Éléments pour une stratégie de valorisation des substances naturelles
p. 56-95
Texte intégral
1Après avoir examiné, pour en tirer de premiers enseignements, ce qui existe actuellement en Polynésie française en fait d’exploitation économique des substances naturelles, l’expertise collégiale a identifié des ressources potentielles nouvelles. On en arrive ainsi à la question centrale qui lui a été posée : comment traduire le potentiel identifié en de nouvelles pistes de valorisation, cohérentes entre elles et adéquates aux capacités locales, c’est-à-dire en une véritable stratégie ? Tel sera l’objet, et l’objectif, de cette troisième section.
2Soulignons l’importance de l’enjeu. Il en va en effet du bon emploi des moyens qui seront impartis à l’élaboration et à la mise en œuvre d’une telle politique, et donc du bon « retour sur investissement » qu’on peut en attendre : investissement financier certes, mais aussi investissement humain, sous de multiples formes.
3Nous nous attacherons en premier lieu à fournir des orientations pour définir les principes et le cadre juridique indispensable à la préservation des intérêts écologiques et économiques de la Polynésie française face à l’essor souhaité des activités de valorisation de ses substances naturelles.
4Puis nous présenterons les conditions économiques et techniques requises pour le bon développement de nouvelles filières de production, conditions qui incluent notamment les contraintes réglementaires spécifiques à certains secteurs sur les marchés français et européen, ainsi que les instruments de protection des produits.
5Enfin, nous développerons les orientations de valorisation proprement dites, en différenciant deux cas de figure : d’une part, les substances naturelles du groupe 1 ; d’autre part, les substances du groupe 2 et les substances marines, avec, dans les deux cas, des indications sur le dispositif nécessaire à la mise en œuvre de ces orientations.
APPROCHE JURIDIQUE
La CDB et le nouveau statut juridique de la biodiversité
6Les ressources biologiques (et leurs composants) sont de plus en plus convoitées et, loin de n’acquérir de valeur qu’à proportion des transformations technologiques dont elles font l’objet, elles ont une valeur en soi. C’est l’ensemble de la biodiversité qui est devenu potentiellement valorisable et par là même stratégique.
7Avec le développement des biotechnologies, le statut juridique des ressources biologiques s’est profondément renouvelé. Jusqu’à la fin des années 1980, ce statut s’articulait schématiquement autour de deux catégories juridiques : d’une part, la souveraineté nationale, pour ce qui est de leur exploitation directe et immédiate ; d’autre part, la notion de « patrimoine commun de l’humanité », dans le cadre de la recherche ou d’une valorisation indirecte et différée, à partir des potentialités chimiques ou génétiques de la ressource susceptibles de générer un nouveau produit.
8Dès le milieu des années 1980, ce statut s’est trouvé en porte-à-faux face à l’évolution du droit qui, aux États-Unis d’abord, en Europe ensuite, et finalement à l’échelle mondiale, a consacré la brevetabilité du vivant. Au terme de cette évolution, toute ressource vivante – ou tout élément qui en est issu, cellule, gène, molécule, etc. – peut désormais être protégée par un brevet d’invention si, une fois retravaillée, elle apparaît nouvelle, inventive et applicable dans un procédé industriel. D’où une distorsion entre, d’un côté, le patrimoine commun de l’humanité, qui postule l’absence de propriété, la liberté et la gratuité des collectes, et, de l’autre, le brevet qui permet une exploitation non seulement lucrative, mais aussi exclusive des substances ainsi librement et gratuitement collectées.
9C’est pour prévenir les conflits d’intérêts pouvant découler de cette situation que la Convention sur la diversité biologique (CDB) du 5 juin 1992 a établi un nouveau statut juridique des ressources biologiques. Abandonnant la qualification de patrimoine commun de l’humanité, la Convention rattache les processus biologiques au principe de souveraineté des États sur leurs ressources naturelles, ce qui permet à ces derniers de réglementer comme ils l’entendent toute forme d’accès au matériel biologique se situant sur leur territoire. L’objectif est de permettre aux États de mieux en contrôler l’utilisation et d’en organiser les échanges, mais aussi de tirer profit des richesses qui en découleront à la suite d’un processus de recherche-développement chimique ou biotechnologique.
10C’est l’article 15 de la Convention qui constitue à cet égard la disposition clé ; en voici les points essentiels :
11« 1 – Étant donné que les États ont droit de souveraineté sur leurs ressources naturelles, le pouvoir de déterminer l’accès aux ressources génétiques appartient aux gouvernements et est régi par la législation nationale. […]
125 – L’accès aux ressources génétiques est soumis au consentement préalable donné en connaissance de cause de la Partie contractante qui fournit les dites ressources, sauf décision contraire de cette Partie. […]
137 – Chaque Partie contractante prend les mesures législatives, administratives ou de politique générale appropriées [...] pour assurer le partage juste et équitable des résultats de la recherche et de la mise en valeur ainsi que des avantages résultant de l’utilisation commerciale et autre des ressources génétiques avec la Partie contractante qui fournit ces ressources. Ce partage s’effectue selon des modalités mutuellement convenues. »
14En vertu de la Convention, l’accès aux substances naturelles s’organise donc désormais autour de trois grands principes corrélés entre eux : souveraineté de l’État, consentement préalable en connaissance de cause de l’autorité publique avant toute collecte, partage des avantages résultant de l’utilisation des ressources fournies. Le système fondé sur ce socle de principes est désigné par l’acronyme APA : accès (aux ressources génétiques) et partage des avantages.
La Polynésie française et la nouvelle donne juridique
15Alors que nombre d’États ont saisi l’opportunité offerte par l’article 15 de la CDB, la Polynésie française ne s’est pas encore, à ce jour, dotée d’une réglementation spécifique sur l’accès aux ressources génétiques. Un projet de texte étant en cours d’élaboration en Polynésie française, il est bon de souligner combien il serait opportun qu’elle légifère en la matière, et de relever qu’elle en a parfaitement la compétence.
16L’absence, à ce jour, de dispositions spécifiques à l’APA ne peut s’expliquer par l’absence de compétence juridique de la Polynésie française. La CDB énonce bien que le pouvoir de déterminer l’accès appartient aux États. Mais en vertu de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, les institutions polynésiennes sont dotées d’une autonomie renforcée et disposent de larges compétences déléguées dans toute une série de domaines, parmi lesquels l’environnement et les ressources marines. Les questions d’accès aux ressources biologiques et de circulation de ces ressources relevant au premier chef de l’environnement (terrestre ou marin), la Polynésie française a donc bel et bien compétence pour mettre en place un dispositif juridique en ce domaine.
17Quant à l’utilité d’un tel dispositif, voyons, a contrario, ce qu’entraîne son inexistence. Certes, la CDB est applicable en Polynésie française, par le biais de la loi n° 94-477 du 10 juin 1994 qui en porte ratification en France. Toutefois, la France, comme beaucoup de pays développés, n’a pas jugé utile de la traduire en une réglementation spécifique. De ce fait, aucune disposition n’organise l’accès à la biodiversité et le partage des avantages qui peuvent en découler ; aucune ne réglemente précisément les conditions de la collecte de ressources biologiques (sauf cas des espèces et espaces protégés) ni le partage des avantages qui peuvent en découler. Il s’ensuit que les opérateurs désirant prospecter en Polynésie des ressources biologiques pour leur capacité réelle ou potentielle à servir de base au développement de médicaments ou autres produits nouveaux n’ont ni à solliciter un accord préalable, ni à s’engager à une contrepartie.
18Ainsi donc, s’en tenir au droit en vigueur n’offre pas à la Polynésie française les moyens de tirer au mieux avantage des perspectives de valorisation de ses substances naturelles. En effet, ni les règles classiques issues du droit civil, du droit de l’environnement ou du droit de la mer, ni les dispositions en cours d’élaboration ces dernières années au plan international dans la logique de la CDB (Lignes directrices de Bonn, futur régime international sur l’accès et le partage des avantages1), ne répondent pleinement aux besoins en la matière. Cette insuffisance du droit en vigueur se manifeste à plusieurs égards :
D’un point de vue écologique, la valorisation des ressources biologiques ne peut se concevoir qu’avec le souci d’assurer leur pérennité. À cette fin, il s’agit de se donner les moyens de prévenir les incidences néfastes sur l’environnement de la Polynésie, milieu biologiquement riche mais vulnérable.
D’un point de vue économique, sans agiter l’épouvantail du pillage des ressources biologiques (biopiraterie), s’abstenir d’organiser plus précisément les conditions de bioprospection peut à tout le moins empêcher la Polynésie de tirer correctement avantage des retombées économiques de la valorisation de sa biodiversité. Il s’agit donc purement et simplement de se donner les moyens de tirer au mieux profit des éventuelles opérations de valorisation, certaines ayant fait la preuve qu’elles pouvaient profiter à la fois aux pays et aux prospecteurs à la condition qu’aient été organisés juridiquement, de façon précoce, les droits et les obligations de chacun. Un tel cadre constitue d’ailleurs un élément important pour la sécurité juridique des futurs utilisateurs industriels de ressources biologiques, qui pourraient hésiter à investir dans des pays sans dispositif juridique clair quant aux conditions d’accès à la biodiversité (l’accès est-il autorisé ou non ? à quelles conditions ? quelle administration saisir ? etc.).
D’un point de vue politique, s’abstenir d’organiser plus précisément les conditions de bioprospection, ce serait risquer de voir les opérations de prospection contestées par les populations locales : on reviendra plus loin sur cet aspect. Plus généralement, la conception d’un tel cadre s’inscrit « dans le sens de l’histoire ». Il faut en effet rappeler qu’à l’échelle de la région du Pacifique Sud, toute une série d’actions poursuivent précisément ce but. On peut citer les travaux (encore embryonnaires) engagés par le Secrétariat général de la Communauté du Pacifique Sud (CPS), acteur clé du développement régional et qui se présente aujourd’hui comme le gardien des ressources du Pacifique, des savoirs traditionnels et des expressions des cultures de la région.
19Intérêt du monde de la recherche et de l’industrie pour les substances naturelles, nouveau statut juridique de la biodiversité, évolution des conceptions et des pratiques en ce domaine : la conjonction de ces facteurs fait qu’il est de l’intérêt bien compris de la Polynésie française de se doter d’un dispositif juridique adéquat et efficace.
20Reste à en définir les grandes lignes :
Dans le paragraphe suivant, on présentera le socle d’un tel dispositif : consentement préalable, formes des contrats, contrôle, droits de propriété industrielle, tels sont les points essentiels à prendre en compte si la Polynésie française veut se doter d’une réglementation de l’accès à sa biodiversité.
Dans la perspective où la Polynésie française entendrait développer une activité de prestation de service dans le domaine qui nous occupe, avec l’établissement de collections, biothèques et extractothèques, assumant une partie de l’activité d’extraction des substances naturelles au profit d’instituts de recherche et d’entreprises, on apportera l’éclairage d’une réflexion juridique sur des questions comme le statut des collections et biothèques, l’activité contractuelle de ces institutions, etc. (cf. « Les perspectives de valorisation », p. 86).
Enfin, on abordera la question, rendue de fait incontournable par l’article 8 (j) de la CDB, des éventuels droits des populations autochtones ou locales sur les résultats de l’exploitation des ressources biologiques (cf. « Droits des populations locales et intérêts collectifs », p. 93).
Le dispositif juridique de base : institution du principe d’APA
21Les deux éléments clés pour l’élaboration d’un texte relatif à l’APA étant le principe d’accord préalable en connaissance de cause ou APCC, et sa traduction en un document contractuel, quels sont les points essentiels à la préservation des intérêts de la Polynésie française en tant que fournisseur de substances naturelles ?
L’accord préalable en connaissance de cause (APCC)
22Posé par l’article 15 de la CDB, son principe implique que la collecte ne peut être réalisée qu’une fois acquis l’accord de l’autorité publique, cette dernière ayant préalablement eu à sa disposition les éléments d’information lui permettant de préserver ses droits sur les ressources et les bénéfices qui en seront éventuellement tirés.
23Cette formalité de l’accord préalable doit obéir à une double exigence : d’une part, une exigence de clarté (quelle administration saisir ? dans quel cas de figure ? etc.) ; d’autre part, une exigence de souplesse, afin d’éviter que la lourdeur des procédures ne soit dissuasive pour les demandeurs, ce qui irait à l’encontre de l’objectif visé.
À quelle instance demander l’APCC ?
24Il est nécessaire de définir quelle autorité doit être saisie ou donner son accord à l’autorisation de collecte. On s’en tiendra ici à quelques indications générales :
Le consentement préalable de la Délégation à la recherche devrait être requis.
Les autorités en charge de l’environnement et des espaces protégés devraient également être impliquées.
Pour qu’elles puissent effectivement se prononcer « en connaissance de cause », il importe de renforcer les capacités des administrations concernées (conformément aux Lignes directrices de Bonn). Dans ce but, elles auront intérêt à créer, au cas par cas, des comités scientifiques d’appui en faisant appel aux organismes scientifiques compétents.
À quels types de collectes doit s’appliquer l’APCC ?
25Même si elle élargit le périmètre de la réglementation existante, limitée aux seules espèces protégées, l’application de l’obligation d’autorisation aux espèces endémiques ne paraît pas suffisante. En effet, ce critère risque d’empêcher la Polynésie française de profiter pleinement des droits conférés par la CDB. Dans ce milieu insulaire, l’évolution a ségrégué des taxons extrêmement spécifiques. Bien qu’ils ne soient pas endémiques à proprement parler, ces taxons sont porteurs de caractéristiques potentiellement intéressantes. Dans ces conditions, distinguer entre l’endémique et le non-endémique, c’est donner le feu vert à des opérations de prospection susceptibles d’aboutir au développement d’un produit sur lequel la Polynésie ne se sera ménagé aucun droit.
26Cette remarque amène à formuler une idée plus générale. En réalité, il ne convient pas de poser un critère discriminant, quel qu’il soit, pour distinguer les collectes soumises à autorisation et celles qui y échapperaient : ni critère tenant aux ressources susceptibles d’être prélevées, ni critère tenant aux personnes désirant prospecter ou aux objectifs qu’elles assignent à leur prospection. En effet :
Toute ressource, in ou ex situ (puisque des collections existent en Polynésie), endémique ou non, marine aussi bien que terrestre, entière ou non (cellules, ADN, etc.), brute ou accompagnée de connaissances quant à ses vertus thérapeutiques, insecticides, etc., étant susceptible d’être valorisée à l’issue d’un processus industriel chimique ou biotechnologique, toutes doivent donc être soumises au principe de l’APCC.
La même conception vaut pour les demandeurs désirant prospecter : étrangers aussi bien que français, entreprises privées comme instituts de recherche publique, car, dans le domaine qui nous occupe, il n’existe pas de frontière nette entre public et privé, recherche fondamentale et recherche appliquée à débouchés commerciaux. Une classique activité d’inventaire est toujours susceptible d’ouvrir sur des recherches appliquées. La plupart des instituts de recherche, qu’ils soient privés ou publics, s’investissent dans la recherche appliquée et déposent des brevets. Ils sont par ailleurs en relation directe avec des entreprises privées, non seulement lorsque ces dernières exploitent leurs brevets, mais aussi plus en amont, lorsque l’institut de recherche réalise des prospections pour leur compte. On en arrive parfois à des cas de figure où un institut de recherche public sert de « paravent » pour éviter d’avoir à demander l’APCC… Dans ces conditions, il est artificiel et contre-productif de tenter des distinguos. S’impose ainsi la conclusion que l’APCC doit être sollicité dans tous les cas.
27Toutefois, afin de ne pas multiplier inutilement de lourdes formalités administratives, on pourra, après avoir posé le principe de l’APCC dans les termes indiqués, en exempter par dérogation les activités classiques d’exploitation et de valorisation des ressources biologiques (pêche côtière, exploitation du jus de nono ou du kava par l’industrie alimentaire, fleurs coupées, etc.) pour autant qu’elles se situent bien dans une perspective d’exploitation et de valorisation directes. Tout transfert de la ressource, à titre gratuit ou onéreux, ou tout transfert d’autres ressources qui auraient été capturées ou prélevées à titre accessoire, au profit d’un tiers ayant pour but d’en faire une valorisation indirecte, sera interdit sauf APCC de l’autorité compétente. C’est ainsi que, sans APCC, une entreprise pharmaceutique ne saurait récupérer auprès des pêcheurs les captures annexes de leur activité de pêche (algues, micro-organismes, etc.). Il doit en être de même dans le cas où une entreprise entendrait mener des opérations de recherche hautement technologiques (par exemple, utilisation d’un gène de la plante ou synthèse d’une molécule) à partir d’une ressource commercialisée telle que le nono.
28Ainsi conçu et défini en extension, le principe du consentement préalable vise à donner à la Polynésie française les moyens de tirer au mieux avantage de ses ressources biologiques, que ce soit pour avoir fourni le substrat matériel de l’innovation, ou pour compenser les pertes liées au fait que ce substrat peut être remplacé en totalité par des produits ou processus issus de la chimie de synthèse, du génie génétique, etc.
L’accord de transfert de matériel
29Dans le cas où la collecte de matériel biologique est autorisée, il convient d’en préciser les conditions de réalisation. À cet effet, la signature d’un contrat (appelé de façon générique « accord de transfert de matériel », ou ATM) constitue le mécanisme le plus adapté. Il permet en effet de déterminer les droits et les obligations de chacune des parties.
Loi vs contrat
30Qui dit contrat dit théoriquement liberté des contractants de s’engager selon des termes « mutuellement convenus ». Pourtant, en ce qui concerne la prospection de ressources biologiques, il paraît nécessaire que la loi donne un cadre à cette liberté, ne serait-ce que pour la raison suivante. Dans ce domaine sont en jeu des intérêts publics, qui requièrent que la loi fixe une série de dispositions auxquelles ces contrats ne peuvent déroger. Au demeurant, cela n’aurait rien de spécifique à la prospection de la biodiversité : le contrat médical ou le contrat de consommation doivent ainsi obéir à des dispositions telles que l’obligation d’informer le patient, le délai de rétractation du consommateur, etc.
Quel type de contrat ?
31Le contrat entre les parties prenantes doit-il se borner à organiser les opérations de prospection pour la recherche ou doit-il anticiper d’emblée sur d’éventuels développements commerciaux ? Il y a matière à débat entre deux types de contrat : le contrat de recherche et le contrat commercial.
32S’agissant de valorisation différée, comme c’est le cas pour la majorité des programmes de bioprospection, la question des modalités de partage des avantages entraîne souvent de longues, difficiles et coûteuses négociations. Il apparaît plus expédient de s’en tenir initialement à un contrat de recherche, à la condition expresse d’y faire figurer l’obligation pour l’utilisateur de renégocier un nouveau contrat avec le fournisseur, dans le cas d’une valorisation industrielle ou commerciale. Afin d’éviter tout malentendu, il convient en effet de poser que cette obligation vaut si un brevet est déposé ou si un produit est commercialisé, car le produit final ne sera pas nécessairement protégé par un brevet. En tout état de cause, il faut donc éviter de délivrer une licence ou un permis de collecte à visée de recherche scientifique sans y prévoir expressément qu’en cas de développement d’une innovation, un accord de partage devra être négocié.
Dispositions contractuelles d’ordre public
33Dans l’ATM, nombre de dispositions relèvent, bien entendu, de la liberté des contractants, par exemple, les lieux de la collecte, l’exclusivité et la durée de celle-ci. Mais y seront également stipulées les dispositions prévues par la loi, auxquelles les contractants ne pourront déroger :
En matière d’accès sous condition d’utilisation durable ;
En matière de partage des avantages.
34Le partage des avantages est susceptible de revêtir diverses modalités : bénéfices immédiats ou à long terme, financiers ou en nature. Sans entrer dans le détail de ces modalités (à peser au cas par cas), trois observations générales peuvent être formulées :
Le principe d’un partage des avantages doit être mentionné dans le texte de loi comme un principe d’ordre public, auquel les prospecteurs ne peuvent déroger.
En fait d’avantages à court terme, un ensemble de raisons fait apparaître plus intéressant d’envisager l’option prestations en nature, l’utilisateur par exemple s’engageant à apporter une aide technique.
Enfin, il faut avoir conscience de ce que toute perspective de partage à terme risque de n’être qu’une coquille vide si les dispositions à cet égard ne sont pas complétées par des dispositions organisant le contrôle des différentes opérations.
Les moyens de contrôle
35Le contrôle du respect des dispositions contractuelles est assurément l’un des aspects les plus difficiles à mettre en œuvre. Le fournisseur du matériel doit avoir la possibilité d’exercer un contrôle sur chacune des étapes allant du prélèvement au développement d’un produit, faute de quoi la perspective d’un partage équitable des avantages devient bien incertaine :
Contrôle de la prospection stricto sensu, afin, au minimum, d’identifier précisément ce qui est collecté et d’en mesurer l’impact environnemental.
Contrôle des transferts successifs des spécimens collectés : une disposition du contrat doit prévoir les moyens d’un tel contrôle. Toujours est-il que la meilleure formule semble celle par laquelle le prospecteur s’engage purement et simplement à ne pas transférer les spécimens collectés à des partenaires non mentionnés dans le contrat. Il n’y a pas à redouter qu’une telle disposition soit dissuasive. Les instituts de recherche commencent à être rompus à cette pratique. Quant aux entreprises, à l’heure actuelle nombre d’entre elles, désireuses de conserver l’exclusivité de jure ou de facto des spécimens, y demeurent favorables, même si d’autres commencent à y renoncer afin de multiplier les opportunités de valorisation.
Contrôle des travaux du co-contractant : dans l’attente d’un hypothétique accord international sur le contrôle aval des brevets, le contrôle des travaux de recherche et développement doit être organisé par le contrat lui-même. Plusieurs dispositions peuvent être prévues : la meilleure, parce que la mieux à même d’assurer le retour d’informations sur l’avancement des travaux de recherche, est la conclusion de conventions associant aux recherches des institutions scientifiques locales (universités, centres de recherche) ou régionales.
36S’il est illusoire et vain de rechercher un contrôle absolu, la combinaison des dispositions venant d’être mentionnées n’en est pas moins nécessaire pour permettre à la Polynésie française de maîtriser l’évolution des recherches auxquelles ses ressources donneront matière.
APPROCHE TECHNIQUE ET ÉCONOMIQUE
37Quels sont les éléments à prendre en compte pour offrir les meilleures chances de viabilité économique aux filières de production à lancer ou à soutenir dans le but de donner une dimension nouvelle à la valorisation des substances naturelles polynésiennes ? Nous retiendrons ici deux axes principaux :
les paramètres économiques, techniques, réglementaires, auxquels ces filières doivent satisfaire,
les principes à observer en fait de protection des produits qui en sont issus, étant entendu que :
d’une part, les paramètres environnementaux, socle d’un développement durable, seront au premier plan des orientations proposées infra comme perspectives de valorisation ;
d’autre part, les appuis techniques aux filières de production (qui sont à rechercher auprès des services centraux spécialisés : Onippam, Iteipmai …) n’entrent pas dans le périmètre de l’expertise ; cependant en raison de l’acuité de ces questions pour les décideurs locaux, on a sollicité l’avis d’experts venant du secteur industriel, chargés de la veille technologique et des filières d’approvisionnement.
Pour des filières2 viables : les conditions de base
Une ressource stable, une production de qualité, des prix compétitifs
38Pour être viables et jouer pleinement leur rôle économique, les filières doivent répondre à un certain nombre de conditions. En effet, injecter de l’argent ou des moyens (ce qui revient au même) ne devrait être envisagé que lorsqu’il existe une probabilité raisonnable de succès ou de progrès. L’engagement de programmes de développement non maîtrisés aboutit généralement à des échecs qui découragent les tentatives ultérieures (les exemples ne manquent pas, y compris en métropole…). Trois conditions de base s’imposent.
Stabilité
39La condition sine qua non du développement d’une filière de valorisation est la mise à disposition d’une matière première naturelle, cultivée ou collectée, stable en quantité. Cette exigence de stabilité doit prendre en compte les phénomènes de saisonnalité mais aussi les aléas climatiques, par la mise en place d’une logistique adaptée : dispersion des cultures, stockage, pré-transformation…
Qualité
40L’objectif n’étant pas de produire une ressource naturelle mais bien d’alimenter des activités de valorisation, il est nécessaire d’assurer aux industries transformatrices des approvisionnements répondant à des critères de qualité spécifiques, définis à l’avance.
Prix
41Le prix auquel est proposée la « matière première » doit être suffisamment attractif pour permettre la mise en place d’une filière de valorisation viable. Il s’agit sans doute, dans le cas de la Polynésie française, d’un des points les plus critiques. Le surcoût lié à l’insularité et au système social français rend incertaine la compétitivité de certaines productions. C’est en particulier le cas pour des ressources largement répandues au niveau mondial comme le tamanu. La compétition des pays à faible coût de main-d’œuvre ne sera supportable que s’il est possible de valoriser une spécificité locale forte, fondée sur la qualité ou l’image.
Pour mettre en place de nouvelles filières
Partir des besoins du marché
42Il ne peut y avoir de développement d’une filière de production que s’il existe un besoin réel du marché pour ce produit. Toute autre démarche relève plus d’un traitement social que d’un traitement économique. En général, on ne peut que constater l’échec des projets de développement reposant sur une démarche du type : « Nous disposons d’un produit que nous savons produire en quantité. Nous allons le commercialiser et in fine nous verrons s’il y a des clients… ». Parallèlement, la démarche consistant à aller voir un industriel pour lui demander : « De quelle plante, ou organisme-source, avez-vous besoin ? Nous pouvons la produire ou en développer la culture pour vous », est également vouée à l’échec. Lorsque le besoin industriel est avéré, l’utilisateur a depuis longtemps élaboré sa stratégie d’approvisionnement.
43Il est donc important de procéder à l’identification des besoins du marché avant d’engager tout investissement, humain et matériel. C’est particulièrement vrai pour des initiatives qui viseraient le marché des produits cosmétiques, marché à la fois très attractif et très difficile. On se reportera à cet égard à la note « Sur le secteur de la cosmétologie » (Annexe 2) : le débat qu’elle reflète illustre bien la complexité et l’imprévisibilité de ce marché.
44À ce stade, il serait sans doute pertinent de recourir, en appui ponctuel ou à plus long terme, aux conseils d’organismes officiels tels que l’Onippam dont la connaissance du marché des plantes, national et international, à la fois au niveau de la production et des débouchés, peut se révéler précieuse.
45Mais c’est parfois ultérieurement, lors de la phase de recherche-développement, que le besoin du marché se révèle plus important que prévu à l’origine. Il est alors très intéressant, dans le cadre d’un partenariat avec l’utilisateur, d’avoir anticipé la mise en place des conditions de production. En règle générale, cette stratégie qui suppose une proximité de contact avec les utilisateurs, peut s’avérer extrêmement payante pour deux raisons :
les contacts fréquents permettent d’instaurer la confiance, nécessaire pour un projet à moyen ou long terme ;
l’étude d’un projet dès la phase R&D permet de prendre une longueur d’avance sur d’éventuels concurrents.
46Les remarques précédentes concernaient d’éventuels produits nouveaux. Dans le cas d’un produit élaboré ou semi-élaboré ayant déjà, traditionnellement, un marché sur le territoire, une autre approche, plus institutionnelle, consisterait à en étudier le potentiel d’introduction sur les marchés extérieurs. Cette démarche implique un investissement initial, de dimension raisonnable, dans des études qui, confiées à des cabinets spécialisés, sont à mener au plan économique et réglementaire, ce qui nous conduit au point suivant.
Prendre pleinement en compte l’environnement réglementaire
47Pour les substances naturelles ou les produits issus de telles substances, un élément essentiel d’appréciation de leur potentiel économique – notamment en termes de dimension du marché, et même de pure et simple possibilité de mise sur le marché – est déterminé par l’environnement réglementaire. En effet, des législations multiples et complexes régissent les modalités et conditions d’utilisation des plantes en tous domaines. Mais c’est plus particulièrement vrai encore dans ces domaines qui sont à la fois très demandeurs, très « porteurs » et en même temps très sensibles : la santé ou la cosmétique.
48Il convient tout particulièrement de tenir compte de la législation sur les médicaments et compléments alimentaires à base de plantes, actuellement en pleine évolution, de manière à orienter les options de valorisation vers les filières les plus accessibles et les plus intéressantes pour la Polynésie française.
Les produits médicamenteux
49Trois cas de figure peuvent être rencontrés :
Le cas général : le médicament à base de plantes est traité comme tout médicament. Il est donc tenu de répondre à l’ensemble des exigences du dossier standardisé (en 5 modules) de demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM). On connaît la longueur du processus et la lourdeur de ses protocoles, notamment celle des études cliniques.
Les produits à « usage médical bien établi » : sous condition de remplir les critères de définition, ils bénéficient, par dérogation, d’un sensible allègement du dossier d’AMM, allègement portant sur les études toxicologiques, pharmacologiques et cliniques.
Les produits d’« usage traditionnel » : ils relèvent encore, pour l’heure, de la seule législation nationale. Mais c’est le secteur où sont attendues les plus importantes évolutions, avec l’adoption ou la refonte des principaux textes de référence. En effet, la nouvelle directive européenne, adoptée en décembre 2003 et publiée en 2004, doit entrer en vigueur à partir du 30 octobre 2005, alors qu’à la même échéance, devrait disparaître le Cahier de l’Agence n°3. À signaler également la révision en cours de la « Liste alphabétique des plantes médicinales de la pharmacopée française », attendue dans la même période.
Les produits alimentaires
50Deux cas de figure peuvent se présenter :
Les denrées considérées comme « traditionnelles » : moyennant l’adéquation à quelques critères (par exemple, une allégation exclusivement alimentaire et sans aucune revendication thérapeutique), leur commercialisation ne requiert aucune procédure d’AMM.
Les produits innovants, revendiquant une ou plusieurs allégations relatives à la santé : il y a obligation de soumettre à l’Afssa un dossier complet, complexe et en fait très proche du dossier d’AMM requis pour les médicaments.
Les compléments alimentaires
51Une directive européenne en donne la définition et la liste (ainsi que celle des nutriments) : « […] source concentrée de nutriments ou d’autres substances – vitamines et sels minéraux dans un premier temps – ayant un effet nutritionnel ou physiologique […] ». Les compléments alimentaires sont commercialisés sous forme de doses (ex. gélules, comprimés, sachets de poudre…). Toutefois, la notion d’« effet physiologique » reste à clarifier, car elle se retrouve aussi bien dans la définition du médicament que dans celle du complément alimentaire. Une réglementation européenne sur les denrées alimentaires à allégation de santé est en cours d’élaboration et devrait permettre une délimitation plus précise entre les domaines « santé » et « alimentation ». En juillet 2007 au plus tard, la Commission présentera un rapport et des mesures appropriées concernant d’autres catégories de nutriments (ayant un effet nutritionnel ou physiologique) utilisés dans les compléments alimentaires, comme les acides gras essentiels, les fibres, les plantes, les herbes aromatiques et leurs extraits, qui ne sont pas concernés pour l’instant par la directive 2002/46/CE. C’est une question à suivre de très près dans les trois ans à venir, dans la mesure où les ressources végétales exploitables identifiées par les experts sont des candidats pour ce secteur d’activité en pleine expansion, la directive mentionnée plus haut ayant fixé à 2007 la date-butoir pour l’harmonisation des réglementations concernant ces produits.
Les produits cosmétiques
52Tous les produits correspondant à la définition qu’en donne la directive 76/768 CEE doivent se soumettre à la législation que ce texte a mise en place. Ainsi, l’étiquetage des produits cosmétiques doit comporter la liste de la totalité des ingrédients. En cosmétologie, tous les végétaux sont autorisés s’ils ne figurent pas sur la liste des plantes réputées toxiques (annexe II de la directive). Toutefois, les colorants, naturels ou synthétiques, font l’objet d’une liste positive d’autorisation.
53De ce bref repérage, il ressort que les années 2003-2004 marquent un tournant décisif dans le devenir des produits à base de plantes, puisqu’il y a, comme nous l’avons vu, refonte ou mise à jour des textes fondamentaux. Une démarche gagnante consisterait à anticiper sur les réglementations en préparation, ce qui implique, pour le territoire et pour les organisations professionnelles des secteurs concernés de se doter d’un dispositif de veille à même de suivre l’évolution de ces dossiers et de tenir les acteurs en alerte.
Organiser les conditions d’obtention de la ressource
54La possibilité de création d’une filière sur le territoire polynésien est fonction d’un certain nombre de conditions matérielles quant à la disponibilité de la ressource. Nous en rappellerons ici les principales :
Si la ressource est suffisamment disponible à l’état sauvage, une structure de collecte doit pouvoir être organisée dans des conditions respectueuses de la pérennité de la ressource, ce qui implique la mise en place de plans de gestion de la ressource prenant en compte l’impact du prélèvement.
La main-d’œuvre nécessaire doit être disponible.
La culture de la plante doit être possible. S’il s’agit d’une plante sauvage, un programme de domestication doit être mis en place avec succès.
Les terrains nécessaires doivent être disponibles. À cet égard, la faible superficie de l’archipel, son morcellement géographique et la structure de son foncier représentent des obstacles réels, pas forcément insurmontables mais dont il conviendra de se préoccuper.
Réunir l’environnement technique adéquat
55Une filière de production structurée n’est pas une entité autarcique, totalement indépendante du milieu qui l’entoure. Pour en assurer la mise en place et le développement, il convient donc d’établir les articulations et les synergies nécessaires avec le tissu économique local.
56Un premier atout est la présence de structures de recherche, fondamentale et appliquée, à même d’apporter l’appui scientifique et technique nécessaire. Dans le domaine qui nous intéresse ici, les compétences recherchées émaneront principalement :
des laboratoires de chimie et de biochimie qui se chargeront de la connaissance fondamentale de la composition de la plante (ou autre ressource) mais qui assureront aussi, par exemple, la mise au point des méthodes d’analyse nécessaires au suivi des programmes de sélection agronomique ou à l’évaluation des ressources sauvages. Si la partie connaissance fondamentale peut être assurée par un laboratoire géographiquement éloigné, la partie analytique doit impérativement être réalisée sur place. La rapidité de réponse et l’implication de laboratoires de chimie et/ou de biochimie dans les programmes de sélection sont des facteurs clés du succès.
des laboratoires de biologie au sens large : là aussi, la partie fondamentale (botanique, écologie…) peut être effectuée par des laboratoires éloignés. En revanche, les domaines appliqués, en particulier l’agronomie et les sciences conjointes, doivent impérativement disposer à la fois de laboratoires sur place et de moyens d’expérimentation « au champ », sous forme de parcelles d’essais ou de fermes expérimentales.
57Un deuxième atout est l’existence sur le territoire de filières économiques proches, dont les moyens techniques, les infrastructures et le savoir-faire pourront être utilisés en coopération.
58L’horticulture constitue à cet égard un bon exemple. Ses moyens techniques et son savoir-faire sont nécessaires à la production en masse de semences, de jeunes plants, à la multiplication des plantes, à la propagation et à la conservation in vitro du matériel génétique d’intérêt.
59Pour les phases de traitement industriel, la présence d’une industrie alimentaire peut se révéler très intéressante en fournissant des possibilités de première transformation sur place (voir le jus de nono produit par l’entreprise Jus de Fruits de Moorea pour la société Morinda). Dans le même ordre d’idées, le recours à des systèmes de séchage (fours) employés en industrie alimentaire peut être précieux pour la déshydratation de ressources végétales et leur préservation en vue d’une utilisation ultérieure. L’absence de cette possibilité technologique est souvent un obstacle au bon développement de la filière. La proximité technologique entre l’agro-alimentaire et les industries de première transformation des ressources naturelles permet une synergie qui doit être exploitée par un recensement systématique des possibilités technologiques offertes sur place.
60En règle générale, une bonne connaissance de l’environnement technico-industriel local est un préalable important. Ce travail d’inventaire et de mise en réseau des potentialités offertes permet un gain de temps et de moyens appréciable.
61Au-delà de ce travail local, un appui doit être recherché auprès d’organismes spécialisés de la filière plantes médicinales et aromatiques. Outre l’Onippam déjà cité, on mentionnera des centres techniques comme l’Iteipmai ou autres, spécialisés dans la recherche agronomique. Leur expérience, à la fois technique et économique, de ce secteur qui se présente comme une multitude de micro-marchés, sera précieuse.
Apprécier l’environnement « psychologique »
62La volonté exprimée par les producteurs potentiels de ressources naturelles de s’engager dans cette voie est un facteur essentiel de réussite, faute de quoi la démarche est condamnée à plus ou moins long terme, quelle que soit la volonté des autorités politiques et administratives de privilégier cette option. L’exemple de la filière nono et des signes comme la mise en place du GIE monoï sont à cet égard des éléments encourageants. En effet, l’auto-organisation des producteurs, avec le soutien des autorités, sous forme de coopératives ou de groupements de producteurs est un signe positif de leur engagement dans cette démarche, et peut faire envisager par la suite la mise en place d’un instrument de régulation des marchés permettant la gestion des crises.
Les conditions de pérennisation des filières
63Une fois la filière mise en place, il importe d’assurer son avenir. Dans cette optique, il convient d’agir sur différents registres.
64Les actions de communication sont parmi les premières à étudier. La production d’une ressource naturelle, brute ou transformée, doit s’accompagner de sa promotion.
S’il s’agit d’une matière brute ou peu transformée, destinée à être utilisée comme ingrédient de formulation, quel que soit le secteur économique visé, il est judicieux de travailler avec un distributeur, de préférence international, bien introduit chez les utilisateurs potentiels. Ce dernier sera le plus à même de procéder au travail long et fastidieux d’approche et de démarchage des clients. En parallèle, des actions de marketing direct (participation aux salons professionnels internationaux, site Internet, publicité dans la presse écrite…) peuvent être mises en œuvre, éventuellement en partage de frais avec le distributeur.
S’il s’agit d’un produit fini, la communication dépendra de la stratégie de marketing/vente envisagée. Mais dans tous les cas, s’agissant de produits originaires d’un territoire géographiquement isolé comme la Polynésie française, une stratégie Internet est le minimum requis.
65Une R&D prospective doit également être définie. Cette action peut être gérée par les organes professionnels de producteurs. Ses tâches consisteraient :
à prévoir (si possible) l’évolution technologique du produit et à planifier les travaux de développement à effectuer ;
à lancer des programmes d’amélioration génétique et/ou agronomique ;
à développer des programmes de caractérisation et d’objectivation des activités biologiques des ressources naturelles produites ;
à mettre en place des programmes d’étude pour défendre le produit contre les imputations de nocivité dont il pourrait faire l’objet. Il s’agirait d’entreprendre, par exemple, des études toxicologiques sur le modèle de l’étude clinique lancée par les producteurs français d’huiles essentielles de lavande et de lavandin. Le kava entre bien dans ce cadre : la mise en place d’études toxicologiques visant à préciser son innocuité ou les conditions de son éventuelle toxicité est le type même de tâche qui pourrait être gérée par une structure scientifique, émanation d’une interprofession territoriale ou régionale.
66À partir du moment où un produit est entré en production, la démarche initiale de prospective économique est à poursuivre avec un contenu nouveau. Il s’agira d’évaluer l’évolution des marchés existants, d’identifier de nouveaux marchés, d’étudier la concurrence. Cette veille économique permettra également de piloter la mise en place des programmes scientifiques nécessaires et d’assurer les arbitrages pour l’attribution des moyens requis.
67En conclusion, il est difficile de donner des orientations plus précises concernant la mise en place de filières de production, compte tenu du caractère très prospectif de cette étude. Il convient toutefois de souligner derechef les points suivants :
Ces actions de développement sont à conduire à partir des demandes du marché.
Elles conservent un caractère aléatoire lié au succès des produits sur le marché.
Du fait de la taille et de l’isolement de son territoire, mais aussi de la nature des produits dont il s’agit, il semble opportun pour la Polynésie française d’insérer ses actions autant que faire se pourra dans une démarche régionale, au sein de la Communauté du Pacifique Sud.
Enfin, le souci d’assurer la réussite commerciale durable des produits issus de la biodiversité polynésienne, et donc la pérennité des filières qui les produisent, implique de concevoir et de mettre en place un dispositif de protection légale bien adapté aux produits eux-mêmes et aux marchés visés. Tel est l’objet du développement suivant.
Principes et modalités de protection des produits
68Quelles sont les dispositions permettant de commercialiser de façon rentable et durable des produits issus de la biodiversité polynésienne, et ainsi d’optimiser leur valorisation économique ? Donner à ces produits une identité juridiquement reconnue permet de protéger de la concurrence, de l’adultération et de la contrefaçon, leurs caractéristiques tant matérielles qu’intellectuelles, autrement dit, l’authenticité des substances et/ou l’originalité des savoir-faire qui leur sont spécifiques.
69Mais avant d’examiner les types de protection envisageables, il convient de rappeler quelques considérations générales dont une démarche de protection doit tenir compte :
Une protection ne se justifie que s’il y a un marché, une demande réelle pour le produit, des débouchés au moins locaux, une certaine concurrence.
Toute protection ayant un coût, il convient d’estimer si les avantages attendus sont proportionnés à ce coût.
Les mesures de protection ne se substituent pas aux investissements nécessaires à la promotion de la qualité du produit concerné.
Deux types principaux de protection sont à distinguer
L’indication géographique (IG) : déclinée en appellation d’origine simple (AO) et appellation d’origine contrôlée (AOC), elle consacre le lien fort du produit à un terroir. Elle nécessite une bonne organisation des producteurs et de la filière, ainsi que le soutien des pouvoirs publics.
La marque : elle assure une bonne protection juridique au plan international. C’est le système qui prévaut dans une grande partie du monde, et notamment aux États-Unis.
70Marque et indication géographique ont en commun de protéger la réputation d’un produit, plutôt que l’innovation, mais aussi d’être bien adaptées à la protection des productions agricoles, et de s’appliquer à des marchés segmentés, où la concurrence se fait sur la différenciation des produits plutôt que sur le prix. Mais elles diffèrent de nature et d’extension (voir encadré ci-après), de sorte que leur coexistence sur un même marché n’est pas envisageable. Une indication géographique ne pourra s’imposer sur un marché où une marque homonyme existe déjà. Il convient donc d’opter pour l’un ou l’autre mode de protection, selon le produit concerné et selon le marché visé, sur la base de données très précises.
71Pour les mêmes raisons, toute suggestion en matière d’organisation/ réorientation de filières doit reposer sur une information très diversifiée et détaillée. Il serait à cet égard particulièrement précieux de disposer, pour de futures initiatives, d’un bilan de l’expérience AO « Monoï de Tahiti » et d’autres tentatives de développement de filières, mais aussi de suivre attentivement les initiatives régionales concernant la biodiversité, sa valorisation et la protection des ressources qui en sont issues.
Les indications géographiques (IG)
72Elles s’appliquent à un espace donné, pour un produit donné, et tous les producteurs présents dans la zone protégée peuvent en bénéficier à condition de remplir les conditions fixées par le cahier des charges. Ce sont donc des droits collectifs, inaliénables.
73Ces droits portent non pas sur l’innovation mais sur la réputation du produit, ce qui implique à la fois un certain savoir-faire dans la production, éventuellement des traditions, mais aussi une reconnaissance du produit et de ses particularités de la part du public. Les IG permettent ainsi de développer un marché visant une clientèle de consommateurs sensibles aux notions de terroir, d’environnement, de traditions socio-culturelles. En revanche, elles ne sont pas adaptées aux « nouveaux produits », ou n’en concerneront que la matière première. Pour obtenir une indication géographique, il faut en effet que l’application que l’on se propose de valoriser soit la même que l’utilisation traditionnelle. Signalons que, dans l’Union européenne, elles peuvent se présenter sous plusieurs déclinaisons (« appellation d’origine », « indication géographique protégée », « spécialité traditionnelle garantie »). Si le marché visé est le marché européen, cela offre la possibilité de choisir la formule la mieux adaptée au produit à protéger.
74Elles réclament un fort encadrement institutionnel et organisationnel : conseil technique, assistance juridique, formation. En revanche, les besoins technologiques sont faibles.
75Les indications géographiques en tant que telles font l’objet d’une protection internationale depuis l’accord de Lisbonne (1958) pour la « Protection des appellations d’origine et leur enregistrement international ». Les indications géographiques doivent d’abord faire l’objet d’une protection dans le pays d’origine pour pouvoir prétendre à l’inscription dans ce registre international, géré par l’Ompi3. La protection conférée est très forte, et les critères si stricts que seuls 20 pays ont adhéré à l’accord, ce qui en réduit considérablement la portée. Ce système international, réaménagé par l’accord Adpic4, bénéficie essentiellement aux pays européens qui représentent 95 % des appellations enregistrées.
76La protection internationale des indications géographiques est explicitement garantie par l’accord Adpic (articles 22 à 24). Les produits déjà protégés par une indication géographique dans leur pays d’origine le sont dans l’ensemble des pays membres, et il est impossible d’utiliser comme nom de marque un nom protégé par une appellation géographique. Il existe toutefois des exemptions à cette protection :
Si le nom est considéré comme générique et déjà largement employé sans référence à la zone d’origine initiale du produit ;
Si le nom a déjà été déposé comme nom de marque avant la demande de protection par une indication géographique. Autrement dit, quand des noms de produits associés à une origine géographique, voire des toponymes, ont déjà été déposés comme noms de marques par des firmes étrangères, il est trop tard, la protection n’est pas rétroactive ;
Si le produit a cessé d’être fabriqué dans la région dont il est originaire ou s’il n’est pas protégé dans son pays d’origine.
77En résumé, on soulignera que l’IG est surtout adaptée aux produits finis directement vendus aux consommateurs. Appliquée à des ingrédients intermédiaires utilisés par des industriels dans des formulations, elle induit en revanche des contraintes de formulation supplémentaires (pourcentage incorporé) qui sont susceptibles d’entraver le développement de son utilisation. En témoigne l’exemple de l’huile essentielle de lavande dont l’AOC a failli disparaître par manque d’utilisation ; à l’heure actuelle, la principale utilisation de cette AOC concerne, non pas les gros volumes d’huile essentielle utilisés par les industriels, mais les petites quantités vendues directement pour l’aromathérapie. Ce type de certification est également de peu d’intérêt pour le secteur pharmaceutique, qui ne peut le valoriser.
Les marques
78Contrairement aux indications géographiques, les marques sont la propriété d’individus ou de groupes qui peuvent les céder, les vendre ou les léguer et qui conservent le droit d’utiliser leur marque s’ils délocalisent la production. Les produits concernés peuvent éventuellement évoquer la tradition ou une relation particulière au terroir si tels sont les attributs que la communication de l’entreprise entend mettre en avant, mais elle n’est en aucun cas tenue d’apporter la preuve de telles allégations. De ce fait, la marque peut protéger de nouveaux produits, des utilisations nouvelles de plantes qui sont l’objet de pratiques traditionnelles, ou des préparations dans lesquelles l’ingrédient traditionnel n’intervient que de façon marginale.
79La plus forte contrainte de ce mode de protection est probablement son coût global élevé : coût de la procédure de dépôt de la marque, coût de l’effort (permanent) de marketing, coût des services juridiques indispensables pour surveiller et poursuivre les contrefaçons et autres atteintes au droit des marques, etc.
80Dans le cadre de cette expertise collégiale, deux déclinaisons de la marque peuvent être intéressantes : d’une part les marques collectives ; d’autre part, les marques certifiées.
Les marques collectives sont détenues et gérées par un groupement de producteurs, un syndicat professionnel ou une association, par exemple. Comme c’est le groupement de producteurs détenteur de la marque collective qui décide des conditions de son utilisation, il y a par cette voie, possibilité d’installer un cadre assez proche de celui de l’indication géographique, mais nettement moins contraignant. Il n’y a par exemple pas d’obligation de démontrer le caractère traditionnel de l’activité, ni l’origine locale de tous les intrants.
Ces marques collectives peuvent être certifiées, ce qui implique le recours à une organisation tierce garantissant que les arguments mis en avant par les détenteurs de la marque (origine du produit, méthode de production employée…) sont authentiques. Ce mode de protection est utilisé notamment par des communautés amérindiennes pour le marketing de leurs produits artisanaux. Très développé en Amérique du Nord, il commence à s’étendre en Amérique du Sud : la certification est assurée par les organisations autochtones ou les administrations en charge des autochtones. Dans ce cas, il s’agit alors de valoriser les savoir-faire traditionnels plus que la matière première.
Marques vs IG
81Aux États-Unis et au Japon, les noms de marques qui font référence à une origine géographique sont très fréquents. Ainsi, le dépôt de toponymes amazoniens comme noms de marque au Japon a récemment fait grand bruit au Brésil, où il a été dénoncé comme une nouvelle forme de biopiraterie. Dans les conflits pouvant surgir entre marque et indication géographique, cette dernière, on l’a signalé plus haut, ne pourra s’imposer sur un marché où une marque homonyme existe déjà (par exemple, « Tahitian noni » et les multiples noms proches déposés par Morinda Inc. aux États-Unis et en Europe). Il est donc inutile d’investir dans une indication géographique si on vise les marchés des États-Unis et du Japon. La marque, y compris à référence géographique, est plus adaptée.
82Une double protection est possible. Certains producteurs à l’intérieur d’une zone couverte par une indication géographique peuvent commercialiser leur produit sous un nom de marque, ce qui leur permettra de tirer seuls les fruits de stratégies de communication ou de marketing plus ciblées et d’investissements publicitaires.
Autres options envisageables en fait de « signes de qualité »
83On peut envisager la certification « bio » selon les directives européennes en vigueur. Il s’agit a priori d’une solution tout à fait conforme au contexte local :
Elle est adaptée aux productions de petite surface.
Elle nécessite un surcroît de main-d’œuvre par rapport au mode de production dominant.
Elle bénéficie d’une bonne image auprès des consommateurs des pays développés.
Elle permet un prix de vente plus attractif.
Le mode de production « bio » est maintenant reconnu pour les ingrédients et les produits de cosmétologie.
84Cette certification est particulièrement adaptée aux produits alimentaires et désormais, dans un contexte qui reste à étudier en raison de la nouveauté des textes, aux produits cosmétiques. Dans le secteur pharmaceutique, cette certification ne présente quasiment aucun intérêt, les médicaments étant exclus du champ de la certification bio qui, de plus, renchérit la matière première.
85Sur un autre registre, il sera possible, au cas par cas, de discuter avec l’utilisateur des possibilités d’un contrat d’exclusivité sur des productions locales. Cette modalité de travail peut avoir un effet fortement incitatif sur l’utilisateur en lui permettant de développer un marketing exclusif.
86Dans ce cas de figure :
L’industriel doit s’engager en termes de volume et/ou de chiffre d’affaires à réaliser pour ne pas simplement bloquer la voie à un concurrent.
Le contrat doit porter sur le long terme.
L’utilisation faite de l’image doit être contrôlée par le territoire concerné.
87En conclusion de la réflexion sur les modes de protection, il convient d’attirer l’attention sur la nécessité de distinguer de façon permanente et claire les deux registres qui se trouvaient rassemblés dans le questionnement soumis à l’expertise collégiale. Étudier les possibilités de commercialiser de façon rentable et durable des produits tirés de substances naturelles est en effet une tout autre question qu’identifier des substances à l’activité prometteuse. Le premier pas dans la perspective d’une valorisation économique des substances naturelles est le passage de la substance identifiée comme potentiellement intéressante à un produit. À cet égard, l’endémisme ou l’originalité des substances ne sont pas forcément des critères adéquats pour définir la spécificité, voire l’unicité des produits. Ce ne sont pas, en tout cas, des critères suffisants. Sont déterminants aussi les techniques ou savoir-faire mis en œuvre dans la transformation ou l’élaboration d’un produit commercialisable, ses différences par rapport à des produits comparables, les coûts correspondants, etc. Un produit peut être unique sans être tiré de substances naturelles uniques, de même que le caractère unique de certaines substances naturelles ne sera pas forcément reconnu comme tel par le marché. C’est l’objet même des marques que de créer de la différenciation et de distinguer certains produits, à l’identité forte, d’autres plus génériques.
88Il n’est par ailleurs pas évident qu’il faille à tout prix et dans tous les cas rechercher la différenciation, la spécialisation à l’extrême ou la production pour des marchés de niche, par définition limités. La plupart des ressources identifiées dans le cadre de l’expertise sont présentes ailleurs dans le Pacifique Sud ou pourraient y être mises en culture. Il faut se poser la question de l’opportunité de développer pour des produits proches une différenciation forte, et donc une forte concurrence, alors qu’une approche régionale concertée pourrait se révéler plus avantageuse pour l’ensemble des parties.
LES OPPORTUNITÉS DE VALORISATION À COURT TERME
89C’est ici que se rejoignent les deux axes de travail de l’expertise collégiale. En effet, le tableau 6 présenté ci-après permet de passer des espèces dont les propriétés sont détaillées dans les fiches correspondantes aux produits qui en sont issus et aux secteurs d’activité dont relèvent ces produits (colonne 1).
90Croisant les apports des chapitres spécialisés, les indicateurs figurant aux colonnes 2 à 5 (état de la recherche-développement, impacts environnemental et socio-économique, points forts et points faibles prenant en compte notamment les contraintes réglementaires) visent à éclairer les opportunités de développement des principaux produits polynésiens. Ils sont complétés par des commentaires et recommandations (colonne 6) qui précisent le pronostic et orientent la démarche vers des actions considérées comme de première importance.
91Élargissant le champ du tableau 4 à l’ensemble des substances retenues dans le groupe 1, cette grille constitue ainsi le « tableau de bord » de leur valorisation et la matrice des conclusions de l’expertise dans le domaine des substances naturelles d’origine végétale.
LES PERSPECTIVES DE VALORISATION
L’exemple des substances naturelles marines
92Au regard de la grande biodiversité marine et du niveau actuel de connaissance qu’on en a, mais aussi de la pluralité des applications potentielles, il apparaît à l’évidence difficile de concevoir une stratégie unique de valorisation. Il s’agira plutôt de stratégies diversifiées en fonction des organismes et des marchés considérés.
93Le tableau présenté ci-après illustre cette double diversité, celle des organismes marins et celle des secteurs d’application, qui justifie la pluralité des options stratégiques.
94Pour mieux éclairer ce tableau, rappelons que :
Du fait de l’étendue en latitude de son territoire, la Polynésie française présente une diversité biologique intéressante, à savoir des organismes tropicaux au nord et tempérés aux îles Australes.
Du fait de la dispersion géographique des archipels de Polynésie, l’inventaire taxonomique reste limité aux principales îles des archipels de la Société, des Tuamotu et des Australes (Atelier biodiversité de Rapa en 2002).
Par ailleurs, seuls les groupes majeurs, coraux, poissons, mollusques, échinodermes et algues, ont reçu une attention particulière, tandis que la connaissance des autres groupes d’invertébrés reste à ce jour fragmentaire.
95Dans ce contexte, on ne trouve pas motif à envisager un axe de valorisation plutôt qu’un autre. La valorisation des micro et macro-organismes est en outre nécessairement différente selon les voies d’obtention des extraits, tant au niveau du pré-criblage qu’à celui du développement.
96En revanche, comme il a été dit en conclusion de la présentation du potentiel marin, la constitution de collections apparaît, à court et moyen terme, comme l’orientation la plus pertinente en fait de valorisation. D’une manière générale, une telle orientation devrait comporter ces différents volets :
échantillonnage ;
mise en place de collections ;
constitution d’une banque de molécules et gestion de cette banque ;
approfondissement de la connaissance de ces molécules (propriétés chimiques, physico-chimiques, activités biologiques) via des études spécifiques et/ou des actions de criblage orientées ;
développement de ces molécules (choix de stratégies) ;
production de molécules et/ou d’extraits à l’échelle pré-industrielle et industrielle avant commercialisation.
97Sans entrer plus avant dans le détail de ce dispositif (voir la contribution Guézennec-Débitus sur CD-ROM), soulignons ici qu’il convient de poser très tôt les questions de propriété intellectuelle, de dépôt de micro-organismes, de brevets (avec possibilité de copropriété), de cession de licences (brevets, exploitation) et de propriété industrielle.
Bioprospection et collections : pour la constitution d’un pôle technologique en Polynésie française
Considérations générales
98En ce qui concerne les activités de bioprospection, le début des années 1990 a été marqué par la véritable révolution qu’a constituée, avec l’introduction de la robotique dans les techniques de criblage pharmaceutique, le développement des techniques de criblage automatisées à haut débit (HTS : High throughput screening). Sont à l’heure actuelle principalement concernés les secteurs santé-médicament, cosmétologie et agrochimie.
99Pour alimenter leurs installations de HTS, les firmes achètent des bibliothèques entières de produits ou d’extraits. La fourniture d’extraits végétaux ou animaux, terrestres et marins, est ainsi devenue une activité économiquement intéressante pour une institution locale, une communauté ou une entreprise.
100Dans le cadre posé par la CDB, la mise en œuvre des programmes de bioprospection est négociée sous la forme juridique de conventions entre les États fournisseurs des ressources, qui cherchent à valoriser leurs « gisements », et les organismes utilisateurs (firmes ou institutions scientifiques).
101Les avantages attendus de cette activité nouvelle sont de plusieurs types :
Des revenus financiers : produit de la vente d’échantillons ou d’extraits, recettes des activités de criblage et d’identification des composés bioactifs, royalties perçues sur les applications industrielles des principes actifs fournis ou dérivés des échantillons vendus…
Des retombées au plan scientifique et au plan socio-environnemental, notamment en termes d’emplois.
102Cela étant, l’enjeu pour la Polynésie française est de développer ces activités sur son territoire dans la gamme la plus étendue possible, afin de bénéficier au maximum de leurs retombées de toute nature.
Pour un pôle technologique « substances naturelles » en Polynésie française
103Considérant que pour 80 à 90 % des plantes endémiques il n’existe aucune référence bibliographique témoignant d’études scientifiques, et que, de ce fait, la majorité des plantes endémiques n’a pu être retenue par l’expertise, on est fondé à dire qu’en termes de connaissance de la ressource, la situation est tout à fait comparable à celle des substances marines. Aussi, à l’instar de ce qui a été recommandé pour les ressources du domaine marin et dans les mêmes formes, proposons-nous la création d’un pôle technologique ayant pour vocation le développement des activités de bioprospection en Polynésie française. Ce pôle regrouperait les activités de prospection et de collecte des substances ou organismes, les activités de conservation, les activités de caractérisation et d’extraction des molécules d’intérêt potentiel en lieu et place et pour le compte d’organismes scientifiques ou de firmes industrielles.
104Ce pôle aurait en charge la création et la gestion :
de souchothèques pour les micro-organismes marins ;
d’extractothèques : herbiers, échantillons et extraits végétaux ou marins (pour une estimation du nombre d’échantillons récoltables) ;
de chimiothèques : collections de molécules isolées en laboratoire.
105Il assumerait ainsi, dans la fourniture de matériel biologique, un rôle plus diversifié et plus « stratégique » que celui de simple pourvoyeur et, par là même, pourrait être en position de susciter, voire d’initier des projets de valorisation en collaboration avec le monde de la recherche et l’industrie. Si, jusqu’à présent, le choix a prévalu de laisser en ce domaine l’initiative au secteur privé, d’autres orientations sont possibles et parfaitement compatibles avec le souci de préserver, dans un partenariat public-privé indispensable, l’espace de déploiement et les intérêts des deux parties. On peut ainsi envisager l’émergence d’un organisme public ou d’intérêt public gérant les collections et pilotant l’ensemble du dispositif.
106Dans la conception et la mise en œuvre d’un tel projet :
Il serait judicieux de se rapprocher des responsables du programme Chimiothèque nationale mené par le CNRS.
Du fait de la dispersion géographique et de l’endémisme insulaire élevé, il convient de prévoir l’organisation de campagnes de récoltes strictement contrôlées, accompagnées de mesures conservatoires, avec mise en culture et conservation in vitro des espèces les plus menacées.
107En ce qui concerne le dispositif à mettre en place (et les équipements de base nécessaires), sont à réunir :
Une plate-forme d’échantillonnage comprenant un herbier et des collections correctement gérées et actualisées, ainsi que l’équipement permettant la conservation ex situ des échantillons végétaux ou marins.
Une plate-forme d’extraction et de formatage des extraits, incluant :
Le fractionnement et la mise en plaques standards dites « plaques mères », avec la constitution d’un stock d’échantillons disponibles pour essais pharmacologiques ultérieurs.
L’isolement et la déréplication pour le repérage rapide des composés ubiquistes peu intéressants. L’équipement de base est constitué d’un appareillage du type robot diluteur adapté au moyen ou haut débit, le moyen débit paraissant a priori suffisant. Ces opérations peuvent être réalisées en Polynésie où existent plusieurs équipes performantes de chimie.
Le criblage biologique spécifique : pour la sélection des extraits actifs sur les cibles choisies au moyen de tests biologiques ; en effet des tests fiables et facilement réalisables peuvent être développés et utilisés par les équipes locales, en collaboration avec les équipes de recherche en biologie médicale, comme celles existant à l’Institut Malardé.
108Quant au criblage biologique robotisé (randomisé), outre le problème du coût des équipements nécessaires, cette étape implique de disposer de spécialistes en pharmacologie et en ingénierie (miniaturisation des tests, robotisation, puis tests de confirmation), double condition qui semble difficile à remplir localement.
Intérêt et faisabilité du pôle technologique
109Ce rapide aperçu des conditions d’une activité de bioprospection en Polynésie française permet de dégager une conclusion importante. Si le dernier aspect mentionné apparaît hors de portée de la Polynésie française, toutes les autres activités que l’on a évoquées peuvent y être avantageusement développées. La maîtrise de la production des plaques de tests destinées aux opérations de criblage biologique permet en outre de diversifier les partenaires. Il s’agit bel et bien ici d’activités de valorisation, au sens le plus directement économique, c’est-à-dire d’activités productives, créatrices de recettes et créatrices d’emplois, sans parler de l’élévation du niveau de formation des jeunes Polynésiens qui ne pourrait que s’en trouver favorisé.
110Une telle orientation suscite l’intérêt des entreprises de biotechnologies. En effet, biothèques et extractothèques leur évitent d’une part d’assumer elles-mêmes les formalités liées à la demande d’APCC, d’autre part de se lancer dans des opérations de prospection « à l’aveugle ». Des firmes comme Servier, Astra Zeneca, Pharmamar ou Pierre Fabre se sont montrées, dans d’autres contextes, favorables à un tel système de mise à disposition de séries d’échantillons présélectionnés. Qui plus est, l’institution de collections et extractothèques permet d’initier des projets de R&D et d’y associer plus étroitement les acteurs locaux. Enfin, elle offre, dans le cas des extractothèques, un moyen de surmonter partiellement les délicats problèmes de contrôle évoqués dans l’approche juridique. Les extractothèques fournissant non les souches mais des extraits, l’industriel désireux de développer un produit doit donc (sauf à se lancer dans la synthèse) revenir vers la collection. Ainsi l’accessibilité peut-elle être contrôlée à la source, du moins dans toute une première phase du processus de développement.
111L’institution de collections de micro-organismes apparaît donc tout particulièrement indiquée pour tout un ensemble de raisons ; on peut y ajouter le réel succès de plusieurs expériences de ce type, étrangères ou locales, publiques ou privées. En Australie, l’Australian Institute of Marine Science (AIMS) est actif depuis 1972. En Amérique centrale, l’Instituto Nacional de Biodiversidad du Costa Rica (INBIO), institution scientifique privée d’intérêt public, est spécialisé dans la collecte, le traitement, la production et le partage d’informations sur la biodiversité. Dans la région de l’océan Indien et plus particulièrement à la Réunion, l’Agence pour la recherche et la valorisation marines (Arvam) a pour mission d’assurer un relais entre recherche scientifique, et responsables de l’environnement et du développement5. Citons encore l’entreprise privée espagnole Pharmamar qui est un des leaders du secteur ou, à Tahiti même, la firme Biolib, qui développe une double activité d’extraction et de criblage à partir d’une collection de bactéries et cyanobactéries.
112Pour mener à bien un tel projet de pôle technologique, quatre éléments sont particulièrement importants :
Étant donné qu’il n’existe sur place que peu de structures privées disposant des moyens adéquats pour s’engager dans cette voie, les pouvoirs publics auront à jouer un rôle décisif de soutien aux porteurs de projet, qui peuvent dans de nombreux cas être des institutions publiques (des Epic, par exemple). Ils peuvent même tenir un rôle « d’amorçage », en créant des structures d’incubation. La mise en place de souchothèques ne nécessitant pas des investissements lourds, un tel engagement ne paraît pas hors de portée de la Polynésie française.
Un atout précieux est constitué par l’existence de structures locales scientifiques et techniques sur lesquelles la création de souchothèques pourra prendre appui, en particulier les laboratoires concernés de l’Université de Polynésie française, de l’Ifremer, de l’Institut Louis-Malardé, etc. Ce dernier notamment, sous réserve que son personnel et ses moyens techniques soient renforcés, pourrait prendre en charge une partie des opérations de prestation de services. En effet, un laboratoire de recherche sur les substances naturelles y a été institué en 1991 ; depuis 1998, l’activité du laboratoire se concentre sur l’analyse de la composition chimique associée aux propriétés biologiques de certaines espèces employées par les tradipraticiens de la région Pacifique. Dynamiser et coordonner ces infrastructures, telle pourrait être une des fonctions essentielles de la plate-forme biotechnologique Gepsun.
Si l’idée en est retenue, le pôle technologique polynésien aura sans nul doute intérêt à s’inscrire dans le système des Centres de ressources biologiques (CRB) en cours de construction. Cette initiative de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) vise à regrouper sous l’appellation « CRB » les collections végétales, animales, microbiennes et humaines, avec une double finalité : d’une part, inciter à la rationalisation du contenu des collections existantes, aujourd’hui éparses et hétérogènes, et en promouvoir la qualité ; d’autre part, faire de ces centres un instrument stratégique en développant leurs activités de service (stockage, mise à disposition, etc.) pour mieux en valoriser le contenu par des coopérations scientifiques. Sous l’égide du ministère français de la Recherche, est en cours de constitution un réseau de collections auxquelles l’administration entend conférer une sorte de « label CRB » assorti d’une aide financière dès lors qu’elles accepteront de souscrire à certaines règles désormais consignées dans une « charte » : règles de conservation et de transformation des ressources biologiques, déclaration de cette activité auprès du ministère chargé de la Recherche, dégagement des crédits nécessaires en personnel et équipements, etc. Relier l’initiative polynésienne à ce système des CRB permettrait non seulement de conforter « l’assurance qualité » aux yeux des partenaires, chercheurs et industriels mais aussi d’obtenir des financements publics, voire une aide au développement des coopérations scientifiques puisqu’un Comité consultatif des ressources biologiques a été mis en place en février 2001 avec mission, entre autres, de développer des liens entre les CRB et les industries du secteur des biotechnologies.
Enfin, prendre ce cap implique d’avoir bien mesuré les implications juridiques du projet. L’institution de collections rend en effet nécessaire de préciser le statut juridique des extraits ainsi mis à disposition. Les relations juridiques bilatérales entre les organismes fournisseurs et leurs partenaires sont en général clairement fixées par contrat. Il s’agit le plus souvent d’un contrat de mise à disposition de matériel (ATM). Mais il peut aussi s’agir d’un contrat de prestation de service si le partenaire sous-traite certaines recherches à l’organisme fournisseur. Quel qu’en soit le type, le contrat fixe donc les droits et obligations de chacune des deux parties. Il laisse toutefois indéterminée la question des relations juridiques unissant ces partenaires au pays sur le territoire duquel les spécimens ont été prélevés. Deux points notamment sont à préciser : l’organisme détenteur des collections en est-il simplement gestionnaire ou en est-il propriétaire ? À qui, dans l’un et dans l’autre cas, profiteront les avantages éventuels ? De façon générale, il n’y a aucune raison que ces organismes, qu’ils soient publics ou privés, qu’ils soient ou non promus par l’autorité publique, échappent à la future obligation d’APCC et ce pour deux raisons au moins : primo, parce que l’autorité publique doit pouvoir évaluer au plus près les incidences écologiques de leur activité de prospection systématique ; secundo, parce que les ressources des collections auront été, pour la plupart, acquises sur le domaine public et, pour certaines, sur les recommandations ou selon des indications fournies par les populations locales. Or, ces populations pourraient en arriver à s’opposer aux activités de valorisation si, à terme, la mise au point d’inventions devait léser les intérêts collectifs, ce qui conduit à prendre en considération la question des intérêts collectifs dans le système d’APA.
DROITS DES POPULATIONS LOCALES ET INTÉRÊTS COLLECTIFS
De quels intérêts collectifs parle-t-on ?
113Le régime juridique de l’accès à la biodiversité a été pensé par les rédacteurs de la CDB comme un dispositif de nature à satisfaire deux objectifs considérés comme intrinsèquement liés : l’équité des transactions et l’utilisation durable de la biodiversité. Sauf à se heurter, à terme, à l’opposition des populations, ce système ne peut se dispenser de prévoir la réaffectation d’une part des avantages issus de la bioprospection au profit d’actions de conservation de la biodiversité et au profit des populations locales. Autrement dit, le système n’a d’avenir, au plan scientifique, technique et politique, que si les retours de bénéfices ne sont pas entièrement captés par les institutions d’État mais sont bel et bien réaffectés pour partie.
114En ce qui concerne les actions de conservation, les modalités d’une telle réaffectation sont multiples, de l’affectation de fonds aux institutions en charge de la protection de l’environnement à la création d’un trust fund (sur le modèle indien, par exemple). L’important est que le texte relatif à l’APA en prévoie expressément le principe.
115S’agissant des populations locales, les choses sont plus complexes. L’article 8 (j) de la CDB dispose que chaque État :
116« dans la mesure du possible et selon qu’il conviendra [...], sous réserve des dispositions de sa législation nationale, respecte, préserve et maintient les connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales qui incarnent des modes de vie traditionnels présentant un intérêt pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique et en favorise l’application sur une plus grande échelle, avec l’accord et la participation des dépositaires de ces connaissances, innovations et pratiques, et encourage le partage équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces connaissances, innovations et pratiques. »
117Cette disposition prend donc acte de ce que, parmi les inventions dont les ressources biologiques sont le support, certaines s’appuient sur l’apport des populations autochtones ou locales. Il est donc logique que ces populations soient associées au système institué par la CDB – consentement à la collecte, partage des avantages qui en découlent – et ce d’autant plus que ces populations et leurs pratiques sont un facteur essentiel de la gestion et de l’utilisation durable de la biodiversité. Dans ce souci, certains États ont prévu, parallèlement aux travaux d’institutions internationales, une participation des populations autochtones et locales au système de l’APA. Le Secrétariat général de la Communauté du Pacifique Sud vient lui-même d’élaborer un « Cadre juridique régional pour la protection des savoirs traditionnels et des expressions de la culture ». Ce texte examine la question de la protection et de la rémunération des savoirs, en réponse à une demande de la région qui s’estime confrontée à une exploitation accrue et à une commercialisation inappropriée de ses savoirs traditionnels et expressions culturelles (pour une présentation plus développée de ce texte, vu sous l’angle de sa pertinence dans le contexte propre de la Polynésie française, voir la contribution Noiville sur CD-ROM).
La Polynésie, un cas « à part » ?
118Collectivité à forte identité culturelle, la Polynésie, dit-on parfois, ne connaîtrait pas pour autant de sentiment marqué d’autochtonie. Par ailleurs, l’architecture institutionnelle française empêcherait de toute façon de reconnaître des droits spécifiques aux communautés autochtones. Ce n’est pas ici le lieu d’entrer dans une discussion de fond de ces deux assertions ; en revanche, on soulignera qu’il convient de prendre en compte deux réalités :
Une réalité juridique : quoi qu’il en soit du sentiment d’autochtonie en Polynésie française, le territoire comprend bel et bien des communautés locales qui participent et participeront à la fourniture de ressources. Or, étant donné que la CDB met sur un pied d’égalité communautés villageoises et populations autochtones (cf. l’art. 8-j), le droit au « partage équitable » concerne toutes les communautés. Ajoutons que, juridiquement, un État peut fort bien ne pas reconnaître en droit l’existence de communautés autochtones ou indigènes tout en leur reconnaissant des spécificités et en leur conférant en fait certains avantages.
Une réalité sociale et économique : en Polynésie comme ailleurs, des savoirs (certes de nature et de valeur très diverses) sont bel et bien divulgués ou susceptibles de l’être par des villageois ou des tradipraticiens ; et ces savoirs constituent ou sont susceptibles de constituer un enjeu commercial. D’une manière ou d’une autre, il existera donc bien une contribution sinon active, en tout cas passive, de la population polynésienne au développement des futures innovations, et donc les droits de chacun – État, prospecteurs, communautés locales et autochtones – doivent être clairement fixés, faute de quoi un sentiment d’inéquité des transactions, voire d’iniquité, pourrait s’installer et des conflits d’intérêts se développer.
Notes de bas de page
1 Adoptées (à l’unanimité) en avril 2002 par la Conférence des parties (180 pays), les Lignes directrices de Bonn constituent un outil essentiel de la mise en œuvre de la CDB. Elles visent à assister les parties dans l’établissement des mesures législatives, administratives ou de politique générale sur l’APA ou pour la négociation des contrats en la matière. Elles énoncent les exigences fondamentales auxquelles doivent répondre ces contrats, précisent le rôle et les responsabilités tant des utilisateurs que des fournisseurs, les éléments qui doivent être pris en compte dans les accords relatifs au transfert de matériel et une liste indicative des avantages monétaires et non monétaires. Elles ont déterminé la mise en place d’un programme de renforcement des capacités pour permettre aux PED de mettre en œuvre les dispositions correspondantes de la Convention. Dans le même sens, les participants au Sommet mondial pour le développement durable organisé à Johannesburg en août-septembre 2002, ont demandé que les pays négocient, dans le contexte de la CDB, un régime international propre à promouvoir et à assurer un partage juste et équitable des bénéfices découlant de l’utilisation des ressources génétiques. Les Lignes directrices de Bonn feront certainement partie de ce cadre de travail plus vaste.
2 La notion de filière est ici entendue comme la structure économique permettant de mettre à la disposition du transformateur (industriel ou artisanal) de la matière première (végétale ou autre) nécessaire à son activité. La partie aval de cette filière (transformation industrielle en produit semifini ou fini) n’est pas incluse dans cette définition car elle est trop diversifiée.
3 L’Ompi, Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, est une agence des Nations unies qui compte 180 États membres. Sa mission est de « promouvoir la protection de la propriété intellectuelle » et de coordonner les politiques mondiales de brevets, droits d’auteur et marques déposées.
4 L’accord sur les Adpic (« Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce », en anglais TRIPS), signé en 1994 dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a pour but d’intégrer les droits de propriété intellectuelle (droits d’auteur, marques de fabrique ou de commerce, brevets, etc.) dans le système GATT/OMC.
5 Observant l’intérêt croissant suscité par les micro-algues en raison de leur implication dans les phénomènes d’écotoxicologie marine (prévention des risques de santé publique), mais aussi en raison de leurs potentialités pharmacologiques, l’Arvam a mis en place, avec le soutien du département et de la région Réunion, une banque de micro-algues isolées des fonds marins de la Réunion et des îles voisines (Phytobank). Chaque souche déposée dans la banque est identifiée, classée et travaillée en partenariat avec différents laboratoires (Cesac de l’université de Toulouse-III, laboratoire de cryptogamie du MNHN de Paris, etc.). Phytobank a déjà noué plusieurs coopérations avec des firmes industrielles.
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