Chapitre 4. Les aires protégées dans la mise en place des réseaux écologiques Gestion globale de la nature ou gestion des institutions de conservation ?
p. 113-133
Texte intégral
1Le concept de réseaux écologiques permet d’envisager un développement durable par le biais d’un zonage du territoire (Bonnin, 2008 ; Cedre, 2002). La simple identification du zonage n’est bien évidemment pas suffisante et l’intérêt de la recherche en droit repose surtout sur les implications d’un tel zonage en termes de régulation. Autrement dit, il importe de s’interroger sur les différentes normes qui peuvent s’appliquer à ces différentes zones. Dans quelle mesure une conservation stricte est-elle encore utile ? Dans quelles situations faudrait-il au contraire limiter les contraintes et utiliser des instruments plus incitatifs qui permettraient l’intégration des objectifs de conservation de la nature dans les politiques sectorielles telles que la politique des transports ou de l’agriculture ? L’objet de ce texte est donc d’évaluer les effets de l’émergence du concept de réseaux écologiques sur les aires protégées, qui de fait perdent l’exclusivité du rôle de conservation de la nature et de la diversité biologique.
2D’un point de vue conceptuel, les réseaux écologiques sont souvent appréhendés par l’utilisation d’un schéma qui représente les trois types de zones les plus couramment utilisées dans la réalisation des réseaux écologiques. Il s’agit des zones noyaux, des zones tampons et des corridors biologiques1 (Jongman et Pungetti, 2004 ; Sepp et Kaasik, 2002 ; Carrière et al., cet ouvrage). Reste à replacer les aires protégées existantes et à venir dans ce schéma.
3L’approche choisie ici est une approche volontairement internationaliste. Mais il importe de souligner l’importance des aires protégées nationales avant de limiter cette analyse aux espaces naturels protégés par une dénomination internationale. La plupart des pays ont développé leur propre système de classification d’espaces naturels, ceux-ci pouvant aller de régimes de protection stricts, comme dans le cas des réserves naturelles intégrales ou de certains parcs nationaux, à des régimes de protection moins contraignants, comme dans le cas des parcs paysagers, en passant par une protection ciblée et systématique de certains habitats ou écosystèmes (voir Rodary et Milian, cet ouvrage). L’introduction de réglementations internationales et européennes en matière de protection de la nature et de la biodiversité a encouragé les États à engager des actions coordonnées en vue d’identifier et de résoudre au niveau supranational les principaux problèmes posés par la conservation.
4Pour autant, la mise en place de réseaux écologiques est désormais préconisée par des déclarations et des textes juridiques2 et il importe de s’interroger sur la place et le rôle des aires protégées dans ces systèmes de conservation intégrée (encadré 1).
5Certaines organisations internationales assimilent les aires protégées aux zones noyaux des réseaux écologiques. Ainsi dans le cadre du réseau écologique alpin mis en place par le secrétariat de la Convention alpine, les zones noyaux sont constituées des aires protégées de grandes tailles (Réseau alpin, 2004). Le Conseil de l’Europe qui soutient la réalisation de ce réseau écologique paneuropéen considère, quant à lui, que les zones noyaux du réseau sont constituées des aires naturelles de grande valeur, qu’elles soient protégées ou qu’elles aient vocation à l’être. D’autres réseaux écologiques qui se mettent en place à d’autres échelles peuvent avoir adopté d’autres définitions (Bennett et Wit, 2001) et la place des aires protégées dans l’élaboration des zonages de territoire reste conflictuelle en l’absence de consensus sur ce thème (voir Carrière et al., cet ouvrage). Il n’en reste pas moins que la plupart des décisions politiques et textes juridiques visant à la mise en place de réseaux écologiques s’accordent sur le rôle des aires protégées en tant que zones noyaux (partie 1), mais elles peuvent aussi dans certains cas jouer un rôle de corridor (partie 2).
Les aires protégées comme zones noyaux
6Les aires protégées par une dénomination internationale se sont multipliées à partir des années 1970 (Rodary et Milian, cet ouvrage). Mises en place dans le cadre d’un texte international contraignant comme la Convention du patrimoine mondial (Paris, 19723) ou non contraignant comme la résolution du Comité des ministres qui met en place le diplôme européen, ces aires protégées sont inscrites sur une liste sans préjudice des droits exclusifs de souveraineté de l’État sur lequel elles sont situées (Kiss et Beurier, 2004). Les États acceptent par le biais du texte international fondateur de prendre des responsabilités vis-à-vis de la protection de ces zones naturelles. Le Conseil de l’Europe, précurseur en la matière, a, dès 1965, mis en place une liste de sites autour de l’attribution d’un diplôme européen. Il a été rapidement suivi par d’autres organisations qui ont aussi opté pour la protection des espaces naturels selon une optique de liste (encadré 1) telles que l’Unesco avec les sites du patrimoine mondial et les réserves de biosphère. L’inscription sur une liste de sites permet d’établir des échanges d’informations et de techniques entre les gestionnaires des espaces au sein de l’organisation internationale responsable, par le biais notamment de réunions périodiques. Cette organisation en réseau autorise des transferts de savoir-faire qui peuvent aussi être un facteur stimulant pour les différents acteurs. Cependant, l’utilisation du terme de réseaux d’aires protégées ou de réseaux de sites ne se justifie que par ces échanges entre les gestionnaires d’espaces à l’intérieur de l’organisation internationale. À l’exception de quelques espèces d’oiseaux pour lesquelles un réseau écologique pourrait être constitué d’îlots de nature non reliés entre eux, les réseaux écologiques impliquent une continuité territoriale que ne recouvrent absolument pas les réseaux de sites protégés au niveau international, le réseau des sites du patrimoine mondial de l’Unesco par exemple.
7Ces différentes listes d’aires protégées ont toutes un objectif principal de préservation de la biodiversité, mais répondent chacune à des objectifs spécifiques (1). L’évolution des modalités de la protection à l’intérieur (2) et à l’extérieur (3) de ces sites permet l’intégration d’objectifs secondaires qui visent aussi la protection de la « nature ordinaire ».
Des objectifs communs mais différenciés
8Certains réseaux de sites ont comme objectif la sauvegarde et la protection de sites exceptionnels. C’est notamment le cas du réseau de sites du patrimoine mondial. C’est aussi le cas des sites du diplôme européen qui vise à récompenser la gestion exemplaire d’espaces naturels ou semi-naturels ou de paysages présentant un intérêt européen exceptionnel du point de vue de leur diversité biologique, géologique et paysagère. D’autres réseaux de sites ont un objectif plus ciblé sur la protection d’espaces naturels à forts enjeux écologiques. Le réseau des sites Ramsar vise, par exemple, à protéger un type d’écosystème particulièrement riche sur le plan biologique mais également très menacé au niveau mondial. Les sites Ramsar jouent un rôle fondamental dans la protection des routes migratoires des oiseaux d’eau ainsi que dans la bonne gestion des processus et des fonctions écologiques des zones humides. Ils participent ainsi à la mise en place d’une structure spatiale cohérente jouant un rôle particulier dans la prévention des inondations et l’atténuation de l’impact de la pollution, rejoignant en cela les objectifs de développement durable de la mise en place de réseaux écologiques.
9La base juridique de ces réseaux de sites, selon qu’elle est contraignante ou non, influe sur la capacité des aires protégées à protéger la diversité biologique en ce sens que cette base n’aura pas la même valeur devant les juridictions des États Parties (Romi, 1990). Certains réseaux de sites sont créés par une convention internationale contraignante, comme dans le cas du réseau Ramsar, d’autres sont fondés sur la base d’une simple résolution ou recommandation qui n’a pas de valeur juridique stricto sensu, comme le diplôme européen. Pour autant, l’aspect contraignant des obligations étatiques résulte non seulement de la force contraignante de ces obligations mais aussi de leur objet. En effet, la valeur des obligations de l’État dépend aussi des possibilités pour les États de retirer une zone du réseau. Or, dans plusieurs réseaux de sites, les États peuvent retirer un site du réseau sans pour autant avoir à se justifier. En ce qui concerne les réserves de biosphère, un État peut retirer une aire du réseau par simple notification au secrétariat. La Convention de Ramsar subordonne, dans son article 2 §5, le retrait du site de la liste des zones humides d’importance internationale à des raisons pressantes d’intérêt national, à l’avertissement préalable du bureau, ainsi qu’à une obligation de compensation (De Klemm, 1998). L’impact de ces dispositions est important, car inclure un site dans un réseau équivaut à le protéger contre les grands projets d’infrastructures menés principalement par l’État. Or, si celui-ci peut le retirer du réseau à tout moment, le fait que les obligations soient juridiquement contraignantes ou non n’influe pas sur l’effectivité de la protection. Cependant, la valeur diplomatique de l’inscription est telle que les États ne retirent pratiquement jamais le site de son réseau.
10La mise en place d’aires protégées dans le cadre d’un réseau de sites internationaux, au-delà de la protection juridique qu’elle offre, permet en effet de faire prendre une valeur supra-nationale à certains habitats naturels, ce qui rend possible d’apprécier différemment certains projets de développement, alors évalués par rapport à une zone naturelle d’importance internationale. La protection devient alors politique plus que juridique. Les mécanismes de sanctions à l’encontre d’États parties qui maltraitent une aire protégée vont d’ailleurs jusqu’au retrait de la zone du réseau. Ces mécanismes ne sont pas sans effet. On peut citer pour exemple le sanctuaire de baleines d’El Vizcaino au Mexique. En 1999, un projet d’agrandissement d’une usine de production de sel a été lancé à Laguna San Ignacio, dans la baie d’El Vizcaino, dernier lagon intact où la baleine grise du Pacifique vient se reproduire et site inscrit sur la liste du patrimoine mondial. Le Comité du patrimoine mondial a mis en garde le gouvernement mexicain contre les menaces que ferait peser sur l’écologie marine et terrestre, sur les baleines grises et sur l’intégrité du site l’établissement d’une usine de sel à l’intérieur du sanctuaire. En mars 2000, le gouvernement mexicain a décidé de refuser l’autorisation de construire l’usine.
11Pour leur capacité à protéger des habitats naturels spécifiques, les aires protégées à l’échelle internationale apparaissent donc comme particulièrement importantes. Leur rôle en tant que zone noyau des réseaux écologiques est cependant aussi en cours de transformation, et cela se remarque notamment dans l’évolution des modalités de protection dans certains réseaux de sites.
La prise en compte des réseaux écologiques au sein des aires protégées
12Certaines aires protégées de grande taille intègrent le concept de réseau écologique sur leur territoire et peuvent jouer un rôle de « laboratoire expérimental » en modifiant l’approche classique de la conservation. Tel est le cas des réserves de biosphère qui ont, depuis l’adoption du cadre statutaire (Unesco, 1996) et de la Stratégie de Séville, trois fonctions clairement définies. Ces fonctions sont décrites comme étant complémentaires et d’égale importance : une fonction de conservation (préserver les ressources génétiques, les espaces et les écosystèmes, et les paysages), une fonction de développement (encourager un développement économique et humain durable) et une fonction logistique (permettre et encourager les activités de recherche, de surveillance permanente, d’éducation et de formation).
13À ces fins, elles sont divisées en trois types de zones : une aire centrale dotée d’un statut juridique garantissant une protection à long terme et dans laquelle la plupart des activités humaines sont interdites ; une zone tampon clairement définie, où seules les activités compatibles avec l’objectif de conservation sont autorisées ; et une aire de transition, qui, en général, ne possède pas de statut de protection et qui permet et favorise l’utilisation durable des ressources (Cibien, 2006). Ce zonage juridicisé en 1995 par le cadre statutaire et la Stratégie de Séville est désormais expressément utilisé pour mettre en place des corridors biologiques à l’intérieur des réserves de biosphère. Le récent zonage de la réserve de biosphère des Carpates orientales en est un exemple. Pour autant, il ne paraît pas nécessaire de généraliser à l’ensemble des aires protégées cette tendance à la mise en place de réseaux écologiques à l’intérieur du territoire de l’espace naturel protégé. La taille des zones protégées qu’implique cette démarche peut en effet limiter la compréhension et l’acceptation par le public des espaces protégés sans apporter de bénéfice évident. De plus, certaines listes d’aires protégées au niveau international ont été mises en place pour protéger strictement certains espaces et ne sont pas adaptées à ce type de zonage intégrant des activités économiques. C’est le cas notamment de la liste du patrimoine mondial ou de celle du diplôme européen. Et leur utilisation dans ce cadre nuit à leur complémentarité avec d’autres listes de sites ainsi qu’à la lisibilité de leur démarche par le public4. Par contre, la traduction dans les droits nationaux du concept de réserves de biosphère qui favorise les mesures de conciliation avec un développement économique tout en maintenant des zones de conservation stricte pourrait être un moyen d’atteindre un développement durable du territoire en permettant la conservation de la nature ordinaire en périphérie des aires protégées.
La nécessité de relier entre elles les zones protégées implique leur conservation
14La conservation de la nature par les aires protégées a aussi des effets secondaires sur la gestion de la nature ordinaire, et ce en dehors du territoire de l’aire protégée considérée. En effet, plusieurs textes internationaux demandent désormais aux États parties de relier entre elles les zones protégées.
15Composé de zones de protection spéciales au titre de la directive Oiseaux et de zones spéciales de conservation au titre de la directive Habitats, le réseau Natura 20005 ne vise pas dans un premier temps la mise en œuvre d’un réseau écologique (au sens décrit dans l’introduction). Cependant, la réalisation finale du réseau implique une certaine cohérence écologique comme l’indiquent plusieurs articles de la directive. Les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs du réseau Natura 2000 permettent désormais à la Commission européenne de commencer à envisager l’étape suivante, comme elle l’a indiqué dans sa communication récente sur la diversité biologique6. La première phase de mise en œuvre a été axée sur la proposition et la désignation par les États membres de l’Union européenne de sites abritant des espèces et des habitats d’intérêt européen. Les prochaines étapes du réseau Natura 2000 viseront à assurer le caractère opérationnel du réseau, notamment afin de faire en sorte que les espèces et les habitats d’importance européenne soient maintenus dans un état favorable de conservation. L’établissement des mesures de conservation nécessaires pour tous les sites désignés, y compris l’élaboration de plans de gestion, l’adoption d’un statut national approprié, des mesures administratives ou contractuelles, représente à présent une des tâches prioritaires des États membres.
16Dans le contexte du changement climatique et des transformations dans l’utilisation des sols, la capacité du réseau à atteindre ses objectifs de conservation dépend notamment du maintien ou de la restauration d’une matrice de territoire appropriée, dans et entre les sites, permettant de maintenir des processus écologiques essentiels et favorisant la biodiversité. En référence à l’article 10 de la directive Habitats, la Commission européenne ainsi que certains États membres s’efforcent actuellement de définir les conditions et les ressources nécessaires pour assurer, au sein du réseau Natura 2000, une gestion cohérente des éléments du paysage (encadré 2).
Encadré 2. Références juridiques directes à la cohérence écologique dans la directive Habitats
Préambule
En vue d’assurer le rétablissement ou le maintien des habitats naturels et des espèces (...) dans un état de conservation favorable, il y a lieu (…) de réaliser un réseau écologique européen cohérent.
Article 1
Site d’importance communautaire : un site qui, (…) peut aussi contribuer de manière significative à la cohérence de « Natura 2000 » visé à l’article 3, et/ou contribue de manière significative au maintien de la diversité biologique dans la ou les régions biogéographiques concernées.
Article 3
3. (…) Les États membres s’efforcent d’améliorer la cohérence écologique de Natura 2000 par le maintien et, le cas échéant, le développement des éléments du paysage, mentionnés à l’article 10, qui revêtent une importance majeure pour la faune et la flore sauvages.
Article 4
(…) L’État membre concerné désigne le site comme zone spéciale de conservation (…) en établissant les priorités (…) pour la cohérence de Natura 2000.
Article 10
Là où ils l’estiment nécessaire, dans le cadre de leurs politiques d’aménagement du territoire et de développement et notamment en vue d’améliorer la cohérence écologique du réseau Natura 2000, les États membres s’efforcent d’encourager la gestion d’éléments du paysage qui revêtent une importance majeure pour la faune et la flore sauvages.
17D’autres textes internationaux de protection de la nature soulignent aussi la nécessité de relier entre elles les aires protégées. La Convention sur la diversité biologique (Rio, 1992) est certainement la plus connue. Aux termes de l’article 8a « chaque partie contractante (…) établit un système de zones protégées ou de zones où des mesures spéciales doivent être prises pour conserver la diversité biologique ». Si le terme de connectivité écologique n’a pas été retenu dans le texte final de la convention, l’utilisation du terme « système » associée à l’analyse des travaux préparatoires permet une interprétation extensive du texte comme demandant aux Parties d’instaurer des zones protégées reliées entre elles7.
18Certaines conventions régionales réclament explicitement l’établissement de corridors écologiques. La Convention sur la protection de la nature en Amérique centrale signalait, dès 1992, l’importance de l’isthme centro-américain en tant que corridor biologique. La Convention alpine a elle aussi reconnu l’importance de mettre en place un réseau écologique dans les Alpes en 1994 via son protocole pour la conservation de la nature et des paysages. Et la récente Convention cadre pour la protection et le développement durable des Carpates signée à Kiev en 2003, qui fixe un cadre juridique pour la protection durable de ses écosystèmes, invite ses Parties à prendre des mesures appropriées en vue d’assurer un haut niveau de protection des habitats naturels et semi-naturels ainsi que leur continuité et leur connectivité (Fall et Egerer, 2004). Cette convention fait explicitement référence à la nécessité pour les Parties de constituer un réseau écologique dans les Carpates qui implique la réalisation « d’un réseau de zones protégées associé à la conservation et la gestion durable des aires situées en dehors des zones protégées ». Pour autant, la recherche de la continuité des aires protégées n’implique pas l’extension abusive des aires protégées et le défi du concept de connectivité est bien de chercher à associer aux aires protégées d’autres modes de protection plus souples.
19Les aires protégées, en plus de protéger des habitats naturels déterminés, peuvent donc avoir des effets en dehors de leur territoire, ce qui participe à l’évolution de leur rôle en matière de conservation de la diversité biologique. Le fait qu’une structure existe peut aussi servir de support logistique à des initiatives en périphérie de la zone centrale. C’est ainsi que leur rôle paraît toujours nécessaire mais doit être perçu différemment en fonction des échelles de réflexion.
Les aires protégées comme corridors
20Certaines aires protégées peuvent jouer un rôle de « corridor », c’est-à-dire permettre de reconnecter ou connecter entre elles plusieurs populations d’espèces en protégeant les infrastructures naturelles. Dès la fin du xixe siècle, une notion inspirée des éléments linéaires naturels avait été proposée par les planificateurs américains. Cette réflexion a produit le concept de greenways (voir Carrière et al., cet ouvrage). Les greenways sont des réseaux d’éléments linéaires, planifiés et arrangés, originellement dans un but de loisirs (Walmsley, 2006 ; Fabos et Ryan, 2004) et qui cumulent désormais des buts multiples incluant la récréation mais aussi l’écologie, l’esthétique et les aspects culturels (Ahern, 1995). Les greenways n’ont pas seulement une fonction écologique, ils sont des réseaux écologiques multifonctionnels. Pour la plupart, ils sont situés autour des villes et visent à permettre aux citadins de « s’aérer » rapidement ainsi qu’à maintenir un paysage naturel aux alentours des grandes structures urbanistiques. Sur le continent européen, l’idée de réseau écologique prend originellement une autre forme et a d’abord été mise en place par les responsables de l’aménagement du territoire de Russie, de Tchécoslovaquie et de Lituanie, qui ont intégré l’outil corridor dans leurs systèmes de planification au cours des années 1970 afin de protéger des infrastructures naturelles (Jongman, 1998). Cette démarche reposait sur le concept de paysage polarisé, qui implique la séparation du paysage entre des zones pour la conservation et la restauration de la nature, et des zones d’utilisation intensive du sol (Frolova, 2000 ; Kavaliauskas, 1996). Cette tradition de planification des infrastructures naturelles explique les multiples traductions juridiques des réseaux écologiques dans ces pays8. Plus récemment, l’Europe occidentale a pris en compte l’importance de réduire la fragmentation des habitats naturels (Burel, 2003) et plusieurs pays ont désormais des textes juridiques mettant en place des réseaux écologiques9.
21Ces différences historiques de conception des réseaux écologiques expliquent que, selon les régions, le terme de corridor peut revêtir différentes significations et il est vrai que ces variations de terminologie sont une source de confusion (CBD, 2005 ; Bennet et Wit, 2001 ; Carrière et al., cet ouvrage). En Europe et dans les organisations internationales, le terme de réseau écologique est le plus souvent employé, mais les programmes sud-américains ou asiatiques utilisent généralement le terme de corridors, qui correspond toutefois au même modèle de conservation10. L’approche de la conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique sera retenue ici. Le terme de corridor recouvre alors l’idée d’une interconnexion écologique. Plus précisément, l’expression désigne un ou des milieux reliant fonctionnellement entre eux différents habitats vitaux pour une espèce ou un groupe d’espèces.
Les aires protégées transfrontalières comme support des corridors interrégionaux
22Les aires protégées transfrontalières jouent un rôle particulier dans la dynamique régionale de la conservation de la nature (Brunner, 2002). L’inscription d’une aire protégée transfrontalière dans un réseau de sites internationaux permet, bien sûr, de favoriser les contacts institutionnels entre les responsables de zones situées de chaque côté de la frontière, mais elle fournit aussi un cadre juridique et politique à la coopération qui peut déboucher sur des initiatives plus générales.
23De nombreuses conventions internationales de conservation de la nature imposent aux États Parties de coordonner leur action dans le domaine des zones protégées transfrontalières11 et les conférences des Parties préconisent désormais des mesures communes de gestion12. La reconnaissance des zones protégées transfrontalières par le droit est un premier pas vers la reconnaissance juridique d’une nécessité de coopération régionale en matière de conservation de la nature. Et le fait que plusieurs réseaux de sites aient attribué une dénomination unique à des zones protégées se situant de part et d’autre de la frontière fait partie du même processus.
24C’est notamment le cas du Patrimoine mondial et du diplôme européen, qui ont ainsi désigné la forêt Bialowieza entre la Pologne et le Belarus. L’un des principaux objectifs de la Stratégie de Séville pour les réserves de biosphère (Unesco, 1996 ; Jardin, 1996) est aussi de promouvoir et favoriser les jumelages entre réserves de biosphère et favoriser la création de réserves transfrontalières. Ces zones protégées transfrontalières reconnues par une dénomination internationale se multiplient ces dernières années (encadré 3).
25Le fait que des commissions mixtes de gestion, comprenant des représentants de chacune des zones protégées, soient instaurées constitue aussi un pas vers l’établissement de mécanismes de coopération à l’échelle régionale. Il est d’ailleurs intéressant de noter que, souvent, l’établissement de telles commissions coïncide avec la mise en place de dynamiques de protection de corridors à l’échelle interrégionale. C’est notamment le cas du parc La Amistad entre le Costa Rica et le Panama. Dans ce parc, une commission bi-nationale permanente présidée par les ministres de la Planification a été mise en place. Cette commission est responsable de la programmation, des projets et de la coordination des activités générales, ainsi que du suivi et de l’évaluation. Le premier accord de coopération a été conclu en 1979 entre le Panama et le Costa Rica, la création du parc international a été entérinée par un accord signé en 1982 et, en 1992, la commission consultative commune devient la commission permanente et acquiert un pouvoir de décision. Ce parc transfrontalier se trouve au cœur de l’initiative internationale du corridor biologique méso-américain. C’est aussi le cas de la zone transfrontalière de protection de la nature dans les réserves naturelles du delta du Danube, qui a fait l’objet d’un accord sur la mise en place d’un corridor vert dans le Danube inférieur (Bucarest, 2000).
26Les zones protégées transfrontalières ont donc des potentialités à jouer un rôle dans l’établissement de corridors inter-régionaux, notamment par la base juridique qu’elles établissent et qui, partant, peut procurer une base pour une dynamique de politiques régionales de conservation.
Les archipels de zones protégées constitutifs de corridors à l’échelle supérieure
27En fonction de l’échelle d’appréhension des territoires, une myriade d’aires protégées peut aussi constituer un corridor. Il en est ainsi, par exemple, de la zone protégée située sur le terrain d’un agriculteur destinée à protéger l’habitat de telle loutre ou tel autre animal protégé et qui est perçue, au même titre que celles situées sur les terrains agricoles voisins, au niveau du schéma régional d’aménagement du territoire, comme un corridor biologique.
28De la même façon, le réseau écologique alpin constitué de zones protégées et mis en œuvre dans le cadre de la Convention alpine (Salzbourg, 1991) est appréhendé dans les études pour son rôle de corridor. L’établissement de liens spatiaux entre les espaces alpins protégés est un thème central de cette convention et de son protocole pour la conservation de la nature et des paysages (Chambéry, 1994) qui contient notamment un article 12 intitulé « réseau écologique ». Les Parties contractantes à cette convention ont souligné que seuls des espaces protégés de grande taille formant une unité écologique cohérente pouvaient assurer une protection durable du paysage alpin ainsi que la continuité des dynamiques naturelles. Elles ont chargé le Réseau alpin des espaces protégés d’analyser le potentiel actuel d’aires de protection et de liens transfrontaliers, et de proposer des mesures concrètes. Il ressort de cette étude que la région alpine comprend plusieurs zones protégées transfrontalières ainsi que de vastes zones protégées couvrant plus de 1 000 hectares, ce qui permet d’envisager la possibilité d’une continuité écologique entre les sites, depuis la frontière franco-italienne jusqu’à la frontière orientale de l’Autriche. Dans huit zones pilotes, plusieurs espaces ont été analysés à l’aide d’indicateurs et reconnus comme présentant un potentiel écologique significatif en tant que corridors écologiques ou zones de liaison. De nombreux espaces protégés sont reliés entre eux au-delà des frontières nationales ou à l’intérieur d’un même pays. Les frontières internationales communes entre différentes catégories d’espaces protégés sont estimées à plus de 250 kilomètres, et la collaboration entre ces espaces pourrait jouer un rôle moteur dans l’établissement de connexions biologiques.
29La partie de l’étude réalisée dans la zone du parc national du Mercantour, du parc naturel Alpi Maritime et du parc naturel Alta valle Pesio e Tanaro montre que cette région, très isolée, sert effectivement de corridor biologique (Réseau alpin, 2004). Ce fait a été confirmé par le suivi effectué sur certains bouquetins marqués qui, partis du parc national du Mercantour, se sont déplacés en direction du sud-ouest pour rejoindre la réserve géologique de Haute-Provence. Le Réseau alpin est également associé à d’autres mécanismes de coopération en dehors des Alpes. Un réseau de zones protégées dans les montagnes des Carpates est en projet, ainsi qu’une initiative similaire dans les Pyrénées. Ces trois massifs formant un continuum écologique à l’échelle macroscopique, des projets de partenariat sont envisagés.
30Les cartes 1 à 7 sont consultables sur le site www.carto-conservation.net
Conclusion
31La conservation des aires protégées comme mode de protection des habitats naturels apparaît toujours aussi essentielle pour garantir une survie à long terme et la conservation de certains milieux naturels. Ainsi l’intégration des aires protégées dans des réseaux écologiques qui aboutirait à leur dilution dans un territoire plus vaste ne paraît pas souhaitable et il importe au contraire de souligner la complémentarité de ces deux méthodes de conservation de la nature. Néanmoins, les fonctions des aires protégées ont tendance à évoluer, ce qui modifie le statut même de ces territoires qui, de zones strictement protégées et encadrées, deviennent des territoires de projets, zones expérimentales d’un développement durable voué à s’étendre en dehors de leurs limites. L’intégration des objectifs de conservation dans les politiques sectorielles d’aménagement du territoire devrait aussi créer des infrastructures écologiques, au-delà des zones noyaux ou des corridors. Pour autant, cette frénésie de zonage nous entraîne vers des mécanismes de conciliation d’activités, sans hiérarchisation bien définie et il importe désormais, au-delà des modèles d’intégration des aires protégées dans les réseaux écologiques, de s’attacher à l’efficacité de ces dispositifs, notamment par le biais de processus d’évaluation qui restent pour l’instant à définir.
Bibliographie
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10.1016/j.landurbplan.2004.09.036 :Walmsley A., 2006 – Greenways: multiplying and diversifying in the 21st century. Landscape and urban planning, 76 : 252-290.
Notes de bas de page
1 À titre d’exemple, l’Estonie utilise les termes de zones noyaux, zones tampons et couloirs écologiques, la Lituanie les termes de géo-systèmes, territoires tampons et corridors écologiques, la Pologne utilise les termes de zones noyaux et d’éco-corridors. Les réseaux slovaques et tchèques sont constitués de bio-centres, de bio-corridors et d’éléments interactifs. Les Pays-Bas utilisent les termes de zones noyaux, d’aires de reconstitution et de corridors écologiques.
2 Les déclarations politiques qui prévoient la réalisation de réseaux écologiques se multiplient : Stratégie paneuropéenne pour la diversité biologique et paysagère en Europe (Sofia, 1995), Stratégie pour la biodiversité et son plan d’action pour l’Asie centrale (2006). On connaît désormais plusieurs textes contraignants en droit international sur le sujet : Convention des Carpates et notamment son article 4 (Kiev, 2003), Convention d’Amérique centrale pour la conservation des aires naturelles (Managua, 1992).
3 Les références exactes des conventions internationales citées dans le texte sont regroupées à la fin de ce texte dans l’encadré 4. N’apparaissent dans le texte que la date et le lieu de signature.
4 L’inscription sur la liste du patrimoine mondial du Val de Loire le 30 novembre 2000 reste une exception mais illustre ce phénomène. Le périmètre va de Sully sur Loire à l’amont à Chalonnes sur Loire à l’aval, soit 260 kilomètres de longueur sur une largeur de quelques kilomètres correspondant au lit majeur du fleuve et regroupant 159 communes.
5 En décembre 2006, le réseau Natura 2000 comptait 20 862 sites au titre de la directive Habitats, dont 1 250 sites marins, et 4 617 sites au titre de la directive Oiseaux, dont 484 sites marins.
6 « Enrayer la diminution de la biodiversité à l’horizon 2010 et au-delà. Préserver les services écosystémiques pour le bien-être humain », Communication de la Commission, Com (2006) 216, mai 2006.
7 Le guide de la Convention sur la diversité biologique préconise d’ailleurs sur la base de l’article 8a, la « création d’un ensemble d’aires protégées plus vastes qu’il n’aurait été autrement nécessaire, associé à l’établissement de corridors écologiques, et de lieux d’étape entre zones protégées, permettant aux espèces de se déplacer en fonction de l’évolution du climat ».
8 Par exemple, l’Estonie (Loi sur le développement durable, 1995), la Lituanie (Loi de protection de l’environnement, 1992), la République tchèque (Loi de protection de la nature, 1992), la Slovaquie (Loi de protection de la nature, 1994).
9 Par exemple, l’Allemagne (Loi fédérale de conservation de la nature, 2002), la Belgique, Région Flamande (Décret relatif à la conservation de la nature, 1997), la France (Loi d’orientation pour l’aménagement durable du territoire, 1999), la Suisse (Conception paysage, 1997).
10 Comme le corridor de conservation Vilcabamba-Amboro entre le Pérou et la Bolivie, ou le corridor biologique méso-américain en Amérique centrale.
11 C’est le cas par exemple de la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de 1979, de l’Accord de l’Asean relatif à la conservation de la nature et des ressources naturelles (Kuala-Lumpur, 1985) ou encore de l’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (La Haye, 1995).
12 Le deuxième plan d’action stratégique de la Convention de Ramsar relative à la conservation des zones humides (2003-2008) indique que les « Parties doivent coopérer à l’échelon international pour réaliser la conservation, et l’utilisation rationnelle des zones humides transfrontières ».
Notes de fin
* force contraignante (FC) ou non contraignante (NC). La force contraignante ici prise en compte est celle de l’instrument juridique qui crée le réseaux de sites.
Auteur
marie.bonnin@ird.fr
Marie Bonnin juriste, est chargée de recherche à l’IRD. Ses travaux portent sur la dimension juridique des politiques de corridors écologiques à l’échelle internationale, notamment en l’Europe et en Amérique latine. Elle a publié le rapport sur l’état d’avancement du réseau écologique paneuropéen aux éditions du Conseil de l’Europe (Coll. Sauvegarde de la nature, 2007).
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