, Routledge : 65-88.
10.1111/1467-7660.00077 :Naples N. A., Desai M. (eds), 2002 – Women’s Activism and Globalisation. Liking Struggles and Transnational Politics. New-York et Londres, Routledge, 288 p.
Nelson J., 1993 – « The study of choice or the study of provisioning ? Gender and the definition of economics ». In Ferber M., Nelson J. (eds) : Beyond Economic Man. Feminist Theory and Economics, Chicago/London, Chicago University Press : 23-36.
Nobre M., 2005 – « Femmes et économie solidaire ». In Laville J.-L., Cattani A. D. (dir.) : Dictionnaire de l’autre économie, Paris, Desclée de Brower : 333-342.
Nobre M., Freitas T., 2011 – « Possibilités et limites de la construction de l’égalité de genre dans l’économie solidaire ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 237-254.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Patel R., McMichael Ph., (2010) – A Political Economy of the Food Riot. Review, A Journal of the Fernand Braudel Center.
10.1007/978-1-137-30553-4 :Picchio A., 1999 – « Visibilidad analítica y política del trabajo de reproducción social ». In Carrasco C. : Mujeres y economía, Barcelona, Icaria.
Prévost B., 2011 – « Le genre dans les nouvelles stratégies de lutte contre la pauvreté : de Sen à la Banque mondiale ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 31-62.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Rauber I., 2002 – « Mujeres Piqueteras : el caso de Argentina ». In Reysoo F. : Économie mondialisée et identités de genre, Suisse, Unesco.
10.4000/books.iheid.6161 :Rousseau S., 2008 – Éditorial. L’égalité hommes-femmes : un outil d’augmentation (générale) du temps de travail ? Revue française de socio-économie,2 : 3-6.
Saiag H., 2011 – Le trueque argentin au prisme de la dette : une socio-économie des pratiques monétaires et financières. Revue de la régulation [En ligne], 10 |2e semestre/Autumn, URL : http://regulation.revues.org/9411
Saussey M., 2011 – « Initiatives féminines et économie sociale et solidaire dans la production du beurre de karité au Burkina Faso ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 107-129.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Saussey M., 2013 – « Développement ». In Achin C., Bereni L. (dir.) : Dictionnaire genre et science politique. Concepts, objets, problèmes, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP) : 154-167.
10.3917/scpo.achi.2013.01.0154 :Saussey M., Elias M., 2013 – « Consommer équitable et vendre son beurre : imaginaire politico-écologique d’une filière globalisée ». In Guérin I., Selim M. (éd.) : À quoi et comment dépenser son argent ? Hommes et femmes face aux mutations globales de la consommation, Paris, l’Harmattan : 207-229.
Schneider M., 2008 – We are hungry ! A Summary Report of Food Riots, http://cornell.academia.edu/MindiSchneider/Papers/175793/_We_are_Hungry_A_Summary_Report_of_Food_Riots_Government_Responses_and_State_of_Democracy_in_2008
Schor J., 2010 – Plenitude : The New Economics of True Wealth. New-York, the Penguin Press.
Servet J.-M., 2007 – Le principe de réciprocité chez Karl Polanyi. Revue Tiers Monde, 190, « Économie solidaire : des initiatives locales à l’action publique » : 255-274.
Thompson E. P., 1991 – « The Moral Economy of the English Crowd ». In Thompson E. P. : Customs in Common, New York, The New Press.
Tilly L., Scott J., 1987 – Women, Work and Family. London, Routledge.
Verschuur Ch. (éd.), 2007 – Genre, mouvements populaires urbains et environnement. Cahiers genre et développement, 6, Paris, L’Harmattan, 404 p.
Verschuur Ch., 2009 – Quel genre ? Résistances et mésententes autour du mot « genre » dans le développement. Revue Tiers Monde, 200, « Les mots du développement » : 785-803.
Verschuur Ch., 2011 – « Mouvements et organisations populaires en milieu urbain : identités de genre et brèches pour le changement ». In Guérin I., Hersent M., Fraisse L. (éd.) : Femmes, économie et développement. De la résistance à la justice sociale, Toulouse/Marseille, Eres/IRD : 185-206.
10.3917/eres.gueri.2011.01 :Verschuur Ch., Destremau B. (éd.), 2012 – Féminismes décoloniaux, genre et développement. Histoire et récits des mouvements de femme et des féminismes aux Suds. Revue Tiers Monde, janvier-mars, 209.
Notes de bas de page
Auteurs
Isabelle Guérin est socio-économiste et directrice de recherche à l’Institut de recherche pour le développement dans l’unité mixte de recherche du Cessma (Centre d’études en sciences sociales sur les mondes américains africains et asiatiques) et affiliée à l’Institut français de Pondichéry. Ses recherches s’intéressent à la fois aux effets inégalitaires de la financiarisation et aux modes de résistance porteurs d’innovation sociale. Elle a travaillé plus précisément sur la microfinance, le surendettement, la servitude pour dette, l’économie sociale et solidaire. Au plan théorique, ses travaux accordent une attention particulière à l’économie politique de la financiarisation (les effets structurels qui sont source de différentiation) et à son économie morale (la signification morale et culturelle des transactions économiques et financières). Elle publie régulièrement dans des revues d’études du développement telles que la World Development, Journal of Development Studies, Development and Change, Journal of International Development, Revue Tiers Monde, Autrepart, etc.
isabelle.guerin@ird.fr
Miriam Nobre est agronomiste et titulaire d’un master du Programme d’études de l’intégration latino-américaine de l’université de São Paulo (Brésil). De 1993 à 2006, au sein de l’organisation Sempreviva Organização Feminista (SOF), elle a travaillé dans un programme d’éducation populaire et, en tant qu’analyste, sur l’économie féministe, l’agro-écologie et la solidarité économique. Militante féministe, elle a été la coordinatrice du secrétariat international de la Marche mondiale des femmes, un mouvement féministe international rassemblant des femmes et des personnes engagées pour l’élimination des causes de la pauvreté et de la violence contre les femmes.
minobre@sof.org.br
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le monde peut-il nourrir tout le monde ?
Sécuriser l’alimentation de la planète
Bernard Hubert et Olivier Clément (dir.)
2006
Le territoire est mort, vive les territoires !
Une (re)fabrication au nom du développement
Benoît Antheaume et Frédéric Giraut (dir.)
2005
Les Suds face au sida
Quand la société civile se mobilise
Fred Eboko, Frédéric Bourdier et Christophe Broqua (dir.)
2011
Géopolitique et environnement
Les leçons de l’expérience malgache
Hervé Rakoto Ramiarantsoa, Chantal Blanc-Pamard et Florence Pinton (dir.)
2012
Sociétés, environnements, santé
Nicole Vernazza-Licht, Marc-Éric Gruénais et Daniel Bley (dir.)
2010
La mondialisation côté Sud
Acteurs et territoires
Jérôme Lombard, Evelyne Mesclier et Sébastien Velut (dir.)
2006