Les ressources marines de la Polynésie française : applications en matière de biotechnologie
p. 37-75
Texte intégral
1. Le contexte polynésien
1La Polynésie française se situe en fin de gradient de la biodiversité indopacifique et s’étend sur 20° de latitude (entre 7° et 27°S., soit plus de 2 000 km) des latitudes équatoriales à subtropicales et entre 135° et 155° de longitude ouest. Les îles se répartissent en cinq archipels : Société, Tuamotu, Gambier, Australes et Marquises. On reconnaît classiquement deux grands types de formations récifales : les îles hautes volcaniques ceinturées par un lagon peu profond et un récif-barrière, et les atolls qui sont des îles entièrement coralliennes entourant un lagon en général profond.
2La répartition de la biodiversité marine subit à la fois l’influence de l’éloignement du foyer de dispersion indopacifique (gradient est-ouest dans le Pacifique), mais aussi en Polynésie un gradient nord-sud du fait même de l’amplitude latitudinale de la Polynésie française pour les îles Australes et Gambier (facteur de diminution latitudinal). La capacité de dispersion des organismes benthiques dépend de la durée de leur phase larvaire pélagique : les espèces à longue phase pélagique ont une large distribution et constitue un fond commun à l’ensemble de la zone, alors que les espèces à phase pélagique réduite ou inexistante ont une distribution réduite (espèces endémiques).
3À ce jour, très peu de travaux sur le benthos de la Polynésie française ont été publiés, pour l’essentiel en raison de la ponctualité et de la dispersion des travaux qui y ont été menés. G. Richard a rassemblé la littérature existante dans un abrégé publié dans les actes du 5e congrès international sur les récifs coralliens qui s’est tenu à Tahiti en 1985. Les groupes les mieux inventoriés pour les invertébrés sont sans nul doute les coraux et les mollusques. Certains autres groupes sont complètement inexistants de l’inventaire, comme les spongiaires et les gorgones, alors que la faune des échinodermes est rapportée simplement à celle de l’Indopacifique.
4Françoise et Claude Monniot ont, de leur côté, réalisé une étude des ascidies, publiée en 1987, sur trois îles : Tahiti, Moorea et Tikehau. Cette étude confirme l’appauvrissement d’ouest en est du Pacifique, mais aussi, sur un autre plan, l’appartenance de la Polynésie à la région Indopacifique. Pour une part importante, 42 %, les espèces étudiées dans ce travail sont nouvelles pour la science, sans compter que l’existence de biotopes bien distincts entre les îles de la Société et les Tuamotu a pu être établie. Tikehau est moins riche que Moorea et Tahiti, ce qui peut être dû à la moins grande diversité des biotopes, ainsi qu’à la taille de l’atoll. Par ailleurs, il semble que la charge importante de particules en suspension de l’eau du lagon de Tikehau soit un obstacle pour la fixation et la nutrition des ascidies. Cependant, ce premier travail sur ces invertébrés est d’un intérêt de premier ordre pour leur production en métabolites secondaires d’intérêt pharmacologique.
5En 2002 s’est tenu l’Atelier littoral « Rapa » dans le cadre du programme « Faune et Flore de Rapa ». Cette île se situe sur la bordure sud de la province Indopacifique. Les mollusques ont été plus spécialement étudiés lors de ce travail, car ils constituent un bon modèle pour l’étude de la répartition biogéographique des espèces marines benthiques. Le nombre d’espèces de mollusques estimé est passé de 140 à 600, ce qui témoigne de l’effort de récolte entrepris et de l’insuffisance des données sur les autres îles polynésiennes. Estimé jusqu’ici à 10 %, le nombre d’espèces endémiques de Rapa devra être revu à la hausse.
6Des données importantes sont également accessibles pour les algues avec notamment les travaux menés depuis de nombreuses années par Claude Payri et ses collaborateurs de l’université de la Polynésie française (UPF). Plusieurs catalogues ont été publiés, un guide illustré a également vu le jour. La flore académique des algues de Polynésie est en cours de réalisation. Par ailleurs, un herbier indexé comportant plus de 5 000 spécimens d’algues marines est déposé à l’UPF. Ce dernier est en grande partie informatisé et les renseignements font partie d’une base de données relatives aux groupes faunistiques et floristiques des écosystèmes coralliens de Polynésie française.
7Cependant, certains travaux n’ont pas été publiés, ou alors sans mention de l’origine des organismes, ce qui ne permet pas de les identifier. De fait, la variabilité des niveaux de connaissance des différentes ressources marines, et la variabilité chimique des organismes marins en général, ne permettent pas de proposer (à quelques rares exceptions près faisant office d’exemples) des « fiches produits » dûment renseignées. Tout au plus, cela peut donner lieu à une (ou des) stratégie(s) générale(s) pour l’étude et le développement éventuel des biotechnologies autour des ressources marines de la Polynésie française.
Ce rapport s’est donné comme objectifs :
De faire un bilan des inventaires réalisés et connus à ce jour des rédacteurs, sur quelques groupes organismes (macro et micro-) marins pouvant présenter un intérêt biotechnologique et, autant que faire se peut, propres au territoire polynésien.
De dresser une liste non exhaustive des principaux domaines d’application en y intégrant les avantages et inconvénients.
De proposer une (des) stratégie(s) de valorisation en ciblant (et préconisant) des organismes et molécules d’origine marine pouvant rapidement faire l’objet de recherches et de développement sur le territoire polynésien. Cette approche se fera en se basant soit sur « l’existant » au niveau de la Polynésie, soit encore en se référant aux études et recherches menées actuellement à travers le monde en ce domaine.
2. Importance des produits naturels d’origine marine
2.1 Le milieu marin, un gisement de molécules nouvelles ?
8Le milieu marin constitue la plus grande partie de la biosphère et contient les formes les plus anciennes et variées de la vie. Plus de 500 000 espèces de plantes et d’animaux ont été répertoriées à ce jour, sans compter le nombre bien plus considérable d’espèces microbiennes non identifiées. Cette étude des micro-organismes a été relativement négligée jusqu’à présent, et ce principalement pour des raisons techniques, mais l’utilisation des outils de biologie moléculaire et de génomique devrait permettre rapidement de réaliser des avancées importantes en ce domaine.
9Cette diversité de vie et d’environnement est une vaste ressource largement inexploitée dont les applications potentielles pourraient être multiples dans de nombreux secteurs industriels. Tant la diversité des formes marines que l’adaptation de ces dernières à un environnement marin atypique et/ou à des conditions extrêmes (zones hydrothermales, sédiments des fonds sous-marins, lagunes hypersalines, suintements froids des marges continentales, continents arctique et antarctique, tapis microbiens, etc.) ouvrent des perspectives nouvelles pour le développement de nouvelles molécules bio-actives, d’enzymes, de polymères, métabolites secondaires, de même que pour la mise en œuvre de nouveaux procédés industriels.
10Les organismes marins possèdent un immense potentiel de molécules originales d’intérêt biologique et les biotechnologies marines restent encore à ce jour une science neuve. Mais force est de constater que, comparativement à son équivalent terrestre, la connaissance de la chimie et de la biochimie des organismes (micro et macro-) marins de Polynésie Française apparaît nettement plus restreinte.
11Sur plus de 500 000 espèces marines identifiées, moins de 3 % de ces organismes marins ont fait à ce jour l’objet d’études en matière de potentialités biotechnologiques. L’intérêt de ces molécules marines se situe à deux niveaux : en premier lieu, ces organismes constituent fondamentalement des modèles moléculaires pour l’étude des mécanismes biologiques et parfois d’adaptation à des conditions environnementales ; en second lieu, ils permettent d’envisager la mise en évidence de nouvelles molécules d’intérêt biotechnologique. L’intérêt du milieu marin pour la recherche de nouvelles molécules d’intérêt thérapeutique reste donc très fort, ce malgré les contraintes de la convention de Rio, qui ont parfois freiné quelques années durant l’étude de ce milieu.
12La connaissance du milieu marin est relativement récente dans la mesure où le développement de l’exploration in situ du milieu sous-marin date des années 1940, alors que l’homme interagit avec le milieu terrestre et les plantes depuis environ 3 000 ans. Contrairement aux organismes terrestres, il n’existe pas de guide ethnopharmacologique pour la recherche d’organismes marins d’intérêt potentiel : ils ont, à quelques exceptions connues, une utilité traditionnelle (médecine, poisons…). Il faut cependant rappeler que les toxines les plus puissantes connues à ce jour sont d’origine marine (palytoxine, tétrodotoxine, saxitoxine, toutes molécules du plan Biotox – terrorisme biologique et chimique), très probablement parce que celles-ci doivent rester efficaces malgré leur grande dilution dans le milieu.
13Les premières études sérieuses sur les potentialités de valorisation des organismes marins en tant que source de métabolites bioactifs remontent au début des années 1960. L’exploitation d’autres propriétés comme notamment l’utilisation des algues marines dans le domaine de l’alimentaire ou comme engrais (source d’azote, de carbone, oligoéléments) est quant à elle beaucoup plus ancienne.
14La littérature scientifique s’enrichit très régulièrement de données liées à la mise en évidence de métabolites bioactifs d’origine marine. Durant les trente dernières années, l’intérêt des substances nouvelles synthétisées par des organismes marins (invertébrés, algues et plus récemment par les micro-organismes marins) a clairement été démontré. Plusieurs dizaines de brevets relatifs aux activités biologiques des organismes marins ont d’ores et déjà été déposés au cours de ces dernières années (dont 67 brevets entre 1999 et 2003) et plus de 18 000 produits ont été, à ce jour, répertoriés comme étant d’origine marine.
15En termes de molécules bioactives, différentes analyses concordent pour indiquer une plus forte probabilité de réussite avec les molécules marines qu’avec les autres : une molécule sur 10 000 identifiées du milieu terrestre obtiendrait une autorisation de mise sur le marché, alors qu’en milieu marin, ces prévisions seraient de 10 pour 10 000.
16Il est cependant intéressant de noter que la majorité de ces métabolites actifs d’origine marine est répertoriée à ce jour comme extraits d’invertébrés, peu d’algues et encore moins de micro-organismes (tabl. 1).
17Plus de 50 % des substances bioactives d’origine marine décrites dans la littérature présentent une activité biologique dans le domaine des antitumoraux, 10 % dans le domaine des antifongiques et le reste au niveau de l’immunomodulation, des antibiotiques, anti-inflammatoires, inhibiteurs enzymatiques, ou substances agissant au niveau du système cardiovasculaire ou du système nerveux. (tableau 2).
18Un tout petit nombre de ces substances est (ou sera) exploité à des fins pharmacologiques car la molécule doit répondre à de nombreux critères : activité, stabilité, absence de toxicité, mais aussi de disponibilité.
19À titre d’exemples, plusieurs médicaments et un insecticide sont à ce jour sur le marché :
l’acide alginique et les alginates (hémostatique, reflux gastroœsophagien / origine : algues) ;
les carraghénanes (hyperphosphorémie) ;
les céphalosporines (antibiotiques / origine : champignons marins Cephalosporium acremonium) ;
la vidarabine (antiviral, Ara-A / origine : spongiaire) ;
La cytarabine (antitumoral, Ara-C / origine : spongiaire) ;
le padan, insecticide largement utilisé au Japon, est inspiré de la néréistoxine isolée d’un ver marin.
20Plus récemment un antalgique, le ziconotide (2002), peptide isolé du venin d’un cône, Conus magus, et produit par synthèse, et le yondelis (2003), alcaloïde issu d’une ascidie Ecteinascidia turbinata (molécule plus connue sous le nom de ET743) ayant obtenu le statut de médicament orphelin pour le traitement de sarcomes, ont été mis sur le marché (médicaments hospitaliers). Le ziconotide est obtenu par synthèse totale et le yondelis est le produit naturel très complexe extrait de l’animal cultivé en milieu naturel (mangroves).
21Par ailleurs, d’autres molécules d’origine marine sont à ce jour à un stade avancé d’études cliniques (tabl. 3).
22L’un des critères déterminants pour l’exploitation d’un produit original reste la facilité et la rentabilité (coût) de son obtention. Trois méthodes permettent d’obtenir les produits en quantité suffisante : l’extraction-purification de métabolites (primaires et secondaires) à partir des organismes (macro et micro-), la synthèse et l’hémisynthèse, compromis entre les deux voies précédentes par la transformation d’un précurseur naturel.
23La synthèse (ou l’hémisynthèse) est parfois complexe mais rarement impossible, sans pour autant être toujours rentable quant à l’exploitation des molécules. Dans ce contexte, la voie de production par biotechnologie de molécules actives reste une voie d’avenir au niveau économique, soit par aquaculture en milieu naturel des organismes producteurs (éponges, ascidies, gorgones, algues…) ou encore par des procédés biotechnologiques (fermentation, photobioréacteur) en ce qui concerne notamment les micro-organismes (cyanobactéries, champignons, bactéries).
3. Les co-produits de la pêche
24L’utilisation des co-produits de la pêche s’inscrit dans une double démarche : « Santé » en premier lieu s’agissant notamment de l’influence des acides gras polyinsaturés et plus spécifiquement des oméga 3 (EPA/DHA) et oméga –(ω6), et « aquaculture » en second lieu. La production de ces huiles extraites de poissons approche le million de tonnes (106) /an et près de 70 % de cette production sont utilisés dans les fermes aquacoles comme éléments de nutrition. D’un point de vue économique, il va de soi que les deux démarches ne s’adressent pas à la même qualité de produits et en conséquence ne relèvent pas des mêmes exigences tant en termes de législation que de coûts de production.
25L’action bénéfique des oméga 3 (EPA/DHA) est connue depuis de nombreuses années avec les apports de ces acides gras essentiels dans les domaines de la santé et plus spécifiquement, dans la lutte contre l’hypercholestémie, les maladies cardiovasculaires, l’hypertension, le cancer. On s’attache à reconnaître comme essentiel l’acide decosahexanéoïque (DHA), notamment dans le développement de l’enfant, et la FAO recommande depuis plusieurs années l’ajout de cet acide gras dans les formulations alimentaires destinées aux enfants.
26L’État français vient de lancer une action prioritaire de lutte contre le cancer prévoyant la création d’un Institut national du cancer, dont la mission doit être soutenue par la mise en place de cancéropôles (7 à 8) dans lesquels cette notion de molécules d’origine marine, et notamment les acides gras polyinsaturés en oméga 3, dans la prévention de certains cancers fait l’objet d’un projet spécifique.
27Un autre aspect de la valorisation des co-produits de la pêche pourrait se situer au niveau de la recherche de lipides bioactifs (sphingolipides, glycérophospholipides, glycolipides, plasmalogènes, céramides, etc.) (fig. 1a, b). Par exemple, l’huile de foie de requin étant susceptible d’agir sur la perméabilité de cellules endothéliales est étudiée par un certain nombre de laboratoires et pourrait trouver applications dans la prévention de certains cancers de par l’activité anti-angiogénique de ses constituants. Il est également à noter sur ce sujet la mise en œuvre d’un projet européen « SeaFood Plus » qui associe 81 laboratoires européens et qui s’est donné comme objectifs la valorisation de co-produits de la pêche (peptides, protéines, hormones, lipides complexes, etc.) dans les domaines de la santé, et notamment dans les cas suivants : ostéroporose-régulation du métabolisme du calcium, hypertension, cardio-vasculaire (anticholestérol), antioxydants. Si les pistes existent, les recherches n’en demeurent pas moins très « amont » par rapport à d’autres molécules marines comme les acides gras polyinsaturés.
28À ce jour, il n’existe pas à notre connaissance de répertoires précis des espèces présentes au niveau de la Polynésie, mais des ouvrages notamment rédigés par des équipes de recherche du CSIRO de Tasmanie et d’Australie, se rapportant aux espèces présentent sur les côtes australiennes, peuvent permettre de mieux appréhender les potentialités de valorisation de leurs acides gras en nutrition santé.
29Un travail important de prospective est actuellement en cours au niveau de la Polynésie française quant à l’exploitation potentielle d’acides gras (EPA et DHA) extraits de la graisse orbitale du thon. Cette étude est menée conjointement par l’institut Louis-Malardé et l’IFREMER dans le but de valoriser ultérieurement les déchets de thon. Les résultats de ces investigations devront alors analysés dans l’optique d’une évolution de la pêcherie de thons en Polynésie française au cours des cinq prochaines années.
3.1 Problèmes et alternatives
30Les principales sources d’oméga 3 (ω3) sont actuellement les poissons gras (thons, maquereaux, sardines, saumons…) mais la qualité de l’huile extraite peut dépendre de nombreux facteurs comme les lieux de pêche, la saison et un certain nombre de facteurs environnementaux (pollution par les métaux lourds). Une récente étude australienne faisait état du fait que près de 60 espèces de poissons étaient concernées soit par de tels problèmes environnementaux (pollution par des métaux lourds), soit par des problèmes de « sur-pêche ». Un autre problème peut être la nécessité de procéder à une étape de purification pour obtenir, à partir d’un mélange complexe d’huiles extraites de ces poissons, les seuls acides recherchés en oméga 3. La demande en oméga 3 est croissante tant pour l’aquaculture que pour les applications dans les domaines de la santé et on estime que, dans un avenir de 10 ans, cette demande ne pourra être totalement satisfaite à partir des sources classiques actuelles. Il convient donc de prévoir dès maintenant de procéder soit à des process de « raffinage » des huiles brutes plus adaptées et efficaces, soit, plus vraisemblablement, l’utilisation de nouvelles ressources.
31Parmi les organismes se présentant alors comme une bonne alternative à cette demande constante en acides gras polyinsaturés, il y a notamment les micro-algues, lesquelles seront abordées dans un autre chapitre de ce document.
4. Les algues
32La Polynésie française, avec ses 5 500 000 km2 d’océans dont 7 000 km2 de lagons, constitue une réserve intacte de produits naturels. La pêche et la perliculture sont les secteurs d’activité les plus développés en Polynésie française dans ce domaine, mais il existe localement d’autres ressources naturelles marines qui pourraient être exploitées, notamment les algues. Les algues font partie des groupes biologiques les mieux connus. Leur inventaire a donné lieu à de nombreuses publications et collections déposées à l’Université de la Polynésie française (Payri et N’Yeurt, 1997 ; Payri et al., 2000).
33Depuis des siècles, les algues marines sont utilisées par l’homme, en particulier dans les pays asiatiques, pour l’alimentation, la médecine et l’agriculture du fait de leur richesse en minéraux et en polysaccharides. Dans les sociétés polynésiennes, l’utilisation des algues était traditionnelle lors des cérémonies de l’oubli (« ho’oponopono ») et de purification, mais elle est encore importante à Hawaii, où une trentaine d’espèces est consommée. En Polynésie française, l’utilisation des algues est restreinte à l’alimentation humaine et à certains archipels (Marquises et Australes). Seules huit espèces sont consommées, essentiellement Caulerpa racemosa (« Rimu »).
34L’utilisation et l’exploitation des algues marines ne sont pas toujours très connues du grand public alors qu’on les utilise quotidiennement. De plus, elles représentent une biomasse considérable avec environ 30 000 espèces identifiées, réparties en neuf embranchements eucaryotes, dont les plus connus sont les Chlorophyta, les Phaeophyta et les Rhodophyta.
35À l’échelle mondiale, les algues sont exploitées majoritairement dans le secteur de l’agroalimentaire (70 %), et essentiellement sur le marché de l’alimentation humaine en Asie (tabl. 3). Ce marché se développe depuis quelques années dans les pays occidentaux, car les algues représentent un « aliment-santé » qui bénéficie d’une image de marque favorable auprès des consommateurs.
36Par ailleurs, dans certains pays, des macro-algues proliférantes voire invasives (Sargassum muticum, Caulerpa taxifolia, Ulva spp.) représentent des biomasses considérables et génèrent des troubles d’ordre économique (nuisance pour le tourisme) et écologique (impact sur les communautés indigènes). Ces algues deviennent alors des déchets encombrants dont l’éradication est souvent coûteuse et difficilement réalisable. Une des solutions consiste alors à les valoriser industriellement en les transformant afin de leur conférer une valeur économique. Par exemple, la prolifération des algues vertes Ulva spp. est devenue problématique car elle touche les zones touristiques. Le coût de la collecte est élevé et le ramassage ne constitue qu’un transfert de pollution. Des essais de bioconversion de cette matière première par des fermentations aérobies ou anaérobie sont en cours pour la création de nouveaux produits (gaz, compost, fertilisants), ce qui permettrait également de diminuer une source de pollution. De la même façon, des études de valorisation de Sargassum muticum ont commencé après l’échec de son éradication et la progression de son invasion. Elles sont actuellement réalisées dans différents domaines : extraction des alginates, compostage et criblage pharmacologique.
4.1 Les algues sources de molécules
37Parmi les nombreux constituants des algues, il convient de citer les protéines, les acides aminés, les stérols, les polyols, l’iode, les sels minéraux, mais également une grande variété d’oligo et polysaccharides, ces derniers représentant d’ailleurs 60 à 70 % de la masse sèche du thalle (appareil végétatif). Trois principaux types de polysaccharides chez les algues peuvent être distingués : les polysaccharides de réserve intracellulaire, les composants fibrillaires, qui constituent en quelque sorte le squelette de la paroi des cellules, et la matrice polysaccharidique intercellulaire associée à cette paroi sous forme de matériel amorphe. Certaines grandes familles de cette dernière catégorie – les alginates extraits des algues brunes ou encore les carraghénanes et agars isolés à partir des algues rouges – sont d’ailleurs utilisées au quotidien principalement pour leurs propriétés physico-chimiques comme agents texturants (gélifiant, épaississant, stabilisant) ou comme rétenteur d’eau.
38L’industrie des polysaccharides d’origine algale (ou phycocolloïdes) est également très développée dans le secteur de l’agroalimentaire du fait de leurs propriétés texturantes (gélifiantes, épaississantes, émulsifiantes et stabilisantes), mais aussi dans les industries pharmaceutiques et cosmétiques (thalassothérapie ou en tant qu’actifs ou agents texturants). Ces polymères contribuent également au développement de nouvelles applications biotechnologiques et thérapeutiques. Il a ainsi été démontré que de telles molécules possèdent, à l’état natif ou après modifications, des propriétés pharmacologiques potentielles, telles que des activités antitumorales, antivirales, antimicrobiennes, anticoagulantes, etc. Enfin, l’utilisation des algues dans le secteur agricole est également développée où elles sont utilisées somme engrais, fertilisants foliaires ou aliments pour le bétail.
39La valorisation de cette ressource marine est donc en plein essor et semble promise à un long avenir eu égard à ces diverses applications.
40Mais l’utilisation des algues ne peut se limiter à leur seule composition et richesse en polysaccharides, protéines ou peptides. Un certain nombre de métabolites secondaires à haute activité biologique ont été isolés d’algues marines et sont actuellement évalués par des laboratoires pharmaceutiques pour leurs activités biologiques. La nature de ces métabolites secondaires apparaît fortement variable selon les algues considérées, et parfois selon les flores microbiennes associées à ces algues dont il convient également de tenir compte. (tabl. 4).
41À titre d’exemple, des laboratoires se sont ainsi spécialisés dans l’extraction et la purification à l’échelle industrielle d’un polymère du glucose : la laminarine. Ce dernier est le polysaccharide de réserve des algues brunes, équivalent de l’amidon chez les plantes ou du glycogène chez l’homme. Il s’agit d’un polysaccharide de faible poids moléculaire (~ 4 000 g/mol) constitué d’une chaîne principale β (1→3) de 15 à 35 unités glucose (avec une large prédominance des chaînes composées de 20 à 25 sucres) sur laquelle viennent se greffer quelques unités β-(1,6)-glucose dans de faibles proportions, généralement inférieures à 10 %. Ce polysaccharide extrait de l’espèce Laminaria digitata, classée comme algue alimentaire, est le principe actif qui est à la base d’un nouveau concept récemment développé : la vaccination des plantes. En effet, la laminarine est un éliciteur, c’est-à-dire une substance capable de déclencher toute une série de signaux et processus biologiques émettant des mécanismes de défense chez la plante.
42Une importante synthèse sur les algues de Polynésie et leur valorisation potentielle a vu le jour récemment à l’appui d’un travail de recherche de M. Zubia-Arreta sous la forme d’une thèse soutenue sur le territoire de la Polynésie française en mars 2003. Cette thèse fait notamment état des possibilités de valorisation en cosmétologie de deux algues proliférantes (Sargassum mangarevense et Turbinaria ornata) sur lesquelles d’autres études sont en cours et/ou devraient être initiées pour en évaluer les différentes potentialités de développement. La nature exacte des polysaccharides pariétaux de ces deux algues doit être établie afin d’en déterminer à l’état natif ou après modifications les applications.
43À ces deux algues autochtones et proliférantes, il convient d’ajouter deux algues rouges Acantophora spicifera et Melamensia, mais aussi Chnoospora minima (Fucophycées), Dermonema virens, algues pouvant également présenter un intérêt en termes de valorisation, notamment au regard d’activités antivirales potentielles. D’autres algues pourraient être prises en considération sur la base de connaissances acquises sur leurs activités biologiques.
44Les potentialités des algues peuvent donc s’exprimer au niveau de différentes molécules et s’adresser à différents champs d’application. Des études préliminaires relatives à l’écophysiologie de l’algue, son mode de croissance, les moyens de culture, l’extraction-purification de molécules, la caractérisation de ces molécules ainsi que leurs modifications potentielles, sans oublier la détermination de leurs caractéristiques physico-chimiques et activités biologiques (à l’état natif ou après modifications), doivent être initiées avant d’envisager des actions de plus grande envergure. Ce travail pourrait sans nul doute s’appuyer sur les connaissances actuelles sur les algues de Polynésie, et tirer profit en particulier de la collection de spécimens d’algues de l’Université de la Polynésie française.
5. Les micro-organismes1
45Les avancées considérables de la biologie moléculaire au cours de ces dernières années rendent désormais possible, et surtout plus accessible, l’étude des écosystèmes microbiens. De nombreuses études ont en effet montré que les techniques classiques de biologie, telles que les mises en culture sur milieux à caractère plus ou moins sélectif, ne permettaient d’accéder qu’à 0,1 % à 1 % des espèces microbiennes présentes dans les écosystèmes marins. Cela signifiait également qu’une proportion très importante de métabolites microbiens d’intérêt biotechnologique pouvaient échapper à toute investigation. Cette ressource inexploitée et peu connue à ce jour pourrait se révéler être le principal gisement de nouvelles molécules d’intérêt biotechnologique lors des prochaines décennies. De fait, on peut donc considérer que l’un des enjeux majeurs de la recherche en matière de biotechnologie marine, et plus spécifiquement au niveau des micro-organismes, porte aussi sur le développement de méthodes d’identification, de caractérisation et d’analyse de la fraction dite incultivable.
46Les micro-organismes et en particulier les bactéries ne sont « responsables » que de 16 % des brevets pris au cours de ces dernières années sur des molécules d’origine marine (tabl. 1). Cependant, il y a fort à penser que ce pourcentage ira sans nul doute croissant au regard :
des spécificités liées aux bactéries, en l’occurrence, une accessibilité à la ressource sans dépendances environnementales et géopolitiques ;
du développement d’outils permettant une meilleure connaissance des écosystèmes microbiens ;
du fait que de plus en plus d’études récentes attribuent la synthèse de molécules actives plus aux bactéries associées qu’aux organismes « hôtes ».
47Le développement de la microbiologie des communautés microbiennes associées aux animaux marins (invertébrés en particulier mais aussi les algues) mérite effectivement une attention particulière. Ces communautés peuvent présenter diverses formes d’association : épibiontes, symbiontes, pathogènes, et concerner différents tissus dont certains très spécialisés (trophosomes de certains annélides des sources hydrothermales).
48Pour les différentes raisons évoquées précédemment, il apparaît impossible, voire inutile, d’inventorier les espèces microbiennes présentes au niveau des différents écosystèmes polynésiens tant en raison de leur nombre que de la représentativité de cette liste éventuelle. Il est admis que moins de quelques pourcentages des espèces microbiennes sont cultivables, donc identifiables, selon les méthodes de taxonomie classique et que, par ailleurs, la notion de « milieu de culture » induit celle de sélectivité d’espèces par rapport à d’autres. Il en est de même au niveau de la valorisation de ces micro-organismes où la synthèse de métabolites d’intérêt biotechnologique peut être la conséquence d’une action au niveau de leurs conditions de croissance et de fermentation. Ainsi, la synthèse de polysaccharides et/ou de poly β hydroxyalcanoates, tout comme celle d’un grand nombre de métabolites secondaires, correspond à une adaptation ou une réponse du métabolisme bactérien par rapport à une situation donnée.
5.1 Les bactéries
49Parmi les potentialités de valorisation des micro-organismes les plus répertoriées dans une littérature relativement abondante sur le sujet, il va s’agir de différencier (si cela est possible) ce qui relève de l’usine cellulaire que constitue le fonctionnement de la cellule bactérienne par elle-même des éléments constitutifs de cette même cellule et des métabolites primaires ou secondaires.
Production de métabolites secondaires. Cette notion de métabolites secondaires est très large allant de la biosynthèse d’antibiotiques, de vitamines, de précurseurs de vitamines et d’antibiotiques, alcools et acides organiques de bas poids moléculaire, stérols, pigments, etc.
Biosynthèse d’autres métabolites au rang desquels il convient de citer les glycoconjugués incluant les exopolysaccharides (EPS), les glycoprotéines ou encore protéoglycannes, sans oublier les polyamines et poly β hydroxy-alcanoates (PHA) ou polyesters biodégradables.
Les « constituants cellulaires » que sont alors les lipides complexes (sphingolipides, phospholipides, glycolipides, céramides, éthers de glycérol, etc.), les protéines, les peptides, les lipopolysaccharides (LPS), etc.
Les enzymes (endo et/ou exocellulaires), qu’il s’agisse d’enzymes de synthèse et/ou de modifications.
50Tout comme pour les algues, parmi les molécules les plus attrayantes d’un point de vue développement industriel s’inscrivant dans le court et moyen terme, il convient de noter en tout premier lieu les polymères bactériens et plus spécifiquement les polysaccharides.
5.2 Les polymères
51Les polysaccharides peuvent être définis comme de longues molécules formées de l’enchaînement de motifs similaires, en l’occurrence de glucides appelés couramment sucres. Ces polysaccharides représentent une famille de biopolymères dont la diversité de structure offre un large spectre de propriétés fonctionnelles. Outre l’intérêt connu depuis de nombreuses années de ces biopolymères dans divers domaines comme l’exploitation pétrolière, l’agro-alimentaire en tant qu’agents de texture, l’agrochimie, les industries du papier, les scientifiques et les industriels s’intéressent de plus en plus aux activités biologiques de ces molécules et à leurs applications dans le domaine thérapeutique.
52Ces macromolécules peuvent trouver de telles applications soit à l’état natif soit après des modifications visant à conférer à ces polysaccharides les activités recherchées, soit encore à mettre leur forme en adéquation avec des applications thérapeutiques.
53Initialement dominé par les gommes d’origine végétale et algale, le marché s’ouvre actuellement très largement aux polysaccharides bactériens. Ces derniers présentent quelques atouts comme l’absence de dépendance vis-à-vis d’aléas climatiques, écologiques et politiques pouvant affecter la qualité, le coût et l’approvisionnement de leurs homologues extraits d’algues ou de plantes. De plus, les possibilités d’agir sur les conditions de fermentation (sources de carbone, température, aération, pH, etc.) en vue d’optimiser la production, d’assurer la traçabilité, mais aussi de modifier le polymère produit, jouent en faveur de la fermentation bactérienne. Ces polymères présentent enfin un degré de régularité de structure plus important et peuvent être extraits et purifiés sans mettre en œuvre des conditions drastiques. Les inconvénients de ces polymères bactériens restent liés aux micro-organismes eux-mêmes, à leur manipulation et conservation, ainsi qu’à la production de métabolites secondaires associés à la fermentation.
54Parmi les autres polymères d’origine microbienne, il faut ajouter les polyamines et les poly-β-hydroxyalcanoates (PHA) ou polyesters biodégradables. Les applications des polyamines vont se situer principalement au niveau des domaines de la santé, ceux afférents aux polyesters biodégradables dans les domaines de la cosmétologie, de la santé et bien naturellement de l’environnement. Les recherches sur ce dernier type de polymère (PHA) sont principalement orientées selon deux directions. La première concerne la mise en évidence de souches microbiennes capables de synthétiser en conditions de fermentation des macromolécules innovantes ; la seconde intéresse la biologie moléculaire avec le transfert des gènes codant pour la synthèse de ces polymères des bactéries vers les organismes supérieurs et en particulier les plantes. On revient dans ce document sur ces polyesters microbiens dans le chapitre consacré aux biomatériaux.
5.3 Les enzymes
55Dans l’industrie chimique, les enzymes constituent déjà des produits de spécialité importants. Il est à noter qu’à ce jour près de 90 % des enzymes commercialisées sont d’origine microbienne. La plus grande part de la valeur est actuellement produite par la vente d’enzymes utilisées en formulation avec des détergents pour les lessives, et le marché le plus important reste à ce jour celui des applications domestiques. De nouveaux produits pourraient résulter de découvertes d’enzymes nouvelles aux propriétés supérieures (quelle que soit l’origine de l’organisme concerné), mais également d’améliorations issues d’ingénierie moléculaire. D’autres percées peuvent résulter de l’amélioration des procédés de production visant à réduire le coût des enzymes. Les enzymes utilisées dans des « process » agroalimentaires (incluant aliments et boissons) ont sensiblement le même niveau de marché que les additifs enzymatiques pour détergents, mais présentent une croissance plus marquée.
56Toutefois, la demande dans ce secteur continue de croître et le marché des enzymes est en progression constante. La croissance du marché sur ce domaine des enzymes est estimée à près de 11 % par an pour les années à venir.
57Le marché mondial des enzymes industrielles est pour l’essentiel contrôlé par un nombre très limité de sociétés (Novozymes et Genencor en particulier). En Europe, il convient de rajouter des utilisateurs majeurs tels que Roquette Frères (France) pour l’industrie de transformation de l’amidon, Degussa (Danemark) pour les enzymes industrielles, qui sont à la recherche d’enzymes innovantes ou plus performantes que celles déjà utilisées. La recherche de nouveaux biocatalyseurs plus performants ou innovants pour la mise en œuvre d’un nouveau procédé industriel peut être le fait de sociétés de biotechnologie qui exploitent la biodiversité naturelle, notamment microbienne marine, comme Diversa (États-Unis), Prokarya (Islande) et Protéus (France). Ces sociétés ont toutes la particularité de posséder un « porte-feuille » d’enzymes issues de micro-organismes et des « technologies propriétaires » d’ingénierie protéique permettant de faire évoluer les propriétés des enzymes recombinantes vers des performances optimales.
58Il existe naturellement un lien fort entre l’habitat des micro-organismes et la présence potentielle d’enzymes innovantes. Les meilleurs exemples en sont donnés par la découverte d’enzymes thermostables associées aux bactéries thermophiles et hyperthermophiles des écosystèmes hydrothermaux profonds ou, à l’opposé, celle d’enzymes spécifiques trouvées dans l’estomac des manchots du continent antarctique. Bon indicateur de la réalité polynésienne, les Australiens de l’Institut australien de science marine (AIMS) ont découvert dans du mucus de corail irradié des bactéries développant des enzymes anti-oxydantes avec des applications potentielles dans le cas de la maladie d’alzheimer.
59En termes de métabolites secondaires et plus spécifiquement de molécules bioactives, les micro-organismes sont à ce jour très peu exploités (16 % des brevets au cours de ces dernières années). Comme cela a déjà été évoqué dans ce rapport, cette faible exploitation est liée à plusieurs paramètres ayant trait tant au niveau actuel de connaissance de la microflore bactérienne, qu’aux difficultés éventuelles de mise en culture et fermentation (extraction-purification des métabolites), mais aussi aux faibles rendements obligeant à passer par la chimie de synthèse ou d’hémisynthèse. Par ailleurs, il est important de souligner la nécessité de préserver les souches et les isolats.
5.4 Autres molécules
60En sus des polymères bactériens (exopolysaccharides, polyesters biodégradables, polyamines), des enzymes et des métabolites secondaires, d’autres pistes d’exploitation de ces micro-organismes existent, notamment celles liées directement à leur métabolisme (dégradation des produits toxiques, bioaccumulation et bioépuration, précurseurs de métabolites actifs), ou encore à leurs autres constituants cellulaires comme les lipides (lipides d’archéa en oncologie), les LPS (lipopolysaccharides), dont on connaît les activités biologiques, et les glycoprotéines.
61La très grande majorité des analyses actuelles autour des biotechnologies marines laisse entrevoir que les micro-organismes devraient être un gisement incontournable et prometteur de molécules d’intérêt pour des secteurs relatifs aux domaines de la santé, de la pharmacie et parapharmacie, de la cosmétologie, de l’environnement et de la chimie.
5.5 Les cyanobactéries et micro-algues
62Outre les bactéries, les cyanobactéries (et micro-algues) apparaissent sans nul doute comme des groupes d’intérêt biotechnologique. Les cyanobactéries sont donc exploitées de façon empirique dans certaines régions du monde depuis longtemps. Dès 1521, Bernal Diaz del Castillo rapportait déjà la consommation de préparations à base de Spirulina (Arthrospira) platensis au Mexique, et plus récemment la consommation de préparations similaires a été observée chez certaines tribus du Tchad. Par ailleurs, la biomasse de Nostoc commune Vaucher fait partie de la pharmacopée traditionnelle chinoise pour soigner les brûlures.
63Cependant, leur potentiel en tant que micro-organismes exploitables en termes de biotechnologies n’a été considéré que récemment. Les recherches de valorisation des cyanobactéries sont désormais nombreuses et sont menées à deux niveaux : le premier a trait à l’utilisation de la biomasse brute vivante ou morte, et le second à la valorisation de certains métabolites extraits des cellules ou du milieu de culture.
64La première exploitation industrielle de cyanobactéries concerne la biomasse brute de Spirulina (Arthrospira) platensis qui présente une bonne digestibilité et dont les propriétés nutritives sont très intéressantes. En effet, les teneurs en protéines (65-70 %), en vitamines (A, B1, et B12), en minéraux, et en acides gras essentiels sont élevées. Cette cyanobactérie est actuellement commercialisée comme complément alimentaire diététique dans les pays riches. Cette culture se développe de façon plus ou moins artisanale dans les pays pauvres pour lutter contre la malnutrition. Une autre cyanobactérie, Phormidium tenue, s’est révélée tout aussi apte à une utilisation en tant que complément alimentaire, mais n’est actuellement pas exploitée. Outre le secteur alimentaire, la biomasse de certaines cyanobactéries pourrait intéresser d’autres domaines industriels, comme celui de l’environnement. En effet, des études portant sur des espèces du genre Phormidium ont montré que ces cyanobactéries pourraient être intégrées dans des cycles de traitement biologique des eaux usées pour réduire considérablement les teneurs en nitrates et en phosphates des eaux traitées. Dans la même optique, d’autres espèces cyanobactériennes se sont montrées efficaces pour l’élimination des métaux lourds en solution par bioaccumulation et biosorption. Ainsi, le produit AlgaSORBTM, un mélange des biomasses de Chlorella sp. et de Spirulina sp., a été mis au point et est commercialisé par la société Resource Management and Recovery (anciennement Bio-Recovery Systems Inc., Angleterre) pour traiter des eaux chargées en métaux. Une récente étude a montré, quant à elle, que la présence d’un tapis microbien (intégrant la cyanobactérie Microcoleus chthonoplastes) dans des marais salants permet d’améliorer la qualité des cristaux de sels en diminuant notamment la quantité de métaux précipités.
65Les recherches de valorisation de métabolites secondaires biosynthétisées par des cyanobactéries sont également encourageantes. En effet, dans ce domaine, de nombreuses molécules sont susceptibles d’être exploitées industriellement, mais encore très peu d’entre elles le sont réellement. Seules à ce jour, les phycobiliprotéines (pigments protéiques) synthétisées par Spirulina sp., la C-phycocyanine et l’allophycocyanine, sont commercialisées, entre autres par les sociétés Prozyme(Californie, États-Unis) et Cyanotech (Hawaii, États-Unis). Ces pigments servent de marqueurs fluorescents en recherche biologique. D’autres pigments comme la scytonémine et les pigments du type mycosporine pourraient également servir de filtres UV dans des préparations cosmétiques. Parmi les autres métabolites d’intérêt, on peut citer les poly β hydroxyalcanoates (PHA), les agents antibactériens, les agents antifongiques, algicides, et antiviraux, ou encore les agents antitumoraux et cytotoxiques. En fait, plusieurs études de criblage d’activités biologiques ont montré que ce groupe de micro-organismes constituait une source potentielle de producteurs de molécules actives. Les propriétés physico-chimiques de polysaccharides synthétisés par ces micro-organismes laissent présager un bel avenir, en termes de valorisation industrielle, pour ce type de polymères. Par exemple, Nostoc commune Vaucher produit un polysaccharide qui inhibe fortement le système du complément. Ce polymère pourrait donc intéresser les domaines médical et pharmaceutique. Un autre exemple est celui du polymère synthétisé par la souche Cyanothece sp. ATCC 51142, qui pourrait être utilisé pour éliminer des métaux en solution ou encore certains colorants industriels.
66L’exploitation industrielle des cyanobactéries peut cependant poser un certain nombre de problèmes en regard du métabolisme de ces micro-organismes. La culture à grande échelle des cyanobactéries, et plus généralement des micro-organismes phototrophes, n’est réellement maîtrisée que pour un petit nombre de souches, mais des systèmes de production de biomasses à grande échelle existent d’ores et déjà à travers le monde (bassins de culture de Dunaliella, en Australie, de Spirulina, à Hawaii, bassins de production de Chlorella, au Japon).
67Un point important concernant les biotechnologies marines est celui de la recherche de sources substitutives d’oméga 3 à l’utilisation actuelle des produits et coproduits de la pêche. Il est reconnu qu’il y a risque au cours des prochaines décennies d’une forte diminution de la ressource en poissons, principale source actuelle de ces acides gras polyinsaturés (EPA : acide ecosapentaenoïque-20 :5ω3 et DHA : acide docosahexaenoïque-22 :6ω3). Il a été démontré que ces acides gras sont bénéfiques pour lutter contre les maladies cardio-vasculaires, l’hypertension, les phénomènes inflammatoires liés par exemple aux rhumatismes articulaires, et qu’ils sont favorables au développement de l’enfant et, comme nous l’avons vu, dans la prévention de certains cancers. Des études sont également en cours au niveau de leur influence sur la maladie d’alzheimer et même sur certains désordres mentaux comme la schizophrénie. Une demande croissante pourrait donc s’ensuivre pour ce type de molécules au regard de leurs effets positifs sur la santé humaine. L’aquaculture offre d’autres domaines d’application.
68Les micro-algues (fig. 2) peuvent être sans nul doute une source d’acides gras insaturés.
69À l’heure actuelle, la contribution des micro-algues et champignons marins à cette industrie des acides gras essentiels est faible (voire négligeable), mais il y a de fortes raisons de penser qu’un changement de stratégies devrait se produire dans les années à venir, en raison notamment de :
la problématique de gestion de la ressource et la diminution de certaines espèces (poissons) à la base de la production de ces oméga 3 ;
l’étape de purification des huiles de poissons qui induit une augmentation sensible des coûts de production ;
la présence d’acides gras en oméga 3 en fortes concentrations au niveau de ces micro-organismes (micro-algues) ;
une nécessaire production à partir d’une source renouvelable (fermentation, photobioréacteur) ;
un meilleur contrôle de la production (micro-organismes hétérotrophes) ;
une meilleure connaissance des voies métaboliques et son exploitation pour améliorer les conditions de production.
70De plus, dans le milieu marin les micro-algues et autres micro-organismes apparaissent comme les producteurs primaires d’oméga 3. Bien qu’il ait été démontré que la synthèse de novo de ces acides était possible chez les poissons, la présence de ces acides dans ces organismes est plus probablement liée à leur alimentation.
71Les teneurs en EPA et DHA des micro-algues peuvent être importantes (tableau 6) et, en ce sens, ces micro-organismes apparaissent comme de bonnes sources de ces acides gras. La production industrielle pourrait se heurter à un problème économique lié aux conditions de croissance de ces micro-organismes. Leur croissance contrôlée peut nécessiter l’utilisation de photobioréacteurs qui entrent fortement dans le coût élevé du développement de telles molécules par cette seule voie de fermentation. Des études sont en cours actuellement, notamment en Australie et Italie, afin d’optimiser à la fois les conditions de croissance et diminuer les coûts de production d’EPA et DHA via l’utilisation de ces photobioréacteurs. Une autre voie prometteuse serait également celle envisagée pour d’autres molécules issues de la fermentation bactérienne, c’est-à-dire la voie du génie génétique et du transfert de gènes impliqués dans la synthèse de ces oméga 3 chez les plantes.
72Enfin à ces études vient s’ajouter la possibilité de rechercher d’autres sources de micro-organismes et en tout premier lieu de micro-algues phototrophes et hétérotrophes, capables de synthétiser des quantités plus importantes de ces acides gras et/ou possédant une plus grande spécificité, tels les rapports EPA/DHA ou ω3/ω6. L’hétérotrophie réunit des avantages certains, notamment une non-dépendance des conditions environnementales extérieures, une bonne connaissance des procédés de fermentation et d’extraction-purification, une optimisation autour de sources de carbone et nutriments renouvelables et une garantie de reproductibilité à la fois sur les plans qualitatifs et quantitatifs. Le nombre de souches hétérotrophes est à ce jour limité mais peut justifier à partir d’écosystèmes atypiques la mise en évidence d’espèces nouvelles.
73Tout aussi abondante en termes d’articles s’y référant, l’utilisation de champignons marins comme source de métabolites secondaires mérite également d’être citée dans cette revue. Il convient d’y intégrer également les recherches menées par le Center for Marine Biotechnology & Biomedecine au sein de la Scripps Institution of Oceanography de la Jolla (États-Unis) sur des actinomycètes marins faisant apparaître d’énormes potentialités en termes de molécules anti-bactériennes, antifongiques et antitumorales. Sur près de 100 souches d’actinomycètes isolées du milieu marin, il a été démontré que près de 80 % pouvaient inhiber la croissance de cellules cancéreuses en tant que synthétisant des molécules. Ces résultats (pestalone, salinosporamide A) ont été brevetés et immédiatement transférés, via des licences d’exploitation, à des sociétés pharmaceutiques.
74Les écosystèmes tropicaux et sub-tropicaux sont ainsi des sources de molécules innovantes, notamment pour tout ce qui a trait aux activités anti-bactériennes et antibiotiques. Des études ont d’ores et déjà été menées sur des bactéries marines isolées dans les eaux territoriales ou dans les zones de la Nouvelle Guinée, de Papouasie ou encore dans la mer de Salomon avec des résultats prometteurs en termes de molécules actives.
75On peut difficilement parler « d’endémisme microbien », mais la Polynésie française possède un certain nombre de spécificités en rapport avec son positionnement géographique, mais aussi en raison de la présence d’écosystèmes particuliers tels que de ceux de certains lagons, ou encore de tapis microbiens, dans les mares de « Kopara » par exemple. Ces mares de Kopara sont caractérisées par une très large diversité microbienne en termes de cyanobactéries et bactéries. Cette biodiversité associée aux conditions physico-chimiques particulières, différentes, selon les zones de prélèvement en fait une source intéressante de micro-organismes d’intérêt industriel.
76Des études et travaux de thèse ont déjà été réalisés sur ces écosystèmes, tant d’un point de vue descriptif que d’un point de vue valorisation potentielle (Laurent Richert, 2004). Une nouvelle thèse (bourse Cifre) est actuellement en cours visant à mettre en évidence et à caractériser les molécules potentiellement innovantes d’origine bactérienne.
6. Quelles applications pour les biotechnologies marines ?
77Les biotechnologies intéressent de nombreux marchés parmi lesquels il convient naturellement de citer le domaine de la cosmétologie, celui de la santé humaine et les secteurs qui y sont associés, la pharmacie et la para-pharmacie, mais aussi des secteurs en forte croissance tels que l’environnement, l’agroalimentaire ou encore les produits d’hygiène corporelle, sans oublier ceux liés à la santé et à la nutrition animales (chiffre d’affaires estimé à 1 à 3 billions de US $/an).
78Tous ces secteurs correspondent à une demande à la fois économique et sociétale (fig. 3) :
l’environnement (« chimie verte ») en quête de technologies propres pouvant se substituer à d’autres approches plus polluantes, moins spécifiques et moins performantes et plus onéreuses, mais aussi en demande de biomatériaux ;
la cosmétologie/dermocosmétologie, qui malgré une législation en évolution, apparaît comme le créneau à privilégier dans une démarche court terme, domaine en quête de nouvelles molécules innovantes tant par leur « histoire » que par leurs propriétés physico-chimiques et efficacité ;
l’agro-alimentaire (pris au sens large du terme) en quête de nouvelles molécules texturantes pour s’adapter et répondre à de nouvelles contraintes de marché (thermostabilité, vectorisation, filmogène) ;
la chimie de synthèse et/ou d’hémisynthèse à la recherche de nouvelles molécules (chirales, etc.) ou de précurseurs de synthèse ;
les domaines de la santé (médical, pharmacie et parapharmacie, nutrition) avec une recherche parfois très ciblée d’une grande spécificité, d’une meilleure efficacité et/ou d’une forte activité, à la recherche de substituts à des molécules existantes mais d’origine non souhaitée, etc.
6.1 Biotechnologie et environnement
79Dans le domaine de l’environnement, les micro-organismes (cyanobactéries, micro-algues, champignons, bactéries, archaébactéries…) peuvent apporter des solutions à un grand nombre de problèmes, tant parce qu’ils garantissent une plus grande efficacité, spécificité, sécurité et innocuité, qu’un meilleur ratio coût /efficacité. De fait, utilisés seuls ou en complément de traitements préalables, les micro-organismes (et les algues) en ce domaine présente(nt) un intérêt croissant pour de nombreux secteurs industriels.
80La non-biodégradabilité d’un certain nombre de composés hautement toxiques pour l’environnement générés par différents secteurs industriels pose le problème de leur élimination ou récupération. Parmi ces composés, il faut citer un grand nombre de déchets et polluants industriels tels que les hydrocarbures polycycliques, les pesticides, herbicides, de nombreux composés chlorés, les phtalates, les composés nitrés aromatiques, les solvants, et naturellement les métaux lourds et radioactifs. L’industrie de l’énergie génère à elle seule près de 2,5 millions de tonnes de métaux lourds /an. L’industrie de la métallurgie contribue annuellement à cette pollution à hauteur de 0,4 million de tonnes tandis que l’agriculture, le traitement des eaux et l’ensemble des autres industries y ajoutent près de 2,4 millions de tonnes supplémentaires.
81Les micro-organismes (bactéries et micro-algues) et les algues peuvent répondre à un certain nombre de ces problématiques, soit directement du fait de leur capacité à assimiler (et dégrader) un certain nombre de ces produits toxiques via des processus enzymatiques (mais pas uniquement), soit, plus indirectement, via la production de biopolymères (exopolymères) adsorbants ou encore biofloculants au rang desquels il convient de citer les polysaccharides et glycoconjugués. Cette utilisation des microorganismes dans le domaine de l’environnement entre alors dans les process de « bioremédiation », « biodétoxification », « bioépuration », « biolixiviation » ou encore « biofixation », selon les mécanismes mis en en jeu. Une base très importante de données relatives aux potentialités des micro-organismes en matière de « bioremediation » a été récemment constituée par l’Université du Minnesota, qui pourrait constituer une base de références pour d’éventuelles études ultérieures.
82À titre d’exemples, on peut citer l’oxydation de l’arsenic sous une forme plus soluble et plus facilement récupérable, la précipitation de sulfures métalliques par des modifications de pH ou encore par génération de sulfures (bactéries sulfato-réductrices), la dissolution de minerais métalliques par des bactéries sulfo-oxydantes, l’association d’un polysaccharide (chitosane) et d’un consortium microbien, la séparation de l’huile à partir d’une émulsion eau-huile par Alcaligenes latus, ou encore l’utilisation de floculents microbiens (bactéries, cyanobactéries) dans le domaine de la détoxification de métaux lourds…
83Un des freins actuels à l’utilisation de ces micro-organismes reste peut-être la cinétique de dégradation de composés toxiques qui les caractérise. Une solution de plus en plus envisagée par les scientifiques consiste alors en la manipulation génétique de ces micro-organismes en vue d’une meilleure sélectivité et/ou efficacité du processus de biodégradation.
Antifouling
84Un autre domaine d’importance au niveau de l’environnement est celui des revêtements antifouling (antisalissures). Les effets néfastes de la présence d’un biofilm et de biosalissures sur les matériaux et équipements utilisés en milieu marin sont variés : écran hydrodynamique et modification de l’écoulement, diminution des échanges thermiques, perte de propriétés optiques, blocage de fonctions mécaniques, accélération de la corrosion ou de la biodégradation. La plupart des activités marines y sont confrontées : ouvrages au large ou côtiers, navires, plates-formes offshore, installations aquacoles, équipements océanographiques immergés pendant des durées de quelques jours à plusieurs mois, voire des années. Les agents antisalissures (peintures, vernis...) généralement utilisés pour protéger les structures sont toxiques et peuvent avoir des conséquences désastreuses sur la faune et la flore. Leur utilisation est réglementée par des normes de plus en plus sévères. L’évolution des réglementations internationales (directive no 89/677/CEE) conduit notamment à une interdiction totale, prévue en 2003, des composés organostanniques reconnus nocifs pour le milieu marin et à une utilisation contrôlée des molécules toxiques (directive « Biocides » no 98/8). L’emploi de biocides et les nettoyages réguliers de structures augmentent considérablement les coûts d’exploitation des industries marines. Les conséquences de la croissance de salissures dans le domaine des industries marines ont été évaluées par un certain nombre de groupes universitaires, notamment en Australie, à 6,5 milliards de dollars par an (évaluation du groupe « Biofouling » de l’Université de New South Wales), et la seule présence d’un biofilm bactérien sur des surfaces est estimée à des milliards de dollars par an due à la détérioration d’équipements, aux pertes d’énergie, aux problèmes de contamination ou infection dans le domaine médical (évaluation « The Center for Biofilm Engineering », Montana).
85Il a été démontré que les micro-organismes et en particulier les bactéries marines sont susceptibles de biosynthétiser, en conditions naturelles, un certain nombre de molécules biologiquement actives, limitant le développement ultérieur de macrosalissures. Ces molécules pourraient alors être exploitées comme agents « antifouling » incorporées dans des revêtements favorisant leur relargage (diffusion) contrôlé.
86À ces applications dans la lutte contre les salissures, il faut également ajouter les industries métallurgiques et chimiques pouvant faire appel, dans des cas particuliers, à des procédés enzymatiques, les domaines des textiles, de la pâte à papier, du traitement du cuir, de la chimie fine et surtout du génie enzymatique et de la biocatalyse.
87Au niveau de la Polynésie, il convient d’ores et déjà de noter la mise en place d’une collaboration entre l’Ifremer et le Service de la perliculture autour de l’utilisation de polysaccharides microbiens (dont ceux issus de travaux menés sur le Kopara) en tant qu’agents antisalissures.
Les biomatériaux
88Les poly-β-hydroxyalcanoates (PHA) ou polyesters biodégradables, synthétisés par des micro-organismes marins (bactéries et cynaobactéries), constituent une autre voie d’intérêt à la fois industrielle et environnementale. L’une des contraintes d’exploitation porte sur les procédés de production et les coûts associés. Mais la possibilité de cloner les gènes codant pour les enzymes de la voie de biosynthèse de ces PHA ouvre des perspectives de culture de plein champ de plantes génétiquement modifiées. L’avenir de ces cultures industrielles à base d’OGM reste cependant totalement tributaire de l’évolution du contexte juridique. Au lieu des cultures industrielles de plantes recombinantes, on pourrait alors se tourner vers des procédés de fermentation.
89La part de marchés en 2000 de ces polymères biodégradables était de 44 000 tonnes par an, soit 0,12 % du marché des matières plastiques. Les prévisions de croissance pour ce type de polymères, incluant non seulement les poly-β hydroxyalcanoates mais aussi les polysaccharides et PLA (polymères d’acide lactique), situent ce marché à plus de 500 000 tonnes en 2005/2006 et 4 millions de tonnes à l’horizon 2020. L’évolution des législations en matière de développement durable, de réduction de l’effet de serre et rejet de CO2, une meilleure gestion des déchets ainsi qu’une volonté d’une réduction de la dépendance vis-à-vis des matières premières importées, plaident en faveur du développement de ce type de polymères.
90D’autres polymères à haut poids moléculaire et d’origine marine tels que la chitine, constituant majeur de la cuticule de nombreux invertébrés d’origine marine (crabes, crevettes) sont eux aussi biodégradables, non toxiques, et pourraient se révéler d’un grand intérêt pour l’alimentaire, les cosmétiques ou la pharmacie. Enfin, la combinaison de polymères naturels (origine algale et/ou végétale) avec ces polymères biodégradables fait également l’objet d’intérêts particuliers de la part de différents secteurs industriels.
Les biocapteurs
91Un biocapteur est un système de mesure associant un élément biochimique et un élément électronique. Le composant biochimique, choisi pour sa capacité à détecter une substance, joue généralement le rôle de récepteur. Il peut être constitué d’enzymes (mono ou multi-enzyme), d’anticorps, de cellules entières (micro-organismes, bactéries, algues ou champignons) ou partielles, de tissus (plante ou animal), ou d’une séquence d’ADN (sondes oligonucléotides). Les propriétés de reconnaissance moléculaire de la biomolécule choisie confèrent une sélectivité à l’interaction biomolécule-analyte cible. Celle-ci est à l’origine d’un signal qui, après traitement, peut être directement corrélé à la concentration en solution de l’analyte cible. Les biocapteurs à base d’enzymes sont actuellement les plus utilisés et développés.
92De nombreux domaines, comme l’alimentation, la protection de l’environnement, la sécurité industrielle et domestique, s’intéressent au développement des biocapteurs à cause de la sévérité croissante des réglementations et normes. Le secteur médical (analyse clinique, normes de sécurité et d’hygiène) est également très demandeur de systèmes de mesures et de contrôle sélectifs et sensibles, tels que les biocapteurs. Ainsi, les chercheurs australiens travaillent sur les organismes de la barrière de corail et sur la conception de biocapteurs capables de détecter un niveau de contamination éventuel d’un coquillage élevé dans les bassins d’aquaculture.
6.2. Biotechnologie et agro-alimentaire
93S’agissant de texturants et d’additifs, les possibilités de valorisation de nouvelles molécules d’origine marine dans le domaine de l’agro-alimentaire existent sans nul doute, mais elles doivent être considérées en regard d’un ensemble de paramètres incluant la notion de molécules de références (« benchmark ») comme le xanthane, le gellane ou polysaccharides d’origine algale (agars, alginates, carraghénanes, etc.), dont les coûts de production et maîtrise de cette dernière peuvent constituer un frein majeur au développement de toute autre molécule.
94Relativement à la nutrition humaine, les apports de protéines, peptides et acides gras essentiels relèvent tout autant du domaine de la santé (avec ses contraintes) que de celui de l’agro-alimentaire.
95Une plus grande spécificité ou des performances et propriétés largement supérieures à ces molécules de référence, associées à des coûts de production acceptables, sont les conditions majeures de développement de molécules nouvelles en agro-alimentaire.
6.3. Biotechnologie et cosmétologie
96Il s’agit bien naturellement d’un secteur économique en forte croissance correspondant à une demande sociétale évolutive.
97Parmi les produits les plus recherchés, il y a les molécules « anti-âge » (agents hydratants, ou de réhydratation, raffermissement de la peau, lissage, anti-rides, réparation cellulaire, régénération des cellules dermiques, protection UV, etc.), ou, d’une manière plus générale, ceux qui sont en adéquation avec une volonté affichée des consommateurs d’un bien-être passant en premier lieu par une apparence physique et l’entretien du corps (« Forever young ! »). Il est à noter que, dans les pays industrialisés, cette tendance a débuté auprès des « baby bloomers » de l’après-guerre et se poursuit maintenant avec les nouvelles générations. Le marché des produits anti-âges était estimé à près de 70 millions de US $ en 2001, produits au rang desquels il convient de citer les vitamines (pour plus de 50 % de ce marché (vitamines A, B5, C et E) et les polysaccharides (acide hyaluronique, chitosane et β glucanes) pour plus de 20 %. À ces produits majoritaires, il faut adjoindre les peptides et protéines, les enzymes (voir dans chapitre 5 le cas des enzymes anti-oxydantes) et co-enzymes, les extraits naturels (Aloe vera…) et d’autres produits comme les hydroquinones, amino acides, etc.
98À ce marché vient se greffer celui des systèmes de délivrance et libération contrôlée des actifs cosmétiques (nanoparticules, nano-émulsions, microcapsules, pour 30 %, et des millicapsules, pour 40 %), marché américain estimé quant à lui à près de 30 millions de US $ (sans y inclure les patches) en 2001.
99Bien que la classe des polysaccharides soit déjà donc bien représentée en cosmétique et dermo-cosmétique, une demande existe en termes de nouvelles molécules caractérisées à la fois par des diversités d’origine, des unités saccharidiques originales et des propriétés physico-chimiques, biologiques et rhéologiques innovantes permettant par exemple d’envisager d’intéressantes applications sous différentes formes galéniques.
100Si les algues (brunes, rouges et vertes) constituent actuellement la principale ressource de molécules marines dans le domaine de la cosmétologie, d’autres sources de micro-organismes sont actuellement évaluées pour leurs potentialités et avantages s’agissant de notions de non-dépendance vis-à-vis d’aléas environnementaux, climatiques ou même géopolitiques. Au nombre de ces nouvelles sources on trouve naturellement les micro-algues et les bactéries. Les applications se situent alors au niveau de propriétés de rétention d’eau, molécules anti-âge (capteur de radicaux libres), auto-bronzantes et accélératrices de bronzage, de protection contre les UV, anti-rides, immunostimulants ou encore colorants, avec comme molécules cibles les polysaccharides, protéines, peptides et pigments.
101La durée de vie approximative de nouvelles molécules se situe entre 3 et 5 ans, induisant de fait une recherche constante et continue de nouvelles pistes de valorisation.
102Mais le développement de nouvelles molécules pour la cosmétologie se devra aussi de considérer une évolution probable de la législation en matière d’utilisation de produits naturels, de la disponibilité de la ressource, de facilité de mise en œuvre et, bien évidemment, de coût de production de ces molécules.
6.4 Biotechnologie et santé
103Le processus menant de l’identification d’une molécule active à la mise sur le marché d’un produit pharmaceutique est long, coûteux, puisqu’il nécessite une parfaite connaissance de la molécule, la caractérisation du (ou des) mode(s) d’action, les essais précliniques et cliniques pour conclure par les demandes d’autorisation de mise sur le(s) marché(s) (tableau 7). Cette phase finale est atteinte dans un domaine de temps de l’ordre de 6-10 ans et des coûts de R&D, marketing et autres, de près de 1 milliard de dollars avec un taux de succès de une molécule commercialisée, donc susceptible de dégager des profits, pour environ 5 000 à 10 000 molécules actives identifiées.
104Au cours de ces dernières années, il a été démontré qu’un grand nombre de molécules marines possèdent des activités biologiques en adéquation avec une recherche de nouveaux médicaments et de voies thérapeutiques dans de nombreux domaines de la santé. Ainsi, en 2002, une quinzaine de produits isolés d’organismes marins, nombre d’entre eux ayant été découverts par le département Produits naturels de l’Institut national du cancer américain, étaient en essais cliniques ou encore aux premiers stades du développement (tabl. 7). Mais sur la base des données actuelles, force est de constater que le nombre de groupes zoologiques concernés paraît très restreint et sans commune mesure avec l’importance de la biodiversité marine. On note par exemple que les micro-organismes en particulier étaient absents de la plupart des études menées à ce jour sur ce sujet. À l’opposé, certains groupes étaient bien représentés, à l’instar des éponges qui possèdent plusieurs centaines de composés bioactifs déjà répertoriés. Les approches évoluent avec une contribution plus marquée au cours de ces dernières années des micro-organismes, tenant aux avantages présentés par ces derniers (une meilleure connaissance des voies métaboliques, la maîtrise des outils de fermentation, d’extraction-purification, absence de contraintes en matière d’accessibilité à la « matière première », origine réelle des molécules…).
105Un certain nombre d’interrogations restent cependant en suspens quant à l’origine exacte de molécules bioactives identifiées dans des organismes supérieurs. Les micro-organismes peuvent représenter de 40 % à 50 % de la biomasse de certaines éponges et autres organismes marins, et pourraient être directement impliqués dans la biosynthèse de molécules bioactives. Les travaux de l’Institut océanographique Scripps ont démontré que la bryostatine, déjà citée dans le tableau 7, pourrait être produite par une bactérie vivant à l’intérieur de B. neritina, Candidatus endobugula sertula. La division médicale de l’Université de Fort Pierce (Floride) vient ainsi de mettre en évidence près de 16 000 isolats associés à des éponges marines. Cette notion de synergie est importante entre les communautés bactériennes associées aux organismes marins (invertébrés, algues) dans le cadre d’une réflexion autour de la recherche et de la mise en évidence de métabolites secondaires d’intérêt pharmaceutique. L’utilisation des outils de biologie moléculaires, par exemple les transferts de gènes impliqués dans la biosynthèse de ces métabolites vers des vecteurs plus adaptés, constitue une voie pour contourner les difficultés de mise en culture de ces micro-organismes symbiotiques.
106Les sucres jouent un rôle essentiel dans l’organisme, participant aux communications entre cellules et au fonctionnement du système immunitaire, luttant contre certains organismes pathogènes et pouvant freiner la progression de certains cancers. Certains de ces sucres, ou enzymes associées, sont soit d’ores et déjà commercialisés (Cerezyme, Fabrazyme, Vancocine), soit en phase clinique I, II et III (Vevesca [III] Vaccin GMK [III], Bimosiamose [II], GCS-100 [I], PI-88 [I et II], etc.).
107Cette notion de « sucre-médicaments »et l’utilisation de polysaccharides natifs et/ou modifiés apparaît donc comme un axe de recherche de plus en plus exploré par le monde médical et la recherche pharmaceutique, de même que celle, plus générale, de glycoconjugués associant une partie « carbohydrate » à une partie protéinique ou lipidique.
108Outre les sucres (sucres-médicaments) et les métabolites secondaires, il convient de mettre en évidence les effets bénéfiques des acides gras, et en particulier des acides gras polyinsaturés oméga 3, avec comme sources potentielles la pêche, les co-produits de la pêche et les micro-algues.
109La très grande majorité des domaines de santé est donc concernée par ces recherches de molécules nouvelles, qu’elles soient par ailleurs d’origine marine ou terrestre (cardiologie, hématologie, ophtamologie, régénération tissulaire, oncologie, les anti-inflammatoires, antiviraux, les anti-hypercholestémie, etc.). Mais la mise en évidence de ces activités biologiques passe obligatoirement par des techniques de criblage. Ces dernières ont beaucoup évolué ces vingt dernières, dans le souci toujours présent de pouvoir valoriser au mieux les molécules isolées et d’essayer de comprendre leur mécanisme d’action, voire leur utilité dans le milieu naturel : les essais sur organismes (bactéries, cultures cellulaires, organes…) ont été parfois remplacés en criblage de première intention par des essais enzymatiques ou sur récepteurs spécifiques des domaines d’activité étudiés.
110Le tableau présenté ci-après résume les principaux champs d’applications des molécules marines toutes origines confondues.
7. Quelle(s) stratégie(s) de valorisation ?
111Existe-t-il une stratégie de valorisation au regard de cette biodiversité en termes d’applications potentielles ? Il apparaît à l’évidence difficile de concevoir une stratégie unique. Sans doute convient-il plutôt d’envisager des stratégies de valorisation en fonction des groupes considérés dans cette expertise.
112Selon les marchés visés, le devenir et le développement de nouvelles molécules devront très probablement répondre aux interrogations suivantes :
Existe-t-il un marché pour toutes nouvelles molécules (marines) dans tous les domaines des biotechnologies ?
Les nouvelles approches (outils) de biochimie et de biologie moléculaire contribueront-elles à la mise en évidence de nouvelles molécules (et de nouveaux micro-organismes) possédant des spécificités réellement innovantes ?
Existe-t-il toujours une demande spécifique pour répondre à un problème particulier (origine de la molécule au regard de législations évolutives ou en réponse à des inquiétudes sociétales) ?
Peut-on imaginer de nouveaux marchés ? Il serait ainsi surprenant que, eu égard à l’évolution actuelle de la chimie « verte » et des ressources renouvelables, la place des biopolymères et donc celle potentielle des biopolymères d’origine marine ne deviennent pas prépondérantes.
Ces molécules pourront-elles alors être produites de manière « économiquement » viable et, si cela est le cas, quelles sont les pistes à privilégier (fermentation bactérienne/synthèse/hémisynthèse) ?
7.1 Le niveau de connaissances de la faune et de la flore marine
113La richesse en organismes marins répond au gradient d’appauvrissement géographique d’ouest en est. Toutefois, l’étalement latitudinal des archipels polynésiens se traduit par une diversité intéressante caractérisée par la présence, notamment dans l’archipel des Australes, d’organismes de zones tempérées. La dispersion géographique des îles a limité l’inventaire taxonomique aux principales îles des archipels de la Société et des Tuamotu. Par ailleurs, seuls les groupes majeurs, coraux, poissons, mollusques, échinodermes et algues, ont reçu une attention particulière tandis que la connaissance sur les autres groupes d’invertébrés restait à ce jour encore fragmentaire. Dans ce contexte, il pourrait sembler difficile, dans une première phase, de considérer un axe de valorisation plutôt qu’un autre. Cette valorisation des micro et macro-organismes est par ailleurs différente selon les voies d’obtention des extraits, tant au niveau pré-criblage qu’au niveau du développement.
114D’une manière générale, une stratégie de valorisation peut se mettre en place selon différentes phases :
une phase d’échantillonnage ;
une phase de mise en place de collections ;
la constitution et la gestion d’une banque de molécules ;
la connaissance de ces molécules (propriétés chimiques, physico-chimiques, activités biologiques) via des études spécifiques et/ou des actions de criblage orientées) ;
une phase de développement de ces molécules (choix de stratégies…) ;
la production à l’échelle pré-industrielle et industrielle avant commercialisation.
115À cette stratégie, il convient d’adjoindre les notions de propriétés intellectuelles, de dépôts de micro-organismes, de brevets (qui pourraient être pris en co-propriété mais sans obligations), de cessions de licences (brevets, exploitation), et de propriété industrielle.
7.2 Échantillonnage
Les macro-organismes
116Toute l’analyse précédente montre l’intérêt de mener en Polynésie française un programme d’échantillonnage dans le double but de la constitution d’un « patrimoine biologique » et de la recherche de substances naturelles. La valorisation ultérieure d’un produit pouvant passer par une phase d’aquaculture de l’organisme source (cf. Ecteinascidia turbinata, Bugula neritina, Pseudopterogorgia elisabethae), une attention particulière devra être portée à la répartition des espèces et à leur contenu chimique en fonction de leur habitat : les espèces vivant dans les lagons profonds seront probablement les plus faciles à cultiver le cas échéant, alors que les organismes des zones à fort courant resteront des modèles académiques. Toutefois, certaines espèces vivant à l’extérieur du récif peuvent s’adapter dans les lagons, mais leur production en métabolites secondaires peut alors varier et ne plus produire les molécules souhaitées. Cette stratégie s’applique surtout au niveau des coraux, poissons, mollusques et échinodermes.
117L’échantillonnage doit alors être double, à la fois pour la systématique et pour l’étude pharmacochimique. L’identification rapide des échantillons, au moins au niveau du genre, permet d’accéder aux banques de données : c’est l’un des points clés de l’étape de réplication. Le travail de spécialistes de différents groupes peut être motivé par la mise en place d’un programme général sur la biodiversité marine qui intéresserait l’ensemble des archipels et d’une collection de référence sur le territoire. Des réseaux de spécialistes mettent en place des banques de données mondiales où sont référencées les différentes espèces (identification, photos, coordonnées géographiques, détenteur de l’échantillon), afin d’améliorer les connaissances biogéographiques des différents organismes.
118Une démarche spécifique pourrait être engagée s’agissant des co-produits de la pêche selon laquelle, outre la notion de gestion de la ressource qu’il conviendrait d’appréhender dès la mise en place de projets de valorisation, seules des études préliminaires sur une caractérisation de molécules d’intérêt extraites de ces déchets (y compris les oméga 3) pourraient conduire, à terme, à la mise en place de structures de valorisation.
119Cette étude devra également porter sur les macro-algues au regard de différents paramètres comme les connaissances des algues polynésiennes et la constitution d’une collection de référence, ainsi que les potentialités de ces organismes dans différents secteurs industriels, sans oublier les études et recherches déjà engagées sur ce sujet. Une attention particulière pourrait alors être donnée à deux algues invasives ou proliférantes (Sargassum mangarevense et Turbinaria ornata) dans une réflexion associant les notions d’environnement, d’écologie et de valorisation industrielle. Un travail de recherches, d’isolement et de caractérisation de molécules devrait cependant être entrepris sur les algues en privilégiant soit les algues proliférantes dont il est fait état plus haut, soit d’autres algues (voir chapitre 4) présentant des fortes potentialités en matière de synthèse de molécules innovantes.
120Il y a donc nécessité d’une mise en place préalable d’actions de recherches appliquées pouvant être menées sur le territoire dans le cadre de structures de recherches existantes ou de collaborations à initier.
Les micro-organismes
121Considérant l’ensemble des remarques évoquées dans le chapitre consacré aux micro-organismes (notion de milieux sélectifs, représentativité, souches cultivables, souches symbiotiques, etc.), il paraît alors plus judicieux de concevoir, concernant spécifiquement ces micro-organismes (bactéries, archaé, cyanaobactéries et microalgues, levures, champignons…), la notion de collection et de préservation de ces micro-organismes, cette souchothèque (ou ces souchothèques) constituant la base (les bases) de toute action ultérieure en matière de valorisation et d’exploitation dans les différents secteurs de la biotechnologie.
122La recherche de pistes de valorisation des micro-organismes marins passe obligatoirement par cette phase de mise en place et de gestion d’une ou de plusieurs de ces collections.
123S’agissant plus spécifiquement des bactéries, cyanobactéries et micro-algues, une telle collection existe d’ores et déjà sur la base d’études réalisées sur le Kopara (Société Biolib, Tahiti), qui pourrait être étendue à d’autres micro-organismes ou lieux de prélèvement. La création d’une telle « souchothèque » nécessite cependant des moyens appropriés, tant au niveau de la caractérisation de ces micro-organismes qu’au niveau de leur préservation.
7.3 Extraction
124Les études menées sur les algues et invertébrés marins ainsi que la collection (ou ces collections) susmentionnée(s) peuvent éventuellement constituer la base d’une seconde « collection », propre aux métabolites primaires et secondaires synthétisés par ces organismes.
125Le mode d’extraction peut naturellement varier selon la source, ainsi que le mode de conservation des organismes, du lieu de récolte jusqu’aux laboratoires de chimie. Cette étape fondamentale pourrait également être réalisée sur le territoire ; elle permettrait de constituer une banque de molécules (chimiothèque) à conserver au même titre que la collection taxonomique de référence.
126S’agissant notamment de micro-organismes, la démarche pourrait alors consister en :
une mise en place et un enrichissement de nouvelles collections et collections existantes au niveau du territoire ;
une mise en place éventuelle d’une chimiothèque (ou banque de molécules) et le lancement d’un travail de caractérisation de ces micro organismes et de leurs métabolites (primaires et secondaires) au travers d’une recherche amont, mais appliquée, menée sur le territoire au regard de compétences existantes et/ou d’accords de partenariat avec le secteur privé.
7.4 Mise en forme pour le criblage d’activités
127Les criblages d’activité des différents domaines étudiés (santé, cosmétologie, agro-alimentaire, environnement et autres) évoluent de plus en plus vers les techniques dites de criblage à haut débit. Afin d’améliorer la rapidité de traitement des touches positives de ces criblages, les extraits sont fractionnés plus ou moins finement pour cerner, dès la première étape, la fraction active. Cette étape de fractionnement et de mise en plaques standards prêtes à être testées permet de constituer un stock d’échantillons disponibles pour les essais pharmacologiques ultérieurs. Ces deux étapes (fractionnement et préservation des échantillons) peuvent également être réalisées sur le territoire, moyennant un investissement technique et humain raisonnable.
7.5 Essais biologiques et valorisation
128La mise en place de tests pharmacologiques robotisés nécessite une logistique importante tant humaine que technologique (mise au point des tests, miniaturisation, robotisation, tests de confirmation), en général disponible dans des groupes de recherche privés ou éventuellement mixte public-privé. Il est difficile d’être spécialiste des différents domaines, et peu rentable d’appliquer une telle structure à une collection restreinte d’organismes à tester. Il est donc important de rechercher à ce niveau des partenaires intéressés et efficaces et de créer des liens forts (formation de jeunes chercheurs polynésiens par exemple) avec des groupes susceptibles de pouvoir développer par la suite un produit.
129La maîtrise de la production des plaques de tests permet de diversifier les partenaires dans différents domaines. Les étapes d’isolement, de réplication et de détermination structurale pourraient être réalisées par un (ou des) laboratoire(s) compétent(s) en Polynésie ou dans une structure partenaire.
130S’agissant d’autres propriétés, des études pourraient également être menées en relation avec les autres champs d’applications de ces molécules, comme la détermination de propriétés rhéologiques et physico-chimiques. Ces études devraient cependant être engagées préférentiellement dans le cadre d’accords partenariaux avec les industries concernées. Il paraît en effet fort délicat, considérant les diversités de structures et de fonctionnalités, d’initier de telles démarches sans une demande industrielle amont et bien établie.
7.6 Développement d’un produit
131Dans le cas des métabolites secondaires, les molécules ayant subi avec succès toutes les étapes de sélection jusqu’à la valorisation en tant que médicament ou plus généralement en tant que molécule bioactive, la production par voie de synthèse doit être envisagée, l’un des critères de sélection d’une substance étant son obtention de façon industriellement rentable. Mais cette voie d’obtention de la molécule cible est aussi fonction de l’organisme source.
132Dans le cas des macro-organismes marins (éponges, échinodermes, parfois algues), l’exploitation de la ressource naturelle n’est en général pas toujours possible, et s’appuie sur des programmes d’étude d’impact et de biogéographie tant biologique que chimique. Plusieurs exemples récents dans divers groupes taxonomiques ont montré que des invertébrés pouvaient être cultivés en milieu naturel, et ainsi constituer la ressource du produit recherché. Les lagons des atolls, particulièrement riches en nutriments, peuvent constituer des milieux de choix par leur richesse en nutriments pour ce nouveau type d’aquaculture. Il peut en être de même pour la culture de certaines algues (« algoculture ») présentant un réel intérêt biotechnologique.
133Mais si la synthèse (ou l’hémisynthèse) s’avère impossible ou peu rentable, la voie biotechnologique est une voie intéressante et à privilégier. Cela est évidemment vrai au niveau des micro-organismes (micro-algues, champignons, archaé, bactéries) où les procédés de fermentation de ces micro-organismes sont de mieux en mieux contrôlés, de même que ceux liés à l’extraction, la purification et la caractérisation des métabolites d’intérêt. La voie biotechnologique présente également les avantages d’une non-dépendance vis-à-vis d’aléas environnementaux (pollution), d’un meilleur contrôle de la source (collections) et, dans la grande majorité des cas, de l’assurance de l’obtention des paramètres essentiels que sont la qualité et la reproductibilité des molécules recherchées.
7.7 Aspects juridiques de la protection de la ressource
Statut IUCN : très peu de spécimens de benthos bénéficient d’un statut IUCN, à l’exception des coraux et des mollusques, tous organismes intéressant les collectionneurs et les aquariophiles.
Contraintes réglementaires : ce sont celles de la convention de Rio.
Mode de protection de la ressource : le mode suggéré est l’interdiction de récoltes par les personnes non enregistrées auprès du service des pêches, et l’obligation de l’armement des navires de récoltes à la petite pêche excluant les navires de plaisance, mais autorisant la récolte des organismes en plongée autonome.
8. Conclusions
134Quelles que soient les sources consultées, les perspectives d’évolution des marchés de la biotechnologie sont considérables, avec des taux de croissance de l’ordre de 10 %/an. Tous les gouvernements des pays industrialisés ont fait des biotechnologies le prochain moteur de la croissance, accompagnant ou relayant celui des technologies de l’information. L’analyse des actifs en cours de phase clinique et des demandes d’autorisation de mise sur le marché est en ce sens sans ambiguïté. Le marché européen de la biotechnologie pourrait être estimé à plus de 100 milliards d’euros d’ici à 2005. À la fin de la décennie, les marchés mondiaux, notamment dans les secteurs où les sciences du vivant et la biotechnologie constituent la majeure partie des nouvelles technologies appliquées, pourraient atteindre plus de 2000 milliards d’euros.
135Les biotechnologies marines sont certes une science relativement neuve mais le milieu marin représente une source inépuisable d’innovations pour les spécialistes en biotechnologies. La Polynésie française de par son large domaine maritime et la diversité des écosystèmes qu’elle présente se positionne naturellement comme une zone privilégiée d’investigations, de mise en place d’activités de recherche et de développements industriels autour de ces biotechnologies marines. Bien d’autres pays possédant des similitudes avec les spécificités du territoire polynésien ont d’ores et déjà intégré ces objectifs dans leurs programmes de recherches et de développement, à l’exemple de l’Australie (CSIRO-AIMS-Australian Institute of Marine Science, James Cook University) et de la Nouvelle-Zélande.
136« Everywhere you look, biotechnology touches your life » : cette expression traduit bien l’évolution des biotechnologies, en particulier marines, dans les différents secteurs industriels que sont ceux de la santé (médical, pharmacologie et parapharmacie), cosmétique et dermocosmétique, agro-alimentaire, environnement, ainsi que de nouveaux secteurs émergents (adhésifs, polymères biodégradables…). Des études sont d’ores et déjà engagées sur le territoire polynésien concernant certains aspects des potentialités offertes par cette biodiversité marine. Les premiers retours de ces données scientifiques apparaissent positifs, mais un travail important reste cependant à réaliser pour mettre en adéquation l’offre et la demande, en tenant compte également des contraintes liées au positionnement géographique et aux capacités d’investissements. Quand cela s’avère nécessaire, ce travail doit prendre en compte une meilleure connaissance de la faune et flore marine, s’entourer de la mise en place de collections (souchothèques) intéressant quelques grands ensembles (algues, microalgues, micro-organismes), de la création parallèle d’une banque de molécules (chimiothèque), mais également de la mise en place d’outils de criblage et/ou d’actions de recherche sur une meilleure connaissance des propriétés et activités des molécules extraites, et bien évidemment ne peut aller sans une réflexion autour de la mise en place de structures de production de ces molécules et/ou organismes sources.
137*Remerciements : les auteurs souhaitent remercier pour leurs commentaires et discussions les professeurs Éric Deslandes de l’Université de Bretagne-Occidentale et Claude Payri de l’Université de la Polynésie française.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 NB : sous la terminologie « micro-organismes » sont regroupées dans l’esprit des rédacteurs les notions de microalgues, champignons, cyanobactéries, archaé et bactéries.
Notes de fin
1 Applications potentielles : 18 :3ω6 γ−linolenic acid, GLA ; 20 :5ω3, eicosapentaenoic acid, (EPA) ; 20 :5ω3 ; docosahexaenoic acid (DHA), 22 :6ω3 ; arachidonic acid, AA : 20 :4ω6
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