Les ONG d’environnement dans un système international en mutation : des objets non identifiés ?
p. 21-58
Texte intégral
1De nombreux auteurs l’ont écrit, les ONG prendraient dans le contexte contemporain une place singulière, car elles porteraient à un niveau planétaire les espoirs d’une redéfinition de la politique, de l’État national, voire de la démocratie. Elles seraient ces unités clefs, représentantes de la société civile internationale, chargées de redessiner une géopolitique globale tout en étant capables de répondre aux changements planétaires face auxquels des acteurs plus traditionnels semblent aujourd’hui si démunis (Princen et al., 1994 ; Beck, 2003).
2S’il est vrai que certaines ONG participent aujourd’hui à un décloisonnement des espaces, à une forme de réduction des distances, à une mise en réseaux des territoires, à tout ce qui, finalement, permet de les penser comme acteurs des processus de mondialisation et d’un renouveau du politique, il ne faut pas oublier que cette assignation à être des représentantes d’une société civile internationale reste autant le fruit de leur militantisme que le résultat d’une transformation du contexte international dans lequel elles évoluent. Le fait que ces organisations militent, entrent en invitées ou en force dans les arènes internationales, réussissent à s’inscrire dans des territoires de différentes échelles, tout en donnant du sens à leurs actions dans des contextes locaux, ne doit pas empêcher de les appréhender dans leurs discours et leurs pratiques en évitant une certaine doxa ambiante qui parasite trop souvent les perceptions. Beaucoup de questions restent en effet en suspens. Sont-elles des représentantes de la société civile ? Sont-elles porteuses d’une nouvelle forme de démocratie ? Représentent-elles des contre-pouvoirs aux États ? Sont-elles, au contraire, des instruments étatiques ou d’intérêts privés dissimulés derrière le paravent de l’intérêt général ?
3On peut choisir d’amorcer une réflexion générale sur les ONG, sans que soient véritablement pris en compte les problèmes inhérents à la diversité et à la confusion qui règnent sous cette appellation. Certains auteurs vont ainsi opérer des tris afin d’isoler des ONG qui correspondent à une forme idéale de l’organisation militante et désintéressée. Cela a pour inconvénient de faire de la réflexion une opération de légitimation de certaines organisations au détriment des autres. Cela participe aussi d’une réification de la catégorie ONG par une consécration scientifique, démarche inverse à tout processus d’éclaircissement de cette représentation collective. Nous pensons en effet que l’utilisation du terme d’ONG ne suffit pas à constituer une catégorie d’analyse scientifique et que le manque de cadre pour comprendre les ONG rend caduque l’étude de leur influence sur les dynamiques économiques et sociales contemporaines (Vakil, 1997). Pour réfléchir à cet objet non identifié, qui défie les grilles d’analyses, d’un point de vue organisationnel, institutionnel ou spatial, il nous faut donc proposer des outils de compréhension du monde des ONG en analysant la diversité qui règne sous cette appellation, dans un contexte international qui a connu des mutations inédites depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
4Pour ce faire, nous examinerons tout d’abord les raisons pour lesquelles ces organisations ont pris une telle importance, en étudiant plus spécifiquement les ONG internationales d’environnement, les plus connues, les mieux dotées en capitaux économiques et en notoriété, et les plus centrales dans le champ de la biodiversité (WWF, FoE [Friends of the Earth], Greenpeace, etc.). Nous rendrons compte des origines militantes de ces organisations, de leur autoproclamation de représentantes de la société civile et de leur place dans la contestation altermondialiste, entre expertise et activisme. Cette première partie, qui montrera aussi qu’il est difficile de se satisfaire de définitions normatives des ONG, nous conduira, dans une deuxième partie, à montrer la vacuité des différents critères de définition du monde des ONG et l’impossibilité de circonscrire ces organisations par les critères habituellement employés. Dans une troisième partie, nous proposerons enfin un modèle d’analyse pour mener des recherches réintroduisant le politique dans l’étude des ONG dans les processus de globalisation.
Les ONG internationales saisies par les mutations politiques et institutionnelles
5Marquée par la fin de la confrontation des deux blocs géopolitiques (capitaliste/communiste), par la montée en puissance des organismes internationaux, par la mise en place de programmes internationaux, la fin du xxe siècle a amené, y compris dans les opinions publiques, à penser de manière planétaire et en termes d’interdépendances ou d’interactions. Selon leur puissance, les États, loin d’avoir disparu, se retrouvent parfois concurrencés, ou même évincés, pour certains États du Sud, par des groupes d’intérêts (firmes, institutions internationales, ONG). Dans ce grand bouleversement, les ONG ont affirmé leur rôle dans les prises de décisions et se sont construit une identité : représentantes d’une société civile transnationale.
6Pour comprendre les traits dominants de cette évolution, il est nécessaire de rappeler les spécificités liées à leur naissance (lieu, génération militante, répertoires, etc.). On pourra ensuite observer l’usage qu’elles font de la notion de société civile, ce qui permettra de mieux comprendre les processus de mondialisation dans lesquels elles s’insèrent. Enfin, nous amorcerons une réflexion sur leurs différents rôles dans un contexte de contestation dite altermondialiste.
Les ONG internationales d’environnement : des terreaux militants datés
7Le mouvement environnemental international remonte à plus d’un siècle ; aussi serait-il hasardeux de l’étudier en faisant abstraction de la variété des cultures militantes de ces organisations qui, d’abord fondées dans la mouvance des sociétés savantes, ont projeté sur le monde leurs représentations de la nature et de la conservation. Rappelons que les premières grandes associations de conservation, du type Sierra Club, sont d’origine anglo-saxonne. Jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale, leurs actions gravitaient autour des muséums ou des laboratoires de recherche s’intéressant essentiellement au monde animal. Cette culture conservationniste a marqué notablement le secteur des ONG environnementales et influencé durablement les programmes internationaux. Après la Seconde Guerre mondiale, l’UICN (Union mondiale pour la nature) organise ces réseaux savants et devient un groupe d’intérêt, très connecté à l’Unesco, afin de promouvoir des mesures environnementales de type international. Ces savants voyagent, se rencontrent, constituent une communauté de pensée qui s’appuie sur leur expertise scientifique. Également issu de ce mouvement, le WWF naît en 1961, avec l’objectif de sensibiliser l’opinion publique occidentale afin d’obtenir son soutien financier.
8Au tournant des années 1960, d’autres organisations apparaissent et visent une mobilisation plus contestataire, qui s’enracine dans le terreau des protestations d’une partie de l’opinion occidentale (anti-guerre du Viêt-nam, anti-colonialiste, pacifiste, etc.). Elles vont faire évoluer les registres d’action en s’attachant prioritairement à deux cibles : les médias et l’opinion publique occidentale.
9Ce virage des années 1970 s’explique par la transformation des opinions publiques du Nord due à l’élévation générale du niveau culturel, à la massification des formes d’informations médiatiques et à la diffusion de la contestation des jeunes, qui varie des formes les plus violentes (manifestations, terrorisme) aux registres les plus conventionnels (demandes d’information, signatures de pétitions). FoE ou Greenpeace ont ainsi été soutenues par une génération mobilisée et socialisée dans un contexte de contestation des excès consuméristes des sociétés industrielles avancées, génération où l’on retrouve moins le profil de ces savants engagés que celui de réels professionnels des médias, notamment des journalistes. Ce dernier point explique que les membres de ces ONG vont user du registre médiatique afin d’émouvoir, en forçant le caractère irréversible de l’atteinte à l’environnement ou en insistant sur la cruauté d’actions destructrices de telle ou telle espèce (encadré 1).
Encadré 1.
Scandaliser l'opinion publique internationale : registre d'action originel de Friends of the Earth
Militant professionnel au Sierra Club, David Brower avait réussi à donner un second souffle financier à cette organisation environnementale en éditant un livre sur les paysages dans les années 1960. Il a compris l’intérêt d’engendrer des mobilisations médiatiques, mais il démissionne en 1969 et crée FoE. Il militera pour la création de la journée de la Terre en utilisant une ressource nouvelle, la photographie de la planète depuis l’espace prise par les astronautes d’Appollo VIII en 1968.
Il recourt encore à la publication en 1970 avec le manifeste de FoE, The Environmental Book, qui réunit des contributions de poètes, artistes ou penseurs « écologistes ». À l’occasion de la promotion de son livre, il vient en Europe avec la volonté de créer un mouvement de fond. Il mène son combat à l’UICN en faveur de la protection des baleines et contre le nucléaire. Il a conscience que sa lutte sera plus efficace s’il arrive à ouvrir des antennes en France, en Suède et en Grande-Bretagne.
À Paris, il est accueilli par Edwin Matthews, un avocat, et il rencontre Brice Lalonde (à l’époque militant du PSU) avec lequel il évoque la fondation d’une antenne de FoE. En Grande-Bretagne, Edwin Matthews rencontre Barclay Inglis (journaliste britannique) durant l’été 1970 et l’entretient de la possibilité d’ouvrir une antenne à Londres. L’idée se concrétise rapidement.
La première tâche de FoE Grande-Bretagne est de diffuser l’ouvrage de David Brower. De fait, le bureau de FoE est gracieusement mis à disposition par Ballantine Books, la maison d’édition de David Brower. Les modes d’action collective créent la « marque » de l’ONG dans l’opinion publique, étonnée par ces nouveaux registres.
Le 10 mai 1971, le premier « coup » médiatique consiste à édifier une pyramide de bouteilles devant le siège de Cadbury-Schweppes, visant à dénoncer le gaspillage et la pollution. Cet événement, diffusé par la presse, a pour effet d’accroître les adhésions et de mobiliser des individus qui créent de nombreux groupes locaux. Mieux, les antennes européennes sont rapidement connues et reconnues comme celles qui initieront les célèbres manifestations à vélo (appelées parfois la « vélorution »), qui attirent l’attention des médias et d’une opinion publique plus habituée à des manifestations de type syndical et ouvrier. Pendant l’été 1974, la réunion de la commission internationale baleinière se déroule à Londres. Les militants de FoE préparent un autre coup médiatique qui rencontre un large écho dans la presse, grâce à son originalité. Un ballon en forme de baleine est gonflé au centre de Londres, afin d’attirer les passants puis de les informer sur les enjeux de cette réunion internationale, largement inconnue du grand public. Ainsi naît un lobbying qui fait entrer le poids symbolique de l’opinion publique dans les négociations internationales, jusqu’alors peu ouvertes à la publicité et caractérisées par une forte technicité.
10Cette dramaturgie, apparue dans les années 1970 et ciblant l’opinion publique du Nord, révèle deux phénomènes. Le premier est que ces ONG ont stabilisé, dès le début, des registres d’action ayant contribué à leur identité militante : l’expertise scientifique, héritée de l’UICN, et le registre médiatique, plutôt hérité de Greenpeace. Le deuxième est que nous sommes en présence de divergences de structuration de l’intérêt environnemental, matérialisées par un pôle conservationniste et un pôle environnementaliste, pôles qui vont se maintenir, malgré l’apparition d’un discours présentant les ONG comme mandatrices d’une société civile porteuse d’une autre politique mondiale.
Derrière le discours de la société civile transnationale
11À la fin des années 1980 se généralise le discours qualifiant les ONG de représentantes d’une société civile mondiale jouant adroitement sur les frontières savant/militant (Pouligny, 2001 ; Dauvin et al., 2002). De nombreux ouvrages scientifiques deviennent de véritables bréviaires à usage des acteurs transnationaux. Cela s’explique par la proximité de certains auteurs universitaires avec le monde militant (Keck et Sikkink, 1998), par le rôle que ces ONG vont développer dans le nouveau paysage géopolitique né de la chute du mur de Berlin, avec la dislocation du bloc communiste, la recomposition des forces de contestation, une nouvelle régulation du monde.
12Dans le même temps, les ONG s’institutionnalisent et perdent parfois leur caractère contestataire en prenant en charge des politiques publiques internationales, en développant un lobbying à l’expertise de plus en plus sophistiquée, ou en recourant à des méthodes de marketing très entrepreneuriales (dons, recours aux médias, etc.). À un moment où les situations de conflits réclament une régulation internationale, les ONG prennent en charge les « crises » labellisées humanitaires ou d’environnement. Ces organisations se voient confier par des organismes internationaux ou par des États des missions qui demandent une expertise éprouvée et une gestion de plus en plus lourde des personnels, des programmes, etc. Grant Jordan et William Maloney (1997) l’ont bien observé dans leur ouvrage, The protest business ?, qui montre comment le WWF-UK ou FoE-UK sont devenues des machines à protester et à récolter des dons.
Professionnalisation, luttes d’intérêts et recherche de légitimité
13La thématique de la société civile apparaît donc dans un contexte de professionnalisation croissante des ONG associée à un environnement de concurrences intersectorielles entre les organisations humanitaires, des droits de l’homme ou d’environnement. En effet, dans chaque secteur, des clivages s’opèrent. Les organisations humanitaires se positionnent comme ONG de développement ou ONG d’urgence (Dauvin et al., 2002). Les ONG d’environnement maintiennent la ligne de partage entre un pôle conservationniste, qui ne prend pas – ou peu – en compte l’intérêt des populations locales, et un pôle environnementaliste, qui place l’être humain au centre de ses préoccupations.
14Au-delà des différences de pratiques, ces clivages témoignent des luttes que ces organisations se livrent auprès des bailleurs de fonds pour justifier leur identité, se construire un capital social de confiance à l’égard des donateurs institutionnels ou privés ; d’où l’intérêt d’engranger des prix ou des récompenses labellisant leur sérieux. Il est en effet essentiel d’attester d’une certaine légitimité pour pouvoir espérer surnager au sein de la nébuleuse non gouvernementale, surtout lorsque, comme en 2002, pendant les préparations du sommet de Johannesburg, se rassemblent des acteurs institutionnels, des élus, des entreprises, des représentants de syndicats, des chercheurs, des ONG, de la plus locale aux plus globales. Dans ce contexte, on imagine bien que le nombre des adhérents/donateurs ou encore des signataires de pétitions devient un enjeu symbolique autant qu’économique pour attester d’une certaine légitimité.
15Noyées dans ces processus de concertation de la « gouvernance » mondiale, les ONG se légitiment aussi comme représentantes d’une autre forme de démocratie, dite participative (la maîtrise par les citoyens de leur destin), ou encore en tant que représentantes de la société civile. Elles diffusent d’ailleurs ce nouveau discours en étant financées par les dons, les subventions et le mécénat, ce qui euphémise leur caractère institutionnel et managérial : « Faites un don et vous appartenez à une société civile » ; « Signez une pétition et vous faites pression sur vos gouvernements », etc. Plus elles contestent certains modes de régulation ou militent pour imposer certains intérêts au niveau des agendas internationaux, plus elles doivent, dans le bras de fer des négociations, mettre en branle une opinion publique internationale dont dépendent les dons et les signatures.
La dimension internationale des ONG : le résultat d’un processus institutionnel
16Si cette posture de représentation de la société civile, porteuse d’intérêts désintéressés et neutres, cache des contraintes fortes sur les modes d’action des ONG, leur dimension transnationale semble également être le résultat d’un processus institutionnel. En interrogeant les acteurs de la Commission européenne ou encore les membres d’ONG, nous réalisons en effet que le caractère transnational des ONG est autant le résultat de leur volonté militante que la conséquence des contraintes imposées par les bailleurs de fonds. Ainsi, les critères de l’Union européenne pour accorder un financement sont clairement fondés sur le caractère transnational de l’ONG, garantie de « sérieux » (Ollitrault, 2004). Il n’est donc pas étonnant d’observer, au milieu des années 1990, deux phénomènes parmi les ONG existantes : une tendance à l’ouverture de bureaux hors du territoire de naissance et la création de bureaux auprès des institutions supranationales qui les accueillent, voire les soutiennent financièrement. Pour le seul secteur de l’environnement, les ONG ont pris conscience de l’importance de l’échelon européen dès la fin des années 1980, en créant des bureaux européens : FoE en 1986, Greenpeace en 1988 et WWF en 1989 (encadré 2).
Encadré 2.
Être dans les couloirs de l’Union européenne : les bureaux des ONG à Bruxelles
Parmi les acteurs-clés, les fonctionnaires européens figurent en bonne place : s’ils sont réceptifs aux questions d’environnement, ils peuvent accélérer leur mise sur agenda. Cela dépend étroitement de leur intérêt, presque personnel, pour la question, mais également de leur intérêt « national ». Certains apparaissent plus sensibles aux questions environnementales que d’autres en raison du poids de leur opinion publique, de leur socialisation politique antérieure, etc. Rappelons en outre que l’enjeu dépasse la DG Environnement (ancienne DG XI), puisque les questions d’environnement peuvent être débattues avec les questions industrielles par exemple. La position des uns et des autres se brouille encore quand des groupes d’intérêts industriels (automobile, etc.) développent des argumentaires environnementaux face à des groupes d’intérêts labellisés « verts ». De plus en plus, des groupes de consommateurs s’emparent de ces questions, surtout depuis le dossier de la « vache folle » et celui des OGM.
L’environnement reste par excellence le domaine des controverses d’experts. L’Union européenne encourage le phénomène en intégrant dans les processus de consultation des experts universitaires, par le biais d’ONG et de l’Agence européenne de l’environnement. Cette dernière, née en 1993, donne des avis, des objectifs et produit de nombreux rapports sur l’état de l’environnement. La DG Environnement est connue pour disposer de peu de personnel, aussi exploite-t-elle l’expertise des autres DG. De ce fait, elle est généralement considérée comme la DG la plus ouverte aux lobbyistes (BOMBERG, 1998). En face, les ONG et les Verts européens prétendent que cette DG a un « ethos technico-commercial » qui réduit l’environnement au plus petit dénominateur commun. Ajoutons que les parlementaires européens peuvent donner leur avis, ce qui en termes de légitimité démocratique a un poids sur la Commission. D’ailleurs, les ONG comme Greenpeace n’hésitent pas à faire pression lors de la discussion de textes au Parlement européen, en informant les membres du Parlement, en discutant avec le groupe des Verts, comme pour le dossier des OGM.
Les grandes ONG internationales environnementales sont d’origine anglo-saxonne. Le poids de cette représentation de l’environnement a son importance et les modes d’action se sont largement inspirés de ceux du lobbying à l’américaine. Ralph Nader, le défenseur des consommateurs américains, est souvent cité en exemple par les militants environnementaux.
Le Bureau européen de l’environnement (BEE)
Créé en 1974, le BEE est la première organisation environnementale mise en place au niveau européen. Elle a été créée à l’initiative d’ONG de la Communauté européenne, qui ressentaient le besoin de coopérer entre elles. En 1996, le Bureau représentait 132 organisations de 22 pays dont à l’époque les 15 membres de l’UE. On y trouve par exemple le National Trust britannique, l’organisation néerlandaise Stichting Natuur, ou encore les organisations internationales les plus connues comme le WWF, Birdlife International et FoE International.
Un représentant de chaque pays se trouve dans le comité exécutif du BEE. Le secrétariat permanent, basé à Bruxelles, est constitué de 11 membres salariés, un secrétaire général, un expert scientifique et des coordinateurs de campagnes et de programmes. Le BEE reçoit des fonds de la Commission européenne et des contributions des États membres.
Le BEE est actif sur les questions d’écolabel, d’« Eco-Management and Audit Scheme » (Emas), de qualité de l’air et de gestion de l’eau. Il siège dans de nombreuses commissions, par exemple sur l’émission de gaz des véhicules.
Friends of the Earth Europe, Les amis de la Terre
En 1986, FoE Europe arrive à Bruxelles. C’est une succursale de Friends of the Earth International. Il y a 29 organisations Amis de la Terre en Europe, situées dans 28 pays européens.
L’organisation fonctionne par consensus des membres. Les groupes membres sont des organisations indépendantes qui définissent et poursuivent leurs propres campagnes à tous les niveaux (international et local), selon leurs compétences et expertises. Par exemple, Friends of the Earth UK est connu sur la question des transports en Europe. FoE Europe est financé par les contributions des membres mais aussi par l’UE. FoE Europe coordonne entre autres les activités sur la biotechnologie et les transports et travaille sur la question du développement durable en Europe
Greenpeace International
Greenpeace International établit son bureau européen à Bruxelles en 1988. En termes structurels, le bureau européen émane du bureau international de Greenpeace. Il aide Greenpeace International à cordonner différentes campagnes internationales. Le personnel de Bruxelles informe Greenpeace International des développements au niveau européen, du travail en œuvre, des stratégies de campagne. Greenpeace International finance le bureau européen. Par conséquent, l’argent des organisations nationales de Greenpeace (Greenpeace UK, Greenpeace Allemagne) finance le bureau de Bruxelles ainsi que les autres départements comme l’unité économie ou les laboratoires scientifiques. En revanche, Greenpeace, à l’opposé des autres ONG, ne reçoit aucune ressource de la Commission européenne.
World Wide Fund for Nature
En 1989, le bureau européen du WWF ouvre à Bruxelles. En 1995, il comptait 8 membres salariés – sept autres étant affectés au bureau du programme européen au siège, à Genève. Les 14 organisations nationales (12 en Europe) constituent la source de financement pour le bureau européen, mais elles ne sont pas mobilisées dans le fonctionnement quotidien.
Elles sont organisées en différentes équipes chargées chacune d’un programme : l’agriculture, le climat, etc. Le bureau européen se préoccupe de « policy », c’est-à-dire de politique. Il participe à des activités de lobbying, mais aussi de communication, de collecte d’information et de recherche de fonds. Au niveau européen, le WWF reste actif sur la question des fonds structurels : l’agriculture, le développement rural ou encore les questions de développement dans les pays du Sud. La Commission européenne est une source essentielle de financement du bureau européen.
Le réseau européen sur le Climat (Climate Network Europe)
Ce réseau est l’un des 8 groupes régionaux du réseau international Climate Action Network.
Établi en 1989, l’objectif du CNE est de promouvoir la diminution des impacts des activités humaines sur le changement climatique. Le CNE rassemble 60 représentants d’ONG environnementales dont plusieurs branches nationales du WWF et de Friends of the Earth. Un bureau consultatif composé de représentants des organisations les plus actives a été créé en Europe. Le bureau décide des sujets à traiter, il assure la coordination des organisations participantes sur les questions de climat et travaille en coopération avec d’autres groupes régionaux du réseau. Il diffuse des informations sur le climat et tente d’impulser des politiques au niveau de l’Union européenne.
Birdlife International
Birdlife International a été fondé en 1922. Le bureau européen s’est ouvert à Bruxelles en 1993, ses membres ayant estimé que cela était nécessaire pour renforcer son efficacité. Il y a 29 membres européens dans Birdlife International. Le RSPB (Royal Society for the Protection of Birds) est l’un des plus importants. Birdlife européen suit le programme décidé par le secrétariat de l’organisation, situé à Cambridge. Le programme est agréé par la conférence européenne de Birdlife et coordonné par le bureau européen. Ce bureau suit le développement des politiques européennes, tisse des liens avec les institutions de l’UE et engage des activités de « lobbying » sur les questions de protection des oiseaux et de leurs habitats. Il s’intéresse aux questions agricoles, pousse à l’application de la directive « Oiseaux » (1979). Ses ressources proviennent de la contribution des membres et de la Commission européenne qui finance le bureau.
La Fédération européenne des transports et de l’environnement
Cette organisation a été créée en 1989 et son bureau a ouvert en 1992. C’est une organisation « parapluie » composée de 29 membres provenant de 18 pays de l’Union européenne, de la zone européenne de libre-échange et de l’Europe de l’Est avant élargissement. Elle regroupe des ONG de défense des consommateurs dont les activités se concentrent sur les questions de qualité de l’air et de transports routiers. Cette fédération a des commissions de recherches et publie largement sur la question des transports. Elle est financée par les membres et par la Commission européenne.
Et d’autres...
À l’issue de cette présentation, il pourrait sembler que les principaux groupes jouant un rôle actif dans la représentation des intérêts environnementaux sont internationaux. Cependant, les associations locales de défense de l’environnement utilisent aussi les normes environnementales, les font appliquer, voire les initient, comme l’association « Eaux et Rivières de Bretagne », dont le juriste a participé à la création de la loi sur l’eau de 1992.
17Avec la montée en puissance de la construction européenne, nous touchons aux relations complexes entre les institutions supranationales et les ONG, qui peuvent prendre des formes d’attraction-rejet ou de pure et simple instrumentalisation réciproque. C’est le cas du WWF, devenu l’expert privilégié des instances supranationales au niveau européen (Ollitrault, 2004). Nos observations révèlent des pratiques éloignées du discours « enchantant » une société civile totalement autonome des contraintes s’exerçant sur les acteurs. Certaines ONG (Greenpeace) ou encore le parti Vert dénoncent cette tendance technocratique de la gestion de l’environnement au sein de l’Union européenne.
Au-delà des identités organisationnelles et des luttes d’intérêts : des alliances
18Si l’idéal de société civile transnationale donne aux acteurs un sens et une représentation magnifiés de leurs pratiques, il n’explique en rien les modalités d’action des ONG au cours des négociations internationales. Est-il ce paravent qui dissimule les traits nationaux d’ONG fortement institutionnalisées mais qui représente un cadre fédérateur lors des luttes internationales ?
19Cet idéal d’action s’est manifesté lors des négociations de Carthagène (1999-2000). Robert Falkner (2002) montre que les ONG, dans un contexte de mobilisation anti-OGM, ont formé un réseau contre un adversaire commun, Monsanto. Ce réseau fonctionne dans un contexte particulier où les ONG produisent du lobbying dans leurs espaces nationaux, sensibilisent leur opinion publique et s’adressent essentiellement aux États. Loin de jouer la carte de la contestation, les ONG ont joué la carte étatique pour faire avancer les négociations internationales. Elles n’ont commencé leurs critiques de la diplomatie inter-étatique secrète qu’au moment où les portes se sont refermées devant elles, dans l’ultime phase des négociations. Selon Robert Falkner, la distinction entre ONG – groupes scientifiques (UICN), organisations levant des fonds (WWF, RSPB), organisations militantes (Greenpeace, FoE) – ne résiste pas à l’observation des pratiques. En revanche, ces ONG internationales partagent une commune capacité d’advocacy, mêlant capacité d’expertise médiatique et scientifique. Au nom de la société civile, elles peuvent aussi user du registre illégal de la désobéissance civile, comme dans le cas de la destruction de plants transgéniques.
20Derrière le terme paravent de « société civile transnationale », nous observons donc une mise en réseau d’acteurs qui, selon les enjeux, les intérêts à défendre et les agendas, savent recomposer leurs alliances. Lorsqu’il s’agit de gérer des politiques internationales d’environnement pour certaines, ou de produire des mobilisations médiatiques pour d’autres, elles retrouvent sans problème leur identité organisationnelle d’origine qui fait sens dans l’espace international. Cette identité semble de plus en plus perturbée par la nécessité, depuis la fin des années 1990, de se placer dans une mouvance de contestation privilégiant une autre mondialisation.
Les ONG face au défi de la contestation altermondialiste : réseaux savants et exportation de représentations du monde
21Depuis le Sommet de la Terre de Rio en 1992, la frontière entre ONG humanitaires et ONG d’environnement perdure, mais, au fur et à mesure des rencontres internationales, de curieux glissements s’opèrent : un intérêt originellement environnemental devient humanitaire ou encore, sous l’effet des programmes de promotion du développement durable, des requalifications se produisent, des nouvelles appellations apparaissent.
Les registres d’action des ONG d’environnement : inventivité transnationale et contraintes de l’institutionnalisation
22Certaines ONG comme Greenpeace participent autant aux forums de contestations qu’à des actions coup de poing (arrachage de mais transgéniques avec la Confédération paysanne en France, en solitaire en Grande-Bretagne). Elles suivent également un parcours très institutionnel en défendant leurs dossiers dans les arènes de négociations. Il faut rappeler que chaque organisation, loin de se contenter d’user d’un seul registre d’action, module son action selon la cible visée, l’effet attendu. Aussi, lorsqu’on analyse les registres d’action des ONG dans un contexte de mobilisation transnationale, une question surgit : sommes-nous en présence d’un répertoire1 conventionnel, ou non conventionnel avec recours à des formes illégales d’action ?
23En considérant la problématique des registres d’action sous un angle planétaire, ce genre de classement est malaisé. Une ONG locale peut avoir des pratiques d’action, des « rituels » d’interaction avec les institutions et peut se trouver bouleversée, contestée ou anéantie lorsque apparaît une ONG internationale ayant des ressources militantes d’expertise d’une autre envergure. De nombreuses études de cas montrent ainsi que l’arrivée des ONG du Nord oblige les ONG locales du Sud à réajuster leurs modes d’action (Chartier, à paraître). De plus, user d’un registre qui est conventionnel dans les pays du Nord, comme le recours au droit ou encore à une forme d’illégalité dramatisée, peut coûter cher dans un contexte non démocratique ou policier. Il importe donc de raisonner en tenant compte du contexte d’action et de réception de ces registres, et non pas en référence à un contexte européen. Les ONG, à la différence de certains mouvements transnationaux de types identitaire, politique ou religieux (Bennani-Chraïbi et Fillieule, 2003) qui se forment sur des identités de diasporas ou pré-existantes, ont eu la capacité, grâce à leurs bureaux essaimés sur la planète, d’importer des registres d’action, de former des relais militants et d’articuler localement des registres d’action reconnus peu ou prou comme légitimes à un niveau international. Elles ont fait preuve d’inventivité grâce à l’usage des médias et du registre des « droits ».
24Ces ONG mobilisent, en effet, des registres d’action qui les inscrivent dans l’héritage d’une pensée occidentale de protection des droits. Depuis la chute du mur de Berlin, les ONG se sont globalement ralliées aux droits de l’homme comme cadre de légitimation (Ollitrault, 1999). De sommets en sommets, la place des médias s’est imposée. Dans ce contexte, la mise en réseau des acteurs est facilitée par l’apparition de nouveaux médias, tel Internet, qui réduit les coûts de certains engagements et rapproche les territoires. Néanmoins, les ressources permettant la traduction des griefs en droits et la diffusion du discours par les médias se concentrent au Nord. Les ONG ont donc les registres prêts à l’emploi pour les mobilisations transnationales.
25Toutefois, concernant le rôle de contestation des ONG, Nadège Freour (2004) montre que Greenpeace soutient un certain nombre d’initiatives prises par des réseaux altermondialistes tout en gardant ses distances à l’égard des contestataires. C’est encore plus manifeste pour les ONG gestionnaires comme WWF, qui refusent tout investissement dans cette contestation internationale. Cela ne signifie en rien que certains de leurs membres ou que leurs communiqués de presse ne soient pas partie prenante des plates-formes altermondialistes. Il existe également une réserve à l’égard du rôle des ONG parmi les contestataires de la mondialisation. Par leur caractère gestionnaire, leurs politiques de recherche de fonds institutionnels, ne sont-elles pas des acteurs d’une gouvernance globale si contestée ? Les critiques s’expriment également ailleurs que dans les contre-sommets. Les ONG internationales produisent de nombreuses données, elles sont également soutenues par des institutions internationales onusiennes qui remettent en cause certains excès de la régulation économique libérale ou encore des options concernant le développement, telle l’Unesco. Comment appliquer des normes tout en connaissant les limites des actions de terrain : mise en place de programmes internationaux sur des zones à protéger très réduites, protection de populations et d’habitats rendue impossible par le contexte économique ambiant, contrebande, pillages, programmes abandonnés par manque de crédit. C’est la conscience de ces limites qui a sans doute conduit le WWF international à exposer lors du sommet de Johannesburg ses préoccupations sur le peu d’avancées obtenues sur les questions du commerce, de l’énergie, de l’eau potable, de la biodiversité, des déchets toxiques et des zones maritimes. Quel que soit le registre mobilisé, du ton policé du WWF à celui accusateur de Greenpeace, les ONG ont mis en lumière une partie des lacunes de ce sommet et en ont décrypté les enjeux ; les mouvements de contestation altermondialiste et les prises de position des ONG se rejoignant pour l’occasion.
26Malgré les apparences, cette contestation ne touche pas, ou peu, à la conception de la démocratie libérale. Les registres de contestation des ONG internationales sont déterminés par le partenariat dans lequel elles sont engagées. Leur financement dépend de leur crédibilité et de leur profil (neutralité, intérêt général, respect des principes démocratiques). Il serait donc autodestructeur pour elles de s’éloigner trop radicalement de ces registres d’action dominants auxquels elles adhèrent par conviction. Enfin, leur volonté de préserver les « biens publics mondiaux » (eau, biodiversité...), de créer des législations internationales atteste de cette foi dans un progrès qui passe par la reconnaissance des droits, fussent-ils des minorités. Des cultures militantes se rencontrent, parfois se confrontent : « Une autre ligne de fracture de la société civile mondiale est l’anglais. Les organisations qui ne maîtrisent pas cette langue ont, de fait, plus de mal que les autres à être visibles sur les questions internationales. Les difficultés se cumulant, il est particulièrement ardu, pour une organisation d’un pays du Sud non anglophone, d’obtenir voix au chapitre. » (Solagral, 2002). Cette forme de domination entre ONG peut conduire celles qui se sentent démunies en expertise ou en ressources d’action à rejoindre plus facilement une forme de critique altermondialiste et à utiliser des moyens officieux : divulgation d’informations ou de rapports de recherches confidentiels.
Les ONG, critiques savantes de la mondialisation : People and Plants, Les Amis de la Terre
27Les ONG qui investissent le champ de la biodiversité mobilisent à des degrés divers, mais de manière homogène, des ressources d’expertise qui peuvent être utilisées dans la construction des critiques altermondialistes. Le mouvement environnemental est connu pour développer des contre-analyses (Lascoumes, 1994 ; Ollitrault, 2001). Concernant la biodiversité, nous observons encore l’importance des réseaux savants qui préparent les textes et les normes internationales, qui réagissent à la méconnaissance de ces normes et savent les appliquer au niveau local, comme le montre l’exemple de People and Plants.
28Cette ONG est née, en 1992, d’une rencontre entre quelques chercheurs à l’occasion d’un colloque au Missouri2. Fruit d’un partenariat de ces militants issus de WWF, de l’Unesco et du Royal Botanic Gardens, Kew, l’ONG, de taille modeste, développe un registre d’action d’expertise rôdé par ces scientifiques intégrés dans les réseaux internationaux, ayant l’aptitude à travailler en groupes de recherches multiculturels. Ainsi, leur action consiste à publiciser leur science par la publication d’ouvrages (Ethnobotany, Plant invaders), qu’ils subventionnent pour en assurer la diffusion dans les universités des pays en voie de développement. Entre 1992 et 1996, quatre conférences internationales de formation ont été tenues, conférences qui permettent à ces chercheurs de susciter un sentiment d’injustice dans l’opinion, en manipulant une expertise intimement inséparable de leurs dispositions individuelles. Leurs outils scientifiques quantifient une spoliation, la perte d’une ressource naturelle. Lors de leur arrivée sur un terrain, leur mission consiste à délimiter des zones de déforestation, à risques, etc., à dénombrer les pertes ou à recenser leurs découvertes. Par exemple, le rapport de recherches menées au Dolpo évalue que « 407 espèces de plantes médicinales sont connues et utilisées à l’intérieur du parc (zone protégée). Dans la périphérie du parc, 85 plantes médicinales sont utilisées pour la santé par des chamans hindouistes. 24 espèces sont récoltées en très grande quantité pour le commerce. » (Aumeeruddy-Thomas, 2002). Ces taxonomies et ces zonages matérialisent des paysages à conserver. Afin de créer l’urgence, les ONG pratiquent leur lobbying (advocacy) par le biais de leurs rapports scientifiques qui comptabilisent les pertes, établissent des prospectives, en particulier au moment des conférences internationales (Anonyme, 2003). Ces actions sont facilitées par les réseaux de savants qu’abritent les ONG, comme Alan Hamilton, fondateur de People and Plants et chargé de la section « conservation des plantes » au WWF-UK.
29Ces militants-savants associent depuis les années 1990 la disparition de nombreuses espèces végétales, voire la mutation des sociétés locales, à la libéralisation des marchés internationaux, à la méconnaissance ou au total déni des règles internationales de protection de la biodiversité. Plusieurs facteurs expliquent le mécontentement qui règne dans les réseaux savants : la difficulté à obtenir les ratifications des États, l’attitude de firmes feignant d’adopter une éthique environnementale pour mieux exploiter des ressources, ou la montée d’une marchandisation du développement durable (Aubertin, 2002). Aussi, le lobbying et les textes proposés incluent-ils de plus en plus une dimension de protection contre une forme de surexploitation libérale et une protection des peuples autochtones. Alan Hamilton a été l’une des têtes pensantes de « The New Global Strategy for Plant Conservation » (19 avril 2002). Ce texte a été adopté par la 6e réunion de la Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique, à laquelle participaient la plupart des États, à l’exception des États-Unis.
30En visant directement l’OMC, l’ONG « Les Amis de la Terre International » n’hésite pas à donner sur son site des recommandations et à soutenir une contestation plus frontale : « Les membres de l’OMC devront veiller à ce que l’accord sur les droits de la propriété intellectuelle relatifs au commerce ainsi que d’autres accords ayant trait à la propriété intellectuelle et auxquels cet accord fait référence, en tant qu’éléments essentiels à son propre fonctionnement, a) ne barrent pas l’accès des personnes aux médicaments et aux semences, que ces médicaments ou semences soient l’objet de droits de propriété intellectuelle ou non ; b) n’amènent pas à la privatisation et à la confiscation ni de formes de vie, ni de connaissances traditionnelles et indigènes, ni de systèmes de connaissances et ne nuisent pas non plus à la biodiversité ; c) n’interfèrent pas avec le droit des gouvernements et des peuples de promouvoir et protéger des domaines d’intérêt public aussi essentiels que la santé, l’environnement et le développement, en réglementant et contrôlant dans quelle mesure les droits de la propriété intellectuelle sur certains produits ou inventions peuvent ou non être revendiqués par leurs propriétaires. ».
31Ainsi réapparaît ce positionnement acrobatique (insider/outsider) des ONG qui s’investissent dans le champ de la biodiversité, militent pour que cette thématique soit présente sur les agendas internationaux, tout en étant responsables de la mise en œuvre de politiques publiques internationales et environnementales. Victorieuses lorsqu’elles imposent certaines normes internationales sur les agendas internationaux, elles bataillent quand elles se rendent compte que ces normes ne sont pas appliquées sur leurs terrains respectifs, ou sont concurrencées par d’autres, notamment commerciales. Ces exemples montrent la capacité des ONG à diffuser des discours composés de représentations du monde mobilisant une rhétorique savante. Mais leur rôle consiste-t-il seulement à être des donneurs d’alerte alors que la biodiversité reste en danger ? Par leurs pratiques, les ONG inventent en réalité d’autres rôles, peu étudiés dans les analyses du système international.
Les rôles méconnus des ONG dans la critique de la mondialisation : socialisation, expertise et traduction des problèmes
32Pour les scientifiques-militants des ONG, il s’agit également de lutter pour faire reconnaître leur discipline, leurs pratiques ou leurs protocoles de recherche. Il n’est pas rare de rencontrer des scientifiques qui relient des disciplines souvent autonomisées comme l’ethno-botanique, qui introduisent des croisements d’approches ou développent des préoccupations éthiques dans leurs pratiques professionnelles. En conséquence, ces réseaux savants qui traversent les ONG brouillent d’autres cadrages simples comme celui de la seule culture militante. Et des concurrences savantes sur le thème de la biodiversité expliquent nombre de conflits entre bureaux d’une même ONG ou les luttes entre ONG. Ajoutons que nombre d’ONG accueillent ou soutiennent des recherches qui auraient peu d’opportunités d’obtenir des fonds, qu’ils soient privés ou étatiques. Les réponses aux appels d’offre de financement, tout comme les appels aux dons, sont nécessaires à la survie de l’organisation et de son personnel (du Sud en particulier). Entreprises scientifiques, les ONG entrent en concurrence avec des laboratoires lors des appels d’offre institutionnels, en particulier dans les pays du Sud. Elles peuvent jouer un rôle économique alternatif.
33Les ONG participent à une forme de mondialisation des intérêts, en l’occurrence environnementaux, mais sous un angle qui n’est pas celui des revendications altermondialistes qui attirent l’attention des médias (happenings, contre-sommets, actions symboliques). De manière originale dans un contexte d’articulation Nord/Sud, les ONG tiennent un rôle de socialisation des élites savantes du Sud en promouvant des programmes, en soutenant certaines recherches, en les intégrant dans leurs équipes. L’effet est double : à la fois une acculturation à certaines formes de représentations du monde et une canalisation de certaines revendications. Les contestations sont portées par une élite, souvent socialisée au multiculturalisme, qui navigue dans des réseaux de recherche transnationaux et met en œuvre des programmes où se mêlent objectifs scientifiques et de conservation. Cette socialisation renforce la conviction des acteurs dans leur discours d’expertise et les éloigne de revendications plus populaires, – même si elles peuvent ponctuellement se rejoindre comme lors de la manifestation des « paysans sans terre » à Johannesburg en 2002. Par leurs entrées dans certaines arènes internationales, les ONG, inféodées ou non aux bailleurs de fonds, sont toutes contraintes à un certain discours d’expert. Elles doivent traduire les revendications locales dans les catégories de la terminologie institutionnelle : peuples autochtones, genre, protection des droits. Même les plus contestataires adoptent la rhétorique libérale des droits, et ordonnent la réalité en diffusant des identités construites dans des institutions internationales.
34Ces ONG internationales influent sur une forme de mondialisation en jouant un triple rôle : en socialisant une élite qui articule des intérêts Nord/Sud ; en remplissant une mission d’expertise qui soutient des programmes mondiaux d’environnement et diffuse des normes, et en traduisant des problèmes environnementaux en un langage scientifico-militant (diagnostic de la réalité, construction de problématiques) qui les légitime autant à l’égard des institutions que de certains réseaux de protestation.
35Ces derniers éléments montrent, encore une fois, combien les ONG jouent des rôles variés. Ajoutons la diversité de leurs formes : ONG membres des délégations étatiques lors de négociations internationales, ONG contestataires dans des contre-forums, ONG locales « vivotant » grâce à quelques membres bénévoles, ONG tentaculaires disposant de bureaux disséminés sur l’ensemble de la planète avec une gestion entrepreneuriale, ONG d’environnement, de développement ou de défense des droits humains. Cette liste non exhaustive, nous l’avons dressée en observant ces figures d’ONG dans le champ de la biodiversité. À défaut de nous faire avancer dans la connaissance du monde des ONG, elle confirme ce qui est aujourd’hui un lieu commun : le terme ONG recouvre une/des réalités difficiles à cerner. Cela implique d’adopter un point de vue qui refuse les a priori méthodologiques et qui demande d’inventer des protocoles d’enquêtes empiriques. Il faut remettre les acteurs, leurs représentations du monde et leurs luttes d’intérêts, au centre de nos préoccupations, en évitant de poser les ONG en objet monolithique et figé.
Pour comprendre les ONG définitions impossibles et méthode d’analyse
36En s’attachant à l’espace politique occupé par les ONG environnementales, la partie qui précède s’est gardée de proposer une définition normative des ONG. Cela est dû au fait que la plupart des tentatives de définition se sont révélées stériles, en particulier parce qu’aucun critère ne permet d’embrasser la diversité qui règne sous cette appellation.
Une définition universelle introuvable
37Le terme ONG est apparu officiellement en 1945, dans l’article 71 de la série de dispositions de la Charte des Nations unies consacrées au Conseil économique et social (Ecosoc). À l’époque, aucune définition précise n’était donnée pour définir ces organisations. En remontant au texte originel, la juriste Dorothée Meyer (2004) a en effet démontré que ces organisations ont eu, dès le début, une identité complexe où se mêlaient la représentation d’intérêts professionnels (syndicats, lobbies économiques) et la représentation qualifiée d’intérêt général (associations caritatives). Finalement, on savait à l’époque qu’elles ne relevaient ni de la sphère publique, ni du monde marchand. Depuis, de nombreuses tentatives ont vu le jour pour circonscrire ces acteurs selon des critères plus positifs, sans que cela apporte une idée beaucoup plus claire. La comparaison de plusieurs définitions montre en effet qu’il existe de nombreux désaccords du fait que les critères constitutifs de ces définitions se révèlent tous plus ou moins défaillants (Chartier, 2002). C’est du moins ce que montre l’analyse des cinq critères les plus récurrents lorsqu’il s’agit de définir les ONG : la notion de privé, d’indépendance à l’égard des sphères marchandes ou publiques, de non-lucrativité, d’officialité et de bénévolat.
Le bénévolat au temps de la professionnalisation
38La notion de bénévolat est tout à fait obsolète au regard des dynamiques de professionnalisation qui ont affecté le monde des ONG. Nous avons montré que la dynamique de professionnalisation a été liée à la nécessité d’obtenir des fonds d’organismes publics ainsi qu’à la concurrence existant entre ONG. Certaines organisations, devenues partenaires ou prestataires de services des gouvernements, ont dû professionnaliser leur secteur juridique tout en élevant leur niveau de contre-expertise et de prestation, le tout afin de se conformer aux critères et aux procédures gouvernementales. D’autres, plus indépendantes vis-à-vis de la sphère publique ou marchande, ont suivi le même chemin en professionnalisant leur service de communication et celui de la recherche de fonds, afin de s’assurer une présence médiatique essentielle pour l’obtention de dons privés. Tous ces services sont désormais comparables à ceux rencontrés dans les organisations du secteur marchand, les employés de Greenpeace ou du WWF ayant les mêmes profils que ceux rencontrés dans des multinationales du secteur privé (Chartier, 2002). Remarquons aussi que ces organisations occupent une part non négligeable du marché de l’emploi (Anheier, 2004). Il n’est donc plus rare de voir des individus effectuer toute leur carrière professionnelle au sein de ces organisations. La nécessité de se professionnaliser afin de gagner en crédibilité et en pouvoir d’intervention accentue la nature obsolète de cette référence au bénévolat.
L’officialité contre le local et l’informel
39La notion d’officialité a été définie par Salamon et Anheier (1992) par des critères attestant d’une bonne structuration des réunions et des lois internes à l’ONG, par la régularité d’adhésion des membres, ainsi que par une reconnaissance officielle de l’organisation par les instances publiques. Trop imprécis pour bien délimiter la notion, ces différents critères sont trop excluants. Ainsi, les manques constatés des critères de permanence et de visibilité ne sont pas nécessairement pertinents. Une organisation peut en effet changer régulièrement de membres tout en continuant d’exister comme ONG et tout en gardant les mêmes objectifs et la même efficacité dans l’action. Pareillement, beaucoup d’organisations disparaissent parfois du débat public pendant quelque temps afin de se restructurer ou de réorienter leur démarche. Cela ne signifie en rien qu’elles ne sont plus formelles et fonctionnelles. La reconnaissance officielle de l’organisation par les instances publiques est aussi un point questionnable. Il existe pourtant dans certaines régions du monde des secteurs associatifs informels ayant une fonction tout aussi importante que les organisations officielles : « Ces organisations “informelles” connaissent un véritable essor et jouent un rôle déterminant dans l’invention des formes démocratiques. À travers elles s’est opéré un renouvellement important des rapports des États avec leurs sociétés civiles » (Doucin, 2000). Ces dernières concernent souvent les organisations de base constituées à l’échelle de la communauté.
40Les ONG sud-africaines ont ainsi été un instrument essentiel de la régulation de la vie sociale pendant les années d’apartheid. Elles ont permis « aux communautés locales de s’organiser en marge et contre les structures officielles d’un régime honni [...]. C’est ainsi que les habitants des “townships” dans lesquels le régime cantonnait la population noire se sont organisés, le plus souvent de manière informelle, pour gérer les affaires communautaires. ». Il en va de même pour des communautés amazoniennes qui s’organisent parfois de manière informelle, souvent sous l’égide d’un prêtre issu du mouvement de la théologie de la libération, et qui se retrouvent à l’initiative de mouvements de défense de leur environnement naturel (Castellanet et al., 2003).
Les notions de privé et d’indépendance mises à l’épreuve de la sphère publique
41Les réserves que l’on peut émettre au sujet des critères de privé et d’indépendance sont importantes. Ces notions réfèrent aux liens existant entre les gouvernements et les ONG ainsi qu’à la séparation institutionnelle entre les deux acteurs. Certains chercheurs insistent sur le fait que les ONG doivent être fondamentalement privées dans leur structure de base (ce qui n’exclut pas des participations financières ou humaines de la part des gouvernements). Il semble pourtant que la division entre organisations publiques et organisations privées soit de plus en plus confuse : « Impressionnés par la capacité des ONG à solliciter des fonds internationaux et des supports techniques, beaucoup de gouvernements ont créé des organisations affiliées à divers ministères » (Marie D. Price, 1999). Ces organisations, dénommées Gongo (Governmental Oriented Non Governmental Organisations), sont en particulier constituées pour capter la vague de fonds à destination du secteur non lucratif des pays du Sud ou pour défendre les intérêts particuliers de ces derniers. Elles ne rentrent donc pas dans le cadre des critères précités alors qu’elles remplissent des fonctions similaires à des ONG financièrement indépendantes. Les critères examinés excluent aussi deux autres types d’organisations considérées comme des ONG par Léon Gordenker et Thomas G. Weiss (1995), les Quango (Quasi Non Governmental Organisation) et les Dongo (Donor Non Governmental Organisation). Les premières, situées dans les pays du Nord, reçoivent la plus grande partie de leurs fonds d’organisations publiques. Beaucoup d’organisations situées aux USA, au Canada ainsi que le Comité international de la Croix-Rouge sont dans ce cas de figure. Lorsque des donneurs publics ou privés ne sont plus intéressés par une collaboration avec les ONG, ils trouvent les moyens de créer leur propre organisation comme récepteur de leurs fonds, un peu sur le modèle des Gongo. Léon Gordenker et Thomas G. Weiss signalent ainsi que des gouvernements et que les Nations unies disposent de leurs propres ONG pour mener à bien leurs objectifs et des actions particulières. L’ONU a ainsi créé « des ONG locales qui ont contribué à mobiliser les populations pour des élections cambodgiennes et pour déminer en Afghanistan » (Ibid. : 361). Ces trois types d’organisations remettent donc en cause les critères de privé et d’autonomie, mais leurs statuts et leurs actions laissent penser qu’elles peuvent être intégrées dans le monde des ONG.
ONG à but lucratif ?
42La notion de « lucrativité » est aussi abusivement restrictive. Des organisations telles que les coopératives ne sont pas prises en compte car elles génèrent et distribuent des profits qui peuvent revenir aux adhérents ou aux dirigeants. Pourtant, ces organisations sont parfois assujetties « aux lois sur les associations et aux règlements des ministères concernés par le domaine d’action » comme c’est le cas en Guinée équatoriale (Doucin, 2000 : 261). Quels que soient les cadres législatifs nationaux, elles sont souvent des supports de la vie associative et il est erroné de ne pas les comptabiliser. Ce critère exclut aussi des groupes d’intérêts privés comme des organisations sectorielles représentantes d’entreprises privées telles que l’Association internationale du zinc ou l’Association européenne des fabricants d’engrais, deux organisations considérées comme ONG environnementales internationales par l’Union des associations internationales (UAI, 1999). Ces organisations n’existent que pour faire la promotion de secteurs industriels particuliers. Elles pourraient parfois être qualifiées plus judicieusement de lobby au « sens américain d’entreprise commerciale enregistrée de représentation d’intérêts et de répertoire particulier de courtage » (Offerle, 1998).
43En dépit des tentatives existantes, on s’aperçoit qu’aucun de ces critères n’est satisfaisant pour arrêter une définition à valeur universelle. De toutes les façons, en partant uniquement d’une définition générique des ONG, l’analyse reste stérile et nous nous trouvons devant des catégories figées, alors que la réalité étudiée se transforme au rythme des mutations de tailles et d’échelles, des techniques, des mentalités, des systèmes sociaux, etc. Pour construire les bases d’une pensée théorique, il est donc nécessaire de situer la notion d’ONG dans une perspective dynamique et dialectique. Pour cela, nous proposons un modèle analytique permettant d’éviter l’enfermement de toute approche normative. Ce modèle à valeur heuristique permet de considérer et de confronter des réalités diachroniques, spatiales, culturelles, sociales, économiques, politiques, structurelles et fonctionnelles propres à chaque organisation. La confrontation de plusieurs résultats d’analyse aidera ensuite à identifier des récurrences ou des différences. Elle permettra aussi d’adopter une approche pluridisciplinaire.
Éléments de structuration pour analyser les ONG
44L’échelle d’intervention de l’ONG est le premier élément à prendre en compte. On analysera ensuite le contexte historique de création de ces organisations, leur taille, leurs champs et modes d’action originels et contemporains, leur fonctionnement interne, leur nature juridique ainsi que leurs sources de financement.
Le premier acte d’une recherche transdisciplinaire : la prise en compte des échelles et des métriques
45Les difficultés rencontrées pour comprendre les ONG tiennent pour beaucoup à l’impossibilité de construire un langage commun sur un objet profondément pluridisciplinaire. Cela est dû, pour l’essentiel, à l’oubli de la question de l’échelle. Que l’on s’intéresse aux définitions ou aux rôles de ces organisations, on se trouvera toujours face à une échelle d’investigation particulière en fonction d’une discipline d’origine. On sait par exemple que la recherche sur le domaine non gouvernemental à projection internationale est demeurée, jusqu’à la fin des années 1990, l’apanage quasi exclusif des juristes et des chercheurs en relations internationales (Ryfman, 2004). Inversement, et dans le même temps, les anthropologues, les sociologues et des géographes ont plutôt observé l’action de ces organisations à l’échelle nationale ou locale (Thomas et al., 2001 ; Fisher, 1997). En conséquence, les perceptions du rôle de ces ONG ont été différentes, l’interprétation de l’impact des ONG dans les politiques de développement durable en étant une excellente illustration.
46À l’échelle internationale, les chercheurs étudient l’action des ONG auprès des agences internationales et des États. L’interprétation dominante en fait la nouvelle panacée censée résoudre les problèmes de développement durable (Edwards et Hulme, 1996). Elles sont en effet présentées comme des acteurs progressistes, essentiels à l’avancée de la démocratie et à l’extension d’une pensée plus libérale. Elles sont en fait perçues comme une nouvelle solution technique aux problèmes de développement durable, l’État étant vu comme un inhibiteur (Fisher, 1997). D’autres, plus critiques vis-à-vis des politiques de développement durable, les voient tout de même comme des organisations capables de transformer l’État et la société, en particulier grâce à leur faculté à produire des discours alternatifs à ceux des agences de développement ou d’environnement (Wapner, 1996 ; Princen et Finger, 1994). Inversement, certains auteurs, qui partent d’une analyse factuelle des actions locales, donnent souvent une tout autre interprétation de l’impact des ONG sur les politiques de développement durable. On rencontre beaucoup d’analyses présentant ces mêmes ONG comme des organisations politiquement non légitimes et contre-productives, les plus radicaux les décrivant comme les fourriers d’un capitalisme ultralibéral et mondialisé (Hours, 1998).
47Si l’on met de côté les différentes conceptions du développement invoquées par les auteurs, les raisons qui induisent ces divergences tiennent à l’entrée scalaire adoptée initialement. Il existe en effet une grande différence entre les ONG étudiées, une ONG brésilienne locale n’ayant pas grand-chose à voir avec Greenpeace ou Conservation International. Les problèmes d’échelle sont devenus problématiques lorsque des échanges sont apparus sur des organisations agissant du local au global. Il est bien entendu qu’un chercheur qui analyse le rôle du WWF auprès des instances internationales n’arrivera pas nécessairement aux mêmes conclusions qu’un anthropologue observant des actions de terrain de cette même ONG (Chartier, 2002). Certains auteurs ont bien tenté de mener des recherches avec des visions multiscalaires, mais leur discipline de formation a souvent fait qu’une échelle d’appréhension dominait sur les autres. C’est le cas des travaux de Paul Wapner (1996), qui a tiré des conclusions sur l’action locale des ONG en analysant leur impact auprès des agences internationales, tout en ne confrontant jamais les discours aux pratiques locales. Inversement, certains auteurs, focalisés sur les dissensions existantes entre discours et pratiques locales, perdent parfois de vue l’impact de ces organisations à d’autres échelles, leur légitimité ne tenant pas au regard de leurs actions de terrain (Kuper, 2003). Ils peuvent ainsi oublier une dimension importante de l’impact de ces ONG qui inscrivent des questions essentielles sur les agendas des organisations internationales.
48L’échelle doit donc être considérée, si possible, dans une perspective diachronique. En effet, une ONG débutant à une échelle locale pourra parfaitement intervenir ultérieurement à une échelle continentale ou mondiale en fonction de contextes politiques, structurels, fonctionnels différents. Cette évolution des positionnements scalaires est un élément essentiel à la compréhension du rôle des ONG et de l’évolution de leurs positionnements dans la société civile. Il faut particulièrement distinguer l’échelle des implantations institutionnelles (qui s’inscrit, dans la plupart des cas, dans des contextes nationaux) de celle des lieux d’action (locale, nationale, continentale, mondiale, etc.). Une organisation pourra en effet disposer d’un seul bureau dans un pays donné tout en conduisant des actions dans plusieurs pays. Elle sera donc institutionnellement nationale et « pratiquement » plurinationale, transnationale ou supranationale, ce qui a bien entendu des implications importantes sur la nature et l’origine des discours portés par cette organisation. La délimitation de ces échelles dépend aussi des métriques qui les relient.
49La métrique est une donnée centrale et transversale. Elle définit des façons de mesurer la distance au sein d’un espace donné. En ce sens, elle ne s’applique pas uniquement à des distances géométriques, mais concerne aussi une multitude de mesures de la proximité ou de l’éloignement. Parmi ces métriques, on peut opérer une distinction, selon que la métrique concerne un espace continu, métrique topographique, ou un espace discontinu, métrique topologique (Lévy, 1994). Grâce à ces éléments, on peut ainsi mesurer la capacité d’une organisation à intervenir à distance, que cela soit en termes euclidiens, mais aussi en termes de coût et de temps ainsi qu’en terme informationnel. L’espace politique occupé par une organisation dépend en définitive de sa capacité à maîtriser et articuler ces différentes métriques. Greenpeace en offre un bon exemple. L’organisation est en effet capable d’influer sur les décisions prises par les instances internationales, les gouvernements, ou de dénoncer sur le terrain des pratiques environnementales critiquables sans être limitée par des contingences spatiales ou temporelles. Grâce à sa grande maîtrise des outils de communication contemporains, grâce aux importants moyens de transport dont elle dispose, grâce à la cohésion du groupe et à l’internationalisation de ses activités3, l’organisation peut agir simultanément, à tout moment et n’importe où sur la terre (Chartier, 2002). En ce sens, elle maîtrise et articule les différentes métriques. L’appréhension de ces échelles et de ces métriques, selon les modalités exposées, permet de percevoir la nature des imbrications, le degré d’insertion, le pouvoir politique et le rôle de l’ONG à l’égard des acteurs des sphères publiques et marchandes.
Lieu et contexte historique de création
50Le lieu de création de l’ONG est une donnée importante et pertinente en fonction de critères nationaux politiques et économiques. Elle établit une séparation entre les pays développés, les pays en développement et les pays en transition, ainsi qu’entre les différentes natures de régimes politiques. On distingue ainsi les régimes démocratiques, autoritaires, dits socialistes, auxquels on rajoute les ex-régimes socialistes et les ex-régimes autoritaires qui ont souvent évolué vers la démocratie, mais avec des contextes politiques différents des régimes démocratiques historiques. Ces différents lieux de création ont en effet une influence sur l’ouverture ou la fermeture de l’espace public qui contraint l’action des ONG, le choix de leurs champs d’action ou leur latitude à défendre tel ou tel intérêt. Cela influe bien entendu sur la compréhension des discours et des actions de ces organisations, une ONG informelle, créée et soutenue par des fonds internationaux en Afrique du Sud pendant l’apartheid n’ayant pas les mêmes rapport à l’État qu’une ONG comme FoE créée en Amérique du Nord à l’aube des années 1970.
51Le contexte historique de création situe l’ONG en s’attachant davantage aux dynamiques politiques, économiques, culturelles et sociales à l’œuvre à l’échelle mondiale. Il est entendu qu’une ONG née pendant les Trente Glorieuses ne met pas en avant les mêmes problématiques qu’une organisation créée à la suite du premier choc pétrolier de 1974. Cette historicisation permet aussi de situer l’ONG par rapport à l’émergence de phénomènes conditionnés par des processus transnationaux (perte en partie de souveraineté de l’État-nation, fin de la guerre froide, mondialisation, etc.). Dalton Russell (1994) a en effet très bien montré que ces différents moments ont donné lieu à différentes vagues environnementales. Des ONG conservationnistes comme le WWF ou l’UICN font ainsi partie d’une première vague environnementale, caractérisée par l’acceptation de l’ordre socio-politique dominant et poursuivant des objectifs consensuels qui entrent dans le cadre de la structure économique dominante. Des ONG comme Greenpeace ou FoE sont en revanche issues d’une deuxième vague de mobilisation environnementale, où il s’agissait de dénoncer l’accumulation des richesses et la croissance économique incontrôlée, tout en prônant un changement dans les relations sociales et politiques, condition préalable à la résolution des problèmes environnementaux.
Fonctionnements internes, taille et nature juridique
52Le fonctionnement interne de l’ONG est essentiel à la compréhension de la capacité de l’organisation à agir en fonction de différentes échelles et selon plusieurs « pas de temps » : élection ou non des dirigeants, centralisation des lieux de décision, indépendance des bureaux nationaux par rapport au siège international, etc. Ce fonctionnement doit être analysé de façon diachronique, car chaque moment de vie de l’organisation peut correspondre à une conception particulière du fonctionnement interne, et de façon synchronique, pour comprendre les tensions entre groupes locaux ou entre bureaux.
53Le statut juridique apporte beaucoup d’informations sur la nature de l’ONG étudiée. Au-delà des différences nationales, nous avons retenu trois grands ensembles de statuts juridiques : le statut d’association loi 1901, le statut de fondation et le statut juridique informel, sans statut juridique défini. De ce statut dépendent le type d’actions entreprises, les modes de prise de décision, la nature des emplois, la transparence des comptes, les relations avec la sphère publique.
54La taille de l’ONG doit enfin être étudiée, tant il en existe une grande variabilité. Certaines ONG « de consultance » seront constituées par deux personnes alors que d’autres comme Greenpeace disposeront de millions de sympathisants et d’un budget de plusieurs centaines de millions d’euros. La prise en compte de ces différences est essentielle pour comprendre l’influence et le degré de légitimité que peuvent avoir ces organisations, mais également la prévalence de certains registres d’action médiatiques pour susciter des dons.
Champs et répertoires d’action originels et contemporains
55La connaissance du champ d’action originel d’une ONG donne de nombreuses informations pour comprendre ses choix stratégiques ultérieurs. Ainsi, une ONG qui s’est opposée à l’hégémonie d’un État-nation aura plutôt tendance à aborder d’autres thèmes de campagne sans rapports avec les gouvernements, alors que des coopérations importantes entre ces deux acteurs pourraient être nécessaires. C’est le cas de Greenpeace, qui s’est créée en s’opposant aux essais nucléaires français et américains ainsi qu’aux industries de pêche à la baleine. Ces affrontements initiaux ont conduit l’ONG à adopter une stratégie de non-collaboration directe avec les gouvernements et les multinationales, stratégie globalement toujours en vigueur (Chartier, 2002). L’état d’esprit de départ peut donc perdurer quelques décennies plus tard, quelle que soit l’importance des évolutions structurelles et fonctionnelles. Les champs d’action contemporains permettent de mesurer la dynamique, la nature des actions et les discours, au regard du champ d’action originel.
56Il n’est pas rare de constater que chaque ONG puise dans une forme de répertoire plutôt que dans d’autres, selon les contextes historiques et leur posture. Il est possible de distinguer six registres d’action dominants qui peuvent être menés de manière autonome ou de concert selon l’effet voulu et la cible visée : l’action militante de terrain, l’action « coup de poing », le lobbying, direct ou indirect, l’expertise, l’action judiciaire et enfin l’information (Dziedzicki et al., 1995).
57L’action militante de terrain se traduit par des actions concrètes effectuées par des bénévoles ou des salariés. La recherche de résultats concrets ou la sensibilisation du public motivent cette orientation rarement événementielle car articulée autour d’échéanciers annuels ou pluriannuels (Journée de la Terre, meeting de défense de tel ou tel site, etc.). L’action coup de poing, typique des actions médiatiques menées par Greenpeace, a pour but d’éveiller l’attention du public sur un sujet particulier, de telle sorte que la pression de l’opinion publique influence les décideurs (s’enchaîner devant une centrale nucléaire, arracher des plants de maïs OGM, etc.). Concernant le lobbying direct et indirect, il s’agit d’intervenir directement auprès des décideurs et des acteurs de la sphère marchande mais surtout publique. Le lobbying direct est caractérisé par la tentative d’influencer les décideurs ou les élus politiques par des courriers de contestation, des rapports d’expertise, des projets de lois destinés directement aux intéressés. Le lobbying indirect est réalisé plus spécifiquement par les membres de l’ONG qui sont invités à intervenir grâce à des bulletins-réponses préparés par l’organisation et envoyés aux décideurs, avec la consigne d’appeler le même jour la ligne directe d’un haut responsable politique, etc. L’expertise ou l’étude sont d’une autre nature. L’ONG espère avoir un impact dans les processus de décision en apportant son savoir et des arguments liés au champ d’action investi. Cette assistance est souvent adressée aux acteurs institutionnels. L’ONG est sollicitée pour apporter son expertise et sa capacité de formation aux gouvernements, entreprises, riverains de zones à conflits, associations locales, etc. L’action judiciaire est un registre d’action relativement nouveau et de plus en plus utilisé. Les ONG mènent des actions de protestation en recourant à la justice, lorsque les lois le permettent. Les cibles privilégiées de ce type d’action sont des acteurs de la sphère marchande et publique qui ne respectent pas les lois. On s’attachera par exemple à dénoncer les infractions d’une industrie en matière environnementale ou l’irrespect par un gouvernement de cadres juridiques supranationaux. Enfin, le répertoire médiatique est composé de ses propres formes d’action ou encore vise à construire ses propres moyens de communication. Il recouvre les moyens d’information tels que la presse (bulletins d’adhérents, presse spécialisée, quotidiens, etc.), la radio, la télévision, Internet, etc. (Ollitrault, 1999). L’information conditionne les autres registres d’action. Le répertoire médiatique comporte souvent deux sous-registres : l’information et la mobilisation, registres qui peuvent, selon le type d’action, être étroitement liés ou autonomisés.
Sources de financement
58La connaissance des sources de financement est le dernier élément déterminant pour analyser les ONG. Cela permet en effet de percevoir les liens existant entre l’ONG et les divers bailleurs de fonds qui peuvent être des donateurs particuliers ou issus d’organisations de la sphère marchande ou publique. Les sources sont séparées en cinq catégories : les fonds publics en provenance des gouvernements ou des instances internationales, les fonds du secteur privé en provenance d’entreprises, les legs de particuliers, les fonds en provenance de fondations privées, les revenus financiers liés à des placements d’argent de l’ONG et les revenus tirés de la vente de produits dérivés ou de consommation courante à la marque de l’organisation.
59La connaissance de ces sources de financement aide à interpréter les choix stratégiques des ONG concernant la nature de leurs modes et champs d’action. En effet, comment une ONG financée à 90 % par un gouvernement pourrait-elle le critiquer de la même façon qu’une organisation dont les financements proviennent exclusivement de dons individuels ? Dans un même ordre d’idées, une organisation financée par des entreprises développe rarement une critique des dynamiques économiques contemporaines. Ces renseignements permettent donc de saisir le degré d’autonomie d’une ONG à l’égard des gouvernements ou des acteurs de la sphère marchande. Ils sont surtout primordiaux pour analyser les limites de l’espace politique occupé par ces organisations.
Conclusion
60Face à ces objets aux contours flous que sont les ONG, nous avons construit des outils d’analyse pour comprendre leurs rôles, leurs modes d’action et l’espace politique qu’elles occupent. Ces outils, synthétisés en une série de critères dans l’encadré 3, visent à faciliter les recherches pluridisciplinaires. Ils visent aussi à questionner « l’objet ONG » afin de mieux identifier quels sont les dynamiques et enjeux politiques, économiques et écologiques mobilisés par et à travers la référence aux ONG.
61Les ONG d’environnement présentent au moins une particularité par rapport aux ONG d’autres secteurs : leur capacité d’expertise savante provenant directement ou indirectement des laboratoires scientifiques, réseaux transnationaux originels. En effet, la biodiversité n’a pu devenir une cause soutenue par les ONG, puis gérée et défendue par ces dernières, que parce qu’elle a été pensée comme conception scientifique de la Nature. Ces ONG, tout en ayant subi les transformations du système international, ont aussi dû se positionner, davantage que leurs consœurs de l’humanitaire ou des droits de l’homme, sur le terrain économique. La brevetabilité du vivant, les répercussions des décisions de l’OMC, l’arrivée d’entreprises pouvant les concurrencer sur les questions « vertes » les ont en effet souvent conduites à adopter des partenariats avec le secteur privé.
62Nées dans les pays anglo-saxons, les ONG internationales de défense de l’environnement ont été pionnières sur le terrain médiatique et sur les actions visant les opinions publiques internationales. La célèbre méthode Greenpeace a fait école et inspiré nombre de campagnes médiatiques des ONG au-delà du secteur environnemental (dramaturgie mettant en scène la lutte des petits contre les puissants). Signalons aussi que leur volonté d’indépendance financière requiert des modalités d’action proches des entreprises.
Encadré 3.
Structure d’analyse des ONG
Critères transversaux
Échelle et métriques d’implantation et d’intervention
Critères constitutifs
Contexte historique et lieu de création
(Régime démocratique, régime politique autoritaire, ex-régime socialiste, pays développé, NPI, pays en développement, etc.)
Champs d’action originels et contemporains
Répertoires d’action originels et contemporains
(Action coup de poing, action militante de terrain, lobbying direct et indirect, expertise/étude/conseil, action judiciaire, information/communication, etc.)
Nature juridique
(type association loi 1901, type fondation, type informel, etc.)
Taille
Fonctionnement interne
(Centralisé, décentralisé, juxtaposition d’entités nationales, etc.)
Sources de financement
(Particuliers, gouvernements, organisations internationales, secteur privé, legs, trusts et fondations, revenus financiers, entrepreneurs économiques, etc.)
63Grâce à l’étude des ONG internationales et à partir des critères constitutifs et transversaux mis à jour, il est possible de proposer quelques signes de l’émergence de nouvelles identités politiques et de nouveaux modes de représentation des territoires. Avec la thématique de la biodiversité, les ONG internationales semblent avoir mobilisé des acteurs qui fonctionnent en réseaux et irradient sur la planète des diagnostics sur la réalité du monde, qui prescrivent des solutions et peuvent diffuser, au-delà du champ scientifique et du secteur de l’environnement, des mises en garde ou des alertes. Ces ONG offrent des identités aux acteurs locaux, qualifiés de « peuples autochtones », qui peuvent jouer avec cette identité imposée et réclamer des droits au nom de cette identité reconnue dans les textes internationaux. Par le biais des textes de défense de la biodiversité, ces ONG ont accordé une existence juridique, sinon politique, à des populations qui se trouvent qualifiées et détentrices de droits qu’il s’agit de faire appliquer dans des contextes de rivalités d’intérêts. À la fin du xxe siècle, les ONG d’environnement ont donc moins contribué à transformer les rapports de domination Nord/Sud qu’à engendrer des cadres de représentation de la réalité qui peuvent finalement devenir des cadres de contestation dont peuvent s’emparer des « peuples autochtones » ou des populations « locales ».
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Nous utilisons le concept de répertoire imaginé par Charles Tilly. Un répertoire d’action, tout comme un répertoire musical, serait utilisé par un acteur dans le cadre de ses actions collectives. Il serait déterminé par sa stratégie, son identité et les contraintes de contexte et l’acteur choisirait le répertoire le plus adapté en considérant ces trois dimensions (identitaire, stratégique, environnementale).
2 Malcolm Hadley, division des sciences écologiques, Unesco, écologue et éditeur scientifique ; Alan Hamilton, International Plant conservation Officer, WWF International, botaniste ; Ghillean T. Prance, directeur général du Royal Botanic Gardens, Kew, taxonomiste, ethnobotaniste ; Gary Martin, ethnobotaniste ayant ouvert le premier bureau WWF à Oaxaca, et Tony Cunningham, ethnobotaniste et conseiller du WWF.
3 Avec un budget de près de 160 millions d’euros, Greenpeace disposait en 2002 de 38 bureaux nationaux ou régionaux, ce qui revenait à une présence dans 41 pays et tous les continents, à l’exception de l’Afrique (Greenpeace, 2002).
Auteurs
Denis Chartier, géographe
Université d'Orléans
Sylvie Ollitrault, politiste
CNRS, CERAPS-Lille 2
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